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Les Annales de la recherche

urbaine

Urbanisation, structures foncières et mutations sociales dans le


pays niçois
Jean-Paul Guichard

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Guichard Jean-Paul. Urbanisation, structures foncières et mutations sociales dans le pays niçois. In: Les Annales de la
recherche urbaine, N°10-11, 1981. Territoires. Sociétés locales. Paysages. La question foncière et l'espace rurale. pp. 109-
123;

doi : https://doi.org/10.3406/aru.1981.1006

https://www.persee.fr/doc/aru_0180-930x_1981_num_10_1_1006

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Urbanisation, structures foncières

et mutations sociales

dans le pays niçois

Jean-Paul Guichard, Christian Séguret

estDans
développement
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profondément
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mettent
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qui
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formes
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Provence,
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spécialement
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leCes
milieu
transfor¬
par
rural
pour
le

La grande promotion immobilière et les grandes entreprises du bâtiment et


des travaux publics (B T P), d'une part, l'artisanat local du bâtiment, d'autre
part, entretiennent, par exemple, des rapports complexes de complémentarité
et d'opposition pour la mise en valeur immobilière de l'espace rural. Ces rap¬
ports s'expriment encore, sous une autre forme, dans les relations menées
entre l'Etat (l'administration) et les communes pour l'élaboration des documents
d'urbanisme. C'est de ces rapports, à la fois économiques et politiques, centrés
sur des enjeux fonciers, qu'il va être question dans ce qui suit.

Les Annales de la recherche urbaine, n° 10/11 109


urbanisation dans le pays niçois

1. La « mise en valeur immobilière » de l'espace

rural,
modalités
est
opérations
articulées.
duelles
ainsi,
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caractère
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de
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Le
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Le développement résidentiel s'adapte


à l'espace préexistant

desL'espace
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à l'espace
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redéfinies.
» agricole,
(amenées
deIlle
lad'eau,
s'agit
long
part

Etant donné qu'il s'agit d'un développement résidentiel à caractère touris¬


tique, la forme privilégiée, quoique non exclusive, qui lui correspond est le
lotissement ; il s'agit donc d'une mise en valeur immobilière de l'espace,
« légère » en ce sens que les opérations réalisées s'adaptent aux contraintes
qu'impose l'organisation préexistante de l'espace (équipements, réseaux, etc.).
Ces opérations immobilières ou de lotissement sont le moyen de valoriser un

110
« mise en valeur mobilière » de l'espace

capital promotionnel dans un cadre « spéculatif », puisqu'une bonne partie des


profits provient de plus-values foncières ; elles permettent ainsi de faire fonc¬
tionner de petites entreprises locales de construction. Elles sont menées aussi
bien par le capital « extérieur » que par les milieux d'affaires locaux ; toutefois,
dans tous les cas, ces derniers doivent intervenir (ne serait-ce que pour assurer
la fourniture des terrains qu'il faut au préalable se procurer auprès de la
paysannerie).
Un tel mode de développement immobilier trouve des limites : il opère un
« écrémage » des sites les plus intéressants, de sorte que les terrains susceptibles
d'être lotis (et dont les coûts de viabilisation sont faibles) deviennent de plus en
plus rares. De plus, les réserves foncières faites par la bourgeoisie locale
concernent le plus souvent de vastes étendues de terrains situés à l'écart des
réseaux existants : ces réseaux sont en effet adaptés à la mise en valeur agricole
de l'espace dans le cadre de la petite exploitation paysanne et, de façon géné¬
rale, concernent donc davantage la propriété paysanne que la propriété bour¬
geoise \
Ainsi, pour satisfaire ses besoins en terrains équipés ou facilement équipables,
la promotion immobilière se heurte à la résistance de la propriété paysanne.
Cette raréfaction des terrains va de pair avec un accroissement de leurs prix 2.
L'accroissement du montant du capital avancé pour les achats de terrains oblige
le promoteur à utiliser les terrains plus intensivement : les exigences de renta¬
bilité obligent donc à passer d'opérations de lotissement, où l'aspect foncier
est dominant, à des opérations beaucoup plus immobilières où c'est, au
contraire, le capital investi dans la construction qui est le plus important ;
paradoxalement, l'accroissement de la charge foncière conduit à des réalisations
immobilières à caractère plus « productif » que spéculatif.
L'extension des lotissements, d'une part, la densification de l'usage résidentiel
des sols, d'autre part, conduisent à surcharger les réseaux existants, ce qui peut
comporter de nombreux inconvénients.

agricole
c'est-à-dire
1. Il nepaysanne
s'agit
dans pas
lesrésiste
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d'une
le bien
mieux
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doit
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d'exploitation
existants.
remarquerRéciproquement,
sont
que les
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meilleures,
la

propriété bourgeoise est souvent constituée par d'anciennes terres incultes, relativement
mal desservies par ces réseaux, ou bien, ce qui revient au même, par des terres abandon¬
nées par la paysannerie et qui étaient précisément les moins bonnes.
2. En dépit des apparences, il ne s'agit pas ici d'une thèse d'inspiration néo-classiquot
(où le prix du sol résulterait de sa rareté). L'accroissement des prix des sols peut résulter :
a) du fait que la viabilisation des nouveaux terrains se fait de plus en plus coûteuse ;
b) ou bien du fait que les dernières exploitations agricoles à devoir céder la place à
l'urbanisation sont aussi celles qui étaient les plus rentables : le coût de leur éviction est
donc de plus en plus élevé.
111
urbanisation dans le pays niçois

Le développement résidentiel conduit à une restructuration


de Vespace préexistant

constituent
est
routes...),
cette
des
àespaces.
aussi
Lafacilitée
l'espace
raisons
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et implique,
déjà
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nouveaux
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qui
fait

L'existence, sur ces espaces nouvellement mis en valeur, de grandes proprié¬


tés appartenant à la bourgeoisie locale facilite d'ailleurs la réalisation d'opé¬
rations de grandes dimensions. En résumé, la mise en valeur immobilière de
ces espaces n'est possible que si elle se fait dans le cadre de grandes opérations,
en même temps que ce genre d'opérations est facilité par les caractères de la
propriété foncière sur ces espaces ; de plus, seuls les capitaux importants sont
en mesure de réaliser ces opérations. C'est ici qu'intervient le mécanisme de
la rente foncière pour inciter la grande promotion immobilière à investir ; les
terrains facilement viabilisables voient leurs prix, on l'a vu, augmenter très
rapidement, alors même que les prix fonciers des grandes propriétés — jusque-là
situées en dehors du processus de mise en valeur immobilière — restent stables.
A partir d'un certain seuil, ces grandes propriétés constituent alors des oppor¬
tunités intéressantes pour la grande promotion immobilière : celle-ci est, en
effet, en mesure de réaliser de grands travaux et peut, par conséquent, procéder
à la mise en valeur des terrains correspondants ; les opérations qu'elle réalise
alors n'ont pas de caractère « spéculatif », dans la mesure où le capital avancé
terrains.
dans les travaux est bien plus important que celui qui est avancé pour les

U articulation entre le capital extérieur


et la petite promotion immobilière locale

marque-t-elle
grande
fait,
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espaces
toute
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opérations
maîtrise
la petite
de
? La
ce;

112
« mise en valeur mobilière # de l'espace

promotion immobilière locale, qui sera à même de les mettre en valeur : la


petite promotion est ainsi reproduite par le capital extérieur. Dans les espaces
déjà viabilisés, la hausse des prix fonciers provoque la densification de l'occupa¬
tion résidentielle des sols et la réalisation d'opérations immobilières où la
construction est l'élément prédominant : cela favorise l'intervention de la grande
promotion. La petite promotion immobilière locale, par contre, est gênée par
l'ampleur du financement que requièrent ces opérations : elle doit recourir
davantage aux banques pour financer les opérations qu'elle réalise, passant
ainsi progressivement dans une situation de dépendance vis-à-vis du système
bancaire, particulièrement vis-à-vis des organismes de crédit spécialisés dans
l'immobilier des grands groupes financiers.
Ce contrôle de la promotion immobilière locale s'accompagne aussi de
l'intervention directe, dans tous les domaines de l'immobilier, de filiales des
grands groupes financiers. Il y a donc un mouvement de liquidation (au moins
partiel) de ce qu'étaient les fonctions des milieux d'affaires locaux en ce qui
concerne la mise en valeur immobilière de l'espace régional. Pour les raisons
indiquées dans ce qui précède, le jugement de ce point de vue doit être nuancé
pour ne pas aboutir à une vision linéaire des choses du type « les gros mangent
les petits » ; en effet, si les milieux locaux se voient retirer certaines responsa¬
bilités dans le processus du développement immobilier, ils n'en continuent pas
moins à agir, comme sous-traitants et comme agents fonciers du capital exté¬
rieur, d'une part, comme petite promotion indépendante, d'autre part.
Cette articulation entre des formes de promotion immobilière qualifiées de
« locales » et des capitaux « extérieurs » s'opère dans le cadre d'espaces concrets
qui peuvent être spécifiés par certaines variables « géographiques » (relief,
parcellaire, éloignement des centres, etc.), mais aussi par des caractères sociaux.
C'est qu'en effet les modalités de cette articulation doivent être spécifiées par
le donné social particulier de l'espace sur lequel elle s'applique. Ce donné social
local doit être situé par rapport à deux dynamiques : d'une part, la dynamique
du secteur agricole ; d'autre part, la dynamique touristique et urbaine. Il importe
de savoir, en particulier, si, dans telle ou telle zone, le mouvement de recul de
l'agriculture doit être mis au compte du développement immobilier ou bien si
ce mouvement (qui, dans bien des cas, est arrivé à son terme : la disparition
totale de l'agriculture) résulte des évolutions des techniques de production et
des marchés des produits agricoles.
Lorsque le développement résidentiel s'applique à un espace déjà en très
grande partie « abandonné », le capital immobilier ne trouve pas localement
la résistance 3 qu'il peut rencontrer ailleurs ; il ne trouve pas non plus les

tance
3. Cette
des paysans
résistance
qui au
ne développement
veulent pas vendre
immobilier
(ou qui peut
vendent
êtreà dedesdiverses
prix élevés),
natures
résistance
: résis¬

113
urbanisation dans le pays niçois

concours fort utiles4 que peut lui apporter un milieu social plus structuré.
Réciproquement, lorsque ce milieu conserve encore un artisanat du bâtiment
et une paysannerie relativement forts, la grande promotion immobilière doit
marquer le pas et attendre que ce milieu social local soit suffisamment trans¬
formé — par l'exercice même des activités immobilières locales — pour pouvoir
alors intervenir.

2. La « mise en valeur immobilière »

et les politiques locales

constitué
teur
communes
cultivée
désertification.
réalisés
culation
formes
entre
souhaité
individuelles.
en
une
dans
spatiale.
La
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le
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productives
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de
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tions
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par
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concours
les
immobilière),
communes
divers
sont
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(les
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etc.communes
d'équipements
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: Broc,
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adoptent
publics
etc.
de capable
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indispensables.
des dispositions
de prendre
(agences endéfavorables
immobilières...)
sous-traitance
à la; certaines
réalisa¬
grande

114
« mise en valeur mobilière » et politiques locales

Le mode de développement urbain souhaité


par les communes

situation
sous
de
la
1 500
Dans
vente
l'espace
forme
et une
5de
actuelle.
000
peut
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certaine
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en
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décomposée
mesure,
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la Dans
leconstruction
individuelles
mode
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sur
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les
la
: lamise
parcelles
viabilisation
souhaité
d'anarchique
dite.
en valeur
comprises
correspond
des
immobilière
\ s'effectue
terrains
entre
à la;

1. La viabilisation préalable des terrains. Le plus souvent, elle est déjà


assurée dans le cadre de l'économie agricole préexistante. Il existe en effet un
important réseau de chemins communaux et ruraux ; de plus, l'irrigation réalisée
pour permettre, il y a quelques années, le maintien de l'agriculture sur ces
espaces (transformation des cultures et des modes d'exploitation) permet désor¬
mais d'assurer l'alimentation des constructions en eau potable. Les travaux
de viabilisation (extension de réseaux, élargissement des voies) sont donc, dans
ces conditions, relativement peu importants (ou alors effectués par tranches)
et sont réalisés par des entrepreneurs locaux 7.

2. La vente. Les parcelles ainsi viabilisées prennent la valeur d'un capital que
le propriétaire peut réaliser à tout moment suivant sa condition économique
(ou ses besoins). Transmises par succession depuis plusieurs générations, elles
sortent d'un patrimoine familial local par le moyen de ventes s'effectuant sur
la base du prix de terrain à bâtir. Ainsi, le propriétaire autochtone touche,
dans ce schéma, la quasi-totalité de la rente foncière. La relation avec l'ache¬
teur est le plus souvent réalisée grâce à cet intermédiaire spécialisé qu'est l'agent
immobilier. Issu du milieu local, celui-ci connaît parfaitement les familles
locales et les propriétés qu'elles possèdent ; réciproquement, sa connaissance
du marché foncier, des règlements d'urbanisme, ses relations professionnelles
sont appréciées et lui permettent d'obtenir un portefeuille foncier intéressant.
C'est également l'agent immobilier qui est le mieux placé pour assurer la mise
en valeur de parcelles d'une certaine importance. Les possibilités de détache¬
ment de parcelles étant également limitées, la valorisation des grandes parcelles
ne peut se faire que sous forme de lotissement ou d'opération immobilière.

rieures.
en7.
6.effet,
Le terme
L'importance
selon d'des« urbanisation
lignesmarchés
des de force
anarchique
n'est
bienpasprécises.
»suffisante
doit être pour
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une telle les
urbanisation
entreprisess'opère,
exté¬

115
urbanisation dans le pays niçois

La première formule demande une mise de fonds relativement peu importante


qu'il peut assumer seul ou, le plus souvent, en association avec des personnes
locales disposant d'un certain capital disponible. L'opération est de faible
envergure — rarement plus de dix lots — et ce, d'autant plus que le processus
d'urbanisation dans la région considérée est lent. L'agent immobilier joue un
rôle clef : il connaît les possibilités de bonnes affaires, les personnes avec
lesquelles il va « travailler » (apporteurs de capitaux), les entrepreneurs qui
seront à même d'assurer les travaux de viabilisation ; il a les compétences pour
monter ce genre d'opération et pour en assurer une commercialisation facile.
L'introduction d'un lotisseur extérieur est difficile dans ce contexte. En effet,
les facteurs qui pourraient favoriser son intervention sont contrôlés (contrôle
de la viabilisation, contrôle de la réglementation d'urbanisme, etc.), si bien que
ses possibilités d'intervention ne sont pas meilleures que celles des agents
locaux. De plus, pour pouvoir réussir son insertion, ce lotisseur devra obtenir
des appuis locaux : il risque alors de se heurter à une solidarité d'intérêts
locaux qui l'empêchera de réaliser son projet. L'intervention extérieure ne
peut être envisageable que si sont développées des conditions permettant la
conjonction d'intérêts locaux et extérieurs. Ainsi, au stade où en sont actuel¬
lement la plupart des communes du piémont, l'intervention extérieure dans
la mise en valeur des terrains à des fins immobilières reste peu développée, et
la rente foncière qui en résulte est appropriée intégralement par des acteurs
locaux, tout en donnant lieu à une répartition entre les propriétaires fonciers
originels, les apporteurs de fonds et les agents immobiliers locaux.

3. La construction. L'opération de construction, depuis la conception jusqu'à


l'exécution par les divers corps de métier, peut s'effectuer entièrement par le
biais des professionnels locaux 8.
Les divers avantages liés à leur localisation leur permettent d'obtenir le plus
fréquemment la réalisation de l'opération. Le choix s'effectue suivant les réseaux
de relations qui existent entre les divers professionnels de l'immobilier : l'archi¬
tecte ou le maître d'œuvre connaît un bon entrepreneur de maçonnerie dispo¬
nible qui, lui-même, a l'habitude de travailler avec tel menuisier, électricien,
etc. L'agent immobilier constitue bien souvent le point de départ dans ce
réseau de relations, conseillant tel architecte, tel maître d'œuvre, tel entre¬
preneur. La construction de maisons individuelles a ainsi permis la reconver¬
sion sur place de nombreux ruraux dans les métiers du bâtiment. L' « économie
locale » repose, en grande partie, sur cet artisanat de la construction et exige,

piémont
de 8.maçonnerie,
Les :professions
géomètre,
de travaux
de
architecte
l'immobilier
publics,
(rarement),
etsont
tous fortement
maître
les corpsd'œuvre
représentées
du bâtiment.
(essentiellement),
dans ces communes
entrepreneur
du
« mise en valeur mobilière » et politiques locales

pour sa survie, le maintien de cette activité et des conditions qui favorisent


son exercice.
Même si cela n'est pas explicité par les intéressés \ il y a un accord implicite,
à fondement économique, au sein de la population autochtone, sur la forme
communal.
que doit revêtir la mise en valeur (principalement immobilière) du territoire

Les propositions du Schéma directeur d' aménagement


et d9urbanisme

Le parti d'aménagement à long terme du S D A U 10 de l'agglomération


niçoise s'articule autour de trois principes : réaliser de grandes infrastructures
de transport, structurer et limiter l'agglomération littorale, intégrer le moyen
pays dans l'espace urbain et touristique. Cette « intégration » débouche sur des
propositions d'affectation des divers espaces qui ne se comprennent qu'à partir
de l'analyse qui est faite du système urbain côtier. Quatre propositions princi¬
pales sont retenues : mettre en valeur de nouveaux sites pour l'urbanisation,
donner un cadre au développement de l'habitat individuel, sauvegarder les
espaces naturels, ouvrir de nouveaux espaces pour les loisirs.
Si l'on examine les implications de ces options sur les formes de l'urbani¬
sation, on constate qu'il s'agit toujours de limiter, d'une manière ou d'une
autre, l'habitat diffus et, corrélativement, de favoriser la densification de cer¬
tains espaces 11 ou les « regroupements d'habitat ». Ainsi, concernant les
« coteaux urbanisés et horticoles », le S D A U note que « la construction devra
y être soumise à des conditions particulières imposant le maintien d'un équi-

tion
d'aménagement
vités
ces
actuels,
espaces
justifications
Ainsi
lité
destinés
mération
élaboré
les9.11.
10.communes
espaces
de
Dans
départementale
locales
Choisis
est-il
Leschacun
par
leur
qui,
à decommunes
valoriser
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l'Organisme
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Nice
utilisation,
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»,référence
et fonction
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d'urbanisme
l'été
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en
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1976.
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des
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àcollecti¬
par
Dl'agglo¬
—Direc¬
locale
venir,
A
dans
des
U,

117
urbanisation dans le pays niçois

libre à dominante végétale. Le but pourra être atteint en regroupant les


constructions, [...] en évitant les lotissements qui tendent à disséminer l'habi¬
tat » ; de même, dans les zones d' « espaces naturels protégés », « les possibi¬
lités de construction seront limitées au maximum, [...] la construction ne pourra
y être autorisée que sur de grandes parcelles, et toutes les possibilités de
regroupement de l'habitat seront recherchées ».
Ces formes d'urbanisation supposent l'intervention de capitaux et d'entre¬
prises d'une certaine importance : le fait de les faciliter revient alors à favo¬
riser la pénétration d'agents économiques « extérieurs » exerçant leurs activités
dans les zones urbaines et organisés pour effectuer ce genre d'opérations. Le
petit capital et les entreprises artisanales locaux n'ont pas la dimension aussi
bien financière que technique pour assurer ce type d'urbanisation. La politique
de regroupement de l'habitat recherchée par l'Etat 12 n'est donc pas neutre :
elle défavorise les intérêts économiques locaux au profit des groupes financiers
et des formes de promotion qu'ils impulsent, au profit des grandes entreprises
de bâtiment et de leurs auxiliaires (agents immobiliers, bureaux d'études tech¬
niques...). Dès lors, il n'est pas étonnant que le projet de SDAU soit accueilli
avec une certaine réserve par les élus locaux.

Les réactions des communes aux propositions


du S D AU

Les réactions suscitées par le projet de SDAU permettent de saisir la


distance qui existe entre les projets des communes et ceux de l'Etat, entre les
intérêts que défendent les responsables locaux (pour les communes étudiées)
et les intérêts qui sont favorisés par l'application des directives nationales
d'aménagement du territoire.
La première réaction, quasi générale, dans ce moyen pays est une réaction
de refus de la relation agglomération littorale-moyen pays posée par le
SDAU. En effet, le développement du moyen pays est pensé dans le cadre
d'une problématique générale du développement de l'agglomération littorale,
ce que rejettent les responsables communaux de ce moyen pays. Nombreux
et divers, les arguments invoqués se rejoignent autour de l'idée qu'il serait
nécessaire de prendre en considération les possibilités de développement « auto¬
nome » 13 du moyen pays, ce qui n'est pas le cas dans le S D A U. Plus ou moins

près,
SDAU
12. Les
13. Il sera
les est
mêmes
périmètres
purement
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118
« mise en valeur mobilière » et politiques locales

confusément, c'est la perspective de la déstructuration complète de l'économie


locale qui est rejetée : l'importance des activités agricoles et artisanales confé¬
rait au moyen pays un caractère rural encore marqué ; les propositions du
SDAU visent à lui donner un caractère urbain, sans qu'il soit possible aux
agents autochtones d'assurer eux-mêmes cette transition. Bien entendu, les
propositions du SDAU concernant les formes que doit revêtir le dévelop¬
pement urbain (habitat collectif, regroupements) sont inacceptables.
Les propriétaires fonciers locaux — ceux qui, en général, détiennent les
terrains dans les zones de petit parcellaire, qui constituent le support essentiel
du développement résidentiel diffus — sont directement touchés par ces
mesures : d'une part, en tant que sont souvent privilégiés pour l'urbanisation
à venir quelques secteurs de grand parcellaire appartenant déjà à des proprié¬
taires « extérieurs » ; d'autre part, en tant qu'ils devront — si leurs terrains
sont utilisés — passer par les exigences d'un promoteur, ce qui réduira, là
encore, le montant de la rente procurée par la vente des terrains.
Le petit lotisseur local verra, lui aussi, son activité singulièrement réduite :
les opérations de lotissement devront être conçues « en grand », avec des
regroupements (villages, « hameaux ») ou bien remplacées par des opérations
de construction d'immeubles collectifs ; dans l'un et l'autre cas, il ne dispose
î>as de la surface financière et technique lui permettant de se reconvertir à ces
opérations.
Enfin, l'opération de construction risque d'exclure la quasi-totalité des profes¬
sionnels locaux de l'immobilier : conduite par un promoteur, celui-ci va utiliser
son propre réseau de relations, établi à partir d'opérations du même type qu'il
a effectuées en d'autres lieux. Les entreprises locales n'auront pas l'envergure,
l'équipement, la compétence, etc., pour travailler à ce genre d'opérations ;
l'architecte ou le maître d'œuvre local n'a pas le bureau d'études techniques
qui pourrait lui permettre de réaliser un travail sérieux ; l'installation d'un
bureau de vente permet de se passer des services de l'agent immobilier ; etc.
La réaction de refus est générale et va être exprimée par l'intermédiaire des
représentants élus de cette population, en particulier, dans le cadre de la
commune.

Si toutes les municipalités de la zone étudiée ont rejeté 14 le S D A U, ce


n'est pas parce qu'elles seraient constituées uniquement par des propriétaires

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119
urbanisation dans le pays niçois

fonciers, comme on a tendance à le supposer très couramment, mais parce


qu'elles représentent les intérêts de la population autochtone 15.
La protection des espaces naturels est ressentie, à juste titre, comme un frein
au développement des activités locales, l'opposition locale étant très forte lorsque
les mesures de protection couvrent des zones de petite ou de moyenne pro¬
priété. On ne veut pas que les détenteurs de terrains situés dans des « espaces
naturels » puissent être « spoliés » par une réglementation restrictive. Si l'Etat
veut protéger des espaces, il faut qu'il y mette le prix — c'est-à-dire acquérir
et entretenir ces espaces ; en tout état de cause, la commune, elle, se refuse
à prendre en charge la protection d'espaces naturels pour satisfaire des objec¬
tifs qui lui sont totalement étrangers. Cette proclamation semble constituer
un défi : puisque l'Etat n'a pas les moyens de sa politique, il lui faut changer
d'optique et comprendre que l'entretien (donc la sauvegarde) des espaces boisés
ne peut être assuré que dans le cadre de petites propriétés habitées.
Tels sont les thèmes les plus fréquemment développés par les élus ou les
représentants élus de cette population, en particulier dans le cadre de la
des sols (P O S) dans ce moyen pays sera l'occasion de voir se manifester à
nouveau l'opposition entre les conceptions défendues par ces petites communes
et les organes de l'Etat ; ce sera aussi l'occasion de rechercher un compromis.

L'élaboration d'un compromis dans le cadre des Plans


d' occupation des sols

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120
« mise en valeur mobilière » et politiques locales

SDAU16. Dans la région étudiée, deux types principaux d'espaces font


exception à ce principe : le « socle » du vieux village et les espaces naturels
de moyenne montagne, sur lesquels un accord de protection est réalisé suivant
certaines modalités. Pour le socle du village, il y aura report des droits à bâtir
ou interdiction de la construction sur la partie supérieure du socle. Pour les
espaces de moyenne montagne qui comportent beaucoup de petites et moyennes
parcelles, l'accord sur leur protection n'est que temporaire : les communes
considèrent que ces espaces constituent une réserve pour le futur dévelop¬
pement urbain, et la position de l'Etat n'est pas fondamentalement opposée
à cette conception.
Il importe de souligner la nécessaire correspondance entre les compromis
politiques réalisés et les modalités de l'articulation, sur le terrain, entre diverses
formes de mise en valeur de l'espace, entre diverses formes de production immo¬
bilière. En d'autres termes, les compromis passés signalent, non seulement des
« oppositions », mais aussi (et peut-être surtout) l'existence de complémentarités
qui s'expriment, en particulier dans le domaine économique, par la mise en
sous-traitance des activités immobilières locales vis-à-vis de formes productives
extérieures.

Vers un espace urbain

développer,
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Cette transition trouve, en premier lieu, des éléments favorables au sein


même du système local : le développement de constructions résidentielles indi¬
viduelles introduit un nombre toujours plus important d'éléments du système
urbain ; les résidents, essentiellement « urbains 17 », sont de moins en moins
marginaux dans la société locale et vont progressivement constituer des groupes
de pression dont l'impact sur la conduite des affaires communales sera de plus
en plus fort. A terme, ils prendront le « pouvoir municipal ».
Pour ces « résidents », les associations constituent des cadres intéressants

16. On trouve ainsi, dans certains POS, que des «espaces naturels protégés, remar¬
1quables
500 m2 par
» la qualité du paysage » (classification SDAU) sont classés en « zone à
17. C'est-à-dire issus du système urbain et rattachés à lui.

121
urbanisation dans le pays niçois

pour développer leurs actions qui, de toute façon, se réfèrent à une idéologie
« urbaine ». Depuis la banale association des parents d'élèves jusqu'à l'asso¬
ciation de défense des sites, ces associations influent le plus souvent sur la prise
de décision communale sur des questions d'équipement ou d'aménagement du
territoire. C'est en leur sein également que sont recrutés les futurs élus commu¬
naux. Elles constituent ainsi des foyers locaux d'animation urbaine à partir
desquels vont se développer les actions tendant à diffuser les conceptions
« urbaines » de l'aménagement du territoire dans le milieu local. En particulier,
les associations de défense des sites ou de l'environnement, qui se sont multi¬
pliées ces dernières années, constituent des groupes de pression de plus en plus
puissants. Elles recrutent 18 très largement dans les clientèles constituées par
les propriétaires de résidences individuelles, qu'elles soient principales ou
secondaires. Ayant acheté un mode et un cadre de vie, ces résidents entendent
préserver celui-ci, ce qui les amène à s'intéresser aux questions de l'aménage¬
ment et à être très réceptifs aux formes de développement urbain susceptibles
de leur garantir, au moins à court terme, ce cadre de vie. Soutenant une poli¬
tique de protection de l'environnement, ils sont donc plutôt favorables aux
opérations de constructions groupées et constituent une force d'opposition
interne au système local d'autant plus importante que le développement rési¬
dentiel a été rapide et que le site sur lequel il s'est développé est sensible 1S>.
La sanction électorale constitue l'aboutissement logique de cet affrontement
entre « urbains » et « ruraux ». L'importance grandissante de l'électorat
« urbain » permet à ses représentants de revendiquer des responsabilités de plus
en plus larges dans la conduite des affaires municipales 20. Les nouvelles orien¬
tations qu'ils voudront imprimer rencontreront d'autant moins d'oppositions
que le déclin des activités rurales est accentué. En effet, la désagrégation de
la solidarité socio-économique locale accompagne ce déclin, et les intérêts
locaux subsistants ne trouvent plus d'appuis et sont de moins en moins consi¬
dérés. Les activités économiques locales trouvent de plus en plus difficilement
les conditions nécessaires à leur maintien du fait de la proximité de l'espace
urbain littoral. Les commerçants locaux n'ont guère profité de la clientèle
résidentielle qui fréquente plutôt les centres d'achats urbains, même pour les

thisants.
18. Entendu dans un sens large : ce peut être aussi bien des sociétaires que des sympa¬
19. Il s'agira d'un «beau quartier» ou d'un «secteur hautement résidentiel».
20. Cette description est volontairement schématique et élimine les interférences poli¬
tiques qui viennent dans la réalité s'y greffer : les « ruraux » comme les « urbains » ne
sont pas politiquement et, bien entendu, économiquement des ensembles homogènes, si
communes.
bien que des alliances s'effectuent le plus souvent entre sous-groupes autour d'idées

122
mise en valeur mobilière » et politiques locales

commerces alimentaires S1, et perdent de plus en plus leur clientèle autochtone


attirée, elle aussi, par les grands pôles commerciaux.
Les entrepreneurs du bâtiment, de leur côté, trouvent deux obstacles princi¬
paux au développement de leur activité qui, pourtant, semblerait devoir être
prospère. En premier lieu, ils trouvent une concurrence de plus en plus sérieuse
chez les constructeurs industriels de maisons individuelles qui livrent, clés en
main, dans des délais records, une maison « personnalisée » bénéficiant de
toutes les garanties de construction 22. En second lieu, et il semble que ce soit
l'obstacle majeur, ils ne trouvent plus, sur le marché du travail local, le per¬
sonnel nécessaire pour assurer la réalisation de leurs divers chantiers. Les
possibilités de revenus relativement plus élevés qu'offrent les activités urbaines
attirent, d'une part, la main-d'œuvre du moyen pays qui cherche à s'y employer
et, d'autre part, détournent les jeunes des métiers du bâtiment 23 .

Jean-Paul Guichard, Christian Séguret

21. Il est bien connu que la «grande surface» a un rayon d'attraction important et
ration. attire une clientèle non négligeable située à l'extérieur du périmètre d'agglomé¬
qu'elle
22. En plus de la garantie d'entrepreneur, l'acquéreur n'a même pas besoin de recourir
à un professionnel de l'architecture, aussi bien en ce qui concerne le permis de construire
que le suivi des travaux.
23. L'offre de salaires plus élevés ne semble pas pouvoir constituer un palliatif : elle
se heurterait, du fait de son incidence sur le coût de la construction, aux lois du marché
(concurrence des autres producteurs de logements, état de la demande solvable de maisons
individuelles). Au niveau du marché du travail, les agriculteurs locaux éprouvent égale¬
ment de sérieuses difficultés. Pour pouvoir se maintenir, vu les conditions de la concur¬
rence, il leur est nécessaire de pratiquer une culture intensive (le plus souvent sous
serres) qui exige, outre d'importants investissements, une main-d'œuvre nombreuse et bon
marché. La main-d'œuvre locale se raréfiant, il devient nécessaire de recourir à de la
main-d'œuvre extérieure (immigrés en particulier). Cependant, le développement de cette
pratique bute sur la question du logement : cette main-d'œuvre immigrée trouve difficile¬
mentfixedesdifficilement
se conditions dans
de logement
ce moyenen pays.
rapport avec ses possibilités et, par conséquent,

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