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TD Relations Individuelles du Travail 2010/2011

G8 – Etudiants salariés

TD4 LA RUPTURE DES CONTRATS ATYPIQUES ET SES CONSEQUENCES

CORRIGE

INTRODUCTION

Si la loi encadre précisément les conditions de rupture des CDD, la jurisprudence contribue elle aussi à
en préciser les modalités, notamment en cas de rupture anticipée du CDD pour faute du salarié.
L’arrêt de la Cour de cassation du 4 juin 2008 apporte sur ce point certaines précisions.

Les faits :
Moins de deux semaines après le renouvellement du CDD de M. Ypour une période de 12 mois, son
employeur a décidé de rompre de manière anticipée le CDD pour faute grave, en raison de l’absence
injustifiée du salarié depuis le renouvellement de son contrat.

La procédure :
M. Y agit devant le Conseil de prud’hommes à l’encontre de son employeur pour rupture anticipée
abusive du CDD et demande à ce titre le paiement de DI et l’indemnité de précarité.

Il est interjeté appel du jugement du Conseil de prud’hommes devant la Cour d’appel de Chambéry.

Par un arrêt du 14 février 2006, la Cour d’appel de Chambéry déboute en partie le salarié de sa
demande en considérant qu’une faute grave du salarié ayant été commise, l’inobservation de la
procédure disciplinaire n’a pas pour effet de rendre abusive la rupture anticipée du contrat mais ouvre
droit à des dommages et intérêts pour inobservation de la procédure.

M.Y se pourvoit en cassation.

Moyens des parties :

Demandeur au pourvoi – M.Y


La procédure disciplinaire des articles L.1332-1 et L.1332-3 doit être respectée.

L’absence de notification écrite et motivée de la sanction entraîne la rupture anticipée abusive du CDD
et ouvre droit à des DI sur le fondement de l’article L. 1243-4 du Code du travail ainsi qu’à l’indemnité
de précarité.

Défendeur au pourvoi – Argument de la CA


La faute grave du salarié est un cas de rupture anticipée du CDD légalement autorisée.

L’inobservation de la procédure disciplinaire est une irrégularité formelle qui ne rend pas la rupture
anticipée abusive mais ouvre droit à des dommages et intérêts pour inobservation de la procédure.

Décision de la Cour de cassation :

Par un arrêt du 4 juin 2008, la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel au motif que
l’absence de notification écrite et motivée au salarié de la sanction prise contre lui rend la rupture
anticipée du contrat de travail abusive et ouvre droit à des DI pour rupture anticipée.

PLAN :
1. Les conditions de la rupture anticipée du CDD
2. Les conséquences de la rupture abusive du CDD

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I. LES CONDITIONS DE LA RUPTURE ANTICIPEE DU CDD

A. L’EXISTENCE D’UNE FAUTE GRAVE

1. Des cas de rupture anticipée limitativement énumérés par la loi

Rappel du principe : le CDD prend fin à l’arrivée du terme prévu au contrat.

En l’espèce : CDD à terme précis conclu du 6 décembre 2003 au 30 septembre 2004, renouvelé pour
une période de 12 mois. Le CDD aurait du prendre fin le 29 septembre 2005 mais a été
prématurément rompu par l’employeur le 12 octobre 2004.

La possibilité d’une rupture anticipée du CDD :

L’arrêt de la Cour de cassation vise expressément l’article L.1243-1 du Code du travail qui rappelle les
cas de rupture anticipée du CDD autorisés par la loi : sauf accord des parties, force majeure ou faute
grave. + Rupture anticipée à l’initiative du salarié à condition de justifier d’une embauche extérieure
en CDI.

NB : La faute grave vise aussi bien la faute du salarié que la faute de l’employeur. Un salarié peut
rompre de manière anticipée le CDD en cas de faute grave de l’employeur.

En l’espèce, l’employeur invoque la faute grave du salarié pour rompre le CDD en date du 12 octobre
2004.

2. L’absence injustifiée : la faute grave du salarié

Définition de la faute grave : faute d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du
contrat de travail.

La faute sérieuse ne suffit pas à justifier la rupture anticipée du CDD.

La gravité de la faute est appréciée par les juges du fond. Selon une jurisprudence constante, les
absences injustifiées constituent une faute grave [Références]

En l’espèce, à partir du 30 septembre 2004, le salarié n’est plus venu travailler dans l’entreprise, sans
justifier de son absence et alors que son contrat avait été renouvelé. Deux semaines plus tard,
l’employeur a rompu son CDD.

B. LE RESPECT DE LA PROCEDURE DISCIPLINAIRE

1. Une exigence d’origine prétorienne

En principe, le CDD peut être rompu sans formalité particulière. L’employeur doit remettre au salarié
l’attestation destinée au Pôle Emploi, le certificat de travail, l’indemnité de CP.

En cas de rupture anticipée pour faute grave, la jurisprudence a posé le principe du respect par
l’employeur de la procédure disciplinaire prévue par les articles L. 1332-1 et L. 1332-3 du Code du
travail. En effet, la rupture du CDD est considérée comme une sanction disciplinaire.

Jp constante : Cass. Soc. 11 avril 1996, n°93-42632, publié ; Cass. Soc., 27 juin 2001, n°99-42216,
publié.

En l’espèce, la Cour de cassation réaffirme très clairement ce principe. « Attendu, cependant, que si le
contrat de travail à durée déterminée peut être rompu avant son terme par l’employeur en cas de faute grave du

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salarié, la procédure disciplinaire des alinéas 1 et 2 de l’article L. 122-41 du code du travail, devenus L. 1332-1 et
L. 1332-3, doit être respectée ».

2. La distinction entre irrégularité formelle et irrégularité substantielle

Concernant la procédure disciplinaire, l’arrêt du 4 juin 2008 distingue clairement l’irrégularité formelle
de l’irrégularité substantielle.

En l’espèce, il n’était pas discuté que la rupture du CDD avait été verbale.

Malgré une terminologie maladroite, l’utilisation du terme de « licenciement » à propos de la rupture


d’un CDD étant impropre, la Cour d’appel a considéré que l’absence de lettre de licenciement et
d’entretien préalable constituait une irrégularité formelle ouvrant droit à des DI pour inobservation de
procédure mais ne rendant pas la rupture du CDD abusive.

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel : l’absence de notification écrite et motivée de la
sanction (rupture du CDD) constitue une irrégularité substantielle qui rend la rupture du CDD abusive.

II. LES CONSEQUENCES DE LA RUPTURE ANTICIPEE ABUSIVE DU CDD

A. L’INDEMNISATION DU PREJUDICE SUBI PAR LE SALARIE

1. L’application de l’article L.1243-4 du Code du travail

En principe, la sanction disciplinaire est annulée sauf lorsqu’il s’agit d’un licenciement ou de la rupture
d’un CDD.

En cas de rupture anticipée abusive, l’article L.1243-4 s’applique et ouvre droit à des DI d’un montant
au moins égal aux salaires que le salarié aurait perçus si le CDD était arrivé à son terme.

Il s’agit d’une indemnité forfaitaire minimale qui ne peut subir aucune réduction (Soc. 31 mars 1993,
Bull. Civ. V, n°103).

En l’espèce, l’arrêt du 4 juin 2008 se réfère expressément à l’article L.1332-3 du Code du travail
(visa). Le salarié devrait avoir droit à des DI équivalent à 12 mois de salaire.

2. Le droit à l’indemnité de précarité

En principe, lorsqu’à l’issue d’un CDD, les relations contractuelles ne se poursuivent pas par un CDI, le
salarié a droit à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation. Elle
est égale à 10% de la rémunération totale brute versée au salarié. (L.1243-8)

L’indemnité de précarité n’est pas due en cas de faute grave (L.1243-10).

L’indemnité versée au titre de l’article L.1243-4 (DI pour rupture anticipée abusive) se fait sans
préjudice de l’indemnité de fin de contrat.

En l’espèce, le salarié n’a pas perçu cette indemnité dans la mesure où son CDD a été rompu pour
faute grave. Mais comme la rupture anticipée est abusive, le salarié pourra y prétendre.

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B. LA PORTEE DE L’ARRET

Cet arrêt se situe dans la ligne de la jurisprudence antérieure qui impose à l’employeur le respect de
la procédure disciplinaire en cas de rupture anticipée pour faute grave. (Cass. Soc., 11 avril 1996,
n°93-42632 ; Cass. Soc., 27 juin 2001, n°99-42216).

Cet arrêt publié au bulletin apporte une précision supplémentaire en sanctionnant l’irrégularité de
procédure assimilée à une règle de fond (absence de lettre de rupture écrite et motivée, absence
d’entretien préalable) par des DI sur le fondement de l’article L.1243-4 du Code du travail.

Dans un arrêt précédent en date du 12


nov. 2003 (n°01-42130, publié), la Cour de cassation a considéré que l’inobservation du délai d’un
jour entre la date fixée par l’entretien et celle du prononcé de la sanction constitue une irrégularité de
procédure ouvrant droit à réparation du préjudice en résultant pour le salarié. S’agissant d’une simple
irrégularité de procédure, celle-ci n’entraîne pas la rupture abusive du CDD pour faute grave, mais
seulement l’octroi de DI pour le préjudice subi.

NB : L’inobservation des règles de forme cause nécessairement un préjudice qu’il appartient de


réparer [Cass. Soc., 13 nov. 2008, n°07-40784, publié]

Par un arrêt postérieur du 6 octobre 2010 (n°09-41294, publié), la Cour de cassation a encore précisé
que la procédure disciplinaire entraînant la rupture anticipée du CDD pour faute grave devait être
mise en œuvre dans un délai restreint.

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