You are on page 1of 73

L2

La nouvelle gouvernance financière publique

Bibliographie

M. Bouvier, M.C. Esclassan, J.P Lassale ; Manuel de finances publiques ; LGDJ ;


9ème édition ; 2008.
M. Bouvier ; Les finances publiques ; LGDJ ; 13ème édition ; 2008.
M. Bouvier ; Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l’impôt ; LGDJ ;
9ème édition ; 2008.

Les politiques se sont intéressés plus fortement aux finances publiques, ce qui
explique que l’on parle de « gouvernance financière publique ».
Il s'agit de l’étude des finances de l’Etat dont nous sommes les financiers à
travers nos impôts et diverses taxes. Le système qui est le notre depuis la crise
des années 1970 (chômage, moins d’argent, moins d’impôts, moins d’achats,
etc.) a entrainé une hausse des dépenses publiques, qui ont augmenté tandis
que les recettes décroissaient. Recettes et dépenses se sont croisées (effet de
ciseau), et un déficit important a pu dès lors se développer. La solution a semblé
être l’emprunt, qui lui aussi a augmenté de façon exponentielle. Ainsi, la dette
publique de la France est aujourd’hui évaluée à hauteur de 1.200.000.000 euros,
tandis que le PIB de la France est de seulement 1.900.000.000 euros.

Introduction

Le terme de finances publiques désigne les finances de l’Etat, les finances des
collectivités locales (communes, départements, régions, etc.), ainsi que les
finances des organismes de sécurité sociale.
E.G : Lorsque l’on parle de dette publique, on ne parle pas seulement de la dette
de l’Etat. La dette publique est la dette cumulée de l’Etat, des collectivités
locales et des organismes de sécurité sociale (plus de 1.200.000.000 d’euros
donc).

Les finances publiques sont également les recettes et les dépenses de ces trois
groupements. On peut aussi employer le vocable de « denier public ».
Les recettes publiques sont essentiellement les prélèvements obligatoires
(impôts : T.V.A ; cotisations sociales – prélèvements effectués sur les salaires
pour le compte des organismes de sécurité sociale).

L’utilisation de l’argent public est représentée par ce que l’on appelle les
dépenses publiques. Il s'agit par exemple des dépenses de l’Etat (universités,
etc.), des collectivités locales (financement d’une piscine municipale, etc.), et les
dépenses des organismes de sécurité sociale (remboursements des médicaments
prescrits par le médecin, etc.).

Les finances publiques sont des finances à part, c’est pourquoi elles nécessitent
un contrôle important afin de veiller à leur bonne utilisation. L’argent public ne

1
L2

doit pas être gaspillé, il convient aussi d’éviter les malversations. Il existe pour
cela d’une part des administrations, mais également des juridictions chargées de
contrôler la régularité des opérations effectuées par le secteur public.
E.G. : L’Inspection générale des finances, la Cour des comptes, etc.

La décision politique appartient aux représentants des citoyens. Le budget de


l’Etat doit ainsi être adopté par le Parlement ; de même, le budget d’une
collectivité territoriale doit être adopté par le conseil de cette communauté
(conseil général pour le département, etc.)

La réforme des finances publiques s’est amorcée depuis la seconde moitié des
années 1970. Elle a été déclenchée par la crise économique qui a provoquée
une crise des finances publiques. Les dépenses publiques ont augmenté mais les
recettes publiques n’ont pas suivi le mouvement. C’est un phénomène
international. La réforme des finances publiques a commencé par les pays
développés, elle se poursuit aujourd’hui du côté des pays en développement ou
émergents.
Cette réforme consiste essentiellement à adapter les méthodes de gestion
utilisées par les entreprises privées à la gestion du secteur public.
Notons tout de même que cette réforme est mondiale, protéiforme.

L’enseignement des finances publiques, ou la manière de les appréhender, s’est


faite en plusieurs étapes.

- La première étape est la législation financière. Au XIXème et au début du


XXème siècle, les finances publiques étaient uniquement considérées sous leur
aspect juridique. C’est une conception qui va prédominer jusqu’aux années 1950.
- La deuxième étape est l’économie financière publique. Elle est apparue à
partir des années 1950 lorsque l’Etat a été obligé d’intervenir de façon massive
dans la vie économique.
- La troisième étape est la gestion financière publique. Le souci de mieux
gérer le secteur public est apparu au début des années 1980. La crise financière
de l’Etat a conduit à rechercher de nouvelles manières de gérer le secteur public.
On a alors commencé à adapter les méthodes de gestion de l’entreprise à la
gestion publique.

Derrière la réforme des finances publiques, c’est une réforme de l’Etat dans son
ensemble à laquelle nous sommes en train d’assister. Depuis 1996, des révisions
importantes de la Constitution sont intervenues en matière de finances
publiques.

Première partie : Les finances publiques et le pouvoir politique

Les finances publiques sont à l’origine du pouvoir politique. On s’appuie


aujourd’hui sur la réforme des finances publiques pour réformer l’Etat. Cela n’a
rien d’étonnant car l’Etat tire ses origines de la création d’un dispositif financier
public.

Première sous partie : Les finances publiques et les transformations du


pouvoir politique

Sans le pouvoir de lever des impôts, mais aussi sans le pouvoir d’utiliser
librement cette ressource, il ne peut pas exister de pouvoir politique. Sans le
pouvoir financier, aucun pouvoir politique ne peut exister. Aujourd’hui le pouvoir

2
L2

financier tire sa légitimité de l’existence d’un droit qui en organise le


fonctionnement : le droit public financier.

Il comprend trois branches : le droit fiscal (droit des impôts), le droit budgétaire
(c'est-à-dire le droit qui pose les règles concernant par exemple la présentation
des budgets publics, ou encore la prise de décision) et le droit de la comptabilité
publique.
C’est très largement à travers la construction du droit public financier que le
parlementarisme démocratique s’est construit.

Chapitre 1 : Finances publiques et naissance du pouvoir politique

Le pouvoir politique a pris naissance en s’enracinant dans le pouvoir financier et


en premier lieu à partir du pouvoir fiscal.

Section 1 : La naissance du pouvoir politique et de l’impôt

L’impôt est à la source du système financier public et de la construction de l’Etat.


Par la suite, c’est de l’impôt que dépend la puissance du pouvoir politique.

I – Une forme désordonnée de prélèvement et de pouvoir : le pillage

Le pillage est une forme lointaine, primitive, de l’impôt. Ce qui le caractérise en


effet est qu’il s'agit d’un prélèvement obligatoire irrégulier dans le temps. Or,
ce qui caractérise l’impôt est sa régularité. Le pillage est soumis au hasard, aux
besoins d’un groupe de pillards. Il consiste le plus souvent à prélever la totalité
des biens qui sont possédés ou qui sont produits par les victimes.

Le pillage est un prélèvement obligatoire (une des caractéristiques de l’impôt)


qui ne laisse pas le temps aux victimes de reconstituer leur patrimoine par la
suite. Cela est stupide car il est alors impossible aux victimes de créer de
nouvelles richesses. Il n’est plus possible dans ce cas de reconstituer des
richesses économiques, et les pillards, en s’accaparant la totalité des biens de
leurs victimes, ne leur laissent plus aucune possibilité de produire de nouveaux
biens ni même de survivre dans certains cas. Autrement dit, ils les condamnent à
disparaître et perdent en même temps leur source de revenus. Les pillards
n’ont aucune conception de la maitrise de leurs ressources sur la durée.
Ils vivent dans l’instant, ne se projettent pas dans l’avenir. Autrement dit, ils
n’ont aucune stratégie.

II – Le tribut

Le tribut est l’ancêtre de l’impôt. C’est aussi avec lui que les pillards les plus
avisés ont commencé à bâtir un pouvoir politique. Les pillards ont compris qu’il
fallait :

- Laisser à la disposition des peuples conquis une partie de leur production,


de leur laisser leurs moyens de production (outils qui leur servent à cultiver la
terre, etc.) Par conséquent, ils ont compris qu’il fallait que leurs victimes soient
en mesure de continuer à cultiver leurs terres, à produire de nouvelles richesses
dont une partie pourra être ultérieurement prélevée.

- Effectuer des prélèvements réguliers, à date fixe après les récoltes. Ils ont
donc compris qu’il était plus judicieux de laisser les individus libres de travailler,

3
L2

de leur laisser de quoi entretenir leur force de travail (c'est-à-dire se nourrir, se


vêtir et se loger). Dès lors, on assiste déjà à la naissance d’une conception
gestionnaire et stratégique.

Cette conception traduit une capacité de se projeter dans l’avenir, mais


également la capacité d’organiser un territoire, un espace territorial.

Le tribut possède déjà les principales caractéristiques de l’impôt. Il est ainsi


obligatoire et peut être effectué par la force. C’est un prélèvement qui intervient
à date fixe. Il laisse aux individus de quoi survivre et de quoi produire de
nouveaux surplus qui pourront être prélevés. Enfin, il s'agit d’un prélèvement
effectué sur la différence entre ce qui est produit et ce qui est consommé
pour continuer à produire, car prélever plus conduirait à l’extinction de la source
du prélèvement.

Section 2 : La naissance de l’Etat et de l’impôt

Les Etats ont pu se constituer à partir du moment où l’on a inventé des formes
de prélèvement obligatoire structurées, c'est-à-dire à partir du moment où
l’on a mis en place une organisation du pouvoir fiscal.

I – L’organisation du pouvoir fiscal et l’administration de l’impôt

L’Etat est apparu lorsqu’a été mis en place un système de financement stable et
permettant par ailleurs de rémunérer une armée et une administration, tout
d’abord fiscale. Autrement dit, l’organisation du pouvoir financier constitue
un préalable à l’organisation d’un pouvoir politique.

Le passage du tribut à l’impôt se caractérise par le fait que l’on crée une
organisation de plus en plus performante pour effectuer les prélèvements
fiscaux. En effet, le prélèvement de l’impôt nécessitait non seulement la force,
c'est-à-dire une armée, mais également de connaître le mieux possible ce
que l’on pouvait prélever. Par conséquent il est indispensable de connaître
précisément ce que l’on appelle la matière imposable, c'est-à-dire ce que l’on
va taxer, ce que l’on appelle aussi la base d’imposition.

Il a ensuite fallu connaître le montant maximum pouvant être prélevé sans


risquer de produire des effets négatifs sur le renouvellement des richesses et
sans risquer de provoquer des révoltes fiscales. Il a donc fallu déterminer ce que
l’on appelle :
- Des procédures d’assiette de l’impôt (asseoir l’impôt), c'est-à-dire des
procédures permettant de calculer les bases d’imposition du contribuable.
- Des procédures de liquidation de l’impôt, c'est-à-dire des procédures
permettant de calculer ce qui est dû par le contribuable. Cela correspond le plus
souvent à l’application d’un taux (d’imposition) à une base.
- Des procédures de recouvrement de l’impôt, c'est-à-dire la manière la plus
efficace et la plus commode pour le contribuable pour lui faire payer sa dette
fiscale.

La connaissance de la matière imposable est indispensable : il faut savoir non


seulement ce que l’on va imposer, mais aussi qui l’on va imposer.

E.G : Sous l’Antiquité, les Egyptiens ont institué des dispositifs sophistiqués qui
leur permettaient de connaître avec précision non seulement la matière

4
L2

imposable, mais également la capacité contributive des contribuables


(jusqu’où ils peuvent payer sans leur prendre le nécessaire à la survie et à la
production). Ils ont institué pour cela d’une part des procédures de recensement
de la population, des familles, et d’autre part ce que l’on appelle un cadastre
c'est-à-dire un plan des terrains qui indique leur superficie, leur type de culture,
leur rendement, et également leur propriétaires ou celui qui en cultive la terre.
Un corps de fonctionnaires spécialisés est alors créé pour réaliser ces tâches. Ces
fonctionnaires vont devoir déterminer la matière imposable, liquider l’impôt et
recouvrer l’impôt (le percevoir).
Sur cette base une structure étatique va pouvoir se mettre en place, et l’on va
pouvoir financer l’armée, l’administration fiscale et également une administration
générale.

II – La création des premiers Etats


A – La naissance des Etats autoritaires

Au départ, l’Etat se présente comme une forme politique supérieure aux


différents groupes qui composent la société. Cet Etat se donne pour objectif
d’unifier sous son autorité les différentes communautés qu’il a soumises. Il se
présente alors comme la communauté supérieure qui est légitime pour
prélever un tribut. La force ne peut demeurer longtemps la solution pour forcer
l’impôt, il faut que cela devienne légitime, que la population consente à l’impôt.
L’Etat va se présenter comme un pouvoir qui réalise l’intérêt général.

Cet Etat va dire aux populations :


- Qu’il est leur protecteur et leur assure sa sécurité grâce à l’armée,
- Qu’il est le moteur du développement économique ; par exemple en organisant
l’irrigation des terres,
- Qu’il organise des fêtes religieuses et organise donc les rapports des individus
avec leurs dieux.
Finalement, le pouvoir politique fournit des services aux communautés et aux
individus qu’il domine. Cela marque les premiers pas vers le consentement à
l’impôt.

B – La création des Etats parlementaires

Sous l’Antiquité, des systèmes fiscaux organisés ont été institués. C'est-à-dire
non seulement des impôts, mais également une administration fiscale. Par la
suite, avec le Moyen-âge, ces systèmes fiscaux vont soit disparaître, soit éclater.
Il ne restera que quelques impôts qui continueront à être prélevés par des
seigneurs féodaux.
Par ailleurs, il n’existe pas au Moyen-âge de différence entre le patrimoine public
et le patrimoine privé (cf. Cours d’histoire du droit). On ne fait pas de différence
entre les finances publiques et les finances privées. Il y a confusion du
patrimoine du souverain avec celui du royaume.

Les guerres vont aller en se multipliant et les moyens utilisés pour faire la guerre
vont coûter de plus en plus chers. Ainsi, un cheval équipé d’une armure et d’un
caparaçon coûtait aussi cher, comparativement, qu’un tank perfectionné
aujourd’hui ! Les souverains ont été obligés de demander une aide matérielle à
leurs vassaux, ce sont les aides féodales. Ces vassaux n’ont pas accepté
d’emblée de contribuer aux dépenses de guerre de leurs souverains et c’est ainsi
que chaque fois que le souverain demande une aide, il est obligé de négocier
cette aide avec ses vassaux. Cette négociation va progressivement prendre une

5
L2

forme habituelle et va même s’institutionnaliser sous la forme


d’assemblées.

C’est dans ce cadre là que vont se décider les aides féodales que l’on qualifiera
d’aides extraordinaires. Progressivement, ces assemblées abandonnent leur
caractère ponctuel pour devenir régulière.

Dans un premier temps, ces assemblées n’étaient qu’épisodiques. Par la suite, la


démultiplication des conflits aidant, les assemblées vont elles aussi être amenées
à se démultiplier et vont devenir régulières dans le temps et devenir de
véritables institutions parlementaires. On les appelle les cortes en Espagne, le
Parlement en Angleterre, les Etats Généraux en France. Par ce biais va naître la
première forme organisée du consentement de l’impôt.
Il faut souligner que dans ce cadre, le souverain n’est plus le seul à détenir le
pouvoir fiscal. Il partage ce pouvoir avec les membres de l’assemblée. L’impôt
devient alors un enjeu majeur ; et c’est sur la base de son consentement que va
se construire le régime parlementaire.

Chapitre 2 : Droit public financier et naissance de la démocratie


politique

Section 1 : La Révolution de 1789 et la naissance du droit public financier

I – La révolution fiscale et la naissance du droit fiscal

La particularité de la Révolution française a été, d’une part, d’inventer des


impôts, et, du reste, d’inventer des principes fiscaux, des règles fondamentales
en matière fiscale. Parmi ces principes, l’un des plus importants est celui du
consentement de l’impôt. C’est sur la base des principes fiscaux inventés à la
Révolution que va pouvoir se construire un droit fiscal comportant
progressivement des garanties pour le contribuable. En d’autres termes, c’est
une sortie de l’arbitraire fiscal qui se met en place à travers cette sécurité
juridique.

D’autre part, la lutte qui se joue autour du pouvoir budgétaire et fiscal entre le
pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, c'est-à-dire entre les constituants et le
roi, se situe au cœur des enjeux politiques. L’issue de ce combat va être
déterminante pour la création d’un régime parlementaire démocratique.
A – Les principes fiscaux fondateurs d’un pouvoir fiscal légitime

A la légitimité sociologique de l’impôt qui demeure, va venir s’ajouter une


légitimité juridique de l’impôt. En effet, la légitimité fiscale va être formalisée
juridiquement par trois principes qui vont figurer dans la Déclaration des droits
de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 aux articles 13 et 14.
Il s'agit du principe du consentement de l’impôt. Soulignons ici que les
révolutionnaires, avant de s’intéresser aux dépenses publiques, se sont
exclusivement intéressés à la fiscalité, aux impôts. Leur attention a été
complètement focalisée sur le droit de lever l’impôt, sur la légitimité fiscale. Ils
ont négligé le pouvoir d’utiliser les ressources fiscales, c'est-à-dire le pouvoir de
dépenser. Ils se sont attribués le pouvoir de décider de l’impôt et ont abandonné
au roi celui d’utiliser le produit de l’impôt.

On peut ajouter qu’après s’être déclaré Assemblée Nationale, le Tiers-Etat a


décidé que tous les impôts existants étaient illégaux et qu’aucun impôt ne

6
L2

pourrait être levé sans un consentement préalable de l’assemblée (décret du 13


juin 1789). Cette décision, qui a pour objectif de limiter le pouvoir royal en
limitant son pouvoir financier, a fait l’objet d’une inscription dans la Déclaration
des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 à l’article 14 :
« Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes la nécessité de la
contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en
déterminer la quotité (i.e. : taux d’imposition), l’assiette, le recouvrement et la
durée ».

Ce principe est qualifié de principe de consentement de l’impôt ou encore de


principe de légalité fiscale (cf. Conseil Constitutionnel). Ce principe est toujours
en vigueur. C’est aujourd’hui un principe à portée constitutionnelle.

A partir du dégagement de ce principe par la Déclaration des droits de l'Homme


et du citoyen du 26 août 1789, la légitimité de l’impôt prend une forme
juridique solide. L’impôt a même une légitimité politique puisqu’il est décidé
par les citoyens ou par leurs représentants. Toutefois, ce pouvoir financier
attribué à l’Assemblée n’est pas complet car il est limité au droit de voter
l’impôt et n’envisage pas celui de décider des dépenses. L’Assemblée ne détient
finalement qu’une partie du pouvoir financier. Cependant, une logique politique
nouvelle s’est amorcée. Il s'agit de la création du régime parlementaire
démocratique.

Un second principe fiscal est inscrit dans la Déclaration des droits de l'Homme et
du citoyen du 26 août 1789. Il s'agit du principe d’égalité devant l’impôt
(article 13). Ce principe condamne tout privilège en matière fiscale. Article 13 :
« Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration,
une contribution commune est indispensable : elle doit être également
répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».

Un troisième principe inscrit dans la Déclaration des droits de l'Homme et du


citoyen du 26 août 1789 est celui de la nécessité de l’impôt. Cela signifie que
l’impôt est indispensable pour financer les dépenses publiques. Il figure aux
articles 13 (« Une contribution commune est indispensable ») et 14 (« La
nécessité de la contribution publique »).

Ces trois principes confèrent une légitimité juridique à l’impôt. Le principe de


légalité (article 14), du consentement de l’impôt, confère une légitimité
politique à l’impôt. Le principe d’égalité devant l’impôt (article 13) lui confère
une légitimité sociale, et concerne la justice fiscale. Enfin, le principe de la
nécessité de l’impôt (articles 13 et 14) lui confère une légitimité financière.

Les révolutionnaires ont également inventé une fiscalité fondée sur des impôts
directs en réaction à celle de l’Ancien Régime.

B – La création d’un système fiscal nouveau


1 – L’influence des doctrines professées par les physiocrates

Les physiocrates ont développé leur théorie au cours de la seconde moitié du


XVIIIème siècle. Leur leader était le médecin du roi Louis XV et s’appelait
François Quesnay. Cette école comptait en son sein des hommes comme le
Chapelier ou Turgot ; elle était à la fois très moderne et archaïque.
Elle était moderne en ce sens qu’elle expliquait que la richesse d’un pays dépend
de la liberté des échanges, de la liberté du marché économique, qu’il fallait par

7
L2

conséquent réduire au maximum les réglementations et qu’il fallait laisser les


hommes échanger librement leurs marchandises, qu’il fallait qu’il s’exerce un
libre-échange.
Sous l’Ancien Régime, les corporations de métier déterminaient les prix des
marchandises et les salaires. Il existait à l’entrée des villes des péages où
devaient être payés des droits sur les marchandises.

Les physiocrates étaient farouchement opposés à ces corporations et à ce


système fiscal. L’action de Turgot allait dans ce sens, mais face aux oppositions il
fût contraint à partir. Cette école était avant-gardiste et préfaçait le libéralisme
économique. Elle demeurait par ailleurs archaïque car elle considérait que la
source de la richesse d’une nation résidait dans la propriété foncière alors
qu’allait se développer l’industrie et qu’avec cela la source de la richesse ne
serait plus la propriété foncière mais la force de travail.

C’est ce qui explique que les physiocrates se soient montrés favorables à


l’institution d’un impôt unique sur le foncier. Ils considéraient en effet qu’il
fallait abolir tous les impôts existants et qu’il fallait les remplacer par
un seul impôt taxant la propriété foncière.

A l’époque révolutionnaire, les constituants étaient pénétrés des idées des


physiocrates. Les révolutionnaires étaient dans leur majorité favorables aux idées
physiocrates et c’est pourquoi ils ont proposé de supprimer les impôts existants
et de les remplacer par un impôt foncier partant du principe que la propriété
foncière étant, selon les physiocrates, la source de la richesse, l’impôt le plus
rentable était bien entendu celui qui taxait la propriété foncière.

2 – La création d’impôts directs sur la propriété foncière

Une fois les privilèges fiscaux abolis dans la nuit du 4 août 1789, la constituante
pose le principe de la mise en place d’une fiscalité égalitaire. Les
révolutionnaires décident d’abolir tous les impôts indirects existants et
notamment les gabelles (impôts sur la consommation) et notamment l’impôt sur
le sel. Ils décident de remplacer ces impôts par des impôts directs taxant la
propriété foncière.

Ils voulaient éviter toutes relations entre le contribuable et l’administration


fiscale car l’on voulait éviter les conflits qui s’étaient multipliés sous l’Ancien
Régime. C’est la raison pour laquelle on a voulu mettre en place des impôts
qualifiés d’impôts indiciaires. En effet, les impôts assis sur une base foncière
permettaient d’éviter les relations entre le fisc et le contribuable car il suffisait
d’évaluer de l’extérieur la superficie de l’immeuble ou du terrain pour
déterminer la base d’imposition (pas besoin de demander aux contribuables
d’écrire quelque chose donc).

Par ailleurs, la constituante a créé dans un premier temps deux impôts. L’un
s’appelait la contribution foncière (contribuer à l’intérêt général), et l’autre la
contribution mobilière.

La contribution foncière a été créée par les lois des 23 novembre et 1 er décembre
1790. Il s'agit du premier impôt créé par les révolutionnaires. Ils pensaient
pouvoir tirer de cet impôt la totalité des ressources qui leur seraient nécessaires,
mais cet impôt n’était pas totalement recouvré.
La contribution mobilière a été instituée par les lois des 13 janvier et 18

8
L2

février 1791. Elle était considérée comme un impôt sur le revenu du contribuable
et demeure un impôt indiciaire.
L’indice de ce revenu était le loyer qui pouvait être demandé pour le logement
occupé par le contribuable. Ce loyer était évalué sur la base d’indices appelés, et
c’est toujours le cas aujourd’hui, valeur locative (du logement). Mais ces deux
impôts étaient difficiles à recouvrer et l’on a décidé de taxer les activités
industrielles et commerciales et d’instituer un impôt appelé la contribution des
patentes.

Sous le Directoire est créé un quatrième impôt appelé contribution sur les
portes et fenêtres.

Ces quatre impôts ont été appelés avec émotion les « Quatre vieilles » (alors qu’il
n’y en a en réalité que trois).

N.B : Les impôts, les contributions, créés à la Révolution étaient des impôts
d’Etat. Ces contributions furent ensuite transférées aux collectivités locales dans
la première moitié du XXème siècle. En effet, l’Etat a considéré à juste titre que
ces impôts n’étaient pas assez rentables pour couvrir ses dépenses et a créé à
son profit ce que l’on appelle les impôts modernes, c'est-à-dire l’impôt sur le
revenu des personnes physiques (IRPP), l’impôt sur les sociétés, la TVA, et il a
remis aux collectivités locales les trois contributions foncières, mobilières et
patentes qui sont devenues des impôts locaux.

Aujourd’hui, la contribution foncière correspond à la taxe foncière sur les


propriétés bâties et à la taxe foncière sur les propriétés non bâties. La
contribution mobilière est devenue la taxe d’habitation, et la contribution des
patentes est devenue la taxe professionnelle.

Ces quatre taxes sont actuellement les principaux impôts directs locaux.

II – Les premiers pas vers le droit pour les élus de décider du choix des dépenses
publiques

Les révolutionnaires étaient convaincus que le pouvoir de décider en matière


fiscale était essentiel et que par conséquent ce pouvoir devait appartenir aux
représentants des citoyens, comme indiqué à l’article 14 de la Déclaration des
droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789. Mais le pouvoir de dépenser
revenait encore à l’exécutif. En réalité, le pouvoir financier était assimilé au
pouvoir fiscal et il faudra attendre 1791 pour qu’au moins en principe soit admis
le fait que le pouvoir législatif était également compétent pour décider des
dépenses, compétent pour décider d’un budget (un budget consiste à prévoir
des dépenses et des recettes).

Selon la constitution de 1791, le corps législatif a pour fonction « de fixer les


dépenses publiques, d’établir les contributions publiques » (article 1er, 1ère
section, chapitre III, Constitution de 1791). Ce texte constitue un premier pas
vers la présentation d’un budget, c'est-à-dire d’un acte parlementaire qui prévoit
pour l’année à venir des dépenses et des recettes et qui autorise l’exécutif à
réaliser ces opérations de dépenses et de recettes.

A cette époque, il n’y a pas encore de texte législatif qui prévoit des dépenses et
des recettes ; il n’existe pas encore de budget. Il n’existera en 1792 qu’une
simple autorisation globale de dépenses qui sera d’ailleurs reconduite les années

9
L2

suivantes.
Plus tard, les constitutions de l’an III et de l’an VIII rappelleront la nécessité d’un
budget. Cela sera néanmoins sans effet. D’autre part, le terme de budget
n’apparaîtra qu’en 1802, mais il n’y en aura pas. Napoléon 1er ira même jusqu’à
établir les impôts lui-même par décret.

Section 2 : La naissance de l’Etat gendarme et du droit budgétaire au XIXème


siècle

Le XIXème siècle est marqué par les théories économiques libérales classiques.
Ces théories estimaient que l’Etat ne devait en aucun cas intervenir dans la vie
économique, qu’il devait être absolument neutre vis-à-vis du marché
économique. Par conséquent, ces libéraux estimaient que le budget de l’Etat ne
devait pas peser sur le marché.

Autrement dit, ils estimaient que :


- Les impôts ne devaient pas être trop lourds afin que les citoyens puissent
investir dans les entreprises ;
- Les dépenses publiques devaient également être limitées car leur
accroissement risquait d’entrainer une augmentation des impôts ou un
financement par l’emprunt.

C’est la raison pour laquelle les libéraux classiques feront en sorte que des
normes soient instituées afin de réglementer l’activité financière de l’Etat, afin de
l’empêcher d’avoir des activités, notamment économiques, au-delà de certaines
frontières. C’est pourquoi le droit budgétaire, c'est-à-dire le droit qui règle
l’exercice du pouvoir financier en ce qui concerne l’évaluation des recettes et des
dépenses publiques, va être élaboré essentiellement dans le cadre de la
construction de l’Etat libéral classique.

I – Les doctrines libérales classiques et les finances publiques


A – Adam Smith (1723-1790)

C’était un professeur de philosophie, d’économie et de droit de l’université de


Glasgow. Il a rencontré les physiocrates lors d’un voyage en France. Il a retenu
de leur vision le principe de la liberté du marché.
Il va associer ce principe de la liberté du marché au développement industriel et
au rôle essentiel joué par le travail dans la production des richesses
économiques. Il publie Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations en 1776, dans lequel il développe sa théorie.

Adam Smith développe les idées selon lesquelles :


- La liberté doit être le principe de base du système économique et
l’interventionnisme doit être rejeté ;
- La source de la richesse n’est pas la propriété foncière, mais le travail ;
- Les salaires et les prix ne doivent pas être réglementés (suppression des
corporations de métiers) ;
- Les frontières doivent être supprimées ;
- L’activité économique de chaque individu est déterminée par son intérêt
personnel et la confrontation de ces intérêts est la source du progrès
économique ;
- L’impôt doit être proportionnel aux revenus, et doit être payé par tous les
contribuables.

10
L2

B – Les libéraux classiques : des héritiers d’Adam Smith

Au XIXème siècle, des économistes ont poursuivi la pensée d’Adam Smith. On les
appelle les libéraux classiques. Par la suite, à la fin du XIXème et au début du
XXème siècle, d’autres économistes ont encore prolongé leurs théories. On les
appelle les libéraux néoclassiques.

Les libéraux classiques sont persuadés qu’Adam Smith est un génie ayant déjà
tout dit et tout écrit, qu’il suffit de prolonger sa pensée. C’est pourquoi ils
reprennent tous les thèmes essentiels présents chez Smith. Dès lors, ils essaient
de construire une science de l’économie qui aurait ses lois comme les sciences
de la nature et qui mettraient en évidence les moyens pour faire fonctionner
scientifiquement la société.

Parmi ces économistes classiques, il faut citer David Ricardo, Jean-Baptiste Say,
Frédéric Bastiat ou encore Robert Malthus. Tous ces économistes, excepté
Malthus, étaient persuadés qu’ils parviendraient à découvrir les lois de la
richesse des nations. Malthus estimait quant à lui que les populations
évoluaient plus rapidement que les biens alimentaires. Par conséquent, à un
moment donné, il n’y aurait plus de quoi nourrir ces populations (croissance
exponentielle de la population et croissance arithmétique de la nourriture 
famines  rééquilibrage).

Les néoclassiques sont persuadés que la production joue un rôle primordial


dans l’économie. Ils développent également l’idée que les individus ont un
comportement rationnel sur le marché économique. Ils entendent par cela que
les individus font le choix d’acheter ou de vendre en fonction de leur intérêt
personnel. Ils en déduisent que la confrontation des intérêts personnels
engendre la réalisation de l’harmonie économique et de l’intérêt général.
Parmi ces auteurs il faut citer Carl Menger, Stanley Jebons ou encore Frédéric
Hayek (1899-1992). Hayek a participé à la création de l’école autrichienne au
début du XXème siècle.

II – L’Etat gendarme : première forme de l’Etat libéral classique

L’Etat gendarme qualifie la forme d’Etat conçue par les libéraux classiques et
néoclassiques. Il s'agit d’un Etat qui doit être indépendant du marché
économique. Ses fonctions doivent être réduites à ce que l’on appelle les
fonctions régaliennes. On l’appelle ainsi car il doit se limiter à assurer la
sécurité des biens et des personnes. Il doit maintenir l’ordre à l’intérieur du pays
et protéger les populations des agressions extérieures.

L’objectif est économique. Il est de permettre aux entreprises et aux individus de


produire et d’échanger en paix. Par ailleurs, cet Etat doit également permettre la
circulation la plus facile des marchandises ; c’est la raison pour laquelle lui
sont confiés la construction et l’entretien des routes.

En résumé, les fonctions régaliennes sont les suivantes :


- Assurer la sécurité des biens et des personnes, ce qui signifie financer une
police et une armée ;
- Assurer le respect des lois, et financer une justice ;
- Assurer la circulation des marchandises, et donc financer la voirie.

Selon cette conception de l’Etat, c'est-à-dire une conception neutraliste par

11
L2

rapport au marché économique, le budget de l’Etat ne doit pas peser sur


l’économie et doit être strictement équilibré. Cela signifie que les dépenses
publiques doivent strictement équivaloir aux recettes publiques. Selon cette
doctrine, il ne doit y avoir ni déficit budgétaire, ni excédent budgétaire. En ce qui
concerne la fiscalité, l’impôt ne doit pas peser sur le marché, sur la
conjoncture économique. Sa seule fonction est de couvrir exactement les
dépenses régaliennes. S’il était supérieur aux dépenses régaliennes, l’argent
prélevé serait alors de l’argent non investi dans le circuit économique.

Si l’on considère les réalités, les budgets du XIXème siècle n’étaient pas
systématiquement équilibrés. Les principes libéraux classiques ont été très
difficilement applicables, et plus l’économie se développait, moins il était facile
de les appliquer. Toutefois, des règles juridiques ont été posées, elles avaient
pour objectif d’encadrer, de limiter l’action de l’Etat dans la vie économique.

III – La naissance du droit budgétaire et de la comptabilité publique

Le droit budgétaire, c'est-à-dire le droit qui organise l’exercice du pouvoir


financier, qui établit des règles relatives à la fixation des prévisions concernant
les recettes et les dépenses publiques, se construira dans le cadre de la
construction de l’Etat gendarme.

En effet, selon les principes libéraux classiques, l’Etat doit être totalement
indépendant dans la vie économique ; ce qui suppose, par conséquent, une
limitation du pouvoir financier public. En conséquence, des normes vont être
créées afin de contrôler la progression des dépenses publiques. On ne veut pas
que ces dépenses augmentent au-delà de ce qui est nécessaire, c'est-à-dire les
charges régaliennes. Ces règles vont donc interdire à l’Etat d’agir au-delà de
certaines frontières clairement établies.

Il va falloir attendre la période de la Restauration pour que se bâtisse le droit


budgétaire. Durant cette période va se construire un droit qui pose comme
principe de base la prévision des dépenses et des recettes publiques pour
l’année à venir. Cette fonction budgétaire va être confiée à l’exécutif pour la
préparation du budget, et au législatif pour sa discussion et son adoption.

Sous la Restauration, et par la suite sous la Monarchie de juillet, les assemblées


parlementaires vont acquérir un véritable pouvoir financier, c'est-à-dire le
pouvoir de décider de l’impôt et le pouvoir d’en dépenser les produits. C’est à
cette époque, et en premier lieu sous l’impulsion des ministres des finances de
Louis XVIII et de Charles X, que vont être créées les principales règles
budgétaires. On aurait pu penser qu’une telle évolution était impossible car la
charte constitutionnelle du 4 juin 1814 ne comportait aucune règle relative au
budget. Seul l’article 48 de la charte faisait allusion à l’adoption des recettes
fiscales. Selon cet article « aucun impôt ne peut être établi ni perçu s’il n’a été
consenti par les deux chambres ».

C’est en 1814 que pour la première fois un budget va faire l’objet d’une
discussion concernant les dépenses. C’est le Baron Louis, ministre des finances
de Louis XVIII, qui va donner le coup d’envoi d’un processus accordant un
véritable pouvoir financier aux élus nationaux. Il va déclarer le 22 juillet 1814 aux
députés : « En vous occupant du budget de l’Etat, votre fonction première sera
de reconnaître la nature et l’étendue de ses besoins et d’en fixer la
somme » (dépenses). Il ajoute : « Votre attention se portera ensuite sur la

12
L2

détermination et la fixation des moyens qui devraient être établis ou employés


pour y faire face » (recettes). Il poursuit ainsi : « Pour procéder suivant l’ordre de
vos délibérations, nous [l’exécutif] allons vous présenter l’évaluation la plus
exactes de nos dépenses, c'est-à-dire les sommes qu’il est nécessaire d’affecter
à chacun des départements ministériels ». C’est donc l’exécutif qui propose les
dépenses pour chaque ministère, qui prépare le budget.

Il termine comme cela : « Nous aurons ensuite l’honneur de vous offrir l’aperçu
des moyens proposés pour les balancer ». Le Baron Louis dit que l’exécutif
propose un projet de budget qui sera ensuite discuté et adopté par les
députés. Le pouvoir reconnaît donc ce pouvoir aux députés.

Une fois ce principe de l’adoption des dépenses ayant été acquis, les élus vont
ensuite faire en sorte de voter de plus en plus en détails les dépenses. Cette
évolution vers une adoption détaillée des dépenses va progressivement donner
naissance à un principe budgétaire que l’on appelle le principe de spécialité
budgétaire.
Tout au long du XIXème siècle, les dépenses publiques seront progressivement
compartimentées en diverses catégories à l’intérieur de chaque ministère. On va
d’abord créer des parties à l’intérieur du budget des ministères : les sections.
Ces sections ont été instituées par une ordonnance du 2 septembre 1827. Les
parlementaires auront alors le droit d’adopter le budget par sections alors qu’ils
ne l’adoptaient auparavant que par ministère.

Par la suite, une loi du 29 janvier 1831 va créer de nouvelles catégories qui vont
s’appeler des chapitres ; les parlementaires vont alors adopter le budget par
chapitres. On dit que les crédits sont spécialisés par chapitres. Dès lors, le
Parlement a acquis un pouvoir financier réel. Il contrôle dans le détail les crédits
qui sont mis à la disposition de l’exécutif.

Ensuite, des textes viendront améliorer la procédure, notamment un décret du


31 mai 1862 qui organise la comptabilité publique et qui est à l’origine d’un droit
de la comptabilité publique et qui par ailleurs précise, rationnalise, les
procédures budgétaires.
A partir de cette date, les procédures budgétaires ainsi que l’architecture du
budget (chapitres, sections) ne seront remises en question qu’à partir des années
1950. En effet, le droit budgétaire et comptable public institué par le décret de
1862 avait été créé sous l’influence et dans un contexte libéral classique au sein
duquel la neutralité de l’Etat était essentielle. Or, à partir des années 1950, on
admet que l’intervention de l’Etat dans la vie économique et sociale est une
nécessité. Par conséquent, il va falloir reconsidérer le droit public financier et il
sera réformé par une ordonnance du 2 janvier 1959.

Chapitre 3 : Les finances publiques et la construction de l’Etat


providence

La fin des années 1950 se caractérise par le développement d’une conception de


l’Etat opposée à celle qu’avaient développée les libéraux classiques. L’Etat est
alors considéré comme un moyen d’assurer par ses interventions le
développement économique et social. Cet Etat interventionniste est appelé Etat
providence.

Section 1 : La création de l’Etat providence et les modifications du droit


budgétaire à la fin des années 1950

13
L2

I – La naissance des premières théories interventionnistes avant la seconde


guerre mondiale

Ces théories ne sont pas nées au cours des années 1950, mais au XIXème siècle
en réaction aux excès du développement industriel. Ces doctrines expriment la
nécessité de l’intervention de l’Etat dans la vie économique et sociale. Ces
théories ne seront réellement acceptées et concrétisées qu’à partir de l’après
Seconde guerre mondiale.

A – Adolphe Wagner, un précurseur de l’interventionnisme

Wagner vivait à Berlin à la fin du XIXème siècle et était professeur d’économie,


socialiste réformiste. Il est favorable à une redistribution des richesses et à une
égalisation des situations sociales en utilisant la fiscalité. Ce qui a rendu sa
pensée originale est l’intérêt qu’il a porté à l’étude des dépenses publiques.
En effet, la quasi-totalité des auteurs de l’Etat ne s’intéressait qu’à l’impôt.
Adolphe Wagner a établi ce qu’il a qualifié de « loi de l’extension croissante de
l’activité publique de l’Etat ». On appelle encore cette loi la loi de Wagner.
Cette loi a été exposée dans son ouvrage Fondements de l’économie politique.
Cette loi signifie que du fait du développement industriel, les dépenses
publiques augmenteront inéluctablement car le secteur public sera
obligé d’intervenir pour rééquilibrer le système économique et social.
Wagner écrivait : « Des comparaisons dans l’histoire et dans l’espace montrent
chez les peuples en voie de progrès un développement régulier de l’activité de
l’Etat et de l’activité publique exercée à côté de l’Etat par les diverses
administrations autonomes (collectivités territoriales) ». Il ajoute : « L’Etat et les
corps autonomes se chargent de plus en plus d’activités nouvelles. Ainsi, un
nombre toujours croissant de besoins collectifs sont satisfaits par l’Etat, nous en
avons la preuve manifeste et mathématique dans l’accroissement des besoins
financiers de l’Etat et des communes ».

Selon Wagner, le secteur public doit aider le développement de l’économie et


doit également corriger les effets négatifs de ce développement.

B – John Maynard Keynes et la formalisation des doctrines interventionnistes

Keynes est né en 1883 et mort en 1946. Il était britannique et a eu l’intelligence


de présenter une théorie d’une grande cohérence de l’interventionnisme public
dans la vie économique et sociale. Il est libéral interventionniste.

L’un des points clés de sa pensée consiste dans le fait qu’il a mis en évidence la
fonction essentielle que doit jouer le budget de l’Etat dans la réalisation de
l’équilibre économique, c'est-à-dire de l’équilibre entre la production et la
consommation, entre l’offre et la demande.
Il a montré le rôle que devait jouer le budget pour compenser les déséquilibres
économiques et sociaux et pour relancer l’économie lorsque celle-ci s’essouffle et
connaît malheureusement la récession.

Keynes estimait que ses collègues libéraux classiques n’avaient pas raison en
prétendant que le marché économique pouvait fonctionner parfaitement sans
intervention de l’Etat. Il n’arrêtait pas de se disputer avec Hayek. Pour Keynes, il
faut que l’Etat intervienne afin de soutenir ou de relancer la demande, c'est-à-
dire la consommation, lorsque cela est nécessaire. On dit qu’il s'agit d’une

14
L2

politique économique de la demande et l’on qualifie le point de vue libéral


classique de politique économique de l’offre.

Il développe également l’idée qu’il faut une politique sociale, et que cette
politique ait pour objectif la recherche du plein emploi. Un autre axe consiste en
le soutien de l’éducation et à l’aide en matière de santé. Pour atteindre cet
objectif, l’Etat doit développer d’une part une politique de soutien au salaire,
d’autre part une politique de redistribution de l’impôt et enfin une politique
d’investissements publics. Afin de développer ces politiques, l’Etat ne doit pas
hésiter à présenter des budgets en déficit. Ce déficit budgétaire permet d’injecter
dans le système économique un supplément de pouvoir d’achat du fait des
dépenses publiques. Autrement dit, il permet de relancer la demande et par
conséquent de relancer l’économie.

Toutefois, Keynes estimait également que s’il le fallait, un budget pouvait être
voté en équilibre ou en excédent afin de réduire la demande et de rétablir
l’équilibre avec la production. Ce n’est pas l’équilibre du budget qui compte en
soi, mais son utilisation pour réaliser l’équilibre de l’économie. Il estimait que
c’était là le seul moyen de sauver l’économie libérale.
Ainsi, il écrivait : « L’élargissement des fonctions de l’Etat apparaît comme le
seul moyen d’éviter une complète destruction des institutions économiques
actuelles, et comme la condition d’un heureux exercice de l’initiative
individuelle ».

Keynes a marqué la pensée économique des générations de l’après seconde


guerre mondiale.
Cet auteur a permis la refonte de la pensée budgétaire.

II – La crise de l’Etat gendarme et la création de l’Etat providence

Les conceptions interventionnistes se sont imposées du fait des crises


économiques et sociales. Elles sont apparues comme une réponse à ces crises.
Les problèmes sociaux engendrés par un développement industriel sauvage ont
conduit à admettre qu’il était indispensable de développer des politiques
sociales.

L’effet déclencheur du succès interventionniste va être la grande crise


économique et financière qui va se développer à partir de 1929. On va alors
comprendre que le marché économique devait être régulé, qu’il ne pouvait pas
s’autoréguler, et qu’il fallait par conséquent des règles et des interventions
du secteur public. C’est ainsi que très pragmatiquement dans les années qui
ont précédé la seconde guerre mondiale, le rôle de l’Etat en matière économique
va se développer avec la politique du new deal lancée par Roosevelt comme en
Europe avec le front populaire en France par exemple. C’est la raison pour
laquelle, après la seconde guerre mondiale, il sera bien admis qu’il faut des
règles et que l’Etat doit être amené à occuper une fonction de stabilisateur de
l’économie.

III – L’adaptation du droit public financier aux caractéristiques de l’Etat


providence

L’institution de l’Etat providence va à contre-courant de l’Etat gendarme. Leurs


points de vue sont totalement opposés.

15
L2

C’est la raison pour laquelle le droit public financier est alors en décalage par
rapport aux réalités du moment. Il n’est plus adapté aux pratiques
interventionnistes et n’est pas non plus en phase avec les théories économiques
du moment. Le contexte général est lui même très différent. On assiste à un
renforcement du pouvoir politique central et à la place primordiale qui est
accordée au pouvoir exécutif, alors que dans les périodes précédentes, sous
les IIIème et IVème républiques, le pouvoir législatif détenait une compétence
quasi absolue en matière financière.

Cette inadaptation du droit public financier a conduit à commencer à le réformer.


C’est alors qu’un large consensus s’est établi sur le fait que le budget de l’Etat
était essentiel pour l’équilibre et le développement du marché économique. Dans
un premier temps, cette fonction économique de l’Etat s’est exprimée dans un
décret de 1956. Ensuite, la Constitution du 4 octobre 1958 a limité les pouvoirs
du Parement en matière financière et a augmenté ceux du gouvernement. Enfin,
une ordonnance du 2 janvier 1959 est venue compléter le dispositif et
l’harmoniser.

A – La reconnaissance juridique de la fonction économique du budget de l’Etat

Un décret du 19 juin 1956 reconnaît de manière explicite la fonction


économique du budget de l’Etat. Il développe deux grandes données :
- Il est indispensable de situer le budget de l’Etat dans un contexte économique
et financier.
- Il est indispensable de centrer les débats sur la loi de finance qui est la
traduction d’un point de vue budgétaire des objectifs économiques et financiers
du gouvernement.

Apparaît ici une notion nouvelle qui est celle de loi de finance. Cette notion sera
ensuite normalisée par l’ordonnance du 2 janvier 1959 et l’on distinguera le
budget, traduction chiffrée de dispositions fixées par une loi particulière appelée
loi de finance (alors que celle-ci ne sert qu’à fixer des objectifs).

Le décret de 1956 reconnaît officiellement le rôle actif que l’on veut faire jouer à
l’Etat en matière économique. Il reconnaît également les liens existants entre
économie et budget ; autrement dit entre finances publiques et économie. Selon
le décret, « Les moyens dont dispose l’Etat comme les ressources qu’il prélève
ont désormais une influence profonde sur la vie de la Nation, son orientation
économique, son devenir social. Le temps n’est plus où les recettes prélevées
par l’Etat pour couvrir les dépenses de fonctionnement de services publics
presque exclusivement régaliens demeuraient sans incidences sur l’économie
nationale et par l’accroissement de ses interventions, l’Etat est présent dans
toutes les branches importantes de l’activité du pays ».

B – La limitation des pouvoirs du Parlement en matière financière

Dans le cadre du parlementarisme rationnalisé, les élus nationaux ont vu leurs


pouvoirs financiers très encadrés et considérablement limités tandis que ceux du
pouvoir exécutif étaient augmentés. Le droit d’amendement financier des
parlementaires a été réduit de façon considérable par l’article 40 de la
Constitution de 1958.

C – L’harmonisation de la législation financière

16
L2

L’harmonisation a été favorisée par une ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi
organique relative aux lois de finance : « constitution financière de la France ».
Un décret du 29 décembre 1962 portant règlement de la comptabilité publique a
été important lui aussi.

L’ordonnance de 1959 a été abrogée par une loi organique relative aux lois
de finance (LOLF) du 1er août 2001.

Section 2 : La critique du système financier public et la crise de l’Etat providence

Au cours de la seconde moitié des années 1970, une crise économique s’est
développée et a eu de fortes répercussions sur le budget de l’Etat. Il s’est déjà
produit lors de la crise 1929, ce que l’on appelle un effet de ciseau. D’un côté,
les dépenses publiques augmentent considérablement du fait de la crise, et d’un
autre côté les recettes publiques diminuent. A un moment donné, les recettes et
les dépenses se croisent et l’écart entres les deux ne fait que s’accentuer. Par
conséquent, le déficit s’accroit, il faut le financer et l’on fait alors appel à
l’emprunt, ce qui ne fait qu’aggraver les choses.

L’Etat providence a tenté de réagir en jouant sur la demande mais cette politique
a eu pour effet d’accroître le phénomène de crise. C’est alors que l’on a contesté
l’Etat providence. L’idée s’est développée du côté des économistes libéraux
classiques qu’il était indispensable de revenir aux principes posés par l’Etat
gendarme. Il fallait donc, comme l’expliquaient ces économistes, cesser
l’interventionnisme et laisser le marché se développer librement.

I – La critique de l’impôt et de la dépense publique

Au milieu des années 1970, et surtout à la fin, on a constaté qu’il était de plus en
plus difficile pour l’Etat d’assumer sa fonction de stabilisateur de l’économie.
C’est alors que les critiques se sont développées vis-à-vis de l’Etat providence.
C’est alors également que s’est amorcée une transformation de la gestion des
finances publiques et une transformation de l’Etat qui n’ont commencé à devenir
perceptibles que des années plus tard. On a compris aujourd’hui que la crise des
années 1970 nécessitait non seulement une réponse de type économique, mais
aussi une réponse de caractère institutionnel. A la fin des années 1970, une
idée forte s’est imposée, selon laquelle l’Etat était beaucoup trop envahissant et
qu’il pesait beaucoup trop sur le système économique.

Les dépenses sont alors considérées comme nuisibles pour l’économie. De cette
critique de la dépense publique est née une critique de l’impôt. Certains
économistes libéraux classiques ont estimé qu’il fallait « affamer » l’Etat
(Friedman, notamment). Il faut donc réduire sa fiscalité. On a l’idée que la
réduction des impôts entraine la réduction des dépenses.
Par ailleurs, l’impôt a fait l’objet d’autres critiques. Il lui a été reproché de gêner
l’investissement des épargnants dans les entreprises, du fait que l’Etat,
par ces prélèvements obligatoires, ponctionnait une partie importante de
l’épargne.

Toutes ces critiques ont conduit à l’idée qu’il serait plus efficace de substituer
aux politiques keynésiennes (politiques qui encouragent la demande, la
consommation) des politiques qui à l’inverse devraient soutenir la production
(c'est-à-dire l’entreprise). Par conséquent, le clivage s’est produit entre les
partisans d’une politique de soutien à la consommation et ceux d’une

17
L2

politique de soutien à la production. Ce clivage recoupe les partisans d’un


Etat interventionniste opposés aux partisans d’un Etat non interventionniste.
Ces clivages se sont exprimés d’un point de vue théorique comme d’un point de
vue pratique par un rejet des théories keynésiennes et par un retour aux
théories libérales classiques.

II – Le retour aux théories libérales classiques

A partir de la seconde moitié des années 1970 s’est produit un regain d’intérêt
pour les théories libérales classiques et néoclassiques du XIXème et du début du
XXème siècle. Ce développement s’est tout d’abord produit aux Etats-Unis avant
de s’étendre à l’ensemble des pays développés, notamment en Europe.
Certaines écoles libérales classiques en perte d’audience deviennent des écoles
prises sérieusement en considération. C’est par exemple le cas de l’école du
« Public choice » qui est née au début des années 1950 et s’est
considérablement développée à partir de la seconde moitié des années 1970.
D’autres écoles sont nées dans le courant des années 1970 et s’enracinent dans
le courant du libéralisme économique classique. Elles se reconnaissent toutes un
maitre à penser, prix Nobel d’économie 1974, Frédéric Hayek.

A – Frédéric Hayek

Hayek était à la fois un juriste, un politiste et un économiste, l’un des fondateurs


de l’école de Vienne. Il est né à Vienne en 1899 et est décédé en 1992. En 1924,
il fonde le Cercle de Vienne ; il s'agit là d’un groupe de réflexion qui réunit des
économistes autrichiens. Se développe ainsi une école libérale classique que l’on
va appeler l’Ecole de Vienne.
Hayek a par ailleurs créé, avec d’autres libéraux classiques, la Société du Mont
Pèlerin, dont l’objectif est de développer les thèses favorables à l’économie de
marché et de combattre les conceptions interventionnistes. Il a enseigné à
l’université de Vienne puis à celle de Chicago, puis à celle de Fribourg et
Salzbourg jusqu’en 1976.

En ce qui concerne ses idées, il s’inscrivait en droite ligne des thèses


développées par Adam Smith et ses successeurs. Il estimait que
l’interventionnisme de l’Etat était particulièrement dangereux non seulement
pour l’économie, mais également pour la liberté individuelle et pour la
démocratie. Il estimait que l’interventionnisme était la source des Etats
totalitaires. Il estimait en outre que les sociétés étaient beaucoup trop
complexes pour prétendre posséder toutes les informations les concernant et
pour prétendre les maîtriser afin de les diriger. Par conséquent, il estimait que les
individus n’avaient aucune prise sur le développement de ces sociétés, qu’ils en
ignoraient le mode de fonctionnement (l’interventionnisme est donc source
d’erreurs).
Selon Hayek, il est inutile et dangereux de vouloir diriger la société car elle est le
produit d’une multitude de relations, elle est très difficile à comprendre, d’autant
plus qu’elle change en permanence. Elle est donc insaisissable. Il est donc
préférable de laisser s’auto organiser la société.

Droit, législation et liberté, Frédéric Hayek, T.3 :


Selon Hayek, « L’inéluctable ignorance de la plupart des données qui entrent
dans l’ordre de la grande société est la racine du problème de tout ordre social,
des millions d’hommes réagissent les uns sur les autres. Chacun ignore la plupart
des faits sur lesquels repose le fonctionnement de la société ».

18
L2

Hayek propose à partir de là une libéralisation totale de la société et même


une disparition de l’Etat et une appropriation du pouvoir par la société
civile, c'est-à-dire par les individus, et notamment en utilisant les
structures associatives.

B – Les écoles néolibérales classiques


1 – L’école libertarienne, ou école libérale-libertaire, ou école anarcho-capitaliste

Cette école est née à la fin des années 1960 par la création d’un parti politique,
le parti libertarien. Il a été créé par des étudiants anarchistes libertaires et par
des étudiants libéraux classiques. Les uns et les autres étaient très opposés aux
théories keynésiennes interventionnistes. Les étudiants libéraux classiques
avaient pour principe qu’il fallait appliquer à la lettre les thèses d’Adam Smith.
Les étudiants anarchistes libertaires appartenaient à un courant anarchiste se
situant dans la lignée d’un des fondateurs du courant anarchiste au XIXème,
Pierre Joseph Proudhon. Il s'agit d’un courant de pensée radicalement anti
étatiste mais néanmoins favorable à la petite entreprise.

Par conséquent, les deux groupes étaient méfiants vis-à-vis de l’Etat, très
individualistes, favorables à la petite entreprise et par ailleurs décentralisateurs.
Cette école va devenir un laboratoire de pensée pour le monde libéral classique.
Les points forts de ces théories sont l’anti étatisme et l’hyper individualisme. Sur
cette base, ils développent les points suivants :
- Une organisation décentralisée de la société. Les associations et les
collectivités locales doivent complètement remplacer l’Etat.
- Les services publics doivent être privatisés et confiés à des entreprises ou
à des associations.
- La petite entreprise doit être aidée car elle est la source du
développement économique.
- Il est indispensable d’opérer une déréglementation radicale et substituer
à cela des contrats entre individus. Autrement dit, le droit doit être produit
par les individus librement à travers leurs conventions.
- Il faut supprimer les impôts. Ils ont pour slogan : « L’impôt c’est le vol ! ».
Aujourd’hui, certains libertariens estiment que l’on peut admettre un impôt sur la
consommation comme la TVA, mais à un taux relativement faible.
- Les frontières doivent être supprimées pour que les échanges
s’effectuent librement.

Pour les libertariens, c’est la liberté de l’individu qui est primordiale. Ils estiment
à la suite de Hayek que la liberté individuelle engendre automatiquement un
ordre idéal. Finalement, le système s’auto organise de manière harmonieuse
lorsque la société est fondée sur le marché économique d’une part, et sur la
société civile d’autre part.

2 – L’école du Public choice, ou école de Virginie

Elle est née dans les années 1950 aux Etats-Unis par deux économistes, Gordon
Tullock et James Buchanan. C’est une école libérale classique qui a la
particularité d’étudier le fonctionnement des institutions politiques et
administratives. Leur démarche intellectuelle consiste à étudier l’administration
et la vie politique à travers le prisme des conceptions libérales classiques dans
l’économie.

19
L2

L’école du Public choice s’intéresse tout particulièrement aux dépenses publiques


et plus précisément à l’utilité des dépenses publiques et à la manière dont
sont prises les décisions les concernant. Cette école étudie les partis politiques,
le système électoral et cela en prenant modèle sur le marché économique. Ils
assimilent la vie politique à un marché ; c’est pourquoi ils s’intéressent
particulièrement au phénomène clientéliste (favoriser les électeurs pour qu’ils
continuent à voter pour une personne déterminée). L’école du Public choice
montre que le clientélisme en politique aboutit à un gaspillage des fonds
publics par des prises de décision en matière de dépenses qui ne se justifient
pas économiquement. L’idée de base est que dans une démocratie, les citoyens
sont des consommateurs qui indiquent leurs choix pour ce qui concernent les
biens publics. Ils indiquent leur choix en votant pour leurs représentants. Or, ces
représentants ont un seul objectif qui est de se faire réélire.

Dès cet instant va se développer une logique de type économique selon laquelle
les élus cherchent à élargir le nombre de leurs électeurs à l’image d’une
entreprise qui cherche à accroitre le nombre de ses clients.
Parallèlement à cela, un principe est posé selon lequel l’électeur se comporte
comme un consommateur sur un marché économique, qu’il agit rationnellement
sur un marché politique et agir rationnellement, selon cette école, signifie agir
selon ses intérêts. Par conséquent, l’électeur votera en fonction des avantages
économiques qu’il pense pouvoir retirer des programmes des partis politiques. Il
s'agit là d’une conception économique gestionnaire de la vie politique et
administrative. Cette école étudie la rationalité des choix qui concernent les
dépenses publiques.

A partir de là, l’école fait un certain nombre de propositions :


- Il faut assouplir l’Etat, le débureaucratiser. Il faut donc l’intégrer aux
mécanismes économiques. Il faut que l’Etat joue le jeu de la concurrence, qu’il
se gère sur le modèle de l’entreprise. De plus, tous les monopoles de service
public doivent être supprimés.
- L’Etat doit se décentraliser. Il faut appliquer un principe que l’on appelle le
principe de subsidiarité, ce qui signifie que les collectivités locales doivent
assumer les fonctions que l’Etat ne parvient plus à assurer (c’est ce qui a
commencé à être fait en France par un partage des compétences entre l’Etat
et les collectivités locales par les lois de décentralisation de 1982 et 1983. Ce
partage des compétences s’est poursuivi par la révision constitutionnelle de
mars 2003).
- Le système électoral doit être réformé car, du fait qu’il est fondé sur un suffrage
majoritaire, il ne permet de donner satisfaction qu’à une partie des électeurs
alors que la dépense publique est supportée par tous les citoyens contribuables.
- Le secteur privé est plus légitime que le secteur public pour gérer les services
publics car, selon l’école du Public choice, lorsque c’est une entreprise privée qui
les gère elle fonctionne avec des fonds qui sont la propriété des dirigeants de
l’entreprise et qui par conséquent sont responsables de leurs erreurs. Ils ajoutent
qu’en revanche, les services publics gérés par l’Etat le sont par des
fonctionnaires qui utilisent l’argent public et qui ne peuvent pas avoir un
sentiment de responsabilité aussi fort qu’un chef d’entreprise.

3 – L’école de la croissance endogène

C’est une école libérale classique née au début des années 1990 aux Etats-Unis.
Son originalité est qu’elle a réalisé une étude pragmatique et scientifique
concernant l’utilité des dépenses publiques.

20
L2

Ces économistes, à la différence des autres économistes libéraux classiques,


estiment que certaines dépenses publiques sont légitimes et sont favorables au
développement économique. Parmi ces économistes, il faut citer Robert Barro et
Aschauer. Ils proposent d’une part une politique sélective en matière de
dépenses publiques ; ils recherchent quelles pourraient être les conditions
favorables à une croissance économique qui serait autoentretenue, c'est-à-dire
une croissance qui ne nécessiterait pas l’action de facteurs extérieurs. Ils sont
pour un impôt neutre.

Politique sélective en matière de dépenses publiques :


Ces économistes cherchent quels sont les moyens pour qu’une croissance
économique soit autoentretenue. Par conséquent, une croissance qui ne soit
pas le fait de facteurs externes. Les recherches de ces économistes ont d’abord
porté sur la manière de stimuler la compétition et la croissance économique par
les dépenses publiques.

A la suite des travaux de Barro, une étude des dépenses publiques sur le long
terme, ils ont émis l’idée qu’il ne fallait pas systématiquement condamner toutes
les dépenses publiques. Ils ont montré que certaines dépenses pouvaient être
favorables au développement économique et qu’il convient d’opérer une
sélection. Ils estiment par exemple que certaines dépenses, qu’ils qualifient de
dépenses d’avenir, sont indispensables au développement futur du système
économique. Il s'agit par exemple des dépenses de recherche et d’éducation. Ils
estiment que les dépenses d’investissement comme les dépenses de
fonctionnement (par exemple les salaires des chercheurs) constituent toutes des
dépenses nécessaires pour l’avenir et profitables au développement économique.
Barro a même démontré en étudiant 98 pays sur une période allant de 1960 à
1985 qu’une relation positive existait entre la progression des dépenses
d’éducation et la croissance du PIB !

L’année dernière marque la première fois que le ministre a utilisé ce terme de


« dépenses d’avenir ».

La réhabilitation de la dépense publique par ces économistes a ouvert un


nouveau champ de réflexion dans le secteur public et a ouvert la voie à la
création de nouveaux concepts en finances publiques. Ces économistes estiment
nécessaire de ne pas dépasser un seuil d’imposition optimal. Les impôts ne
doivent pas peser sur le marché, doivent être proportionnels (qui s’oppose à
progressif), ne prenant pas en compte la capacité contributive des contribuables.

Section 3 : La réforme du système financier public comme source de réforme de


l’Etat

Depuis une trentaine d’années, les Etats développés, puis les Etats en
développement, se sont engagés dans des réformes importantes de la manière
de gérer le secteur public et plus particulièrement de la manière de gérer les
finances publiques. Tous les Etats qui se sont engagés dans cette évolution ont
pris modèle sur les méthodes de gestion utilisées par les entreprises.
Par ailleurs, tous ces Etats sont amenés à libéraliser leur économie, ce qui donne
lieu à des privatisations mais également au développement de la
décentralisation.
Ces évolutions qui s’enracinent à l’origine dans la nécessité de répondre à la
crise économique transforment progressivement l’Etat. Les administrations sont
les premières concernées, mais ce sont également les pouvoirs politiques.

21
L2

I – La réforme des finances des collectivités territoriales et la responsabilisation


des acteurs publics locaux

La responsabilisation des acteurs publics en matière financière, c'est-à-dire


le fait de leur attribuer une certaine autonomie de décision et de gestion,
constitue un élément clé des réformes contemporaines. Cette responsabilisation
financière a d’abord été attribuée en France aux collectivités territoriales. Ce
sont maintenant les gestionnaires de l’Etat, depuis 2006, qui sont concernés. Les
collectivités territoriales, dans les années 1960 étaient considérées comme étant
mineures dans le milieu financier (il leur fallait des autorisations pour emprunter
et pour se servir de ces sommes etc.). Une autonomie financière des collectivités
locales a commencé à se mettre en place dans la seconde moitié des années
1970 par l’attribution d’une certaine autonomie de gestion des fonds mis à leur
disposition (subventions de l’Etat, ou encore prêts qui leur sont accordés).

Par la suite, les collectivités territoriales acquièrent une certaine autonomie


fiscale. On considère aujourd’hui que l’autonomie financière des collectivités
locales est réalisée pour certains lorsqu’elles détiennent au moins une autonomie
de gestion. Pour d’autres, cela suppose non seulement qu’il y ait autonomie de
gestion, mais aussi que les collectivités locales soient également dotées d’une
autonomie fiscale. L’autonomie fiscale s’entend d’une part du fait que les
collectivités locales soient dotées d’impôts propres, et d’autre part de la
possibilité pour ces collectivités de voter les taux de ces impôts (que ce ne soit
pas le Parlement qui vote le taux d’imposition des impôts locaux).

A – L’acte I de la réforme des finances locales


1 – Les premiers pas vers l’autonomie financière

L’autonomie financière des collectivités locales, c'est-à-dire leur


responsabilisation financière, a été marquée par la globalisation de moyens de
financement tels que les subventions et les emprunts. Au lieu d’attribuer aux
collectivités locales des subventions ou des prêts spécifiques, utilisables que
pour une dépense bien définie par l’Etat, on autorise la collectivité à utiliser
librement les fonds mis à sa disposition. On appelle cela une subvention globale.
C’est alors une révolution.

a – L’autonomie de gestion

Elle a commencé avec la globalisation des prêts accordés aux collectivités


locales. Cette globalisation des prêts a été initiée en 1976. Trois institutions
financières, la caisse des dépôts et consignations, les caisses d’épargnes, et la
caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales (qui n’existe plus
aujourd’hui, et est devenue Dexia crédit local), ont proposé, à titre expérimental
d’abord, aux collectivités locales de plus de 10 000 habitants, des prêts globaux.
Cette opération a ensuite été généralisée à partir de 1979 pour les communes
plus petites.
Une loi du 3 janvier 1979 crée une dotation globale pour les collectivités locales
appelée dotation globale de fonctionnement.

Jusqu’en 1979 l’Etat allouait aux collectivités locales des subventions qualifiées
de spécifiques. Il s'agissait de subventions accordées sur la base d’un dossier
fourni par la collectivité locale. Il y était expliqué quel était l’objectif de cette
subvention et l’Etat décidait d’accorder ou non la subvention. S’il l’accordait, elle

22
L2

devait être impérativement affectée au financement de l’opération dans le


dossier. En outre, il existait à l’époque un plan quinquennal qui prévoyait les
équipements et les politiques que l’Etat entendait conduire dans les cinq ans à
venir. Et si les collectivités locales demandaient des subventions pour des
opérations qui figuraient dans le plan, elles avaient plus de chance de les obtenir.
On en a déduit qu’il fallait responsabiliser les collectivités en globalisant les
subventions.
Début d’une autonomie de gestion.

b – Vers l’autonomie fiscale

Dans un premier temps, les collectivités locales se sont vues attribuer des impôts
propres par des lois de 1973, 1974 et 1975. On leur a attribué quatre impôts :
la taxe d’habitation, la taxe foncière sur les propriétés bâties, la taxe foncière sur
les propriétés non bâties et enfin la taxe professionnelle. Il s'agit d’une base
d’autonomie fiscale.

Par la suite, une loi du 10 janvier 1980 leur a accordé la possibilité de voter
librement les taux de ces quatre impôts. De la sorte, les collectivités locales
bénéficient d’un pouvoir fiscal qui leur est délégué par le Parlement. Les
assemblées délibérantes (par exemple le conseil municipal) des collectivités
locales ne détiennent pas pour autant le droit de supprimer un impôt, de créer un
impôt ou de modifier les règles d’imposition de ces impôts locaux. Il ne leur est
délégué que le pouvoir d’en voter les taux.

Depuis la loi du 10 janvier 1980, les collectivités locales peuvent faire varier les
taux d’imposition de la taxe professionnelle qui est un impôt à la charge des
entreprises, de la taxe d’habitation qui est à la charge des personnes qui
occupent un appartement, de la taxe foncière sur les propriétés bâties qui est un
impôt à la charge des propriétaires d’immeubles bâtis et de la taxe foncière sur
les propriétés non bâties qui est à la charge des propriétaires de terrains.

Deux possibilités sont offertes aux collectivités locales pour faire varier ces taux :
- La variation proportionnelle des taux. Elle consiste à faire évoluer les
quatre taux de la même manière chaque année ;
- La variation différenciée des taux. Cela consiste à augmenter ou diminuer
les taux de façon différente pour chacune des taxes.

Cette seconde solution permet beaucoup plus que la première de développer


une politique fiscale.

Le renforcement de l'autonomie financière des collectivités locales :

Des textes importants ont étés pris en 1982 et 1983. Il s'agit des lois de
décentralisation. Ces lois ont pour objectif de développer le pouvoir financier des
collectivités locales. Il faut remarquer que les collectivités locales détenaient déjà
une certaine autonomie de gestion du fait de la globalisation des prêts et des
subventions. Par ailleurs, une certaine autonomie fiscale des collectivités locales
leur avaient été accordée puisqu'elle disposait d'impôts qui leur étaient propres
ainsi que de la possibilité de voter librement le taux de ces impôts. Il s’ensuivit
qu’au début des années 1980, les collectivités territoriales disposaient déjà d'une
certaine autonomie financière.

a – Les grandes caractéristiques de la réforme de la décentralisation de

23
L2

1982/1983

Cette réforme de la décentralisation s'inscrit dans un vaste mouvement de


décentralisation qui s'est produit dans les pays développés à la fin des années
1970 et au début des années 1980. La décentralisation est considérée partout
comme un moyen de sortir de la crise financière de l'Etat qui s'était développé
depuis la 2nde moitié des années 1970. Autrement dit les Etats ont tentés de se
désengager d'un certain nombre de dépenses sur les collectivités locales. Ce
désengagement s'est fait par un transfert de compétence de l'Etat vers les
collectivités locales. Autrement dit, l'Etat ne parvenant plus à assurer certaines
fonctions, il les a confiés aux collectivités locales.

Ce mouvement de décentralisation partait du principe que les collectivités


locales étant plus proche des citoyens, connaissaient mieux leurs besoins, cela
permettait de minimiser les gaspillages.

Par ailleurs l'Etat a également transféré des moyens financiers nouveaux aux
collectivités territoriales, via des impôts et des dotations. Les lois de
décentralisation ont poursuivi le processus d'autonomie financière et ont
notamment instituées une subvention (dotation) globale d'investissement.

A également été institué un contrôle a posteriori des actes des collectivités


locales. On contrôle leur régularité (à la différence du contrôle a priori existant
jusqu'alors).

b – La montée en puissance du pouvoir financier local

Les nouvelles fonctions accordées aux collectivités locales vont se traduire par
une augmentation de leurs dépenses et de leurs recettes et les budgets locaux
(on désigne les dépenses ici) représentent maintenant la moitié du budget de
l'Etat. Les collectivités locales réalisent maintenant les ¾ des équipements
publics civils (non inclus les dépenses de défense). En 1980 les collectivités
locales ne réalisaient que 10% de ces équipements.

Ces collectivités emploient près de 1 800 000 fonctionnaires. La dette des


collectivités locales représente environ 10% de la dette publique locale. C'est à
dire 1200 milliards d'euros.

Les transferts financiers de l'Etat vers les collectivités locales, c'est à dire les
subventions et le transfert d'une part du produit d'impôt d'Etat représente
actuellement plus de 90 milliards d'euros.
Les impôts locaux représentent 5% du PIB (le taux de pression fiscal générale est
à un peu plus de 43%). Ce pouvoir financier local est important.

c – Un pouvoir financier hétérogène

Le pouvoir financier local est constitué par les recettes et les dépenses d'un très
grand nombre de collectivités locales. Il y a un France 36700 communes, 100
départements, 26 régions. A ces collectivités territoriales, il faut ajouter ce que
l'on appelle les « satellites des collectivités territoriales ». Il s'agit d'institutions
auxquelles les collectivités territoriales ont déléguées des pouvoirs, auxquels
elles ont confiées la réalisation de certaines opérations. Par exemple il s'agit
d'associations, il s'agit de sociétés d'économie mixte locale (sociétés dont les
capitaux sont à la fois privés et publics, les capitaux publics étant détenus par les

24
L2

collectivités locales. On appelle maintenant ces institutions des « entreprises


publiques locales »), groupement d'intérêts publics ainsi que des groupements de
communes...

Résultat : certaines collectivités locales peuvent être particulièrement


démembrées lorsqu'elles délèguent une grande partie de leurs compétences à
d'autres institutions.
Cette hétérogénéité engendre de très grandes inégalités entre les collectivités
locales.

Par exemple, sur les 36700 communes, 3200 communes ont moins de 1000
habitants, 1000 communes ont moins de 50 habitants. Cela pose des problèmes
de financement.

Pour les départements c'est un peu la même chose. La Lozère par exemple, 75
000 habitants, le département du Nord c'est 2 500 000 habitants. Le phénomène
concerne aussi les régions, ainsi la région Ile-de-France c'est 11, 5 millions
d'habitants, la région Rhône-Alpes c'est plus de 6 millions et le Limousin c'est
700 000 habitants.

Actuellement, on réfléchit à la réorganisation des structures territoriales. On


pense à la réforme de la carte territoriale. Une commission de réflexion est en
place actuellement pour y réfléchir.

B – L'acte II de la réforme des financements


1 – La révision constitutionnelle du 28 mars 2003

Il existe un principe constitutionnel important en ce qui concerne les collectivités


territoriales. C'est le principe de libre administration des collectivités territoriales.
Ce principe qui figure à l'article 72 de la Constitution a fait l'objet d'une révision
en mars 2003.

Article 72 avant sa révision : « Les collectivités territoriales s'administrent


librement ».

Le gouvernement dépose un projet de révision en 2003 pour compléter cet


article. Des propositions de révision de cet article ont été faites à plusieurs
reprises mais sans jamais aboutir. C'est le gouvernement Raffarin, qui en 2003,
propose un projet en révision de l'article 72. Ce projet sera adopté.
Les dispositions fondamentales de cette révision figurent à l'article 72-2 de la
Constitution, elles inscrivent la libre administration dans l'autonomie financière
des collectivités locales.

Dispositions essentielles : « La libre administration des collectivités territoriales


est garantie par des ressources dont celles ci [les collectivités] peuvent disposer
librement. Elles peuvent recevoir toute ou partie des impositions de toute nature.
La loi peut les autoriser à en fixer le taux [des impôts] et l'assiette dans les
limites qu'elle détermine ».

En vertu de l'article 34 de la Constitution, c'est le parlement qui détient le


pouvoir législatif et qui détient par conséquent le pouvoir de créer des impôts,
d'en supprimer ou de modifier les règles d'imposition. Mais le parlement à la
possibilité d'autoriser les collectivités territoriales à décider du taux d'imposition
de leurs impôts mais également de décider de la base (l'assiette) de ces impôts.

25
L2

Les collectivités territoriales se sont déjà vu délégué le pouvoir de voter les taux
et cela par la loi du 10 janvier 1980. En revanche aucune loi n'a encore autorisée
les collectivités locales à fixer l'assiette de leurs impôts. Cette révision a ancré le
principe de libre administration dans l'autonomie financière des collectivités
territoriales.
Par ailleurs, la loi de révision constitutionnelle indique également que les recettes
fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales doivent
représenter pour chaque catégorie de collectivités une part déterminante de
leurs ressources.

On s'est longuement interrogé sur la notion de part déterminante. C'est une loi
organique qui a permis de définir plus précisément les modalités d'application de
cette révision constitutionnelle.

2 – La loi organique du 29 juillet 2004

La loi a notamment définie la notion de catégorie de collectivités territoriales


ainsi que la notion de « ressources propres ».

a – Les catégories de collectivités territoriales

L'autonomie financière n'est pas reconnue à chaque collectivité territoriale. Cette


autonomie est garantie à la catégorie à laquelle elles appartiennent. C'est-à-dire
à l'ensemble des communes et à l'ensemble des départements et à l'ensemble
des régions.
Cette autonomie financière se définie par rapport à la notion de ressources
propres.

b – La notion de ressources propres

Les ressources propres comprennent le produit des impôts, le produit des


redevances pour services rendus, le produit des dons et des legs, et également
les produits financiers.
Ne font pas partie des ressources propres, les emprunts et les subventions.

Pour qu'il y ait autonomie financière, il faut que le montant des ressources
propres sur la totalité des ressources excepté l'emprunt. On divise les ressources
propres sur les ressources totales sauf l'emprunt. Il faut que ce rapport ne soit
pas inférieur, pour chaque catégorie de collectivités, au niveau constaté au
moment de la révision constitutionnelle, soit en 2003.
Un rapport est fourni chaque année au parlement. Ce rapport fait apparaître pour
chaque catégorie de collectivités territoriales le ratio des ressources propres sur
l'ensemble des ressources hors emprunt. Si ce ratio est inférieur à celui de 2003,
des dispositions seront prises dans le cadre de la loi finances.

2 – La réforme des finances de l'Etat et la responsabilisation des acteurs publics


nationaux

Cette réforme est instituée par une loi organique « Loi organique relative aux lois
de finances » du 1er août 2001. Cette loi est entrée complètement en application
depuis le 1er janvier 2006. Il faut insister sur le fait que de la même manière que
pour les collectivités territoriale, cette réforme financière ne procède (concerne)
pas de simples ajustements technique. Il s'agit d'une importante réforme de

26
L2

l'Etat. C'est une réforme financière qui a des conséquences très importantes sur
d'une part l'organisation administrative et d'autre part d'une réforme de la
répartition, de la distribution des pouvoirs politiques.

Il ne s'agit pas non plus d'un phénomène franco-français. Ce phénomène


concerne la majorité des Etats au niveau international. Il s'agit par conséquent
d'un processus lourd, d'une tendance lourde dont la caractéristique est celle d'un
rapprochement de la gestion publique vers la gestion privée.
Il s'agit d'adapter les méthodes de gestion utilisée par les entreprises à la gestion
publique. L'objectif est de rendre le secteur public plus performant, de l'inscrire
dans ce que l'on appelle « une culture de la performance ».

A – Les facteurs de la réforme


1 – Un nouvel environnement théorique

Le droit budgétaire et comptable de l'Etat était défini jusqu'à la réforme de 2001


par une ordonnance qui était l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Ce texte
avait été pris dans un contexte général qui était dominé d'un point de vue
théorique par les conceptions keynésiennes.
Ce texte s'est trouvé confronté à partir des années 1990 à un contexte général
qui s'était complètement transformé et particulièrement du point de vue
théorique. Des conceptions libérales classiques avaient remplacées les thèses
keynésiennes, autrement dit on substituait l'idée que le marché économique ne
devait pas subir d'interventions de l'Etat à l'idée que ce marché devait être
régulé par l'Etat.

On est passé ainsi d'une sorte de mystique de l'Etat à une mystique du marché.

2 – La crise financière de l'Etat

Avec la crise économique de la fin des années 1970, les dépenses publiques ont
augmenté et les recettes publiques ont stagné, et l'on s'est alors demandé de
quelle manière on pouvait rééquilibrer les dépenses et les recettes et éviter ainsi
d'emprunter. Dans la mesure où l'on ne pouvait plus augmenter les impôts, on
s'est tourné vers la maîtrise, vers la recherche de la maîtrise des dépenses
publiques. On a cherché les moyens de mieux contrôler l'évolution des dépenses
et par conséquent de mieux gérer le secteur public. On essaye de développer au
sein du secteur public, une culture de gestion.

3 – Les facteurs politiques

Avec la crise des années 1970, l'opinion a changé, les mentalités ont changé et
les contribuables citoyens ont commencé à s'intéresser plus précisément à
l'utilisation qui était faite de l'impôt.
Les parlementaires sensibles aux mouvements d'opinion ont pris le relais et ont
exprimés leur volonté de voir s'accroître leurs pouvoirs financiers. Ils ont
réclamés un pouvoir d'initiative plus important mais également un pouvoir de
contrôle de l'exécution du budget de l'Etat.

4 – Le prolongement du processus de modernisation de la gestion publique locale

Les collectivités locales depuis la fin des années 1970 étaient engagées dans un
processus de responsabilisation en matière financière. Le seul processus s'est
notamment traduit par le fait que certaines collectivités locales ont expérimenté

27
L2

une adaptation des méthodes de gestion de l'entreprise à leur propre gestion.


Elles ont par exemple développé l'analyse financière, elles ont développé des
méthodes de contrôle de gestion en vigueur dans les entreprises.
A noter qu’à partir de 1997, la comptabilité des communes et ensuite celle des
autres collectivités territoriales a été totalement transformée, réformée. Cette
comptabilité a été calquée sur celle des entreprises.

5 – Le poids de l'environnement international

Depuis les années 1980, certains Etats anglo-saxons s'étaient déjà engagés dans
une réforme de leur gestion en prenant modèle sur l'entreprise.
Par ailleurs, des institutions internationales, comme le FMI où encore l'OCDE ont,
à partir de la seconde moitié des années 1980 et surtout à partir des années
1990, proposées des pratiques de gestion fondées sur la transparence des
finances publiques.
Enfin, l'Union Européenne a également incité les Etats à gérer leurs finances de
manière plus « rationnelle ».

B – La philosophie de la réforme

Celle de 2001 :
Elle est caractérisée par le fait que, sont associées 2 logiques : une économique
(logique de gestion) et une logique politique (consiste à accroître les pouvoirs du
parlement). Par conséquent, sont présentes, dans cette réforme, 2 cultures : une
de gestion et une démocratique. C'est l'association de ces 2 cultures qu'il
convient de qualifier de « nouvelle gouvernance financière publique. »

Cette nouvelle gouvernance financière publique a aussi pour objectif de


développer au sein de l'Etat les capacités d'expertise des gestionnaires et de
développer des techniques d'évaluation de leur performance.

1 – L'axe politique : accroissement des pouvoirs du parlement

La réforme (de 2001) a pour objectif d'imposer plus de transparence dans le


système financier public ; il s'agit d'améliorer la lisibilité du budget de l'Etat et de
ses comptes. On a simplifié la présentation du budget.

Cet aspect de lisibilité concerne aussi bien les parlementaires que les citoyens.

Second aspect politique : Le pouvoir d'initiative parlementaire en matière


financière. Cet aspect a été augmenté par un accroissement de leur pouvoir
d'amender le projet de loi de finance présenté par le gouvernement. Ce droit
d'amendement des parlementaires en matière financière a été considérablement
limité par la Constitution de 1958. La réforme de 2001 a accru ce pouvoir
d'amendement.

Troisième aspect : La LOLF (loi organique relative aux lois de finances de 2001)
institue au profit du parlement la possibilité de contrôler l'exécution du budget.

2 – L'axe économique

Il consiste à moderniser la gestion publique, la gestion de l'Etat. A partir du


principe que 2 éléments sont essentiels pour bien gérer. D'une part, il est
indispensable que les budgets et les comptes publics soient transparents. On ne

28
L2

peut pas gérer efficacement dans l'opacité. Cet objectif de transparence est aussi
un objectif politique.

Egalement, il y a la performance. La LOLF institutionnalise le contrôle de gestion


et fait du critère de performance un critère de bonne gestion. L'action des
gestionnaires sera évaluée sur la base d'indicateurs que l'on appelle des
indicateurs de résultats ou encore indicateurs de performance.

Par conséquent, on généralise au sein du secteur public une responsabilisation


des acteurs. Cette responsabilisation consiste à leur donner une large liberté
pour atteindre les objectifs qui leur on été fixé. En contrepartie, un contrôle a
posteriori est mis en place. Il consiste à vérifier si les résultats, les objectifs ont
bien été atteints.

C – Les acteurs à l'origine de la réforme

Cette réforme relève à l'origine d'une initiative parlementaire. Ce sont les acteurs
politiques qui sont les initiateurs de cette réforme. Ce sont ensuite les
administrations financières qui ont été concernées et qui ont eu en charge de
construire très concrètement l'architecture de la réforme. Ces mécanismes dans
un deuxième temps concernent toutes les administrations publiques.

A la différence de ce qui s'était passé autrefois, l'initiative de la réforme est


venue du parlement ; autrefois les textes importants en matière financière ont
tous été le produit de l'exécutif. Le déclenchement du processus de réforme s'est
fait en 1998 à l'initiative du président de l'assemblée nationale (Laurent Fabius)
qui a institué un groupe de travail chargé de réfléchir sur l'efficacité de la
dépense publique. Le rapporteur de ce groupe de travail était Didier Migaud
(actuellement président de la commission finances de l'AN). Le 16 mars 2000, le
1er ministre, Lionel Jospin, dans une intervention à la TV explique qu'il faut
réformer l'ordonnance du 2 janvier 1959.

Le 11 juillet 2000, Didier Migaud dépose une proposition de loi visant à réformer
l'ordonnance de 1959. Une commission spéciale chargée d'examiner cette
proposition est installée le 19 octobre 2000 par le président de l’Assemblée
Nationale. Le rapporteur de cette commission est Didier Migaud.

De son coté, la commission des finances du Sénat alors présidée par le sénateur
Alain Lambert (UMP) se place dans une position constructive. Le Sénat ne dépose
pas de texte concurrent à celui de l’Assemblée Nationale. Il se contente de
proposer des modifications qui sont discutées par les 2 commissions du Sénat et
de l’Assemblée Nationale. C'est cette attitude qui va permettre que la réforme
soit adoptée.

Ensuite, viens la mise en œuvre de la réforme. Cette mise en œuvre a conduit à


créer une administration spéciale au sein du ministère des finances. Cette
administration s'appelait la « direction de la réforme budgétaire ». Elle a été
supprimée le 1er janvier 2006 lorsqu'a été mise en place dans sa totalité la
réforme budgétaire.
La direction de la réforme budgétaire est remplacée par l'actuelle direction
générale de la modernisation de l'Etat. Cette direction se partage maintenant le
pilotage, la mise en œuvre, de la réforme budgétaire avec une autre
administration qui est la direction du budget.

29
L2

D – La nouvelle présentation du budget ou la nouvelle architecture budgétaire

Elle est en vigueur depuis le budget pour 2006. La présentation actuelle se fait
sous la forme d’objectifs. Il existe des objectifs majeurs appelés des missions,
comme par exemple la mission culture, la mission action extérieure de l’Etat. Ces
missions représentent les grandes politiques publiques décidées par l’Etat. Pour
le projet de loi de finances pour 2009 (projet de budget en réalité), quarante-sept
missions ont été prévues. Les missions sont généralement au nombre d’environ
cinquante.
Ces grands objectifs, les missions, sont ensuite déclinés en sous-objectifs qu’on
appelle des programmes. Pour le budget 2009 il est prévu cent soixante-dix
programmes. Ensuite, les programmes sont eux-mêmes divisés en sous-objectifs
qu’on appelle des actions, il en est prévu cinq cent soixante-dix-neuf.

Cette nouvelle architecture procède de ce que l’on appelle une logique de


résultats. Elle consiste, d’une part, à présenter le budget sous la forme de
résultats à atteindre et, d’autre part, d’évaluer si ces résultats ont bien été
atteints.
Cette conception est différente à celle en vigueur antérieurement à 2005 et qui
consistait simplement à attribuer des moyens aux administrations pour qu’elles
puissent fonctionner. On qualifie ce dernier dispositif de logique de moyens.
Par conséquent, alors que jusqu’en 2005 le Parlement adoptait un budget de
moyens, il adopte maintenant un budget de résultats.

Deuxième sous partie : Les finances publiques et la prise de décision


politique

Chapitre 1 : L’élaboration et l’adoption du budget de l’Etat, la prise de


décision budgétaire

Le processus de prise de décision budgétaire est à la fois technique et politique


et fait en outre intervenir de nombreux acteurs. Chacun de ces acteurs poursuit
sa propre logique, ses propres objectifs. Par ailleurs, il faut remarquer que
pendant ces trente dernières années, les procédures d’élaboration et d’adoption
du budget de l’Etat se sont considérablement transformées. On a notamment
décloisonné les rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Ces
deux pouvoirs qui étaient autrefois totalement séparés au cours du processus
de préparation du budget puis de son adoption, ont été récemment associés et
notamment en ce qui concerne l’élaboration du budget. De plus, les budgets
s’inscrivent dorénavant dans une logique stratégique.

Section 1 : L’élaboration de la loi de finance

La préparation du budget est un processus tout à fait pragmatique qui évolue


selon les circonstances. Les textes, et notamment la LOLF, sont peu prolixes en
ce qui concerne la préparation du budget.
L’article 38 de la LOLF (loi organique relative à la loi de finances d’août 2001)
dispose que « sous l’autorité du Premier ministre, le ministre chargé des finances
prépare les projets de loi qui sont délibérés en Conseil des ministres ». Par
conséquent, c’est l’exécutif qui prépare le budget. On peut distinguer, dans
l’élaboration de la loi de finance, quatre phases essentielles.

- Une phase de détermination d’une stratégie budgétaire cohérente dans un


cadre pluriannuel (cela n’est valable que depuis 2009) ;

30
L2

- Une phase de définition d’une discipline budgétaire et de perspective par le


dialogue et la collégialité, notamment entre ministères ;
- Une phase de règlement des conflits entre ministères par un arbitrage
politique ;
- La mise au point définitive du projet de budget (pas de budget tant que le projet
n’est pas adopté par le Parlement), qui sera comme tout projet de loi soumis
préalablement à l’examen du Conseil d'Etat.

I – Les institutions et les procédures d’aide à la décision

Il existe des procédures techniques, mais également des acteurs politiques ou


sociaux.

A – L’aide technique à la décision

Elle relève tout d’abord des administrations financières mais également d’un
comité interministériel.

1 – Les administrations financières

N.B : Les administrations financières sont des administrations qui appartiennent


au ministère des finances. Les administrations dont il va être question
appartiennent au ministère du budget, des comptes publics et de la fonction
publique.

La préparation du budget fait l’objet d’une série de mises au point successives.


Dans ce processus, une administration financière tient une place particulière ; il
s'agit de la Direction du budget. La Direction du budget n’est pas seule, et est
aidée par d’autres administrations financières.

a – La Direction du budget

Le ministère des finances fait un travail de prévision qui relève de la Direction du


budget. Cette Direction comporte des effectifs limités (environ trois cent
personnes). Cependant, il s'agit de l’une des administrations les plus stratégiques
de ce ministère. Sa fonction est d’autant plus importante qu’en dehors de la
préparation du budget de l’Etat, elle participe également à la préparation de la
loi de financement de la sécurité sociale.

N.B : Rappelons qu’il existe trois catégories au sein des finances publiques. Les
finances de l’Etat, les finances de la sécurité sociale et celles de collectivités
territoriales.

Par ailleurs, la Direction du budget a également en charge la mise en application


de la LOLF ainsi que de toutes les mesures qui s’en sont suivies. En ce qui
concerne l’élaboration de la loi de finance, la Direction du budget doit d’abord
faire des estimations de dépenses et de recettes et doit faire une projection qui
s’inscrit dans la programmation pluriannuelle qui doit être transmise chaque
année à la Commission européenne dans le cadre de ce qu’on appelle le Pacte
de stabilité et de croissance. Par ailleurs, la Direction du budget effectue
également une analyse rétrospective, c'est-à-dire une analyse des résultats
précédemment obtenus. Elle évalue si les objectifs qui avaient été fixés ont été
ou non atteints. Elle prépare enfin un budget à moyen terme, c'est-à-dire sur
trois ans, et cela depuis la préparation de la loi de finance pour 2009.

31
L2

Toutes ces opérations sont délicates car au moment où elles sont effectuées on
ne connaît pas nécessairement de manière exacte les dépenses et les recettes à
venir. On ne peut faire que des estimations. Or, ces estimations sont
susceptibles d’être remises en question par un changement de
conjoncture économique. Pour établir ces estimations, on s’appuie notamment
sur une évaluation du taux de croissance pour l’année à venir. Or, et c’est le cas
aujourd’hui, il arrive que ce taux doive être réévalué à la baise.

Par exemple, le projet de loi de finance pour 2009 était bâti sur un taux de
croissance de 1,5%. Cependant, il s’avère que ce taux devrait être de l’ordre de
0,1%.

D’une manière générale, si les estimations ne sont pas exactes, c’est tout le
projet de budget ainsi que tout le raisonnement budgétaire qui s’écroule dans un
atroce fracas et se révèle inexact. On situe en effet le projet de budget dans un
ensemble d’hypothèses économiques comme par exemple le taux de croissance
mais aussi les taux d’intérêts bancaires ou encore l’inflation. Toutes ces données
économiques sont fournies à la Direction du budget par une autre administration
financière qui s’appelle la Direction du Trésor et de la politique
économique.

b – Les autres administrations financières

En dehors de la Direction du Trésor et de la politique économique, la Direction du


budget se fait aider par d’autres administrations financières. Elle reçoit par
exemple des informations de la Direction générale des finances publiques
qui lui fournit des données sur la fiscalité. La DGFIP est une administration fiscale
qui assoit et recouvre les impôts. Elle reçoit également une aide de la Direction
générale de la modernisation de l’Etat ou encore de la Direction de l’institut
national des statistiques et études économiques.

2 – Le Comité interministériel d’audit des programmes (CIAP)

Le CIAP a pour fonction de vérifier pour le compte du gouvernement si les


informations qui sont jointes au projet de loi de finance sont pertinentes. Il
analyse notamment la pertinence des programmes et des indicateurs de
résultats qui leur sont associés et produit un rapport et donne un avis pour les
programmes des différents ministères.

Le rapport et l’avis sont transmis au ministère concerné ainsi qu’aux


commissions des finances de l’Assemblée Nationale et du Sénat, ainsi qu’à la
Cour des comptes. Par ailleurs le CIAP produit un rapport public d’activité tous
les ans. Il contient des recommandations ainsi que les remarques faites par le
Comité interministériel d’audit des programmes sur les programmes qui ont été
audités (évalués).

Le CIAP a été mis en place le 1er octobre 2002, il est composé de quinze
membres qui appartiennent tous à des corps d’inspection et de contrôle des
différents ministères. Enfin, le CIAP est présidé par un inspecteur général des
finances.

B – L’aide politique et sociale à la décision


1 – Le débat d’orientation budgétaire au Parlement

32
L2

Le débat d’orientation budgétaire (DOB) est une procédure consistant pour le


gouvernement à consulter (avis) le parlement sur les orientations envisagées
pour le budget. Cette idée n’est pas nouvelle. Une première expérience d’un tel
débat avait été menée en 1990 par le gouvernement Rocard. Toutefois, il a fallu
attendre 1996 pour que cette expérimentation soit reprise. C’est le
gouvernement Juppé qui l’a utilisé pour la préparation du budget pour 1997. Il n’y
eut pas de débat d’orientation budgétaire l’année suivante du fait des élections.
Le dispositif fut repris en 1998 puis normalisé par la LOLF le 1er août 2001 et mis
en application dès 2003.
Les collectivités territoriales se livraient déjà à cet exercice depuis une loi du 6
février 1992. En effet, les collectivités territoriales doivent organiser un débat
sur les orientations budgétaires dans les deux mois qui précèdent l’examen du
budget par le Conseil de la collectivité.

Le débat d’orientation budgétaire consiste à organiser une consultation du


Parlement sur les choix envisagés par le gouvernement. Cette procédure s’inscrit
dans la volonté de mettre en place un processus homogène ininterrompu de
décision budgétaire, c'est-à-dire d’un processus qui intègre la préparation et
l’adoption du budget et qui de la sorte atténue la séparation en matière
budgétaire entre l’exécutif et le législatif.

Le débat d’orientation budgétaire n’est pas un débat général. Les parlementaires


disposent d’éléments techniques tels qu’un rapport du gouvernement, un rapport
de la cour de comptes, des informations données par les rapporteurs généraux
des commissions des finances de chaque assemblée. Cela permet au parlement
d’avoir une position constructive, c'est-à-dire de faire des propositions au
gouvernement. Le parlement a la possibilité de débattre de la présentation des
programmes proposés par le gouvernement, ce qui permet au parlement de faire
des propositions relatives aux politiques publiques envisagées. D’autre part, le
débat d’orientation budgétaire a lieu au printemps, c'est-à-dire à une période de
folle jovialité où les parlementaires ont la possibilité de se faire une opinion sur
l’architecture budgétaire présentée par le gouvernement, sur les objectifs mais
aussi sur les indicateurs et le Parlement peut ainsi, en donnant son avis,
proposer des modifications qui pourront ou non être retenues par le
gouvernement.

2 – La conférence nationale des finances publiques et le Conseil d’orientation des


finances publiques

Il est essentiel d’avoir à l’esprit qu’il existe trois composantes, et par conséquent
trois types d’acteurs, dans les finances publiques. Il s'agit des finances de l’Etat
d’une part, des finances de la sécurité sociale d’autre part et enfin des finances
des collectivités territoriales. La maîtrise des finances publiques suppose de
concevoir de manière intégrée ces trois catégories. On essaie depuis ces
dernières années d’instituer un réseau composé des trois catégories d’acteurs
concernés. On a mis en place une institution paritaire dont l’objectif est de
réguler par la concertation les dépenses publiques. En effet, a été lancé le 11
janvier 2006, par le Premier ministre, ce que l’on appelle la Conférence
nationale des finances publiques. Cette institution est régie par un décret du
5 mai 2006. Elle réunit chaque année les représentants des trois grandes
composantes des finances publiques. L’objectif est de proposer les moyens de
maitriser les dépenses publiques et notamment la dette publique.

33
L2

A cette institution s’ajoute le Conseil d’orientation des finances publiques. Il


est placé auprès du Premier ministre et est composé des ministres chargés de
l’économie et des finances, du budget, de la sécurité sociale, et des relations
avec les collectivités territoriales. S’ajoutent à ces personnes des élus nationaux
(députés, sénateurs), locaux, ainsi que des représentants des organismes de
sécurité sociale. La fonction de ce conseil consiste à analyser la situation des
finances publiques, de proposer des solutions pour les maitriser, et de préparer
les travaux de la Conférence nationale des finances publiques. Ce Conseil remet
ainsi chaque année au Premier ministre, après l’adoption de la loi de finance de
l’Etat, et après l’adoption de la loi de financement de la sécurité sociale, un
rapport qui est rendu public.

Avec ces institutions on est en présence d’un embryon de l’institution future de


régulation des finances publiques, d’une mise en cohérence des décisions prises
par chaque catégorie d’acteurs

II – Les différentes étapes de la préparation du budget de l’Etat

Ce qui caractérise la préparation du budget de l’Etat c’est d’une part une


conception stratégique et d’autre part la volonté d’associer les différents acteurs.

A – La phase de détermination d’une stratégie budgétaire dans un cadre


pluriannuel

Dès le mois de décembre de l’année N-1 (décembre 2009 pour 2011 par
exemple) ont lieu des échanges entre la direction du budget et les ministères au
sujet des orientations de l’année N+1.
Ces orientations sont présentées à un collège des directeurs financiers de l’Etat.
Ensuite, le coup d’envoi est donné par le pouvoir politique. Le Premier ministre
adresse à chaque ministre un document appelé « lettre de cadrage » (pour la
préparation du budget 2009, cette lettre a été envoyée aux ministres le 11
février 2008).

Cette lettre de cadrage fixe le cadre de la mise en œuvre d’un budget


pluriannuel. Elle indique aux ministres à qui elle a été envoyée les normes qu’ils
doivent respecter en matière de dépenses. Autrement dit, cette lettre donne des
instructions à chaque ministre pour élaborer son budget. Par exemple, pour la
préparation du budget 2009 la lettre impose aux ministres une évolution de leurs
dépenses qui ne doit pas dépasser le taux d’inflation. Le taux retenu pour 2009 a
été de 2%. De février à mai ont lieu des réunions qui ont pour objectif de
déterminer ce que l’on appelle les perspectives budgétaires à moyen terme,
c'est-à-dire les économies mais aussi les réformes qui doivent être réalisées sur
les trois années à venir.

1 – Le cadre général de la stratégie budgétaire

La stratégie budgétaire est organisée autour de deux dispositifs. D’une part la


révision générale des politiques publiques, et d’autre part la
programmation budgétaire pluriannuelle.

a – La révision générale des politiques publiques (RGPP)

Elle consiste à mettre à plat le fonctionnement de l’ensemble du secteur public.


C’est un dispositif qui a été présenté en Conseil des ministres par le Premier

34
L2

ministre le 20 juin 2007 et qui a été officiellement lancé le 10 juillet 2007. La


RGPP consiste à faire un travail d’audit (évaluation) des politiques publiques et
de leur mise en œuvre par les différents ministères. C’est un dispositif qui existe
depuis de nombreuses années dans certains pays.

L’objectif est de rationaliser l’action administrative et de faire des économies. Par


exemple, en 1993, le Canada était confronté à un déficit d’environ 6% de son
PIB, sa dette était de 70% du PIB. La décision a alors été prise de ramener ce
déficit à 3% en trois ans. Le Canada a donc mis en œuvre, en 1994, une révision
générale de ses dépenses publiques et tous les programmes budgétaires ont
été évalués, audités. Des mesures furent prises et la dette fut ramenée en 1998
à 65% du PIB. Les dépenses ont diminué de 17.000.000.000 de dollars. Le
Royaume-Uni s’est engagé dans une même pratique en 1998.

Le dispositif de pilotage de la RGPP se caractérise par une très forte


implication des décideurs politiques. En effet, la RGPP est pilotée par un
Conseil de modernisation des politiques publiques. Ce conseil est présidé
par le président de la République et est composé de l’ensemble des ministres. Ce
conseil décide des réformes qui doivent être mises en œuvre. Une autre
caractéristique réside dans le fait que le travail d’expertise, d’audit, est réalisé
par des études composées d’experts publics et d’experts privés. En ce qui
concerne ces experts publics, il s'agit de hauts fonctionnaires qui appartiennent à
des corps d’inspection. Du côté du secteur privé, on fait appel à des consultants,
c'est-à-dire à des cabinets privés.

On peut encore ajouter que les équipes présentent leurs résultats à un comité
de suivi de la RGPP. La présence des décideurs politiques est également très
forte dans ce comité. En effet, le comité est coprésidé par le secrétaire général
de l’Elysée et par le directeur de cabinet du Premier ministre. Sont membres de
ce comité, le ministre du budget, le secrétaire d’Etat à la prospective et à
l’évaluation des politiques publiques, sont également membres les ministres
concernés par les comptes publics, les rapporteurs généraux de la commission
des finances de chacune des assemblées. En font également partie le receveur
général des finances et le président du conseil d’administration de la banque BNP
Paribas (car il a été l’auteur d’un rapport sensationnel sur la dette publique).

En plus de cela, les équipes qui auditent bénéficient du soutien de la Direction du


budget, de la Direction générale de la modernisation de l’Etat et également du
cabinet du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Une première réunion du Conseil de modernisation s’est tenue le 12 décembre


2007. Elle a donné lieu à un examen des scenarii possibles pour transformer les
politiques publiques. Une seconde réunion a eu lieu le 4 avril 2008 au cours de
laquelle ont été prises des décisions de réorganisation des administrations à
réaliser sur la période 2009-2111. Une troisième réunion de ce Conseil s’est
tenue le 11 juin 2008. Au total, ce sont plus de 300 décisions de réorganisation
qui ont été prises qui concernent les missions écologiques, justice, agriculture,
culture recherche et enseignement supérieur, etc.

On prévoit de réorganiser cela sur trois années. On est donc déjà dans le cadre
d’une organisation pluriannuelle. Il faut de plus relier la RGPP qui a pour objectif
de faire des économies avec la programmation pluriannuelle. La RGPP est en
relation directe avec la mise en place, depuis le projet de budget pour 2009,
d’une programmation budgétaire pluriannuelle.

35
L2

b – La programmation budgétaire pluriannuelle

Cf. également Chapitre IV de la deuxième sous-partie de la deuxième partie.


La programmation budgétaire pluriannuelle a été officiellement annoncée par le
président de la République le 12 décembre 2007 lors d’un Conseil de
modernisation des politiques publiques. Cette programmation a été mise en
œuvre la première fois lors de l’élaboration du budget pour 2009. C’est une
programmation sur trois ans. Cette programmation ne remet pas en cause un
principe de base du droit budgétaire de l’annualité budgétaire. Cela signifie que
des lois de finance continueront à être adoptées chaque année. Simplement, ces
lois de finance annuelles s’inscrivent maintenant dans une programmation
pluriannuelle de trois ans.

2 – Les conférences performances

Les réunions qualifiées de conférences performances ont lieu à la fin du mois de


mars. Elles regroupent les services de différents ministères. Y participe
également la direction du budget. L’objectif de ces conférences est de
déterminer des objectifs et des indicateurs de résultat (appelés également
« indicateurs de performance ») pour le prochain budget. Ces objectifs et
indicateurs seront transmis aux parlementaires qui en disposeront au moment
du débat d’orientation budgétaire (juin).

3 – Les conférences de budgétisation

Au mois d’avril ou de mai, après que des décisions aient été prises dans le cadre
de la révision générale des politiques publiques (RGPP), se tiennent des réunions
appelées conférences de budgétisation. Y participent la direction du budget et les
représentants des différents ministères. Ces réunions ont pour objet d’examiner
les demandes de crédits et les demandes d’effectifs faites par les ministères.

B – Les arbitrages politiques


1 – Les réunions de restitution

A la suite des différentes conférences, le ministre du budget, des comptes publics


et de la fonction publique organise des réunions appelées réunions de
restitution qui ont lieu avec chaque ministre. L’objectif est d’étudier
l’ensemble des propositions et d’arbitrer les différents pouvant exister
entre les ministres et la direction du budget.
Les arbitrages sont ensuite rendus par le Premier ministre.
Une fois ce travail d’élaboration du budget et de discussion autour des
problèmes, les ministres vont recevoir une « lettre-plafond ».

2 – Les lettres-plafonds

A la fin du mois de juin, dans la première quinzaine de juillet, le Premier ministre


adresse à chaque ministre une lettre qui, d’une part, les plafonds de crédit du
ministère et, d’autre part, les réformes structurelles qui doivent être effectuées
par le ministère en question.

C – La finalisation du projet de loi de finance

Le projet de loi de finance va être finalisé jusqu’à la fin du mois de septembre. Il

36
L2

va être soumis en septembre au Conseil des ministres. Une fois le projet adopté
par le Conseil des ministres, il est transmis à l’Assemblée Nationale.
Cette transmission doit se faire au plus tard le 1er mardi d’octobre.

Section 2 : L’adoption de la loi de finances

C’est le parlement qui discute puis adopte le projet de loi de finances.

I – L’examen préalable du projet par les commissions des finances

Le projet de loi de finance est d’abord examiné par les commissions de finances
de chacune des assemblées. Le rapporteur général de chaque commission
produit un rapport sur ce projet. Par ailleurs, des rapporteurs appelés
« rapporteurs spéciaux » produisent des rapports détaillés sur les différentes
catégories de dépenses.
Les commissions des finances facilitent donc le travail des assemblées.

II – La discussion et l’adoption du budget


A – Les délais
1 – La procédure de droit commun

Les délais sont fixés par l’article 47 de la Constitution de 1958 et par les articles
40 et 45 de la LOLF du 1er août 2001. Le projet de loi de finance doit être déposé
sur le bureau de l’Assemblée Nationale au plus tard le 1er mardi d’octobre. A
partir de là, le Parlement dispose d’un délai de soixante-dix jours pour adopter le
budget. L’Assemblée Nationale dispose de quarante jours pour examiner le projet
en première lecture. Si elle ne respecte pas ce délai, le gouvernement à la
possibilité de saisir le Sénat du texte initial (avec éventuellement les
amendements déjà votés). Dans ce cas là, le Sénat devra statuer dans un délai
de quinze jours.
Incidemment, si les délais sont respectés par l’Assemblée Nationale, le Sénat
dispose de vingt jours en première lecture. Ensuite, c’est la navette normale qui
s’effectue.

2 – Les procédures particulières

Les procédures d’urgence.


La procédure d’urgence de l’article 45 de la Constitution peut être utilisée. Cette
procédure est de droit lorsque le texte n’a pas pu être adopté après deux
lectures par chaque assemblée.
Le Premier ministre demande la réunion d’une commission mixte paritaire, etc.
Lorsque le projet de loi de finance n’a pas été déposé en temps utile, le
gouvernement demande d’urgence au Parlement l’autorisation de percevoir les
impôts (article 47 de la Constitution).

B – Le déroulement de la discussion

L’examen du projet de loi de finance en séance publique se fait dans un ordre


précis.

1 – L’ordre de priorité : l’examen des deux parties de la loi de finance

Le projet de loi de finance comprend deux parties. D’une part les recettes, et
d’autre part les dépenses. L’article 42 de la LOLF prévoit que la deuxième partie

37
L2

de la loi de finance ne peut être mise en discussion si la première partie n’a pas
préalablement été adoptée.

2 – L’exercice du droit d’amendement

Le droit d’amender le projet de loi de finance soumis au Parlement par le


gouvernement est excessivement réduit. Effectivement, selon l’article 40 de la
Constitution, les amendements ne sont pas recevables lorsque leur
adoption aurait pour conséquence une diminution des ressources ou
une aggravation des charges.

Un compromis a alors été prévu dans le cadre de la LOLF. La loi organique


relative aux lois de finance du 1er août 2001 a permis une extension du droit
d’amendement des parlementaires. Elle a permis aux parlementaires de modifier
le projet du gouvernement sans pour autant augmenter les crédits prévus dans
ce projet.

La structure actuelle du budget de l’Etat se présente sous la forme de missions


qui sont des objectifs généraux et qui représentent les politiques publiques
qu’entend mener l’Etat. Le projet de loi de finance pour 2009 prévoit quarante-
sept missions. Elles sont ensuite déclinées en cent soixante-dix programmes,
eux-mêmes divisés en six-cents soixante-dix-neuf sous-objectifs appelés actions.

Les parlementaires doivent appliquer strictement l’article 40 au niveau des


missions, ce qui signifie que le plafond de crédit de la mission ne peut pas
être augmenté. Néanmoins, les parlementaires ont dorénavant la possibilité de
modifier les programmes à l’intérieur d’une mission. Ils ont la possibilité de
supprimer un problème et d’en transférer les crédits sur les autres programmes à
l’intérieur de la même mission ou de créer un nouveau programme. Ils ont
également la possibilité de transférer les crédits d’un programme vers un ou
plusieurs autres programmes.

Les parlementaires peuvent choisir de répartir autrement les crédits entre


programmes, mais ils ne peuvent jamais dépasser le montant de crédit attribué à
la mission. Une mission doit comporter au moins deux programmes, il faut donc
que les parlementaires laissent deux programmes.

Le président de la commission des finances du Sénat et celui de l’Assemblée


Nationale ont publié au printemps, dans le journal Le Monde, un article dans
lequel ils estiment que l’article 40 de la Constitution pourrait faire l’objet d’une
révision allant dans le sens d’une plus grande liberté des parlementaires en
matière d’amendement du projet de loi de finance.

Chapitre 2 : Le contrôle et l’évaluation de l’exécution des budgets


publics

Section 1 : Les contrôles administratifs et juridictionnels de l’exécution des


budgets publics

I – Le principe de la séparation ordonnateur comptable

La séparation entre l’ordonnateur et le comptable constitue un principe essentiel


du droit public financier en France. On sépare en effet la personne qui engage
une dépense et qui donne l’ordre de payer la dépense de celle qui effectue

38
L2

matériellement le paiement de la dépense. La première personne s’appelle


l’ordonnateur et la seconde le comptable. Ce principe a été mis en place pour
mieux contrôler l’utilisation de l’argent public.

Il s’applique également en ce qui concerne les recettes. En effet, celui qui donne
l’ordre de percevoir une recette n’est pas le même que celui qui encaisse
matériellement la recette.
On sépare par conséquent celui qui ordonne et celui qui exécute.

Les ordonnateurs ne constituent pas un corps particuliers de fonctionnaires. Il


peut s’agir de fonctionnaires mais, dans la majorité des cas, ce sont des
décideurs politiques comme par exemple les ministres ou encore les présidents
des assemblées.
Il existe différentes catégories d’ordonnateurs.

1 – Les ordonnateurs principaux

Ils sont pour le budget de l’Etat. C’est le cas par exemple des ministres pour leur
ministère, le président du Conseil général pour son département ou encore le
maire pour sa commune.

2 – Les ordonnateurs secondaires

Les ordonnateurs principaux n’ont pas la possibilité d’exécuter toutes les


opérations qui figurent à leur budget. Ils se font aider par des ordonnateurs
secondaires. C’est le cas par exemple du préfet, qui est ordonnateur secondaire
pour ce qui concerne le budget de l’Etat au niveau du département pour les
administrations déconcentrées.

3 – Les ordonnateurs délégués

Ce sont des fonctionnaires auxquels les ordonnateurs principaux ou secondaires


ont accordé une délégation de signature.

Les comptables publics ne sont pas des décideurs, ils exécutent des décisions qui
sont prises par les ordonnateurs. Ils ont une double fonction. Une fonction de
contrôle tout d’abord. En effet, l’ordre donné par l’ordonnateur fait l’objet d’un
contrôle de régularité très minutieux de la part du comptable public et si le
comptable constate que l’ordre est irrégulier, il refusera de l’exécuter sinon il
engagerait sa responsabilité propre.

Une fois effectué ce contrôle, le comptable public effectue les opérations de


paiement ou de recouvrement de la recette et enregistre ces opérations en
comptabilité.

Le comptable public encourt un certain nombre de sanctions s’il commet des


irrégularités. Ces sanctions peuvent être pénales en cas de détournement de
fonds, disciplinaires en cas de manquement aux obligations professionnelles, et
pécuniaires en cas d’irrégularité de sa gestion. Par exemple, le comptable peut
être déclaré responsable sur ses biens personnels des sommes manquant dans
sa comptabilité.

N.B : Les comptables publics appartiennent, dans leur grande majorité, à une
administration financière qui fait partie du ministère du budget, des comptes

39
L2

publics et de la fonction publique, qui s’appelle la Direction générale des


finances publiques. Ils opèrent un contrôle administratif de base (premier
type de contrôle administratif effectué).

II – Les contrôles administratifs


A – Le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel

Dans le but de rapprocher les comptables publics et les gestionnaires des


administrations des différents ministères, ont été créés des départements
comptables ministériels au sein des ministères. Il s'agit de comptables publics qui
exercent leurs fonctions au sein du ministère. Ils ne se trouvent pas, comme
autrefois, dans un bureau du ministère des finances.
Ces comptables ont pour fonction de tenir la comptabilité du ministère, ce qui
n’était pas tout à fait le cas auparavant.

B – L’inspection générale des finances

L’inspection générale des finances est un corps de hauts fonctionnaires, créé


sous la Restauration. Leur fonction est d’effectuer des contrôles financiers des
comptes de tous les comptables publics. Ils contrôlent également les
comptes d’institutions privées qui bénéficient de subventions
publiques. Une autre de leur fonction consiste dans la production de rapports
concernant l’évaluation des politiques publiques.

C – Le contrôle général, économique et financier

Ce service a été créé pour réaliser trois fonctions.


- Le contrôle de la régularité de l’exécution du budget de l’Etat et contrôle des
entreprises et des organismes liés à l’Etat.
-La mesure de la performance des organismes publics liés au secteur industriel et
commercial. Ils effectuent par exemple des audits des chambres consulaires
(chambres de commerce et d’industrie).
- Le conseil. Ils produisent des études ou des expertises sur des questions
concernant l’industrie, l’artisanat, le commerce et les professions libérales.

III – Les contrôles juridictionnels

Ce sont des contrôles opérés par des juridictions spécialisées.

A – La Cour des Comptes

C’est une institution spécialisée de contrôle (ISC), créée le 16 septembre 1807


par Napoléon Ier. La Cour des Comptes est présidée par un Premier président
choisi par le gouvernement. Elle est composée de chambres spécialisées avec à
leur tête un président de chambre.
Chaque chambre est ensuite composée, dans l’ordre hiérarchique, d’auditeurs,
de conseillers référendaires et de conseillers maitres. La Cour a un parquet
composé d’un procureur général et d’avocats généraux.

Elle a pour fonctions :


- Le contrôle des comptes publics. Comme l’inspection générale des finances
elle contrôle les comptes des comptables publics. La procédure de contrôle est
collégiale et contradictoire.
La comptabilité du comptable est d’abord examinée par un rapporteur. Il en

40
L2

vérifie la régularité et produit un rapport écrit. Ce rapport est ensuite transmis au


procureur général mais également à un conseiller maitre. Ce dernier examine le
rapport et présente un contre-rapport afin de limiter les erreurs. Une fois ce
travail effectué, la Cour prononce un arrêt.

- Le contrôle de gestion. Ce contrôle concerne les ordonnateurs. Il s’agit de


vérifier le bon emploi des fonds publics qu’en font les ordonnateurs, mais il ne
s’agit pas d’un contrôle juridictionnel. Il n’y a donc pas de jugement ; en
revanche, les conclusions du contrôle sont susceptibles de faire l’objet d’une
publication dans le cadre d’un rapport présenté par la Cour.

- La certification de la sincérité des comptes de l’Etat.

La Cour des comptes, sur leur demande, à l’obligation de porter assistance au


Parlement et au gouvernement.

B – La Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF)

La Cour de discipline budgétaire et financière a été créée par une loi du 27


septembre 1948. Sa fonction consiste à sanctionner les irrégularités
commises par les ordonnateurs et à leur infliger des amendes. Elle est
présidée par le Premier président de la Cour des comptes. Elle comprend par
ailleurs un vice-président, qui est le plus souvent le président de la section
finance du Conseil d'Etat, deux conseillers d’Etat et deux conseillers maitres de la
Cour des Comptes.

La fonction du ministère public devant la Cour de discipline budgétaire et


financière est assurée par le Procureur général près la Cour des Comptes.
Les recours en cassation se font devant le Conseil d'Etat. Cette juridiction peut
être saisie par les présidents du Sénat et de l’Assemblée Nationale, le Premier
ministre, le ministre des finances, les ministres concernés et enfin la Cour des
Comptes.

C – Les chambres régionales des comptes

Les chambres régionales des comptes contrôlent les opérations financières des
collectivités locales. Elles ont été créées par la loi du 2 mars 1982. Il existe une
chambre régionale des comptes par région. Elles adoptent une procédure de
contrôle largement similaire à celle de la Cour des Comptes.

Section 2 : Le contrôle de l’exécution du budget de l’Etat par le Parlement

A côté des contrôles de régularité effectués par les administrations et les


institutions spécialisées, le Parlement peut lui aussi contrôler et évaluer les
opérations financières de l’Etat. Il peut le faire de diverses manières.

1 – Le contrôle sur pièce et sur place

Selon l’article 57 de la LOLF, les commissions des finances de l’Assemblée


Nationale et du Sénat ont la possibilité de suivre et de contrôler l’exécution des
lois de finance. Par conséquent, elles peuvent effectuer des contrôles sur pièce
(contrôle des documents) et sur place (déplacement au sein de l’institution) de
l’utilisation de l’argent public, et peuvent procéder à toutes les investigations
qu’elles jugent utiles. Tous les renseignements et les documents doivent leur

41
L2

être fournis. Elles peuvent se faire assister par la Cour des Comptes.

2 – Les auditions

La commission des finances de chaque assemblée a la possibilité d’auditionner


les personnes qu’elles jugent nécessaire d’entendre. Ces personnes ont
l’obligation de se soumettre à l’audition. Elles sont alors déliées du secret
professionnel.

3 – Les questions au gouvernement

Les parlementaires ont la possibilité d’interroger le gouvernement en matière


budgétaire dans le cadre des questions écrites ou orales. D’autre part, en vue de
l’examen du projet de loi de finance, les commissions parlementaires ont la
possibilité d’adresser des questionnaires au gouvernement avant le 10 juillet. Le
gouvernement doit y répondre par écrit au plus tard huit jours après la date
limite de dépôt du projet de loi de finance.

Deuxième partie : Les finances publiques et la bonne gestion

Partout dans le monde, les Etats s’efforcent de moderniser leur gestion


financière, on qualifie ce nouveau phénomène de nouvelle gestion publique. On
parle aussi de « bonne pratique en matière de gestion ». L’objectif poursuivi est
de maîtriser les dépenses publiques et pour ce faire, d’introduire dans la gestion
budgétaire plus de transparence, plus d’efficacité, une meilleure programmation
des dépenses. D’autre part, on prend partout modèle sur les méthodes de
gestion utilisées par les entreprises.
Autrement dit, la gestion publique se rapproche de plus en plus de la
gestion privée. C’est la raison pour laquelle ce que l’on appelle une culture de
gestion se développe dans le secteur public.

Première sous-partie : Les transformations de la gestion publique

La gestion publique se transforme sur la base du principe de la recherche de la


performance.

Chapitre 1 : La culture de la performance, principe de la nouvelle


gestion publique

L’introduction d’une culture de la performance dans le secteur public est une


idée ancienne qui a mis longtemps pour prendre une forme concrète.

Section 1 : Les origines historiques

Cela a débuté aux Etats-Unis et s’est ensuite développé en France.

I – La recherche de la performance aux Etats-Unis

Dès le début du XXème siècle, on a cherché à trouver des moyens pour gérer
plus efficacement le secteur public aux Etats-Unis. Plusieurs commissions se sont
réunies et ont proposé des solutions.

1912 : La commission pour l’économie et l’efficacité. Cette commission,


également appelée « commission Taft », recommandait des changements

42
L2

radicaux dans les méthodes de gestion utilisées par le secteur public. Elle
proposait ce que l’on appelle un budget de programme, c'est-à-dire un budget
organisé en fonction de différents objectifs, de différentes fonctions appelées
programmes. Ces propositions ne purent pas être appliquées.

1929 : La crise de 1929 s’est caractérisée par une augmentation des dépenses
publiques et une diminution des recettes publiques, ce qui a conduit à
s’interroger là encore sur les moyens de maitriser l’évolution des dépenses et
l’on a proposé de considérer le budget de l’Etat comme un instrument de
contrôle de la gestion.

1947 : La commission Hoover. Cette commission va travailler jusqu’en 1949 et


va proposer une refonte complète de la structure des administrations des
ministères afin d’en améliorer le fonctionnement. [Aujourd’hui, la RGPP, révision
générale des politiques publiques, poursuit un objectif similaire] Cette
commission a par ailleurs proposé de modifier la présentation du budget et
d’adopter une présentation sous la forme de programmes.
Enfin, la Commission Hoover qualifie ce type de budget de budget de
performance.

Années 1960 : Au cours des années 1960 on propose d’utiliser des méthodes
pratiquées par les grandes entreprises depuis les années 1920, c'est-à-dire des
budgets de programme. Cela constitue également une conception stratégique de
la gestion. En 1961 l’ancien directeur général de l’usine Ford, Mac Namara,
devient secrétaire d’Etat à la défense aux Etats-Unis. Il décide d’appliquer à son
ministère les méthodes de gestion utilisées par l’usine Ford. Il demande alors à
un groupe d’experts de l’aider à adapter ces méthodes à son ministère.

Ce groupe d’experts propose ce qu’il appelle le planning programing


budgeting system (PPBS). Il s'agit tout d’abord de fixer des objectifs
stratégiques au ministère, c'est-à-dire de proposer une politique à long terme
(planning) ; il s'agit en second lieu de proposer les moyens pour atteindre ces
objectifs (programing) ; et enfin il s'agit de présenter ces moyens sous la forme
d’un budget, d’un programme chiffré des dépenses, d’un regroupement de
ces dépenses par programme (budgeting).
Selon cette méthode, chaque programme est doté d’un responsable devant
atteindre les objectifs qui lui sont fixés. Il est responsable de ses résultats. Les
responsables peuvent être gratifiés ou pénalisés en fonction des résultats qu’ils
ont obtenus.
Par conséquent, un tel budget est qualifié de budget de résultats.

1973 : Une autre commission propose d’insister sur ce qu’on appelle la


reddition des comptes, ce qui signifie que tous les gestionnaires responsables
de programmes doivent rendre des comptes sur les résultats obtenus.
On se trouve placé, dans ce cadre de gestion, dans une logique que l’on qualifie
de logique de résultats ; ce qui signifie que l’on ne se borne pas à attribuer
des moyens (crédits) à une administration, mais que l’on demande à ce que des
résultats soient atteints et que des comptes soient rendus sur ces résultats. On
n’est plus seulement dans une logique qualifiée de logique de moyen (attribuer
des moyens à une administration, sans se soucier des résultats).

II – La recherche de la performance en France

En France, à la fin des années 1960, le gouvernement envoie une mission

43
L2

d’exploration aux Etats-Unis pour examiner et comprendre le PPBS. En 1968, le


gouvernement décide d’appliquer ce PPBS à la gestion des administrations
publiques en France. Une expérimentation est faite au ministère de la défense et
au ministère de l’équipement. Autrement dit, des budgets de programme sont
mis en place, on détermine des objectifs, on détermine également des
indicateurs de résultat qui permettent de savoir si les objectifs ont été ou non
atteints.

Cette nouvelle manière de considérer la gestion publique est alors qualifiée en


France de rationalisation des choix budgétaires (RCB). Les programmes du
budget sont des programmes pluriannuels. La RCB se soldera par un échec et
sera abandonné à la fin des années 1970 car elle est restée cantonnée aux
administrations. Les parlementaires ne s’y sont pas intéressés, à la différence de
la récente réforme budgétaire (LOLF), où ce sont les parlementaires qui ont pris
l’initiative de mettre en place une nouvelle gestion publique pour l’Etat.

Section 2 : les normes internationales et la mondialisation

Depuis le développement de la globalisation de la mondialisation, s'est


développé un phénomène d'harmonisation des normes, des règles financières
publiques au niveau international. Cette harmonisation est principalement due à
des institutions internationales qui proposent des règles de bonne conduite
budgétaire et comptable aux Etats.

I – La mondialisation et la proposition de code de bonne conduite par les


institutions internationales

Ces institutions proposent des normes déjà depuis des années. En 1998 par
exemple le FMI a proposé des règles très construites. L'atmosphère des années
1990 a été marquée par le consensus de Washington.

A – Le consensus de Washington

Ce qu'on appelle le consensus de Washington est une forme d'interprétation du


développement économique international et de la manière de lutter contre la
pauvreté. Ce consensus de Washington fut produit dans un cadre théorique très
marqué par les théories économiques libéral classique (voir supra).

1 – Les caractéristiques du consensus de Washington

Le terme de consensus de Washington a été crée sur la base des propositions


d'un économiste américain nommé John Williamson. Il a voulu qualifier,
déterminer les moyens de réaliser le développement économique. Il a fait
différentes propositions en 1989. Il estimait que ces propositions faisaient
l'unanimité chez les économistes. Il estimait également qu'elles étaient en accord
avec les conceptions du FMI et de la Banque mondiale. C'est pourquoi en 1989, à
Washington, il a proposé une liste de dix recommandations destinées aux pays
dont l'économie était en difficulté. Il a essayé par cela de résumer la position de
la plupart des experts des institutions financières internationales concernant les
moyens à utiliser pour favoriser la croissance et réduire la pauvreté des pays en
développement.

Parmi ces dix prescriptions, plusieurs d'entre elles concernent la discipline


budgétaire (maitrise pour les Etats de leur déficit public, nécessité de produire

44
L2

des budgets en équilibre : faire en sorte que le budget de l'Etat ne pèse pas sur
le fonctionnement du marché économique), il y a aussi la libéralisation des
marchés financiers, commerciaux et une dérèglementation de ces marchés, une
abolition des barrières douanières. Développer les privatisations et protéger la
propriété privée.

2 – La remise en question du consensus de Washington

Les résultats de la mise en œuvre de ces principes n'ont pas étés


particulièrement convaincants. Si les budgets de certains Etats ont pu être
relativement améliorés, l'inflation a dans certain cas diminué mais la pauvreté
n'a pas été réduite.

Un rapport de la commission « croissance et développement » en date du 22 mai


2008 exprime l'idée et se montre partisan d'une autre politique d'aide au
développement. La commission « croissance et développement » est une
commission internationale crée en 2006 et qui est financée par l'Australie, les
Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Banque Mondiale. Elle est présidée par
un libéral classique qui s'appelle Michael Spence. Cette commission est
composée de vingt-et-une personnes : des économistes, des responsables
politiques (chefs d'Etat, ancien chefs d'Etat, ministres, ex ministres,
représentants de l'ONU, représentants de la Commission européenne et
représentants de gouverneur de la banque centrale). Ce rapport conclu « la
principale de nos conclusion est que la croissance indispensable pour faire
reculer la pauvreté et assurer un développement durable réclame un Etat fort ».
La remise en cause du consensus de Washington porte sur les deux aspects
suivants : les spécificités des pays n'ont pas été prises en compte (solutions
beaucoup trop uniformisées), par ailleurs les aspects institutionnels ont été
négligés alors que les institutions juridiques, administratives, politiques sont
indispensables au développement.

La suprématie du marché économique a trop souvent conduit à écarter


l'intervention de l'Etat. Un post-consensus est en train de se décider autour de
plusieurs axes :

Réhabilitation du rôle de l'Etat : On prend conscience qu'il doit investir dans les
infrastructures d'éducation et de santé ; développer la démocratie ; mettre en
place des administrations compétentes ; considérer chaque pays en particulier et
non pas uniformisé les solutions.

C'est à travers « la nouvelle gouvernance financière publique » que se mettent


en place aujourd'hui les réformes budgétaires dans les pays en développement
ou émergents. Cette nouvelle gouvernance financière publique associe une
gouvernance démocratique et une gestion publique rationnelle et efficace.

B – La mondialisation et la définition de standards budgétaires par le Fonds


monétaire international

Sur le plan international, on peut constater le développement d'une culture de


gestion au sein du secteur public. Cette culture de gestion se caractérise par la
recherche d'une plus grande transparence, clarté des comptes publics. L'objectif
général poursuivi par les Etats est de maitriser les dépenses publiques et le FMI
propose des règles de bonnes conduites en matière budgétaire.

45
L2

1 – Le Fonds monétaire et la diffusion d’une culture de gestion

Le FMI est une institution internationale qui a été crée à la fin de la Seconde
guerre mondiale dans le cadre des accords de Bretton Woods. L'objectif qui lui
était donné était de réguler le système monétaire national, de surveiller le
système avant de prévenir les problèmes. Cette régulation du système monétaire
international par le FMI fait parti de ce qu'on appelle la « surveillance
multilatérale internationale ». Le FMI est rattaché à l'ONU en tant qu'institutions
spécialisées. Son rôle est centré sur l'économie militaire et sur l'aide aux pays en
développement. Cela s'est étendu depuis plusieurs années, aux politiques et aux
procédures générales budgétaires. Cette nouvelle compétence s'inscrit dans ce
que l'on qualifie de nouvelle régulation. C'est une nouvelle forme que prend la
surveillance multilatérale internationale. Cela consiste à mettre en place au sein
des Etats ; des dispositifs, des règles standardisées de manière à conduire ces
Etats à se responsabiliser en matière législative. Le PMI incite les Etats à
réorganiser leurs procédures de gestion des fonds publics et principalement à les
rendre plus transparente.

2 – Le code de transparence budgétaire du Fonds monétaire international

Le FMI a publié en 1998, un code de transparence budgétaire. Ce code fut révisé


en 2007 et il présente ce que le FMI considère comme les meilleurs pratiques en
matières budgétaires. L'objectif est de faire en sorte que dans le monde les Etats
se conforment à une discipline budgétaire commune. Autrement dit qu'ils
utilisent des règles de gestions et des principes budgétaires et comptables
voisins voir même identiques. Le FMI ne peut pas imposer ses règles aux Etats. Il
peut seulement leur proposer de s'engager sur cette charte de bonne conduite
en matière budgétaire et d'en transcrire les règles dans leurs législations
financière.

Ce code est complété par un manuel sur la transparence des finances publiques.
Ce code comprend quatre grands principes :

- Une définition claire des fonctions et des responsabilités des


différents acteurs. Il doit y avoir une différence nette entres acteurs et
activités du secteur public et acteur et activités du « secteur privé ». La gestion
des finances publiques doit s'inscrire dans un cadre juridique et institutionnel
clairement définie notamment la répartition des fonctions entre les décideurs et
les gestionnaires doit être parfaitement claire.

- La transparence des procédures budgétaires : Les informations


budgétaires doivent être présentées de la manière la plus claire et notamment
doivent être précisées les objectifs de la politique budgétaire.

- L'accès du public à l'information : Les informations concernant les finances


publiques doivent être accessibles aux citoyens.

- La garantie d'intégrité : C'est un principe qui concerne la qualité des


informations budgétaires qui sont fournies (c'est à dire leur sincérité). Cela fut
introduit par la LOLF du 1er août 2001.

C – Le « Public expenditure and Financial accountability » (PEFA)

Collaboration entre la commission Européenne, la banque mondiale, la France, le

46
L2

RU, la Norvège, la Suisse et le FMI. L'objectif de ce PEFA est d'aider à


l'harmonisation des normes budgétaires des Etats et d'aider à la réforme des
finances publiques des Etats, particulièrement des Etats en développement. Le
PEFA produit des indicateurs de performance concernant les situations
budgétaires des Etats. Ces indicateurs commencent à être utilisés pour évaluer
l'avancée des réformes budgétaires.

D – Les normes comptables proposées par le comité secteur public de la


fédération internationale des comptables (FIC)

Des normes comptables publiques sont proposées aux Etats par un organisme
international (le FIC) qui bénéficie du soutien de la banque mondiale et du FMI.
Cette institution est composée de représentants de différents pays dont la
France, le RU, l'Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande, l'Argentine, le Canada, etc.).
Cette institution propose des normes comptables standard. Et l'idée essentielle
consiste dans la mise en place au sein des Etats d'une comptabilité prenant
modèle sur celle de l'entreprise. La France par exemple, pratique une
comptabilité très proche de l'entreprise depuis la mise en place de la LOLF. Il se
généralise progressivement à travers le monde, une conception commune de la
gestion publique.

II – Le poids des structures régionales internationales sur les transformations des


systèmes financiers publics nationaux

La politique financière publique des Etats est nécessairement limitée lorsque sont
mises en place des zones d'intégration économique et plus encore des zones
d'intégration monétaire comme par exemple l’Union européenne ou encore
l'Union économique et monétaire des pays de l'Afrique de l'ouest (UEMOA).

La question qui se pose est de connaitre le degré d'autonomie dont dispose les
politiques en matière financière.

A – Les normes de l’Union européenne


1 – Une politique financière encadrée par le droit de l’Union économique et
monétaire.

Critères de convergence et le pacte de stabilité.

a – Les critères de convergence

L'autonomie des Etats est réduite en matière financière par l'obligation de


respecter des critères de convergence. Ces critères ont été initialement posés
par le traité de Maastricht du 7 février 1992. Ils ont été ensuite repris dans le
traité instituant la communauté européenne, à l'article 104.

Selon cet article 104, « Les Etats membres évitent les déficit excessifs ». De plus
« La commission surveille l'évolution de la situation budgétaire et du montant de
la dette publique dans les Etats membres ». Elle examine si la discipline
budgétaire a été respectée et cela sur la base de deux critères.

Les deux critères sont :

La limitation des déficits publics. Le rapport entre le déficit public et le


Produit intérieur brut ne doit pas dépasser 3%. On entend par déficit public, les

47
L2

résultats cumulés de l'Etat, des collectivités locales et des organismes


de sécurité sociale. Il ne s'agit pas du seul déficit de l'Etat.
Ce critère fut inséré dans l'article 1 du protocole annexé au traité européen. La
limitation de la dette publique. Le rapport entre la dette publique et le PIB ne doit
pas dépasser de 60% le PIB. La dette publique consiste dans l'addition de la dette
de l'Etat, plus celle des collectivités territoriales et de la sécurité sociale. Le PIB
actuel est de l'ordre de 1900 milliards d'euros.

b – Le pacte de stabilité et de croissance

Les politiques économiques au sein de la zone euro doivent être cohérentes,


coordonnées et les politiques budgétaires qui sont menées par les différents pays
doivent concourir à une consolidation, à un renforcement de la situation des
finances publiques de chacun des Etats. Cela doit permettre à la banque
centrale européenne (BCE) de maintenir des conditions favorables à la vie
économique et financière de la zone euro.

Par exemple, On veut éviter que l'augmentation des déficits publics d'un Etat
provoque des problèmes dans les autres Etats. Cette coordination s'inscrit dans
le cadre de ce qu'on appelle « le pacte de stabilité et de croissance ».

C'est un dispositif qui a renforcé les critères de convergence et la discipline


budgétaire. Le pacte à pour objectif de faire en sorte que les Etats se
rapprochent de l'équilibre budgétaire, voir même dégage un surplus budgétaire.
C'est une résolution du conseil de l'Europe qui a institué ce pacte : résolution
d'Amsterdam du 17 juin 1997. Ce pacte fut précisé par 2 règlements du 7 juillet
1997.

Concernant les modalités de ce pacte : on a décidé l'obligation pour les Etats de


produire chaque année un plan à moyen terme (3 ans) de leurs objectifs
concernant leur solde budgétaire. Ces soldes doivent être proches de l'équilibre
(0% du PIB) voit même excédentaires.

Le pacte comporte plusieurs volets.

Tout d'abord, un volet sur la surveillance des politiques économique, ce


volet prévoit que les Etats doivent produire, présenter chaque année une
programmation budgétaire à moyen terme. Ces programmes doivent afficher un
objectif qui est celui d'un solde budgétaire équilibré ou excédentaire.

Le Conseil des ministres européens peut émettre des recommandations lors de


l'examen de ces programmes, voir même lors du suivi de l'exécution de ceux ci.
Par ailleurs des amendes peuvent être décidées en cas de déficit excessif (une
marge d'appréciation est prévue en cas de circonstances exceptionnelles), si
l'Etat persiste dans son inaction vis à vis de ses déficits

L'exécution de ce plan suppose non seulement que l'Etat mais aussi les
collectivités locales et les organismes de sécurité sociale parviennent à maitriser
leurs dépenses, à réduire leur déficit et par conséquent à réduire leur
endettement.

2 – Les points forts de la logique financière européenne


a – La globalisation des finances publiques

48
L2

La globalisation des finances publiques : Les finances publiques sont conçues de


manière globales (on prend en compte l'ensemble des finances de l'Etat, des
collectivités locales et de la sécurité sociale).

b – Le souci de la qualité de la gestion financière publique

Un principe de bonne gestion financière publique est évoqué à l'article 274 du


TUE. L'objectif de finances publiques bien gérées est central.

c – La transparence budgétaire

Une obligation de transparence figure dans les textes communautaires.

B – Les structures régionales en Afrique

Il existe plusieurs structures régionales en Afrique mais la plus élaborée et aussi


la plus proche (dans sa structure) de l’Union Européenne est l'UEMOA (union
économique et monétaire de l'ouest africain). Crée par un traité du 10 janvier
1994. En font partie, le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte d'Ivoire, Le Sénégal, le
Niger, le Togo, le Mali et la Guinée Bissau. Tous ces Etats ont crée une
communauté sur le modèle de l'UE. Cette institution insiste sur la nécessité
d'harmoniser et de faire converger les politiques budgétaire est fiscales des Etats
qui la composent. Ces Etats doivent parvenir à une réduction de leur déficit
public, ils doivent parvenir à une réduction de la dette publique, il est également
prévu une réduction de la masse salariale de ces Etats et une augmentation du
taux de pression fiscale.

Chapitre 2 : Le management de l’entreprise, un modèle pour la nouvelle


gestion publique

Section 1 : Le modèle du gouvernement de l’entreprise

I – La théorie de l’agence et la conception contractualiste de l’entreprise

Le modèle utilisé est le modèle anglo-saxon de l'Entreprise. Selon la conception


Anglo-saxonne de la gouvernance de l'entreprise. L'entreprise est considérée
comme un lieu où s'établissent des rapports contractuels. Dans cette conception,
le contrat est la base du fonctionnement de l'Entreprise. Tout ce passe comme si
le décideur (patron) et le gestionnaire (employé) s'engagent l'un envers l'autre.
On désigne le gestionnaire (employé) par le qualificatif d'agent. Dans ce
contexte, l'agent est mandaté pour réaliser un objectif, un résultat et dispose
d'une délégation de pouvoir de la part du décideur pour réaliser cet objectif.

Par conséquent, l'agent est relativement autonome. Il est responsabilisé. L'agent


sera jugé sur ses résultats. En fonction de cela il sera soit sanctionné, soit
gratifié. L'agent fait l'objet d'un contrôle d'une évaluation de ses performances. Il
doit produire un rapport de performance. Le décideur de son coté, à pour
préoccupation de s'assurer qu'une fois le contrat signé entre lui et l'agent, l'agent
respecte bien ses engagements. On parle de risque de hasard ou encore d'aléa
moral. Le décideur essaye de se prémunir de cet aléa moral par un dispositif de
contrôle, de surveillance mais aussi d'incitation du gestionnaire.

II – L’adaptation de la gestion privée à la gestion publique

49
L2

L'utilisation au sein du secteur public du modèle de l'agent atténue voir même


supprime les différences entre gestion publique et gestion privée. Dans ce cadre,
la gestion publique, en adoptant le modèle de l'entreprise, est conduite à établir
un rapport client fournisseur entre les citoyens et l'Etat.

Cette logique entraine des transformations fondamentales au sein des


administrations, ainsi que dans les rapports qu'entretiennent les administrations
et leurs administrés. Les citoyens ou les usagers en viennent à se considérer
comme des clients. C'est par exemple le cas aux USA. Cette évolution se poursuit
maintenant dans de nombreux pays. Du coté des administrations, les
gestionnaires sont de plus en plus responsabilisés et autonomes pour réaliser les
objectifs qui leur sont fixés. Ce modèle fut mis en place depuis de nombreuses
années dans des pays comme l'Australie, la Nouvelle Zélande, le RU, les Pays-
Bas, le Canada, l'Espagne, l'Italie et la France.

Section 2 : L’adaptation du modèle de l’entreprise à l’Etat


I – Le pilotage de la gestion

Il s'effectue sur la base de ce que l'on appelle une « chaîne de responsabilités ».


La responsabilité dont il s'agit est une responsabilité gestionnaire.

A – La responsabilité des gestionnaires

Elle se fonde sur plusieurs dispositifs :

La fongibilité des crédits : des crédits sont attribués aux gestionnaires publics.
Ces crédits sont utilisables par les gestionnaires pour atteindre les résultats, les
objectifs qui leur ont été fixés. Ils sont classés d'une certaines manière à leur
niveau dans la position d'un chef d'Entreprise. On dit que les crédits qui leur sont
accordés sont fongibles car les gestionnaires ont la possibilité de décider par
exemple que des crédits qui ont été désignés au départ comme destinés à
financer des investissements peuvent être utilisés à d'autres fins, par exemple
pour financer des dépenses de fonctionnement.

Ce qui est important, ce n'est plus la différence entre crédit d'investissement et


crédit de fonctionnement. Si on veut transformer les crédits en fonctionnement
on pourra le faire, ou vice versa. Autrement dit, on peut changer la destination
des crédits.

Par contre, il est interdit d'utiliser des crédits d'investissement ou de


fonctionnement pour augmenter le montant des rémunérations des personnels.
Cependant on peut utiliser des crédits de personnels pour financer soit des
dépenses d'investissement, soit d'autres dépenses de fonctionnement.

La fongibilité est asymétrique.


Cette possibilité d'utiliser l'eau par les gestionnaires leur confère une grande
autonomie mais en contrepartie ils doivent rendre des comptes.

B – Les responsables de programmes

Un responsable d'un ou plusieurs programme est désigné au sein de chaque


ministère. Ce sont des hauts fonctionnaires. Ils sont au nombre de 80 pour 170
programmes prévus pour 2009. Ces responsables de programmes produisent
chaque année un projet annuel de performance. Ce PAP est présente au

50
L2

parlement. Les responsables de programmes s'engagent sur des objectifs à


atteindre. Ils ont la possibilité d'utiliser librement les crédits mis à leur disposition
mais ils doivent ensuite rendre des comptes et seront jugés sur leurs résultats.

C – Les responsables de budget opérationnel de programmes et unité


opérationnelles de programmes

Le responsable d'un programme va diviser son programme en ce que l'on appelle


des budgets opérationnels de programmes. Il va désigner un responsable pour
chaque budget opérationnel de programme (BOP). Un responsable de BOP peut
être responsable de plusieurs BOP. Il existe 2300 BOP et 1200 responsables de
BOP. Le responsable d'un BOP gère librement les crédits mis à sa disposition. Ce
responsable de BOP s'engage auprès du responsable à atteindre des objectifs.
Ces objectifs sont négociés entre le responsable de programme et le responsable
du BOP. Cette négociation se déroule dans le cadre de ce que l'on appelle, le
dialogue de gestion. Le responsable du BOP a lui même la possibilité de diviser
son BOP en plusieurs unités opérationnelles de programme. Et là encore il
désignera un responsable pour chaque « unité opérationnelles de
responsabilité ». Là encore des objectifs entre le responsable du POP et les
responsables des UOP.

Cette chaine de responsabilité qui va du responsable du programme au


responsable de l’UOP a été mise en place dans le cade de la mise en œuvre de la
LOLF.

D – Le bilan des budgets opérationnels de programme (BOP)

En Janvier Février on effectue un bilan des BOP. On analyse les résultats obtenus
et les écarts entre ces résultats et les objectifs. On réfléchit sur l'efficacité de la
gestion ainsi que sur la pertinence des objectifs fixés. On identifie également les
bonnes pratiques, c'est à dire les actions qui se sont montrées les plus efficaces.

La structure du budget est simple (revoir les missions, programmes, les actions).
A chaque niveau on place un responsable.

E – La mise en cohérence du processus de gestion des finances de l'Etat

1 – Le dialogue de gestion

C'est une procédure, un dispositif déjà utilisé par les entreprises. Avec la mise en
place d'une chaine de responsabilité au sein de l'Etat, le dialogue, la concertation
se substitue le système hiérarchique habituel. Les décisions se prennent à
travers ou à l'issue d'une discussion entre le responsable de programme et le
responsable de BOP puis entre le responsable de BOP et le responsable de UOP.

« Le programme est divisé en BOP, le BOP est divisé en UOP ».

Avec le dialogue de gestion les responsables à tous les niveaux s'entendent sur
la manière d'atteindre les objectifs, sur les moyens disponibles pour les atteindre.
Le dialogue de gestion consiste à décider conjointement des objectifs à atteindre
et des indicateurs de résultats qui permettront de déterminer, d'être informé sur
la réalisation de ces objectifs.

Ce système ne marcherait pas sans un organe de cohérence. Il y a tellement de

51
L2

programmes, de BOP et de l’UOP. Il faut un organe de cohérence.

2 – La surveillance de la cohérence par le préfet

Cette déconcentration et cette responsabilisation de la gestion nécessite que soit


mis en cohérence les multiples actions ministérielles au niveau des territoires.
C'est le préfet qui va s'assurer de cette cohérence. Le préfet donne d'abord un
avis préalable sur les BOP, il donne cet avis au responsable du programme. Le
préfet s'assure de la cohérence du BOP avec les autres actions territoriales. Le
préfet veille également au respect de la démarche de performance et de la
cohérence de cette démarche avec les priorités qui ont été fixées pour le
territoire (département, région) sur lequel il exerce son autorité.

II – L'évaluation de la performance par des indicateurs de résultat

L'un des enjeux les plus importants de la nouvelle gestion publique consiste à
faire passer l'Etat de ce que l'on appelle une culture de moyens à une culture de
résultat.
La culture de moyens consiste à allouer des crédits à des administrations sans se
préoccuper de fixer des objectifs.

La culture de résultats consiste à attribuer des moyens, des crédits mais en


fixant des objectifs à atteindre et en mesurant ensuite si ces objectifs ont bien
été atteints. Cette mesure se fait à l'aide des indicateurs de résultat.

Selon cette nouvelle logique, à chaque programme sont associés des objectifs et
des indicateurs de performance (résultat). Ces objectifs et ces indicateurs
figurent dans un document annexé au projet de loi de finance et remis aux
parlementaires. Ce document s'appelle un projet annuel de performance.

A – L'engagement sur des objectifs et des indicateurs

La stratégie d'un programme est définie, décidée par le responsable du


programme en accord avec son ministre. Cette procédure conduit à sélectionner
un nombre limité d'objectifs. A cet objectif sont associés un ou plusieurs
indicateurs de résultat. A chaque indicateur est associée une cible à atteindre
dans un délai déterminé. Par exemple en ce qui concerne la mission sécurité. Elle
a 2 programmes (police nationale et gendarmerie).

Le programme gendarmerie possède un certains nombre d'actions dont l'action


sécurité routière. L'un des objectifs de l'action sécurité routière est de réduire le
nombre de blessés et de tués sur les routes. La cible qui a été fixée à l'horizon
2009 est de limiter à 27 834 le nombre de blessés. Ce chiffre est l'indicateur de
résultat. La valeur prévue de cet indicateur pour 2008 est de 29 611.

Un comité interministériel d'audit des programmes contrôle la pertinence, la


fiabilité des indicateurs. Ces audits sont réalisés par des fonctionnaires qui
appartiennent à des corps d'inspection et de contrôle. Il s'agit par exemple
d'inspecteurs des finances.

B – Le contrôle de la performance par le parlement

Le responsable de programme s'engage sur les objectifs et sur les indicateurs qui
figurent dans le cadre du projet annuel de performance (PAP) de son programme.

52
L2

Il est responsable de ce programme, par conséquent, il doit rendre compte au


parlement des résultats qu'il a obtenu. Il le fait en produisant un rapport annuel
de performance (RAP). Le responsable de programme rend des comptes après la
réalisation du programme (à la fin de l'exercice budgétaire). Le RAP est joint en
annexe de la loi de règlement.

Selon ce nouveau dispositif, les parlementaires ne se limitent plus comme autre


fois à débattre des crédits car ils ont également à discuter des objectifs, des
indicateurs.

Cette logique d'entreprise nécessite des outils de gestions adaptés de


l'entreprise. L'un de ces outils est essentiel, il s'agit de la comptabilité.

III – Une comptabilité de l'Etat très proche de celles des entreprises

Depuis 2006, la comptabilité de l'Etat a été complètement réformée. Elle est


conçue maintenant sur le modèle de celle de l'entreprise. On appelle ce type de
comptabilité, une comptabilité d'exercice. Il s'agit d'un système comptable qui
consiste à décrire, à retracer, non seulement les flux (les entrées et les sorties
d'argent), mais également la valeur du patrimoine de l'Etat. C'est à dire ce qu'il
possède mais également ce qu'il doit. Aujourd'hui l'Etat comme les entreprises
présente en fin d'exercice (en fin d'année civile) un bilan et un compte de
résultat.

Deuxième sous partie : Les nouveaux enjeux de la gestion publique

L'enjeu majeur de la gestion publique consiste dans la maitrise de son


endettement et également la maitrise du déficit budgétaire. Actuellement, le
déficit budgétaire de l'Etat représente plus de 20% de l'ensemble du budget.
Cela veut dire que l'Etat vit environ 25% au dessus de ses moyens. Par
conséquent il est obligé en permanence d'emprunter de l'argent.

C'est au cours des années 1980 que l'on a particulièrement pris conscience qu'il
fallait trouver les moyens de maitriser les dépenses pour retrouver l'équilibre
budgétaire. Jusqu'à cette date, on réfléchissait surtout essentiellement à la
fiscalité, à l'impôt.

Chapitre 1 : L'équilibre des finances publiques

Le pouvoir financier, c'est le pouvoir de prévoir les dépenses et les recettes pour
une période de temps limitée. Cette période est l'année civile. Cette prévision se
fait dans le cadre de ce qu'on appelle un budget.

Section 1 : Les notions budgétaires de base

I – Les notions de budget et de loi de finance pour l'Etat


A – Définition
1 – La notion de budget

Le budget est un acte de bonne gestion par ce qu'il consiste à prévoir des
dépenses et des recettes. Il s'agit d'un document utilisé dans le cadre d'une
gestion active des fonds publics.
Le budget n'est pas seulement un acte de gestion. C'est également un acte

53
L2

politique. En effet, le budget est un acte démocratique, il est élaboré, conçu et


n'est adopté, voté que par les décideurs et des élus politiques (gouvernement +
parlement).
D'autre part, le budget est la traduction financière de certain choix de société. Le
budget de l'Etat est adopté par le parlement et constitue un acte législatif : une
loi. C'est la raison pour laquelle on parle de loi de finance.

Par conséquent, la liberté des gestionnaires est des décideurs politiques est
encadrée par le droit, c'est la raison pour laquelle le budget est à la fois un acte
juridique, politique, économique et de gestion.

Le budget est également à la fois un acte de prévision et un acte d'autorisation.

Un acte de prévision :
C'est un acte de prévision des dépenses et des recettes pour l'année civile à
venir. Il doit être adopté par une assemblées délibérante, représentative des
citoyens et démocratiquement élue, (c'est le parlement pour l'Etat), c'est le
conseil de la collectivité pour les collectivités territoriales.

Un acte d'autorisation :
En adoptant le budget, l'assemblée délibérante, autorise la réalisation des
opérations qui y figurent. Autrement dit, elle autorise, l'exécution des dépenses
et le recouvrement des recettes par l'exécutif de l'institution. C'est à dire pour
l'Etat, par le gouvernement, par les ministres. Autrement dit, le budget exprime
le partage des compétences entre l'organe délibérant et l'organe exécutif. Cette
autorisation doit être préalable. Elle doit en principe précéder les opérations
d'exécution. Cette règle constitue une nécessité juridique. On dit que le budget
est un acte-condition. La sanction de cette règle consiste que si le budget n'est
pas voté (adopté) en temps voulu, dans l'impossibilité » pour l'exécutif d'assurer
l'engagement des dépenses pour le recouvrement des recettes.

2 – La distinction budget/Loi de finance

Cette distinction concerne l'Etat. On distingue d'une part, la loi de finance et


d'autre part le budget depuis une ordonnance du 2 janvier 1959. Ces 2 notions
ont été reprises dans la loi organique relative aux lois de finances du 1er août
2001 (LOLF).

Selon l'article 1er de la LOLF : Les lois de finances déterminent pour un exercice la
nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'Etat.
Selon l'article 6 de la LOLF : Les ressources et les charges budgétaires de l'Etat
sont retracées dans le budget...le budget décrit pour une année l'ensemble des
recettes et des dépenses budgétaire de l'Etat.
Les lois de finances contiennent des dispositions qui sont présentées comme
pour toute loi sous la forme d'articles. Il s'agit par exemple de dispositions
fiscales, ou encore de dispositions qui peuvent concerner les finances des
collectivités territoriales.

Le budget est un document comptable, chiffré, des dispositions prisent dans le


cadre de la loi de finance.

Les lois de finances : acte législatif.


Le budget : document comptable.

54
L2

B – Les 3 catégories de loi de finances

La loi de finance initiale : LFI. Il s'agit de la première loi de finance de l'année.


Elle doit être adoptée par le parlement d'ici le 31 décembre pour l'année
suivante.

Par exemple, la loi de finance pour 2009 doit être votée pour le 31 décembre
2008.

Les lois de finances rectificatives : LFR. On les appelle aussi « collectifs


budgétaires ». Ce sont des lois de finances qui modifient en cours d'année,
lorsque cela est nécessaire des dispositions, des choix qui avaient été prévus par
la loi de finance initiale. Dans le courant de l'année 2008, 2 lois de finances
rectificatives ont été prévues. L'une d'entre elle concerne des mesures pour
répondre à la crise financière actuelle (celle-ci n'a pas encore été adoptée). Il est
également question qu'un projet de loi de finances rectificatives pour 2009 soit
discuté par le parlement en début d'année prochaine pour adapter le budget
2009 aux nécessités liés à la crise. Il peut y avoir aucune LFR ou plusieurs dans
une même année.

La loi de règlement : Les LFI et LFR prévoient des recettes et des dépenses. Mais
la loi de règlement n'est pas un acte de prévision. Elle ne prévoit pas les recettes
ou les dépenses. Elle constate les résultats de l'exercice de l'année civile
écoulée. C'est également un texte voté par le parlement. En découle les
réalisations effectives et les résultats effectifs de l'année.

II – Les budgets des collectivités locales

Il n'y a pas de notion de loi de finance pour les collectivités territoriales car les
elles ne sont pas législateurs (article 34 de la Constitution). On parle seulement
de budget pour les collectivités territoriales. Ces collectivités produisent 3
catégories de budgets :

- Le budget prévisible : premier budget de l'année. Il correspond à la LFI pour


l'Etat.
- Le budget supplémentaire et les Décisions modificatives : budgets adoptés en
cours d'année pour modifier les choix du budget prévisible. Ils correspondent aux
LFR pour l'Etat.
- Le compte administratif : Il décrit les opérations réellement effectuées. Il
correspond à la loi de règlement pour l'Etat.

III – Définition et évolution quantitative des dépenses publiques


A – Définition
1 – La notion de dépense publique

Par dépense publique on veut dire les dépenses des charges de l'Etat + celles
des collectivités locales, plus celle des organismes de sécurité sociale. Les
dépenses publiques ne se limitent pas aux dépenses de l'Etat. Il s'agit là d'une
qualification introduite par l'UE.

2 – Les notions de dépenses d'investissement et de dépenses de fonctionnement

Les dépenses d'investissement : On les appelle aussi les dépenses d'équipement

55
L2

ou encore dépenses en capital ». Il s'agit de dépenses qui concernent les


bâtiments publics (FAC, etc.)

Les dépenses de fonctionnement : Dépenses courantes. Elles permettent de faire


fonctionner les équipements ou les employés qui utilisent le dit équipement ou
encore les intérêts des emprunts.

Toute réalisation d'un équipement entraine des dépenses de fonctionnement. Un


équipement engendre une reconduction de dépenses de fonctionnement chaque
année pendant toute la durée de cet équipement. Cela provoque ce que l'on
appelle, une inertie du budget.

Une nouvelle notion est apparue depuis quelques années. Il s'agit de la notion de
« dépense d'avenir ». Ces dépenses concernent tout aussi bien, l'investissement
que le fonctionnement. Par exemple, les dépenses de recherche ou les dépenses
de formation ou d'éducation sont considérées comme des dépenses d'avenir et
par conséquent comme des investissements pour l'avenir, même s'il s'agit de
dépense de fonctionnement comme par exemple les salaires des chercheurs.

Les notions de dépenses d'investissement et de dépense de fonctionnement sont


remises en question par la pratique nouvelle issue de la LOLF, qui est celle de la
fongibilité des crédits, c'est-à-dire la possibilité pour le gestionnaire, pour le
responsable d'un programme. On a la possibilité d'utiliser des crédits de
fonctionnement pour financer les crédits d'investissement.

Rappel : Cette fongibilité est asymétrique.

3 – La notion de dépense au transfert

L'Etat et les collectivités territoriales redistribuent une partie de leurs ressources


budgétaires à d'autres collectivités afin que ces collectivités réalisent certaines
dépenses. Ces dépenses apparaissent en dépenses dans le budget de l'Etat et en
recettes dans le budget de la collectivité : dépenses de transferts. Ce sont
souvent des dépenses sociales ou liée au développement économique.

Le RMI fait l'objet d'un transfert du budget de l'Etat vers les budgets des
départements. Ce sont les départements qui sont chargés de redistribuer le RMI.

4 – Les dépenses définitives et les dépenses temporaires

Les dépenses définitives : elles représentent la quasi-totalité des dépenses (par


exemple les salaires).
Les dépenses temporaires sont des prêts ou des avances consenties par les
collectivités publiques. On les qualifie de temporaire celles qui bénéficieront
d'une aide de l'Etat.

5 – Les dépenses fonctionnelles et dépenses par nature

Les dépenses fonctionnelles : Organiser les dépenses de manière fonctionnelle


signifie qu'on les rassemble par objectifs, par programmes qu'on peut aussi
appeler des fonctions. Il existe par exemple des fonctions cultures, sécurité,
défenses, logement.

Les dépenses par nature : Les dépenses peuvent être classées par nature de la

56
L2

charge. Les salaires, les intérêts sur emprunts, les frais de déplacement, les
loyers.
Dans ce cas là, on aligne les postes de défenses par nature sans les rattacher à
tel ou tel objectif.

On peut combiner une présentation des dépenses par fonction et par nature.
Cela signifie qu'à l'intérieur de chaque fonction, on va retrouver les dépenses par
nature qui concerne cette fonction et uniquement celle-ci.

B – L'évolution chiffrée

Document sur le budget 2008 en « flyers ».

Les dépenses de l'Etat : 300 milliards d'euros.


Les dépenses des collectivités locales : 180 milliards d'euros.
Les dépenses de la sécurité sociale : 450 milliard d'euros minimum.

Les principales dépenses de l'Etat sont :

La mission enseignement scolaire : 60 milliard d'euros.


La mission recherche et enseignement supérieur : 24 milliards.
La mission défense : 48 milliards d'euros.
La mission sécurité : 16 millions d'euros.
La mission culture : 2,9 milliards d'euros.
La mission justice 8 milliards d'euros

Les intérêts de la dette de l'Etat : 45/50 milliards d'euros.

Il faut observer que les dépenses de l'Etat sont essentiellement des dépenses de
fonctionnement. Ce sont les collectivités publiques qui effectuent la plupart des
travaux sur les routes. Les collectivités locales réalisent 73% des équipements
civils (hors défense). En 1980, avant les collectivités locales ne réalisaient que
10% des dépenses.

Section 2 : Les notions d'équilibre budgétaires

Il n'existe pas de règles juridiques qui imposent à l'Etat de présenter son budget
en équilibre. L'Etat doit seulement tenir compte d'un équilibre économique et
financier général. Les collectivités locales ont une obligation d'équilibre du
budget. Il existe un débat ancien entre économistes sur le sujet de l'équilibre
budgétaire. Les uns estimant que cet équilibre des dépenses et des recettes est
indispensable. Les autres estimant que l'essentiel était l'équilibre général de
l'économie.

I – Les conceptions théoriques


A – La conception libérale classique

Pour les économistes libéraux classiques, l'équilibre des dépenses et des recettes
est indispensable car il constitue une garantie pour la neutralité de l'Etat par
rapport au marché économique. L'équilibre entendu dans ce sens est un équilibre
strict. Il ne peut y avoir ni déficit, ni excédent.

Pas de déficit : les déficits sont interdits car leur financement oblige soit de
recourir à l'emprunt et par conséquent d'alourdir les dépenses des futurs budgets

57
L2

avec les intérêts à payer notamment, soit à recourir à une augmentation des
impôts, et l'on diminue alors le pouvoir d'achat ou la capacité d'investissement
des contribuables.

Pas d'excédent : S'il y a excédent, cela signifie que l'on a prélevé plus d'impôts
que nécessaire. D'autre part, présenter le budget en excédent c'est prendre le
risque d'engager des dépenses qu'il faudra reconduire (que l'on risque de ne pas
pouvoir supprimer dans l'avenir).

B – La conception keynésienne

Selon Keynes, l'équilibre qu'il faut réaliser c'est avant tout l'équilibre général de
l'économie. Pour les keynésiens, le budget peut parfaitement être déficitaire ou
excédentaire ou strictement équilibré. L'essentiel c'est qu'il permette de réaliser
l'équilibre entre la consommation et la production, autrement dit le solde
budgétaire est considéré comme un instrument, comme un moyen d'intervention
pour relancer l'économie, par une augmentation des dépenses publiques.

II – Les conceptions techniques


A – Les notions de solde budgétaire

Le solde c'est la différence entre les dépenses et les recettes. Le solde


budgétaire des lois de finances est appelé : le solde prévisionnel. Lorsque le
budget a été exécuté on parle alors de solde d'exécution.

B – La notion de besoin de financement

Le besoin de financement est une notion plus large que celle de déficit. Il faut
ajouter au déficit le remboursement des emprunts des années précédentes
(l'amortissement de la dette). Il faut couvrir le déficit mais il faut également
rembourser chaque année le capital emprunté. Le besoin de financement tel qu'il
figure dans le projet de loi de finance pour 2009 est de 165,3 milliards d'euros
dont 52 milliards de déficit budgétaire.

III – Les notions de l’équilibre juridique

La notion d’équilibre, d’un point de vue juridique, est différente selon que l’on
considère l’Etat ou les collectivités territoriales.

En ce qui concerne l’Etat, la notion d’équilibre figure à l’article 1er de la LOLF. Il


ne s’agit pas d’un équilibre comptable, mais d’un équilibre au sens keynésien
du terme. Ce qui est pris en compte est l’équilibre général économique et
financier. Par conséquent, les déséquilibres comptables entre les dépenses et les
recettes sont possibles. Par exemple, un déficit est possible. Il n’existe donc pas
de règles juridiques imposant un équilibre comptable au budget de
l’Etat. C’est le Parlement qui définit l’équilibre (qui va définir quelle est la
différence entre les dépenses et les recettes).

Les collectivités locales ont l’obligation de voter leur budget en équilibre


comptable.

Chapitre 2 : La transparence des finances publiques

Section 1 : Un budget lisible, un budget clair

58
L2

Jusqu’en 2005, la présentation du budget de l’Etat était très compliquée. Les


crédits qui y figuraient étaient dispersés au sein des ministères sous la forme de
850 comptes que l’on appelait des chapitres. Depuis 2006 (LOLF), les crédits
sont répartis à travers un nombre d’objectifs limités que l’on appelle des
missions, des programmes et des actions.

A – Les missions

Les missions sont des grands objectifs qui représentent les politiques publiques
qu’entend mener l’Etat (culture, sécurité, etc.). Ces missions peuvent relever
d’un ou plusieurs ministères.
Elles sont composées de programmes.

B – Les programmes

Les programmes sont ministériels. Il s'agit d’objectifs devant permettre de


réaliser l’objectif essentiel qui est la mission. Le programme constitue la clé de
la réforme budgétaire car il pose en principe une budgétisation des crédits
par objectifs. Cela signifie que les décideurs publics qu’ils soient gestionnaires
ou qu’ils appartiennent à la classe politique, sont conduits à raisonner en termes
d’objectifs et pas seulement comme autrefois seulement en termes de moyens.

Par exemple, lors de la discussion budgétaire les parlementaires sont obligés de


raisonner en termes d’objectifs, de fixer des objectifs, c'est-à-dire de raisonner à
travers une culture de la stratégie. A l’ancien budget de moyens succède ce que
l’on appelle un budget de résultats.
Ces programmes sont ensuite divisés en sous-objectifs appelés les actions,
également susceptibles d’être divisées en sous-actions.

Section 2 : Les structures de pilotage du budget clairement identifiables


I – La Direction du budget

Elle joue un rôle essentiel dans la préparation des lois de finances. Elle est
chargée de proposer au ministre du budget les grands choix en matière de
recettes et de dépenses. Une fois qu’ont été fixées les priorités
gouvernementales, elle les traduits en moyens budgétaires. Elle suit également
l’exécution du budget et elle peut proposer des moyens pour améliorer la
réalisation des objectifs qui ont été fixés.

Par ailleurs, la Direction du budget assure depuis le 1er janvier 2006 le pilotage de
la mise en œuvre de la LOLF. Elle a également en charge l’élaboration d’une
programmation pluriannuelle des dépenses de l’Etat. Au total, la Direction du
budget doit remplir sept missions :
- Proposer une stratégie globale des finances publiques sur le long terme ;
- Elaborer une programmation pour mettre en œuvre cette stratégie sur le long
terme ;
- Veiller à ce que la budgétisation annuelle soit cohérente avec la
programmation ;
- S’assurer que la gestion publique réponde à une logique de performance ;
- Participer à l’élaboration du budget communautaire et à son cadrage
pluriannuel ;
- Définir les outils budgétaires à utiliser ;
- Assurer la tutelle stratégique des organismes publics.

59
L2

II – La Direction générale de la modernisation de l’Etat

Une administration avait été créée en mars 2002 pour mettre en place la LOLF.
Cette administration s’appelait la Direction de la réforme budgétaire. Il avait été
décidé que cette Direction disparaitrait lors de la mise en place de la LOLF (1 er
janvier 2006). Par conséquent, la Direction de la réforme budgétaire a été
supprimée au 1er janvier 2006 et lui a succédé une autre administration, appelée
la Direction générale de la modernisation de l’Etat (DGRE). La DGRE a pour
fonction de mettre en application les grandes orientations concernant la
modernisation de l’Etat au service des usagers. Parmi ses fonctions, on peut
retenir qu’elle doit faire en sorte de rendre compréhensible l’action de l’Etat, elle
doit simplifier les procédures administratives, développer l’administration
électronique et participer à la dématérialisation des démarches administratives.

III – Le comité interministériel d’audit des programmes (CIAP)

Il s'agit d’une institution composée de hauts fonctionnaires appartenant aux


grands corps de contrôle de l’Etat. Elle est présidée par un inspecteur général
des finances. Sa fonction est de garantir la qualité des projets de programme,
autrement dit de garantir la pertinence des objectifs et des indicateurs de
résultat qui leurs sont associés et qui seront intégrés dans le projet de loi de
finance.

Section 3 : Des principes budgétaires garant de la transparence

Dans tout régime démocratique, la recherche de la transparence financière est


un objectif central. Cette recherche est dominée par la mise en avant d’un
principe qui est celui de la clarté des documents budgétaires, et cela pour que
les décisions prises par les parlementaires ne soient pas faussées par un manque
d’information ou par des informations inexactes. Par ailleurs, la transparence est
également recherchée pour pouvoir suivre l’exécution du budget et pour être en
mesure de juger de la régularité et de la sincérité des comptes publics.
Cela a nécessité la mise en place de nombreux principes depuis le début du
XIXème siècle.

I – Le principe de spécialité budgétaire

Ce principe est né sous la Restauration. Il signifie que l’on détaille les crédits,
qu’on spécialise les crédits par catégories de dépenses. Actuellement, les crédits
sont ouverts par missions et par programmes, et l’ont dit que l’unité de
spécialité est le programme. Les crédits sont spécialisés par programme.

II – Le principe de l’universalité budgétaire

Ce principe comporte deux règles :

- La règle de non-affectation : elle consiste à imputer l’ensemble des recettes


sur l’ensemble des dépenses. Autrement dit, il n’est pas autorisé d’affecter
une recette particulière à une dépense particulière. Cette règle est
souvent transgressée car certains crédits sont affectés à certaines dépenses.
C’est par exemple le cas des budgets annexes.

- La règle de non-compensation : elle est aussi parfois qualifiée de règle du

60
L2

produit brut. Elle consiste à interdire la compensation d’une dépense par une
recette. Les recettes et les dépenses doivent figurer pour l’intégralité de leur
montant au budget, elles ne peuvent être compensées.

Ainsi, dans le cas où un contribuable est un fournisseur de l’Etat, d’un côté ce


contribuable est redevable de ses impôts envers l’Etat, d’un autre côté l’Etat lui
doit le prix de la prestation qui lui a été rendu par ce contribuable. Pour simplifier
les choses pour nos cerveaux de larves atrophiées, il est possible de faire la
différence entre les sommes dues d’un côté par le contribuable, d’un autre côté
par l’Etat, et celui qui resterait redevable verserait la différence. En fait, cette
possibilité est interdite, on ne peut compenser. Il faut que d’un côté le
contribuable règle sa dette, et que de l’autre côté l’Etat règle la sienne au
contribuable.

III – Le principe de sincérité budgétaire

Ce principe a été introduit par la LOLF. Selon ce principe, les lois de finance
doivent présenter de façon « sincère » les ressources et les charges de l’Etat. Les
ressources ne doivent alors pas être surestimées et les dépenses ne doivent pas
être sous-estimées.

Ce principe de sincérité s’applique également aux comptes de l’Etat. La


comptabilité de l’Etat doit donner ce que l’on appelle une image fidèle de son
patrimoine et de sa situation financière.
Ce principe est donc à la fois budgétaire et comptable. La Cour des comptes a
pour fonction de certifier la sincérité des comptes de l’Etat.

IV – Le principe d’unité budgétaire


A – Définition

Selon la règle de l’unité budgétaire, l’ensemble des dépenses et des recettes doit
être présenté dans un seul document. Cela a pour objectif de permettre aux élus
d’avoir une vue globale exhaustive des prévisions budgétaires. Cette règle pose
deux problèmes.

1 – Le document budgétaire lui-même

Le budget de l’Etat est présenté en trois parties :


- Budget général,
- Budgets annexes,
- Comptes spéciaux.

Si la quasi-totalité des recettes et des dépenses figurent bien au budget général,


d’autres recettes et d’autres dépenses sont cependant inscrites aux budgets
annexes et aux comptes spéciaux. Par conséquent, le budget de l’Etat n’est pas
réellement unifié (notons que ces saloperies de budgets annexes et de comptes
spéciaux sont tout de même fournis, le seul problème est en réalité qu’il n’y a
pas une colonne « recettes » et une colonne « dépenses »).

2 – Présentation d’ensemble de tous les comptes publics

(Etat, collectivités territoriales et organismes de sécurité sociale).


Il n’existe aucun document centralisant toutes les opérations réalisées par les
collectivités territoriales, l’Etat et les organismes de sécurité sociale. On s’efforce

61
L2

actuellement de trouver les moyens de consolider les opérations financières de


ces trois catégories d’acteurs.

B – Les grandes catégories du budget de l’Etat


1 – Le budget général

Il comprend environ 95% du budget de l’Etat. Les recettes sont inscrites


globalement, aucune d’entre elles n’est affectée à une dépense particulière (non-
affectation).

2 – Les budgets annexes

Ils retracent des opérations effectuées par les services de l’Etat qui n’ont pas de
personnalité morale et dont l’activité consiste à produire des biens ou des
services qui donnent lieu au paiement d’impôts. Par conséquent, les budgets
annexes ont été créés pour traiter à part des opérations commerciales de l’Etat.
On isole certains services publics et les dote d’un budget propre appelé budget
annexe. Ce budget figure en annexe du budget général. Il en existe actuellement
deux : le budget annexe contrôle et exploitation aériens et le budget annexe
publications officielles et informations administratives.

Ils doivent être votés en équilibre. Si un excédent est dégagé, l’excédent est
reversé au budget général. S’il y a un déficit, il sera comblé par une subvention
d’équilibre du budget général.

3 – Les comptes spéciaux

Ils enregistrent les opérations que l’on a voulu individualiser en raison de leur
caractère spécifique, généralement temporaire. A la différence des budgets
annexes, leur solde peut être excédentaire ou déficitaire et ce solde est reporté
d’une année sur l’autre.

Chapitre 3 : L’intégration des finances de l’Etat, des collectivités locales


et des organismes de sécurité sociale

Se pose aujourd’hui la question d’une vision d’ensemble des finances publiques


afin d’en contrôler l’évolution et par cela de contrôler l’évolution du déficit public.
L’Etat s’est fixé pour ses dépenses une norme d’évolution de ses dépenses : le
taux d’inflation. Il souhaiterait que cette norme de dépenses puisse s’appliquer
aux autres catégories des finances publiques et notamment aux dépenses des
collectivités locales.

Section 1 : La maîtrise des dotations de l’Etat allouées aux collectivités locales


I – Les subventions allouées par l’Etat aux collectivités locales

On appelle cela les concours de l’Etat. Ils sont de l’ordre d’environ 75 milliards
d’euros. L’Etat accorde aux collectivités locales deux catégories de subventions.
D’une part les subventions de fonctionnement, d’autre part les subventions
d’investissements.

Les dotations de fonctionnement servent à financer les dépenses courantes des


collectivités locales (dépenses…de fonctionnement !). Parmi ces subventions, la
plus importante s’appelle la dotation globale de fonctionnement. Elle
représente environ 40 milliards d’euros. Elle est accordée aux communes, aux

62
L2

départements et aux régions.

Les dotations d’investissement servent à financer les dépenses d’équipement


(routes, etc.). Il en existe principalement deux : la dotation globale
d’équipement, versée aux communes dont la population est inférieure à 20 000
habitants, ainsi qu’aux départements. La seconde est le fonds de
compensation de la TVA. Les collectivités locales sont considérées comme des
consommateurs et supportent par conséquent, comme tout consommateur final,
la totalité de la TVA. Elles ne peuvent pas récupérer la TVA qu’elles ont payée
lors d’un achat sur la TVA qu’elles auraient encaissé lors d’une vente comme
c’est le cas pour les entreprises.

Cela est incohérent car la dotation est équivalente à environ 20% du budget des
collectivités pour l’achat d’équipement…soit le montant de la TVA. C’est pourquoi
le fonds de compensation de la TVA consiste à rembourser aux collectivités
locales la TVA qu’elles ont payé à leur fournisseur lorsqu’elles ont fait
l’acquisition d’un bien d’équipement. Ce remboursement ne concerne que les
dépenses d’investissement. Elle n’est pas remboursée lorsqu’elle concerne les
dépenses de fonctionnement.

II – Les dispositifs de régulation


A – Le contrat de solidarité

L’Etat a mis en place un dispositif qui vise à encadrer l’évolution de la plupart des
dotations : le contrat de solidarité. Il consiste à placer dans ce qu’on appelle une
enveloppe (un morceau de papier replié sur lui même afin d’accueillir un bout de
papier) la plupart des dotations et à faire évoluer le montant de cette enveloppe
en fonction de l’évolution prévue des prix à la consommation.
Le contrat de solidarité s’inscrit dans une logique d’ensemble qui a pour objectif
de maitriser les dépenses publiques.

B – La Conférence nationale des finances publiques

Il s'agit d’une institution créée par un décret du 5 mai 2006. Elle réunit chaque
année les représentants des trois grandes composantes des finances publiques
(Etat, collectivités locales et organismes de sécurité sociale). Elle a pour fonction
de proposer les moyens de maîtriser les dépenses publiques et la dette publique.

C – La Conférence nationale des exécutifs

Cette institution a été créée le 4 octobre 2007. Elle a pour mission de faire
participer les collectivités territoriales à l’élaboration des normes qui les
concernent ainsi qu’à la réforme de la fiscalité locale. Il s'agit d’un lieu de
concertation. Cette institution comprend les ministres concernés par les affaires
locales (ministres des finances, de l’intérieur, de l’écologie, et des affaires
européennes), ainsi que par les représentants des trois grandes associations
d’élus locaux (association des maires de France, assemblée des départements de
France et association des régions de France).

On y trouve également le président du comité des finances locales et celui du


Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Le président de cette
Conférence est le Premier ministre.
Sont donc créés récemment des institutions entre les différents acteurs
financiers publics.

63
L2

Section 2 : La maitrise des finances sociales

Elles représentent plus de 450 milliards d’euro (plus que l’Etat ou les collectivités
locales). Elles ne font qu’augmenter depuis une trentaine d’années.

I – Les contraintes liées aux évolutions de la démographie


A – Les problèmes posés

Ces problèmes concernent essentiellement la question de ces enfoirés de


retraités. L’allongement de la durée de la vie accroit la charge des retraites. Par
ailleurs, la diminution du nombre des actifs a des effets sur les cotisations de
retraite (baisse des cotisations), ce qui remet en question l’équilibre du régime
des retraites. Des solutions sont proposées.

- Chaque individu constitue sa propre retraite. Par exemple, en cotisant à ce que


l’on appelle des fonds de pension. Ce sont des organismes privés qui placent
l’argent de leurs cotisants et leurs servent une pension au moment de leur
retraite. Ces fonds de pension sont assez limités, ils dépendent en effet aux
placements qu’ils ont opérés, et certains d’entre eux sont ainsi remis en question
par la crise financière actuelle.
- Augmenter les cotisations qui pèsent à la fois sur les entreprises et sur les
salariés. Le poids des prélèvements obligatoires étant déjà élevé (44% du PIB),
cela pose problème en pratique.
- Constituer des réserves pour plus tard. La Suède ou le Canada ont ainsi institué
un fond national de retraite (pour pouvoir financer les retraites). Le Canada, pour
financer ce fond, a institué une « surcotisation ».
- La solution qui va être adoptée en France consiste à augmenter l’âge de la
retraite.

B – La progression des dépenses

Le nombre de retraités va augmenter, ce qui est une source importante


d’augmentation des dépenses. Ceux nés juste après la seconde guerre mondiale
peuvent faire valoir leur droit à la retraite (60 ans). Ce phénomène va s’ajouter
au fait que la proportion des personnes âgées de plus 60 ans a déjà augmenté de
plus de 4% depuis 1946 et progresse actuellement de près de 5%/an. On estime
qu’à partir de 2010, les plus de 60 ans seront plus nombreux que les moins de 20
ans.

Le coût des prestations sociales va aller en s’accroissant pour deux raisons :


- Allongement de la durée de vie.
- Baisse, proportionnellement à autrefois, des salaires servant de base au calcul
des retraites.

C – L’évolution des recettes

Elle ne sera pas plus importante car elle dépend du nombre des actifs et
également de la situation de l’emploi.

II – Les contraintes liées à la crise de l’emploi

Le nombre de demandeurs d’emploi a des conséquences sur le niveau des


dépenses sociales. Cela concerne autant l’Etat que les organismes de sécurité

64
L2

sociale.

Section 3 : Quelles normes pour les collectivités locales et les organismes de


sécurité sociale ?

Depuis 1983, l’Etat s’est efforcé de ne pas augmenter ses dépenses dans des
proportions supérieures aux évolutions du PIB, mais cette norme de dépenses
a subi de très nombreuses exceptions.
Ce n’est que depuis 2003 que cette norme qui consiste à faire évoluer les
dépenses au rythme de l’inflation est respectée. Cependant, l’Etat souhaiterait
que cette norme de dépenses soit étendue aux autres secteurs publics, et
notamment aux collectivités territoriales.

La réponse à la crise financière actuelle va nécessiter une intervention accrue de


l’Etat et par conséquent une augmentation de ses dépenses. On se pose
actuellement la question de dissocier les dépenses de l’Etat habituelles et ses
dépenses exceptionnelles liées à la lutte contre la crise.
Il serait question d’isoler les dépenses liées à la crise au sein d’une nouvelle
mission du budget de l’Etat qui serait une mission spécifique dédiée à la lutte
contre la crise.

Chapitre 4 : La programmation pluriannuelle des finances publiques

Une des innovations les plus importantes de ces dernières années en matière de
finances publiques consiste dans le souci de contrôler la gestion publique, de la
piloter.
La question de la programmation des dépenses publiques dans le temps est
centrale pour toutes les stratégies budgétaires contemporaines. La France vient
d’instituer une programmation pluriannuelle pour les années 2009/2010/2011.
Cette programmation concerne les dépenses de l’Etat. Par ailleurs, une révision
de la Constitution de juillet 2008 a institué une nouvelle catégorie de lois,
lesquelles sont les lois de programmation pluriannuelle des finances
publiques. Une première loi de ce genre a été votée à l’automne dernier.

Section 1 : Les enjeux de la programmation pluriannuelle

Elle se heurte à une règle budgétaire importante qui est le principe d’annualité
budgétaire.

I – Le principe d’annualité budgétaire

L’origine de ce principe est d’abord politique. Il tire ses origines du consentement


de l’impôt. Lorsque les premiers impôts révolutionnaires ont été créés en 1790, il
a été décidé qu’ils seraient levés pour une année. Cela concernait par
conséquent les ressources, et il a été ensuite été étendu aux dépenses.

A – Exposé du principe

Pour l’Etat, la loi de finance initiale est établie chaque année avant le 31
décembre pour l’année civile çà venir, c'est-à-dire du 1 er janvier au 31 décembre.
L’exécution de ce budget se fait sur la même période.

Les collectivités locales devraient normalement adopter leur budget avant la fin
de l’année pour l’année suivante, mais elles sont autorisées à le voter jusqu’au

65
L2

31 mars car elles ne possèdent pas toutes les informations nécessaires


concernant leurs finances, qui leurs sont fournies par l’Etat, avant la fin de
l’année.

B – Les origines et les inconvénients du principe

Ce principe a été institué à la Révolution afin qu’existe une régularité dans le


temps qui n’existait pas sous l’Ancien Régime. On a considéré que la période (un
an) n’était ni trop longue ni trop courte. Si elle était plus courte, les débats
budgétaires seraient trop nombreux et si elle était plus longue, le contrôle du
Parlement serait trop espacé dans le temps.

Le problème qui s’est posé, par rapport à ce principe d’annualité, est que l’Etat
est de plus en plus intervenu en réalisant des équipements de plus en plus
importants. Or, la réalisation de ces équipements nécessitait parfois plusieurs
années. En vertu du principe d’annualité, le budget n’autorise à dépenser que sur
une année, ce qui voulait dire que pour réaliser de gros équipements il fallait
voter chaque année pour la tranche à réaliser l’année suivante. On ne pouvait
pas adopter l’ensemble de l’opération. De ce fait, les gros investissements
étaient soumis aux fluctuations politiques, économiques ou financières.

Ainsi, si une nouvelle majorité hostile à la poursuite des travaux entrait en


fonction, elle pouvait faire cesser ces opérations car l’Etat n’était juridiquement
engagé que pour une année. Il a par conséquent fallu mettre en place un
dispositif permettant de poursuivre des travaux sur plusieurs années et
d’engager l’Etat sur plusieurs années. Ce dispositif s’appelle les autorisations
d’engagement.

II – La pluriannualité travestie

Dans notre droit budgétaire, la pluriannualité est généralement présentée de la


manière suivante : l’annualité est la règle, la pluriannualité est l’exception. A y
regarder de plus près, on s’aperçoit que des dépenses pluriannuelles existent
sans qu’elles soient qualifiées comme telles.
- La création d’emplois nouveaux dans la fonction publique. En effet,
lorsque l’Etat crée un emploi dans la fonction publique, et qu’il recrute un
fonctionnaire, il prend de fait un engagement pluriannuel car il s’engage à
payer le traitement de ce fonctionnaire puis sa retraite et cela sur une longue
durée.
- La charge de la dette publique. En effet, lorsque l’Etat émet un emprunt, il
s’engage à payer les intérêts pour toute la durée de l’emprunt. Par conséquent il
s’engage dans un processus pluriannuel.

Section 2 : Les outils classiques de la programmation pluriannuelle

Traditionnellement, il existe deux dispositifs : les autorisations d’engagement


d’une part, et les lois de programmation d’autre part.

I – Les autorisations d’engagement

Elles étaient autrefois qualifiées, avant la mise en œuvre de la LOLF,


d’autorisations de programme. Ces autorisations instaurent une programmation
des dépenses d’investissement et des dépenses de fonctionnement sur plusieurs
années (ce dispositif s’applique pour toutes les dépenses de fonctionnement,

66
L2

excepté celles qui concernent les rémunérations des personnels). Si l’on était
tenu de respecter le principe d’annualité budgétaire, il serait nécessaire dans le
cas où l’on voudrait réaliser une dépense sur plusieurs années, de voter chaque
année dans le cadre du budget la partie de la dépense concernant cette année,
c’est-à-dire par exemple la partie de la dépense concernant les travaux devant
être réalisés au cours de cette année (ex : pour 2009, on ne peut pas voter des
investissements pour après 2009). L’Etat ne s’engage pas juridiquement au-delà
d’une année, toujours en vertu de ce principe : ainsi, si par exemple un
équipement ne peut être réalisé que sur plusieurs années, il pourrait être décidé
de ne pas poursuivre les travaux, simplement parce que l’Etat s’engage
juridiquement sur une année. D’autre part, si l’on inscrivait le total de la dépense
sur 1 an cela augmenterait artificiellement puisque une partie seulement de ces
dépenses serait réalisée sur l’année. Par conséquent, on a institué un dispositif
qui permet à l’Etat de s’engager juridiquement sur plusieurs années. Ce sont les
autorisations d’engagement. Ces autorisations sont accompagnées de ce que
l’on appelle des crédits de paiement (CP). Ils correspondent au paiement de la
dépense chaque année lorsque le travail a été fait.

En résumé, les autorisations d’engagement (AE) sont pluriannuelles : elles


engagent l’Etat sur la durée du programme. Cela signifie que l’équipement qui
est prévu devra être réalisé et que les fonds pour le financer sont d’ors et déjà
prévus. Ces fonds ne seront débloqués que par tranches au fur et à mesure de la
réalisation des travaux. Ainsi, les sommes nécessaires sont inscrites au budget,
votées (adoptées), ce qui est engage l’Etat et ce qui oblige chaque année à
inscrire les crédits nécessaires au paiement du service fait par l’entreprise. Ces
crédits qui sont inscrits chaque année et qui correspondent à la tranche du
programme d’équipement qui devra être réalisée sont qualifiés de crédits de
paiement. Ces derniers sont annuels. Ce sont les seuls pris en compte dans les
charges du budget. Ils rentrent dans le calcul du solde budgétaire.

II – Les lois de programmation

Les lois de programme (ou lois de programmation / d’orientation) sont des lois
qui définissent certains objectifs de l’action économique et sociale de l’Etat. Il ne
faut pas les confondre avec les autorisations d’engagement. Ces lois n’ont aucun
caractère obligatoire, il s’agit seulement d’indications qui n’engagent pas l’Etat.
Ce sont des déclarations d’intention, formalisées dans un cadre législatif. Les lois
de programme sont des lois ordinaires. Cependant, sous les IIIe et IVe
Républiques, les lois de programme avaient la même valeur que le budget. C’est
l’ordonnance du 2 janvier 1959 qui leur a retiré leur valeur budgétaire et qui les a
limitées à des lois ordinaires. Il y a des lois de programmation pour l’éducation, la
dépense, et ainsi de suite. Ce sont des lois ordinaires, et par conséquent elles
sont le plus souvent non appliquées en raison de leur faible force. NB : Les
autorisations d’engagement figurent dans le cadre des lois de finances, ce qui
n’est pas le cas des lois de programme.

Ces outils n’étaient pas suffisants pour développer une véritable stratégie
budgétaire. Ces outils ne concernaient que quelques éléments. Il fallait faire en
sorte de dépasser l’annualité. On pouvait recourir à la pluriannualité en Grande-
Bretagne, mais pas en France avant 2008.

Section 3 : La nouvelle programmation pluriannuelle

Les dispositifs que l’on vient de voir existent toujours. A partir de 2008, on en a

67
L2

simplement ajouté de nouveaux. Cette nouvelle programmation est représentée


par une programmation des dépenses de l’Etat mais aussi une programmation de
l’ensemble des finances.

I – La programmation pluriannuelle : une réforme gestionnaire

La stratégie budgétaire de l’Etat s’enracine (ou s’organise) aujourd’hui dans la


révision générale des politiques publiques. Cette révision générale des politiques
publiques (RGPP) sert de fondement à l’élaboration d’une programmation sur
trois ans (triennale) des dépenses de l’Etat. Ce dispositif ne fait pas l’objet d’une
décision législative qui remettrait en question le principe d’annualité budgétaire.
Il s’agit d’un dispositif gestionnaire qui vise à rationaliser la gestion budgétaire
de l’Etat. Cette programmation est élaborée par les services du ministère du
budget dans le cadre de la préparation du budget. Seules les prévisions
concernant la 1ère année font l’objet d’un vote au Parlement dans le cadre de
l’adoption de la loi de finances. Cette programmation a été préconisée par un
rapport au gouvernement qui concernait la mise en œuvre de la LOLF. Ce rapport
a été écrit par Alain Lambert (UMP) et Didier Migaud (PS) qui sont les initiateurs
de la LOLF. Par ailleurs, la programmation budgétaire pluriannuelle a
officiellement été annoncée par le président de la République le 12 décembre
2007 lors du premier conseil de modernisation des politiques publiques qui s’est
tenu au moment de la présentation de la première tranche de la RGPP. Les
propos du Président de la République étaient les suivants : « Nous mettrons en
place pour 2009 / 2011 un budget pluriannuel cohérent avec notre trajectoire de
finances publiques. Il s’agit d’une révolution dans notre fonctionnement
administratif ». Cela faisait une quinzaine d’année que l’on parlait de cette
réforme mais elle ne s’était jamais faite. Elle a été pour la première mise en
œuvre lors de l’élaboration du budget 2009 sur une période qui correspond à
celle de la RGPP (3 ans).

Ce dispositif ne remet cependant pas en question le principe d’annualité


budgétaire car seules les lois de finances annuelles ont une valeur contraignante
et continuent à être adoptées à l’automne par le Parlement. La différence est
que, bien que discutée et soumise à l’adoption des parlementaires chaque
année, les projets de lois de finances s’inscrivent maintenant dans le cadre d’une
programmation triannuelle. D’autre part, alors que les lois de finances
concernent les dépenses et les recettes, la programmation pluriannuelle ne fixe
quant à elle que des plafonds de dépenses. Cette programmation qui se limite
aux dépenses de l’Etat concerne les missions qui figurent au budget (les
politiques publiques, donc). Le périmètre de cette programmation comprend les
crédits des missions figurant au budget général.

On qualifie cette programmation de programmation semi-glissante car le


dispositif fonctionne de la manière suivante : En premier lieu un plafond global
de dépenses est fixé pour chacune des années. Ce plafond est déterminé en
fonction de ce que l’on appelle une norme de dépenses. Il s’agit actuellement du
taux d’inflation prévu pour l’année en question. Ce plafond fait l’objet d’une
programmation ferme, fixe, immuable, sur trois ans (excepté la possibilité d’une
modification liée à une variation du taux d’inflation). En second lieu des
plafonds sont fixés par missions. Ces plafonds sont fermes pour les deux
premières années mais révisables la troisième année en fonction des contraintes
de cette dernière. En troisième lieu sont enfin déterminés les crédits répartis
par programme (plafonds par programmes) En ce qui concerne les programmes,
les crédits sont fermes la première année mais modifiables les deux années

68
L2

suivantes. Cette programmation peut être qualifiée de semi-glissante puisqu’on


peut faire glisser des dépenses d’une année sur l’autre. La troisième année sert
de fondement à la programmation pluriannuelle suivante (pour 2009/2011, la
suivante sera 2011/2013).

II – La loi de programmation pluriannuelle des finances : une réforme politique

Une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques a été instituée


par la loi de révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Cette loi de
programmation n’abroge cependant pas les lois dont on a parlé tout à l’heure.
Selon l’article 34 révisé de la Constitution, les lois de programmation déterminent
les objectifs des actions de l’Etat. De plus, les orientations pluriannuelles des
finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s’inscrivent
dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques. Autrement
dit, la programmation pluriannuelle des finances publiques est associée à la
réalisation de l’équilibre des dépenses et des recettes publiques. Par ailleurs,
cette programmation concerne l’ensemble du secteur financier public,
c’est-à-dire l’Etat, les collectivités locales et les organismes de sécurité
sociale. Autrement dit, cet article s’inscrit dans la logique des critères de
convergence et du pacte de stabilité institué dans le cadre de l’UE. On a ainsi
créé une catégorie de lois qui va complètement dans le sens de l’UE. Il faut
toutefois souligner que cette loi de programmation pluriannuelle des finances
publiques est comme toutes les lois de programmation dépourvue de force
obligatoire sur le plan financier. Ce ne sont pas des lois de finances mais bien des
lois ordinaires. Elles peuvent donc être ou non appliquées. Néanmoins, il était
important de donner un caractère solennel par un vote des parlementaires non
seulement aux engagements pris dans le cadre du pacte de stabilité et de
croissance mais également à une logique nouvelle de gestion des finances
publiques. Par ailleurs, il est aussi important que la maîtrise des finances
publiques soit conçue de manière consolidée / globale, ce qui signifie que soient
prises en considération non seulement les dépenses et les recettes mais les
dépenses et les recettes de l’ensemble du secteur public (pas seulement l’Etat).
On ne peut plus considérer aujourd’hui les finances de l’Etat de manière
indépendante de celles des collectivités locales et des organismes de sécurité
sociale. C’est la raison pour laquelle le texte constitutionnel (l’article 34) fait
référence aux finances publiques dans leur totalité. C’est la même chose pour
l’équilibre des comptes publics qui doit être considéré de manière globale.

NB : il faut souligner que la conférence nationale des finances publiques, laquelle


réunit les représentants des différentes composantes du système financier
public, va dans le sens d’une globalisation, c’est-à-dire d’une consolidation des
comptes publics.

Chapitre 5 : La mobilisation des ressources fiscales

Section 1 : Une grande variété de prélèvements obligatoires

I – Définition de l’impôt et des autres prélèvements obligatoires

La notion de prélèvement obligatoire est utilisée en France pour désigner d’une


part les impôts prélevés au profit de l’Etat, ou des collectivités locales, ou encore
des organismes de sécurité sociale, et d’autre part les cotisations sociales
prélevées au profit des organismes de sécurité sociale, non considérées comme
des impôts. En effet, on considère que les impôts sont sans contrepartie. Or les

69
L2

cotisations sociales ont une contrepartie (comme c’est le cas pour le


remboursement des médicaments par exemple). L’ensemble des prélèvements
obligatoires représente environ 44% du PIB et plus de 20% sont représentés par
les prélèvements sociaux. Il est très difficile de comparer les prélèvements
obligatoires d’un pays à un autre car les services publics rendus par le secteur
public ne sont pas identiques. En effet, il y a des pays où la couverture sociale
est nulle alors qu’en France elle est au contraire très importante. Les débats les
plus nombreux concernant la fiscalité sont relatifs à la justice fiscale et à la
simplification des systèmes fiscaux.

II – Caractéristiques et évolutions des impôts

L’impôt constitue l’essentiel des ressources de l’Etat avec environ 300 milliards
d’euros. Il représente 90% des ressources définitives de l’Etat. Le reste des
recettes est constitué par des revenus provenant de l’exploitation des domaines
publics et privés. Les principaux impôts d’Etat sont la TVA (qui représente 45%
du total des impôts d’Etat), l’impôt sur le revenu des personnes physiques,
l’impôt sur les sociétés et la taxe intérieure sur les produits pétroliers. Ce sont les
quatre principaux impôts d’Etat. Il y en a bien d’autres (230 environ). L’impôt
représente environ la moitié des ressources des collectivités locales. Les
principaux impôts locaux sont la taxe professionnelle, la taxe d’habitation, la taxe
foncière sur les propriétés bâties et non bâties. Il en existe beaucoup d’autres tel
que la taxe sur la publicité, sur les eaux minérales, sur les permis de conduire, la
taxe de séjour (généralement comprise dans le prix des chambres d’hôtels), la
taxe sur les remontées mécaniques. En résumé, il y a des taxes à peu près sur
tout (sauf l’air). Les organismes de sécurité sociale sont financés à la fois sur des
impôts et par des cotisations sociales. Ces dernières sont dues à la fois par les
salariés et par les employeurs. Les impôts sociaux sont maintenant une source
de financement de plus en plus importante de la sécurité sociale. Parmi ces
impôts, le plus important est celui sur le revenu des personnes physiques qui
s’appelle la contribution sociale généralisée.

Section 2 : Les résistances à l’impôt


I – Les révoltes fiscales

C’est un phénomène universel.

A – Les révoltes fiscales en France

Dans la période contemporaine, deux grandes révoltes fiscales ont eu lieu en


France. Il s’agit du mouvement Poujade d’abord puis du mouvement Nicoud. Ce
sont des mouvements qui ont profondément marqué l’administration fiscale
française. Ils ont été, notamment le second mouvement, des mouvements très
violents de révoltes contre l’administration fiscale.

S’agissant du mouvement Poujade, il s’agit d’un mouvement de contestation de


l’impôt qui s’est développé dans les années 1950. Il a été créé par un
commerçant du centre de la France qui s’appelait Pierre Poujade, qui a fondé
l’Union de défense des commerçants et des artisans (l’UDCA). Son objectif a été
de s’opposer aux contrôles fiscaux qui venaient d’être mis en place. En fait, si le
prétexte a été fiscal, il s’agissait surtout d’une réaction aux premières
transformations de l’économie et plus particulièrement à une concentration du
commerce de distribution et par conséquent à une disparition des petits
commerces. L’une des actions les plus spectaculaires de l’UDCA a été

70
L2

d’empêcher les agents du Fisc d’effectuer leur contrôle. Poujade demandait à ce


qu’on se place devant les entreprises qui faisaient l’objet du contrôle. Le
commerçant imposé n’était pas sanctionné car il disait de pas refuser l’impôt, ce
qui était une ruse. D’où une grande adhésion à l’UDCA. Par ailleurs, le
mouvement Poujadiste a bénéficié du mode de scrutin de la IVème République,
c’est-à-dire de la représentation proportionnelle. L’UDCA présenta des candidats
aux élections, à la chambre des députés et obtint en 1956 une cinquantaine de
sièges, ce qui lui permettait de peser sur les décisions politiques. Ce n’était donc
pas seulement un syndicat mais aussi une force politique et sociale. Avec la Ve
République et son nouveau mode de scrutin, l’UDCA n’obtint aucun siège à
l’Assemblée nationale. Il disparut par conséquent en tant que force.

S’agissant du mouvement Nicoud, il a été semblable au mouvement Poujade (il


réunissait donc des commerçants et des artisans) et s’est développé au cours
des années 70. Il s’agit du comité inter-professionnel de défense des
commerçants et artisans (CID). Le CID fut créé en 1969 par un commerçant de la
région Nord-Alpes, Gérard Nicoud. Ce mouvement s’est caractérisé par des
actions parfois très violentes et spectaculaires contre les agents des impôts. Il
kidnappait parfois des agents, les ligotait et les attachait toute la nuit à des
arbres (sic !), plaçaient des bombes devant les portes de députés giscardiens (on
raconte qu’une petite fille a failli un jour être blessée suite à une explosion d’une
porte, et le mouvement Nicoud a fait porter des fleurs pour s’excuser). A un
moment, Nicoud a été emprisonné et les militants, descendus dans la rue,
défilaient en criant « pas de Nicoud, pas de sous » (il y avait donc une menace
d’une grève de l’impôt). Nicoud a finalement été libéré suite à la pression
populaire. Ce mouvement n’a jamais eu de représentation politique. Enfin,
certains militants devinrent maoïstes, voire marxistes-léninistes et le mouvement
finit par disparaître de lui-même.

B – Les révoltes fiscales aux Etats-Unis

C’est sur le plan doctrinaire ou théorique que s’est développée la résistance à


l’impôt. Des doctrines antifiscales sont nées et se sont développées à la fin des
années 1970, et cela suite au mouvement du développement des théories
néolibérales classiques (déjà étudiées, voir infra). On s’est alors focalisé sur le
rejet de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, beaucoup plus que les
impôts sur les dépenses (la TVA n’était pas mal considérée car elle n’avait pas
d’impact réel sur les entreprises). Les critiques se sont concentrées sur la
pression fiscale trop importante, sur la progressivité de l’impôt, enfin sur la
complexité des problèmes fiscaux. L’impôt était considéré comme un frein à
l’investissement dans les entreprises.

Un vaste mouvement de refus s’est ainsi développé à la fin des années 70 du


côté des classes moyennes. Il était soutenu par des associations qui étaient pour
la plupart très marquées par les théories économiques libérales classiques. Ce
mouvement antifiscal a connu son apogée en Californie avec l’adoption le 6 juin
1978 par les deux tiers des électeurs d’un amendement à la Constitution appelé
la proposition 13. Cet amendement a réduit considérablement l’impôt foncier de
l’Etat de Californie en instituant un plafonnement du taux de cet impôt à 1% de
la valeur marchande du bien. Il s’agit là d’une première forme de
constitutionnalisation du taux de pression fiscale. Cet amendement avait été
soutenu par un sénateur républicain (Jarvis) ainsi que par le futur président des
USA (Ronald Reagan). Ce dispositif a ensuite été institué dans 22 autres Etats
des USA.

71
L2

II – Les autres modes de résistance à l’impôt


A – La fraude fiscale

Elle constitue un anti-fiscalisme individuel dont l’ampleur est évaluée à 15 ou


20% des recettes fiscales en France. On distingue la fraude de l’évasion fiscale.

La fraude est en effet un délit puni pénalement, et consiste à se soustraire


intentionnellement à l’impôt. Il faut donc prouver l’intention.
L’évasion fiscale consiste quant à elle à utiliser au maximum les possibilités
d’atténuer la charge fiscale sans pour autant enfreindre la loi. On parle
d’optimisation fiscale.

B – La grève de l’impôt

La grève de l’impôt a parfois été proposée par des partis politiques ou par des
mouvements anti-fiscaux. On avait demandé par exemple à des militants de
s’opposer à la construction d’une centrale nucléaire. Généralement, la grève de
l’impôt n’a jamais fonctionné.

C – La fuite devant l’impôt

Cette délocalisation des contribuables concerne surtout les sportifs de haut


niveau. Elle consiste à délocaliser leurs activités dans un autre pays à plus basse
pression fiscale. Le siège de leurs activités se trouve alors dans des paradis
fiscaux, Etats où la pression fiscale est parfois quasiment nulle. La fuite devant
l’impôt est également une réduction des activités professionnelles : on a
rencontré certains individus qui estimaient que, passé un certain stade, ils
paiyaient trop d’impôts, et qu’il valait donc mieux arrêter de travailler.

D – L’économie souterraine

L’économie souterraine est ce qu’on appelle le travail clandestin, c’est-à-dire des


activités non déclarées ou encore des échanges de services entre professionnels.
Le travail clandestin est aujourd’hui considérablement développé dans tous les
Etats du monde. C’est la terreur des Etats actuels car il est difficile à arrêter.

Section 3 : Les transformations de l’impôt


I – Les transformations de la nature de l’impôt

Aujourd’hui, la matière imposable et l’impôt lui-même se transforment sous la


pression de différents facteurs : la mondialisation des échanges, la délocalisation
des contribuables, le développement du commerce électronique, la prolifération
des industries de services, l’instabilité des systèmes fiscaux et financiers. 1ère
conséquence : la mobilité de la matière imposable au-delà des frontières pose
le problème de la fraude fiscale d’une part et du poids de plus en plus lourd de
l’impôt supporté par les contribuables qui n’ont pas les moyens ni de se
délocaliser ni d’optimiser leur fiscalité. 2e conséquence : le développement du
commerce électronique pose de très grands problèmes en ce qui concerne le
paiement de la TVA. On note en effet une fraude à la TVA.

II – La réforme fiscale et la recherche du bonheur

A – Les utopies fiscales

72
L2

Ce sont des doctrines qui proposent un impôt idéal : un impôt juste, simple et
rentable. Par ailleurs, cet impôt remplacerait tous les autres impôts. Il s’agirait
donc d’un impôt unique. Quelles sont les propositions d’impôts uniques qui ont
été faites à l’époque et aujourd’hui ?

L’impôt unique sur la terre : Cette doctrine a été conçue initialement par les
physiocrates au XVIIIe siècle. La terre était perçue comme la source de la
richesse économique. Ainsi, il était logique de taxer la propriété foncière. Cette
idée fut reprise au XIXe siècle, aux Etats-Unis, par Henri George (1839 – 1897).
George voulait instaurer un régime fiscal juste en instituant un impôt unique qui
aurait pour vertu de lutter contre la pauvreté. Il estimait qu’en taxant lourdement
la propriété foncière, on allait décourager les investisseurs d’investir dans ce
domaine et les conduite à investir dans l’industrie, ce qui aurait pour effet de
créer les emplois et par conséquent de lutter contre la pauvreté. Pour George, il
s’agissait de supprimer tous les impôts et de les remplacer par un seul impôt sur
le foncier.

L’impôt unique sur le capital : Il a été proposé par un fabricant de chocolats


(considéré à l’époque comme un médicament) qui s’appelait Menier à la fin du
XIXe siècle. C’était un libéral. Il estimait qu’il fallait supprimer tous les impôts et
les remplacer par un impôt sur le capital. Cette idée a été reprise dans la période
contemporaine, sous un angle lui aussi libéral.

73

You might also like