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Antiquité

L'Antiquité est la période durant laquelle se sont developpées les plus anciennes civilisations,
l'humanité rompt alors avec le monde animal afin de developper un ensemble de phénomènes
socio-culturel. L'Europe tombe sous l'influence greco-latine, la Gaule est progressivement
intégrée à l'Empire Romain. Celui-ci survit des siècles grâce à sa puissante organisation
politique et militaire. Mais peu à peu, les tribus germaniques s'imposent et parviennent à
effacer les vestiges de la civilisation romaine.

Moyen Âge
La chute de l'Empire romain annonce une période sombre dans toute l'Europe, les tribus
germaniques prennent le contrôle des régions. Rapidement, les Francs vont s'imposer et
aboutir à la formation de l'Empire carolingien véritable pôle d'une renaissance culturel. Au
delà des invasions normandes, la ferveur religieuse entraîne les Croisades et les innombrables
pélerinages. Tandis que les principes de la féodalité aboutiront à un long conflit entre la
France et l'Angleterre qui renforcera le pouvoir royal.

La société du Moyen Âge (476 - 1498)

Le système féodal
Contexte historique
La fin d'un monde
Peu après les invasions barbares, le décor urbain de Rome disparût, et laissa place aux
champs, pâturages et forêts. Les principes de la culture urbaine des Romains devaient ainsi
s'adapter à ce nouveau changement. De puissantes tribus germaniques envahirent l'Europe et
s'y installèrent aux IIIe et IVe siècles de l'ère chrétienne. Elles amenèrent de nouvelles règles
de conduite, de nouveaux codes d'éthique et une nouvelle manière d'accumuler et de répartir
les richesses.
La
décadence
de l'Empire

Détail d'un
tableau
représentant
une orgie
romaine,
signe de la
décadence
de l'Empire.

Les Romains de la décadence - par Thomas COUTURE (Musée d'Orsay)

Une société chaotique


Le monde était entré dans une nouvelle ère remplie d'énigmes et de mystères, il était
dangereux de s'aventurer dans les forêts hostiles où les bandits avaient le contrôle. Les
voyageurs du temps des Romains avaient disparus. La peur collective régnait partout. Les
premiers Mérovingiens occupés à se détruire ont peu fait pour améliorer cette situation de
chaos. A peine les invasions de l'Est endiguées qu'il fallait faire face aux Vikings et
Normands. Le grand Charlemagne restaura en partie la situation en posant les principes d'une
nouvelle administration. La monnaie circula de nouveau, des écoles furent crées, la population
se hiérarchisa entraînant souvent la possession de privilèges pour les uns par rapport au autres.
Cette période est couramment appelée : « La Petite Renaissance ».

L'organisation féodale
L'administration locale
Sous l'Empire carolingien, l'empereur représentait le cœur de l'organisation administrative.
L'étendue de son territoire l'avait imposé à déléguer ses pouvoirs à des responsables de
régions, contrées ou districts. L'insécurité du territoire était telle que le royaume était délimité
géographiquement de telle sorte que l'on pouvait aller d'un point à un autre en une journée de
cheval. Les rivières ou les forêts délimitaient les régions ainsi formées. La nécessité et la peur
avaient imposé un tel réseau de relations entre le responsable d'une région, appelé vassal et
l'empereur ou le roi auquel il avait promis fidélité. Le vassal prêtait serment au seigneur, il
occupait ainsi un fief, domaine terrien de taille importante. Il devait fournir des soldats au
seigneur et lui assurait des revenus. En retour, le seigneur le protégeait avec son armée.
L'organisation du
fief

Certains champs et
villages dépendent
directement du
vassal qui est
retranché dans le
château fort. Celui-
ci a confié des
hameaux à des
arrière-vassaux qui
protègent à leur
tour des sous-
vassaux qui
s'occupent de
quelques parcelles
et maisons.
(Bibliothèque nationale de France)

Décentralisation du pouvoir
Le système féodal est donc formé d'un ensemble de rapports personnels, fondés sur les aides
réciproques qui organisent la société sur de nouvelles bases. Un certain rapport de force est
caractéristique du système féodal. Le puissant a besoin d'hommes fidèles pour l'aider à
administrer les terres et l'armée. Il y a d'autre part les moins puissants qui demandent aide et
assistance, ils deviennent ainsi serviteurs du plus puissant. Mais ils pourront en outre
promulguer des lois, recruter des soldats... Le système féodal est né de la faiblesse des États et
de l'insécurité qu'elle engendrait. L'État fut par la suite morcelé en un grand nombre d'unités
autonomes et accompagné du déplacement de la vie sociale et économique vers la campagne
ainsi que vers la résidence du seigneur : le château.
La vie au château

Le château était le centre


d'un ensemble vivant
pratiquement en circuit
fermé. Il comprend les
habitations du seigneur,
des soldats, des paysans
libres, des artisans, des
serfs ainsi que tout ce
qui était nécessaire à leur
vie : les écuries, les
entrepôts, les magasins,
les fours, les ateliers...
Dans des situations
exceptionnelles telles
qu'un siège, il pouvait se
passer du monde
extérieur.

(Bibliothèque nationale de France)

Une société nouvelle


Le vassal n'était pas le vrai propriétaire de son fief, cela revenait au suzerain, mais il pouvait
administrer et utiliser à son profit les ressources et les produits de la terre. A la mort du vassal,
la terre revenait au suzerain, mais dans la pratique le fils du vassal venait renouveler le
serment de fidélité fait par son père. Le vassal peut lui-même être assisté par d'autres
personnes qui lui prêtent fidélité, ces personnes recevaient alors, un château, une tour fortifiée
avec un village, des champs, ou une route et un pont. Ils constituaient les arrière-vassaux. A
cette époque on distingue déjà trois ordres : la noblesse qui s'occupait de commander et
guerroyer, le clergé qui priait pour la paix spirituelle, les paysans quant à eux travaillaient
moissonnaient, ils survivaient avant tout.

L'émergence de la noblesse
A la mort de Charlemagne, le pouvoir impérial s'affaiblit, les délégués du pouvoir prirent de
l'indépendance et de l'importance. Une noblesse émergea et se hiérarchisa respectivement en
barons, vicomtes, comtes, marquis, ducs et princes. Il arrivait même que des vassaux soit plus
riches que leurs seigneurs. Ainsi les ducs de Normandie qui contrôlaient l'Angleterre était plus
puissants que les rois de France. Lorsque les Capétiens montèrent sur le trône leur pouvoir
était très réduit, ils ne contrôlaient pas tout le royaume mais uniquement la région d'île de
France. Il leur fallait aussi assurer leur hérédité, mais peu à peu les Capétiens parvinrent à
restaurer l'autorité royale et à abreuver leur pouvoir. De son coté, l'Église récupéra le
monopole spirituel de l'Occident où la vision manichéenne du Diable et de Dieu n'a jamais été
aussi forte.
Le serment du vassal au seigneur

« Tout le monde sait que je n'ai rien


pour me nourrir et me vêtir. C'est pour
cela, mon seigneur, que j'ai sollicité
votre miséricorde, et vous avez bien
voulu me l'accorder, la faveur de me
placer sous votre protection. Je le fais
à condition que vous me donniez de
quoi vivre, en échange de mes
services... Tant que je vivrai, et bien
que demeurant libre, je vous servirai
avec fidélité. Mais en échange, je
resterai toute ma vie sous votre
pouvoir et votre protection. »
Chroniques de Jean Froissard, XVe, (Bibliothèque nationale de France)

Expansion du système féodal


L'Empire carolingien était à l'origine d'une renaissance artistique, qui s'effondra sous les
invasions normandes. Cependant les Normands adoptèrent le système féodal, ils l'importèrent
même en Sicile et en Angleterre. Le système féodal fut même employé en Espagne par les
Musulmans. Les Croisades l'exportèrent jusqu'aux seigneuries latines d'Orient. Au XIIe siècle,
les fiefs sont les plus importants au Nord et au Centre de l'Europe. Ils allaient donner
naissance aux régions et principaux États modernes. Le système féodal se maintint en place
près d'un demi-millénaire. Pendant des siècles, des régions européennes vécurent dans un
climat de paix et de prospérité, cela n'excluait pas les guerres entre barons, mais le peuple
avait rarement à subir les pillages et rapines.

La hiérarchie de la noblesse

• Prince
• Duc
• Marquis
• Comte
• Vicomte
• Baron
• Chevalier
• Ecuyer

La condition des pauvres


Différentes conditions pour le peuple

• Les artisans : Ce sont les plus favorisés, ils s'occupaient de travailler le fer, le cuivre,
le bois, la laine... Ils obtenaient un atelier et une maison par un seigneur et devaient lui
fabriquait des outils en contrepartie (des armes en général). Mais ils restaient des
hommes libres.
• Les alleutiers : Parmi les agriculteurs qui cultivaient les champs du seigneur,
nombreux étaient ceux qui étaient également libres. Ce sont les alleutiers qui étaient
propriétaire d'un alleu (terres libres sans le contrôle d'un seigneur). Ils nécessitaient
cependant une protection, et réclamaient ainsi le soutien d'une armée à un seigneur. En
échange, ils fournissaient au suzerain une partie de la récolte et devaient effectuer des
corvées (travaux gratuits) : réparation d'un mur du château, construction d'un pont,
moissons... Ils devaient en outre payer une taxe pour utiliser le four ou le pont
seigneurial. Mais malgré ces charges lourdes, il en résultait d'un accord entre hommes
libres.
• Les serfs : Beaucoup plus modestes que les autres, ils étaient quant à eux attachés à
une terre et à un seigneur, ils n'étaient donc pas libres, mais ils vivaient dans des
conditions beaucoup moins dures qu'on ne le pense. Cette « servitude » leur apportée
une sécurité et une certaine stabilité.

Le travail
de la
terre au
mois
d'octobre

Jean et Herman Les très riches Heures du duc de Berry, le mois d'octobre - par
Paul LIMBOURG (musée Condé, Chantilly)

Le monde rural
La ruralité est le nerf du système, elle constitue la base de la survie économique. Les
industries sont en effet peu présentes, elles se réduisaient à la fabrication des armes, de
forteresses, de cathédrales... Et le commerce interrégional existait à peine. La majorité des
paysans restent des hommes libres chez eux, l'esclavage se limitait à la cour royale et à la
vassalité. Les paysans semaient à la main et utilisaient des bœufs pour cultiver. Chaque année,
des terres étaient laissées en jachère (non cultivées) afin de les rendre fertiles. Mais très vite,
les conditions du paysan se dégradèrent. Le temps devint plus humide et plus froid au XIIIe
siècle, les récoltes furent mauvaises. Bientôt, il n'y avait plus assez de soleil pour extraire le
sel de l'eau de mer, la viande ne se conservait plus. Ainsi, des maladies apparurent : la
typhoïde, la dysenterie et la peste, elles s'ajoutèrent à la famine qui poussait certaines
personnes à manger chiens, chats et même leurs propres enfants.

Les chevaliers
La chevalerie
Rompant avec la tradition franque qui consistait à partager le royaume entre les fils, le
seigneur féodal fit de son fils aîné l'unique héritier du fief. Les autres fils recevaient une
somme d'argent, une armure, un cheval dressé pour le combat, un écuyer et une épée. Nantis
de ce bagage, ils s'aventuraient sur les routes, et avec l'aide de Dieu et de leur épée pouvaient-
ils conquérir un fief. Ce furent les premiers chevaliers. C'est sous l'influence de l'Église que
fut créée la chevalerie, un ordre militaire et presque religieux, difficile à accéder. Ses
membres devaient s'engager à servir le bien, la justice et l'honneur.

Chevalier
au cours
d'un
tournoi

L'initiation du chevalier
Seuls les fils de nobles pouvaient devenir chevaliers. De rares exceptions étaient faites pour «
les chevaliers de l'épée » qui obtenaient ce titre pour leur courage sur le champ de bataille.
Mais le postulant devait suivre un long apprentissage. Dès sept ou huit ans, le jeune cadet
devenait page et servait le seigneur comme un domestique noble. A quatorze ans, il devenait
écuyer, il portait son écu (bouclier représentant les armoiries), il devenait son assistant sur le
champ de combat. Il apprenait dans le même temps, le maniement des armes et à monter le
cheval en portant son bouclier et sa lourde lance. Il s'entraînait à l'esquive des coups avec la
quintaine (mannequin en bois qui pivotait sur un axe). L'instruction durait sept années en
général.

L'investiture du chevalier
La cérémonie d'investiture du chevalier avait traditionnellement lieu le jour de l'Ascension
(quarante jours après Pâques). Le seigneur fournissait le coûteux équipement du chevalier. La
veille de la cérémonie, le postulant portait une chemise blanche et une tunique rouge, couleur
du sang. A la tombée de la nuit, le chevalier passait la nuit agenouillé devant l'autel de la
chapelle à prier. A l'aube, une sonnerie de trompette annonçait le début de la cérémonie.
Durant la messe, le chapelain rappelait les devoirs du chevalier. Après la communion, le
cheval du futur chevalier entrait dans la chapelle. Puis la main tendue au-dessus de l'Évangile,
le jeune homme jurait solennellement de respecter les règles de la chevalerie. Il revêtait alors
son armure (haubert, cuirasse, brassards, jambières). Puis le seigneur frappait du plat de
l'épée, les épaules et la tête du chevalier (adoubement). Le seigneur prononçait alors ces
mots : « Au nom de Dieu, de Saint-Michel et de Saint-Georges, je te fais chevalier. Sois
preux, loyal, généreux. » Le chevalier mettait son casque, saisissait sa lance et sautait à
cheval. Cette chevauchée était le symbole de son errance à travers le monde où il devra faire
respecter la justice, défendre la foi...

La ferveur religieuse
Introduction
Au début du Moyen Âge, la foi religieuse était déjà profonde et bien ancrée chez les chrétiens
européens. Malgré une tendance à générer un certain fanatisme, elle ne s'exalta que rarement
jusqu'à la violence. Les choses changèrent cependant à mesure que grandissait et s'étendait la
menace de l'Islam...

Présentation du contexte historique


L'expansion du christianisme
A partir de l'an 100 de notre ère, les conversions au christianisme au cœur même de l'Empire
romain alarmèrent les dirigeants impériaux. Sous le règne de Néron, la persécution et la
persécution s'effectuait à une cadence vertigineuse. Le théologien Origène qui s'était castré
pour ne pas succombait au péché de chair écrivait alors : « La foi en Jésus Christ s'assoit, se
nourrit et s'étend sur des montagnes de martyrs ». La logique et la morale de la pensée gréco-
latine ne pouvait comprendre la chrétienne. Alors que les Romains se livraient avec délice au
paganisme, l'empereur Constantin Ier fut frappé par une vision, et se convertit subitement au
christianisme. En fait ce césar se souciait moins de ses convictions que d'une opportunité
diplomatique.

Le Bien contre le Mal


Dans ce bouillon de culture très particulier que fut le Moyen Âge, bourré de fantaisies
démoniaques et de visions angéliques, deux acteurs tiennent un rôle de premier plan : Dieu et
Satan. Deux antithèses mères de tous les excès entre ferveur et exaltation. Hors le Ciel ou
l'Enfer, point d'alternative au genre humain en cette période sombre. Sauver son âme telle
était l'objectif. Pourtant au début des invasions barbares, Dieu était craint, ses colères étaient
redoutées, mais finalement en quittant l'époque mérovingienne, le Dieu exerçant les
châtiments est progressivement devenu un Dieu bienfaiteur incarnant le Bien, et Satan est
devenu la personnalisation du Mal.

La
sagesse de
Dieu

L'image
de Dieu
en
vieillard
tenant le
globe, se
répand
dans l'art
occidental
au cours
du XIVe
siècle.

Heures à l'usage de Troyes (Troyes, B.m., ms. 3713, f. 093,


3713)

Divers exemples de la ferveur religieuse


La croisade contre les albigeois
La ferveur religieuse fut le grand symptôme du Moyen Âge, à la chute de l'Empire romain, le
christianisme apparaissait comme une religion jeune et vigoureuse. Un processus d'expansion
soumis à des évolutions du point de vue dogmatique et spirituel, lui donnait un beau
dynamisme. Cependant les hérésies et les schismes florissaient et se multipliaient. L'un des
plus dangereux schismes était sans doute l'arianisme qui niait la divinité du Christ. L'une de
ces hérésies fut celle des bogomiles de Bulgarie, et qui s'étendit jusqu'à l'Occident. Ce fut
alors une grave crise religieuse en France qui vit s'affronter l'Église catholique aux Cathares et
aux Albigeois. La croisade entreprise par la papauté contre l'hérésie cathare fut commandée
par l'ambitieux Simon de Montfort. Les armées papistes ravagèrent l'Aquitaine, entraînant des
milliers de victimes et détruisant la culture la plus raffinée de l'époque : la civilisation
occitane issue du mythe de la chevalerie, de l'honneur chevaleresque et de l'amour-courtois,
honorée par les troubadours.

Le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle


La tradition raconte qu'après avoir été décapité en Judée, les restes de Saint Jacques le
Majeur, apôtre du Christ, auraient été amenés dans le plus grand secret sur la côte de Galilée.
De là, on suppose qu'ils furent embarqués pour la Galice extrémité de la péninsule ibérique.
Un culte primitif local entretint et perpétua la mémoire de cet événement, tenant secrète la
sépulture jusqu'à sa découverte au IXe siècle. La nouvelle se répand alors dans le monde
chrétien de l'Europe de manière vertigineuse enflammant les esprits, exaspérant la foi de tous.
Un engouement pour ce nouveau culte apostolique va drainer des foules pèlerines en quête «
d'extraordinaire ». Des hommes se mettent en route, à pied par les sentiers et les chemins peu
sûrs, traversant rivières impraticables et denses forêts au mépris de tous les dangers. Les
pèlerins d'Europe se retrouvent en France et traversent notamment le col de Ronceveaux (la
Chanson de Roland). L'élan de la Reconquista espagnole donnera de l'ampleur au pèlerinage.

Jacques
le
Majeur

Les croisades
Bénie par le pape et conduite par les monarques des royaumes chrétiens, cette aventure devait
représenter tout ce que l'esprit médiéval avait de bon en lui. Huit croisades au total, où
s'impliquèrent tous les états (clergé, noblesse, bourgeoisie et université), toutes castes
confondues. Forgerons, tanneurs et artisans équipèrent les Croisés, les travailleurs de
chantiers navals fournissaient les navires pour traverser la Méditerranée. Les femmes
confectionnaient vêtements, couvertures, et brodaient avec ferveur les bannières, enseignes et
fanions qui devaient arborer les champs de bataille, de nombreuses femmes de la Cour
suivaient la reine qui accompagnait parfois son royal conjoint. Et la hiérarchie du clergé priait
depuis les plus hautes cathédrales aux modestes chapelles. Les multiples campements devant
les cités assiégées étaient en proie à une dévotion particulièrement atroce. Ainsi, après la mise
à sac de la Palestine, Raoul de Caen, chroniqueur de la Première Croisade écrivait : « A
Maarat, les nôtres firent cuire les païens adultes dans des marmites et embrochèrent les
enfants pour les manger rôtis. » Certains prêtres musulmans qui savaient où se cacher la
Sainte croix du Christ furent torturés, des Juifs étaient enfermés dans leur synagogue et y
brûlèrent vifs. Ces entreprises démesurées étaient principalement menés par les Francs qui
perdirent durant les Croisades plus d'hommes que tous les autres pays Chrétiens réunis.

La hiérarchie du clergé

Le clergé peut se distinguer entre :

• clergé régulier : qui suit la règle d'un ordre religieux.


o ordre monastique (bénédictains, cistérciens)
o ordre mendiant (franciscains, dominicains)
• clergé séculier : qui vit dans le « siècle », c'est-à-dire dans la société.

On peut également distinguer :

• Le haut clergé, les prélats :


o Pape
o Cardinaux
o Evêques
o Archevêques
o Abbés
o Prieurs
• Le bas clergé :
o Prêtres
o Frères convers
o Curé

Annexe : voir la liste complète des papes

La justice
La justice au Moyen Âge
L'époque médiévale vit la coexistence de deux concepts en matière de justice :

• Le premier se réclamant du droit romain, il s'agit de celui des rois et de l'Eglise, qui,
après la chute de l'Empire et la christianisation des barbares incarnait l'antique prestige
de Rome. Le Droit romain consistait en l'application de la justice en vertu de lois et
décrets écrits : La loi des Douze Tables de l'ère républicaine tout d'abord, puis les lois
plébiscites ou codes, à l'époque de l'Empire. Les Romains avaient adopté la manière
des Athéniens de rendre la justice.
• Le second est celui du peuple et des seigneurs sur leur fief qui désirait établir leur
justice sans rendre de compte, ce mode de justice dérive des principes du droit
germanique Par essence, la justice germanique était très simpliste : le seigneur se
réservait le droit d'infliger des châtiments à ses sujets, en application de vagues
concepts issus d'antiques traditions. Cependant aucune loi n'était rédigée. L'exercice
du droit germanique des seigneurs féodaux était réparti selon trois niveaux :
o La haute justice, qui donnait pouvoir de vie ou de mort et l'octroi de
l'utilisation de la torture ainsi qu'à la saisie des biens.
o La moyenne justice se limitait à punir des délits qui n'impliquaient pas la peine
de mort mais pouvaient conduire à de lourdes condamnations.
o La basse justice était restreinte au châtiment des serviteurs dépendant du
seigneur.

Scène de
torture d'un
homosexuel
au Moyen
Âge

Justice et châtiments
Les concepts de droit romain et de droit germanique se heurtèrent au cours des siècles, de
nombreux châtiments physiques refirent leur apparition en Europe. La principale nouveauté
introduite en Europe fut l' ordalie, il s'agit d'un système visait à démontrer la culpabilité ou
l'innocence de l'accusé. Cette pratique barbare consistait à soumettre l'accusé à une épreuve
difficile qu'il devait surpasser pour prouver son innocence. Parmi les plus courantes : la
bassine d'huile bouillante dans laquelle l'accusé devait plonger une main et la ressortir
indemne ou celle des braises de charbon chauffées qu'il devait se saisir sans se brûler...
Evidemment dans la majorité des cas, l'accusation était suivie par l'exécution capitale.
L'Eglise ne fit rien pour éradiquer ces pratiques brutales, bien au contraire, elle les développa
avec dextérité. Une variante de l'ordalie fut celle du « jugement de Dieu » : l'accusateur
affrontait l'accusé dans un combat mortel. Les femmes et les nobles pouvaient choisir un
champion pour les représenter. Une autre pratique fut celle de l'écartèlement. Le prisonnier,
après avoir été pendu, décapité, lapidé, ou criblé de flèches, était mis en pièces : chacun des «
morceaux » était exposé publiquement.

Le Tribunal d'Inquisition
L'Inquisition était chargée dès le XIIIe siècle de réprimer l'hérésie dans certains États
catholiques. Les premiers inquisiteurs connus, deux moines de l'ordre de Cîteaux lors de
l'hérésie cathare. C'est en 1231 que le pape Grégoire IX créa Le Tribunal d'Inquisition, placé
sous le contrôle de l'ordre des Dominicains. D'abord présentée comme un organisme
judiciaire temporaire, l'Inquisition a été transformée en établissement régulier et permanent
par les conciles du Latran (1215) et de Toulouse (1229). Toute personne pouvait être
poursuivie sur simple dénonciation, l'essentiel pour les juges étant d'obtenir l'aveu des
inculpés, ce qui, à partir de 1252, les amena à utiliser la torture. Par son action brutale, elle fut
aussi utilisée pour combattre d'autres formes d'hérésie, pour réprimer la sorcellerie, pour
persécuter les non-chrétiens ou jugés tels. Au XVe siècle, les progrès de la centralisation
royale firent peu à peu tomber en désuétude les tribunaux d'Inquisition en France.
Sorcellerie et satanisme

En cachette, on
pratiquait l'envoûtement
et l'exorcisme. On
croyait au pouvoir des
talismans, amulettes, ou
des philtres. La justice
civile et religieuse ne
tarda pas à mener une
lutte féroce contre ces
pratiques. Le satanisme
se réfère à un maître,
Satan ; c'est une religion
qui s'oppose
ouvertement à la
chrétienté. Mais à cette
époque, on ne fit pas de
distinction entre
sorcellerie et satanisme.
Même l'herboristerie
pouvait être considérée
comme une hérésie.
Inquisition Scene, par Francisco GOYA 1816 (Royal Academy of San Fernando, Madrid)

Les ordres
Les ordres de chevalerie

• Les Hospitaliers : L'ordre des Hospitaliers est fondé en 1113 en Palestine pour soigner
et protéger les pèlerins qui s'y rendaient. Gouvernés par un grand maître, les
Hospitaliers faisaient vœu de chasteté, de pauvreté et d'obéissance. Après la perte de la
Terre Sainte avec la prise de Saint Jean d'Acre en 1291, ils s'installent à Chypre et
conquièrent l'île de Rhodes sur les Byzantins en 1309. Charles Quint leur cède l'île de
Malte; ils prennent alors le nom de Chevaliers de Malte. Ils continuent à s'illustrer
contre les Turcs et s'illustrent lors de la bataille de Lépante en 1571. L'ordre demeura à
Malte jusqu'à la prise de l'île par Bonaparte en 1798. L'ordre siège aujourd'hui à Rome
et n'a plus qu'un rôle honorifique.
• Les Templiers : L'Ordre des Chevaliers de la milice du Temple est fondé en 1119,
pour la défense des pèlerins en Terre Sainte. Il s'enrichit, posséda domaines et
forteresses, servit de banque aux pèlerins et, plus tard, aux rois. Après la perte de la
Terre Sainte, l'ordre se retire dans ses possessions européennes. En butte à de
nombreuses hostilités, notamment parce qu'il ne relève que du pape, l'ordre est
persécuté à partir de 1307 par Guillaume de Nogaret et Philippe IV le Bel : arrêtés et
soumis à la question, les Templiers avouent des crimes peu vraisemblables. Le pape
Clément V convoque un concile sous la pression du roi de France. En 1312, Clément
V prononce la dissolution de l'ordre des Templiers. Le grand maître de l'ordre, Jacques
de Molay, est exécuté en 1314, et les biens des Templiers sont transmis aux
Hospitaliers.
• Les Chevaliers Teutonniques : Cet ordre hospitalier et militaire est fondé vers 1128
par les Croisés à Jérusalem, mais exerce son influence surtout en Allemagne. L'ordre
bénéficie bientôt de privilèges et de donations considérables. Les heurts avec les
Hospitaliers les incitent à chercher un établissement en Europe Orientale. Leur
avancée à l'Est est limitée par les Russes (défaite devant Alexandre Nevski en 1242).
Au XIVe siècle, le grand maître des Teutoniques apparaît comme un des souverains
les plus puissants et les plus riches d'Europe. Le XVe siècle voit cependant leur déclin
la défaite de Tannenberg de 1410 face aux Polonais et Lituaniens. Napoléon supprime
l'ordre en 1809, qui se reforme en Autriche en 1840.

Le trésor
des
Templiers

On a
beaucoup
écrit sur ce
fameux
trésor,
nombreux
l'ont
cherchés en
vain.
Pourtant
l'ordre était
infiniment
riche,
lorsque les
sbires de
Philippe le
Bel
investirent
le Temple
de Paris, ils
ne
trouvèrent
rien. Un
cortège de
chariots
recouverts
de paille,
avaient
quitté la
capitale la
veille a-t-on
dit. On dit
que le trésor
fut emmené
au Nord de
la France
pour aller
jusqu'en
Angleterre.
D'autres
sources
affirment
qu'il fût
caché dans
les monts
d'Auvergne.
Mystère...
Diffusé sur www.mythes-et-legendes.net

Les ordres religieux


La vie monastique a pris forme, dans ses structures essentielles, entre le IIIe et le XIIe s.
Selon la tradition chrétienne, le monachus (moine) mène une existence retirée, plus ou moins
solitaire, ceci est vrai pour l'ermite et, à un degré moindre, du cénobite (celui qui vit avec
d'autres moines).

• Les ordres monastiques (bénédictins, cistérciens) : L'ordre bénédictin, fondé au VIe


siècle par saint Benoît de Nursie, est le plus ancien ordre monastique d'Occident. À
partir du XIe siècle, l'ordre se diversifia : clunisiens, camaldules, chartreux... En 1098,
avec la création de Cîteaux par Robert de Molesme, naissait l'ordre des cisterciens,
dont le théologien le plus célèbre fut saint Bernard, abbé de Clairvaux. Mais les
entorses à la pureté primitive de la règle se multiplient, le prestige des cisterciens
décroît au profit des ordres mendiants.
• Les ordres mendiants (franciscains, dominicains) : Saint Dominique part prêcher dans
le pays languedocien en proie à l'hérésie cathare. Il prend conscience de l'ignorance de
la population et du clergé. Il fonde à Toulouse en 1215, l'ordre des dominicains, une
communauté de prêtres destinés à mener une sainte vie, à la prédication itinérante et à
l'enseignement. C'est une innovation que de concevoir une vie religieuse au contact
des foules et non dans un monastère isolé. Saint François d'Assise, quant à lui,
fondateur des franciscains (1210) fait une rencontre personnelle avec le Christ qui le
conduit à se dépouiller de tout son passé et à épouser Dame Pauvreté. La vie intérieure
de St François est marquée par la réalisation de son propre péché et de la miséricorde
de Dieu qui vient racheter. Les franciscains portent une robe brune avec une corde
pour ceinture (ce qui leur a valu le nom de cordeliers), habit des pauvres de leur
temps.

L'Art de la Guerre au Moyen Âge


Faire la guerre au Moyen Âge
Stratégie militaire
Au Moyen Âge, à l'exception de Crécy, Bouvines ou Azincourt, il n'existe pas vraiment de
grandes batailles. La majorité des opérations militaires consistent à éviter la bataille rangée et
l'affrontement en rase campagne. La majorité des conflits ne sont que des escarmouches ou
des embuscades (cependant meurtrières), des raids et des opérations relativement courtes mais
avec des déplacements relativement longs en raison de la progression lente des armées.
Souvent, dans les conflits locaux, il s'agissait de mettre en difficulté son adversaire en
l'affaiblissant militairement (perte d'hommes, de matériel...) et économiquement (demande de
rançons, destruction des ressources). Ainsi, il était coutume d'engendrer la crainte et la terreur,
ce qui explique les sacs, pillages et autres rapines qui touchaient le plus souvent des
populations pauvres et innocentes.

La
bataille
de
Crécy
(1346)

(Bibliothèque Nationale de France)

Tactique militaire
Le plus souvent, une armée était une combinaison de cavaliers et d'hommes à pied, ce qui
aboutissait à un dispositif assez complexe qui était l'œuvre de grands tacticiens comme
Charles le Téméraire par exemple. Il ne faut pas oublier qu'à l'époque, il n'existait pas de
cartes d'état-major. Les commandants en chef n'avait une connaissance du terrain qu'en
employant des espions ou des guides locaux. L'usage des cartes n'apparaît qu'au cours du XVe
siècle pour les opérations terrestres, alors qu'on en employait depuis le XIIIe siècle pour les
expéditions nautiques.

La bataille rangée
Refusée la plupart du temps, la bataille rangée était cependant le point le plus culminant de
toute campagne. Il existe trois types de combattants au cours des batailles :

• La cavalerie montée : Constituée de 3 ou 4 rangs de cavaliers formant une « bataille


».L'ensemble était constitué de petits groupes tactiques appelés « conrois » groupés
autour d'une bannière représentant une famille ou un seigneur. On formait alors des
blocs de cavaliers et de lances le plus serré possible. Les cavaliers se mettaient
lentement en route pour conserver l'alignement, puis accélérant au moment d'arriver
sur l'ennemi. Le but était de disperser l'ennemi, pour former des groupes isolés facile à
vaincre.
• La cavalerie démontée : La tactique était d'attendre l'attaque de l'adversaire. Cela
pouvait durer longtemps... Elle était très utilisée par les Anglais, les Français, quant à
eux l'appréciaient peu et l'employèrent bien trop tardivement.
• L'infanterie : Le corps d'infanterie avait trois dispositifs de combats : en ligne de front
sur quelques rangs formant une sorte de rempart ; en cercle très en usage chez les
Suisses, employé par les Français à Bouvines ; en bloc comme la bataille en forme de
quadrilatère, auquel s'ajoute un triangle d'hommes faisant face à l'adversaire. Une telle
formation de 10 000 hommes occupait une surface de 60 m sur 60.

Sièges et places fortes


Les Sièges
La plupart du temps, face à l'arrivée d'une massive armée, la seule solution adoptée est d'aller
se retrancher dans une place forte où l'on s'organisera pour soutenir le siège. La guerre de
l'époque n'est donc qu'une succession de perte et de reprise de places fortes émaillés par de
fulgurantes charges de chevaliers. Si l'attaque échouait, les chevaliers survivants se
retranchaient à nouveau derrière les murailles de la place forte. C'est ce que l'on appelle la
guerre guerroyante. Les armées se livraient alors à une incroyable partie d'échecs qui
consistait à s'emparer des places fortes, car celui qui les dominait, contrôlait tout le fief.

Le siège
d'Orléans
par
Jeanne
d'Arc

Le château fort
Le château est le lieu de résidence du seigneur, plus il est imposant et doté de moyens de
défense, plus le seigneur affirme sa puissance et sa gloire. Mais c'est aussi un lieu militaire
protégeant les biens et habitants du fief. Les premiers châteaux furent des tours en bois
établies sur des collines que l'on protégeait par plusieurs palissades et fossés. Vulnérables aux
feu et autres armes de jet, la pierre fut utilisée sous l'impulsion de normands. Les premiers
donjons en pierre étaient carrés, par la suite on les faisait arrondis pour réduire les angles
morts. Puis sous l'impulsion de Philippe Auguste en France, les châteaux devinrent de
véritables forteresses. Il devenait alors difficile de s'en emparer. La méthode la plus courante
était le siège, on encerclait le château pour le couper des ressources. En manque
d'approvisionnement, les assiégés finissaient par se rendre. Cependant le château pouvait
contenir une grande quantité de ressources et le siège pouvait durer des années. Il fallait alors
passer à la prise du château.
Voir la description intéractive d'un château fort

Les corps d'armées


La cavalerie
Généralement, il y avait trois divisions de cavalerie, la première vague devait enfoncer
l'ennemi, le gêner et le disperser, pour que les deux suivantes vagues puissent le mettre en
déroute. Les chevaliers, qui étaient l'élite de l'armée obéissait rarement aux ordres, ils
combattaient uniquement pour leur gloire personnelle, la victoire n'était qu'au second plan.
Parfois, les stratèges mettaient leurs cavaliers à pied à combattre avec les fantassins en
renfort, on se plaçait derrière des dispositifs (pieux, tranchées) pour contrer des charges. La
bataille de Crécy (1346) montre bien l'indiscipline des chevaliers, les Français qui étaient bien
plus nombreux se sont butés face aux archers Anglais qui se retranchaient derrière des pieux,
ils étaient appuyés par des chevaliers à pied, et vainquirent les Français. Mais à la fin du
Moyen Âge, le rôle de la cavalerie lourde était beaucoup plus réduit, les stratèges avaient
compris qu'il ne suffisait pas de charger des troupes d'infanterie bien disciplinées. Les charges
dévastatrices étaient encore possible, mais lorsque l'ennemi était en fuite et désorganisé.

Les archers
Pendant le Moyen Âge, il y avait toute sorte d'armes de jet (arc court, arc long, arbalète),
l'avantage des archers était de pouvoir tuer l'ennemi sans engager de combat individuel. Très
pratiqué dans les temps anciens, l'arme de jet s'oublia au début du Moyen Âge où les
chevaliers dominaient les territoires. Le code d'honneur rejetait l'arc, qui est considéré comme
l'arme d'un lâche. Mais les archers demeuraient utiles pour les sièges et batailles, ils furent
déterminant au cours des batailles d'Hastings (1066) et Crécy (1346). Les archers étaient en
formation compacte, leurs flèches pouvaient percer une armure à moins de cent mètres. Les
Anglais utilisèrent beaucoup les archers car ils étaient désavantagés lorsqu'ils se battaient hors
de leur île. Ils développèrent la tactique du tir de barrage, plutôt que de viser une cible
individuelle, ils visaient la zone qu'occupait l'ennemi. Ils pouvaient en outre tirer six flèches à
la minute. Les arbalétriers devinrent incontournables dans les autres armées d'Europe, qui
bénéficient d'une meilleure précision. Vers le XIVe siècle, les premières armes à feu de poing
apparurent aux champs de bataille.

La bataille
d'Hastings
(1066)

Épisode extrait de la Tapisserie de Bayeux


L'infanterie
Pendant l'Âge sombre, les fantassins étaient prédominant dans les armées, la tactique était
simple, on s'approchait de l'ennemi et on lui donnait de grands coups d'épées. Les Francs
lançaient leurs haches avant de se précipiter sur l'ennemi pour briser leurs rangs. L'arrivée des
chevaliers éclipsa l'infanterie, qui manquait de discipline et d'entraînement, il s'agissait
souvent d'une milice de paysans. Les Saxons et les Vikings utilisaient leurs bouclier en avant
pour se protéger des archers et des cavaliers. Les pays vallonnés (Écosse, Suisse) apprirent à
utiliser l'infanterie contre l'ennemi, les lanciers et piquiers armés de lances et de pointes
pouvaient ainsi mettre en déroute une cavalerie. Les Écossais plaçaient un cercle de lanciers
pendant leurs guerre d'indépendance (comme dans le film « Braveheart »). Les Suisses se
spécialisèrent avec l'utilisation des piques en réadaptant les formations de phalanges grecques.
Pour contrer ces lourdes formations serrées, les Espagnols eurent l'idée d'utiliser l'artillerie,
puis chargeait avec une infanterie équipés d'armes légères.
Les informations ci-dessous sont tirées du site www.donjons-de-france.com que nous
remercions pour sa coopération.

Les armures
L'armure du soldat
Très vite, on comprit que se défendre du combat était aussi important que porter un coup à
l'ennemi. Le terme "armure" n'apparaît qu'au XVe siècle pour désigner les protections en
aciers, auparavant on parlait d' harnois ou d' adoubement. Les premières armures étaient faites
en cuir, les Grecs et les Romains utilisèrent le bronze. A la chute de l'empire, l'armure
disparût, les barbares ne portaient qu'un bouclier et un casque. A l'époque carolingienne,
l'armure réapparaît, on plaçait des pièces de métal (écailles, rectangulaires, anneaux) sur une
large étoffe, c'est la broigne, utilisée par les Carolingiens et les Normands. Au XIIe siècle, on
adopta le haubert (cotte de maille), véritable tissu de métal. Un capuchon de maille et des
gants de peaux complétaient parfois l'équipement. Puis, au XIIIe siècle, on complétait la cotte
de maille avec des gantelets et des chausses de mailles, on ajoutait ensuite des pièces de fer,
car le haubert était vulnérable aux armes de choc (masse, marteau). Puis bras, torse, coudes,
jambes furent tour à tour protéger. Au XIVe siècle, il y eut une transition entre la cotte de
mailles et l'armure de plates complètes, avant d'être abandonnée par l'apparition des armes à
feu.
XIIe siècle - XIIIe siècle - Cotte de
XIVe siècle - Gambison XVe siècle - Armure
Haubert de mailles complétée de
et haubert, surcot, de plates complète,
mailles long, chausses et de
cubitières, genouillères gorgerette de mailles
casque conique à gantelets, surcot,
et grèves et bassinet
nasal heaume cylindrique

Le heaume
Le heaume désigne l'armure de tête, le terme fait son apparition au XIIe siècle, l'utilisation du
casque remonte cependant à l'Antiquité. Les améliorations successives du casque consistèrent
à couvrir de plus en plus le visage rendant difficile l'identification de son propriétaire. C'est
peut-être l'origine de l'Héraldique, la science des blasons. Un épisode très célèbre figure dans
la tapisserie de Bayeux, Guillaume le Conquérant enlève son casque pour être reconnu par ses
hommes qui le croyait mort. Au Xe siècle, on utilisait le casque conique à protection nasale
qui fut importé par les Normands. A partir du XIIIème siècle, pour mieux protéger le visage,
on créa un heaume cylindrique enveloppant la tête entière avec des fentes uniquement pour
les yeux. Ces heaumes étaient lourds et rendaient la respiration difficile. L'amélioration des
techniques de travail du fer permit de revenir à une forme conique sur le dessus du heaume
qui protégeait davantage que la forme plate, tout en conservant une protection du visage. Le
bassinet, qui apparut vers le début du XIVe siècle améliora considérablement le confort. Il
était moins lourd et possédait une visière pouvant être relevée. A la fin du XIVème siècle, le
heaume à "tête de crapaud" fait son apparition (utilisé lors des tournois et joutes).
Casque conique
Heaume cylindrique Heaume à "tête de
avec protection Heaume à bassinet
à dessus plat (XIIe crapaud" (XIVe
nasale (XIe (XIIe siècle)
siècle) siècle)
siècle)

L'écu
Le bouclier est la plus courante et ancienne des armes de défense, spontanément, les hommes
utilisaient des pièces de bois pour parer les coups. Puis on y installa des attaches destinés à
maintenir le bouclier d'une seule main, parfois on y ajoutait une sangle pour reposer le
bouclier sur le dos afin de manier des armes lourdes. Les premiers boucliers étaient ronds,
mais ce sont les Romains qui adoptèrent les boucliers à bords droits, beaucoup plus efficaces
contre les projectiles. Mais au Moyen Âge, les Francs et les Vikings utilisaient plutôt des
boucliers ronds recouverts de cuir pour une meilleure rigidité. On appelle écu, le bouclier du
Moyen Âge. Dès le XIe siècle, les Normands adoptèrent le bouclier long, arrondi sur le
dessus, et se prolongeant pour protéger les jambes. L'amélioration des armures et l'utilisation
du cheval contraignit les soldats à employer un bouclier plus petit. A partir du XIIIème siècle,
l'écu porte régulièrement les armoiries de son propriétaire ce qui permet de l'identifier. Au
XIVe siècle, le bouclier de tournoi, plus petit apparût, il possédait une encoche sur le dessus
afin de maintenir la lance. Le pavois fit également son apparition, il s'agissait d'un grand
bouclier ovale porté par les fantassins et les arbalétriers, qui le plantaient dans le sol pour se
protéger lors du rechargement de leurs armes.

Bouclier Vicking
Bouclier Normand Écu en V du
avec l'umbo au
du XIe siècle XIIIe siècle
centre

Les armes
Les armes de corps à corps

• L'épée : C'est l'arme la plus utilisée par l'homme d'arme du Moyen Âge. L'époque
carolingienne voit s'installer l'épée longue (les Romains utilisaient des épées courtes).
Elle devint alors une arme noble et le chevalier lui donnait parfois un nom (Durandal,
l'épée de Roland). A la fin du XIIe siècle, la poignée devient plus longue pour être
portée à deux mains. On distingue deux types d'épées, lames légères et lourdes qui
servent à frapper d'estoc ou de taille (de la pointe ou du tranchant), les chevaliers
possédaient souvent les deux types de lame.
• La lance : C'est une arme très ancienne, on utilise un long bâton équipé d'une pointe en
fer. Au XIe siècle, la lance ne dépassait pas trois mètres, elle servait à charger
l'ennemi. On y ajouta une garde d'acier pour protéger la main du chevalier. Au XIVe
siècle, on utilisait un crochet fixé sur l'armure afin que le chevalier puisse maintenir la
lance sous l'aisselle. La lance fut ainsi plus longue et plus lourde.
• Le fléau : C'est un manche de bois muni d'une chaîne métallique sur laquelle est
accroché une masse de fer, les Français ne l'utilisaient que très peu. Elle était
particulièrement destructrice pour les hauberts, elle fut ensuite rallongée, pour
atteindre les cavaliers. La masse était généralement sphérique et armé de pointes. Une
variante du fléau : le goupillon possédait plusieurs chaînes garnies de boules à pointes
acérés.
• La hache : Les peuplades germaniques furent les premiers à utiliser la hache (outil) au
combat. Les Francs utilisaient la francisque (hache courte à une lame), qu'ils pouvaient
lancer à 3-4 mètres pour ouvrir le combat. Ils utilisèrent plus tard la hache Danoise,
longue (1m50) tenue à deux mains. Au XIVe siècle, des haches nouvelles apparurent
(hallebarde), pouvant frapper de taille et d'estoc (tranchant et pointe).
• La masse : Composée d'un manche et d'une tête garnie de pointes, on l'utilise dès le
XIIe siècle. La masse pouvait briser un crâne ou même casser un membre à travers le
haubert. Plus tard, la masse était formée d'une série de lames, le manche fut fabriqué
en fer pour éviter qu'il se casse.

Le fléau La hache La masse La hache francisque

Les armes de jet

• L'arc : Arme qui date du néolithique, il s'agit d'un bâton de bois courbé avec une corde
liée aux extrémités. L'arc composite fut une avancée majeure, améliorée au niveau de
la corne et des nerfs. Les flèches devaient avoir une trajectoire stable pour être
efficace, généralement peu coûteuses, elles étaient produites en quantité. La taille des
flèches dépendaient de la difficulté à bander l'arc. L'archer était vêtu légèrement pour
pouvoir se mouvoir plus facilement, pour sa survie, il devait disposer d'une arme
supplémentaire (couteau, épée).
• L'arbalète : Cette arme dérive de l'arc, elle est utilisée dès le Xe siècle. L'arc est posé
sur une pièce en bois qui le maintient ( arbrier) et d'un mécanisme ( noix) qui permet
de maintenir la corde tendue, de lâcher la flèche, et de bander l'arc. L'arbalète est plus
puissante et précise que l'arc mais sa cadence est plus faible. Les flèches courtes
étaient appelés les carreaux (15 à 30 cm). Le pape Innocent II interdit en 1139 l'usage
de cet instrument (qui dit-on fut inventé par le diable), mais elle fut employée contre
les infidèles lors de la IIIe croisade. Les différentes arbalètes se caractérisent par leur
mécanisme :
o L'arbalète à croc : tout en maintenant l'arbalète des deux mains, le soldat
engageait son pied dans un étrier et tendait la corde en poussant l'arme.
o L'arbalète à pied de biche : constituée d'un levier à deux branches, lorsqu'on le
basculait, il ramenait deux crochets vers l'arrière qui bandaient l'arc. Elle était
beaucoup utilisée par les arbalétriers à cheval.
o L'arbalète à moufle : une corde attachée à un treuil était placé à l'aide d'un
crochet sur la ceinture du soldat qui en tirant dessus rabaissé le treuil et bander
l'arc, c'est la plus puissante des arbalètes.
o L'arbalète à cranequin : constitué d'un tambour rotatif qui sous l'effet d'une
manivelle se déplaçait sur une roue dentée à crémaillère. Un stratège chinois
inventa au IIIe siècle une arbalète à répétition qui pouvait tirer dix traits en
quinze secondes.

Archer Arbalétrier

Héraldique
Généralités
Origine de l'héraldique
A la fin du XIIème siècle, à l'époque des Croisades, des lois précises et jusqu'alors
immuables, règlent les principes auxquels doit obéir la science du blason, appelée «
Héraldique ». On est de nos jours assuré que l'origine des blasons, sous cette forme remonte
au XIème siècle, lorsque les casques à protection nasal étaient utilisés. On ne pouvait alors
reconnaître le soldat. Les chevaliers vont alors peindre sur leurs écus des figures
géométriques, animales ou végétales. La reconnaissance sur les champs de bataille est donc
l'élément qui a contribué à la création de l'héraldique. Pouvoir se rassembler rapidement
auprès des chefs de bataille en pavanant des étendards et autres fanions aux couleurs de
chacun.

La forme de l'écu
L'écu a revêtu différentes formes suivant son origine ou sa destination. Sa surface est divisée
en neuf partitions. Le coté droit de l'écu (dextre) correspond à la gauche de la personne qui le
regarde. Il en est de même pour le coté gauche (senestre). De par sa forme, nous savons si les
armoiries de l'écu a des origines françaises, suisses, allemandes...

Écu des Écu de tournois ou


Écu français ancien Écu des dames
demoiselles bannière

Écu français Écu ibère Écu italien Écu anglais

Les divisions de l'écu

Les couleurs

Les couleurs se divisent en deux groupes : les métaux et les émaux. Il existe également un
code schématique (points, lignes...) qui correspond à chaque couleur. On associe également
une planète et une pierre précieuse à chacune des couleurs ainsi qu'une liste de vertus.

Les couleurs ne peuvent pas être employées n'importe comment et leur superposition obéit à
des règles strictes et impératives. On ne peut donc superposer deux couleurs du même groupe,
par exemple si la table de l'écu est de gueules (rouge), le lion qu'elle portera ne pourra être
que or ou argent (métal jaune ou blanc). Si la règle n'est pas appliquée, on dit que les armes
sont "à enquerre".
Les Métaux
Intelligence - grandeur
Or (jaune) Le Soleil - la Topaze
- vertu
Netteté - pureté -
Argent (blanc) La Lune - la Perle
sagesse
Les Émaux
Gueules (rouge) Mars - le Rubis Amour - patriotisme

Pourpre (violet) Jupiter - l'Opale Courtoisie - paix

Azur Beauté - fidélité -


Vénus - le Saphir
(description) persévérance
Santé - espérance -
Sinople (vert) Mercure - l'Émeraude
liberté.

Sable (noir) Saturne - le Diamant Tristesse

Les fourrures
Sept sortes de fourrure parmi les éléments constitutifs d'un blason dont la plus connue est
l'hermine qui orne les armes de Bretagne.

Champ d'argent moucheté de petites croix de sables à pied élargi et


Hermine
se terminant par trois pointes.

Contre-Hermine L'inverse de l'hermine. Fond de sable à mouchetures d'argent.

Vair Petits clochetons argent et azur alternés tête-bêche.

Contre-Vair Petits clochetons d'azur et d'argent réunis deux par deux.

Contre-Vair en Les clochetons de même forme et de même couleur sont alignés


pointe verticalement.

Chargé de vair quand les couleurs sont différentes du Vair et du


Vairé
Contre-vair.
Chargé de Contre-vair quand les couleurs sont différentes du
Contre-Vairé
Contre-vair.

Les différents types d'armoiries


Elles ont une relation avec le nom de famille, par exemple trois marteaux pour
Les parlantes
désigner la famille Martel (elles se présentent parfois sous la forme de rébus).
Elles font référence à un fait ou un exploit au cours duquel s'est illustré la
famille ou l'un de ses membres. Les armes d'Autriche portent une bande d'argent
Les allusives (blanc) sur un fond de gueules (rouge) (on retrouve la même disposition sur le
drapeau de l'Autriche actuelle). Ceci pour rappeler la blessure du duc Léopold II,
son armure était couverte de sang, seule sa ceinture restait blanche.
Elles rappellent un lien unissant un groupe : corps de métier, états ou régions
Les politiques
unis par un pacte.
Les
Elles évoquent une idée ou un concept.
symboliques

Partitions et pièces honorables


Les partitions et pièces honorables
L'écu peut être divisé en parties égales, par une droite dont les directions sont celles
correspondant aux quatre orientations des coups d'épée donnés avec le tranchant. Ce sont les
grands coups guerriers. Ces parties déterminées sur l'écu sont appelées partitions. Mais l'écu
peut être divisé par plusieurs droites, soit deux traits et trois partitions ; cinq traits et six
partitions ; ce qui forme à la surface de l'écu un dessin différent que l'on appelle pièce
honorable.
Partitions Pièces honorables

Parti Pal

Coupe Fasce

Tranché Bande

Taille Barre

Encartelé Croix
Encartelé en sautoir Sautoir

Traits bordant les pièces

Ondés Engrêlés Denchés Crénelés Potencés

Autres partitions et pièces honorables


En plus des partitions précédentes qui rappelaient les coups d'épée, il y en a six autres. Parmi
les pièces honorables, la variété est plus grande, elles se distinguent des autres pièces du fait
qu'elles couvrent, pour la majorité d'entre elles, au moins un tiers de la table d'attente. On
distingue également les pièces honorables qui sont relatives aux vêtements.
Autres partitions

Gironné Tiercé en pal Tiercé en fasce 6 Quartiers 8 Quartiers 16 Quartiers


Les pièces honorables relatives aux vêtements

Vêtement Chape Chausse Embrasse Mantel Giron


Autres pièces honorables

Chevron Écu en cœur

Pairle Franc-quartier

Gousset Escarre

Bordure Canton

Orle Équipolé
Les rebattements
Les rebattements sont des répétitions des pièces honorables sur l'écu, elles portent parfois un
nom qui rappelle la pièce honorable répétée.
L'écu dit "palé" est divisé par des pals dont le nombre est égal aux intervalles
du champ (quatre pals plus quatre intervalles). Si l'écu est divisé par un trait
Pal
de coupe, il est dit "contre-palé". Si le nombre de pals est égal à cinq ou plus,
le pal prend le nom de vergette et l'écu est dit "vergeté"
L'écu "fascé" est divisé en six ou huit fasces égales d'émaux alternés. Si cet
écu est divisé par un trait de parti, l'écu est dit "contre-fascé". Si le nombre de
Fasce fasces (toujours pair) est supérieur à huit, ces fasces prennent le nom de
burèles et l'écu est dit "burelé". Si les burèles sont regroupées par deux ou
par trois, elles prennent respectivement le nom de jumelles et de tierces.
L'écu "barré" est un écu divisé par un nombre pair de barres ayant de plus la
particularité de présenter une alternance de métal et d'émaux. L'écu peut être
Barre
"coticé en barre", quand il est recouvert, au plus, de dix barres qui prennent
le nom de cotices en barre.
Lorsque l'écu est divisé par des bandes en nombre pair, il est dit "bandé".
Tout comme l'écu barré, il présente une alternance de métal et d'émaux. En
Bande blasonnant (décrivant) l'écu, on doit indiquer le nombre de pièces. L'écu peut
être "coticé en bande", quand il est recouvert, au plus, de dix bandes qui
prennent le nom de cotices en bande.

Modification des pièces honorables


Un certains nombre de pièces honorables peuvent subir des modifications de formes qui
permettent d'ouvrir encore plus le champ des possibilités de représentation adaptées aux
besoins de ceux qui désirent adopter des armoiries.
Il s'agit d'une modification qui
Lorsque le pal, la fasce, la bande affecte la bordure d'un écu. Cette
Denché ou la barre sont découpés en dents Componé bordure est alors composée de
de scie. fragments de couleurs ou de
métaux différents alternés.
Lorsque les dents de scie sont plus
Lorsque l'une de ses extrémités est
Dentelé nombreuses que dans les pièces Aiguisée
taillée en pointe.
denchées.
Lorsque l'extrémité des pièces ou
Les pièces ont des bords entaillés d'une pièce ne touche pas le bord
Vivré Alésée
par de grosses dents. de l'écu. C'est un attribut que l'on
trouve très souvent dans les croix.
Il s'agit de toute pièce qui porte une
brisure qui, rappelons-le, est une
Lorsque les pièces sont, à leur
modification ajoutée à un écu pour
partie inférieure (donc tournés vers Rompue
Bastillé distinguer la branche cadette d'une
la pointe de l'écu), munies de ou brisée
famille de la branche aînée ou la
créneaux.
branche bâtarde par rapport à la
branche légitime.
Bretessé Lorsque les pièces sont crénelées Potencée Se dit de la pièce qui se termine en
sur toutes leurs faces ; une pièce forme d'équerre.
est dite « contre-bretessé » lorsque
les créneaux sur les deux faces sont
alternés.
Les pièces sont alors bordées de La pièce vidée est celle dont seuls
Engrêlé petites dentelures aux côtés Vidée les bords sont marqués et dont la
arrondis. couleur intérieure est celle de l'écu.

Autres
Les meubles
Ce sont des pièces de petite dimension qui viennent charger un écu et qui ne sont pas des
pièces honorables. Ces figures sont en très grand nombre et très diverses. Ce sont soit des
figures animales, dans un nombre très limité, végétales ou géométriques. Quant il s'agit de
pièces géométriques, leurs proportions sont strictement définies (losange, anneau, triangle,
étoile...). Pour les figures animales, des conventions de représentations sont mises en place.
Pour les figures végétales, les feuilles et les fruits sont disproportionnés (afin qu'ils soient
visibles et reconnaissables de loin). Les représentations animales sont très stylisées, en
particulier les parties facilement identifiables : tête, griffes... Au XIVème siècle, il apparaît de
nouveaux meubles : objets, armes, bâtiments.
L'ours était auparavant considéré comme le roi des animaux,
il est progressivement remplacé par le lion, cependant l'aigle
lui ravit le titre face aux oiseaux. En tant que meuble, il est
par défaut rampant, qui signifie pour l'époque saisir, attraper.
Le Lion
Mais il existe de nombreuses autres attitudes, sautant,
regardant, couché, assis... Suivant sa posture, le lion
(généralement avec une tête de profil) peut être appelé léopard
si sa tête est de face, mais il s'agit du même animal.

L'aigle fut souvent utilisé comme le symbole de l'Empire


Romain Germanique. Il existe tout comme le lion, plusieurs
L'Aigle formes et dispositions. Il peut être notamment bicéphale (à
deux têtes) ou tricéphale. Comme le lion, il représente la force
et le pouvoir.

La fleur de lys (ou lis) existe sous plusieurs variantes, il a


évolué continuellement au cours du temps pour finalement se
stabiliser au cours du XIVème siècle. A l'origine, on lui
Le Lys
attribue le lis végétale, ou une pointe de lance. Elle est utilisée
pour représenter les armes royales. En 1364, Charles V
ramène cette représentation à trois fleurs de lys.

Le blasonnement
On appelle blasonnement la manière de décrire des armoiries selon un langage conventionnel
qui permet, à lui seul, de décrire l'écu sans que l'on ait besoin de le dessiner. Le cas le plus
simple est celui de l'écu qui ne comporte ni partition ni figure, il est alors dit « plain ». Ensuite
pour blasonner un écu, on commence toujours par énoncer le champ de l'écu (par son émail
ou métal) puis on énonce les pièces qui le chargent. Si la table d'attente de l'écu est divisée en
partitions, il faut toujours commencer par citer celle qui se trouve en haut à gauche (ce qui
correspond pour nous à la dextre de l'écu). Viennent ensuite celles de la partie supérieure, puis
celles venant en dessous. Chaque partie doit être intégralement décrite avant de passer à la
suivante.
France
« D'azur, semé de fleurs de lys d'or »
Ancienne

France Moderne « D'azur, à trois fleurs de lys d'or »

Duché de
« De gueules, à deux léopards d'or »
Normandie

« D'argent à l'aigle éployée de sable becquée et


Bertrand du
membrée de gueules au baston de mesme brochant à
Guesclin
dextre sur le tout »
L'Art et la Culture
Les différents mouvements d'arts
L'Art au Haut Moyen Âge
Peu après la chute de l'Empire Romain, on assiste à l'apparition d'édifices à plan centré basé
sur le cercle, le carré ou l'octogone entourés de demi-cercles. A l'origine, à vocation thermale
ou de loisirs chez les Romains, mais adopté comme édifice religieux par les chrétiens. Sur les
différents décors, les personnages sont représentés avec de très grands yeux et des traits figés,
l'individualisation se faisant plus par les vêtements et la chevelure. Les sarcophages sont
taillés dans des pierres dures et sculptés de scènes de loisirs, de chasses. Les invasions
barbares apportent un nouvel élan dans la culture artistique (tombeau de Childéric). Plus tard,
sous Charlemagne, l'héritage culturel des Romains est mis au goût du jour. Dans le domaine
des manuscrits, la minuscule caroline fait son apparition. Une part nouvelle est faite pour les
finitions et détails, comme en témoignent l'architecture et la sculpture. L'art ottonien (d'Otton
Ier) se situe dans le prolongement de la renaissance carolingienne mais avec une influence
byzantine dont les œuvres d'art circulent par les voies marchandes. On emploie beaucoup de
pierres brutes ou polies (saphirs, rubis, émeraudes). Le Saint Empire Romain Germanique où
règne l'empereur Otton succède à l'empire carolingien. La Saxe est désormais la région la plus
florissante aux dépens de la France.

Les
rois
mage
s

Les rois mages - par Saint-Apollinaire de Ravenne


L'Art Roman
L'art roman est né de questions physiques dans le domaine architectural qui sont apparus au
Xe siècle : remplacer les plafonds de bois en pierres, élargir les nefs, augmenter la hauteur des
églises et faire mieux pénétrer la lumière. Le terme roman désigne en partie l'appartenance
avec l'art romain ainsi que l'essor des langues romanes. Les différentes caractéristiques sont la
recherche de chapiteaux et de voûtements, l'apparition du cuivre champlevé, le culte pour les
reliques, et la vogue des pèlerinages. A partir de 1120, débute la sculpture des tympans
d'église (espace sur les portails d'églises décoré de sculptures), de magnifiques frises font leur
apparition. En architecture, les voûtes sont plus larges, et en Normandie, sous l'influence
réciproque avec l'Angleterre, on commence déjà à voir les prémisses du gothique. La
tapisserie de Bayeux est l'œuvre la plus représentative de cette époque. Après la dislocation de
l'empire carolingien apparaît en Meuse une forme artistique intéressante et originale, qui aura
quelques liens avec l'art ottonien en Germanie, et qui participera à l'éclosion de l'art gothique.
C'est l'art Mosan (de la Meuse) qui est un art "charnière" entre roman et gothique.

La tapisserie de Bayeux

Épisode extrait de la Tapisserie de Bayeux

L'Art Gothique
Sous l'affermissement des rois Capétiens ( Louis VII, Philippe Auguste...), cet art nouveau
apparaît en Île-de-France. L'architecte gothique cherche à unir les masses, à fondre les
volumes. L'arc-boutant y joue un rôle tout aussi important que l'ogive. Il crée une dynamique
verticale, il permet aussi de réduire le rôle porteur du mur. Les grandes arcades s'inscrivent
dans une volonté d'amplifier les vides au détriment des pleins. Dès lors, une grande vague de
reconstruction balaye la France, à cause d'incendies ou autres évènements, les églises se
réadaptent à ce genre nouveau qui s'impose très vite. Les vitraux sont beaucoup mieux
utilisés, parfois jusqu'à la démesure (cathédrale de Reims). Par ailleurs, les sculpteurs
affirment leur originalité par un jeu complexe de courbes et de contre-courbes dans les plis,
par des effets d'ombre et de lumière. Dans tous les domaines d'arts, la lumière joue un rôle
dynamique. La sculpture devient servante de l'architecture, cet accord correspond à un grand
bouleversement stylistique. La peinture joue un rôle plus prépondérant, on voit ainsi
apparaître de magnifiques fresques murales. Les objets d'arts se multiplient, notamment à
Limoges. L'art gothique s'impose comme l'art caractéristique du style médiéval. Mais comme
toujours, l'art sert avant tout la religion, ce n'est que bien plus tard, dans les peintures
flamandes et italiennes, que l'on commence à peindre des gens ordinaires, et des scènes du
quotidiens.
Voir la description intéractive d'une cathédrale

Classification des mouvements d'arts

• Haut Moyen Âge


o Art du Haut Moyen Âge
• Bas Moyen Âge
o Art roman
o Art gothique
• Renaissance
o Prérenaissance (1300-1400)
o Première Renaissance (1400-1500)
o Haute Renaissance (1500-1530)
o Renaissance tardive ou Maniérisme (1520-1580)
• XVIIe
o Art baroque/classicisme
• XVIIIe
o Rococo
• XIXe siècle
o Néo-classicisme
o Romantisme
o Réalisme
o Impressionisme

La littérature au Moyen Âge


Troubadours et jongleurs
Selon la tradition, le fondateur de la poésie lyrique des troubadours fut Guillaume IX (1071-
1127), comte de Poitiers, duc d'Aquitaine, un vassal plus puissant que le roi de France. Ses
compositions étaient fortes et raffinées. D'ailleurs les troubadours appartenaient le plus
souvent aux classes dominantes. Les jongleurs en revanche, étaient issus exclusivement des
classes ouvrières. Les deux « métiers » étaient distincts. Les troubadours composaient leurs
propres vers et les mettaient en musique. Accompagné d'un instrument à corde, le jongleur
n'était que l'interprète de ces chansons. Le réel artisan de la poésie provençale du Moyen Âge
fut le troubadour. Certains n'étaient pas toujours noble, cependant lorsqu'un poète atteignait la
condition reconnue de troubadour, on le considérait plutôt comme un marquis que comme un
tavernier. Le Sud de la France était une région attentive plus que partout ailleurs à ce
phénomène lyrique.

Troubadours
- XIIe siècle

L'éloge de l'amour courtois


Les structures féodales étaient différentes au Nord, où oui se disait « oil » (langue d'oil). Au
Sud, où l'on parlait la langue d'oc, la femme était une source infinie pour la poésie occitane.
En Languedoc, la femme avait une importance politique plus large, elle pouvait dirigeait le
fief en l'absence de son époux. Saint Bernard de Clairvaux, fondateur de l'Ordre cistercien
avait influencé le culte de la Vierge Marie. Grâce à Marie, la femme avait une représentation
de la Création, et par conséquent, une source de perfection. La Dame « chantée » par un
troubadour n'était pas son épouse, mais celle d'un noble située socialement très au-dessus de
lui. Sur un plan plus laïc, Guillaume, abbé de Saint-Thierry, l'ami de Saint-Bernard, dans son
traité « De la nature de l'amour », place la femme au-dessus de l'homme dans l'expression de
ce sentiment. La structure féodale continuant à être la règle dominante de la société
européenne, la supériorité atteinte par l'image de la femme par rapport à celle de l'amant, très
platonique, finit par créer dans cette relation un lien de vassalité similaire à celui du chevalier
avec son seigneur. C'est le principe courtois. Parmi ces marques extérieures de « dépendance
», se trouve celle de la soumission reproduite dans les miniatures où le Chevalier jure à
genoux fidélité à sa Dame. A cette époque, où l'on célébrait les mariages d'intérêts, il était
toléré qu'un troubadour fasse l'éloge de l'épouse d'un noble. Au contraire, l'épouse se trouvait
glorifié, et par conséquent le conjoint aussi. Cependant, l'amour physique était secrètement
souhaité, mais rarement consommé.

Scène
érotique
médiévale

La chanson de geste
La chanson de geste est la première forme de littérature profane écrite en langue française.
C'est la forme médiévale de l'épopée latine, transposée au monde de la guerre, de la poésie
hagiographique, de l'exaltation de la vie des saints. La chanson de geste est une forme
littéraire de l'action comme l'indique clairement le terme de geste (du latin gesta : actions). Le
mot chanson met en évidence le caractère oral de ces textes qui sont, en règle générale,
chantés et récités par les jongleurs. Un seul jour n'était pas suffisant pour réciter les 4 000 vers
de « la Chanson de Roland », la plus célèbre de toutes. Les sources manuscrites sont ainsi très
différentes entre elle compte tenus de ce caractère oral. Ces longs poèmes narratifs célébraient
les prouesses guerrières, les héros, en général des chevaliers français devenus des personnages
légendaires. Les évènements narrés remontent à plusieurs siècles avant la création du poème,
mais sont revus à l'occasion des conflits contemporains. Le thème récurrent de la croisade sert
de prétexte pour exalter la vaillance guerrière et les prouesses des héros sur fond mythique de
combats surhumains et de descriptions fabuleuses. Exprimée à une époque chrétienne, la
chanson de geste véhiculait une profonde charge idéologique, celle de la lutte entre le Bien et
le Mal. La Chrétienté contre les Sarrasins musulmans. La plupart des chansons sont
composées dans le Nord-Ouest de la France (Normandie), mais il se peut que le berceau de
cette forme poétique soit né au Sud de la France. Les chansons les plus célèbres sont celles de
Roland, de Charlemagne, de Guillaume d'Orange et du Cid.

Autre formes littéraires


Dans les cours princières et seigneuriales, jusque là très rudes, l'influence des clercs et le
contact avec les civilisations orientales par le biais des Croisades, firent naître le goût d'une
littérature écrite dans la langue du pays. Outre les chansons de geste, vus précédemment,
d'autres formes littéraires s'exprimèrent. Au milieu du XIIe siècle, la poésie aquitaine
s'introduisit dans les cours du Nord : elle chantait dans un langage précieux les aventures et
les amours des chevaliers. Ce genre atteignit son sommet avec les romans de Chrétien de
Troyes : Perceval ou Lancelot sont des monuments de la poésie française. Puis apparurent les
contes et chantefables, composés de morceaux de proses et de couplets en vers accompagnés
de mélodies : Aucassin et Nicolette, au XIIIème siècle annonçaient déjà une littérature plus
populaire.

Perceval
au
château
du Graal

Perceval visitant le chateau du Graal - par Ferdinand


Piloty
La culture et l'enseignement au Moyen Âge
Culture écrite ou orale
Les récits colportés par les ménestrels n'étaient pas la source unique des connaissances du
peuple. Transmise de père en fils, la tradition orale inscrivait dans la mémoire de chacun des
faits, des recettes et des enseignements moraux : proverbes, contes et légendes, chansons,
recettes pour guérir telle ou telle maladie formaient la culture populaire à laquelle s'ajoutait
l'enseignement de l'Église. A cette époque, l'imprimerie n'était pas encore inventée, les livres
étaient écrits à la main par des moines copistes qui mettaient une année, ou plus, à écrire ou à
recopier un seul ouvrage. On écrivait sur des feuilles de parchemin, obtenues par tannage de
peaux d'agneau et de brebis. Les livres coûtaient si cher qu'ils étaient des objets de luxe. Il y
avait très peu de livres, mais peu de gens savaient lire et encore moins écrire. A chaque fois
que l'on devait lire une lettre, de connaître le contenu d'un recueil de lois, ou d'écrire une
missive, on avait recours à un spécialiste. Il s'agissait d'un métier, et personne ne s'étonnait de
l'analphabétisme des rois et des princes.

L'Église, moteur de la culture


Dans l'océan d'ignorance du Moyen Âge, l'Église représentait l'unique « institution culturelle
» et le trait d'union entre l'Antiquité et la culture moderne. Dans les églises et les couvents, on
préserve avec soin les conquêtes du genre humain : la langue latine, la littérature, la sculpture,
la peinture, les arts ainsi que les techniques les plus précieuses. Benoît de Nurcie, au VIe
siècle avait recommandé aux moines d'apprendre l'art de l'écriture, de constituer une
bibliothèque dans chaque couvent et de constituer une école élémentaire ouverte à tous. C'est
grâce à cette action que put s'étendre la grande culture médiévale. Mais c'est Charlemagne qui
ordonna l'ouverture d'école publique dans les monastères. Les écoles se multipliaient auprès
des cathédrales, des églises importantes et des monastères. Le rôle principal de ces écoles était
de former les futurs clercs. Il y avait deux écoles auprès de chaque cathédrale :

• L'école « intérieure » était réservée à ceux qui désiraient approfondir leurs études pour
entrer dans le clergé.
• L'école « extérieure » était une sorte d'école élémentaire ou primaire. Cette dernière
qui était aussi ouverte aux pauvres, joua un rôle décisif dans la diffusion du savoir en
Europe.
Un
moine
copiste

Les premières universités


Après avoir acquis des notions d'arithmétique, de grammaire, de géométrie, de musique et de
théologie, l'étudiant pouvait continuer ses études en se rendant dans une université.
L'université est une création typiquement médiévale, bien que différentes des nôtres à l'heure
actuelle. En effet, il s'agissait d'une association d'étudiants provenant de régions et de nations
très diverses, qui se réunissaient autour d'un maître qu'ils payaient eux-mêmes. Les docteurs
ou professeurs, hébergeaient souvent les étudiants sous leur toit. Être professeur au Moyen
Âge n'était pas de tout repos, s'il n'était pas clair ou ennuyeux, il était chahuté et même
malmené. Clercs et étudiants formaient une catégorie à part. Unis par le même amour du
savoir, parlant entre eux le latin, grands amateurs de divertissements, ils se déplaçaient par
groupe dans toute l'Europe. Ces compagnies turbulentes d'étudiants itinérants contribuèrent à
former une culture internationale.

L'enseignement du Moyen Âge


L'intérêt majeur des docteurs se portait sur la théologie, c'est-à-dire l'étude approfondie de
Dieu et de son œuvre : l'Homme et son destin. Le grand foyer de la théologie fut la Sorbonne,
où régna au XIIIe siècle Saint Thomas d'Aquin. Bien vite, la philosophie ou étude des idées,
fut adjointe à la théologie. La renaissance de cette discipline fut due pour une grande part aux
Arabes qui avaient sauvé les œuvres des penseurs grecs comme Aristote, qu'ils avaient
traduites et commentées, avant de les répandre jusqu'en Occident. Parallèlement à ces deux
sciences fondamentales se développèrent d'autres disciplines liées aux nécessités pratiques. Le
contact avec le monde arabe, et en particulier avec l'école de Bagdad fit naître de grandes
écoles de médecine : Salerne en Italie, Séville en Espagne, Montpellier en France devinrent
des centres renommés pour les soins et la recherche médicale. Vers le milieu du XIVe siècle,
après l'épidémie de peste noire qui ravagea le tiers de la population, on découvrit la
propagation des maladies contagieuses. Par ailleurs, le développement du commerce permit
aux mathématiques de faire des progrès considérables. Les études juridiques reçurent quant à
elles, une grande impulsion grâce au développement de l'État et de l'administration
centralisée.

Le commerce au Moyen Âge


Introduction
Au Moyen Âge, un commerçant spécialisé dans le type de marchandises orientales (poivre,
noix, cannelle, huile...) était un homme riche. Avec le développement du grand commerce, la
fortune et le pouvoir des « bourgeois commerçants » allaient toujours croissant. En effet, au
cours du bas Moyen Âge, les petites associations, à caractère régional, d'artisans et de
commerçants ayant des intérêts communs évoluent et prospèrent jusqu'à devenir des ligues
européennes puissantes. Nous allons traiter dans cet article :

• Les voies de communications.


• L'activité commerciale au Moyen Âge.
• La navigation.

Les voies de communications


De nouvelles routes commerciales
Les Européens commencèrent doucement à s'émanciper vers les territoires extérieurs. Grâce
aux Croisades, ils se déplaçaient maintenant avec assurance sur terre comme sur mer. La carte
des routes commerciales du Moyen Âge montre que le grand commerce touchait toute
l'Europe :

• Au nord, une puissante association de villes germaniques et scandinaves, la Hanse,


exerçait un véritable monopole en mer du Nord et dans la Baltique.
• Au sud, les villes portuaires de Gênes, Amalfi et Venise, en Italie, dominaient le
commerce méditerranéen. Ces villes bénéficiaient des conséquences des croisades qui
contribuèrent puissamment à réactiver les échanges avec les ports du Levant.

De plus, des pistes caravanières et des routes maritimes rejoignaient l'Inde, le Sud-Est
asiatique et la Chine. Les produits provenant de ces contrées étaient achetés par les Européens
dans les villes du Levant ou à Byzance. En échange, ils y vendaient du bois, du fer, du blé, du
vin, de l'huile, etc.

Caravane espagnole

Caravan crossing the Silk Road (Bibliothèque Nationale


de France)

Des innovations techniques


Parmi les causes de l'essor du commerce médiéval, il faut compter certains progrès techniques
accomplis dans le domaine des moyens de transport. Pour le transport terrestre, il y a les
avancés du ferrage, du harnachement et de l'attelage à la file des chevaux. Ces innovations
furent complétées par le cerclage de fer des roues des charrettes et des chars ainsi que par
l'augmentation des routes pavés. D'autres améliorations se produisirent plus tardivement : au
XIVe siècle apparurent les sangles suspendant les caisses des charrettes et les avant-trains
tournant autour d'un essieu.

Le réseau romain
Depuis Rome, comme « centre nerveux », de nombreuses voies et chaussées rayonnaient
suivant des tracés qui pouvaient atteindre n'importe quel point de l'Empire, y compris le plus
éloigné, et au long desquels les voyageurs pouvaient bénéficier d'un remarquable système de
relais pour les chevaux et d'auberges pour se reposer. Lors de la chute de l'Empire romain, le
changement qui s'opéra, s'il ne fut pas brutal, suivit cependant un lent processus de
détérioration et d'abandon qui se prolongera durant plus de deux siècles. Concrètement,
depuis le règne de l'empereur Caracalla, jusqu'au troisième siècle de notre ère, Rome avait
cessé de se préoccuper de l'entretien du réseau secondaire de routes ; seules, les grandes voies
qui partaient de Rome bénéficiaient de ces tâches vitales, les relais fonctionnaient, et les
auberges bien que se raréfiant demeuraient ouvertes. L'immense réseau de voies de
communications élaboré par les Romains, cette œuvre parmi les plus colossales de l'ingénierie
civile de tous les temps, devait malheureusement disparaître avec le collapsus de l'Empire.
Le pont
du Gard,
aqueduc
romain
du Ier
siècle

Les voies d'invasions


Au VIIe siècle de notre ère, les grandes voies romaines, déjà fortement détériorées, restaient
néanmoins le meilleur et le plus fréquenté des moyens de communication de l'époque. Ce
furent les voies romaines qu'empruntèrent en priorité de nombreuses tribus barbares pour
envahir l'Empire à partir du IVe siècle, avec leurs pesants chariots tirés par des bœufs, bétail
et esclaves, sans compter les femmes, les enfants et de redoutables guerriers montés à cheval.
D'après les chroniques de l'époque, en Europe et dans la première moitié du VIIIème siècle,
ces voies ou ce qu'il en restait furent délaissées au profit des voies strictement vicinales. Les
villes, les cités et des villages entiers connaissaient alors une désertification en masse. Cette
période coïncide avec le début du féodalisme.

La « petite Renaissance »
Dans la seconde moitié du VIIIe siècle sur le Vieux Continent se produisit un renouveau de
l'activité commerciale, intellectuelle et religieuse initié par l'empereur Charlemagne,
personnalité dominante du Haut Moyen Âge (période qui s'étend du début du Ve siècle
jusqu'à l'aube du XIIème siècle). L'Empire Carolingien, maintenu par les successeurs de
Charlemagne devait durer presque un siècle et demi au cours duquel il connut une authentique
renaissance qui s'affirma dans la première moitié du IXe siècle. Les routes de l'Europe au
cours de ces longues périodes furent à nouveau fréquentées. Mais c'en était fini des antiques
chaussées romaines ; le temps avait fait son œuvre d'une part, et, après le passage successif
des barbares et des paysans, elles avaient été saccagées et pillés, car le matériau dont ces voies
étaient faites, blocs de pierres d'excellente qualité s'était révélé d'une grande utilité pour la
construction des habitations. De nombreux manoirs furent construits à partir de la pierre
extraite des chaussées romaines. Toutes ces raisons firent qu'il restait bien peu de choses des
larges voies qui traversaient jadis les montagnes et franchissaient les rivières sur des ponts
ingénieux, la plupart détruits. Les chemins et les sentiers de l'Empire carolingien, s'ils
s'inspirèrent de la voie romaine étaient beaucoup plus modestes.
Carte de
l'Europe
de
l'Ouest

Le féodalisme : localisation du commerce


Le féodalisme avait fait de timides apparitions dans la première moitié du VIIIe siècle, voici
qu'il resurgit avec toute sa vigueur au début du Xe siècle. A cette époque, le système féodal de
vassalité prédomine en Allemagne, en Angleterre et dans une grande partie de la France.
Système rigide dans lequel le paysan, serf de la glèbe, devait se plier au joug de la terre. Au
sommet régnaient les grands seigneurs féodaux, propriétaires d'immenses territoires et
auxquels devaient se soumettre d'autres propriétaires moins bien nantis, les vassaux. Le
féodalisme est un système très local qui est quasiment indépendant de l'extérieur. Les
seigneurs assurent la protection des vassaux car les routes ne sont plus très sûres. De ce fait, le
Xème siècle fut la période la plus obscure de l'histoire de l'Europe. Les chemins se vidèrent de
leurs voyageurs, seuls les troupes de soldats les parcouraient, lors d'inévitables incursions
guerrières. Les cités et les villes laissées à l'abandon, ressemblaient alors à des fantômes de
pierre. Rome qui, un siècle avant notre ère, avait hébergé un demi-million de personnes, selon
les calculs les moins optimistes, ne recensait au Xème siècle pas plus de cinquante mille
âmes, soumises à toutes sortes d'actes de violence et d'humiliations de la part d'une noblesse
avide.

Les routes au service des pèlerinages


Malgré tout, à partir de la moitié du XIe siècle, l'activité commerciale commença à redonner
des signes de vies. Le chemin de Santiago, qui conduisait jusqu'aux confins du Nord-Est de
l'Espagne, là où selon la légende, reposait les restes de l'apôtre Jacques le Majeur, devint la
route la plus fréquenté d'Europe. Les pèlerins partant de France traversaient les Pyrénées pour
aller se recueillir sur la tombe du saint apôtre. Le chemin de Compostelle ou « chemin
français » était surveillé de manière efficace par le célèbre ordre militaire des Templiers, et
ses chevaliers avaient pour mission de nettoyer le chemin des pillards et des malfaiteurs,
bandits de grands chemins et filous de tout poil qui le hantaient. En fait, ce zèle se confondait
parfois à quelques excès, à tel point qu'en deux occasions le Pape dut mettre un frein à
l'excessive ferveur de certains chevaliers. En plus des pèlerins, qui voyagèrent habituellement
à pied et par groupes peu nombreux, beaucoup d'autres voyageurs en transit empruntaient le
chemin français : montreurs, acteurs, ambulants, bambocheurs, femmes de mœurs légères,
arracheurs de dents, barbiers, drapiers, commerçants en vin, marchants de bois, vendeurs
d'eau, vendeurs de reliques (toutes certainement fausses) ; toutes sortes de prêtres et de frères,
les membres d'ordres mineurs tels celui des frères mendiants.
L'activité commerciale au Moyen Âge
Le commerce au Moyen Âge
Le Moyen Âge se divise en deux grandes étapes :

• Le Haut Moyen Âge : Elle s'étend du Ve siècle au milieu du XIe. C'est une époque
chaotique où le dépeuplement des villes et des cités va croissant. Période éminemment
rurale au cours duquel le système de commerce est fondé sur le troc.
• Le Bas Moyen Âge : Cette période verra fleurir le commerce et les marchands, ainsi
devait naître une forme de capitalisme qui s'affirmera au fil du temps. Les guildes et
les hanses sont issues de cette deuxième partie du Moyen Âge. A l'origine, il s'agissait
de confréries à caractère religieux, qui fleurirent au cours de l'Empire Carolingien,
lesquelles donnèrent naissance aux corporations.

Rue
marchande
au Moyen
Âge

Des confréries aux ligues


Malgré une idéologie respectable « association traditionnellement pieuse et charitable mise
sous la protection d'un saint patron », certaines des confréries s'attirèrent de nombreuses
critiques pour leurs désordres de vie. En 852, Hincmar, archevêque de Reims, critiquait
durement les coutumes de groupes capables de transformer les fêtes de sanctification à la
gloire de Dieu en banquets des plus fastueux. Il devint difficile alors de distinguer confréries
et corporations, religion et profession étant alors étroitement unies. En dépit d'une soi-disant
renaissance carolingienne, l'Europe demeurait une société rurale où villes et cités comptaient
peu. A partir de l'essor économique de la fin du Xe siècle, les viles et les cités commencèrent
à compter dans le milieu toujours dispersé de la société campagnarde, et les artisans se
regroupèrent par domaines d'activité : merciers, orfèvres, marchands d'eau, drapiers, épiciers,
peintres, musiciens... Les corporations défendaient les intérêts de leurs membres et servaient
également aux autorités municipales pour contrôler la qualité des produits et fixer les taxes.
Les marchands vont jouer un rôle de premier plan au cours du XIe siècle. Les échanges
commerciaux prennent de l'ampleur : les marchandises sont transportées d'un point de
l'Europe à l'autre par voie de terre ou le long des côtes méditerranéennes. Les risques
encourus tout au long de l'acheminement étaient multiples : banditisme, péages outranciers,
etc. La nécessité de protéger les intérêts mutuels s'imposait donc et les marchands vont
s'associer en guildes : de la cité, l'échange s'étend alors à la contrée et très vite aux régions,
annonçant la prospérité.
Guildes et frairies
Les guildes possédaient leurs privilèges et leurs propres juridictions codifiés selon un statut
officiellement reconnu. Parmi ceux-ci, figuraient la fixation des prix, celle des poids et
mesures et le monopole commercial. Certaines guildes obtinrent le droit de frapper leur
propre monnaie, mais ces cas étaient cependant rares et de courte durée. Dans le contexte de
l'époque, la guilde passa pour être une authentique association de marchands et de
transporteurs sur une même voie d'eau, de clients attirés d'un même centre commercial. La
Guilde des marchands de Tiel, en Gueldre, par exemple, était en contact avec l'Angleterre,
c'est la plus ancienne. La frairie était celle de la Halle basse de Valenciennes, en France, dont
les archives datent de 1050. Apparut ensuite la Guilde marchande de Saint Omer. Mais ce
sont la Flandre et les régions rhénanes qui furent le fer de lances des guildes économiques qui,
beaucoup plus tard vers le XVIIIe siècle s'étendront en Angleterre, à la totalité des Pays-Bas,
aux pays scandinaves...
La fête du Ommeganck à Bruxelles

Procession des corps de métiers. On remarque les emblèmes correspondant aux différentes
confréries.

La fête du Ommeganck à Bruxelles, par Denis van Alsloot (Musée du Prado, Madrid)

Hanses d'Europe
Les guildes avaient vigoureusement contribué au développement du mouvement communal
en suscitant l'esprit de solidarité et la résistance au régime féodal. Mais ces corporations vont
bientôt disparaître pour laisser la place à une politique plus ambitieuse, d'abord régionale puis
européenne : la création des hanses (de l'allemand ancien hansa, troupe, bande). Tout d'abord
regroupement de guildes, les hanses n'échappèrent pas au mouvement et se transformèrent en
ligues de villes marchandes :

• La Hanse de Londres regroupait plus d'une vingtaine de cités et de villes autour


d'échanges commerciaux avec la capitale britannique.
• La Hanse des XVII Villes, association de marchands drapiers, qui va s'affirmer dès
1230 aux Pays-Bas et dans le nord de la France.
• La Hanse Teutonique, sans aucun doute alors la plus célèbre et la plus importante de
toutes. Au XIVe siècle, elle est à son apogée. Contre la domination de ce patriciat,
oligarchique et exclusif, les petits se liguèrent. Sa puissance était telle que les États
traitaient ses représentants comme les ambassadeurs d'un grand pays.

Le commerce hanséatique était fondé, d'une part, sur le trafic des fourrures et de la cire,
provenant de Russie et de Prusse, d'autre part, sur celui des draps flamands et anglais et du sel
gemme. A ces produits de base s'ajoutaient le cuivre et le fer de Suède, les vins de France ou
du Rhin, etc. Au XVème siècle, la décadence des guildes et des hanses devint manifeste, à
l'exception de la Hanse Teutonique. Beaucoup d'entre elles firent un retour au concept de
confrérie religieuse, dont les rites allaient se maintenir jusqu'à une époque tardive (au milieu
du XIXe siècle, en Angleterre).

Les grandes foires


Si la plus grande part du commerce international provenait des ports du Nord ou de la
Méditerranée, ceux-ci irriguaient ensuite le continent tout entier. Désormais, les commerçants
étaient de véritables hommes d'affaires, alors que leurs prédécesseurs se déplaçaient à dos de
mulet ou sur des charrettes branlantes, ils achetaient désormais des chargements entiers de
navires et des lots de marchandises. Dans les foires, où ces grands marchands se donnaient
rendez-vous, se réglaient d'énormes affaires. Les foires étaient l'âme du commerce médiéval.
Elles se déroulaient dans toutes l'Europe : Londres, Reims, Troyes, Cologne, Leipzig,
Genève... Les foires duraient chacune six ou sept semaines selon un calendrier fixé afin que
les foires puissent s'enchaîner chacune par rapport aux autres. Ainsi, le marché était actif toute
l'année. Les affaires conclues au cours de ces rencontres encourageaient la production
industrielle et artisanale, elles stimulaient les progrès techniques. Afin d'éviter aux grands
marchands de transporter une grande quantité d'argent, on inventa la lettre de change : ce
moyen permet de payer une dette à distance, en passant par l'intermédiaire de deux banquiers
qui correspondent entre eux. La lettre de change introduisit le crédit, mais de façon camouflée
car l'Église interdisait les prêts avec intérêts. Au cours de cette période, ce sont les riches
familles italiennes qui furent à l'avant-garde dans le domaine bancaire. Le monde changeait,
les châteaux féodaux perdaient de leur importance tandis que les villes commerçantes
croissaient. La fortune des seigneurs s'amenuisait au profit des riches bourgeois qui tenaient
les rênes de l'économie. Ceci contribua à la naissance des États modernes.

Foire
marchande
La navigation
Progrès techniques dans la navigation
Le grand commerce médiéval bénéficia des progrès réalisés dans la construction des navires
et dans l'apparition de nouveaux instruments de navigation. L'innovation la plus importante
fut la diffusion de la boussole. Son origine reste incertaine : si les Chinois la connaissaient
depuis longtemps, ce sont peut-être les Arabes qui l'introduisirent en Europe, à moins qu'elle
n'est été redécouverte par des marins ou des astronomes occidentaux. L'aiguille magnétique
qui flottait simplement, au début, sur l'eau ou sur l'huile fut, par la suite, fixée sur un pivot
permettant de tourner la boussole dans toutes les directions. Les marins pouvaient désormais
affronter la haute mer sans craindre de se tromper de cap. Outre la boussole, on commença à
utiliser deux instruments arabes, l' astrolabe et le sextant, qui permettaient de mesurer la
hauteur des astres au-dessus de l'horizon. En calculant exactement le temps passé à naviguer,
on pouvait déterminer avec précision la distance que le navire avait parcourue vers le nord ou
le sud (latitude), vers l'est ou l'ouest (longitude). Profitant de ces améliorations, les Génois
furent les premiers à la fin du XIIIe siècle, à relier par voie maritime l'Italie aux Flandre et à
l'Angleterre. A cette époque le navire type était la galéasse. Cette galère se déplaçait
principalement à la voile. L'apparition de la voile latine triangulaire, qui pouvait être orientée
dans toutes les directions permettait au navire de naviguer par vent de travers et même contre
le vent. Le gouvernail de poupe, fixé par des charnières au milieu du pont arrière du navire
(gouvernail d'étambot), remplaça les rames latérales, longues et pesantes, les manœuvres en
furent améliorées. La vergue (support en croix de la voile) tournante permit d'orienter au vent
de côté les voiles carrées. Sur certains voiliers, un second mât à l'avant commençait à faire
son apparition.
La galéasse

Pour naviguer, les


marins italiens,
français ou catalans
utilisaient la
galéasse. La
longueur du navire
faisait trois fois sa
largeur, et celle-ci
deux fois sa
hauteur, il s'agit de
la règle catalane
(tres dos y as, «
trois, deux, un »).
En mer Baltique,
on avait plutôt
recours à la
hourque, dont la
coque était faîte de
planches
superposées et non
jointes.
La navigation commerciale
Comme nous l'avons déjà vu, la chute de l'Empire Romain provoqua l'effondrement des
routes de communications. Le commerce par voie de mer pendant l'Empire romain
germanique était considérable. Les provinces de l'Empire ne cessaient d'échanger leurs
marchandises, la Méditerranée était alors balayée par les grands quinquérèmes et trirèmes.
Ainsi le blé d'Égypte servait à approvisionner le port d'Ostie qui permettait la survie de Rome.
Vers l'an 250, la fabrication de grandes trirèmes cessa, et la navigation n'eut plus cours.
Pirates barbaresques, corsaires siciliens et maltais occupèrent alors la Méditerranée. Si bien
qu'à l'apparition des Vikings sur les côtes européennes, aucune puissance ne pouvait rivaliser
sur mer. Par la suite, Génois et Vénitiens se firent une lutte acharnée pour dominer en
Méditerranée. Les Portugais, de leur côté, après l'invention de la caravelle étaient plus en
proie à la quête de terres nouvelles et de marchés lointains. Le commerce des épices fut un
monopole portugais pendant longtemps durant. Ce petit pays côtier de la péninsule ibérique
était devenu le royaume le plus riche d'Europe. Ceci donne alors une idée de l'importance de
la navigation commerciale. Nous sommes alors à la moitié du XVe siècle et le Moyen Âge
touche à sa fin.

La technique et la science
Introduction
Pendant longtemps, le Moyen Âge fut considéré comme une époque morte du point de vue du
développement scientifique et du progrès technique. Aujourd'hui, on reconnaît au contraire
que les quatre ou cinq siècles qui séparent l'an Mille de l'invention de l'imprimerie apportèrent
de profondes transformations. Certes, il y eut peu de découvertes ou d'inventions
spectaculaires, de celles qui ouvrent de nouveaux horizons à l'humanité, comme l'invention,
au XVIIIe siècle, de la machine à vapeur ou de l'électricité. Les conquêtes de la technique
médiévale étaient plus humbles, davantage liées aux besoins de la vie quotidienne et aux
travaux familiers de la ville et des champs. Mais c'est justement pour ces raisons qu'elles se
révélèrent, à la longue, d'une portée fondamentale.

Techniques agricoles
Des innovations en agriculture
Nous savons qu'après l'an Mille, l'Europe connût un formidable essor économique. Un facteur
essentiel de la reprise économique fut la capacité des agriculteurs à produire plus que ce qu'ils
avaient besoin pour leur subsistance. Les biens excédentaires pouvaient alors être vendus ou
échangés sur les places des marchés ou encore dans les grandes foires commerciales. Cet
afflux de marchandises redonna vie au commerce, et, en contrecoup, à l'artisanat et à
l'industrie. Certaines innovations, ou applications pratiques de découvertes faites par des
savants, furent apportées à la technique de l'agriculture. Elles jouèrent un rôle peut-être décisif
dans cet essor général, car elles permirent d'augmenter considérablement les rendements.

Serfs de la
glèbe
travaillant
la culture
fourragère

Introduction des cultures fourragères - Les Très


Riches Heures du Duc de Berry (XVe siècle)

Un nouveau type de charrue


Les grandes civilisations du monde antique s'étaient développées dans un milieu chaud, où les
terres étaient sèches, friables et les sols peu profonds. Le problème principal des agriculteurs
était alors de maintenir le plus longtemps possible l'humidité dans la terre. Ils adoptèrent pour
cela une charrue légère, sans roue, appelée araire, en réalité un simple et solide pieu
égratignant à peine la terre. Il était en effet inutile de les retourner au soleil, elles sécheraient
plus vite. Avec une paire de bœufs, les paysans labouraient le champ en sillons parallèles,
puis, perpendiculairement aux sillons, de manière à briser les mottes de terre. Cette manière
de procéder, adaptée au climat méditerranéen, ne convenait pas du tout en Europe du Nord.
Là, la terre était humide et lourde, de plus l'humidité endommageait les racines de certaines
plantes. Après plusieurs tentatives, un nouveau type de charrue fut adopté, toujours en usage
de nos jours. Cette charrue, plus lourde que l'araire était montée sur roues. Devant le soc, un
long couteau vertical en fer, appelé coutre, permettait de pratiquer une première ouverture
dans un sol lourd. Le soc, recouvert de fer, retournait les mottes. Il se terminait par un versoir
qui permettait de rejeter la terre remuée de part et d'autre du sillon. De cette façon se formait,
entre deux sillons parallèles, un petit monticule de terre, qui se révéla très utile. Quand la
saison était sèche, le blé poussait dans le creux des sillons humides. Au contraire, si la saison
était trop humide, il poussait sur le monticule débarrassé de l'humidité excessive.
Paysan
utilisant
un
araire
tracté
par
deux
bœufs

Labours et semailles, Escurial (Bibliothèque royale


Espagne)

Des attelages plus efficaces


Depuis, la domestication du cheval, les hommes savaient qu'il était rapide et plus fort que le
bœuf. On n'avait pourtant que rarement recours à cet animal pour les travaux des champs, car
le harnais n'était pas adapté aux lourdes tractions. Le harnachement traditionnel consistait en
une bricole lâche portée sur le cou de l'animal. Aussi, plus le cheval tirait, plus la bricole
gênait sa respiration. Au début du Moyen Âge, on inventa le harnachement à collier rigide. Ce
collier rembourré s'appuyait sur les épaules du cheval et n'entravait pas sa respiration. On
améliora aussi le rendement des attelages en modifiant la position des animaux de trait. Dans
l'Antiquité, deux, quatre, parfois six chevaux étaient attelés côte à côte devant un char. La
force de ces chevaux était mal concentrée, et en partie perdue. Au Moyen Âge, on les attelés à
la file, ou par couples, les chevaux exerçaient ainsi une force bien supérieure. Sous les climats
chauds et secs, les sabots des chevaux s'usaient relativement peu. On les protégeait en les
munissant de bandages appelés hipposandales. En revanche, sous les climats tempérés et
lourds du centre de l'Europe, on renforçait les sabots grâce à des fers cloués dessous. Le
ferrage fut une des innovations qui contribuèrent à faire du cheval l'auxiliaire indispensable de
l'Homme. Par ailleurs, la selle arquée améliora la stabilité du cavalier, surtout dans l'axe
longitudinale (avant - arrière), elle accrut sa capacité de manœuvre notamment dans les
affrontements armés. Les Barbares venus d'Orient, apportèrent l'étrier dès le IXe siècle. Reliés
à la selle, les étriers constitués un solide point d'appui, renforçant la stabilité latérale. Le
guerrier pouvait portait des lances et se dresser sur les étriers lors d'un combat.

Le moulin
La redécouverte du moulin à eau
Le monde industrialisé actuel est aux prises avec un grave problème : celui de l'énergie. Il y a
encore quelques années, le pétrole semblait suffisant à satisfaire des besoins en augmentation
constante. On a depuis pris conscience de l'épuisement des ressources. Un problème analogue
se posa au cours du XIe siècle. En effet, l'essentiel de l'énergie disposé par l'Homme était
fourni par l'animal. La relance de l'activité économique créa un besoin urgent en énergies
nouvelles. Dans l'Antiquité, les grands empires disposaient d'une masse énorme d'esclaves, de
ce fait la question de l'énergie ne se posa jamais de façon cruciale. Mais le déclin de
l'esclavage dans le monde médiéval, poussa les hommes à redécouvrir et répandre une
invention très ancienne : le moulin à eau. On pense que les premiers moulins à eau étaient
connus, dans les pays d'Orient, en Grèce et dans l'Empire romain dès le Ier siècle avant J-C.
Vers le IXe siècle, les moulins se répandirent rapidement en France. Le principe du moulin à
eau est relativement simple. La force de l'eau qui s'écoule ou tombe du haut met en
mouvement une grande roue. Des engrenages transmettent ce mouvement à une meule de
pierre qui, en se mouvant sur une pierre fixe, broie les céréales jusqu'à en faire de la farine. A
partir de ce principe de base, d'ingénieux dispositifs permirent d'actionner des mécanismes
beaucoup plus complexes.
Les applications de la roue hydraulique
Un moyeu de la roue hydraulique
relié à un tourniquet pourvu de seaux,
permettait de faire remonter à la
surface l'eau des puits ou mines
inondées. Ainsi, on pouvait irriguer
des terrains secs improductifs et de
remettre en activité des mines
inexploitées.
Ceci est une application beaucoup
plus compliquée du système
hydraulique. Un ouvrier fabrique du
fil de fer. Le métal grossièrement
travaillé est passé en force dans de
petits trous. Assis sur une balançoire,
l'ouvrier saisit le fil qui sort du trou
avec de grosses pinces. La balançoire
est reliée à une manivelle actionnée
par la roue hydraulique, l'ouvrier est
porté vers l'avant puis vers l'arrière
selon l'axe de la manivelle. Lors du
mouvement arrière, il lui suffit de
tenir le fil avec les pinces pour le tirer
de force. Cet exemple témoigne d'un
progrès technique important, puisqu'il
y a transformation du mouvement
circulaire de la roue en un
mouvement de va-et-vient.
Un autre progrès décisif pour
l'utilisation artisanale et industrielle
de l'énergie hydraulique intervint
lorsqu'on inventa une façon de
transformer le mouvement circulaire
de la roue en un mouvement
rectiligne dans le sens vertical. Il
s'agit de l'arbre à cames : des coins en
saillie sur l'arbre relié à la roue, en
tournant régulièrement, font monter et
descendre l'outil qui accomplit le
travail.
• Dans le premier exemple, de
gros et lourds pilons, en
retombant, brisaient le minerai
nécessaire à la fonderie.
• Dans le second exemple,
l'arbre à cames actionne un
très lourd marteau-pilon qui
forme la masse spongieuse du
fer fondu et, le débarrassant
des scories (résidus), le
transforme en acier.

Ces utilisations industrielles


expliquent pourquoi le moulin fut
longtemps synonyme de fabrique et
l'est encore dans la langue anglaise
(mill).

Le moulin du meunier

• Le moulin seigneurial : Le plus ancien et le plus répandu des moulins était celui du
meunier, où les paysans venaient faire moudre le blé et d'autres céréales. Les seigneurs
obligeait leurs serfs à moudre le grain, contre paiement, dans le moulin seigneurial (ou
moulin banal), et punirent ceux qui utilisaient les meules à main. L'usage du moulin se
répandit et la maison du meunier devint un des principaux lieux de rencontre de la vie
villageoise.
• Le moulin à vent : A cette époque, les moulins du meunier sont encore hydrauliques.
Mais le Moyen Âge eut recours à une autre source d'énergie : le vent. L'utilisation du
moulin à vent s'imposa dans les milieux arides et battues par les vents. Il est connu
depuis fort longtemps, notamment en Asie. Le principe de son fonctionnement et ses
applications sont pratiquement les mêmes que ceux du moulin à eau. La force motrice
est produite par le vent, qui fait tourner des ailes reliées à l'arbre central. L'avancée
technique la plus importante se produisit lorsqu'on plaça la partie supérieure du moulin
sur une plate-forme tournante. De cette façon on orientait les ailes en fonction de la
direction du vent.
Paysans
labourant un
champ

On voit, ci-
contre, les
différentes
techniques
utilisées en
agriculture, la
herse, la
charrue,
l'utilisation du
cheval, et au
fond, on
aperçoit un
moulin à vent.

Autres domaines
Progrès techniques dans la navigation
Le grand commerce médiéval bénéficia des progrès réalisés dans la construction des navires
et dans l'apparition de nouveaux instruments de navigation. L'innovation la plus importante
fut la diffusion de la boussole. Son origine reste incertaine : si les Chinois la connaissaient
depuis longtemps, ce sont peut-être les Arabes qui l'introduisirent en Europe, à moins qu'elle
n'est été redécouverte par des marins ou des astronomes occidentaux. L'aiguille magnétique
qui flottait simplement, au début, sur l'eau ou sur l'huile fut, par la suite, fixée sur un pivot
permettant de tourner la boussole dans toutes les directions. Les marins pouvaient désormais
affronter la haute mer sans craindre de se tromper de cap. Outre la boussole, on commença à
utiliser l' astrolabe (instrument arabe), qui permettait de mesurer la hauteur des astres au-
dessus de l'horizon. En calculant exactement le temps passé à naviguer, on pouvait déterminer
avec précision la distance que le navire avait parcourue vers le nord ou le sud (latitude), vers
l'est ou l'ouest (longitude). Profitant de ces améliorations, les Génois furent les premiers à la
fin du XIIIe siècle, à relier par voie maritime l'Italie aux Flandre et à l'Angleterre. A cette
époque le navire type était la galéasse. Cette galère se déplaçait principalement à la voile.
L'apparition de la voile latine triangulaire, qui pouvait être orientée dans toutes les directions
permettait au navire de naviguer par vent de travers et même contre le vent. Le gouvernail de
poupe, fixé par des charnières au milieu du pont arrière du navire (gouvernail d'étambot),
remplaça les rames latérales, longues et pesantes, les manoeuvres en furent améliorées. La
vergue (support en croix de la voile) tournante permit d'orienter au vent de côté les voiles
carrées. Sur certains voiliers, un second mât à l'avant commençait à faire son apparition.
La galéasse

Pour naviguer, les


marins italiens,
français ou catalans
utilisaient la galéasse.
La longueur du navire
faisait trois fois sa
largeur, et celle-ci
deux fois sa hauteur, il
s'agit de la règle
catalane (tres dos y as,
« trois, deux, un »). En
mer Baltique, on avait
plutôt recours à la
hourque, dont la coque
était faîte de planches
superposées et non
jointes.

Des progrès en optique


Grâce à la redécouverte d'ouvrages de l'Antiquité, ou à la découverte des écrits des savants
arabes, certaines sciences connurent un grand essor. Il en fut ainsi de l'optique. Une de ses
applications allait changer la vie de beaucoup de personnes : les lunettes. Les premières
lunettes sont appelées besicles, dérivant de béryl, la pierre précieuse transparente qu'on
utilisait alors pour les verres. Elles n'avaient pas de branches, mais les montures des verres
pivotaient et pinçaient le nez pour se fixer. Il est probable que l'usage des lentilles concaves et
convexes, qui augmentaient les possibilités de l'œil humain, soit beaucoup plus ancien.
L'empereur Néron n'employait-il pas des pierres précieuses adroitement taillées comme
loupes ? Les progrès en optique s'appliquèrent également dans la navigation, et, plus tard,
dans l'observation du ciel.

Un
cardinal
copiste
munit
de ses
besicles

Tommaso da Modena (1352)

Les premières images « imprimées »


Depuis toujours, la culture était l'affaire de quelques privilégiés. Malgré les efforts de l'Église
et de souverains éclairés, l'apprentissage de la lecture et de l'écriture était réservé aux classes
favorisées. Il était entendu que les autres, les paysans, les artisans, n'en avaient nul besoin. De
plus, le coût très élevé des manuscrits et leur nombre restreint limitaient la diffusion de
l'instruction. Deux inventions allaient commencer à changer cet état de fait. La technique de la
gravure sur bois d'abord, ou xylographie, un procédé déjà connu en Chine : une image
entaillée dans le bois et encrée laissait une empreint nette sur une feuille. Et l'apparition du
papier, au XIVe siècle, permit le remplacement des parchemins fut une avancée encore plus
importante. C'est ainsi que des images dessinées illustrant des scènes de la Bible furent
répandues partout : on les appela les « Bible des pauvres », ceux qui, ne sachant pas lire, se
contentaient de regarder les illustrations.

La naissance de la chimie
Les alchimistes du Moyen Âge cherchaient la substance, ou pierre philosophale, qui aurait
changé en or n'importe quel matériau ordinaire. Nous savons aujourd'hui que cela est possible
en théorie, grâce à la physique atomique, mais impossible en pratique. Les alchimistes
médiévaux effectuèrent cependant des milliers d'expériences, dans un but souvent plus
mystique, que scientifique, avec les matières les plus disparates, enregistrant ensuite
soigneusement les résultats de leurs observations. S'ils ne découvrirent pas la pierre
philosophale, ils purent connaître, par l'expérience, les réactions de presque toutes les
substances et jetèrent ainsi les bases de la chimie.
L'alchimiste Nicolas Flamel

La légende veut que Nicolas Flamel ait non


seulement découvert la formule permettant
de transformer le plomb en or, mais
également l'élixir de vie éternelle. Nicolas
Flamel aurait reconstitué la pierre
philosophale à partir des symboles contenus
dans un livre d'origine divine : "Abraham le
Juif". L'alchimiste avait acquis une grande
fortune, et, construit plusieurs chapelles et
hôpitaux. En 1712, un voyageur rencontre
un derviche en Asie Mineure qui lui affirme
que Nicolas Flamel et sa femme sont
toujours vivants. Certains pensent que
Richelieu aurait été le dernier propriétaire
du livre.

L'héritage extérieur

• La poudre à canon : Les Chinois, inventeurs de la poudre à canon, l'utilisaient pour


tirer des feux d'artifice lors de leurs fêtes, ou pour lancer des messages lumineux, la
nuit. On ignore, où et comment la poudre a été introduite et « réinventée » en Europe.
Lorsque l'usage s'en répandit au XIVe siècle, son expérimentation se limita aux
champs de bataille. Ainsi naquirent les premiers canons, qui projetaient, avec une
précision de tir très approximative, des boulets de pierre sur les armées ennemis ou
contre les épais murs des châteaux forts qui devinrent obsolète.
• L'invention du zéro : Les sciences mathématiques connurent, elles aussi, une
remarquable évolution au Moyen Âge. C'est peut-être dans ces domaines que les
progrès furent les plus significatifs. Parmi les nombreuses innovations, on peut
rappeler l'introduction des chiffres arabes, ceux-là même que nous utilisons : en
réalité, il s'agissait de chiffres indiens transmis aux européens par les Arabes. Un
chiffre qui ne compte pour rien, le zéro, a une importance plus grande encore, et
augmenta considérablement les possibilités de numération. La comptabilité des
marchands s'améliora et devint plus précise.

Les premières industries

• La première industrie textile : L'industrie textile fut à la base de l'énorme


développement que connaîtra l'Europe quelques siècles plus tard. L'art de transformer
la laine des moutons ou la tige du lin en fibres, de les filer pour obtenir des fils
continus et de les tisser pour en faire une étoffe est une activité qui suppose une
technologie élémentaire. C'est très probablement pour cette raison que ce travail fut le
premier à être presque entièrement « industrialisé ». Les mouvements rotatoires,
rectilignes ou alternés qui étaient imprimés à la machine par la roue du moulin à eau
convenaient bien au travail à répétition de la filature.
• La naissance des industries : Après l'an Mille, la situation était, schématiquement, la
suivante : grâce aux changements des conditions politiques et sociales, ainsi qu'aux
innovations techniques, l'agriculture produisait, outre le nécessaire, des excédents,
c'est-à-dire, une richesse qui pouvait être échangée ou vendue. La diffusion des
moulins permettait de disposer d'une énergie suffisante pour actionner des machines
accomplissant une série de travaux. Les techniques de travail des métaux furent ainsi
renouvelées, grâce aux quantités d'énergie supplémentaires fournies par les moulins.
Une roue hydraulique et un arbre à cames, par exemple, pouvaient actionner
facilement de gigantesques soufflets dans une fonderie. L'air envoyé sur le feu
augmentait la température à des degrés de fusion, en grande quantité et à des coups
limités. Les activités métallurgiques connurent alors un véritable essor.

La vie quotidienne au Moyen Âge


Introduction
Cet article regroupe plusieurs aspects des mœurs et de la vie quotidienne au Moyen Âge.
Nous étudierons successivement :

• La vie urbaine au Moyen Âge, avec l'expansion des communes et la description de


Paris.
• La vie des paysans à la campagne.
• Les divertissements populaires tels que les foires ou les tournois de chevaliers.
• Les mœurs et coutumes, habillement, coiffures, rôle des femmes...
La vie urbaine
Les communes
Avec le réveil économique et la croissance des villes, l'influence de ses habitants, les
burgenses ou bourgeois était croissante. Dans les principales cités d'Europe s'étaient formées
des associations appelées corporations, guildes ou hanses, et rassemblant les personnes
exerçant le même métier. Au début leur rôle consistait en un soutien mutuel contre la
concurrence et le besoin. Mais les corporations se heurtèrent très vite aux seigneurs qui
voyaient d'un mauvais œil cette organisation étrangère à l'ordre féodal. La lutte entre
seigneurs et bourgeois fut ainsi à l'origine du mouvement des communes libres. Peu à peu, la
prospérité et l'unité de la bourgeoisie citadine réussissait à contrôler ou neutraliser le pouvoir
effectif du seigneur. Les moyens utilisés étaient divers. Parfois, les citoyens trouvaient l'appui
d'un allié précieux : l'évêque de la ville. L'évêque n'hésitait pas à défendre les bourgeois
contre leur seigneur et même à prendre les armes pour s'opposer aux grands féodaux. Dans
d'autres lieux, c'est le souverain lui-même qui soutenait les prétentions des bourgeois : le
comte de Flandre et le roi de France encouragèrent le mouvement des communes. Pour le roi
de France, il s'agissait d'affaiblir le pouvoir des grands feudataires du royaume. Ainsi, les
citadins d'une ville « se gouverner en commun », d'où l'appellation de commune.

Les libertés communales


Les libertés communales Dans la plupart des cas, les bourgeois conjurés achetaient leurs
libertés au seigneur. Si le seigneur acceptait, on rédigeait des « chartes de franchise » (ou de
liberté), énumérant les droits accordés aux communes libres. Mais bien souvent, irrités par les
refus et réticences qu'ils rencontrèrent, les citadins n'hésitèrent pas à recourir à la violence.
Bien sûr, la répression féodale était terriblement sanglante (1076 : Le Mans, 1114 :
Amiens ...). Mais le mouvement s'étendit durant les XIIe et XIIIème siècle. Les libertés
acquises par les villes étaient plus ou moins étendues. Au nord-est de la France, la commune
jouit d'une réelle indépendance. Elle fait ses lois, bat sa monnaie, lève une milice... Mais c'est
en Allemagne et Italie du Nord que les libertés sont les plus larges : les communes constituent
de véritables petits états. Ayant obtenu leur autonomie, les communes s'organisèrent sous le
gouvernement de leurs magistrats, contrôlés et aidés par le conseil communal, dont faisait
partie les personnages les plus riches et les plus influents de la cité. Souvent, des conflits
éclataient entre les corporations et les grands de la cité (marchands, banquiers...). Le roi
proposait alors son arbitrage face à ces conflits permanents. Mais parfois, la cité faisait appel
à un personnage étranger à la ville, le podestat (celui qui exerce l'autorité), auquel on confiait
le gouvernement de la cité. Le mouvement d'émancipation de ces villes introduisit des
manières de penser et des attitudes qui étaient étrangères au monde féodal. Enfin, il légua une
institution qui se maintint jusqu'à nos jours : le régime municipal.
« L'air de la
cité rend
libre »

Une règle
particulière
fut établie
dans
certaines
communes,
notamment
Bologne.
Elle
consistait à
acheter la
liberté d'un
esclave s'il
se réfugiait
un an et un
jour dans
une
commune.
Les
citoyens ne
désirés
aucun serf
ou esclave
sur son
territoire.

Paris au Moyen Âge


Protégé par l'épaisse muraille de ses remparts, qui discipline sa croissance et le met à l'abri
des invasions, Paris, à la fin du XIIIe siècle, compte environ 200 000 habitants, ce qui est
énorme pour l'époque. Située sur la montagne Sainte-Geneviève, l'université attire plus de
deux mille étudiants et une centaine de professeurs venus de toute l'Europe. Dans ce quartier,
marchands et artisans sont surtout spécialisés dans le livre (relieurs, parcheminiers,
enlumineurs). Entre ce quartier intellectuel de la rive gauche et la ville marchande de la rive
droite, l'île de la Cité concentre les fonctions politiques et religieuses. Robert le Pieux, au
début du XIe siècle, a décidé d'y établir la résidence royale. A partir de 1160, sous l'impulsion
de Sully, évêque de Paris a été ouvert le chantier d'un nouvelle cathédrale. L'évêque dirige lui-
même les travaux, embauchant tailleurs, charpentiers... Grâce à l'application des principes de
l'architecture ogivale (ou gothique), Notre-Dame peut élever sa voûte jusqu'à 35 mètres, et ses
murs troués de vitraux multicolores, permettent à la lumière de pénétrer dans la nef pour
éclairer les nombreuses statues. En 1245, Saint Louis fait construire la Sainte-Chapelle, un
monument d'une audace architecturale exceptionnelle. 1130 panneaux de verre y résument
l'histoire du monde telle qu'elle est racontée dans la Bible. Situé au croisement d'une voie
fluviale, la Seine, et de la route terrestre allant d'Orléans à Senlis, Paris est aussi un carrefour
commercial important et un grand centre économique et bancaire. La Seine est encombrée de
bateaux et ses rives sont parsemées de moulins. Sur la rive droite, deux grandes bâtisses
construites par Philippe Auguste permettent la protection des marchandises entreposées. Par
suite du développement de la ville, ce premier marché permanent (les premières halles)
déborde rapidement l'enceinte prévue. Les ateliers et les échoppes envahissent alors les rues.
Les artisans se regroupent par rues auxquelles ils donnent le nom de leur corporation : rue de
la Ferronnerie, rue de la Tissanderie... La corporation la plus importante est celle des «
marchands d'eau », son chef, finira par s'imposer comme maire de Paris.
Paris au
Moyen Âge

• A
gau
che,
la
ville
mar
cha
nde,
la
plus
ani
mée
.
• Au
cent
re,
sur
l'île,
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les
fonc
tion
s
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ville
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son
univ
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ses
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spéc
ialis
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dan
s le
livr
e.

Des rues très animées


En 1131, le fils aîné de Louis VI qui se promenait à cheval dans Paris fut jeté à bas de sa
monture qui avait été effrayée par un troupeau de cochons. Le dauphin se fractura le crâne et
mourut peu après. Le roi avait donc interdit les cochons dans la ville. Mais les animaux ne
disparurent pas pour autant. Les places et les rues étaient très sales, jusqu'au jour où Philippe
Auguste, incommodé par l'odeur de purin qui monter jusqu'à ses fenêtres décida de les faire
paver. Ces rues étaient le théâtre d'une immense animation. Dès le lever du jour, l'étuveur
invitait les citoyens a prendre un bain chaud dans son établissement. Les boutiques s'ouvraient
alors : drapiers, barbiers interpellaient les clients depuis le pas des portes, le pâtissier offrait
ses gâteaux, ses saucissons et son pâté. Le pain était vendu par des marchands ambulants, qui
le portaient dans de grands paniers en osier. Comme les gens ne savaient pas lire, les
commerçants affichaient de lourdes enseignes sur leur boutique. Mais il n'y avait pas que les
marchandises que l'on vantait dans la rue. Les actes officiels et les nouvelles étaient criés. Des
attroupements de badauds se formaient autour de jongleurs, musiciens qui récitaient
notamment des chansons de geste. Mêlés à la foule, les mendiants imploraient les passants.
Les eaux usés et les détritus étaient jetés par les fenêtres, « Gare à l'eau ! » criait-on. Lorsque
la nuit tombait, les rues étaient plongées dans l'obscurité, il n'y avait pas encore d'éclairage
public. Aussi, la nuit, les rues étaient-elles abandonnées aux brigands.

La vie rurale
Campagne et ville
Les paysans représentent près de 95% de la population médiévale, ils représentèrent la base
matérielle, et le fondement de l'activité économique de la civilisation européenne. Le
dynamisme des marchands et artisans fit la prospérité des cités, mais ce sont les paysans qui
nourrissaient les citadins. Le travail de la terre était pénible et laborieux, mais il s'améliora, et
permit à l'Europe de prospérer. Au Moyen Âge, la séparation entre ville et campagne était
moins nette qu'aujourd'hui. Autour des remparts de la cité s'étendaient champs et prés. Mais le
développement technique avec l'essor du commerce, de l'artisanat et des travaux intellectuels
en ville, et de la culture et de l'élevage en campagne, entraîna une séparation plus marquée. La
vie des paysans épousait le rythme des saisons, les mêmes travaux se répétaient d'une année à
l'autre. Les transformations à la campagne étaient moins nombreuses et moins rapides qu'en
ville. La vie citadine, au contraire, favorisait le contact entre les individus, la diffusion des
connaissances techniques et intellectuelles. L'habitant des cités apparaissait moins soumis aux
contraintes de la nature.
La
représentation
du temps

Au Moyen Âge,
les paysans
avaient une
conception du
temps très
différente de la
nôtre; ils se le
représentaient
comme quelque
chose qui se
répéter sans
cesse et qui
revenait toujours
à son point de
départ, à l'instar
des aiguilles
d'une horloge.
Le temps était
pour eux à
l'image des
saisons qui se
succéder. Ainsi
le calendrier des
paysans épousait
étroitement la
succession des
activités
agricoles
(labours,
semailles,
récoltes...). Les
mois de l'année
sont un motif
fréquemment
représenté au
Moyen Âge,
chaque mois est
symbolisé par
les activités
agricoles de la
saison.
Deux catégories de paysans

• Les serfs de la glèbe : Les paysans, ou serfs de la glèbe (c'est-à-dire de la terre, au sens
de sol cultivé) faisaient partie du domaine. Lorsque le terrain était vendu, ils passaient
d'un maître à l'autre, de la même manière que les animaux de la ferme. Les fils de
paysans devenaient paysans comme leurs ancêtres, et comme leur futur descendance.
Mais le servage n'était pas à proprement parler l'esclavage, même si la condition des
serfs était proche des esclaves de l'Antiquité. Dès la fin de l'Empire romain,
l'esclavage avait reculé sous l'influence de la nouvelle organisation économique et
sociale, qui s'était formée autour du domaine, et qui suppléait l'État en pleine
décomposition. De plus l'Église condamnait l'esclavage. Les serfs avaient beaucoup
d'obligations mais aussi des droits. Ils étaient pleinement considérés comme des
personnes, et théoriquement, ils pouvaient quitter le domaine à tout moment, aucune
loi ne les obligeait à rester liés à la terre.
• Manants et alleutiers : Le phénomène de servage se généralisa en Europe du Nord. En
témoignent les nombreux vocables européens. Du latin manere (resider), dérivèrent les
mots mansus ou manse, c'est-à-dire les champs et la maison des paysans. En français,
le paysan fut appelé manant, celui qui reste sur la terre. L'habitation de la ferme fut
appelée maison. En Angleterre, les seigneurs appelèrent manor, manoir, le petit
château destiné à surveiller et protéger les champs. A côté des serfs subsistaient des
paysans libres ou alleux. Les alleutiers (ou vilains), comme on les appelait en France,
étaient fort nombreux dans l'Europe du Sud.

Serfs de la
glèbe
travaillant
la culture
fourragère

Introduction des cultures fourragères (XVIe siècle)

La répartition du territoire
Au début du Moyen Âge, l'Europe était une étendue inculte et sauvage, appauvrie par le
passage des tribus barbares. La transformation de ce continent est le résultat du labeur
ininterrompu commencé à l'époque médiévale, et en particulier des grands défrichements des
forêts (par le feu ou la hache). La terre appartenant au seigneur était divisée en deux parties :

• La réserve domaniale : Du latin dominus (maître). En plus du château ou de la


résidence seigneuriale, elle comprenait les champs, les vignes, les pâturages, es forêts,
terrain de chasse du seigneur. Elle comprenait également le village installé autour du
château, avec le four, le moulin et des artisans tels que le sellier ou le forgeron.
• Les manses : Le reste du domaine était divisé en manses (ou tenures) attribués selon
leur étendue à une ou plusieurs familles paysannes. Le manse était la cellule
fondamentale de l'économie agraire du Moyen Âge. Le serf disposait des produits du
potager, ainsi que de la basse-cour et du porc, une des seules sources de protéine
animale, le mouton était réservé à la laine et le bœuf pour le trait. Le serf avait
également le droit de faire paître ses bêtes sur les champs en jachère (terrains non
cultivés).

L'évolution du servage
En échange de la terre et de la protection militaire, le serf avait quelques devoirs envers son
seigneur. Il devait remettre une partie de la récolte à son suzerain et de payer des taxes. Il
devait également participer gratuitement à des travaux appelés corvées. Ces tâches pouvaient
être labours, récoltes ou sarclages sur les terres du seigneur. Mais ils étaient également
appelés à la réparation d'un pont, creusement d'un puits ou réparation des murs du château.
Mais au fil des ans, les besoins en argent des seigneurs s'accrurent, en partie à cause de
l'enrichissement général. Le paysan quant à lui obtenait des revenus en vendant au marché les
produits qu'il ne consommait pas. Cela modifia la condition du serf qui pouvait ainsi
s'affranchir des corvées et réquisitions militaires en échange d'une somme d'argent au
seigneur. On passa ainsi du servage au fermage, le propriétaire louait la terre au paysan qui
l'exploitait à son compte. La production agricole augmenta considérablement car le paysan
travaillait à son compte et se devait d'obtenir de quoi payer le loyer et de quoi nourrir sa
famille.
Paysans
labourant
un champ

De nouvelles techniques agricoles


Les paysans avaient constatés que certaines cultures comme les céréales, appauvrissaient le
sol, alors que d'autres comme les légumes l'enrichissaient. Pour éviter l'épuisement du sol, les
agriculteurs de l'Antiquité avaient institué le système de la rotation biennale : un champ semé
en céréales était laissé en jachère l'année suivante, il était labouré, mais non semé, et servait
de pâturage. Au Moyen Âge, la rotation devint triennale : le champ était cultivé en céréales la
première année, puis en légumes la deuxième année, avant d'être laissé en jachère la troisième
année. Le gain de ce système était double. En effet, désormais seul un champ sur trois restait
improductif, et la culture des légumes enrichissait la terre. La production augmenta de 50%, le
paysan pouvait vendre ses excédents et améliorer sa condition précaire. De plus, la technique
permit l'amélioration des outils agricoles : araire, charrue, herse, houe, faucille...

Les divertissements populaires


Foires et spectacles

• Les foires : C'est à partir du IXe siècle et sous l'essor des croisades qu'une ferveur
religieuse redonne de la vigueur à la vie sociale. Les grandes foires européennes du
Moyen Âge eurent à cette époque leur premier moment d'authentique splendeur. Les
foires apparurent comme la conséquence de la nécessité pour les commerçants de
s'approvisionner en marchandises de toutes sortes. La France fut un acteur de premier
ordre dans le développement des grandes foires médiévales, parmi lesquelles se
détachent celles de la Champagne et la foire parisienne du Lendit. Au XIIe siècle
apparurent d'autres foires et d'autres produits, notamment la foire de Beaucaire en
Languedoc. Mais avec le temps, les foires méridionales françaises furent éclipsées par
celles organisés quatre fois l'an, deux semaines durant, dans la ville de Lyon, depuis
1420. La situation privilégiée de Lyon, à un croisement où confluent les courants du
trafic international provenant des quatre points cardinaux, en fit une ville de foire par
excellence.
• Les spectacles : Le Bas Moyen Âge fut une époque où l'industrie et le commerce
eurent un essor qui ne sera dépassé qu'à l'aube de la Révolution industrielle du XVIIIe
siècle. Les gens se déplaçaient alors partout, sur mer comme sur terre. Des spectacles
itinérants se produisaient de foire en foire et sur les plus modestes marchés régionaux.
Saltimbanques, funambules, lanceurs de couteaux, ventriloques, conteurs, bouffons,
pitres, mimes... passaient de palais en châteaux, sans négliger les plus petites cours
royales. Parfois, d'authentiques œuvres théâtrales étaient montées. Les œuvres
représentées par ces compagnies ambulantes étaient rudimentaires, car peu de gens
pouvait lire et écrire. Les dialogues pouvaient ainsi être livrés à l'improvisation des
interprètes, qui pouvaient être des étudiants en vacances ou des religieux.

Foire marchande

Les tournois
Seuls les chevaliers pouvaient participer aux joutes et aux tournois. Ces compétitions étaient
le spectacle le plus apprécié du public durant tout le Moyen Âge. Le tournoi était
solennellement ouvert par un héraut (officier chargés de faire des proclamations solennelles),
qui annonçait sur les places publiques l'intention du roi ou d'un grand seigneur de rassembler
pour cette fête les chevaliers les plus réputés du pays. Autour d'une vaste esplanade, appelée
lice, les participants avaient élevés leurs riches tentes ou pavillons. Au sommet de la lance
plantée à l'entrée était suspendu le bouclier avec les armoiries du seigneur. Le tournoi durait
habituellement plusieurs jours. Les épreuves étaient variées et dotées d'un riche prix. Les
adversaires s'affrontaient avec des armes dites « courtoises », c'est-à-dire rendues inoffensives
ou presque (les accidents étaient fréquents) : les lances étaient épointées et les épées privées
de leur tranchant. Alors que la joute voyait s'affronter deux cavaliers séparés par une barrière
ou une corde, la « mêlée » consistait en une véritable bataille rangée entre deux groupes de
cavaliers égaux en nombre. La mêlée se déroulait en champ libre, et bien qu'il existât
quelques règles comme celle de ne pas frapper d'estoc, elle était très violente ! Il n'était pas
rare de sortir des morts du terrain d'affrontement. Au XVe siècle, se formèrent des
compagnies de chevaliers dont l'unique but était de favoriser des tournois. Pour les jeunes fils
cadets d'aristocrates, le tournoi devenait une véritable profession. A en croire les
chroniqueurs, les combats devinrent de plus en plus spectaculaire. Il y avait parfois d'autres
compétitions comme la lutte libre, le tir à l'arc, à l'arbalète ou à la fronde.

La joute
L'épreuve la plus spectaculaire était la joute, au cours de laquelle deux adversaires
s'affrontaient directement, à pied et à cheval. Le chevalier défiait son rival en touchant de la
pointe de l'épée le bouclier suspendu à son pavillon. Le défi devait alors être relevé. Descendu
dans la lice, le chevalier parait son armure resplendissante, manifestant ses sentiments envers
sa dame, à qui l'on dédiait le combat : le chevalier portait au bras, sur la lance, ou autour du
cou, un voile ou un mouchoir aux couleurs de celle-ci. Puis la joute commençait. Au signal
des juges, les concurrents s'élançaient au galop l'un contre l'autre; le choc des lances contre les
boucliers ou l'armure était terrible. Si aucun des deux adversaires n'était désarçonné, un
nouvel engagement succédait au premier. Au contraire, si l'un tombait, l'autre mettait pied à
terre et le duel continuait à l'épée ou à la masse. Le perdant devait reconnaître loyalement sa
défaite, sinon les juges le déclaraient « hors de combat ». Le vainqueur recevait non
seulement le prix mis en compétition, mais aussi les armes, les chevaux et la personne même
du vaincu : celui-ci était considéré comme prisonnier et recouvrait la liberté sous une rançon.
Le dernier tournoi

En 1559, c'est au cours d'un


double mariage que se produisit
un spectacle de bien funeste
mémoire. Pour clôturer les
festivités, un tournoi eu lieu à
Paris. Le roi de France Henri II
décida alors d'y participer pour
affronter le comte de
Montgomery, l'une des plus fines
lames de l'époque. La fatalité fit
qu'au cours de la troisième passe,
la lance de Montgomery, déviée
par l'écu d'Henri pénétra sous la
visière du casque de celui-ci et lui
traversa l'œil. Le roi agonisa dix
jours, puis mourut. La reine
Catherine de Médicis interdit
alors les tournois et les joutes sur
le sol français.

Les fêtes

Au Moyen Âge, près d'une journée sur trois est chômée, il y a beaucoup de vacances. La
majorité des fêtes sont catholiques, mais la tradition a conservé quelques rites d'origine
païenne :

• Les fêtes catholiques


o Epiphanie : Elle correspond à la présentation de Jésus aux Rois Mages. La
traditionnelle galette des rois est alors partagée.
o Carême : Quarante jours avant Pâques, le peuple est invité au partage, au jeun
et à la prière.
o Paques : Vers le début du printemps, on s'échange des œufs peints pour
symboliser la fin des privations de l'hiver et du carême.
o Toussaint : Fête d'origine celte, instituée par Louis le Pieux. Le 1er novembre,
on fête Tous les Saints, c'est-à-dire de la Communauté des vivants et des
morts.
o Noël : Le 25 décembre, on fête l'avènement du Christ.
• Les fêtes profanes
o La fête des fous : Elle était célébrée le jour de Noël, ou le jour de l'An ou
encore de l'Épiphanie. Les domestiques prenaient la place de leurs maîtres, les
valeurs établies de la société étaient renversées et la religion était ridiculisée.
o La fête de l'âne : Elle était célébrée dans certaines villes la veille de Noël. En
souvenir de la fuite en Egypte, une jeune fille tenant un enfant dans ses bras
pénétrait dans une église à dos d'âne. Pendant la messe, toutes les prières se
terminaient alors par "hi-han". L'Église a rapidement interdit ces célébrations.
o Les Mais : Le 1er mai ou au cours du mois de mai, les jeunes hommes
déposaient des branches d'arbres devant la porte des jeunes filles à marier. La
branche d'arbre symbolisait les qualités ou les défauts de la jeune fille.
o La Saint-Jean : Le soir du 24 juin, au moment des moissons, on allume de
grands feux. Les jeunes couples se tenaient par la main et sautaient par dessus
le feu pour avoir des enfants ou une bonne récolte.
o La Saint-Michel : Le 29 septembre, les paysans devaient payer aux seigneurs
leurs redevances (taxes).

Les moeurs et coutumes


La condition des femmes
Au Moyen Âge, l'Église considère la femme comme instigatrice du péché originel, on la
soupçonne de porter l'hérésie. Il n'y a qu'un remède à cela : le mariage, en rendant la femme
mère. Ce sont les familles qui unissent leurs enfants, généralement douze ans pour les femmes
et quatorze ans pour les hommes. Dans les classes élevées, le mariage est un instrument
d'alliances et d'implémentations. Si le couple n'est pas en mesure d'avoir un enfant, le mariage
peut être remis en question, et la femme peut être répudiée. Beaucoup de grossesses sont
fatales aux mères, et faute d'avortement on pratique beaucoup l'infanticide. Les prostituées ou
filles de joie sont beaucoup présentes au Moyen Âge. La prostitution est autorisée par l'Église,
la femme doit provenir d'une ville étrangère pour éviter l'inceste. Souvent, ces femmes ont été
rejetées par leur famille après un viol ou une grossesse clandestine. Le viol est puni, mais pas
de la même façon : s'il s'agit d'une religieuse, d'une femme mariée ou d'une vierge, le crime
peut être puni de mort. S'il s'agit d'une servante d'humble condition, on doit fournir une
indemnité à la famille. Les femmes participent activement à la vie économique, d'ailleurs,
dans le commerce alimentaire, les femmes sont majoritaires. Cependant les salaires sont dès
cette époque nettement inférieurs aux hommes. En campagne, elles aident leur mari aux
tâches agricoles. Mais à travers l'amour courtois des chevaliers et troubadours, la femme reste
une importante source d'inspiration. Principalement développé par la culture occitane, les
femmes sont vénérées pour leur beauté et leur amour, les hommes pour leur courage et leur
bravoure. Enfin certaines femmes ont réussi à se forger une solide renommée historique :
Aliénor d'Aquitaine, Marie de France, Jeanne d'Arc...

Costumes et habillement
Le vêtement possède au Moyen Âge une signification sociale : selon le rang et les fonctions
occupés, on ne s'habillera pas de la même façon. Au XVe siècle, la plupart des hommes ont
adopté le port d'un vêtement de dessus très court, mais certains, par décence, continuent de
porter des robes et manteaux longs : les prêtres, les notables, les doctes. Parmi ceux-ci,
médecins et juristes partagent le privilège de porter le même costume rouge doublé de
fourrure blanche. Les vêtements proprement dits sont complétés par de nombreux accessoires
du costume. La ceinture, le plus souvent une simple lanière de cuir, est parfois cloutée. Celle
des femmes peut être orfévrée et constituer un véritable bijou. Nombreux sont les hommes à
accrocher à leur ceinture une bourse ou une sacoche. Accessoire indispensable du costume,
les aiguillettes sont des lacets accrochant l'un à l'autre deux vêtements ou deux pièces d'un
même vêtement.
Cycle de la
Passion du
Christ :
Reniement
de saint
Pierre

Cycle de la Passion du Christ : Reniement de saint


Pierre (10/25) - Sanctuaire Notre-Dame des Fontaines,
La Brigue

Les coiffures
Les gens du Moyen Âge ne conçoivent pas de vivre tête nue, la variété des couvre-chefs, tant
masculins que féminins, est flagrante. Les femmes de plus haut rang portent des coiffes à
cornes cachant complètement leurs cheveux tirés en arrière. Ces coiffes sont recouvertes de
tissu façonné et parfois d'une résille. Certaines portent un simple voile blanc tombant sur leurs
épaules. Quand elles sont vieilles, les femmes s'entourent toute la tête, y compris le menton,
dans des linges blancs appelés touailles. La touaille est une pièce de tissu étroite et très
allongée qui fait partie du trousseau de la mariée et sert à tout dans la maison : torchon,
serviette, essuie-mains, maillot, bandage, tablier... Diversité et hiérarchie apparaissent
également dans les coiffures masculines. Travailleurs manuels et hommes de peine portent un
simple calot. Apprêter son chaperon demande une certaine dextérité : cette longue pièce de
drap est enroulée au sommet de la tête. L'un, court, retombe sur le côté, l'autre plus long,
drape souplement les épaules ; en cas de mauvais temps il peut aussi serrer davantage le cou
et les oreilles pour les protéger du froid.

Les repas
La table est généralement recouverte d'une nappe blanche, au centre de la table, dans une
grande coupe sur pied se trouve le plat principal. Les aliments ne sont pas posés sur des
assiettes mais sur des « tailloirs », larges tranches de miches de pain, qui absorbent le jus.
D'autres petits pains, façonnés en boules détachables les unes des autres, sont à la disposition
des convives. Les gens mangent avec leurs doigts et partagent quelques verres et quelques
couteaux, la cuiller est réservée au service du plat central, la fourchette n'existe pas à cette
époque. La nourriture est hachée (on a de mauvaises dents) et très épicée (elle se conserve
mal). Les carafes, pour l'eau et pour le vin, et différentes sortes de cruches et de pichets sont
utilisés dans chaque maison.
Cycle de
la
Passion
du
Christ :
Dernière
Cène

Cycle de la Passion du Christ : Dernière Cène (2/25) - Sanctuaire Notre-


Dame des Fontaines, La Brigue

Quiz - La société du Moyen Âge


1) Le système féodal - Quel est le nom du territoire du vassal ?
Le comté
Le fief
La marche
Le département
2) Le système féodal - Lequel parmi ces titres est le plus haut dans la hiérarchie noble ?
Le Chevalier
Le Baron
Le Duc
Le Comte
3) Le système féodal - Laquelle de ces affirmations est fausse concernant les alleutiers ?
Ce sont des paysans libres
Ils doivent payer une taxe au seigneur
Ils doivent exécuter des corvées
Leurs terres appartiennent au seigneur
4) Le système féodal - Généralement, a quel âge devient-on écuyer ?
7 ans
14 ans
21 ans
il n'y a pas d'âge courant
5) Le système féodal - Traditionnellement, quel jour les chevaliers sont investis ?
Ascension
Noël
Pâques
Pentecôte
6) La ferveur religieuse - Quel empereur romain se convertit au catholicisme ?
Constantin Ier
Néron
Justinien
Auguste Ier
7) La ferveur religieuse - Où se trouve les restes de Saint Jacques le Majeur ?
En Galilée
En Galice
En Judée
En Castille
8) La ferveur religieuse - Combien de croisades dénombrent-t-on ?
6
7
8
9
9) La ferveur religieuse - Quel ordre de chevalerie est créé en 1128 à Jérusalem ?
Les Templiers
Les Hospitaliers
L'Ordre de Malte
Les Chevaliers Teutonniques
10) La ferveur religieuse - De quel type d'ordre religieux sont issus les franciscains ?
L'ordre mendiant
L'ordre monastique
Le clergé séculier
Le Haut-Clergé
11) L'Art de la Guerre - Quelles ouvertures sont aussi appelées les hourds ?
Les merlons
Les mâchicoulis
Les meurtrières
Les échauguettes
12) L'Art de la Guerre - Comment se nomme les tunnels creusés sous la muraille du château ?
Le mâchicoulis
La meurtrière
Le merlon
La sape
13) L'Art de la Guerre - Quel peuple maîtrisait l'utilisation de l'arc lors des batailles ?
Les Français
Les Suisses
Les Anglais
Les Espagnols
14) L'Art de la Guerre - Au cours de quel siècle apparaît le haubert ?
XIème
XIIème
XIIIème
XIVème
15) L'Art de la Guerre - Quel arbalète est constituée d'un treuil relié à la ceinture du soldat ?
L'arbalète à croc
L'arbalète à pied de biche
L'arbalète à moufle
L'arbalète à cranequin
16) Héraldique - Quelle est le type d'écu dont la forme est un losange
L'écu de tournoi
L'écu ibère
L'écu des dames
L'écu des demoiselles
17) Héraldique - Quel couleur traditionnelle correspond au sinople ?
Vert
Rouge
Jaune
Noir
18) Héraldique - Quel trait constitue la partition tranché ?
Trait horizontale
Trait verticale
Diagonale partant d'en haut à gauche
Diagonale partant d'en bas à gauche
19) Héraldique - Laquelle de ces pièces honorables ne fait pas allusion à un vêtement ?
Chape
Chausse
Mantel
Chevron
20) Héraldique - Quel rebattement se rapporte à la pièce honorable tranché ?
Pal
Fasce
Barre
Bande
21) L'Art et la Culture - Quel mouvement d'art succède à l'art roman ?
L'art du Haut Moyen Âge
L'art baroque
L'art gothique
L'art classique
22) L'Art et la Culture - La cathédrale de Notre Dame appartient à quel mouvement d'art ?
L'art du Haut Moyen Âge
L'art baroque
L'art gothique
L'art roman
23) L'Art et la Culture - Laquelle de ces affirmations est fausse ?
Les troubadours sont issus des classes aisées
Au Sud de la France, on parle la langue d'oc
L'amour courtois fait l'éloge de la femme
La chanson de Roland est une poésie occitane
24) L'Art et la Culture - Laquelle de ces matières n'était pas étudiée à l'école médiévale ?
La guerre
La musique
La théologie
La sculpture
25) L'Art et la Culture - Sur la façade nord de Notre-Dame, qui aurait servie de modèle pour
la réalisation de la Vierge ?
Blanche de Castille
Marguerite de Provence
Aliénor d'Aquitaine
Constance de Provence
26) Le commerce - Quel est le personnage clé de "la petite Renaissance" ?
Saint Louis
Charlemagne
Otton Ier
Philippe II Auguste
27) Le commerce - Quelle région est la plus florissante en guildes ?
La Rhénanie
Le Sud de la France
L'Angleterre
L'Italie
28) Le commerce - Laquelle de ces hanses n'existe pas ?
La Hanse de Londres
La Hanse des XVII Villes
La Hanse Teutonique
La Hanse lyonnaise
29) Le commerce - Quel procédé permet aux marchands d'éviter de transporter une grande
somme d'argent ?
La lettre de change
Les assignats
Le papier de charge
Le sceau de fidélité
30) Le commerce - Quel peuple fut le permier à maîtriser la boussole ?
Les Vikings
Les Vénitiens
Les Chinois
Les Arabes
31) La technique et la science - Qu'est-ce qu'une araire ?
Une charette
Une charrue sans roue
Un harnais
Un fer à cheval
32) La technique et la science - Laquelle de ces inventions est attribuée aux Arabes ?
La boussole
L'astrolabe
La poudre à canon
L'invention du zéro
33) La technique et la science - Laquelle de ces inventions est attribuée aux Chinois ?
L'astrolabe
Le sextant
La poudre à canon
L'invention du zéro
34) La technique et la science - Qu'est-ce que la xylographie ?
L'art de jouer un instrument de musique
Des mathématiques
De la gravure sur bois
L'écriture de parchemins
35) La technique et la science - Qui est Nicolas Flamel ?
Un seigneur français
Un navigateur
Un astronome
Un alchimiste
36) La vie quotidienne - Qu'est-ce qu'un podestat ?
Une charte de libertés accordée à la commune
Une personne étrangère exerçant son autorité sur la commune
Un evêque rallié au sort de la commune
Un habitant d'une commune
37) La vie quotidienne - A la fin du XIIIème siècle, combien d'habitants compte Paris ?
2 000
20 000
200 000
2 000 000
38) La vie quotidienne - Qu'est-ce qu'une manse ?
Une commune
Un alleutier
Un serf de la glèbe
Une sorte de ferme
39) La vie quotidienne - Quel fête est célébrée le 29 septembre ?
La Saint-Jean
La Saint-Michel
La fête de l'âne
La fête des fous
40) La vie quotidienne - Lequel de ces ustensiles n'existe pas au Moyen Âge ?
Le couteau
La fourchette
La cuiller
L'assiette

Clovis et la conquête de la Gaule(476 - 629)

Clovis Ier
Introduction
Terrible époque que celle-ci, le grand Empire Romain s'émiette pour disparaître, les grands
empereurs ont perdu leur panache. Les tribus germaniques se sont étendues, elles ont reculé
les frontières de l'Empire. Les légions romaines ont perdu leur efficacité face à la ferveur
barbare. Cette période est sombre et énigmatique, le monde entre progressivement dans le
Moyen Âge.

Le contexte de l'époque
L'héritage des Francs
Barbares civilisés les tribus franques se mirent en mouvement en même temps que les
Germains. Les plus actifs d'entre eux sont les Francs Ripuaires et Saliens. Les Ripuaires (ou
Rhénans) s'étendaient sur la vallée Rhénane à la droite du Rhin. Les Saliens sont originaires
du territoire hollandais, ils se déplacèrent vers le sud-ouest et investirent le nord de la Gaule.
Comme les autres peuples barbares, les Francs reconnaissaient l'autorité d'un roi. Les premiers
souverains des Francs Saliens sont des rois légendaires tel que Clodion le chevelu et Mérovée
(qui donna son nom à la dynastie mérovingienne). Ces derniers avaient aidés les Romains
d'Aetius à chasser Attila de Gaule, une gigantesque bataille avait eu lieu aux Champs
Catalauniques où les Huns furent battus. Childéric Ier succéda à Mérovée, la parenté n'est
cependant pas prouvée. Il mena tout d'abord une vie de débauche et fut chassé de son
royaume. Rétabli quelques années plus tard, il aida les Romains d'Aegidius à chasser les
Wisigoths. (ndlr : un article sur les Francs sera l'objet d'une étude plus approfondie).
Le tombeau de Childéric

Le tombeau de Childéric fut découvert à


Tournai en 1653 par un maçon sourd et
muet. Il étonne par son origine païenne et
germanique : le roi est enterré avec ses
chevaux, portant au bras un bracelet d'argent
et par son aspect Romain : il portait un
manteau de pourpre tenu par une fibule d'or,
propre au général romain et un anneau au
doigt servant à sceller les actes portant la
légende : Childéricus rex ( Childéric roi). Le
manteau était orné d'abeilles d'or, symbole
mérovingien que Napoléon Ier adopta par la
suite pour rappeler les origines de la France.
Childéric Ier

La Gaule, une mosaïque de peuples


La Gaule était la province la plus cultivée et la plus riche de l'Occident romain. Elle fut avec
la Bretagne l'une des premières provinces à être abandonnées par les Romains. Avec
l'affaiblissement des défenses impériales elle tomba très vite aux mains des Barbares :

• Au Sud-Ouest, les Wisigoths (Espagne et Aquitaine).


• Au Sud-Est, les Ostrogoths (Italie du Nord).
• Le Centre-Est devint le pays des Burgondes (un des rares peuples convertis au
catholicisme).
• Entre la Loire et la Somme, un général romain, s'était taillé un royaume dont la
capitale était Soissons, se considérant comme le « roi des Romains », il essayait de
maintenir la civilisation latine.

Ainsi la Gaule représentait une mosaïque de cultures et un enjeu principal pour le nouveau roi
des Saliens : Clovis, fils de Childéric.

La Gaule à l'avénement de Clovis

Le prénom Clovis
Clovis s'appelait en réalité Chlodowech (illustre à la guerre), les historiens le déformèrent en
Clovis. Le prénom a évolué sous les Carolingiens : Chlodowichus puis Lodovicus avant de
devenir Ludovicus puis Ludovic de nos jours. En France occidentale, le prénom devient
Lodoïs puis Louis. Clovis peut ainsi être considéré comme Louis Ier !

Le règne de Clovis
La conquête du royaume de Syagrius
A 15 ans, Clovis est encore un jeune garçon imberbe lorsqu'il est hissé sur le pavois (bouclier)
pour être proclamé roi des Francs à Tournai en 481. Le royaume est maigre et d'autres saliens
contrôlent les régions voisines mais Clovis bénéficie de l'œuvre de son père Childéric. Très
vite le jeune roi veut s'affirmer et refuse de partager son pouvoir comme son père l'avait fait.
Il réunit les petites tribus avoisinantes et s'allie avec deux autres rois saliens (Ragnacaire et
Chararic) afin de s'emparer du royaume de Syagrius ainsi que sa ville : Soissons. La guerre
déclarée en 486, Clovis et ses troupes triomphent sur les Romains aux portes de Soissons.
Syagrius vient alors se réfugier chez le chef des Wisigoths : Alaric, mais par peur de
représailles, Alaric livre le chef romain à Clovis qui l'égorgea. Grâce aux rançons obtenues
pour la libération de riches notables et au butin amassé lors de la conquête, il put former une
armée permanente. Poursuivant sa marche victorieuse, il étendit le royaume des Francs
jusqu'à la Bretagne et la Loire.
Le vase de Soissons

Après la prise de Soissons, le butin comme


le voulait l'usage, devait être partagé entre le
roi et ses hommes. Or, Clovis, voulant offrir
un beau vase trouvé dans le pillage de
Soissons à l'évêque de Reims, le plaça hors
part. Cela mit en colère un de ses guerriers
qui accusa publiquement Clovis de tricherie,
et selon la légende brisa le magnifique vase.
Un an plus tard, lors d'une revue militaire,
Clovis reconnu le guerrier et lui jeta sa
hache à terre, le guerrier se baissa pour la
ramasser et Clovis lui décocha un coup de
francisque dans le crâne en disant : « Ainsi
as-tu fait avec le vase de Soissons ». Des
doutes subsistent sur cette légende, en effet
le vase n'aurait pas été détruit et donné à
Saint-Rémi.
Vengeance de Clovis (Bibliothèque nationale de France)

L'influence de Clotilde
Pendant ce temps, Théodoric le Grand chef des Ostrogoths s'est imposé un grand royaume en
Italie, il se maria avec l'une des sœurs de Clovis. Voulant échapper au pouvoir des Goths,
Clovis chercha une alliance auprès des Burgondes. Ainsi un mariage fut arrangé entre Clovis
et Clotilde la fille du chef des Burgondes. Ayant reçu une éducation catholique, Clotilde
s'employa à convertir son mari dont le peuple pratique le culte païen. Mais à l'Est, les
Alamans agressent les frontières, menaçant les Burgondes, les Saliens et les Ripuaires. Un
affrontement a lieu à Tolbiac en 496, la bataille part à l'avantage des Alamans, après avoir
invoqué les dieux païens, Clovis s'en retourne vers le dieu de Clotilde et lui jure de se
convertir s'il gagne la bataille. Par miracle, le chef Alamans et tué, bientôt ses soldats fuient et
sont en déroute. Il restait alors au chef franc de respecter son vœu.
La fleur de lys

Lors de la bataille de Tolbiac, un ange proposa à


Clovis d'échanger les trois crapauds (symbole païen)
qui ornaient son bouclier contre trois fleurs de lys
d'or. Ainsi, la fleur de lys devint l'emblème de la
monarchie française jusqu'en 1830. Elle flotte encore
sur le drapeau du Québec.
Voeu de Clovis à la bataille de Tolbiac - par Paul-Joseph BLANC
(Panthéon)

La conversion des Francs


Au delà de la promesse faite à Tolbiac, Clovis savait qu'il pouvait tirer un avantage de sa
conversion au catholicisme. En effet, il pourrait s'attirer la bienveillance des populations
gallo-romaines dont la plupart était régis par des rois ariens. Cependant Clovis hésita, la
moitié de son peuple vouait le culte païen, la reine Clotilde demanda l'appui de l'évêque Rémi
qui influençait beaucoup Clovis. Ainsi, à Reims dans la nuit de Noël 497 (ou 498,499 ?),
Saint-Rémi baptisa Clovis avec 3 000 de ses soldats. Les populations gallo-romaines
accueillirent les Francs non plus comme des envahisseurs mais comme des libérateurs.
L'Église, qui était la plus haute autorité spirituelle, choisit ainsi le camp des Francs.
Le Baptême

Ce fut une cérémonie impressionnante, qui


se déroulait en présence des chefs francs et
des notables gallo-romains qui se
soumettaient à l'autorité du roi. Par la suite,
l'action de Clovis fut favorisé par l'Église : «
Chaque jour, Dieu faisait tomber les
ennemis sous sa main car il marchait d'un
cœur pur devant le Seigneur. »
Le Baptême de Clovis - par LE MAÎTRE DE ST-GILLES
(Washington.National Gallery)

Les Wisigoths
Vers l'an 500, Clovis intervient dans une querelle familiale des Burgondes. Chilpéric, le père
de Clotilde est assassiné par son frère Gondebaud. Après avoir affronté Gondebaud pour
venger sa femme, Clovis se résout à signer un traité d'alliance avec celui-ci en 502. Cette
nouvelle alliance inquiéta de plus en plus Alaric le chef des Ostrogoths qui en fit part à
Théodoric des Wisigoths. Clovis entraîna ses tribus franques ainsi que les Burgondes à
Vouillé près de Poitiers pour affronter les Wisigoths, ennemis des Francs de longue date.
Alaric II fut vaincu et tué par les propres mains de Clovis. L'armée de Théodoric fut quant à
elle contenu par les Byzantins de l'empereur Anastase, qui a signé une alliance avec les
Francs. Clovis s'empara alors de Toulouse, capitale des Ostrogoths, ainsi que du légendaire
trésor d'Alaric.
Le trésor d'Alaric

La légende veut qu'en 52, l'empereur Titus trouva


le trésor de Salomon lors de la mise à sac de
Jérusalem. Par la suite, Alaric Ier s'en empara lors
de la mise à sac de Rome en 410. Ce trésor était le
plus grand d'Occident et contenait le Saint Graal.
D'autres sources affirment que les Wisigoths ont
transporté le trésor dans les remparts de
Carcassonne où Clovis échoua. On le situa dans le
puits de Carcassonne, dans la montagne d'Alaric
ou dans le château de Montségur où les cathares
avaient position. Au début du XXe siècle, un curé
Béranger Saunière dépensait des fortunes
colossales sans que l'on sache d'où provenait sa
richesse. On pense alors qu'il a découvert le trésor
d'Alaric et a fait un trafic illégal avec la cour
Autrichienne.
Limons (Puy de Dôme): fibule ajourée, or et grenats, fin VIe s. Tête de Christ au centre d'un
Chrisme, Ø 63 mm, BN Paris

La réunification des tribus


Après la victoire de Vouillé, Clovis reçut à Tours le signe de la protection bienveillante de
l'Empire Romain d'Orient qui lui donna le titre de consul et d'auguste. Cette investiture
l'élevait comme souverain légitime, aussi s'employa-t-il à réunifier le royaume franc qui est
encore morcelé par l'existence de petits territoires régis par des rois. Clovis commença à
s'attaquer à Chararic et Ragnacaire ses deux alliés Saliens contre Syagrius, il fit raser la tête
au premier (la chevelure était le symbole du pouvoir royale, ainsi les soldats avaient la nuque
rasée), puis il les exécuta. Les Saliens unifiés, il restait les Francs Ripuaires à soumettre.
Clovis mit en œuvre une machination démoniaque, en incitant le prince des Ripuaires à
assassiner son père Sigebert le roi. Par la suite, le jeune prince fut tué alors qu'il amenait les
trésors de son royaume à Clovis. Clovis sût alors convaincre la population ripuaire de le
choisir comme roi. Cette attitude barbaresque déconcerta l'entourage du roi des Francs.

Les successeurs de Clovis


Le partage du royaume
En 509, Clovis choisit Paris comme nouvelle capitale de son royaume, la ville est déjà un pôle
actif de la Gaule et fut le lieu de résidence de certains empereurs romains, on parle aussi de
l'influence de Sainte-Geneviève (patronne de la ville) sur Childéric puis Clovis. Se
considérant comme le chef de l'Église, Clovis s'employa à convertir la Gaule entière au
catholicisme. En 511, Clovis réunit les évêques au concile d'Orléans, l'Église mérovingienne
prend alors naissance. La même année, le grand roi meurt à Paris, il est inhumé auprès de
Sainte-Geneviève. La loi salique qui régissait les coutumes franques excluait les femmes à la
succession. Ainsi, comme le voulait la tradition, le royaume fut partagé entre les quatre fils de
Clovis. L'unité mérovingienne était perdue et les territoires ainsi formés allaient se défier
pendant des années.
Le premier partage

Par la suite pour mieux comprendre les querelles fratricides, il est conseillé d'avoir sous les
yeux la généalogie des Mérovingiens

Les fils de Clovis (Thierry Ier, Clodomir, Childebert Ier, Clotaire Ier)
Le premier des fils de Clovis, Thierry avait hérité des territoires les plus exposés aux
invasions extérieures, aussi son expérience devait lui permettre d'y faire face. Il n'était pas le
fils de Clotilde mais d'une princesse rhénane, il était donc plus distant avec ses trois demi-
frères Clodomir, Childebert et Clotaire qui agissaient ensemble. Ces derniers raniment les
hostilités avec les Burgondes pour venger leur mère Clotilde ( Clovis s'était résolu à signer la
paix avec les Burgondes), cet affrontement aboutit à la mort de Clodomir. Childebert et
Clotaire assassinent alors les fils de Clodomir afin de se partager le territoire de leur frère.
N'ayant eu aucun héritier mâle, Childebert cède à sa mort son royaume à Clotaire qui devient
ainsi maître de tout le royaume franc, Thierry et ses descendants étant tous morts. Un
deuxième partage a lieu en 561 entre ses quatre fils : Caribert Ier, Gontran, Sigebert Ier et
Chilpéric Ier.

Le second partage

Les fils de Clotaire (Caribert Ier, Gontran, Sigebert Ier, Chilpéric Ier)
Caribert meurt prématurément, ses trois frères se partagent son royaume. Une querelle
familiale va plonger les trois autres frères dans une guerre impitoyable. En compagnie de sa
maîtresse Frédégonde, Chilpéric étouffe sa propre femme pendant son sommeil. Seulement, la
femme de Chilpéric est la sœur de Brunehaut, l'épouse de Sigebert. Une lutte sans merci va
alors s'engager entre :

• Chilpéric et sa nouvelle femme Frédégonde (Neustrie)


• Sigebert et sa femme Brunehaut (Austrasie).

Au centre, Gontran prend d'abord le parti de Sigebert et ensemble ils parviennent à prendre
l'avantage. Mais après s'être brouillé avec ce dernier, Gontran s'allie maintenant avec
Chilpéric. Sigebert est assassiné par deux sbires de Frédégonde (femme de Chilpéric), son fils
Childebert II passe sous la tutelle de Gontran puis le quitte pour Chilpéric. Mais très vite, la
lutte reprend entre les deux derniers frêres : Chilpéric, toujours plus arrogant, et Gontran. La
mort de Chilpéric, assassiné par un inconnu ne calme pas les hostilités. Les deux reines
d'Austrasie et de Neustrie : Brunehaut et Frédégonde perpétuent la lutte des deux royaumes en
orchestrant assassinats et jeux d'alliances. Malgré cela, Childebert II et son oncle Gontran se
rapprochent de nouveau, ils scellent une alliance qui permet à Childebert de récupérer le
royaume de Gontran à la mort de ce dernier.

Assassinat
de
Sigebert
Ier

Assassinat de Sigebert (Bibliothèque nationale de France)

La réunification de Clotaire II
Désormais, il n'y a que deux royaumes :

• L'Austrasie et la Bourgogne (ancien territoire des Burgondes) gouvernés par


Childebert II. A la mort de ce dernier, le royaume est donc partagés entre ses fils :
Théodebert II (Austrasie) et Thierry II (Bourgogne).
• La Neustrie gouvernée par Frédégonde et son fils Clotaire II.

Très vite, Clotaire II prend le contrôle du royaume de Neustrie. Intelligent, il va profiter de la


querelle entre les deux frères Théodebert et Thierry. Il s'allie à Thierry et vainc Théodebert,
par la suite il rompt l'alliance avec Thierry et fait exécuter Brunehaut et les héritiers du
royaume d'Austrasie. Ainsi Clotaire II parvient à régner sur tout le royaume franc (comme
l'avait fait Clovis et Clotaire Ier). A sa mort, le royaume est de nouveau partagé entre ses deux
fils Dagobert Ier et Caribert II. L'aîné Dagobert parviendra à restaurer l'unité de la monarchie
franque.
Légendes mérovingienne
Légendes mérovingienne
L'origine des Mérovingiens est toujours un mystère, elle a alimenté des récits légendaires : On
trouve l'origine des Mérovingiens dans la Grèce Antique notamment en Arcadie, peuple
d'origine de Callisto (que Zeus changea en une constellation : la Grande Ourse), ses habitants
participèrent notamment à la guerre de Troie. Cette peuplade traversa alors le Rhin pour se
lier aux Francs. Les habitants d'Arcadie sont issus selon la légende de l'une des douze tribus
d'Israël. Les Mérovingiens avaient une marque de naissance (une croix rouge sur les
omoplates), dans la Bible on trouve ce passage qui y fait allusion : « ... le très haut le protège
tous les jours et demeure entre ses deux épaules ». Plus fantastique encore, certains avancent
que les Mérovingiens seraient les descendants de Jésus Christ et de Marie-Madeleine. Après
la crucifixion, Marie-Madeleine serait partie en Gaule et aurait enfanté là-bas. Ce mystère
essentiel aurait été protégé par des associations secrètes tel que les Templiers. L'origine des
Mérovingiens reste obscure, on raconte aussi que la femme de Clodion, enceinte de Mérovée
alla se baigner un jour dans l'océan, là elle fut séduite par « la bête de Neptune », un animal
marin qui la rendit enceinte une seconde fois. Ceci pourrait expliquer en partie les pouvoirs
surnaturels de quelques rois mérovingiens (guérisons, communication extra-sensorielle...). De
grands noms sont affiliés aux Mérovingiens, c'est le cas de Godefroi de Bouillon (héros de la
première croisade et roi de Jérusalem), ou les Habsbourg-Lorraine (dont est issue Marie-
Louise épouse de Napoléon Ier) ou encore Alain Poher (président de la République à la mort
de Pompidou). Godefroi de Bouillon serait selon la légende un proche descendant de
Lohengrin, fils de Perceval (qui découvrit le Graal selon la légende arthurienne).
Les visions de Childéric

Dès la première nuit de noces, la reine


Basine réveille Childéric et lui demande de
regarder dans la cour. Childéric y voit des
lions, des licornes et des léopards. Il vient se
recoucher mais Basine l'oblige à se relever
et à regarder par la fenêtre, le roi y voit alors
des ours et des loups. La troisième fois, il
voit des chiens et autres bêtes chétives.
Après avoir passé la nuit chastement, Basine
lui révèle la signification de son rêve : « Il
nous naîtra un lion ; ses fils courageux
auront pour symbole le léopard et la licorne.
D'eux naîtront des ours ou des loups pour le
courage et la voracité. Les derniers rois sont
des chiens, et la foule des petites bêtes
indique ceux qui vexeront le peuple, mal
défendu par ses rois ». Ces visions
témoignent de la dégénérescence prochaine
des Mérovingiens.
Visions de Childeric (Bibliothèque nationale de France)
Quiz - Clovis Ier
1) Où Clovis fût-il baptisé ?
Paris
Reims
Chartres
Tournai
2) Quel tribu contrôle Alaric ?
Wisigoths
Ostrogoths
Alamans
Burgondes
3) Quel est le nom du général romain qui siégeait à Soissons ?
Aetius
Aegidius
Anastase
Syagrius
4) Combien de fils Clovis a-t-il eut ?
2
3
4
5
5) Qui obtient le royaume de Paris à la mort de Clovis ?
Thierry Ier
Clodomir
Childebert Ier
Clotaire Ier
6) Lequel de ces rois n'a pas gouverné sur la totalité du royaume franc
Clovis
Chilpéric Ier
Clotaire Ier
Clotaire II
7) Quel reine affronta pendant de longues années Frédégonde
Clotilde
Brunehaut
Bertrude
Galswinthe
8) En quelle année fut découvert le tombeau de Childéric Ier ?
653
1153
1653
1953
9) A qui était destiné le vase de Soissons ?
Anastase
Clotilde
Sainte Geneviève
Saint Rémi
10) Lequel de ces personnages n'est pas considéré comme l'un des descendants des
Mérovingiens ?
Mazarin
Alain Poher
Godefroi de Bouillon
Marie-Louise de Habsbourg-Lorraine
11) Qui est l'épouse de Sigebert Ier
Galswinthe
Brunehaut
Frédégonde
Clotilde
12) Laquelle de ces villes n'est pas la capitale d'un des royaumes à la mort de Clovis
Soissons
Reims
Tours
Paris
13) De quel royaume est originaire Clotilde ?
Alamans
Wisigoths
Ostrogoths
Burgondes
14) Durant quel bataille Clovis a-t-il vaincu les Wisigoths ?
Vouillé
Tolbiac
Soissons
Carcassonne
15) Qui est le fils de Thierry Ier ?
Théodebald
Théodebert
Caribert
Gontran
16) Quel est le royaume de Chilpéric Ier et Frédégonde ?
Austrasie
Aquitaine
Neustrie
Bourgogne
17) Selon la légende, de quel région de la Grèce proviennent les Mérovingiens ?
Corinthe
Corcyre
Attique
Arcadie
18) Que se passa-t-il en 476 ?
Chute de l'Empire Romain
Baptême de Clovis
Mort de César
Bataille des Champs Catalauniques
19) Quel est le fils de Clovis dont la mère n'est pas Clotilde ?
Thierry Ier
Clodomir
Childebert Ier
Clotaire Ier
20) Quel évènement décide Clovis à se convertir au catholicisme ?
La mort de Childéric
Le mariage avec Clotilde
La réunification des tribus
La victoire de Tolbiac
L'avénement des Carolingiens(629 - 768)

Les Pipinnides
Introduction
Plusieurs années après la conquête de la Gaule par Clovis et ses descendants, le royaume
franc est en proie à des guerres fratricides. La richesse des Mérovingiens a cessé de croître à
cause de la cupidité des fonctionnaires en charge de la levée d'impôts ainsi que par l'absence
de victoires militaires qui priva le royaume de ses butins et tributs. Ainsi les derniers
Mérovingiens étaient contraints de dilapider leur fortune pour acheter la fidélité de leurs
hommes. Privé de ses richesses, le pouvoir royal s'affaiblit considérablement au profit d'une
riche famille aristocrate de la Meuse : Les Pipinnides ancêtre des Carolingiens.

Les rois fainéants


Le bon roi Dagobert
A la mort de son père, Clotaire II, en 629, Dagobert Ier devient roi des Francs, il doit
cependant céder l'Aquitaine à son frère Caribert II. Après l'assassinat de son frère, Dagobert
reconstitue une nouvelle fois l'unité des royaumes francs et choisit Paris comme capitale. Il
s'entoure alors d'habiles conseillers, des aristocrates tel que Saint Eloi ou Saint Ouen. Il
soumet les Gascons et impose sa suzeraineté à la Bretagne. Dagobert s'appuie pleinement sur
le clergé pour gouverner comme son ancêtre Clovis, il sait parfaitement que la religion est la
seule force cohérente du Royaume. C'est aussi un mécène, protecteur des arts, il décide par
exemple de combler de dons la basilique de Saint-Denis. Pendant les dix années de son règne,
Dagobert va jouir d'un pouvoir absolu, il entretient de bonnes relations avec Byzance et tente
de s'opposer à la nouvelle puissance slave. Cependant, très vite, il est menacé par des héritiers
non directs de Chilpéric, qui alliés aux Gascons s'emparent de la quasi-totalité du royaume
d'Aquitaine. A la mort de ce grand souverain, l'anarchie se réinstalle et la dynastie s'affaiblit
définitivement, plus aucun roi n'aura un tel prestige dans tout le royaume.
La chanson de
Dagobert

La célèbre
comptine
concernant
Dagobert date en
réalité de 1787, il
s'agissait alors de
ridiculiser la
royauté. Pour éviter
la censure, les
auteurs se sont
inspirés d'un roi
très ancien, ils y
ont d'ailleurs
rajouté le
personnage de
Saint Éloi pour se
rendre plus
crédible. Dagobert
avait en effet une
vie dissolue, et
avait plusieurs
épouses à la fois.
Saint-Eloi orfèvre, par Pertrus CHRISTUS

Les Pipinnides, une famille riche et puissante


Pendant la période mérovingienne, le roi est assisté d'un Maire du Palais, à l'origine simple
intendant du Palais, il va gagner une influence croissante pour devenir un chef de
l'administration, nommant les comtes, les ducs, les évêques, décidant également de la guerre
et de la paix. Maire du Palais d'Austrasie, Pépin de Landen, un riche aristocrate, avait
contribué à la réunification du royaume sous l'égide du roi de Neustrie : Clotaire II, à la mort
de ce dernier, il devient l'un des conseillers de Dagobert avant d'être écarté pour ses
prétentions. Il redevient Maire du Palais d'Austrasie en 639 car les fils de Dagobert sont trop
jeunes pour régner. Grimoald, le fils de Pépin de Landen, a les mêmes aspirations que son
père, après avoir obtenu le poste de Maire du Palais d'Austrasie, il parvient à gagner la
confiance du roi Sigebert III (fils de Dagobert). D'une audace extrême, Grimoald fait adopter
son propre fils par Sigebert et fait enfermer le prétendant au trône ( Dagobert II) dans un
couvent en Irlande. Mais cette usurpation démasquée aboutira finalement à l'assassinat de
Grimoald et de son fils. Mais dix ans plus tard, son neveu Pépin de Herstal parvient à
s'imposer en qualité de Maire du Palais d'Austrasie, en effet sa puissance militaire et politique
font de lui un homme incontournable. En 687, il s'empare à l'issue de la bataille de Tertry de
la Mairie du Palais de Neustrie. Cette famille que l'on appelle les Pippinides (qui allait
engendrer les Carolingiens) est désormais la maîtresse incontestée de tout le royaume du Nord
(Neustrie et Austrasie).

Les rois fainéants


Devant le pouvoir grandissant des Maires du Palais, les descendants de Dagobert sont
communément appelés "les rois fainéants" du fait de leur impuissance au trône (fait néant). En
effet, la plupart d'entre eux arrivent sur le trône à bas âge et ont une espérance de vie très
courte, aussi on sait peu de choses sur certains d'entre eux. A la mort de Dagobert, le royaume
fut partagé entre ses deux fils, Sigebert III (Austrasie) et Clovis II (Neustrie). Ces deux
royaumes étaient de nouveau en proie à un affrontement sans fin. Après avoir subi deux
échecs, Pépin de Herstal écrase la Neustrie à Tertry, mais alors que le pouvoir est entre ses
mains, Pépin n'ose s'emparer de la couronne. Il laisse donc le roi de Neustrie ( Thierry III)
qu'il vient de battre sur le trône de manière symbolique.

Partage du royaume à la mort de


Dagobert

Charles Martel
L'avènement de Charles Martel
Peu avant sa mort, afin d'éviter des querelles pour sa succession comme Maire du Palais,
Pépin de Herstal désigne son fils illégitime Charles Martel comme unique successeur. Mais à
la mort de Pépin, sa femme Pléctrude emprisonne le jeune Charles afin de faire élire ses deux
fils. Bientôt, la Neustrie se soulève et en 715, à la mort de Dagobert III, les Neustriens libèrent
un jeune clerc d'un monastère qui prétend être le fils de Childéric II, qu'ils font couronner. La
régence de Pléctrude a donc aboutit à la destruction de l'œuvre de Pépin de Herstal.
Cependant, le jeune Charles Martel parvient à s'échapper de sa prison, déterminé, il rassemble
derrière lui des partisans d'Austrasie. A la mort de Pléctrude, il parvient à s'emparer de la
mairie d'Austrasie. Ambitieux, il signe une trêve avec les Frisons (peuple germanique) et se
met en guerre contre les Neustriens et ses alliés d'Aquitaine. En 717, à Vincy il inflige une
cuisante défaite à ses ennemis et peut faire son entrée triomphale à Paris.
Charles Martel

Bibliothèque Nationale de France

La réunification du royaume
Charles Martel est désormais unique maire du palais des royaumes d'Austrasie, de Neustrie et
de Burgondie réunis. Il gouverne le royaume en lieu et place du mérovingien Thierry IV, un
enfant de 10 ans. Il décide alors de restaurer l'unité des Francs. Il s'appuie alors sur les
familles aristocratiques qui lui doivent sa fortune, il s'assure le soutien de l'Église en évinçant
les évêques qui lui sont hostiles et en se rapprochant de la papauté de Rome. A la tête d'une
puissante armée, il écrase les Frisons et les Saxons et soumet la Thuringe et la Bavière.
Charles Martel entame une politique de laïcisation des biens de l'Église, afin de disposer de
nouvelles terres pour des riches aristocrates, à la tête d'une puissante cavalerie. Ayant acheté
leur fidélité par des terres, Charles Martel contribue ainsi à la naissance du régime féodal.

La menace islamique
Moins d'un siècle après la mort de Mahomet, les guerriers musulmans avaient envahi
l'Espagne. Au début du VIIIe siècle, ils franchissent les Pyrénées et investissent le Languedoc,
la chrétienté n'a jamais été aussi menacée. Le duc d'Aquitaine, Eudes, était parvenu à freiner
la poussée islamique près de Toulouse en 721. Le duc Eudes s'était allié avec un gouverneur
berbère de Septimanie, qui de religion musulmane était en révolte contre ses coreligionnaires.
Seulement le gouverneur d'Espagne, Abd al-Rahman, avait canalisé la révolte et se lançait
maintenant à une expédition punitive contre les Aquitains. Devant un tel danger, Eudes fit
appel à son voisin Charles Martel qui contrôle tout le Nord de la Loire. Celui-ci fait avancer
son armée venue de toutes les parties du royaume franc. La bataille s'engage près de Poitiers
contre les troupes d'Abd al Rahman. Charles Martel équipe chacun de ses soldats d'une épée,
d'un haubert ainsi que d'une longue lance. Après sept jours durant lesquels les troupes se sont
livrées seulement quelques escarmouches, les Arabes se décident enfin à attaquer, mais ils se
heurtent inutilement aux défenses franques. Abd al-Rahman est tué au cours de la bataille, et
les Arabes s'enfuient au cours de la nuit. La légende raconte que ce sont 375 000 Arabes qui
auraient péri. Fort de ce succès, Charles Martel investi l'Aquitaine et chasse les chefs
musulmans qui y sont installés. Le chef franc apparaît alors comme le sauveur de la
chrétienté, et le maître incontesté du royaume franc.
La bataille
de Poitiers

Charles
tient son
nom de
Martel «
celui qui
frappe
comme un
marteau »
grâce à son
incroyable
énergie qui
lui a permis
d'écraser les
musulmans.

La bataille de Poitiers, par Charles STEUBEN

Pépin le Bref
La bataille pour la succession
Un peu avant sa mort survenue en 741, Charles Martel avait réparti le royaume entre ses deux
fils : Carloman et Pépin. Seulement le testament de Charles avait fait des mécontents
inassouvis, notamment Hunald, le fils du duc Eudes d'Aquitaine. Celui-ci pouvait trouver
l'appui du duc de Bavière et de Griffon, un des fils de Charles né d'une autre union. Pépin et
Carloman se font alors solidaires afin de lutter contre ces révoltes qui torpillent les quatre
coins du royaume. Les deux frères commencent par écraser les Aquitains, puis se repartissent
le duché. Puis Carloman soumet les Alémans, à l'Est après une répression sévère et cruelle.
Pépin quant à lui, habile diplomate, parvient à ménager la Bavière. Resté alors Griffon, le
demi-frère jaloux qui s'est laissé persuader par sa mère qu'il a obtenu de vastes territoires de la
part de Charles. Griffon est capturé et emprisonné à Neufchâteau, il parvient cependant à
s'évader grâce à la complicité de sa sœur. Réfugié en Aquitaine, il ranime la révolte aux cotés
du duc Hunald. Mais les troupes sont vaincues de nouveau en 745, Hunald se retire alors
d'Aquitaine. Mais Griffon parvient à rejoindre les Saxons qu'il pousse à la révolte. Pépin
prend alors les armes et défait la rébellion, et, pour calmer les ardeurs de son jeune demi-frère,
Pépin nomme Griffon duc du Mans en lui octroyant 12 comtés.

Pépin le Bref, roi des Francs


Très pieux, Carloman décide de se faire moine, Pépin qui se fait surnommer "le Bref", en
raison de sa petite taille, est alors seul pour régir l'État. Les deux frères n'ont pas manqué
auparavant d'élire Childéric III, qui n'est roi des Francs que symboliquement. Pépin le Bref
aspirait désormais à ceindre la couronne franque, il conclut dans ce but un accord avec le
pape, Zacharie : en échange de son aide contre les Lombards, qui menaçaient les États
contrôlés par l'Église, celle-ci autorisa à déposer le dernier roi mérovingien, Childéric III.
Ainsi en novembre 751, à Soissons, Childéric est arrêté, tondu (perdant ainsi son caractère
royal), et emprisonné. L'assemblée des Grands du royaume nomme alors Pépin, roi des
Francs. L'archevêque de Mayence, Boniface, donne l'onction au nouveau roi en marquant son
front avec de l'huile sainte (le Saint-Chrême). Cette cérémonie du sacre, avec son rite de
l'onction du roi par les huiles saintes, fut perpétuée en France jusqu'au XIXe siècle. Elle avait
un double sens : par elle, le pouvoir royal acquérait un pouvoir sacré, et l'Église se faisait
reconnaître comme la source du pouvoir.
Sacre de Pépin le
Bref

Par la suite, en
754, le pape
Etienne II
octroya, par un
second sacre, à
la royauté de
Pépin le
caractère
religieux
indispensable.
Une nouvelle
légitimité était
créée et était
inaugurée par
l'alliance de la
famille avec la
papauté.
Sacre de Pépin le Bref par le pape Etienne II à Saint-Denis le 28 juillet 754, par
François DUBOIS 1837 (Châteaux de Versailles et de Trianon)

Les Francs au secours de la papauté


Ayant reçu avec ses fils, le titre de « patrice des Romains », Pépin devait maintenant
s'acquitter de sa dette envers le pape. Les Lombards, peuple germanique représentaient
toujours une menace depuis le VIe siècle lorsqu'ils s'installèrent dans la plaine du Pô. Ils
envahirent les possessions byzantines en Italie, occupèrent Ravenne et osèrent même
s'attaquer à Rome. En 754, le pape fit même le déplacement pour venir demander son aide au
roi des Francs. Jamais un pape n'avait entreprit pareil voyage. Pépin lança alors deux
expéditions en Italie, qui mirent un arrêt à l'expansion lombarde. Les territoires libérés furent
remis directement à l'Église et non à leur propriétaire légitime, l'empereur de Byzance. Ce don
que l'on appela « la donation de Pépin » fut à la base de la formation des États de l'Église. Le
Saint-Siège catholique se détacha alors de Byzance et s'en remet désormais de sa sécurité aux
souverains francs. Cela aboutira en 1054 au schisme entre les chrétiens orthodoxes d'Orient et
les chrétiens catholiques d'Occident.

Un grand règne
Dès 756, après avoir tenté de mater les Saxons et les Bavarois, Pépin prépara la conquête
définitive de l'Aquitaine, toujours en révolte, mais ce n'est qu'en 768 qu'il parvient à ses fins.
Il expulse également les Arabes de Septimanie. Parallèlement, le roi des Francs jeta les bases
d'une administration solide dans son royaume et amorça la « renaissance carolingienne ». A
l'extérieur, plusieurs tentatives de rapprochement furent effectuées avec les Byzantins et les
Arabes, préparant la vision impériale de son royaume. A l'intérieur, sa plus grande tâche fut
d'effacer le clivage Neustrie-Austrasie qui divisait la Gaule depuis le VIe siècle. Lorsque
Pépin tomba malade en 768 et se fit conduire à Saint-Denis pour y mourir, il partagea son
royaume entre ses deux fils, Charles et Carloman. L'œuvre accompli par ce souverain était
immense, et sous l'impulsion de son fils Charles, les Pipinnides allaient désormais se faire
appeler les Carolingiens.

Pépin
le Bref
et
Berthe
au
Grand
Pied
Charlemagne, empereur d'Occident

(768 - 814)
Histoire

Charlemagne
Introduction
Avec la bénédiction du pape, les maires du palais ont usurpé le trône aux derniers
Mérovingiens, « les rois fainéants ». Pépin le Bref devenu roi des Francs en 751, parvient à
restaurer l'unité du royaume. Avec la reine Bertrade « Berthe au grand pied », la fille du
comte de Laon, un puissant seigneur de l'époque, Pépin a deux fils : Charles et Carloman.
Très vite l'aîné Charles s'impose et annonce son style, il se fera appelé « le Grand », et
deviendra l'un des plus grand souverain de France qui marqua toute la période du Haut Moyen
Âge.

De grandes conquêtes
La lutte des deux frères
A la mort du roi franc en 768, les premières difficultés apparaissent, les deux frères, Carloman
et Charles ne s'entendent guère, le partage était dès lors prometteur de discorde. Selon les
vœux de Pépin :

• Charles obtenait l'Austrasie et le Nord de la Neustrie, il se fit sacrer roi à Noyon.


• Carloman obtenait le Sud de la Neustrie, la Bourgogne et la Provence, il siégeait à
Soissons.

En 769, l'Aquitaine se révolte, Charles demande l'aide de son frère, qui lui refuse. Charles
prend alors la poursuite du duc d'Aquitaine et parvient à rétablir l'ordre en menaçant les
Gascons (Basques) qui lui livre finalement le duc rebelle. Mais en 770, c'est la Lombardie qui
apparaît plus menaçante, la veuve de Pépin, Bertrade organise un mariage entre Charles et
Désirée la fille du roi des Lombards. Mais les deux frères ne s'entendent toujours pas, et c'est
finalement la mort de Carloman en 771 qui va tout changer. Charles destitue l'héritage de ses
neveux qui s'enfuient avec Gerberge, la femme de Carloman vers la cour lombarde ( Gerberge
est la fille du roi lombard). Charles est désormais roi unique des Francs.
Charlemagne

Détail d'une mosaïque de la cathédrale de


Strasbourg

La conquête de la Lombardie
Les relations entre Didier, le roi des Lombards et le jeune roi franc se dégradèrent très vite,
Charles avait répudié Désirée qui était très laide. Le pape Adrien Ier se réjouissait de cette
opportunité, comme l'avait fait son prédécesseur, il demanda de l'aide auprès du roi franc.
Charles avait un grand intérêt à soumettre les Lombards, menace constante, d'autant que leur
roi Didier voulait réhabiliter les fils de Carloman, réfugiés à sa cour, sur le royaume franc.
Charles traversa alors les alpes avec son armée, défit les Lombards qui se réfugièrent dans la
ville de Pavie, capitale du royaume. En 774, la ville tombe et Charles prit le titre de « roi des
Francs et des Lombards », il fit alors son entrée triomphale dans la capitale coiffé de la
célèbre couronne de fer, dont le fermoir, selon la légende, a été forgé avec un clou de la Vraie
Croix du Christ.

Les Saxons, irréductible adversaire


Tout au long de son règne, les difficultés les plus conséquentes auxquelles Charles devra faire
face sont liés aux Saxons, un peuple païen aussi irréductible face à l'épée qu'à l'appel de
l'Évangile, qui vivait sur les territoires devenus aujourd'hui les Flandres et la Lorraine en plus
de leur terre d'origine la Saxe, l'actuelle Allemagne. Il fallut à Charlemagne (du latin Carolus
Magnus, Charles le Grand) près d'un quart de siècle pour les soumettre totalement. Les
Saxons qui avaient promis des concessions profitèrent de la campagne de Lombardie pour se
révolter de nouveau. Les Saxons sont de nouveau battus et promettent leur conversion au
christianisme, Charlemagne rentre avec son lot d'otages saxons. Mais les révoltes n'en
continuèrent pas moins.
Charlemagn
e en
campagne
contre les
Maures

(Bibliothèque nationale de Turin)

Contre les Maures


Depuis près d'un siècle, la chrétienté se voyait menacé par les Maures qui occupaient encore
toute l'Espagne. Pour le pape, comme tous les chrétiens, il revenait à Charlemagne de se
défendre contre ce danger permanent. Charlemagne n'avait pas l'intention de conquérir
l'Espagne, il avait conscience du décalage économique et culturel des deux mondes, de plus il
admirait la civilisation islamique, très avancée sur le commerce, l'artisanat, les sciences et les
arts. Toujours est-il que Charlemagne envahit la Catalogne et pris la ville de Pampelune. Puis
le gros de l'armée se replia pour rejoindre la Germanie, car les Saxons s'étaient de nouveau
rebellés. L'arrière-garde qui protégeait le repli s'engagea alors dans les vallées pyrénéennes.
Elle était commandée par Roland, comte de Bretagne, un valeureux guerrier très aimé de
Charlemagne. Le 15 août 778, comme elle se trouvait dans l'étroit passage du col de
Roncevaux, les Gascons (Basques) dévalèrent du haut des montagnes et massacrèrent la
troupe franque. « Ce cruel revers, nous dit un chroniqueur du temps effaça presque
entièrement dans le cœur du roi la joie des succès qu'il avait eus en Espagne. » Cet événement
devint le fait d'armes le plus connu du règne grâce à un grand poème écrit vers la fin du Xe
siècle, la Chanson de Roland. Charlemagne se contenta dès lors d'occuper des places fortes en
Catalogne.
La Chanson de Roland

Ganelon le beau-père de Roland, désireux de se venger de celui-


ci ainsi que des onze pairs qui lui vouent un véritable culte,
s'entretient avec Marsile, un roi sarrasin, et lui donne toute les
informations qui permettront d'exterminer l'arrière-garde de
Charlemagne. Roland est nommé à la tête de cette arrière-garde,
avec ses onze pairs dont Olivier, comte de Genève et meilleur
ami de Roland. Charlemagne a dès lors un sombre pressentiment.
Marsile a réuni 400 000 hommes, qui se rue sur les 20 000
Francs, enclavés dans le col de Roncevaux. Par fierté, Roland
refuse alors de sonner l'olifant (cor) pour rappeler Charlemagne.
La première vague de Sarrasins (100 000 hommes) est contrée et
exterminés. Mais au bout du cinquième assaut, les Francs ne sont
plus que 60. Roland se décide alors à sonner de l'olifant,
Charlemagne l'entend mais Ganelon lui dissuade d'en prendre
compte. La bataille continue, Roland tranche la main de Marsile
qui s'enfuit. Olivier mortellement blessé meurt dans les bras de
Roland. Roland reste seul avec son ami Turpin qui sont soudain
assaillis par 400 sarrasins qui les criblent de flèches avant de
s'enfuir. Mourant Roland tente en vain de briser son épée, la
vaillante Durandal, qui brise un roc. Roland se couche alors le
visage tourné vers l'Espagne et s'en remet à Dieu. Charlemagne
très affecté condamne le traître Ganelon, symbole de la félonie.
La fiancée de Roland, Aude, meurt de chagrin. Le poème fait une
grande part au merveilleux chrétien et à l'amour des preux
chevaliers pour la « douce France ».
Roland sonne du cor à Roncevaux (miniature médiévale)

Des difficultés en Germanie


Les intraitables saxons se sont de nouveau soulevés, ils ont ravagé le territoire franc jusqu'à la
Moselle. Charlemagne organise donc une sévère répression. Mais les révoltes n'en
continuèrent pas moins. En 782, un chef saxon, Widukind, réussit à décimer une armée
saxonne ralliée aux Francs et à se réfugier ensuite en territoire danois. Charlemagne avait la
ferme intention d'annexer la Saxe à sa couronne, mais pour se faire il devait faire plier les
Saxons. Chose qui devient moins aisée à mesure que les païens appliquaient les tactiques
militaires chrétiennes. Par représailles, Charles décida de se livrer à un épouvantable
massacre, près de Verdun, ce sont 4 500 Saxons qui furent exécutés, femmes et enfants ne
furent épargnés.

Les conquêtes en Europe centrale

• Le soulèvement des Saxons encouragea par ailleurs le duc de Bavière, Tassilon III qui,
en 779, refusa de reconnaître la souveraineté franque et fut sur le point de semer le
trouble dans toute la partie Sud de la Germanie occupée par les Francs. Mais
abandonné par ses sujets, Tassilon est finalement battu et emprisonné. La Bavière est
ainsi intégrée au royaume en 788. Charlemagne confisqua les biens immenses de
Tassilon, qui était considéré comme « l'homme le plus riche de l'Empire », plus que
Charlemagne lui-même qui de surcroît, n'a jamais eu de fortune personnelle et fut un
des premiers rois de l'époque médiévale à distinguer le Trésor Royal et ses biens
propres.
• Puis, après la Bavière, Charles affronta les Avars, une peuplade belliqueuse d'origine
mongole, comme les Huns, qui était établie en Pannonie (actuelle Hongrie). La guerre
contre les Avars fut sans pitié. Charlemagne répondit à la férocité de l'ennemi par une
férocité égale. L'affrontement se termina par la prise du camp royal avar par Pépin, le
fils de Charlemagne. Leurs terres furent placées sous le contrôle des Francs, puis
christianisés. Un traitement analogue fut réservé aux Slaves de Bohème. A la suite de
ces conquêtes, les territoires de Germanie, de Hongrie, de Bohème et d'une partie de la
Yougoslavie furent arrachés à l'emprise barbare.

Empereur
Le sacre de Charlemagne
Les relations entre Charlemagne et le pape Adrien Ier n'était pas si exemplaire, la Toscane et
toute l'Italie du Sud était promise au pape, mais le souverain franc préférait imposer sa propre
domination sur l'Italie. L'indépendance des États du pape était de plus en plus fictive. Malgré
tout, Charles est soucieux de sa construction politique, et il sait que le facteur religieux est
essentiel. Aussi, lorsque le nouveau pape Léon III est emprisonné en 799 et roué de coups part
des nobles qui l'accusent d'immoralité, Charlemagne intervient et assure le retour du pape à
Rome sous bonne escorte. En remerciement de service rendu, notamment contre les
Lombards, Charlemagne prend le titre inédit d'« Empereur des Romains ». La cérémonie se
déroule à la basilique Saint-Pierre de Rome le 25 décembre 800. Il se présente de façon
symbolique en continuateur lointain de l'empire romain d'Occident. C'est ainsi qu'il arbore
comme emblème l'aigle monosépale.

Le sacre de
Charlemagne

(Bibliothèque nationale de France)

La conquête de la Germanie
La tâche la plus ardue pour Charlemagne était de soumettre définitivement les Saxons afin de
rattacher la Germanie à l'Empire, et de la pacifier. En 785, le chef barbare, Widukind, tombe
malade, il fut alors obliger de céder son commandement. Dès lors les campagnes saxonnes ne
furent plus aussi dures ni aussi laborieuses pour les Francs qui finirent par gagner en 799.
Mais guérillas, répressions et déportations en masse reprirent et ne s'achevèrent qu'en 804.
cette année-là, Charlemagne eut recours aux grands moyens, en décidant que « tout Saxon
non baptisé et qui refusera de l'être serait puni de la peine de mort ». De plus, il déporta toute
la population saxonne résidant entre les deux fleuves de l'Elbe et de la Weser. A mesure
qu'elle était pacifiée, la Germanie fut divisée en marches (zones de défense) dirigées par des
chefs francs.

L'organisation de l'Empire
L'Empire carolingien
Au début du IXe siècle, l'État franc représentait déjà un vaste Empire et ses frontières étaient
fortement consolidées. Après le couronnement de Charlemagne, le centre de gravité de
l'Empire se déplaça vers l'Est, c'est-à-dire au détriment de la France et au bénéfice de
l'Allemagne. La capitale fut instaurée à Aachen, ville germanique connu sous le nom de «
Aix-la-Chapelle ». Charlemagne appréciait les eaux thermales de cette ville, qui lui
permettaient de soigner sa goutte et ses rhumatismes. L'annonce du couronnement ne pouvait
plaire à Constantinople qui vit en Charlemagne un usurpateur. L'Empire byzantin, devant la
démonstration de puissance affichée, s'orienta vers des transactions entre les deux empires, et
celles-ci se mirent en place. Pendant un moment, on pensa marier l'Empereur d'Occident, à
Irène, l'impératrice souveraine d'Orient, le plan ne pût aboutir. A cette époque, il y a trois
empires rivaux : l'empire carolingien, l'empire byzantin et l'empire arabe. Ce nouveau monde,
en raison de l'antagonisme religieux ne pouvait tirait profit des relations maritimes entre
l'Orient et l'Occident, contrairement au monde romain. D'où la restructuration de l'empire
franc qui s'orienta vers une activité économique située entre le Rhin et la Meuse, favorisant la
future Allemagne.

L'Empire de Charlemagne

Homme de guerre, homme de paix


Le portrait de Charlemagne nous est connu grâce à Éginhard, un historien contemporain.
Grand (il mesurait 1,92 m), fort et vigoureux, Charlemagne inspirait le respect de ses ennemis
qui, sur le champ de bataille, craignaient davantage sa force physique que son intelligence
tactique. D'une réelle bonté, il aimait faire des aumônes aux pauvres, pouvait éclater en
sanglots à l'annonce de la mort d'un ami, et vénérait sa mère Bertrade, qu'il consultait souvent.
Très attachée à sa famille, il ne séparait jamais de ses enfants, et fût marié à quatre reprises.
Charlemagne a une grande curiosité d'esprit, il s'instruit beaucoup pour pallier ses lacunes, il
donne ainsi une éducation complète à ses enfants. Mais il fut d'abord et avant tout un guerrier,
bien que son but affirmé fût la paix. Profondément religieux, convaincu que Dieu avait confié
au peuple franc et à son souverain la tâche de répandre et de défendre la foi chrétienne ainsi
que les coutumes qu'elle apportait avec elle, il passa sa vie à combattre les Barbares, du nord
au sud de l'Europe. Par le fer et le sang, il réussit à établir un empire chrétien sur la majeure
partie de l'Europe occidentale, au point que les historiens lui attribuèrent par la suite le titre de
Pater europae, père de l'Europe moderne.

Les Missi dominici


L'empereur ne pouvait pas toujours contrôler la manière dont ses ordres étaient appliqués.
Charlemagne confiait donc les charges sûres à des personnes qui étaient « les yeux, les
oreilles et la langue du souverain ». C'étaient les missi dominici (envoyés du maître).
Véritables inspecteurs généraux du royaume, ils avaient les pleins pouvoirs pour rappeler à
l'ordre comtes et marquis, surveiller le fonctionnement de la justice et de l'état des finances.
Les missi dominici étaient en général au nombre de deux : un religieux et un laïc. Ils avaient
pour mission de procéder à des enquêtes, de contrôler l'administration des provinces et de
signaler à l'empereur les abus qu'ils avaient pu constater.

Les missi
dominici se
présentant
devant
Charlemagn
e

Comtes et marquis
Suivant en cela l'usage des Francs, Charlemagne divisa l'empire en comtés (il y en a plus de
200 dans l'Empire) ; aux frontières, il créa des marches ou régions tampons destinés à
protéger les invasions extérieures. Comtés et marches, vivant en relative autonomie, furent
confiés aux plus fidèles de ses compagnons (comtes et marquis). L'empereur leur rendait
périodiquement visite ; il recevait alors les représentants de la population et les chefs du
clergé, contrôlait les comptes, décidait des travaux à entreprendre. Dans chaque comté se
tenaient régulièrement des assemblées provinciales ou plaids (du latin platicium, convention),
qui tenaient lieu de cours de justice. Les juges ou échevins, réglaient les affaires ordinaires.
Mais les jugements les plus importants étaient prononcés par le comte ou par le tribunal royal.

Plaids généraux et Champ de Mai


Les comtes et marquis se comportaient sur leur territoire comme de véritables petits
souverains. En réalité, ils constituaient les vassaux de l'empereur, qui était le propriétaire des
terres. Afin de centraliser son pouvoir, Charlemagne réunissait des plaids généraux (en
moyenne trois fois par an). Tous ceux qui comptaient dans l'Empire étaient conviés : marquis,
comtes, évêques, abbés (supérieurs de monastère)... Dans ces réunions, on débattait de tous
les problèmes de l'Empire, et on instaurait des lois. Les fonctionnaires de l'Empire les
transcrivaient ensuite de façon ordonnée en divisant le texte en chapitres. Revêtus de la
signature et du sceau de Charlemagne, ces chapitres, ou capitulaires étaient répandues dans
les provinces pour y être appliqués. Charlemagne tenta ainsi de remplacer les traditionnelles
décisions orales par des écrits. Le Champ de Mai (appliqué au mois de mai) est un plaid
général qui règle les questions militaires.
« L'Empereur à la
barbe fleurie »

En prêtant à
l'empereur une
barbe alors qu'il
était
vraisemblablement
imberbe, les
représentations du
souverain veulent
souligner son
autorité virile.
Quand au
qualificatif de
fleurie, il s'agit d'une
mauvaise traduction
de « flori », qui
signifie blanc en
vieux français.

La société carolingienne
Une société belliciste
Dans l'Empire carolingien, la guerre avait une importance primordiale : elle était tenue pour
une activité normale, presque une nécessité. Durant le règne de Charlemagne, les années où il
n'y eut pas de campagne militaire peuvent même se compter sur les doigts d'une seule main.
La période des combats était située entre mai et octobre. Les buts poursuivis étaient divers :
remettre à sa place un comte récalcitrant ou traître, amasser un butin par des raids au delà des
frontières et, bien sûr, conquérir des territoires et christianiser les infidèles. De toutes les
régions de l'Empire arrivaient des armées entières avec armes et bagages, conduites par un
comte ou marquis. L'empereur lui-même passait en revue l'armée franque. Le Champ de Mai
était ainsi non seulement une assemblée de chefs, où se décidaient les opérations militaires à
venir, ami aussi une occasion de réaffirmer avec éclat l'unité de l'Empire autour du souverain
et de son armée.

La société carolingienne

• Les serfs, moteur économique : L'économie au temps des carolingiens était fondée sur
le travail des serfs. Ceux-ci n'étaient pas à proprement parler des esclaves, mais des
personnes soumises à un maître, qui devaient accomplir la tâche qu'on leur ordonnait
et qui restaient attachées à un domaine. Les villae étaient l'objet d'un attention
particulière : domaine agricole vivant en autarcie, c'est-à-dire produisant tout ce qui
est nécessaire à la vie de ses habitants, la villa formait l'unité économique de base de
l'Empire.
• Le clergé, ciment des peuples : Charlemagne s'appuya tout au long de son règne, sur
l'Église. Le christianisme formait le ciment unissant les peuples de l'Empire, qui
n'avaient en commun ni la langue ni les mœurs. Même s'il surveilla toujours de très
près les affaires religieuses, l'empereur donna une place de premier rang aux
dignitaires de l'Église.

Charlemagne
et les
évêques

(Bibliothèque nationale de France)

La Renaissance carolingienne

• La création d'écoles : Afin de former des administrateurs compétents, Charlemagne


favorisa un renouveau des études, il créa entre autre l'École du palais, que dirigera
Alcuin. Après de nombreux conciles, Charlemagne réussit à imposer des réformes
religieuses (réforme liturgique, discipline dans les abbayes, écriture). Charlemagne
s'indignait du style grossier de certains ecclésiastiques, aussi le clergé devait être
instruit, d'où la création d'écoles près d'églises et de monastères. L'Église passa ainsi
vers l'effort d'éducation du peuple. Dans les monastères, on recopie les Saintes
Écritures, de façon élégante (nouvelle écriture plus ronde : écriture caroline) et dans
un latin correct.
• Charlemagne, restaurateur des arts et des lettres : Sous l'influence de l'art byzantin, les
églises seront décorées avec des mosaïques et des fresques. Les reliures des Bibles
s'ornent de bas-reliefs, on peint aussi des miniatures ou de délicates enluminures.
Reliques et manuscrits sont ainsi décorés par de grands orfèvres. Les arts et les lettres
subissaient une brillante renaissance, la langue latine était restaurée, des personnes
brillantes comme Alcuin ou Angilbert relancèrent le goût de la culture antique.
L'architecture subit également une véritable renaissance artistique, inspirée de l'art
romain. Les constructions religieuses connaissent un véritable essor, le palais d'Aix
témoigne également du renouveau de l'architecture civile.
Le monogramme de
Charlemagne

Éginhard apprit à
Charlemagne à
signer de cette
façon : une croix
comprenant les
lettres de Karolus,
les consonnes sont
aux extrémités, les
voyelles situées
dans le losange
centrale.

La mort du souverain
La mort du souverain
Après la soumission des Saxons en 804, Charlemagne entreprend ses dernières campagnes
militaires : contre les Arabes d'Espagne, les Avars ou les Bretons, mais aussi les Slaves, les
Sarrasins, les Grecs et les Danois. En 812, l'empereur romain d'Orient Michel Ier reconnaît
Charlemagne comme empereur romain d'Occident. Charles pense alors à sa succession :

• De tous ses fils, l'un Pépin le Bossu avait tenté de le renverser, il fut enfermé dans un
monastère.
• Charles le Jeune, qui avait reçu l'onction du pape lors du sacre est destiné à la
succession mais il meurt en 811.
• Le second fils de Charlemagne, Pépin était roi d'Italie, il se distingua en capturant le
trésor des Avars, « le Ring », il meurt en 810.
• C'est alors Louis (le Pieux ou le Débonnaire) qui succédera à Charlemagne, il est sacré
en 813, du vivant de son père.

Charles était fort et robuste, il ne fut malade que durant les quatre dernières années de sa vie,
il se mit à boiter et à souffrir de la fièvre. En 814, il meurt de pleurésie, il est inhumé à la
basilique d'Aix-la-Chapelle. L'unité de l'Empire qui était déjà difficile à maintenir à cause de
l'immensité d'un territoire s'étendant de la Baltique à l'Adriatique et à cause du système des
comtés et des marches, source de morcellement, put être sauvegardée aussi longtemps que
Charlemagne fut en vie, mais ne devait guère survivre à la disparition du « ciment » que
représentait son autorité et son prestige.

La Francie Carolingienne
Introduction
Peu après la mort de Charlemagne, trois événements majeurs marquent l'Empire carolingien :
• Des troubles de successions entraînent la dislocation de l'Empire, désormais la partie
germanique est définitivement séparée de la partie romane. Ce sont les premiers
visages de la France et de l'Allemagne qui apparaissent.
• L'Europe est en proie à de nouvelles invasions (Sarrasins, Hongrois, Normands ...).
Les Vikings constituent cependant la menace la plus importante. Leur intrusion dans la
« Francie » va bouleverser à jamais le pays.
• Les Robertiens (de Robert le Fort, ancêtre des Capétiens) vont très vite s'imposer face
aux Carolingiens régnants. Pendant un siècle, les deux familles vont se disputer la
couronne avant qu'elle ne soit définitivement attribuée aux Robertiens.

La division de l'Empire
La mort de l'Empereur
C'est en tant que dernier fils survivant de Charlemagne que Louis Ier le Pieux (ou le
Débonnaire) obtient le titre d'empereur d'Occident en 814. L'empire ne sera donc pas découpé,
comme il était coutume de le faire à l'époque. Pendant quelques temps encore, la machine
crée par Charlemagne va continuer de fonctionner. Mais Louis Ier qui se fait appelé « le
Débonnaire » en raison de sa faiblesse de caractère n'est pas l'homme apte à conserver l'unité.
Jusqu'à sa mort, il va lutter contre ses trois premiers fils ( Pépin, Louis, Lothaire), jaloux de
leur demi-frère, Charles, fils de sa seconde femme Judith de Bavière. Par ailleurs, le pape
Etienne IV gagne de l'indépendance et le lien entre Rome et l'Empire semble rompu. Après la
naissance de Charles, un nouveau partage est décidé, celui-ci ne plaît pas aux trois frères qui
déposent leur père en 833. Pépin et Louis, regrettant d'avoir donné tous les pouvoirs à
Lothaire (l'aîné qui avait obtenu la plus grosse part du pouvoir), restaurent leur père déchu en
835. En 840, Louis le Pieux meurt, laissant derrière lui une succession qui s'annonce délicate.

Les trois frères


Pépin d'Aquitaine, second fils de l'empereur mourut en 838. A la mort de Louis le
Débonnaire, l'Empire est donc partagé entre ses trois autre fils : Louis le Germanique,
Lothaire et leur jeune demi-frère Charles le Chauve. Seulement, Lothaire décide de
s'approprier l'intégralité du territoire. Louis s'allie donc avec Charles contre leur aîné qui est
battu en 841 (bataille de Fontenoy en Puisaye). Les deux frères se prêtent serment à
Strasbourg (842), puis gagnent Aix-la-Chapelle, où Lothaire est contraint d'accepter un
partage équitable. En 843, le partage est finalement décidé à Verdun :

• Lothaire reçoit la Francie médiane, de la mer du Nord à l'Italie, il garde le titre


d'empereur.
• Louis le Germanique reçoit la Francie orientale ou Germanie (la future Allemagne).
• Charles le Chauve reçoit la Francie occidentale (la future France).

Les frères tentent alors de mener une politique plus fraternelle, en tentant de se consulter.
Parallèlement à ses querelles fratricides, les premières escarmouches normandes apparaissent
sur les côtes de la Manche et de l'Atlantique.
Le partage de Verdun

Les Normands
Les premières incursions normandes
En 793, les Vikings (guerriers de la Mer) font leur première incursion sur une île anglaise,
pillant et saccageant un monastère. Leur réputation arrive même jusqu'à la cour de
Charlemagne suscitant l'épouvante. Il faut dire qu'ils ne font pas les choses à moitié, arrivant
sur leur proie par surprise, les mutilant de toute part, et incendiant tout sur leur passage.
Réputés invincibles, ces guerriers barbares appartiennent à une civilisation très ancienne. Ils
étaient originaires des pays scandinaves (Danemark, Finlande, Norvège). Leurs villages
étaient situés au fond des fjords, là où de maigres terres permettaient la culture et l'élevage.
C'est probablement la surpopulation ainsi que l'incapacité de ces terres peu fertiles à nourrir
tous leurs habitants qui poussèrent les clans à chercher fortune ailleurs. Plus tard lorsqu'ils se
rendirent compte que les frontières de l'empire carolingien n'étaient plus protégées, c'est la
population de régions entières qui participa aux expéditions militaires, modifiant ainsi le
destin de plusieurs pays. Leur expansion se fit dans deux directions :

• Vers l'est et les plaines de Russie (Varègues originaires de Suède).


• Vers l'ouest, où ils conquirent les îles du nord, de l'Angleterre au Groenland (conquête
d'Erik le rouge), puis descendirent vers le sud, atteignant la Sicile ( Robert Guiscard)
et Constantinople ! Leif Erikson, fils d'Erik le Rouge gagna même l'Amérique du
Nord.
Le drakkar, terreur des
mers

Navigateurs
infatigables, dont la
technique maritime
était supérieure à tous
les autres peuples de
l'époque, les Normands
utilisaient le knorr. Bas
sur l'eau, fuselé, souple,
il était surnommé « le
destrier des ondes »,
mais ceux qui le voyait
apparaître à l'horizon le
nommait le drakkar,
c'est à dire dragon, car
sa proue était souvent
surmontée par une tête
de cet animal
fantastique.

La société des Vikings


Les Vikings vivaient dans de petits villages, les maisons et les fermes étaient généralement en
bois, avec un toit recouvert de paille. La société viking était divisée en groupes. Un chef, ou
roi, commandait le clan en temps de guerre. Mais, ordinairement, les décisions importantes
étaient prises par les thing, ou assemblées d'hommes libres. A partir de 930 furent convoqués
des assemblées de toute la nation viking, appelés al thing. Les hommes libres se divisaient en
karl, riches agriculteurs qui formaient le gros de l'armée, et en jarl, agriculteurs modestes qui
devaient travailler eux-mêmes leurs champs. Au bas de la société, les esclaves, ou thrall,
prisonniers ou Vikings réduits en servitude parce qu'ils n'avaient pas pu s'acquitter de leurs
dettes. Les Vikings partageaient la religion des Germains, la religion nordique. Après la
conversion plus ou moins forcée de toute la Germanie par Charlemagne, ils restent les seuls
adorateurs de Thor et d'Odin. Mais peu à peu, le monde viking entier se convertit. En l'an
1000, l'Islande devient catholique par choix politique.
La mythologie scandinave

La mythologie nordique est


constituée des légendes
provenant de la religion
pratiquée autrefois dans
une grande partie de
l'Europe du Nord. Religion
panthéiste accordant une
large place à la Nature, à la
femme (plusieurs déesses
importantes) et à la
divination (art associé aux
runes), elle place la Vie au
centre de son système, une
vie conçue comme
affrontement des forces de
création et de dissolution,
d'où résulte toute fécondité.
Au delà des Dieux, la
mythologie évoque aussi la
présence de créatures
célèbres (trolls, elfes,
géants, dragons...).

L'avenement des Robertiens


Le règne de Charles le Chauve
Au moment où Charles le Chauve reçoit la Francie occidentale, certaines régions refusent sa
tutelle. C'est le cas de la Bretagne où Nominoë parviendra à garder son royaume en battant les
troupes royales (846). Les Aquitains, quant à eux, proclament roi Pépin II, fils de leur
précédent roi Pépin Ier (également demi-frère de Charles). Mais en 841, les Normands font
leur première incursion sur les côtes françaises en saccageant Rouen, pillant tout sur leur
passage. Très vite le royaume est investi, et les Aquitains sont contraints de traiter avec
Charles le Chauve, puis finissent par lui proposer le royaume d'Aquitaine. Pépin II, vexé,
s'alliera avec les Vikings pour saccager son ancien royaume. Chaque année, les Vikings
reviennent, encore plus violents, Charles ne parvient pas à trouver l'appui des autres Nations
du traité de Verdun, il essaye en vain de restaurer la situation mais au prix de lourdes
concessions. Dès 856, les Vikings font leur première grande incursion, cette vague de
déferlements ne cessera qu'en 861. Compte tenu de la gravité de la situation, Charles est
contraint de confier des responsabilités militaires à de hauts dirigeants.

Robert le Fort, père des Robertiens


Au même moment où règne Charles le Chauve, apparaît un personnage important de l'Histoire
de France, c'est Robert le Fort. Appartenant à la même famille que la première épouse de
Louis le Pieux, Robert devient missi dominici en 853. Deux ans plus tard, il se soulève contre
son roi, puis devient duc de la région entre la Seine et la Loire. Il s'illustre alors contre les
Bretons, mais surtout il arrête par deux fois (864 et 865) les Normands. Robert devient alors
une des personnes les plus influentes du royaume. En 856, la situation devient plus grave,
Charles le Chauve lui confie alors un commandement important à l'Ouest. Robert fortifie les
villes et les fleuves et affronte vigoureusement les Normands. La même année, il meurt au
cours du combat de Brissarthe près d'Angers. Pendant ce temps, Charles tente de mater les
conflits avec l'aristocratie française. A la mort de l'empereur Lothaire, Louis le Germanique
(Allemagne) et Charles le Chauve (France) décident de se partager le royaume de leur défunt
frère. En 875, les amitiés de Charles avec la papauté lui sont favorables, il parvient à gagner le
titre d'empereur. Mais, il meurt en 877, laissant derrière lui une situation difficile dans le
royaume.

Les Vikings débarquant sur


les côtes françaises

(Bibliothèque Nationale de France)

Le renforcement des Robertiens


Après la mort de Robert le Fort, son demi-frère Hugues l'Abbé est chargé de la tutelle de ses
deux fils : les jeunes Eudes et Robert. Hugues s'acquitte fort bien de son rôle en renforçant
l'héritage de Robert le Fort. Il fortifie les places fortes de la région du Centre (Orléans,
Blois...), mais surtout il gagne de l'influence à la Cour. Ainsi, à la mort de Charles le Chauve,
le fils du roi, Louis II le Bègue est soumis à la grande influence des Grands du royaume qui
l'élisent roi aux prix de fortes concessions, Louis est même contraint d'accepter la tutelle d'
Hugues l'Abbé qui agit comme le faisait les maires du palais sous les Mérovingiens. Louis le
Bègue est faible et malade, sous son règne, le pouvoir royal perd son autorité. Il meurt
prématurément en 879. Dès lors, ce sont les partis des Grands qui tiennent la couronne entre
leurs mains, néanmoins les partisans des rois légitimes l'emportent et la couronne est alors
octroyée à Louis III et Carloman, les deux fils du roi. Avec les différends que connaît le
royaume, le pays est alors depuis plusieurs années à la merci des Normands. Ces derniers ont
depuis changés de méthode, au lieu de se contenter de remonter les fleuves, ils s'engouffrent
de plus en plus à l'intérieur des terres. Les deux jeunes rois se montrent plus actifs que leur
père, et c'est l'aîné Louis qui est chargé de lutter contre les Normands. Après plusieurs succès,
Louis tombe malade et meurt, son frère Carloman, âgé de 16 ans tente de reprendre l'œuvre de
son frère. Mais les Grands décident alors de payer un important tribut aux Vikings en échange
de leur retrait. Carloman meurt en 884 au cours d'un accident de chasse.
Les Robertiens

Les Robertiens sur le trône


Devant l'anarchie intérieure et la menace normande, les Grands écartent le dernier fils de
Louis le Bègue (âgé de 5 ans), et confient la couronne à Charles le Gros, fils de Louis le
Germanique, qui, possédant déjà l'héritage de son père, devient alors empereur d'Occident.
L'unité de l'empire est alors ressoudée, mais Charles le Gros est loin d'avoir l'envergure de
Charlemagne. Atteint d'épilepsie, le souverain s'avère médiocre et incapable d'assumer un tel
titre. Eudes, le fils de Robert le Fort, est alors nommé comte de Paris. Face à l'immobilité de
l'empereur, les Normands commencent l'assaut de Paris durant l'hiver 885-886. Mais la ville
ne cède pas, le comte Eudes se couvre de gloire en défendant courageusement son territoire.
C'est un succès décisif qui vaut à Eudes l'appui des Grands du royaume. Ainsi en 888, Charles
le Gros est renversé, et Eudes devient roi de France. Ancêtre des Capétiens, il porte la
couronne 108 ans avant Hugues Capet. Ceci est l'aboutissement de la prise du pouvoir par la
Noblesse. La monarchie héréditaire franque est devenue élective. Le roi qui nommait les ducs
et comtes (fonctionnaires du royaume) est maintenant choisi par eux et parmi eux. Eudes
continue l'œuvre de son père Robert le Fort, et bat les Normands à Montfaucon. La seconde
vague d'invasion normande qui commença en 879 paraît s'achever en 892. Pour éviter les
dissolutions intérieures, Eudes fait du carolingien Charles III, son successeur à la couronne.
Eudes,
défendant
Paris des
Normands

La sédentarisation des Vikings


A la mort de Eudes en 898, c'est Charles III le Simple, qui comme convenu monte le trône.
Mais le pouvoir royal a bien changé. Pour répondre aux invasions normandes, mais aussi
hongroises et sarrasines, le roi reconnaît et partage son pouvoir avec les comtes et marquis du
royaume. Le champ d'action du roi se trouve alors rétréci. Mais le nouveau système de
pouvoir transféré aux princes porte ses fruits. Ainsi, l'action contre les Normands est plus
locale et précise, et cela finit par payer. Rollon, l'un des chefs normand, échoue devant
Chartres grâce à l'alliance de l'aristocratie du Nord de la France. Des deux partis, on est alors
prêt à un accord commun. En 911, par le traité de Saint-Clair-sur-Epte, passé entre Rollon et
Charles III, la Normandie (terre des Normands) devient un duché donné aux Normands
(hommes du Nord), contre la promesse de cesser les raids sur la Seine, de se faire baptiser,
d'épouser Gisèle de France, la première fille de Charles le Simple. La sédentarisation des
Vikings met ainsi fin aux invasions normandes, et leur chef Rollon se trouve alors vassal du
roi de France.
Le baptême de Rollon

En échange du territoire de la
Normandie, Rollon doit se convertir. Il
se fait baptiser sous le nom de Robert à
Rouen.
(Bibliothèque Nationale de France)

La cohabitation : Robertiens et Carolingiens


Charles le Simple face à la révolte des Robertiens
La fin du problème normand amène alors les seigneurs du royaume à se soulever de nouveau
contre le roi. Robert, frère d' Eudes avait toujours soutenu son frère pendant son règne. A la
mort de Eudes, Robert reçoit l'héritage de la famille (marche de Neustrie, comtés de Paris,
Blois, Orléans...). Ce puissant marquis a la charge de défendre l'Ouest contre les Bretons et les
Normands. Il continue cet ouvrage sous Charles le Simple, en défendant notamment la ville
de Chartres face à Rollon. En 911, lorsque la paix est faite avec les Normands, Robert s'allie
avec les autres dynasties féodales, il trouve l'appui de son beau-fils Raoul de Bourgogne.
Pendant ce temps, Charles s'oppose aux familles de l'Est pour réclamer la Lotharingie qu'il
finit par obtenir. En 920, au cours d'une assemblée, Charles se brouille violemment avec
Robert. En 922, les Robertiens fomentent alors une révolte contre le roi et parviennent à élire
Robert, roi des Francs. Charles le Simple est contraint à la fuite, mais il possède suffisamment
de partisans en Lotharingie pour contre-attaquer. Au cours de la bataille de Soissons, Robert
est tué au cours de la bataille, mais son fils Hugues le Grand, galvanise ses soldats en
montrant le cadavre de son père, et finalement la bataille sera perdue par l'héritier carolingien.
Les grands feudataires refusent encore de le reconnaître roi et lui préfère Raoul de Bourgogne
(beau fils de Robert). Charles devenu un roi sans couronne trouve refuge chez son vassal,
Herbert II de Vermandois qui le retient prisonnier ( Robert Ier est son beau-frère), et l'enferme
dans une tour du château de Péronne où il mourra en 929 après 6 années de captivité.

Le règne de Raoul de Bourgogne


L'avènement de Raoul de Bourgogne entraîne la perte de la Lotharingie au profit du roi de
Germanie Henri l'Oiseleur. Raoul se consacre alors à la lutte contre plusieurs troupes
normandes non implémentées en Normandie. Il est contraint d'acheter leur retrait. La vie
politique en Occident voit la rivalité entre Raoul et Herbert de Vermandois qui veut agrandir
son comté. Bientôt Herbert emploie des moyens de forces : rapprochement avec la Germanie,
appel aux Normands de Rollon, chantage à la restauration de Charles le Simple ( Herbert
détient Charles prisonnier dans son fief). Hugues le Grand, fils de Robert fait alors alliance
avec Raoul pour combattre les prétentions d' Herbert. L'intervention du roi saxon Henri Ier
sauve le rebelle. En 935, les deux partis signent la paix. Raoul se concentre alors pour étendre
son influence face aux grands seigneurs. Mais son action est vaine, il ne peut empêcher la
divisions du royaume en grandes principautés, résultat de la féodalité et du pouvoir croissant
de ses vassaux. Le roi ne possédant pas de ressources fiscales et donc d'armée était contraint
de faire alliance avec les dynasties dominantes du royaume. Raoul meurt à Auxerre en 936.
Assassinat de Guillaume
Longue-Épée

Fils de Rollon, Guillaume


Longue-Epée prête
serment au nouveau roi de
France, Raoul de
Bourgogne. Il est l'un des
fondateurs du duché de
Normandie. Il se marie
avec la fille d' Herbert,
comte de Vermandois.
Guillaume surnommé
"Longue Épée" est
énergique est influent, il fit
plusieurs alliances avec
Hugues le Grand. Attiré
dans un guet-apens, il est
assassiné par les Flamands
à Picquigny dans la
Somme.
(Bibliothèque Nationale de France)
La restauration carolingienne
A la mort de Raoul, Hugues le Grand, fils de Robert de France apparaît comme le personnage
le plus puissant du royaume. Il possède de nombreux comtés et plusieurs abbayes. Il ne
souhaite pas gouverner lui-même car il ne veut pas abandonner ses comtés. Il décide alors de
donner la couronne au fils de Charles le Simple : Louis IV d'Outremer, surnommé ainsi car il
a été élevé à la cour de Wessex en Angleterre. Agé de 16ans, Louis débarque à Boulogne et
ne constitue qu'un instrument aux mains de Hugues. Ce dernier utilise la légitimité
carolingienne pour mettre à bas son concurrent Herbert de Vermandois. Louis s'émancipe très
vite et devient bientôt le principal rival de Hugues. Après plusieurs esquives diplomatiques, le
roi parvient à réunir une armée pour s'attaquer au duc Hugues. Seulement, il ne possède que la
région de Laon, il n'a aucune autorité sur toutes les régions au sud de la Loire. C'est Hugues le
Grand qui règne sur la Francia et la Bourgogne. Le roi est donc capturé par les Normands et
livré à Hugues. Libéré un an plus tard, après avoir cédé la place forte de Laon, Louis IV fait
alliance à son beau-frère Otton Ier (empereur de Germanie) qui n'accepte pas l'abaissement du
pouvoir royal. L'armée ottonienne pénètre en France mais est incapable de prendre une place
forte telle que Laon ou Paris. Hugues contrôle en effet la majeure partie du territoire du
royaume. Mais le souverain parvient à le soumettre, qui est bientôt contraint de s'incliner sous
peine d'exclusion de l'Église. Finalement, Louis meurt peu après d'une chute de cheval en 954.
Et sous le consentement de Hugues le Grand, le fils de Louis, Lothaire, monte sur le trône. La
mort de Hugues en 956 va favoriser le début de son règne. Mais la diplomatie prudente de
l'héritier des Robertiens, qui lui permit d'agrandir considérablement son domaine, sous peine
de refuser à deux reprises le trône, va permettre l'avènement de son fils : Hugues Capet. La
dynastie capétienne va ainsi rester sur le trône près de 900 ans.

Les premiers Capétiens

(987 - 1137)
Histoire

Les premiers Capétiens


Introduction
Après le traité de Verdun, les Carolingiens régnèrent sur la Francie occidentale, mais le
pouvoir réel leur échappait de plus en plus, à mesure que de puissants seigneurs renforçaient
le leur sur leurs fiefs. Les Robertiens, comtes de Paris disputèrent alors la couronne aux
Carolingiens. Bientôt cette puissante famille allait obtenir le pouvoir royal et l'asseoir pendant
près de 800 ans. Cette période est également marquée par l'essor du duché de Normandie,
terre allouée aux envahisseurs Vikings. Les ducs de Normandie, de plus en plus puissants
allaient conquérir la Grande Bretagne, provoquant un conflit quasi-permanent entre la France
et l'Angleterre.
La fin d'une dynastie
Les derniers Carolingiens
En France, les multiples invasions des Scandinaves et des Hongrois avaient considérablement
affaibli le pays. La dévastation des régions les conduisit au repli sur soi-même. Le féodalisme
provoqua une hiérarchie à plusieurs niveaux. Un seigneur assurait la sécurité de ses terres, ces
terres étant divisées en fiefs attribuées à un vassal. Le féodalisme aboutit ainsi à une
localisation importante si bien qu'il n'y avait plus vraiment de Nation, mais plutôt un magma
de régions dirigées par des ducs ou comtes, vassaux du roi de France. Ces ducs avaient fait de
leurs fiefs un héritage familial. En 954, Lothaire, fils de Louis IV devient roi de France. La
mort en 956 de Hugues le Grand, le puissant comte de Paris, va favoriser le début de son
règne. Mais le jeune Hugues Capet, fils de Hugues le Grand tient à garder ses avantages
familiaux. Pourtant le conflit qui l'oppose à Lothaire paraît tourné en faveur du roi
Carolingien. Mais Lothaire va s'embourber dans un conflit avec Otton, l'empereur de
Germanie, à la fin de son règne le roi est très affaibli. Son fils, Louis V était déjà associé au
trône aux cotés de son père. A la mort de Lothaire, Louis est donc déjà roi, mais sa situation
est des plus précaires. Il doit faire face au duc des Francs, Hugues Capet, qui a l'appui de
l'archevêque de Reims, Adalbéron. Le soutien de l'Eglise de Reims est important car c'est elle
qui assure la légitimité du roi de France, la même qui a baptisé Clovis. Mais en 987, Louis V
meurt subitement dans un accident de chasse, il n'a alors aucun héritier direct.
Hugues Capet

Ce n'est qu'au XIIe siècle, que Hugues fut


surnommé Capet, sans doute parce que, comme
ses ancêtres, il était abbé de Tours, où était
conservé un fragment du manteau (capa) de
Saint Martin. A cette époque on prit conscience
du tournant politique de 987 avec l'émergence
d'une nouvelle dynastie qui se perpétua jusqu'en
1792, et fut restaurée de 1815 à 1848. En 1792,
lorsque Louis XVI fut jugé, il se fit appelé sous
le sobriquet de Louis Capet, en référence au
nom de son ancêtre.

L'élection de Hugues Capet


A la mort de Louis V, seul son oncle Charles, duc de Lorraine, réclamait le droit à la couronne
en tant que descendant des Carolingiens. Mais Hugues Capet, alors comte de Paris, de Senlis,
d'Orléans et de Dreux, joua alors de ses relations avec le puissant prélat Adalbéron. Il profita
de cette circonstance pour se faire élire roi par une assemblée de seigneurs qui se laissèrent
convaincre par l'archevêque par ces mots : « Nous n'ignorons pas, que Charles de Lorraine a
des partisans : ils prétendent que le trône lui appartient par droit de naissance. Si l'on pose
la question, nous répondrons que le trône ne s'acquiert pas par droit héréditaire. On ne doit y
élever que celui qui se distingue non seulement par la noblesse corporelle, mais aussi par la
sagesse qui trouve son appui naturel dans sa loyauté... » Ainsi, le 3 juillet 987, Hugues Capet
est sacré roi en la cathédrale de Noyon par l'archevêque Adalbéron. Le jour de Noël de la
même année, Hugues associe son fils Robert au gouvernement et le fait sacrer de son vivant.
Conscient de la fragilité de son ascension, il s'assurait ainsi l'héritage du royaume à son fils.
Procédé astucieux qui permit de substituer la monarchie élective souhaitée par les Grands et
en vigueur sous les derniers Carolingiens, en une monarchie héréditaire, gage de la continuité.
Les Capétiens régnèrent en France jusqu'en 1848, avec pour unique interruption, la
Révolution Française et l'arrivée de Napoléon.
Le rituel du sacre

Comme les Carolingiens, les Capétiens utilisèrent le prestige religieux pour


asseoir leur légitimité. Après Hugues Capet et jusqu'à Charles X, chaque roi
eu à cœur de renouveler le rituel du sacre. A l'origine le sacre est une
pratique germanique héritée des barbares. Le roi fait office d'intercesseur
entre le monde divin et le monde humain. Pépin le Bref fut le premier à être
ainsi sacré en confirmation de son accession à la royauté. Les Capétiens
entretinrent une confusion entre le sacre germanique et le baptême de Clovis
dans le souci d'enraciner leur légitimité au plus profond de l'Histoire. Deux
reliques caractéristiques sont utilisées au cours du sacre des rois :

• L'épée de Charlemagne, dénommée « Joyeuse », cette épée faisait


partie avec son fourreau du Trésor de l'abbaye de Saint-Denis.

• L'huile sainte versée sur le front du souverain. La Sainte Ampoule


qui contient l'huile aurait été transmise à l'évêque Rémi par un ange
et son contenu se régénèrerait miraculeusement à chaque onction.
L'évêque Rémi utilisa cette huile lors du baptême de Clovis.

Les premiers Capétiens


Le règne d'Hugues Capet
En cette fin du Xe siècle, le roi de France est un seigneur parmi tant d'autres. Il est même
moins puissant et moins influent que la plupart de ses pairs. A la vérité, il n'est vraiment le
maître que d'une région comprise ente Paris et Orléans. Mais à la différence des autres
seigneurs qui l'ont élu, le nouveau roi a été sacré et personne ne doute qu'il ait été choisi par
Dieu pour faire régner la paix dans le royaume. Le sacre de Hugues est un élément fondateur
du royaume de France moderne. Le royaume de Hugues s'étend sur le bassin parisien,
l'ancienne Neustrie mérovingienne. Les Capétiens vont en faire le noyau de la France actuelle.
Le roi doit vite s'imposer sur son territoire face aux petits barons ou aux grands vassaux des
comtés de Blois et d'Anjou. Sa légitimité est en effet bien fragile. Lorsqu'il s'oppose à son
vassal Adalbert de Périgord, refusant de lever le siège de Tours, Hugues lui demande : « Qui
t'as fait comte ? », et le vassal répliqua « Qui t'as fait roi ? ». Dans le même temps, Arnoul
remplace son oncle Adalbéron, à l'évêché de Reims. Celui-ci étant un partisan du carolingien
Charles de Lorraine, il devient alors urgent à Hugues Capet d'écarter ce dangereux prétendant.
Grâce à une trahison organisée, Charles est finalement capturé, c'est la fin des prétentions
carolingiennes. En 996, Hugues est à Saint-Martin de Tours lorsqu'il meurt de la variole. Il est
inhumé à Saint-Denis.
La France de l'an mil

Le règne de Robert II le Pieux


Robert II est éduqué par le célèbre Gerbert d'Aurillac (qui deviendra pape sous le nom de
Sylvestre II). Il a gardé de cette éducation une grande piété, d'où son surnom. Comme tous ses
contemporains, il passa l'an 1000 sans s'en apercevoir. Il épouse Rozzala, la veuve du comte
de Flandre, de 35 ans son aîné, mais celle-ci lui apporte une dot intéressante. Malgré sa piété,
Robert est excommunié pour avoir répudier sa femme. Le règne de Robert est marqué par
l'acquisition de la Bourgogne au terme de 12 ans de conflit. Le duché est donné à son fils
Henri, qui sera peu après associé au trône comme l'avait fait Hugues Capet pour Robert. Les
grands feudataires perdent ainsi leur droit d'élection. Mais la jeune dynastie reste sous la
menace des Grands, le domaine capétien étant resserré autour d'un étau. En 1026, le fils de
Robert, Henri est sacré roi à Reims. Désormais, pour consolider la position du fils aîné, il est
décidé qu'à la mort de son père, il hériterait de la totalité du domaine royal et qu'il n'y aurait
pas de partage entre lui et ses frères. La loi salique utilisé par les Mérovingiens et
Carolingiens est ainsi oubliée, le partage du royaume entre les fils avait déjà provoqué la
dislocation du royaume de Clovis et le démantèlement de l'empire de Charlemagne lors du
traité de Verdun. Ainsi, à la mort de Robert II le Pieux, Henri Ier a une position plus solide au
sein du royaume.
Robert II le Pieux

Robert II est le
premier roi
thaumaturge.
Depuis, tous les
rois Capétiens
auront le don de
guérir les
écrouelles
(tuberculose
ganglionnaire).
Ainsi, après qu'un
roi avait touché un
malade, une
guérison spontanée
pouvait être liée au
geste royal
considéré comme
une intervention
divine.

Le règne d'Henri Ier


Henri est le second fils de Robert II le Pieux, il est associé au trône lorsque son frère aîné
meurt en 1026. Devenu roi, Henri épouse la fille de l'empereur d'Allemagne qui décédera
l'année suivante. Henri épouse donc en secondes noces Anne de Kiev. Leur fils, Philippe sera
le futur roi, dès l'âge de sept ans, il est associé au trône. La situation d' Henri est assez
délicate, sa mère, Constance souhaite voir son troisième fils sur le trône. Elle trouve l'appui de
plusieurs feudataires notamment de Eudes II de Blois. Henri est contraint de se réfugier chez
le duc de Normandie, Robert le Diable. Il a néanmoins de nombreux alliés : le comte de
Flandres, le comte d'Anjou et l'empereur d'Allemagne, Conrad. Il rétablit la situation en
attribuant la Bourgogne (qu'il avait reçu par son père) à son demi-frère. Ce sont les différentes
querelles entres les seigneurs qui va permettre la sécurité du roi. En 1047, Henri gagne la
bataille de Vals les Dunes contre les barons normands qui s'opposait au jeune duc Guillaume.
Mais bientôt, le roi doit renverser son alliance, le duc normand étant devenu trop puissant.
Mais Guillaume de Normandie remporte une victoire contre le roi et ses alliés. Henri Ier
meurt en 1060, son fils Philippe Ier lui succède alors.

La conquête normande
Le duché de Normandie
Après le traité de Saint-Clair sur Epte en 911, la Normandie (terre des Normands) est
attribuée à Rollon, un chef viking. Le roi Charles II s'assurait alors de la paix avec les
envahisseurs scandinaves. Les Normands s'étaient convertis et ils étaient désormais des
vassaux du roi de France. Les successeurs de Rollon prirent le titre de comtes de Normandie
jusqu'à Richard II où ils devinrent des ducs. La Normandie n'échappa pas au processus
d'émancipation des princes territoriaux. Les ducs rendent la justice, frappent leur monnaie,
lèvent l'impôt... Mais à la différence des autres princes territoriaux, les ducs normands évitent
de laisser des pouvoirs trop importants à leurs vassaux. Le duché est l'un des plus grands et
des plus riches du royaume. L'aristocratie franque se mélangeait à une partie d'hommes
d'origine scandinave. Le duché s'agrandit au fil des années notamment grâce à Guillaume
Longue Epée, fils de Rollon. En 1028, Robert le Magnifique (ou le Diable) devient duc à la
mort de son frère. Celui-ci aide le roi Henri Ier à lutter contre sa mère et ses frères rebelles. Il
meurt subitement à Nicée au retour d'un pèlerinage à Jérusalem.
Guillaume
le
Conquérant

Pierre de la sépulture de Guillaume le Conquérant (cloître de


l'église de l'Annonciade, à Florence - Italie)

Guillaume « le Bâtard »
Avant de partir pour Jérusalem, Robert le Diable désigna l'un de ses fils, Guillaume pour lui
succéder. La tradition normande voulait qu'un homme ait plusieurs épouses et qu'il puisse
choisir l'un de ses fils pour l'hériter. Arlette, la mère de Guillaume était la fille d'un tanneur,
son origine modeste fit valoir à Guillaume le surnom de « Bâtard ». Durant la minorité de
Guillaume, les désordres se multiplièrent en Normandie. Guillaume était encore jeune et très
souvent livré à lui-même face aux barons normands qui essayaient de s'emparer du pouvoir.
Avec l'aide du roi Henri Ier, il mata la révolte des barons à Vals les Dunes. En 1050, il épouse
sa cousine Mathilde de Flandres, contrairement à son père, il restera monogame et fidèle à son
épouse. Les années suivantes sont marquées par des conflits féodaux, Guillaume se révélant
un formidable homme de guerre. Il bat même les troupes royales d' Henri Ier. En 1066,
Guillaume de Normandie est devenu l'un des plus puissants hommes du royaume. Il fonde la
ville de Caen, en bâtissant son château et deux abbayes (l'Abbaye aux hommes dédiée à Saint
Étienne et l'Abbaye aux dames dédiée à la sainte Trinité).

La conquête de l'Angleterre
En 1066, le roi d'Angleterre, Édouard le Confesseur meurt sans héritier. Le demi-frère
d'Edouard, Harold monte sur le trône oubliant une promesse faite quelques années plus tôt qui
faisait de Guillaume le successeur de son cousin Edouard. Guillaume prépare alors l'invasion
de l'Angleterre. Il obtient d'abord l'excommunication d'Harold par le pape, car il avait reconnu
le choix d'Edouard sur des reliques sacrées. Sous l'étendard papale, Guillaume préparait alors
l'attaque de l'Angleterre. Des chevaliers de toute la France se joignirent à lui. Après avoir
traversé la Manche, il débarque dans le Wessex. Le choc des armées a lieu à Hastings.
Victorieux, Guillaume le Conquérant se fait sacrer roi d'Angleterre, le jour de Noël 1066.
Cette date est fondamentale dans la monarchie anglaise. C'est la fin de la domination saxonne
sur l'île. La conquête d'Angleterre est racontée par la tapisserie de Bayeux, l'un des chefs
d'œuvre artistique du Moyen Âge (70 mètres de long). L'origine de la tapisserie reste
énigmatique, la légende l'attribue à la reine Mathilde. Devenu roi, Guillaume accomplit une
œuvre immense, construisant de nombreux monuments, notamment la Tour de Londres. En
1085, il commanda ce qu'on peut appeler un recensement au sens moderne, le « Livre du
Jugement Dernier » ou Domesday's Book, qui faisait l'inventaire des hommes et richesses du
royaume. Guillaume reste cependant le vassal du faible roi de France. Et cela va causer de
véritables conflits entre les deux pays en raison des possessions anglaises sur le territoire
français. Les Normands se sont également établis en Sicile, où Robert Guiscard s'établit en
1059, délivrant le pape assiégé à Rome. Plusieurs dynasties normandes se sont ainsi installer
en Europe. En Angleterre, le français est la langue de la Cour, l'anglais est en fait un
amalgame entre le saxon et le français qui représente environ 60% de son vocabulaire.
La bataille d'Hastings

Le 14 octobre 1066, les troupes normandes et saxonnes s'affrontent à


Hastings. On compte environ 7 000 hommes dans chaque camp. L'armée
saxonne est très disparate et essentiellement constituée d'hommes à pied
qui ont pour seule consigne de « bombarder l'ennemi avec tous les
projectiles possibles. » La ligne de front est protégée par une ceinture de
boucliers. En face, l'armée de Guillaume paraît mieux organisée. Elle est
constituée de normands, bretons, flamands, français... Une première
ligne d'archers est chargée d'harceler l'ennemi tandis qu'une ligne de
fantassin prend le relais. Les chevaliers suivent... Suivant le plan de
Guillaume, les archers décochent leurs flèches sur les lignes adverses.
Mais la chevalerie normande s'éparpille dans les marécages, c'est la
déroute. Le bruit circule que le duc de Normandie a été tué. La panique
gagne les rangs, les Anglais se lancent à la poursuite des fuyards.
Guillaume ôte son casque et parcourt ses lignes afin que ses soldats le
reconnaissent. Mais les défenses anglaises tiennent bon. C'est alors qu'il
ordonne un simulacre de retraite. Un trait de génie ! Il attire ainsi les
Anglais désorganisés et sans discipline pour mieux les occire. La bataille
se prolongea l'après-midi. Harold meurt après avoir reçu une flèche dans
l'œil. A la nuit, Guillaume avait gagné la bataille d'Hastings, ainsi que le
trône de l'Angleterre. La bannière papale arborée durant la bataille
confère à l'expédition le statut d'une véritable croisade contre le roi
saxon. Transformant le pays en l'un des plus puissants d'Europe, les
Normands ont importé l'arc long, qui fait sa première apparition à
Hastings. Arme de prédilection des Anglais, ravageuse lors de la guerre
de Cent Ans.
Détail de la Tapisserie de Bayeux

Le renforcement des rois Capétiens


Le règne de Philippe Ier
A la mort du roi Henri Ier, son fils Philippe est encore bien jeune pour régner. C'est son oncle,
le comte de Flandre, Baudouin V (père de Mathilde, épouse de Guillaume le Conquérant) qui
assure la régence. Philippe doit rapidement s'opposer à la puissance de Guillaume le
Conquérant, devenu roi d'Angleterre en 1066. Ne pouvant le vaincre directement, Philippe
joue alors de la diplomatie, en soulevant les fils du roi anglais contre leur père. Après l'avoir
chassé de Bretagne, il soutient Robert Courteheuse, le fils de Guillaume qui a hérité du duché
de Normandie. Pour récompense, Robert Courteheuse lui offre Gisors. Guillaume le
Conquérant meurt en 1087, son autre fils Guillaume le Roux lui succède alors. Philippe
continue alors de soutenir Robert contre son frère, il a l'intention de dissocier la Normandie de
l'Angleterre. Guillaume le Roux projette l'invasion du territoire royal, c'est le fils de Philippe,
Louis qui parvient à le chasser du royaume. En 1095, le pape Urbain II lance la Première
Croisade, mais Philippe est écarté de l'expédition pour avoir répudier sa femme, contre la loi
de l'Église. Philippe Ier a contribué à élargir le domaine royal en obtenant notamment le
Vermandois, le Vexin français et le Gatinais. Mais la situation du capétien reste sous la
menace des grands seigneurs du royaume, certains n'hésitent pas à piller le domaine royal.
Vers la fin de son règne, Philippe laisse son fils Louis gouverner le pays. Il meurt en 1108,
après un long règne de près de 50 ans.

Le règne de Louis VI le Gros


Après la mort de Philippe Ier, la transmission de la couronne au fils aîné du roi défunt
semblait être acceptée par tous les Grands du royaume. Louis VI, comme son surnom
l'indique, était assurément un homme gros, mais sa corpulence ne l'empêchait pas de mener la
vie active à laquelle son titre de roi le condamnait. Suger, le grand conseiller de la couronne,
nous a laissé ce portrait saisissant du souverain : « Placé entre les corps de bataille ennemis,
l'épée à la main... il combattait corps à corps, faisant l'office d'un simple chevalier, non d'un
roi. » Et c'est bien ainsi qu'il faut imaginer le roi de France au début du XIIe siècle, payant de
sa personne, et, si les circonstances l'exigeaient, rougissant son épée du sang de ses ennemis.
Louis le Gros défendit d'abord le royaume contre les entreprises étrangères : celle d'Henri Ier,
roi d'Angleterre, et duc de Normandie. La guerre, qui tournait à l'avantage d'Henri (victoire de
Brémule en 1119) s'interrompit après la disparition des héritiers du roi anglais lors d'un
naufrage dans la Manche. Henri Ier entraîna alors son gendre Henri V contre la France,
l'empereur allemand qui tenta sans succès, en 1124, d'envahir la Champagne. Mais Louis
passa le plus clair de son temps à affermir son autorité à l'intérieur même du domaine royal :
contre les barons pillards qui menaçaient la sécurité des gens d'Église et celle des marchands,
ou contre ses vassaux indociles ou félons (traîtres), il porta la guerre, chevauchant sans cesse
et livrant bataille sur bataille. Louis aura agrandi son domaine de l'Auvergne, du Poitou, du
Limousin, du Périgord, du Bordelais, de l'Agenais et de la Gascogne. Le royaume de France
commençait à prendre forme.

Couronnement de
Louis VI le Gros, roi
de France

Le premier texte
faisant référence au
mot France remonte à
1119. Sur une lettre
adressée au pape
Calixte II, Louis VI
se déclare roi de
France, non plus des
Francs, et fils
particulier de l'Église
romaine.
Le temps des Croisades

(1095 - 1270)

Les croisades
Introduction
Bénie par le pape et conduite par les monarques des royaumes chrétiens de la vieille Europe,
cette aventure devait représenter tout ce que l'esprit médiéval avait de bon en lui. Malgré
l'échec militaire manifeste des croisades (à l'exception de la première), la Chrétienté en sortit
grandie au niveau économique et culturel. Le choc des cultures fut nettement favorable à
l'Europe, moins avancée que le Moyen Orient qui rentre alors en déclin. Les croisades
permirent également au niveau géopolitique la création des Etats Latins d'Orient (comté
d'Edesse et de Tripoli, principauté d'Antioche, royaume de Jérusalem) et l'essor des
républiques maritimes italiennes (Amalfi, Gênes, Pise et Venise).

Les Etats
latins et les
républiques
maritimes
italiennes

Tout l'Univers (Hachette)

Les caractéristiques des Croisades


Une grande aventure médiévale
Alors que la société européenne était rigide et fragmentée, tous les états (clergé, noblesse,
bourgeoisie et université) s'impliquèrent dans les huit expéditions, toutes castes confondues :

• La haute noblesse les appuya et lutta pour elles


• La hiérarchie du clergé prêcha en leur faveur depuis les cathédrales jusqu'à la plus
modeste des chapelles.
• Basse noblesse ou puînés des familles s'y lancèrent qui en quête de réputation et
d'honneurs, qui de pouvoir et de richesses.
• Trouvères et jongleurs rivalisèrent en poésie sur la reconquête de la Terre sainte,
atteignant parfois dans leurs vers des sommets artistiques sublimes.
• Pour tout chevalier « partir à la Croisade » devint très vite un devoir incontournable,
autant que le respect et l'amour pour sa dame.

Un grand investissement économique


Au cours des huit campagnes, tout le monde y trouva son compte :

• Corporations d'armuriers, forgerons, tailleurs, tanneurs et artisans de toute sorte


équipèrent et pourvurent les croisés
• De puissantes corporations de commerçants et d'investisseurs financèrent les
différentes campagnes entreprises...
• Grands armateurs et travailleurs des chantiers navals fournirent les nombreux navires
nécessaires au transport de cette multitude.
• Le petit peuple des campagnes enfin, tout comme les pauvres prolétaires des villes,
nourrissaient au passage les phalanges plébéiennes des armées : infanterie et unités
d'artillerie.

Guillaume
de Tyr
écrivant sa
chronique
des
croisades

(Histoire d'Outremer, XIIIe siècle, BN, Paris,


MS 2631, f. 1r)

Le rôle des femmes


Les femmes, jusqu'alors réalité féodale passive participèrent à la grande entreprise en
confectionnait vêtements, couvertures et toiles d'abri : brodant une infinité de bannières avec
force flammes, enseignes, insignes, fanions et drapeaux que devaient bientôt arborer sur les
champs de bataille les porte-étendards des armées. Sans parler de mouchoir marqué de deux
ou trois larmes d'amour de sa dame, que tout chevalier en partance pour le Proche Orient
emportait noué autour de son bras ou caché contre son cœur. Souvent même, la reine
accompagnait son royal conjoint dans l'aventure, suivie elle-même par les dames de la plus
haute noblesse, voyageant elles aussi avec leurs époux. En même temps que les comtesses,
marquises et autres baronnes, une troupe bigarrée de prostituées suivait. On trouvait
également toute une horde de vauriennes, d'entremetteuses, de joueuses invétérées, de
truandes et assassines.

Des expéditions très sanglantes


Une fois les villes conquises, les troupes chrétiennes et leurs chefs, se livraient à des atrocités
qui faisaient frémir les chroniqueurs chrétiens qui en avaient été les témoins, certains se
plaisaient à pratiquer le cannibalisme. Ainsi, après la mise à sac de la Palestine, Raoul de
Caen, chroniqueur de la Première Croisade écrivait : « A Maarat, les nôtres firent cuire les
païens adultes dans des marmites et embrochèrent les enfants pour les manger rôtis. » Le
chroniquer arabe Usana ibn Munqidh, qui avait connu dans sa chair les atrocités de la
deuxième te troisième croisade, notait dans ses mémoires : « Quand on nous eu informés sur
les frany (nom donné par les Arabes aux Croisés), nous vîmes en eux des bêtes nuisibles qui
ont une supériorité dans la valeur et l'ardeur au combat mais rien d'autre, tout comme les
animaux ont une supériorité dans la force et l'agressivité. » Et cet autre : « Les frany
passèrent au fil du couteau la population de la Cité sainte et tuèrent des Musulmans pendant
une semaine. Dans la mosquée Al-Aqsa, ils massacrèrent 60 000 personnes. Ils réunirent et
enfermèrent les Juifs dans leur synagogue et les y brûlèrent vifs. » Même leurs
coreligionnaires n'échappèrent pas à la fureur sacrée des troupes européennes : tous les prêtres
et pratiquants des rites orientaux résidant à Jérusalem furent expulsés de la ville et beaucoup
assassinés. Plusieurs prêtres coptes qui savaient où se trouvait cachée « la Sainte croix du
Christ » furent férocement torturés afin qu'ils livrent leur secret.

Un croisé en prière

Libres de toute attache,


les pauvres répondent à
l'appel de la croisade
avec plus de ferveur que
les autres classes
sociales. Sensibles aux
récompenses célestes
promises, ils cousent sur
leurs vêtements une
croix en tissu, d'où leur
nom de "croisés" qui
leur sera attribué.

XIIIe siècle, BL MS Royal 2A XXII f. 220

La prédominance française
Cependant avec notre regard d'aujourd'hui, les Croisades, ces entreprises démesurées,
absurdes dans un certain sens, se révélèrent d'un haut degré d'imperfection et, par dessus tout,
chaotiques et irrationnelles. Ce mot de « Frany » nous fait prendre conscience du fait que les
Croisés provenaient de toutes les régions d'Europe, depuis le Portugal jusqu'à la Lituanie,
mais elles étaient principalement et essentiellement une entreprise française. Grâce à cette
prépondérance, la France était à chaque fois le centre et l'axe de la politique européenne :
l'Etat le plus puissant et le plus influent du continent. Mais la France sortit cependant
exsangue des Croisades, y perdant plus de vies humaines que tous les autres pays de la
chrétienté réunis. Selon l'avis de plusieurs historiens, les Croisades furent le prologue de la
guerre de cent Ans au cours de laquelle la France affronta l'Angleterre dans des conditions
désavantageuses dès le début.

Les Croisades

Les Croisades
La première croisade (1095 - 1099)
Voir l'article consacré à la Première Croisade

La deuxième croisade (1147 - 1149)


En 1144, les musulmans reprirent le comté d'Edesse (l'un des quatre Etats d'Orient fondé par
les croisés). Le pape ordonna alors de former une nouvelle croisade. Elle fut prêchée par
Bernard de Clairvaux, à l'assemblée de Vézelay, en Bourgogne, en 1146. L'expédition fut
conduite par le roi de France Louis VII et l'empereur germanique Conrad III. Les désaccords
entre les chefs, le manque d'organisation et les erreurs militaires entraînèrent une série de
revers des forces croisées. Après que ses troupes eurent été décimées à Dorylée, Conrad rentra
en Allemagne. Louis VII, quant à lui était peu expérimenté pour mener la guerre, et il se
heurtait bien souvent à la perfidie des byzantins. Les survivants rejoignirent Jérusalem, puis
déclenchèrent une attaque contre Damas, sans pouvoir s'emparer de cette ville. La nouvelle de
l'arrivée de renforts musulmans contraignit les chrétiens à lever le camp et à rentrer sans
gloire en Europe. En deux années seulement, le prestige des armées croisées était tombé si bas
que l'on pouvait penser que plus personne ne voudrait reprendre les armes.

Louis VII partant


pour la Seconde
Croisade

Louis VII tient son


surnom de
"Jeune", car il était
le fils cadet de
Louis VI le Gros.
Elevé par Suger à
l'abbaye de Saint-
Denis, il a gardé
l'empreinte
monastique et le
peu de goût pour
les armes.

La troisième croisade - la « croisade des rois » (1189 - 1192)


Quarante années passèrent, pendant lesquelles chrétiens et musulmans vécurent souvent en
bon voisinage. Beaucoup d'anciens croisés avaient épousé des femmes arabes et avaient
adopté nombre de coutumes orientales. Les échanges commerciaux étaient très intenses entre
les ports du Levant et ceux des côtes italiennes. Le plus important des personnages du monde
musulman était alors le sultan d'Egypte, Salâh al-Dîn, dit Saladin, qui avait étendu sa
domination sur une grande partie du Levant et établi de bons rapports avec les chrétiens. Mais
la violation de ce statu quo par quelques seigneurs fanatiques ramena la guerre dans la région.
Saladin battit les chrétiens à la bataille d'Attîn et entra en vainqueur à Jérusalem en 1187. La
prise de la ville entraîna l'appel à la troisième croisade. Elle fut appelée la « croisade des rois
» parce qu'à sa tête se trouvaient les souverains les plus prestigieux d'Occident : l'empereur
Frédéric Barberousse, le roi de France Philippe Auguste et le roi d'Angleterre Richard Cœur
de Lion. Les armées réunies étaient très importantes. Mais à peine arrivé en Asie Mineure,
Frédéric Barberousse se noya pour avoir traversé une rivière avec son armure. Les deux
souverains survivants reprirent la ville de Saint-Jean d'Acre. Puis les événements prirent une
autre tournure. Le roi de France n'avait qu'une seule hâte : retourner dans sa patrie et profiter
de l'absence de Richard pour mettre la main sur les possessions françaises de ce dernier. Resté
seul, le roi anglais accomplit des prodiges, mais il n'est plus en mesure de battre Saladin.
Aussi conclut-il, en 1192, une trêve avec son valeureux adversaire. L'accord stipulait que
Jérusalem restait aux mains des musulmans, qui s'engageaient en retour à protéger les pèlerins
chrétiens se rendant dans la ville Sainte. De plus, les Francs conservaient les ports du Levant,
ainsi que Chypre.
Siège de Saint-Jean
d'Acre

Cette croisade est


certainement l'une des
plus célèbres. Le grand
sultan Saladin était très
respecté des chrétiens qui
le considéraient comme le
« reflet immaculé de la
Chevalerie ». Face à lui,
Richard Cœur de Lion, un
redoutable guerrier, très
endurant au combat. Le
roi anglais a été
immortalisé par les
aventures de Robin des
Bois.
(Bibliothèque Nationale de France)

La quatrième croisade - la « croisade de Venise » (1202 - 1204)


La quatrième croisade fut inspirée par le pape Innocent III, qui mit les souverains chrétiens en
demeure de reprendre les armes et de libérer le Saint Sépulcre des mains des infidèles. A la
différence de la précédente, ce fut une croisade conduite par de simples chevaliers : Boniface
de Montserrat, Baudouin de Flandre et Geoffroy de Villehardouin. Son objectif initial était
l'Égypte, mais elle fut complètement déviée de son but par les Vénitiens. Ceux-ci s'étaient
engagés à pourvoir au transport des troupes contre le paiement d'une somme très importante.
Comme les croisés n'avaient pas réussi à réunir entièrement l'argent, les Vénitiens exigèrent la
prise de la ville de Zara (aujourd'hui Zadar en Yougoslavie), qui faisait concurrence à la
sérénissime république : en cinq jours, cette cité chrétienne fut prise. Puis les croisés se
dirigèrent vers Constantinople qu'ils mirent à sac en 1204. Venise se fit céder des territoires
byzantins. Le chef croisé Baudouin devint le premier empereur de l'Empire latin d'Orient.
Ainsi s'acheva cette croisade de chrétiens contre d'autres chrétiens : on était loin de l'idéal d'un
Godefroi de Bouillon.
Les Vénitiens
détournent la
croisade vers
Constantinople

La « croisade des enfants » (1212) et la cinquième croisade (1217 - 1221)

• La « croisade des enfants » (1212) : Pour faire oublier le scandale de la quatrième


croisade, on laissa croire que seuls des enfants innocents pouvaient miraculeusement
libérer le Saint Sépulcre. Des prédicateurs fanatiques surent convaincre les parents de
plus de 30 000 enfants de les laisser partir désarmés, sans ravitaillement,
complètement démunis. A Gênes, de malhonnêtes commandants de navires les firent
passer en Égypte et en Tunisie, où, naturellement, ils furent vendus comme esclaves.
• La cinquième croisade (1217 - 1221) : La cinquième croisade est également prêchée
par le pape Innocent III. Après une expédition infructueuse des rois de Chypre et de
Hongrie, le roi de Jérusalem Jean de Brienne tente d'envahir l'Égypte dont le sultan
contrôlait la Terre Sainte : il réussit à prendre Damiette en 1219 avec l'aide précieuse
des chevaliers templiers. Trois années plus tard, l'armée occidentale progressant sur le
chemin du Caire, se fait surprendre par une crue du Nil et doit capituler : les
musulmans leur imposent de libérer Damiette en échange de la possibilité de reprendre
la mer sans être inquiété.

La sixième croisade (1228 - 1229)


L'empereur germanique Frédéric II, excommunié pour avoir rompu avec le pape Grégoire IX,
fut pratiquement obligé de partir en croisade. Il partit avec beaucoup de retard et arriva en
Terre sainte en 1228, avec seulement 3 000 soldats. Après 5 mois de négociations avec le
sultan d'Egypte Al-Kâmil, il parvient par la diplomatie à signer le traité de Jaffa. Il obtint ainsi
la restitution de Béthléem, de Nazareth et même de Jérusalem au royaume latin. A Jérusalem,
les musulmans gardent la possession de leurs temples et mosquées, tandis que les chrétiens
récupèrent le Saint Sépulcre. Mais ce succès ne fut pas reconnu en Occident, où l'on se
scandalisa de l'accord conclu avec les infidèles ! En 1244, les musulmans reconquirent
Jérusalem, qui ne devait jamais plus retourner en mains chrétiennes.
L'empereur
germanique
Frédéric II de
Hohenstaufen
(1220-1250)

Etonnant
succès de cet
empereur
germanique
qui récupère
Jérusalem
sans avoir
versé une
goutte de
sang.

La septième croisade (1248 - 1254)


En 1248, la Terre Sainte est reprise par les infidèles : le sultan d'Egypte a repris Jérusalem qui
avait été restituée aux occidentaux suite aux négociations de la 6ème croisade, et a massacré
l'armée franque. Louis IX entreprend donc une expédition au cœur de l'Egypte afin d'attaquer
les sarrasins au cœur de leur puissance, espérant forcer le sultan à céder Jérusalem. Cependant
l'ardeur religieuse est moindre, Louis IX est obligé de forcer un certain nombre de ses proches
à prendre la croix avec lui. Il part avec sa femme Marguerite de Provence et ses deux frères,
Robert d'Artois et Charles d'Anjou. Le roi embarque à Aigues-Mortes, un port royal en
construction qui permettra à la France d'avoir un débouché sur la Méditerranée. Après une
escale à Chypre, les croisés s'emparent de la ville de Damiette, puis se prépara à marcher sur
Le Caire où résidait le sultan. Elle ne parvient pas à son but, car elle fut assaillie en route par
les sarrasins et taillée en pièces à Mansourah. Le frère du roi, Robert d'Artois est tué avec bon
nombre de ses chevaliers, le roi et le reste de l'armée furent faits prisonniers. Après
négociation, Louis IX est libéré contre une énorme rançon de 400 000 livres (payée
partiellement par les Templiers). Saint Louis passa encore quatre années en Terre sainte,
aidant les principautés franques à réorganiser leur système de défense. Les renforts sur
lesquels il comptait ne venant pas, il finit par rentrer en France, en 1254. C'est également la
mort de sa mère, Blanche de Castille, qui assurait la régence, qui va décider Louis à rentrer
après six années d'absence.
Siège de
Damiette

Malgré
l'échec de la
croisade,
Saint Louis
gagna le
respect et la
considération
du pape.

La huitième croisade (1270)


L'échec de la septième croisade, que Saint Louis interpréta comme une punition divine
l'affecta beaucoup. Pourtant au XIIIe siècle, l'Europe n'est plus, comme au XIIème siècle,
mobilisée contre les infidèles. Comme le disait le poète Rutebeuf : « On peut bien gagner
Dieu sans bouger de son pays, en vivant de son héritage. Je ne fais de tort à personne. Si je
pars, que deviendront ma femme et mes enfants ? Il sera temps de se battre quand le sultan
viendra par ici. » Le danger représenté par les musulmans était devenu moins pressant : déjà
expulsés de Sicile, ils étaient méthodiquement refoulés de la péninsule Ibérique. Bien que le
tombeau du Christ fût à nouveau sous le contrôle de l'islam, la ferveur religieuse était
retombée, de même que s'était dissipé l'espoir d'une colonisation facile et d'une fortune rapide
qui nourrissait les rêves des petits seigneurs. De ce point de vue, Saint Louis n'était pas en
accord avec son temps : les bourgeoisies marchandes avaient compris qu'on ne pourrait
déloger ni contenir l'islam, mieux valait s'accommoder de son existence et entretenir des
relations avec lui. Saint Louis ne partageait pas ce point de vue et voulut tenter une nouvelle
fois l'impossible. Il commença à accumuler l'argent, les vivres et les armes dès 1267. En
juillet 1270, il s'embarqua pour Tunis. Il croyait de son frère Charles d'Anjou, roi de Sicile,
que l'émir de cette ville avait l'intention de se convertir au christianisme. Epuisé par la chaleur
et le manque d'eau, le vieux roi mourut devant Tunis. On a longtemps cru qu'il s'agissait de la
peste, mais il semble que ce serait plutôt d'une dysentrie. Avec cet ultime et dérisoire échec
s'achève l'ère des croisades dont Louis IX incarne la dernière figure.

La Première Croisade
Introduction
En ce jour de novembre 1095, malgré le froid et la neige tombée sur la montagne entourant
Clermont, capitale de l'Auvergne, une grande foule s'était rassemblée pour la venue du pape
Urbain II. Quand celui-ci prit la parole du haut d'une simple tribune en bois, il se fit un grand
silence. Tout le monde devinait que le pape allait parler des nouvelles qui s'étaient répandues
dans toute l'Europe à propos de la Terre Sainte. Et ces nouvelles étaient désastreuses pour la
chrétienté.

Les enjeux
L'appel du pape
Urbain s'adressa à la foule en français : « Ô peuple des Francs ! Peuple aimé et élu de Dieu !
De Jérusalem et de Constantinople s'est répandue la grave nouvelle qu'une race maudite,
totalement étrangère à Dieu, a envahi les terres chrétiennes, les dépeuplant par le fer et le
feu. Les envahisseurs ont fait des prisonniers : ils en prennent une partie comme esclaves sur
leurs terres, les autres sont mis à mort après de cruelles tortures. Ils ont détruits les autels
après les avoir profanés. Cessez de vous haïr ! Mettez fin à vos querelles Prenez le chemin du
Saint Sépulcre, arrachez cette terre à une race maligne, soumettez-là ! Jérusalem est une
terre fertile, un paradis de délices. Cette cité royale, au centre de la terre, vous implore de
venir à son aide. Partez promptement, et vous obtiendrez le pardon de vos fautes ! Souvenez-
vous aussi que vous recevrai pour cela des honneurs et la gloire éternelle au royaume des
cieux. » Un frémissement, des murmures, des cris d'indignation étouffés parcoururent alors la
foule. Un célèbre moine prédicateur qui participait au concile de Clermont, Pierre d'Amiens,
dit Pierre l'Ermite, poussa ce cri : « Dieu le veut ! ». La foule le reprit comme un grondement
de tonnerre : « Dieu le veut ! ». C'est ainsi que commença la Première Croisade.
Le concile de
Clermont

La présence du
pape français
Urbain II au
concile de
Clermont attira
une telle foule
que la réunion
dut se tenir en
plein air
(contrairement
à la miniature
ci-contre), sur
une place
entourée par
les tentes des
participants,
accourus de
plusieurs pays.
Livre des Passages d'Outre-mer, XVe siècle, BN, MS Fr. 5594, f.
9

La Terre sainte aux mains des infidèles


Urbain II, moine de Cluny, poursuit à sa manière la réforme grégorienne de l'Église engagée
par son prédécesseur Grégoire VII. L'appel de Clermont s'inscrit dans la continuité des «
trêves de Dieu », le clergé invite les chevaliers à interrompre leurs combats et à respecter les
non-combattants (femmes, enfants, ecclésiastiques, marchands,...). Le pape veut en particulier
moraliser la chevalerie, éradiquer la violence et mettre fin aux guerres privées entre seigneurs
féodaux. Or les croisades allaient représenter les entreprises militaires les plus importantes et
les plus sanglantes de l'histoire médiévale. A l'origine de cette offensive de la chrétienté
contre l'islam, il y a des causes et des prétextes très divers. Dans le monde islamique, des
changements importants étaient intervenus. Les Arabes, civilisés et tolérants, avaient toujours
accueilli sans difficulté les pèlerins chrétiens en terre Sainte, et plus volontiers encore les
marchands venus d'Occident. Or, leur pouvoir en Palestine avait été réduit par l'avancée des
Turcs Seldjoukides. Ces musulmans étaient beaucoup plus rudes et intolérants que leurs
coreligionnaires arabes. Au XIe siècle, ils occupaient la Mésopotamie, la Syrie, les ports du
Levant et la Palestine avec tous ses lieux saints, Bethléem, Nazareth, Jérusalem. C'est surtout
l'occupation de la ville sainte qui révoltait l'Occident, car elle abritait le Saint Sépulcre,
abritant la tombe du Christ. Même si, par la suite, les faits furent exagérés, il est vrai que les
pèlerins de Palestine furent en butte à la persécution des Turcs. Le désir d'arracher ces régions
aux mains des « infidèles » fut un puissant stimulant religieux, qui poussa de nombreux
fidèles à endosser la tunique blanche « croisée », c'est-à-dire marquée de la croix rouge du
Christ. La détermination des croisés fut renforcée par les premiers succès des chrétiens
espagnols dans leur entreprise de reconquête (Reconquista) de la péninsule ibérique.
Un croisé en
prière

Libres de
toute attache,
les pauvres
répondent à
l'appel de la
croisade avec
plus de
ferveur que
les autres
classes
sociales.
Sensibles aux
récompenses
célestes
promises, ils
cousent sur
leurs
vêtements
une croix en
tissu, d'où
leur nom de "
croisés " qui
leur sera
attribué.
XIIIe siècle, BL MS Royal 2A XXII f. 220

Des raisons politiques et économiques


L'avancée des Turcs menaçait directement l'empire byzantin qui, durant sept siècles, avait
constitué le rempart contre lequel s'était brisée l'expansion islamique à l'est du continent
européen. Dans les visées de certains souverains occidentaux, les croisades devaient permettre
de venir en aide aux Byzantins, mais aussi d'établir, pour leur propre compte, des enclaves «
latines », ou catholiques, en Terre Sainte. Cet objectif était notamment soutenu par les
républiques maritimes italiennes : les Turcs, en effet, avaient coupé les routes du grand
commerce avec l'Orient. Des ports et comptoirs sous domination chrétienne permettraient de
rouvrir ces routes, pour le grand profit des commerçants génois ou vénitiens. Le projet
d'expéditions en Orient excitait aussi l'imagination de centaines de chevaliers et de barons
désargentés et sans fiefs, de cadets ou de simples aventuriers qui espéraient conquérir au loin
les terres et les richesses qu'ils n'avaient pu trouver en Occident. De plus, la bénédiction de
l'Église et l'approbation de la chrétienté les auréolaient d'un grand prestige.

Enthousiasme général
L'enthousiasme pour la croisade fut énorme : des dizaines de milliers de personnes, y compris
les femmes, les vieillards, les enfants, se déclarèrent prêtes à partir libérer le Saint-Sépulcre. Il
est hors de doute que la ferveur religieuse fut le moteur principal de cet immense élan. Mais
d'autres facteurs alimentaient aussi cet enthousiasme. Le pape délia serviteurs et vassaux de
leur serment de fidélité envers leurs seigneurs durant toute la période de la croisade. C'était
une aubaine pour des centaines de petits vassaux, mais encore plus pour des milliers de
paysans et de serfs, pour lesquelles la croisade était l'occasion inespérée de sortir de leur
condition et de devenir riches. L'indulgence plénière, c'est-à-dire le pardon de tous les péchés
qu'ils avaient commis, était en outre accordé aux croisés. De plus, ceux-ci ne pouvaient être
jugés, s'ils commettaient quelque crime, que par des tribunaux ecclésiastiques, qui étaient
disposés à fermer les yeux sur les fautes commises pour la cause sacrée. L'appel du pape
tombé à pic, en effet, depuis l'an Mille, la chrétienté vit un renouveau : les guerriers codifient
leurs combats et les paysans, bénéficiant d'une meilleur sécurité, améliorent leurs conditions
de vie. La population se met à croître rapidement, et l'Europe connaît un réel essor
économique. Le monde a quitté l'âge sombre pour entrer dans le Bas Moyen-Âge.

Pierre
l'ermite
haranguant
les troupes
croisés

Les deux types de croisades


La « croisade des gueux »
« Dieu le veut ! Dieu le veut ! » : tel fut le cri de ralliement qui marqua le début des croisades.
Urbain II avait fixé au mois d'août 1096 le départ de la grande expédition. Mais des dizaines
de milliers de personnes s'étaient spontanément mises en route avant la date prévue. Sans
protection armée, elles couraient au massacre. Plus de 12 000 personnes étaient partis de
France en mars, conduites par le fanatique Pierre l'Ermite, entouré d'une vénération
charismatique et un noble au nom évocateur, Gauthier Sans Avoir. On y trouvait : femmes
accompagnant leur mari, paysans à la foi ardente désireux de fuir les servitudes féodales,
enfants et vieillards convaincus de faire tomber les remparts de Jérusalem par la force de leurs
prières. Il n'y avait alors que huit chevaliers. Dans le même temps, deux autres groupes
mineurs étaient partis d'Allemagne. Munie de très peu d'armes et d'un maigre ravitaillement,
un peu comme des pèlerins se rendant dans le comté voisin, cette foule descendit le Danube
avec l'intention de rejoindre Constantinople et, de là, la Palestine : presque tous ignoraient où
se trouver le pays. Cette croisade des pauvres se transforma en fléau. Les croisés saccagèrent
des villages entiers pour obtenir de la nourriture. Comme la plupart de leurs contemporains,
ces pèlerins n'ont pas conscience du temps historique. Ils pensent que le Christ est à peine
antérieur à leur époque, et s'acharnent à massacrer d'innocents groupes de juifs, qualifiés d'«
ennemis du Christ ». Ces rapines et violences provoquèrent la réaction armée des habitants
des régions traversées. Une majorité atteignirent Constantinople, où l'empereur Alexis Ier leur
fit traverser le Bosphore, mais leur conseilla d'attendre l'arrivée de la véritable armée croisée.
Ce fut en vain. La foule poursuivit sa marche jusqu'à Nicée, une place forte turque. Là, elle se
disposa en ordre de bataille : quelques escouades d'archers turcs, sortis de la ville, suffirent à
décimer ces malheureux rêveurs. Une escadre de navires byzantins récupéra les rares
survivants.

Les Turcs
massacrant
les pèlerins
en 1096

La « croisade des barons »


Entre l'été et l'hiver 1096 se mit en marche la gigantesque machine de la première véritable
croisade. Elle fut appelée « croisade des seigneurs », car aucun roi ne s'y était associé. Les
différents souverains d'Europe : Philippe Ier, roi de France, Guillaume II, roi d'Angleterre et
l'empereur Henri IV avaient été excommuniés par le pape. Mais les chefs de la croisade
étaient valeureux et acquirent rapidement un grand prestige. L'expédition comprend quatre
armées :

• Les Français du Nord sont placés sous le commandement de Hugues de Vermandois,


frère du roi de France Philippe Ier, et Robert Courteheuse, fils de Guillaume le
Conquérant.
• Les chevaliers du Rhin et de la Meuse sont menés par deux frères : Baudouin de
Boulogne et Godefroi de Bouillon, le plus vaillant chevalier du groupe, courageux au
combat et débordant de foi.
• Une troisième expédition part du Midi de la France sous la conduite du comte de
Toulouse, Raymond IV de Saint-Gilles, âgé mais chargé de gloire et d'expérience pour
avoir déjà combattu les musulmans en Espagne.
• Enfin, une quatrième armée part de l'Italie méridionale commandée par le normand
Bohémond de Tarente, le fils de Robert Guiscard, qui conquit la Sicile. Bohémond est
un guerrier expérimenté, il a déjà combattu les musulmans. Il est accompagné de son
neveu, Tancrède de Hauteville, « l'incarnation de l'idéal du chevalier chrétien. »

Le gros de l'expédition croisée était composé de contingents français ou de souche franque. Si


bien que les musulmans qui voyaient fondre sur eux une armée chrétienne communiquant en
français, prirent l'habitude d'appeler « Francs » tous les chrétiens d'Europe.

Les grandes étapes


De Constantinople à Nicée
Les armées composées d'environ 30 000 hommes au total, qui s'étaient rassemblées en divers
points de l'Europe, se mirent en marche, en utilisant des routes différentes, pour aboutir à
Constantinople. Le commandement unique fut confié à Godefroi de Bouillon, qui rejeta
aussitôt fermement la proposition de Bohémond de Tarente de s'emparer de la capitale
byzantine, affirmant être venu « uniquement pour combattre les infidèles ». Mais l'idée de
mettre la main sur la riche cité de Constantinople demeura présente. L'empereur byzantin,
Alexis Ier, approvisionna les troupes croisées, déjà bien épuisées, et s'engagea à les assister
militairement. Les croisés avaient eu des démêlés avec l'empereur, celui-ci était vexé que
l'Occident prenne la relève de l'Orient pour la lutte contre l'Islam. Alexis pensait voir arriver
des mercenaires à sa solde. Il fut soulagé lorsque les troupes se mirent enfin en route pour
Jérusalem. Les discordes ravageaient l'armée croisée : Godefroi commandait... quand on le lui
permettait. Mais la division encore plus accentuée régnant chez les musulmans favorisa les
croisés. Les troupes chrétiennes occupèrent Nicée sans grande difficulté. Par la suite, elles
affrontèrent les Turcs à Dorylée dans une bataille très dure. Les troupes de Bohémond de
Tarente étaient encerclées. Comme à leur habitude, les Turcs lancèrent flèches et javelots sur
leurs adversaires. Mais les Francs maîtrisaient parfaitement la défensive, grâce à leurs cottes
de maille et leurs épaisses armures. Les troupes de Godefroi arrivèrent alors en rescousse. Dès
lors, les Turcs abandonnèrent le champ de bataille, laissant un butin énorme, et perdant leur
invincibilité.
Les Croisés
catapultant des têtes
des morts lors du
siège de Nicée

Afin de semer
l'effroi sur les
assiégés, les Francs
catapultèrent des
têtes de morts par
dessus les remparts
de Nicée.

Croisés catapultant des têtes des morts lors du siège de


Nicée, par Guillaume de Tyr (miniature dans Les Estoires
d'Outremer, XIIIe siècle, Ms français 2630, folio 22 v.,
Bibliothèque Nationale, Paris.)

La pénible marche vers Jérusalem


Après la victoire de Dorylée, les troupes durent affronter leur ennemi le plus impitoyable :
une marche de 800 kilomètres sous un soleil ardent, dans des régions dépourvues d'eau, alors
que les vivres manquaient et que les tribus bédouines les harcelaient sans cesse. Bien plus que
les batailles, ces difficultés décimèrent l'expédition. L'hiver 1097 fut particulièrement
pénible : après le soleil et la soif, les croisés affrontèrent le vent et le froid, la pluie, la faim et
les épidémies, sous les remparts d'Antioche, dont les habitants résistèrent huit mois. De
nombreux chrétiens désertèrent et s'embarquèrent à leurs frais sur des navires génois et
vénitiens pour revenir en Europe. Cependant, beaucoup d'autres, les plus dévots et les plus
solides, résistèrent. Parmi ceux-ci survécurent ceux qui s'étaient nourris pendant des semaines
avec des « cannes douceâtres appelées zucra en arabe » : les Européens avaient découverts le
sucre.

La prise d'Antioche
Antioche, assiégée par les croisés, résistait depuis huit mois. C'est alors que les croisés
apprirent l'arrivée, en renfort des assiégés, d'une forte armée turque. Cette nouvelle suscita un
tel mouvement de crainte et de désespoir qu'ils redoublèrent leurs assauts et prirent Antioche
en une semaine. La ville fut livrée au pillage. L'audacieux Bohémond conduisit ensuite les
troupes croisés contre l'armée turque, qui fut vaincue. Six mois passèrent pendant lesquels les
croisés reprirent des forces et se réorganisèrent. Mais entre temps, les croisés se laissèrent
griser par le pouvoir. Les seigneurs ne résistèrent pas à la tentation de s'offrir une province,
malgré la promesse faite à l'empereur byzantin qui devait récupérer les territoires pris aux
Turcs. Ainsi, Bohémond avait convaincu les Byzantins qui l'accompagnaient de s'enfuir. Les
Byzantins l'avaient abandonné et il put se libérer de son serment de vassalité avec l'empereur.
Bohémond se proclama ainsi prince d'Antioche. Quant à Baudouin de Boulogne, il attaqua
Edesse pour son propre compte. De tous les grands croisés, seul Raymond IV ne s'était pas
corrompu. Il partit seul pour Jérusalem bientôt rejoint par Godefroi de Bouillon.
Le siège
d'Antioche

Un jour, un
pauvre pèlerin
raconta son rêve
où il avait vu
Saint André qui
lui révéla
l'endroit où était
cachée la Saint
Lance (la lance
du centurion qui
aurait percé le
flanc du Christ).
La Lance était
enterré dans le
sol de l'église
Saint Pierre
d'Antioche. On
souleva les
dalles puis l'on
creusa une
fosse, la Sainte
Lance fut
retrouvée
quelques jours
plus tard. Par la
suite on accusa
Raymond de
Saint-Gilles
d'avoir imaginé
le subterfuge de
la lance pour
fanatiser ses
compagnons.

La prise de Jérusalem
Le 7 juin 1099, trois ans après leur départ d'Occident, 12 000 soldats du Christ, déguenillés,
tombèrent à genoux en pleurant lorsqu'ils aperçurent au loin les remparts puissants et élevés
de Jérusalem, la Ville Sainte ! Les Croisés bénéficièrent des rivalités entre musulmans.
Pendant que les Turcs étaient à Antioche, les Egyptiens fatimides avaient pris la ville de
Jérusalem. Godefroi de Bouillon fit dresser les tentes autour de la ville et installer les
machines de sièges, les tours pour l'escalade des remparts, construites par les charpentiers
génois, les catapultes et tous les engins conçus par les techniciens militaires. La garnison de la
place, qui ne dépassait pas le millier, observa tous ces travaux avec étonnement et quelque
crainte. Le calife égyptien envoya ses ambassadeurs auprès des chefs croisés : il promettait,
comme autrefois, toute liberté aux pèlerins chrétiens pour séjourner dans la ville et visiter les
lieux saints. Les chefs de la croisade tinrent conseil. Allait-on abandonner, si près du but,
l'objectif principal de l'expédition et s'interdire de former des royaumes latins en Orient, alors
même que certains chevaliers s'étaient déjà taillé quelques fiefs dans les territoires conquis ?
Aussi exigèrent-ils une reddition sans conditions. Les musulmans refusèrent. Le siège de la
ville commença. Durant quarante jours, les mille défenseurs résistèrent aux douze mille
croisés qui les assiégeaient. Le 15 juillet, Godefroi, Tancrède et leurs hommes réussirent à
escalader les remparts de la ville. A coups de hache, ils atteignirent les portes, qu'ils ouvrirent
toutes grandes. Les soldats se ruèrent dans la cité. Exaspérés par es privations, exaltés par les
harangues des prédicateurs, affamés, ils ne pensèrent plus qu'à se venger et à rançonner la
population, comme ils l'avaient fait à Antioche. Ce fut une page peu glorieuse de la chrétienté.
Le pillage de
Jérusalem

Un témoin oculaire,
Raymond d'Agiles,
raconta : « On vit alors
des choses jamais
vues. De nombreux
infidèles furent
décapités, tués par les
archers ou contraints
de sauter du haut des
tours. D'autres encore
furent torturés puis
jetés dans les flammes.
On pouvait voir dans
les rues des monceaux
de têtes, de mains et de
pieds. On chevauchait
partout sur des
cadavres. Ce fut un tel
massacre dans la ville
que les nôtres
marchaient dans le
sang jusqu'aux
chevilles. Les croisés
pillaient à satiété : ils
parcouraient les rues,
entraient dans les
maisons, raflaient or,
argent, chevaux, tout
ce qu'ils trouvaient... »
Les croisés à l'assaut de Jérusalem en 1099, par Guillaume de Tyr
(Histoire d'Outremer, Bibliothèque municipale, Lyon)

L'héritage de la première Croisade


Les Etats Latins d'Orient
Les croisés atteignirent enfin la basilique édifiée sur le Saint Sépulcre du Christ, que les
infidèles avaient reconstruite après qu'un souverain fanatique eut cherché à l'abattre. Là, ils
s'embrassèrent, pleurant de joie, les croisés avaient enfin atteint leur objectif. Le pape Urbain
II mourut sans avoir eu connaissance du succès de l'expédition. On proposa à Godefroi de
Bouillon le royaume « latin » ainsi conquis aux dépens de Raymond de Saint-Gilles qui était
l'autre prétendant. Il refusa la couronne, se contentant du titre plus modeste d'« avoué, ou
défenseur du Saint Sépulcre », ne voulant ceindre une couronne d'or là où le Christ avait une
couronne d'épines. Il vainquit une armée égyptienne à Ascalon, puis s'occupa activement de
l'organisation de son royaume. Il mourut brusquement, un an après la conquête, peut-être
empoisonné par un musulman. Le royaume de Jérusalem fut donc confié à son frère
Baudouin. Cette première croisade va donner naissance à quatre principautés chrétiennes en
Terre Sainte créée sur le modèle féodal de l'Europe Occidentale. Ainsi, les 4 Etats Latins
d'Orient sont :

• Le comté d'Edesse, fondé par Baudouin


• La principauté d'Antioche, occupé par Bohémond
• Le comté de Tripoli, pris en 1109
• Le royaume de Jérusalem, offert à Godefroi de Bouillon

Les Etats Latins


d'Orient

Les Etats francs


se consolidèrent
pour apparaître
comme une
véritable
puissance
régionale. La
France peut alors
développer des
échanges
commerciaux
avec d'autres
ports de la
Méditerranée.

La naissance des ordres de chevalerie


Pour défendre les États latins, des ordres de moines-soldats sont organisés en armée
permanente : ainsi les Hospitaliers, en 1113, et les Templiers, en 1118. Des forteresses sont
érigées, tel le fameux krak des Chevaliers en Syrie. Profitant de cette nouvelle communication
avec l'Orient, le commerce méditerranéen s'intensifie et devient florissant. L'ordre du Temple
est né en Terre sainte, en 1119, après la première Croisade, à l'initiative du chevalier
champenois Hugues de Payns qui voulait protéger les pèlerins se rendant à Jérusalem. Il a été
officialisé par le concile de Troyes, neuf ans plus tard à la demande de Bernard de Clairvaux.
L'ordre tire son nom du temple de Salomon, à Jérusalem, où il a installé son siège à ses
débuts. L'ordre gagne en influence au cours des siècles et recrute dans toute l'Europe. Il va
défendre les puissances latines en Orient, isolés des forces occidentales.
Le phénomène Da Vinci Code

L'intrigue du best-seller "Da Vinci Code" se base sur les secrets,


souvent contestés, du Prieuré de Sion. Le roman explique que le
Prieuré de Sion serait une société secrète fondée en 1099, après la
première croisade, par Godefroi de Bouillon. Ayant découvert un
grave secret concernant sa famille, dissimulé depuis l'époque du
Christ, il chargea la société secrète de veiller sur ce secret et de le
transmettre aux générations ultérieures. D'après la légende
Godefroi serait un héritier des Mérovingiens. Par cela même,
Godefroi serait un descendant du Christ et de Marie-Madeleine qui
vint se réfugier en Gaule. Pour beaucoup, les informations sur la
descendance du Christ constituent le Saint-Graal, habituellement
représenté sous la forme du calice (vase sacré), immortalisé dans
les contes de Chrétien de Troyes. Le Prieuré est fortement lié à
l'Ordre du Temple, Hugues de Payns, le fondateur des Templiers
serait également le premier grand maître du Prieuré de Sion. Le
Prieuré existerait toujours, et le mystère qui l'entoure pose bien des
questions. Bien sûr, toutes les thèses de Brown sont à prendre avec
recul, car il s'agit d'un roman. Concernant le Prieuré, sa création
remontrait seulement aux années 50. (Ci-contre : Le dernier repas
du Christ, par Léonard de Vinci. Dan Brown y verrait Marie-
Madeleine à la droite de Jésus, pour d'autres, il s'agit de Saint-
Jean.)
La Cène, par Léonard de Vinci

Les ordres de Chevalerie européens

• L'Ordre du Saint-Sépulcre de Jérusalem (1099)


• L'Ordre Hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, ou, Ordre Souverain de Malte (1113)
• L'Ordre du Temple (1118)
• L'Ordre de Calatrava (1158)
• L'Ordre de Saint-Jacques-de-l'épée (1170)
• L'Ordre d'Alcántara (1177)
• L'Ordre de Saint-Benoît d'Aviz, ou, d'Avis (1187)
• L'Ordre Constantinien de Saint-Georges (1190)
• L'Ordre Teutonique (1198)
• L'Ordre de Saint-Lazare de Jérusalem, et, Notre-Dame du Mont Carmel (avant 1200)
• L'Ordre des Chevaliers Porte-Glaive (1202)
• L'Ordre de Sainte-Marie d'Espagne (1272)
• L'Ordre de Montesa (1317)
• L'Ordre du Christ du Portugal (1319)
• L'Ordre Très Noble de la Jarretière (1348)
• L'Ordre des Chevaliers de la Noble Maison de Saint-Ouen, ou, Chevaliers de l'Etoile
(1351)
• Le Très Honorable Ordre du Bain (1399)
• Le Noble Ordre de la Toison d'Or (1430)
• L'Ordre de l'Eléphant (1462)
• L'Ordre de Saint-Michel (1469)
• L'Ordre de San Stefano (1561)
• L'Ordre des Saint-Maurice-et-Lazare de Savoie (1572)
• L'Ordre du Saint-Esprit (1578)
• Le Bailliage d'Utrecht de l'Ordre Teutonique (1580)
• L'Ordre Très Ancien et Très Noble du Chardon (1687)
• L'Ordre Royal et Militaire de Saint-Louis (1693)
• La Légion d'Honneur (1802)

Source et descriptions : http://lorl.free.fr/ordlist.htm

Les cathares
Introduction
Entre le Xe et XIIe siècle, une mystérieuse « hérésie » fait son apparition dans le Midi de la
France. Bientôt son expansion et sa menace est telle que l'Eglise catholique est contrainte de
mener une guerre à l'éradication de cette religion. Deux croisades seront menées par le
royaume de France, il s'agit surtout pour le roi de France de dominer tout le Languedoc et
l'Aquitaine. La lutte contre les cathares s'achèvera par la chute de la forteresse de Montségur
en 1244.

Le contexte
La civilisation occitane
Au XIIe siècle, le sud-ouest de la France est une région bien différente de celle du nord de la
Loire. On y parle une langue distincte (langue d'oc et non d'oïl) et une civilisation brillante et
raffinée s'y épanouie. Se déplaçant de château en château, les troubadours, poètes et
musiciens, chantent l'amour, mais aussi l'honneur et la négation du droit du plus fort. Ces
idées et ces valeurs sont très présentes dans une région où les gens cultivés, surtout dans les
villes, ont gardé vivant les souvenir de la civilisation romaine. Des règles, des lois et des
codes limitent le pouvoir des grands et régissent les rapports qui les unissent à leurs vassaux
et à leurs sujets. Tandis qu'en Île de France, le roi se bat à cheval et s'impose de diverses
manières à ses vassaux récalcitrants, dans les villes du Midi languedocien et aquitain, les
habitants élisent des consuls ou des capitouls qui gouvernent et parlent d'égal à égal avec les
seigneurs dont ils dépendent. Plus libres, les villes du Midi sont aussi les plus accueillantes
aux idées étrangères : leur importante activité commerciale (Toulouse est la troisième ville
d'Europe) les met en relation avec de nombreux pays. Les commerçants qui y échangent des
denrées et des biens, y puisent des idées qu'ils propagent ensuite vers l'Occitanie.
Les Cathares
chassés de la
ville de
Carcassonne

(Enluminure des Grandes Chroniques de France. British Library, Londres. Photo


D.R.)

L'origine de la religion cathare


C'est dans ce milieu que se répandit une religion nouvelle dont le succès fut si rapide qu'il
effraya l'Église catholique. Cette dernière fut en partie responsable de cet extraordinaire
essor : critiquée de toutes parts et incapable de se réformer, elle prépara le terrain sur lequel le
catharisme put s'enraciner. Bien avant l'apparition de la religion cathare, de nombreux moines
avaient prêché la révolte ouverte contre l'Église, ses prêtres et ses sacrements : l'exigence
entre une plus grande simplicité dans la relation des hommes avec Dieu, d'un retour à une foi
moins prisonnière du cadre luxueux dans lequel l'avait enfermée l'Église, étaient des
revendications très largement répandues à l'époque. Mais le catharisme était bien plus qu'un
mouvement de simple critique; il était aussi et surtout une religion différente du catholicisme
romain. La tradition qui le nourrissait était très ancienne puisqu'elle s'était développé à partir
du VIIe siècle avant J.-C., autour d'un personnage important de l'Antiquité, le prophète perse
Zoroastre. Ce dernier pensait qu'il existait dans l'univers deux principes irréductibles, le Bien
et le Mal, en lutte permanente l'un contre l'autre. Les idées de Zoroastre eurent une influence
considérable pendant toute l'Antiquité et elles furent, dans leurs grandes lignes, reprisent au
IIIe siècle après J.-C. par le prophète Manès, fondateur de la doctrine manichéenne. Au Xe
siècle, en Bulgarie, cette doctrine donna naissance aux bogomiles (De Bogomile, le fondateur
de la secte), qui avaient repris les idées religieuses des conceptions manichéennes. Par la
suite, on a souvent établi un lien de filiation entre le catharisme et le bogomilisme, cependant,
ce lien est aujourd'hui contesté. Si ces deux doctrines sont très proches, il semble que le
catharisme soit directement issu du christianisme et des doctrines marcionistes (de Marcion)
et gnostiques. Le catharisme est en effet le fruit d'un travail scripturaire, proposant une
interprétation différente des évangiles, rejetant notamment tous les sacrements de l'Église
catholique (baptême d'eau, culte des reliques, mariage, etc.).
L'essor de la religion cathare
La religion cathare tire son nom du terme grec catharos, qui signifie pur, car elle donne
comme but à l'homme d'atteindre la pureté parfaite de l'âme. Pendant la durée de sa vie
terrestre, considérée comme une épreuve, l'Homme doit s'efforcer, par une conduite
appropriée, de rompre avec la matière, le monde physique et les besoins grossiers. Pour les
cathares, qu'on appelle aussi albigeois (de la région d'Albi), tout cela représente le Mal auquel
est opposé le Bien, c'est-à-dire l'âme purifiée, ignorant les désirs du corps. Ceux qui
parviennent à purifier leur âme se reposent à jamais dans le Bien après la mort. Les autres
doivent se réincarner indéfiniment. Pour les cathares, la mort n'était pas redoutée car elle
pouvait signifier la délivrance. Ce mépris de la mort leur donna l'énergie nécessaire pour
combattre le roi de France et le pape. Dès 1147, des moines furent envoyés pour redonner la
raison aux albigeois, mais tous échouèrent. La dernière tentative fut celle de Saint Dominique
(fondateur de l'ordre des Dominicains), mais il n'obtint qu'un succès limité. Le pape en vint
progressivement à penser qu'il fallait mener contre eux une guerre sainte. La rupture entre
cathares et catholiques fut totale en 1208 lorsque le légat du pape fut assassiné.
Croyants et Parfaits

Les cathares et ceux qu'on appelait « Parfaits » ou «


Bonshommes », qui jouaient en quelque sorte le rôle de
prêtres, devaient observer des règles très strictes. Ils étaient
astreints à jeûner fréquemment, et une série d'aliments leur
étaient défendus en temps ordinaire. Ils ne construisaient pas
de temples, ils priaient et prêchaient n'importe où, chaque
fois que la possibilité s'en offrait. Ils rejetaient tous les
sacrements à l'exception du Consolamentum. Elle concernait
les croyants désireux de devenir Parfaits (sorte de baptême).
Le croyant s'engageait à respecter les règles propre aux
Parfaits : ne plus mentir, ni jurer, ne plus avoir de relations
sexuelles, régime alimentaire très strict... Recevant l'accolade
de ses initiateurs, qui s'agenouillaient ensuite devant lui, le
nouveau Parfait était censé sentir descendre sur lui l'Esprit
saint. Tant qu'ils purent afficher librement leurs opinions, les
cathares s'habillaient de préférence en noir. Après la
répression, ils se contentaient de dissimuler une ceinture noir
sous leurs vêtements ordinaires.

La lutte contre les cathares


La première croisade contre les albigeois (1209 - 1218)
L'assassinat de son légat amena le pape à lever une croisade contre les hérétiques. Le roi de
France, Philippe Auguste, répondit à l'appel et laissa à ses plus puissants vassaux, le duc de
Bourgogne, les comtes de Montfort et de Saint-Pol prendre la tête de l'armée. Ce sont 300 000
croisés qui descendirent dans la vallée du Rhône. Le comte de Toulouse, Raymond VI,
soupçonné d'avoir encouragé le meurtre du légat, s'était rallié à l'Église et s'était croisé contre
ses propres sujets. L'armée des croisés mit le siège sur la ville de Béziers, une ville solidement
fortifiée. Cependant les habitants, forts de ce sentiment de sécurité, assaillirent les
campements qui se tenaient aux pieds des murailles. Les ribauds (mercenaires et chevaliers
recrutés pour l'expédition) profitèrent que les portes des remparts étaient ouvertes pour se
frayer un chemin à l'intérieur de la cité et pour y faire pénétrer ensuite une partie de l'armée.
Aux soldats qui se demandaient comment faire pour distinguer, dans la population, ceux qui
étaient hérétiques de ceux qui étaient fidèles, l'abbé de Cîteaux, Arnaud Alméric, répondit par
cette phrase terrible : « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens! » La mise à feu du
Languedoc commença : la ville fut incendiée et ses habitants, massacrés. Après Béziers, ce fut
le tour de Carcassonne où l'armée s'annonça à la fin du mois de juillet 1209. L'âme de la
résistance de la ville fut le jeune vicomte Roger de Trencavel. Le siège dura trois semaines,
les assiégeants avaient privé la ville d'eau, obligeant les assiégés à parlementer. Trencavel qui
était venu parlementer fut mis prisonnier par les croisés, rompant ainsi le code d'honneur de la
chevalerie. Simon de Montfort, un chevalier croisé dont le courage avait été remarqué, fut
choisi pour succéder aux biens de Trencavel. Cependant, ses sujets lui étaient naturellement
hostiles. Aussi, jusqu'à sa mort, en 1218, il fut constamment en guerre contre ses sujets
récalcitrants.

Simon de Montfort, vainqueur et vaincu


A l'issue de ces sièges longs et éprouvants, les croisés victorieux offraient la vie sauve aux
hérétiques acceptant de renier leur foi, mais ils étaient bien peu. Par le fer, le feu et le sang, la
croisade continuait, mais l'enjeu devenait chaque jour plus clair, il s'agissait pour les seigneurs
du Nord de maîtriser le Midi. Le comte de Toulouse et le roi d'Aragon finirent par s'en
inquiéter et, en 1213, ils unirent leurs forces pour attaquer Simon de Montfort au château de
Muret. L'assaut tourna court malgré l'avantage numérique, Pierre d'Aragon fut tué, et
Raymond VI dut se replier dans sa ville de Toulouse qui fut par la suite investie par l'armée de
Simon de Montfort. Mais le peuple gardait une fidélité profonde et préférait aller au bûcher en
chantant plutôt que de renier leur foi. Lorsque Raymond VI et son fils Raymond VII revinrent
d'Angleterre où ils s'étaient réfugiés, ils furent accueillis avec beaucoup d'enthousiasme. Une
émeute populaire avait chassés les chevaliers français de la ville de Toulouse. A cette
nouvelle, Montfort accourut aussitôt pour mettre le siège dans la ville, c'est là qu'il fut tué en
1218. Sa mort fut accueillie par des cris de joie : les cathares voyaient disparaître le plus cruel
de leurs ennemis.
Simon de Montfort

Chef de la croisade contre les


albigeois, il mena cette guerre avec
courage et cruauté. Il s'était déjà
illustré pour sa bravoure au cours de
la quatrième croisade. Il représente le
« puritanisme du nord ». Il est le
parfait opposé de son ennemi, le
comte Raymond VI de Toulouse,
symbole du « méridional libertin ».
Ils sont le modèle du choc des deux
cultures en présence.

La seconde croisade contre les albigeois (1226)


En 1224, de nouvelles menaces se précisèrent sur le pays occitan. Le nouveau roi Louis VIII
va se montrer plus implacable encore que son père Philippe Auguste. En 1226, alors que les
seigneurs et comtes du Midi se voyaient réinstaller sur leurs terres, une seconde armée croisée
allait déferler sur le Languedoc, avec le roi de France en personne à sa tête. La plupart des
villes s'effondrèrent ou se soumirent assez facilement. Seul Avignon opposa une âpre
résistance de trois mois. La mort de Louis VIII sauva Toulouse d'un nouveau siège, mais les
redditions successives de ses vassaux finirent par convaincre Raymond VII qu'il valait mieux
capituler. Par le traité de Meaux, signé en 1229, le comte de Toulouse s'engagea à demeurer
fidèle au roi et à l'Eglise catholique, à mener une guerre intraitable contre les hérétiques et à
marier sa fille unique au frère du nouveau roi de France, Louis IX, afin de préparer le
rattachement du Languedoc à la France. Après la signature du traité et le retour de Raymond
VII à Toulouse, le tribunal d'Inquisition fut créé et confié à une poignée de dominicains.
Jouissant d'un pouvoir sans limites, les inquisiteurs sillonnèrent le Midi pour débusquer les
hérétiques. Mais ces mesures ne suffirent pas à étouffer l'aspiration du Midi à croire et à
gouverner comme il l'entendait. Une seconde révolte secoua la région après l'assassinat, en
1242, des juges du tribunal de l'Inquisition par des chevaliers cathares.

Bataille de
Muret

La bataille de
Muret, le 12
septembre
1213 fut un
tournant dans
la lutte pour le
Midi occitan, à
l'avantage de
l'armée royale.

(Bibliotheque Nationale de France)

La prise du château de Montségur


Une paix définitive fut signée à Lorris en 1243 entre le roi de France et le comte de Toulouse.
C'était la fin de l'Occitanie indépendante et surtout du catharisme. Pour leur porter le coup de
grâce, il fallut cependant prendre la forteresse de Montségur, symbole du refus de l'autorité
royale, où s'était réfugiés 400 croyants de la religion cathare. La position de la forteresse (un
pic dominant de plus de cent mètres des terres voisines) donnait un sentiment de confiance
immense aux assiégés. Durant une année, ils défièrent avec succès l'autorité du roi et du pape.
Les 10 000 soldats engagés dans le siège ne pouvaient que constater l'inefficacité des boulets
que catapultaient les pierrières contre les remparts. Cependant, une nuit de juillet 1244, grâce
au renfort d'un groupe de montagnards habitués à l'escalade et connaissant parfaitement les
lieux, les assiégeants réussirent à pénétrer dans la place par surprise et parvinrent à obtenir sa
capitulation complète. Ne disposant plus d'aucun refuge sûr, pourchassés par les inquisiteurs,
les derniers cathares vécurent comme des bêtes traquées, suscitant parfois de brèves révoltes.
Les Parfaits survivants émigrèrent en Catalogne, en Sicile et en Lombardie. Ainsi
disparaissait la culture la plus raffinée de l'époque : la civilisation occitane issue du mythe de
la chevalerie, de l'honneur chevaleresque et de l'amour-courtois, honorée par les troubadours.
Montségur, forteresse imprenable

Montségur n'était pas un château


comme les autres. Les architectes
qui le construisirent eurent le souci
d'édifier une bâtisse aisément
défendable. Mais ils eurent
également la volonté de construire
un véritable temple de la religion
cathare. Ainsi, l'orientation de
l'édifice n'était pas simplement due
au hasard : ses principaux axes se
situaient dans l'alignement des
points qui signalaient à l'horizon les
endroits où se lève et se couche le
Soleil à certaines époques de
l'année (équinoxes et solstices). Le
Soleil tenait un rôle important en
tant que symbole de la Lumière et
du Bien dans la religion cathare.
Montségur est devenu aujourd'hui
un symbole de la renaissance
occitane.

Le trésor des cathares

Après la chute de Montségur, de nombreux cathares émigrèrent en Italie. C'est là qu'ils ont
sans doute transférer leur trésor. Il s'agit peut être du vieux trésor wisigoth d'Alaric, caché
dans les environs de Carcassonne. Cependant, au début du XXe siècle, près de Rennes-le-
Château, l'abbé Béranger Saunière fait des dépenses exubérantes sans que l'on sache d'où
venait sa fortune. Une chose est sûr ce curé a trouvé un trésor. Pourrait-il s'agir du trésor des
cathares ? N'oublions pas que lors du siège de Montségur, une poignée d'assiégés s'enfuirent
du château pour une destination mystérieuse.

La menace Plantagenêt

(1137 - 1223)

Philippe Auguste, le rassembleur


Introduction
Après avoir consolidé son autorité au sein du territoire, la faible dynastie capétienne devait
faire face à son plus puissant vassal : le roi d'Angleterre. C'est une première guerre de Cent
Ans qui s'annonce. Mais à l'issu de ce premier bras de fer entre la France et l'Angleterre, le
génie et la fougue de Philippe Auguste fera de la dynastie capétienne, une puissance forte et
incontournable en Europe.

Louis VII le Jeune


Le règne de Louis VII le Jeune
Ce fils de Louis VI qui, en 1137, accède au pouvoir à l'âge de 16 ans, était un homme
extrêmement religieux que sa femme, Aliénor d'Aquitaine, le surnomma « le moine ». Il
démontra sa foi en participant activement à la deuxième croisade et en s'affirmant tout au long
de sa vie comme le protecteur de l'Église. Mais il n'oublia pas pour autant les intérêts de la
dynastie capétienne. En prenant systématiquement le parti de l'Église contre les seigneurs
abusifs, il réussit à affermir son autorité dans tout le royaume et même à agrandir le domaine
en direction de la Bourgogne et de l'Auvergne. Comme ses prédécesseurs, Louis VII a
contribué à l'affaiblissement du pouvoir féodal. La France s'enrichit sous son règne,
l'agriculture se transforme et gagne en productivité, la population augmente, le commerce et
l'industrie se développent, une véritable renaissance intellectuelle apparaît, et le territoire se
couve de châteaux forts construits en pierre. Enfin, malgré son peu de goût pour la guerre et
malgré la puissance de son adversaire, il parvint à tenir tête au roi d'Angleterre, Henri II.

Louis
VII le
Jeune

(Bibliothèque Nationale de France)

Suger, abbé de Saint-Denis


Dans l'entourage de Louis VI comme de Louis VII se trouvait un moine qui joua un rôle de
premier plan et qui assura une sorte de trait d'union entre les deux règnes. Issu d'une famille
pauvre, il fut confié très jeune aux moines de l'abbaye Saint-Denis, au nord de Paris, où il fut
élevé en compagnie du futur roi Louis VI. Lorsque celui-ci monte sur le trône, Suger devint
un familier du palais royal. Le roi chargea son ami de missions très importantes auprès du
pape à Rome et le fit élire, en 1122, abbé de Saint-Denis, qui était alors l'une des lus grandes
abbayes du royaume. Suger dirigea l'éducation du dauphin Louis. Quand celui-ci, devenu le
roi Louis VII, partit pour la croisade, entre 1147 et 1149, il fut nommé régent du royaume.
Jusqu'à sa mort, il œuvra au renforcement du pouvoir royal et à l'amélioration de la justice. Il
conseilla aux deux souverains qu'il servit de s'appuyer sur les habitants, ou bourgeois des
villes, contre les féodaux pillards et indisciplinés. Aux villes qui le demandaient furent ainsi
accordées des chartes, où étaient consignés les droits concédés par le roi : la faculté de rendre
la justice, de s'armer, de lever des impôts... C'est le début des communes. Vers la fin de sa vie,
il écrivit la vie des deux rois et surtout se consacra à la reconstruction de l'église de Saint-
Denis.
La naissance de l'art gothique

En 1144, l'abbé Suger inaugure le nouveau chœur de


l'église abbatiale de Saint-Denis. Il voulait en effet
rendre son abbaye digne des reliques qu'elle abritait,
digne aussi de conserver les tombeaux des rois de
France qui, depuis Dagobert, s'y faisait inhumer. Aussi
fit-il appel à un architecte qui était partisan de
techniques tout à fait nouvelles. La nouveauté des
églises gothiques réside en la découverte de la croisée
d'ogive (deux arcs se croisant à la clef de voûte). Ce
procédé plus résistant permit d'élever la structure en
hauteur et d'alléger le toit, afin de libérer aux fenêtres
des surfaces considérables. Plus tard, lorsque la
reconstruction de Saint-Denis fut achevée, Suger,
légitimement fier de son œuvre, fit graver au bas d'un
vitrail : « Moi-même, Suger, en ai dirigé les travaux ».

La deuxième croisade (1147 - 1149)


En 1144, les musulmans reprirent le comté d'Edesse (l'un des quatre états d'Orient fondé par
les croisés). Le pape ordonna alors de former une nouvelle croisade. Elle fut prêchée par
Bernard de Clairvaux, à l'assemblée de Vézelay (Bourgogne), en 1146. L'expédition fut
conduite par le roi de France Louis VII et l'empereur germanique Conrad III. Les désaccords
entre les chefs, le manque d'organisation et les erreurs militaires entraînèrent une série de
revers des forces croisées. Après que ses troupes eurent été décimées à Dorylée, Conrad rentra
en Allemagne. Louis VII, quant à lui était peu expérimenté pour mener la guerre, et il se
heurtait bien souvent à la perfidie des byzantins. Les survivants rejoignirent Jérusalem, puis
déclenchèrent une attaque contre Damas, sans pouvoir s'emparer de cette ville. La nouvelle de
l'arrivée de renforts musulmans contraignit les chrétiens à lever le camp et à rentrer sans
gloire en Europe. En deux années seulement, le prestige des armées croisées était tombé si bas
que l'on pouvait penser que plus personne ne voudrait reprendre les armes.
Louis VII partant pour
la Seconde Croisade

Louis VII tient son


surnom de "Jeune", car
il était le fils cadet de
Louis VI le Gros. Elevé
par Suger à l'abbaye de
Saint-Denis, il a gardé
l'empreinte monastique
et le peu de goût pour
les armes.

Aliénor d'Aquitaine
Une des dernières mesures décidées par Louis VI le Gros, quinze jours avant sa mort, en
1137, fut de marier son fils avec l'héritière du riche duché d'Aquitaine, la belle Aliénor. En
devenant la femme de Louis VII, elle permettait au roi de France de pénétrer dans une région
où l'autorité royale était restée jusque-là purement théorique. A peine la dépouille de son père
avait-elle été conduite à Saint-Denis que Louis VII se rendait à Poitiers pour se faire
couronner duc d'Aquitaine. Ce mariage était un véritable coup de maître de la diplomatie de
Suger. La dot de la jeune mariée permit de tripler le domaine royal, il y avait alors une partie
du Midi et de l'Ouest de la France, soit 19 des départements actuels. La nouvelle reine
apportait en héritage non seulement le duché de son père, mais aussi un peu de cette
civilisation de la Guyenne, plus raffinée et plus brillante que celle du nord de la France. Ainsi,
Aliénor aimait la musique, les fêtes et les chansons des troubadours, ces chanteurs-poètes qui
allaient de château en château en célébrant la beauté des gentes dames. A l'inverse, Louis VII
était timide, réservé et très pieux, ce qui s'accordait mal avec le caractère fort et sensuel d'
Aliénor. Cette différence de caractère, de culture, s'ajoutant au fait qu'Aliénor ne parvenait pas
à donner au roi l'héritier qu'il espérait. Cependant les dix premières années semblent se passer
sans réelle mésentente.
Aliénor d'Aquitaine

"La grand-mère de l'Europe" comme on l'appelle


aussi est également une femme distinguée et
cultivée. Elle est à l'origine du premier code
maritime de l'humanité. Ce code est connu sous le
titre de "rôle et lois d'Oléron" et il régit les règles
de navigation. Elle fit huit enfants à Henri II
Plantagenêt, puis elle se retira à Poitiers à cause
des infidélités de son mari. Tout en étant
exceptionnelle, la vie d' Aliénor témoigne du
comportement très libre des femmes au Moyen
Âge, du moins dans les classes supérieures. Elle
entretenait et répandait la culture occitane des
troubadours et de l'amour courtois. Aliénor est
aussi la grand-mère de Blanche de Castille, la
mère de Saint-Louis.

Aliénor, reine d'Angleterre


Le conflit avec la France et l'Angleterre avait commencé après l'invasion du pays par le duc
de Normandie, Guillaume le Conquérant. Le riche duc, qui était le vassal du roi de France
était alors roi d'Angleterre et l'un des hommes les plus puissants d'Europe. Sous son influence,
le pays prospéra et se modernisa. En 1128, le comte d'Anjou, Geoffroy Plantagenêt (dû à son
habitude de porter une branche de genêt à son casque) épouse Mathilde d'Angleterre, la
descendante des rois normands qui possédait le duché de Normandie. Ainsi, leur fils Henri
possédait le double héritage de ses parents. Pendant ce temps, le roi de France Louis VII est
appelé à participer à la deuxième croisade, son épouse Aliénor d'Aquitaine l'accompagne
alors. Les deux années qui suivirent détériora les relations du couple. Aliénor tenta en vain de
convaincre son mari d'aider son oncle Raymond de Poitiers, qui siégeait à Antioche.
Désappointée, elle se vengea par une conduite déshonorante et trompa le roi avec un
musulman. Cette conduite déchaîna les chroniqueurs de l'époque : Guillaume de Tyr l'accusa
même d'un inceste avec son propre oncle. A son retour, Louis présenta un rapport de
consanguinité au 5ème degré avec Aliénor, qui lui permit d'annuler le mariage en 1152. Deux
mois après sa répudiation, Aliénor épouse Henri II Plantagenêt qui devient roi d'Angleterre en
1154. Henri possède alors le trône d'Angleterre mais également la moitié de la France avec les
possessions en Anjou et en Normandie de ses parents, mais aussi celles d'Aquitaine apportées
par Aliénor. Cette grave faute politique est le début d'une rivalité continuelle entre la France
et l'Angleterre. Pourtant le rapport de force entre le puissant roi d'Angleterre et le roi capétien
paraît démesuré. Mais Louis VII peut s'appuyer sur l'Église, et sur le despotisme d'Henri II qui
pousse ses vassaux et ses fils à se révolter contre lui.
Possessions des rois d'Angleterre et de France

Philippe II Auguste
L'avènement de Philippe II Auguste
Après la répudiation d' Aliénor, Louis VII épousa successivement Constance de Castille et
Adèle de Champagne. Cette dernière lui donne un unique héritier mâle : Philippe. En 1179, il
le fait sacrer roi à Reims, et épuisé par la maladie, lui abandonne le pouvoir. Louis meurt en
1180 juste après avoir signé le traité de Gisors avec Henri II d'Angleterre. Philippe II n'est
alors âgé que de 15 ans. Il était alors marié avec Isabelle de Hainaut, une descendante de
Charlemagne. La dynastie carolingienne, si elle a cessé de régner est encore présente dans le
cœur des Français qui l'appelle "la race des grands rois". Les cinq premières années de son
règne, Philippe réussit à triompher de ses encombrants protecteurs, les comtes de Flandre et
de Champagne, et à agrandir le domaine royal. Mais la grande affaire du règne fut bien sûr la
lutte avec les Plantagenets. Louis VII, conscient de ses faiblesses militaires et de la puissance
de son adversaire avait préféré la ruse au combat ouvert. Il avait soutenu la Bretagne et le
Poitou contre le roi anglais, et surtout, il avait aidé les fils d'Henri qui réclamaient une part
d'héritage du vivant même de leur père. Ainsi Louis VII réussit-il peu à peu à user la force de
son rival. Son fils, Philippe, choisira une voie différente, en cherchant l'affrontement sur le
champ de bataille. Mais lorsque le grand Richard Cœur de Lion succéda à son père en 1189,
Philippe se trouva face à un redoutable adversaire. Il accepta cependant de prendre avec lui la
tête d'une croisade en Palestine.
Le sacre de
Philippe II

Philippe
Auguste est le
premier roi à
se donner
officiellement
le titre de roi
de France.

La troisième croisade (1189 - 1192)


Quarante années passèrent, pendant lesquelles chrétiens et musulmans vécurent souvent en
bon voisinage. Beaucoup d'anciens croisés avaient épousé des femmes arabes et avaient
adopté nombre de coutumes orientales. Les échanges commerciaux étaient très intenses entre
les ports du Levant et ceux des côtes italiennes. Le plus important des personnages du monde
musulman était alors le sultan d'Egypte, Salâh al-Dîn, dit Saladin, qui avait étendu sa
domination sur une grande partie du Levant et établi de bons rapports avec les chrétiens. Mais
la violation de ce statu quo par quelques seigneurs fanatiques ramena la guerre dans la région.
Saladin battit les chrétiens à la bataille d'Attîn et entra en vainqueur à Jérusalem en 1187. La
prise de la ville entraîna l'appel à la troisième croisade. Elle fut appelée la « croisade des rois
» parce qu'à sa tête se trouvaient les souverains les plus prestigieux d'Occident : l'empereur
Frédéric Barberousse, le roi de France Philippe Auguste et le roi d'Angleterre Richard Cœur
de Lion. Les armées réunies étaient très importantes. Mais à peine arrivé en Asie Mineure,
Frédéric Barberousse se noya pour avoir traversé une rivière avec son armure. Les deux
souverains survivants reprirent la ville de Saint-Jean d'Acre. Puis les événements prirent une
autre tournure. Le roi de France n'avait qu'une seule hâte : retourner dans sa patrie et profiter
de l'absence de Richard pour mettre la main sur les possessions françaises de ce dernier. Resté
seul, le roi anglais accomplit des prodiges, mais il n'est plus en mesure de battre Saladin.
Aussi conclut-il, en 1192, une trêve avec son valeureux adversaire. L'accord stipulait que
Jérusalem restait aux mains des musulmans, qui s'engageaient en retour à protéger les pèlerins
chrétiens se rendant dans la ville Sainte. De plus, les Francs conservaient les ports du Levant,
ainsi que Chypre.
Siège de Saint-Jean d'Acre

Cette croisade est certainement


l'une des plus célèbres. Le grand
sultan Saladin était très respecté des
chrétiens qui le considéraient
comme le « reflet immaculé de la
Chevalerie ». Face à lui, Richard
Cœur de Lion, un redoutable
guerrier, très endurant au combat.
Le roi anglais a été immortalisé par
les aventures de Robin des Bois.

(Bibliothèque Nationale de France)

La lutte contre le Lion


La raison officielle du départ de Philippe Auguste de la troisième croisade était sa santé.
Après la prise de Saint-Jean d'Acre, le roi tomba malade d'une sort de typhoïde (il planait
alors une rumeur d'empoisonnement par les Anglais). Mais ce départ anticipé n'était pas pour
déplaire les ambitions de Philippe. Une fois rentré, le roi capétien profite de l'absence de son
rival pour occuper le Vexin normand. Richard Cœur de Lion décide alors de rentrer pour
défendre sa terre. Mais il est capturé et fait prisonnier de 1192 à 1193, par l'empereur
germanique Henri VI, fils de Frédéric Barberousse. Cependant une fois libre, Richard inflige
une série de défaites au roi de France. Philippe manque même de tomber dans une embuscade
près de la forêt de Fréteval où il perdit son trésor et les archives de la couronne. Mais il
démontra sa grande valeur notamment à Gisors, où à la tête d'un régiment de cavalerie,
Philippe se trouva face à toute l'armée anglaise, le roi charge à la tête de ses troupes et
manque de se tuer, il aurait déclarer « Non, je ne fuirais pas devant mon vassal ». Le conflit
s'enlisa et s'équilibra, la guerre contre Richard fut marqué par de réelles atrocités, le pape
intervint à multiples reprises en tant que médiateur. Ce n'est qu'après la disparition de
Richard, mortellement blessé devant le château de Chalus en 1199, que Philippe put réaliser
son ambition de reconquête.

Philippe Auguste, le rassembleur


A la mort de Richard, Philippe profita des erreurs commises par le frère cadet de celui-ci :
Jean Sans Terre (ainsi appelée car il n'avait reçu aucun domaine). Le roi de France parvient
même à le faire condamner par une cour de grands seigneurs du royaume : celle-ci décida que
tous les fiefs des Plantagenets en France devenaient être confisqués. La prise de la forteresse
anglaise de Château-Gaillard, véritable point stratégique, permet le rattachement de la
Normandie et la Bretagne. Philippe put ainsi occuper en 1204, la Normandie, l'Anjou, le
Maine, la Touraine et le Poitou. Jean Sans Terre n'eut de cesse de récupérer ses biens. Il
parvient même à former une coalition très dangereuse, unissant contre le roi de France,
l'empereur d'Allemagne et le comte de Flandre. Mais Philippe devança ses ennemis et battit
successivement l'armée anglaise à La Roche-aux-Moines et celle de ses alliés à Bouvines. Ce
succès lui permit de priver définitivement les Plantagenets de leurs possessions continentales,
à l'exception toutefois de l'Aquitaine. Dans l'Europe entière, Bouvines auréola la monarchie
française d'un prestige nouveau. Tellement occupé, Philippe ne peut participer aux quatrièmes
et cinquièmes croisades qui sont des désastres. Sur sa lancée, Philippe agrandit encore le
domaine royal en y adjoignant l'Auvergne, l'Artois, le comté d'Evreux, tandis que son fils
Louis traversait la Manche, occupait Londres et tout l'Est de l'Angleterre sans coup férir. La
mort de Jean Sans Terre, survenue sur ces entrefaites sauva la monarchie anglaise, les barons
anglais se ralliant à leur nouveau roi, le jeune Henri III. Malgré cet échec, Philippe mérita
pleinement son surnom d'Auguste, du latin augeo, « celui qui augmente ».

La prise de Château-Gaillard

La forteresse est construite par Richard Cœur de Lion en un an


seulement : "Qu'elle est belle ma fille d'un an". Le roi anglais s'est pour
cela inspiré des châteaux syriens qu'il a vu au cours de la troisième
croisade (Kraks de Terre-Sainte). Au bout de sept mois de siège, les
Français provoquent l'écroulement d'une tour grâce à un ingénieux
travail de sape (galerie souterraine). Les anglo-normands se regroupent
alors dans la 1ère enceinte du château. Mais les soldats français
parviennent à y pénétrer en passant ... par la fenêtre des latrines. C'est
avec l'appui d'une catapulte que les Français vont parvenir à s'emparer
de la 2ème enceinte. Les assiégés seront pris avant d'avoir le temps de se
réfugier dans le donjon.

Bouvines - 27 juillet 1214

Après la défaite de Jean Sans Terre à La Roche-aux-Moines, Philippe Auguste décida


d'affronter l'empereur d'Allemagne Othon et le comte de Flandre. La rencontre des deux
armées eut lieu en juillet 1215 sur le plateau de Bouvines, entre Valenciennes et Lille. Au
cours d'une mêlée confuse, le roi de France est désarçonné et manque d'être capturé par les
Flamands. Il ne doit son salut qu'à l'intervention de quelques chevaliers. L'empereur, à son
tour, est assailli et s'enfuit en abandonnant son étendard. Mais la fureur française eut raison
des fantassins teutoniques. Lorsque la nuit tomba, l'armée impériale était en pleine retraite.
Philippe fit alors sonner les trompettes pour rappeler ses troupes, « qui rentrèrent au camp
avec une grande joie ». Malgré sa confusion, la bataille de Bouvines fut une victoire
incontestable dont le retentissement fut énorme dans le royaume et dans tout l'Occident. Le
retour de l'armée fut triomphal. Dans les villages, les cloches sonnaient. On tendait des
tapisseries sur les façades. A Paris, les bourgeois, les étudiants et le clergé se portèrent au-
devant du roi en chantant des hymnes. Durant sept jours et sept nuits, on dansa dans les rues
de la cité. Pour la première fois, le peuple ressentait comme sienne une victoire remportée par
le roi et son armée.

La
bataille
de
Bouvine
s

La bataille de Bouvines, par Horace VERNET (Château de Versailles)

Le royaume le plus riche d'Occident


Philippe Auguste ne passa pas sa vie à batailler. Il organisa l'administration du royaume en
créant un corps de fonctionnaires chargés de faire appliquer ses ordres : les baillis ou
sénéchaux. Il institua ainsi une administration forte et centralisée. Il lève l'impôt avec zèle
auprès des seigneurs et du clergé afin de mener ses campagnes (la dîme saladine avait été crée
pour financer la troisième croisade). Il organise la Justice autour de Parlement, et limite le
pouvoir des seigneurs, en attribuant des responsabilités de haut-niveau à la bourgeoisie des
villes, classe ambitieuse et efficace. Il veilla à l'embellissement de sa capitale, qu'il fit
entourer d'une nouvelle enceinte : commencée en 1190, celle-ci fut achevée à la veille de
Bouvines. Il protégea l'université, à laquelle il accorda en 1215 des statuts officiels, et fit
construire une nouvelle résidence royale au Louvre. Philippe est un protecteur des arts et des
lettres, c'est l'un des hommes les plus instruit de son temps. Poursuivant la politique de ses
prédécesseurs, il s'appuya sur les bourgeois des villes contre les féodaux, contribuant ainsi à
l'essor du commerce. A sa mort en 1223, la France était devenue le plus puissant royaume de
l'Occident chrétien. Marié trois fois, Philippe est le père d'un unique fils issu de son premier
mariage avec Isabelle de Hainaut. Ce dernier lui succède sous le nom de Louis VIII.

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