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5. Les modalités d’énoncé.

5.1. Modalités. Notions fondamentales. Le carré des oppositions (Aristote1).

Les notions fondamentales relatives à la proposition et aux modalités sont formulées par Aristote en particulier
dans Peri Herméneias (lat. De Interpretatione). Nous citerons ici la traduction en français par Jules Barthélémy
Saint-Hilaire (1866, Paris : Ladrange), sous l’intitulé Herméneia. Traité de la proposition2. Dans les Premiers
Analytiques avaient été explorées les relations entre modalités et syllogismes.
Mais, sauf qualification contraire, nous nous limiterons dans cette brève présentation aux vues exprimées dans
l’Herméneia.

La modalité admise dans les Premiers Analytiques devait également figurer dans l'Herméneia. Si la démonstration se fonde
sur la théorie du syllogisme, la théorie même du syllogisme se fonde sur celle de la proposition.
Qu'est-ce donc que la proposition? Quelles en sont les espèces? quelles formes principales peut-elle revêtir? voilà ce que
l'Herméneia recherche et devait rechercher. Les propositions sont par elles-mêmes absolues ou modales, comme elles le sont
dans le syllogisme. Il fallait donc étudier les modales, tout comme les propositions absolues. Seulement ici, Aristote a très
justement encouru la censure de son critique; et quand il s'est demandé comment se suivent mutuellement les idées de
contingent, de nécessaire et d'impossible, c'est de la métaphysique qu'il a fait bien plutôt que de la logique. C'est un écueil dont
il aurait dû se garantir; c'est une des très rares erreurs qu'il ait commises.

(Préface par Jules Barthélémy de Saint-Hilaire à la Logique d’Aristote. Organon, tome I, les « Catégories », suivies de
l’« Herméneia », p. 21)

5.1.1. Classement des « énonciations » : par énonciation, Aristote comprenait tout jugement prédicatif (c’est-à-
dire : toute proposition), lieu du vrai et du faux. Cette réduction se laisse comprendre, dans la mesure où le
philosophe n’étudiait de toute manière que les énonciations déclaratives, décrivant un état de chose réel, par
opposition aux énoncés interrogatifs ou impératifs, qui ne sont par hypothèse ni vrais ni faux. Il distingue deux
sortes d’« énonciations » :
- l’énonciation simple (une énonciation « simplement une », « absolue », qui affirme ou nie une
seule chose d’une seule (autre) chose : L’homme est un animal, plus connue sous le nom
d’énonciation ou de proposition catégorique)
- l’énonciation multiple (une énonciation par conjonction, qui comporte une condition : Si l’homme
est, il est animal ; ou par disjonction, qui comporte une alternative : ou bien l’homme est juste, ou
bien il est injuste – catégorie plus connue sous le nom d’énonciation hypothétique).

De fait, pour Aristote (Herméneia, chap. VIII et XI), sont des « propositions multiples » aussi :

L’homme est blanc et musicien = L’homme est blanc il est musicien


L’homme et le cheval sont blancs = L’homme est blanc et le cheval est blanc
André est un bon tanneur = André est tanneur et il est bon (comme tanneur)

La reformulation de la distinction aristotélicienne <énonciation simple/ énonciation multiple> en termes


d’énonciation/proposition catégorique vs énonciation/proposition hypothétique est le fait de la logique médiévale :
on la retrouve chez Thomas d’Aquin, dans De propositionibus modalibus, mais elle était déjà présente chez Boèce,
à qui l’on doit aussi le premier classement des propositions catégoriques en modalisées et non modalisées
(modales et « de inesse »). Dans l’Herméneia, les propositions modales (selon le nécessaire ou selon le contingent
notamment) sont opposées aux propositions « absolues », et la modalité est posée comme modification d’une
proposition absolue ; la notion de proposition « simplement une » et de « proposition absolue » semblant se
recouvrer.

5.1.2. Structure des propositions catégoriques : (Quantificateur) Sujet-(Copule)-Prédicat3 (Quelque homme


est juste (=Certains hommes sont justes)).

● Le sujet (S) est ce à quoi l'on attribue le prédicat.


● Le prédicat (P) est ce qui est attribué au sujet.

1
Philosophe grec du IVe siècle avant Jésus Christ (av. J.-C.). La mise en forme traditionnelle des écrits d’Aristote relatifs à la
logique, édités sous le nom d’Organon (gr. « outil, instrument ») vers 60 av. J.-C., par Andronicus de Rhodes, ayant été le fait
de Boèce (cinq siècles plus tard, soit au Ve siècle après Jésus Christ (apr. J.- C.)), le carré logique (ou : carré des oppositions)
est encore connu, dans la littérature, sous le nom de « carré de Boèce ». Sont particulièrement concernés, pour ce qui est de la
définition des différentes espèces de propositions (appelées, dans le texte d’Aristote : énonciations), et des oppositions entre
celles-ci, deux traités : De l’interprétation, d’une part, et les Premiers analytiques, de l’autre.
2
En ligne : http://www.documentacatholicaomnia.eu/03d/-384_-322,_Aristoteles,_La_proposition_Hermeneia,_FR.pdf
(consulté le10 février 2019).
3
Tous les énoncés du langage ordinaire ne présentent pas spontanément la structure< Sujet-(Copule-) Prédicat>. Il faudrait
donc les transformer pour les rendre conformes à cette structure logique. Parmi les procédés utilisés, le plus simple est celui de
la transformation du <verbe> en <copule + participe présent> : Quelque Grec vit (Certains Grecs vivent) devient ainsi Quelque
Grec est vivant (Certains Grecs sont vivants).

1
● Le quantificateur exprime la quantité de la proposition : s'agit-il de tous les hommes (proposition
universelle) ou seulement de certains d'entre eux (proposition particulière)?
● La copule exprime la qualité de la proposition (affirmative ou négative : est ou n'est pas).

5.1.4. Théorie de l'inférence immédiate : analyse des relations nécessaires entre propositions.

● raisonner = inférer.
● inférer = tirer d'une ou de plusieurs propositions données et connues comme vraies ou comme fausses
(qu'on appelle prémisses) une ou plusieurs propositions nouvelles (qu'on appelle conclusions) jugées
vraies ou fausses en fonction de la relation logique que l'on a établie entre elles et les prémisses.

● inférences immédiates = inférences qui partent d'une seule proposition (à valeur de vérité arrêtée : ou
bien elle est vraie, ou bien elle est fausse) ; inférences dites médiates (cas particulier : syllogisme) =
inférences qui partent de deux propositions au moins (deux exactement, dans le cas du syllogisme).

● Structure de l’inférence immédiate. L’inférence immédiate est un raisonnement composé de deux


propositions : une prémisse et une conclusion, unies par un lien de conséquence logique.

● Une série d'inférences immédiates sont rassemblées sous la forme traditionnelle du carré logique. Ce
carré donne un nom aux relations inférentielles qui existent entre une proposition universelle affirmative
(A), une proposition universelle négative (E), une particulière affirmative (I) et une particulière négative
(O – les abréviations venant des premières voyelles des termes latins affirmo et nego).

Carré logique (ou : carré de Boèce)

TOUT HOMME EST JUSTE TOUT HOMME N’EST PAS JUSTE


[universelle affirmative] [universelle négative]

c o n t r a i r e s

s s
u u
b b
a a
l l
t contradictoires t
e e
r r
n n
e e
s s

QUELQUE HOMME EST JUSTE s u b c o n t r a i r e QUELQUE HOMME N’EST PAS JUSTE


[particulière affirmative] [particulière négative]
s
=NON (TOUT HOMME EST NON =NON (TOUT HOMME EST JUSTE)
JUSTE)
(NON-TOUT) HOMME EST (JUSTE)
(NON-TOUT) HOMME EST (NON-
JUSTE)

2
5.1.5. Théorie de l'inférence immédiate : définition des relations inférentielles (chap. VII de L’Herméneia, « Des
propositions universelles, particulières, indéterminées et singulières »)

● La relation de contradiction oppose deux propositions de quantité et de qualité différentes. Les contradictoires
ne peuvent être ni vraies en même temps, ni fausses en même temps (prenant toujours des valeurs de vérité
différentes).

Tout homme est juste – contradictoires – Quelque homme n'est pas juste
[universelle affirmative] [particulière négative]

Aucun homme n'est juste – contradictoires – Quelque homme est juste


[universelle négative] [particulière affirmative]

● La relation de contrariété oppose deux propositions de même quantité (universelle) mais de qualité
différente. Les propositions contraires ne peuvent être vraies en même temps, mais peuvent être fausses en
même temps.

Tout homme est juste – contraires – Aucun homme n’est juste


[universelle affirmative] [universelle négative]

● La relation de subcontrariété oppose également deux propositions de même quantité (particulière) mais de
qualité différente. Les propositions subcontraires ne peuvent être fausses en même temps, mais peuvent
être vraies en même temps.

Quelque homme est juste – subcontraires – Quelque homme n'est pas juste
[particulière affirmative [particulière négative]

● La relation de subalternation oppose (de prime abord) deux propositions de même qualité (ou bien
affirmative, ou bien négative) mais de quantité différente. La vérité de la subalterne inférieure (particulière)
suit de la vérité de la supérieure (universelle).

Tout homme est juste – subalternes Quelque homme est juste


[universelle affirmative] (à supérieure affirmative) – [particulière affirmative]
Aucun homme n’est juste – subalternes Quelque homme n'est pas
[universelle négative] (à supérieure négative) – juste [particulière négative]

Pour rendre justice aux distinctions logiques pertinentes (QUANTITE : quantification universelle/ quantification
existentielle ; QUALITE : négation/ affirmation), plutôt qu’aux limitations des langues naturelles employées
comme métalangues (d’où deux formes de quantificateur universel, selon l’environnement affirmatif (tout) ou
négatif (aucun)), nous proposons de reformuler explicitement le quantificateur universel des propositions
négatives aucun en termes du quantificateur universel tout, soit : aucun N4 n’est A5 = tout N est non-A.

Voir l’équipollence nullus homo iustus est = omnis homo iustus non est [universelle négative] au niveau
des exemples latins d’origine.

omnis homo iustus est [universelle affirmative] ;


nullus homo iustus est (= omnis homo iustus non est) [universelle négative] ;
aliquis homo iustus est (= non omnis homo iustus non est) [particulière affirmative] ;
aliquis homo iustus non est (= non omnis homo iustus est) [particulière négative].

4
N de : nom.
5
A de : adjectif.

3
5.1.6. Types de propositions catégoriques selon l’inhérence du prédicat (P) au sujet (S) :

● Propositions catégoriques de inesse (« être dans ») appelées aussi assertoriques: inhérence de P à S non
modifiée6.
● Propositions catégoriques modales : inhérence de P à S modifiée7.

5.1.7. Carrés modaux.

Carré aléthique :

Nécessaire Impossible

(=NECESSAIRE QUE P) (=NECESSAIRE QUE NON-P)


(=IMPOSSIBLE QUE NON-P) (=NON POSSIBLE QUE P)

Possible Contingent

(=NON NECESSAIRE QUE NON-P) (= NON NECESSAIRE QUE P)


(=POSSIBLE QUE P) (= POSSIBLE QUE NON-P)

Carré épistémique :

Certain Exclu
100 % VRAI 100% FAUX
(=CERTAIN QUE P) (=EXCLU QUE P)
(=EXCLU QUE NON-P) (=CERTAIN QUE NON-P)

+INDICATIF +SUBJONCTIF

Probable Incertain
PLUS DE 50% VRAI AU MIEUX 50% VRAI/ 50% FAUX
(=PROBABLE QUE P) (= NON CERTAIN QUE P)
(=NON CERTAIN QUE NON-P) (=NON EXCLU QUE NON-P)
(=NON EXCLU QUE P)

6
Dictum seul : tout ce qui précède illustre ce cas de figure.
7
Modus + dictum.

4
Carré déontique :

Obligatoire Interdit

(=OBLIGATOIRE QUE P) (=OBLIGATOIRE QUE NON-P)


(=NON PERMIS QUE NON-P) (=NON PERMIS QUE P)

Permis Facultatif

(=NON OBLIGATOIRE QUE NON-P) (= NON OBLIGATOIRE QUE P)


(=PERMIS QUE P) (= PERMIS QUE NON-P)

La reformulation des propositions catégoriques assertoriques du carré de Boèce en termes du seul quantificateur
universel et de la négation, pour obscurcir le lien naturel entre universelle affirmative et particulière affirmative,
et respectivement entre universelle négative et particulière négative [subalternation = opposition seulement en
quantité], comporte l’avantage d’être formellement analogue à l’analyse des propositions catégoriques modales,
où la négation, si négation il y a, porte tantôt sur le modus, tantôt sur le dictum, tantôt sur les deux.

Comparer le tableau ci-contre aux carrés modaux ci-avant :

TOUT HOMME EST JUSTE TOUT HOMME (N’EST PAS JUSTE)


[universelle affirmative] [universelle négative]

(TOUT HOMME) (EST JUSTE) (TOUT HOMME) (N’EST PAS JUSTE)

c o n t r a i r e s

s s
u u
b b
a a
l l
t contradictoires t
e e
r r
n n
e e
s s

[particulière affirmative] s u b c o n t r a i r e [particulière négative]


s
NON (TOUT HOMME (N’EST PAS NON (TOUT HOMME EST JUSTE)
JUSTE))
(NON-TOUT HOMME) (EST JUSTE)
(NON-TOUT HOMME) (N’EST PAS
JUSTE)

Ce type de manipulations atteste d’une relation intéressante entre quantificateur du sujet (extension du
nominal sujet) d’une part, et modus, de l’autre : le modus est au dictum ce que le quantificateur est au sujet ;

5
Gustave Guillaume saisira ce rapprochement en termes de visée (ou : actualisation), qui concerne tant le verbe
(par les traits de temps-aspect-mode) que le nom substantif (par l’article).

Analogie (purement formelle8) proposée ici : quantificateur ← modus, prédicat ← dictum. Cette analogie serait
susceptible de fonder l’extrapolation du carré logique des propositions assertoriques aux inférences sur les
propositions catégoriques modales.
Pour ce qui est de l’analogie <quantificateur ← modus, prédicat ← dictum>, comparer les définitions modales en
termes des primitifs nécessaire, certain et respectivement obligatoire, à l’expression alternative des AIEO de
inesse en termes du seul quantificateur universel :

[TOUT] HOMME EST JUSTE TOUT HOMME EST NON-JUSTE


[universelle affirmative] [universelle négative]

NON TOUT HOMME EST NON-JUSTE NON TOUT HOMME EST JUSTE
[particulière affirmative] [particulière négative]

Soit :

NECESSAIRE QUE P NON NECESSAIRE QUE NON-P NECESSAIRE QUE NON-P NON NECESSAIRE QUE P
CERTAIN QUE P NON CERTAIN QUE NON-P CERTAIN QUE NON-P NON CERTAIN QUE P
OBLIGATOIRE QUE P NON OBLIGATOIRE QUE NON-P OBLIGATOIRE QUE NON-P NON OBLIGATOIRE QUE P
TOUT HOMME EST JUSTE NON TOUT HOMME EST NON- TOUT HOMME EST NON- NON TOUT HOMME EST
JUSTE JUSTE JUSTE

8
Puisque, du point de vue sémantique, et compte tenu de la syntaxe des langues naturelles, ce serait plus juste d’associer
modus et prédicat et dictum et sujet (voir énoncés à modalité de dicto).

6
5.2. Réalisation des modalités d’énoncé en français
5.2.1. La zone des modalités aléthiques et ses réalisateurs en français

Carré aléthique :

Nécessaire Impossible
(=nécessaire que p) (=non possible que p)
(=non possible que non p) (=nécessaire que non p)
+subjonctif +subjonctif
c o n t r a i r e s

s s
u u
b b
a a
l contradictoires l
t t
e e
r r
n n
e e
s s

Possible Contingent Contingent


(=possible que p) s u b c o n t r a i r e (=non (=non
s
(=non nécessaire que non p) nécessaire que nécessaire que
+subjonctif p) p)
(=possible que (=possible que
non p) non p)

discontinu ponctuel
+subjonctif +indicatif
Contingent vs possible : une distinction à maintenir ?

[Contingent : non nécessaire que P= non impossible que non-P. Il arrive que Socrate coure (Socrate étant de
fait courant au moment de l’assertion de la phrase modalisée: course en acte). Possible « en acte ».
Possible : non nécessaire que non-P= non impossible que P. Il est possible que Socrate coure (Socrate étant
assis au moment de l’assertion de la phrase modalisée). Possible « en puissance ».]

Malgré la distribution (possiblement) complémentaire des exemples, entre les deux valeurs de non-nécessaire
discriminées dans le texte d’Aristote (« De l’interprétation ») – respectivement le contingent et le possible,
et l’usage de mots distincts (possible (< lat. possibilis, pour le grec dynaton)/ contingent (< lat. contingens,
correspondant proposé au Moyen Age, par les Scolastiques, pour le grec endekomenon), dans le texte, et, dans
la table des conversions/ implications9, en formules verbales : il se peut que/ il arrive que), nous remarquerons

9
Dans sa forme initiale, où les colonnes correspondent à la relation contradictoire (négation du modalisateur), la table des
conversions/ implications comporte des solutions de continuité des implications, pour les contradictoires de « il n’est pas
nécessaire que p »et respectivement de « il n’est pas nécessaire que non-p », marquées ici par des gras et des signes
d’exclamation ; les conversions (ou : équivalences) des propositions modales à opérateurs abstraits de l’ordre du <possible> et
du <nécessaire>, mises en vedette ici par les italiques, seront définies plus loin dans le texte (commentaire de la table) :
Il se peut que p soit le cas

Il ne se peut pas que p soit le cas
→Il arrive que p soit le cas

→Il n’arrive pas que p soit le cas
→Il n’est pas impossible que p soit le cas

→Il est impossible que p soit le cas
→Il n’est pas nécessaire que p soit le cas

!!! Il est nécessaire que p soit le cas↓

7
que la conversion, en termes de il arrive que, des valeurs modales aléthiques formulées en termes de il se peut
que, s’avère être un cas de substitution synonymique triviale (sans jeu aucun des négations), à l’encontre
de ce qui se passe lors de la conversion de il est nécessaire que en il se peut que ou respectivement en il est
impossible que.

Comparer les conversions non triviales du <nécessaire> en <possible> et <impossible>, sous (1a) aux
conversions triviales (par substitution synonymique sans jeu des négations) du <possible> (en formulation

Il se peut que p ne soit pas le cas



Il ne se peut pas que p ne soit pas le cas
→Il arrive que p ne soit pas le cas

→Il n’arrive pas que p ne soit pas le cas
→Il n’est pas impossible que p ne soit pas le cas

→Il est impossible que p ne soit pas le cas
→Il n’est pas nécessaire que p ne soit pas le cas

!!!Il est nécessaire que p ne soit pas le cas↑
[Commentaire dans le texte :]

[Commentaire dans le texte :]


Il se peut que p soit le cas

(≡) Il n’est pas nécessaire que p ne soit pas le cas

Il ne se peut pas que p soit le cas



(≡) Il est nécessaire que p ne soit pas le cas

Il n’est pas nécessaire que p soit le cas



(≡)
Il se peut que p ne soit pas le cas

Il est nécessaire que p soit le cas



(≡) Il ne se peut pas que p ne soit pas le cas

À force de rétablir les implications du côté droit, nous perdrions la corrélation horizontale entre les colonnes (en termes de la
relation contradictoire) ; mais nous retrouverions une certaine version (incomplète relationnellement) du carré de Boèce
(contradictoires, contraires et subcontraires en clair, encore que dans d’autres positions relatives, mais subalternes
complètement occultées):
Il se peut que p soit le cas

Il ne se peut pas que p soit le cas
→Il arrive que p soit le cas

→Il n’arrive pas que p soit le cas
→Il n’est pas impossible que p soit le cas

→Il est impossible que p soit le cas
→Il n’est pas nécessaire que p soit le cas
!!!
→Il est nécessaire que p ne soit pas le cas
POSSIBLE-CONTINGENT ↓

IMPOSSIBLE 
Il se peut que p ne soit pas le cas

Il ne se peut pas que p ne soit pas le cas
→Il arrive que p ne soit pas le cas

→Il n’arrive pas que p ne soit pas le cas
→Il n’est pas impossible que p ne soit pas le cas

→Il est impossible que p ne soit pas le cas
→Il n’est pas nécessaire que p ne soit pas le cas
!!!
→Il est nécessaire que p soit le cas
CONTINGENT-POSSIBLE

NÉCESSAIRE

8
métalinguistique verbale : il se peut que) en <contingent> (en formulation métalinguistique verbale : il arrive
que) sous (1b):

1a.

● NECESSAIRE : Il est nécessaire que p = il ne se peut pas que non-p (il n’est pas possible que non-p) =
il est impossible que non-p ;
● POSSIBLE : Il n’est pas nécessaire que non-p = il se peut que p (il est possible que p) = il n’est pas
impossible que p ;
● CONTINGENT : Il n’est pas nécessaire que p = il se peut que non-p (il est possible que non-p) = il n’est
pas impossible que non-p ;
● IMPOSSIBLE : Il est nécessaire que non-p = il ne se peut pas que p (il n’est pas possible que p) = il est
impossible que p.

1b.

● NECESSAIRE : il ne se peut pas que non-p (il n’est pas possible que non-p) = il n’arrive pas que non-p ;
● POSSIBLE : il se peut que p (il est possible que p) = il arrive que p ;
● CONTINGENT : il se peut que non-p (il est possible que non-p) = il arrive que non-p ;
● IMPOSSIBLE : il ne se peut pas que p (il n’est pas possible que p) = il n’arrive pas que p.

Ce qui nous conduit à l’idée (qui remonte à Abélard10) que le possible et le contingent étant équivalents (ainsi
que, selon Abélard, Aristote lui-même l’aurait suggéré), il n’y a que trois modalités logiques de base – le
nécessaire, le possible et l’impossible – le carré modal aléthique pouvant être envisagé alors comme un triangle
(cf. Le Querler 1996 : 48).

Que se passe-t-il dès que l’on se tourne vers les langues naturelles ? Par exemple, en français et en roumain ?
Les adjectifs possible et contingent sont certes parasynonymes11. Encore que leur comportement syntaxique ne
soit pas identique, seul possible instanciant un emploi d’opérateur de phrase :

2a. Il est possible que Socrate coure.


2b. *Il est contingent que Socrate coure.

D’où la nécessité de comparer le comportement de l’adjectif opérateur possible avec celui du verbe opérateur il
arrive que12 :

3a. Il est possible que Socrate coure.


3b. Il arrive que Socrate coure.

Ainsi que l’attestent maintenant les exemples sous (4), les deux opérateurs de phrase n’ont pas le même
comportement en regard d’un dictum descriptivement marqué pour le virtuel :

4a. Il est possible que Socrate coure un jour.


4b. *Il arrive que Socrate coure un jour.
4c. OKIl arrivera un jour que Socrate coure13.

D’autres verbes opérateurs de sémantique [-nécessaire] se rangent, à cet égard, soit du côté de il est possible
que (le verbe modal il se peut que+SUBJONCTIF), soit du côté de il arrive que (les verbes factuels il se fait que,
il se trouve que+ INDICATIF) :

5a. Il se peut que Socrate coure un jour.


5b. *Il se fait que (+Il se trouve que) que Socrate court un jour.

Il arrive que se range en revanche avec il est possible que (+ il se peut que) quant à la possibilité d’enchaînement
sur mais (…) pas maintenant, se dissociant à cet égard des verbes factuels il se fait que, il se trouve que :

10
Dans son ouvrage intitulé Dialectica, où il commente (entre autres) le carré de Boèce.
11
Ainsi, l’adjectif contingent étant défini, dans le Petit Robert (2007) comme : « Qui peut se produire ou non », avec des renvois
à : accidentel, 1casuel, conditionnel, éventuel, fortuit, 1incertain, occasionnel, et des exemples illustratifs du type de :
Evénement contingent, chose contingente (soumis(e) au hasard), l’une des acceptions de l’adjectif possible (3 possible) sera
(selon le même dictionnaire) « qui peut se réaliser, être vrai ; qui peut être ou ne pas être », avec des renvois à : contingent,
éventuel. Et des illustrations du type de : Averses possibles en fin de journée. De possibles chutes de neige. Une aggravation
possible de la maladie. Une rechute est toujours possible. Il n’y a plus aucun doute possible. Il est possible qu’il fasse froid cette
nuit (il se peut que).
12
Un verbe factuel.
13
Où le marqueur descriptif de [+virtuel] (un jour) porte sur le modus, marqué, d’ailleurs aussi grammaticalement, pour le
virtuel (affixe de futur).

9
6a. Il est possible que (+ Il se peut que, +Il arrive que) Socrate coure, mais (il ne court) pas maintenant
(+ il n’est pas en train de courir maintenant).
6b. ???Il se fait que (+ Il se trouve que) Socrate court, mais (il ne court) pas maintenant14.

En 6a, l’enchaînement par ___mais (il ne court) pas maintenant (+ il n’est pas en train de courir
maintenant) oblige à une lecture du dictum ou bien « habituelle » (« Il se peut que Socrate coure d’habitude
(+qu’il soit un coureur (professionnel)) »), ou bien temporellement discontinue (itération : « il se peut que
Socrate coure de temps à autre »), interdisant la lecture « soit en train de courir » – choix privilégié en l’absence
de l’enchaînement.

Toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire en l’absence d’éléments co(n)textuels favorisant les
lectures habituelle ou fréquentative, Il est possible que (+ il se peut que) Socrate coure sera en effet
entendu au sens de « il est possible que Socrate soit en train de courir [au moment t0 où j’énonce la
phrase]».

Ce qui barre, en 6a, la lecture d’actualité (« être en train de courir en t0 ») obligeant à l’une des interprétations
marquées (directement ou indirectement) pour la discontinuité, « courir de temps à autre », ou bien « courir
d’habitude/ être un coureur (professionnel)» c’est la conjonction de la perspective modale initiale d’incertitude
sur p (<NON CERTAIN (p)>), au constat que p n’est pas le cas (constat consistant avec la modalisation
<CERTAIN (non-p>). Soit, en notation abrégée, où ?? symbolise le caractère problématique de la conjonction,
et * son impossibilité :

< ??NON CERTAIN (p) & constat (non-p)>, donc : <*NON CERTAIN (p) & CERTAIN (non-p)>.

Nous remarquerons que CERTAIN (non-p) est, techniquement parlant, à force d’extrapoler le carré logique
aux modalités (épistémiques), la subalterne supérieure (négative) de NON CERTAIN (p). Et nous
savons déjà que la vérité de la subalterne inférieure est censée suivre de la vérité de la subalterne
supérieure. Faut-il en déduire que ce qui est exclu soit aussi, et en même temps, incertain (=douteux) ?!

La relation logique entre subalternes supérieure et inférieure, définie sur le carré des propositions
assertoriques (propositions quantifiées : universelle affirmative, particulière affirmative ; universelle
négative, particulière négative), en termes d’implicature quantitative 15 ne se laissera extrapoler telle
quelle au carré modal qu’au prix d’une reformulation des modalités en termes directement
quantifiés (extensionnels): à force, par exemple, de définir ce qui est contingent, incertain, facultatif
comme « ce qui est faux dans au moins un monde possible » (ce qui est impossible, exclu, interdit étant
« faux dans tous les mondes possibles ») on pourra dire que l’impossible implique le contingent, l’exclu
implique l’incertain, l’obligatoire, le facultatif. Car être faux dans tous les mondes possibles implique être
faux dans un monde possible, tout comme la vérité de « tout homme est non-violent » implique la vérité
de « quelque homme est non-violent ».

En l’absence d’une telle reformulation extensionnelle des modalités (au plan métalinguistique), tout ce
que l’on pourra avancer, ce sera que la subalterne inférieure est orientée vers la subalterne supérieure
correspondante : ce qui est incertain (=douteux) a davantage de chances de ne pas être que d’être (ce
qui est exclu n’ayant aucune chance d’être).

Les marqueurs des modalités {[-nécessaire], [-impossible]} semblent donc se ranger, en français, le long d’un
continuum, en termes de [virtuel], [discontinu] :

[-virtuel] [+virtuel]
[-discontinu] [+discontinu]16

Il se fait que Il arrive que Socrate coure, mais il Il est possible


Socrate court. ne court pas maintenant. que Socrate coure
un jour/ Socrate
Il se trouve que Il se peut que coure
Il peut se faire [« d’habitude »
que17 : « soit un
coureur »], mais

14
Acceptable, à la limite, sous lecture habituelle (ou dispositionnelle) : si donc Socrate était entendu avoir l’habitude de courir
tous les soirs (a fortiori si Socrate était un athlète (coureur professionnel) plutôt qu’un philosophe).
15
Ce qui vaut de l’ensemble tout entier vaut également de l’un (quelconque) de ses membres : si la proposition « tout homme
est non-violent » est vraie, alors la proposition « quelque homme est non-violent » l’est aussi.
16
C’est là la modalité sporadique isolée dans Kleiber 1983.
17
Verbe factuel ponctuel + auxiliaire modal de possibilité ([+virtuel]).

10
Il peut arriver il ne court pas
que18 maintenant.
S’il arrivait Socrate coure
que19 un jour, …

<contingent ponctuel> <contingent discontinu> <possible>


prédication validée prédication validable20

La distinction entre <contingent> et <possible> est donc à maintenir en langue naturelle, même si elle se laisse
réduire en logique (par le jeu des méta-termes).

NÉCESSAIRE

● verbes modaux : devoir (+infinitif), il faut que + subjonctif, il faut + infinitif21

- aucune contrainte pour les énoncés exprimant une « nécessité analytique » (=de définition –
voir exemples (1) et (2)), mais il y a des contraintes sur l’emploi de devoir/il faut dans des énoncés
qui expriment un fait d’observation (comportement régulier, habituel) : il faut que la régularité
observée se laisse interpréter comme le produit d’une inférence, et que l’inférence ait des amorces
(marques linguistiques) dans l’énoncé (exemple (3a-b)) :

(1) Un nombre premier doit être impair (Krønning 2001 : 77)


(2) Tout ce à quoi on réfère doit exister. Appelons cela l’axiome de l’existence (Searle 1969 :121, apud
Kronning 2001 : 68)
(3)
a. Sous la pression atmosphérique normale, l’eau doit bouillir à 100 degrés
b. ?L’eau doit bouillir à 100 degrés/ OK L’eau bout à 100 degrés (Krønning 1996 : 37)

Tel n’est pas le cas de tout énoncé d’une nécessité d’inférence (=nécessité synthétique), les énoncés
génériques tel (4) sont grammaticaux même si l’inférence n’y a pas d’amorce linguistique, se rapprochant
en cela de la nécessité de définition. Comparer à (5) et (6), qui comportent une amorce d’inférence (soulignée
dans le texte) :

(4) Tous les hommes doivent mourir (Krønning 2001 : 78). [inférence implicite sans amorce autre que
l’entrée lexicale du nom substantif homme : Homme,= animal, animal=mortel, donc homme = mortel]
(5) Si tu lances une pierre dans l’air, il faut qu’elle retombe.
(6) Une fois né, il faut aussi mourir.22

- « futur aléthique » : Est-ce de Galilée que le Christ doit (+OKva23) venir ? (Jean 7 : 41, Bible 1975,
apud Krønning 2001 : 78).
- « futur aléthique du passé » : Cependant, pour Lisbeth, la date du départ approchait : elle devait
(OKallait) quitter Paris le dimanche suivant (Martin du Gard, apud Krønning 2001 : 78).

- « condition nécessaire » : Les candidats doivent avoir moins de 52 ans au moment de la


nomination (Krønning 2001 : 79). Que doivent être l’homme et le monde pour que le rapport soit
possible entre eux ? (Sartre 1943 :38, apud Krønning 2001 : 73).

18
Verbe factuel discontinu + auxiliaire modal de possibilité ([+virtuel]).
19
Charge d’irréel du tour syntaxique (Si…-ait) aidant, le verbe factuel en arrive à être compatible avec le caractère virtuel du
dictum.
20
Cf. Cristea 1981 :37- 44, pour une analyse que nous reprenons ici à notre compte, modulo la distinction entre « aléatoire
virtuel » et « possible » à proprement parler. L’aléatoire virtuel (appelé aussi, dans cette référence, « contingent » – par rapport
à l’ « aléatoire actuel », qui regroupe les réalisateurs que nous avons rangés sous <contingent ponctuel>/ <contingent
discontinu>) n’est cela dit à distinguer du vrai possible qu’en termes de leurs marqueurs respectifs, réputés (para)synonymes ;
aucun test distributionnel ne permet de discriminer par ailleurs les deux classes sémantiques alléguées. Les cas de
surmodalisation comportant un verbe factuel (pouvoir+ verbe factuel : il peut se faire que, il peut arriver que), tour syntaxique
virtualisant + verbe factuel : s’il arrivait que…,) sont analysés comme « aléatoire virtuel » (saisie compositionnelle), et les cas de
modalisation simple (il se peut que….), comme du (vrai) « possible ».
La seule distinction quasi-distributionnelle d’avancée nous semble bien ténue : +alternative équiprobable [explicitée], +
contingent/ -alternative équiprobable [explicitée], +possible. Il se peut que ça tourne bien serait un cas de « possible » tout
court, tandis que il se peut que ça tourne bien, comme il se peut que ça tourne mal serait un cas de « contingent » (« aléatoire
virtuel »).
21
Il faut partir = il faut que l’on parte
22
Exemples de notre main, sur le modèle des exemples à devoir aléthique empruntés aux écrits de Hans Krnning.
23
Argument linguistique pour l’interprétation aléthique vs épistémique de ces énoncés à lecture futurale : relation paraphrastique
à : V-FUT probablement/ certainement/ sans doute barrée (Kronning 2001 : 74).

11
● Adjectifs opérateurs de phrase : il est nécessaire que (+subjonctif)/ de (+infinitif), il est inévitable que
(+subjonctif)

(7) Il est nécessaire d’être exposé à ce type de stimuli avant un âge critique, pour apprendre à parler.
(8) Il est nécessaire que l’on soit exposé à ce type de stimuli avant un âge critique pour que l’on apprenne
à parler.

(9) Il est inévitable qu’il en soit ainsi (P. Rob.).

Inévitable a de nombreux synonymes à lecture première24 aléthique: [conséquence] immanquable, [coup]


imparable, [réformes] incontournable [s], [destin] inéluctable, [conséquence] fatal[e] [du capitalisme]. Pourtant
aucun de ces synonymes n’est susceptible de vrai emploi d’opérateur de phrase et ne joue donc le rôle d’un
modalisateur aléthique.
Quand ils fonctionnent comme attributs de ce, dans le tour (familier), c’est +Adj, employé en incise, leur
interprétation semble être sensible au contexte. C’est en particulier le cas de l’adjectif fatal.

Dans un co-texte déjà aléthique, l’adjectif fatal aura une lecture de <nécessité> aléthique :
(10) Et il faut que ça arrive, c’est fatal (P. Rob. : fam.),

Dans un contexte épistémique (prédiction), la lecture épistémique (de <certitude>) semble s’imposer :
(11) Paul arrivera bien à lui mettre la main dessus, c’est fatal. (« c’est sûr »).

● Adverbes modaux : fatalement, forcément, immanquablement, inéluctablement, inévitablement,


nécessairement

(12) Le génie est fatalement condamné à n’être qu’imparfaitement compris de la foule (R. Rolland, in P.
Rob.) ;
(13) L’aventure devait fatalement tourner mal. (P. Rob.)
(14) La cause et l’effet sont liés nécessairement. (P. Rob. : adverbe de manière)/ La cause et l’effet sont
nécessairement liés (modalisateur de re).
(15) Le sérieux que donne nécessairement la pensée continuellement fixée sur tout ce qui est grand
(Stendhal, in P. Rob.).

POSSIBLE

● verbes modaux : pouvoir +infinitif (possibilité interne (capacité)/ externe (possibilité matérielle)), il se
peut que + subjonctif, savoir au conditionnel présent négatif + infinitif

(16) Elle peut venir à pied, sa jambe est déplâtrée. (capacité)


(17) Elle peut venir à pied, puisqu’il n’y a plus de verglas. (possibilité matérielle)
(18) Si le ciel se couvre, il se PEUT qu’il pleuve. (prémisses non actuelles → possibilité matérielle25).
(19) Je ne saurais vous remercier assez de votre aide. (capacité).

● Locutions verbales comportant le nom chance (« possibilité de se produire par hasard »)26 : il y a peu
de chances, il y a des chances, il y de fortes chances, il y a une bonne chance (pour) que + subjonctif

(20) Il y a des chances que votre fille guérisse, si vous suivez à la lettre ces quelques conseils.

● Adjectif opérateur de phrase : il est possible que + subjonctif

(21) Il est possible que votre fille guérisse, sous réserve de suivre à la lettre le traitement prescrit.

● Adverbes modaux : éventuellement, possiblement (Québec)

(22) Vous n’êtes manifestement pas des personnes possiblement (+éventuellement) intéressées par cette
offre (= « susceptibles d’être intéressées par… ». Cf. Les personnes possiblement (+éventuellement)
intéressées par cette offre (P.Rob.)).

CONTINGENT

24
Ainsi que d’autres, dont l’acception « nécessaire » (nécessité aléthique) est dérivée, en français familier, d’un sens premier
« obligatoire » (nécessité déontique) : forcé, obligé, obligatoire. À la faveur d’un co(n)texte orienté vers l’aléthique, ces adjectifs
fonctionneront comme modalisateurs aléthiques, dans la même structure syntaxique. Une fois lancée dans l’air, la pierre
retombera, c’est obligé (+c’est forcé, + c’est obligatoire). C’est forcé connaît même un emploi d’ouvreur de phrase : une fois
lancée dans l’air, c’est forcé qu’elle retombe. Et, dans le P. Rob. : C’est forcé qu’il perde/ Il perdra, c’est forcé.
25
Lecture conditionnée également à certains faits d’intonation (accent focal sur le verbe modal plutôt que sur le verbe dictal).
26
Expriment, selon T. Cristea, l’« aléatoire virtuel quantifié » (Cristea 1981).

12
● Verbes factuels : il arrive que+ subjonctif/ il arrive à qqn de +infinitif, il se fait que, il se trouve que+
indicatif27

(23) II arrive que le mois d’août soit pluvieux (Cristea 1981 :40).
(24) Il lui arrive de se tromper (Cristea 1981 :41).
(25) Il se trouve que, malgré la justesse du raisonnement, la solution est fausse (Lexis, apud Cristea
1981 :39).
(26) Comment se fait-il qu’il parte déjà (+ qu’il soit déjà parti) ? (P. Rob.)

● adverbiaux modalisateurs de sémantique [+contingent] : par hasard, incidemment28

(27) Est-ce que par hasard vous ne seriez pas complice ? (P. Rob.)
(28) Si par hasard tu le vois, préviens-le (« au cas où ») (P. Rob.).
(29) Dinde : Gros oiseau dont la chair, quand on la mange à l'occasion de certains anniversaires religieux, a
des vertus de ferveur et de grâces. Incidemment, c'est un excellent mets
[Le Dictionnaire du Diable (1911)].

● Marqueurs non spécifiques :


● Adjectifs opérateurs qui réalisent, à la forme affirmative, le <nécessaire>, employés à la forme
négative29 : il n’est pas nécessaire de +infinitif/ que+subjonctif

(30) Il n’est pourtant pas nécessaire que tous les événements finissent mal. (Cristea 1981 : 42).

● Adverbes de modalisation qui réalisent, à la forme affirmative, le <nécessaire>, employés dans des
phrases négatives : pas forcément, pas nécessairement

(31) Tu n’auras pas forcément raison30 (P. Rob.).


(32) Tous les événements ne finissent pas nécessairement mal.

IMPOSSIBLE

Pas de réalisateurs spécifiques, hormis l’adjectif impossible lui-même (opérateur de phrase il est impossible de +
infinitif/ que+ subjonctif) : formes négatives de certains réalisateurs du POSSIBLE.

(33) Il m’est impossible sur ce point d’être de leur avis (Renan, in P. Rob.)
(34) Impossible de le joindre (P. Rob.)).
(35) Il est impossible que tous les étudiants aient fait la même erreur.

(36) Il n’est pas possible que tous aient fait la même erreur.
(37) Elle ne peut pas venir à pied, sa jambe est dans le plâtre.
(38) Elle ne peut pas venir à pied, à cause du verglas.

Principaux marqueurs :

Il est nécessaire/possible que l’on+ subj = il est nécessaire/possible de + inf


Il faut que l’on + subj = il faut+inf
Devoir/ pouvoir+ inf

Remarques.

(1) NecessaireALÉTHIQUE : C’est+adj / c’était + adj (fatal, forcé, obligé, obligatoire)

Noter qu’à l’imparfait (c’était fatal), à la faveur de la rupture d’avec l’instance d’énonciation actuelle (<moi-ici-
maintenant>), l’adjectif marquera la nécessité aléthique, même si la proposition donnant son antécédent à ce
n’a pas d’orientation aléthique particulière :
(39) Paul y est arrivé, c’était fatal.

L’interprétation épistémique peut être retrouvée alors dans les contextes échoïques (discours rapporté de paroles
ou de pensées) :

27
Excepté : comment se fait-il que+ subjonctif.
28
Noter que l’adverbe accidentellement, synonyme des deux modalisateurs invoqués, ne fonctionne, lui, qu’en tant qu’adverbe
de manière (modificateur du verbe, susceptible de porter l’accent focal, et donc de faire l’objet d’une restriction – sachant que
les marqueurs restrictifs du type de seulement, ne… que sont des opérateurs de focalisation) : je l’ai avalée accidentellement.
Je ne suis qu’accidentellement impliquée dans cette affaire.
29
Le contingent étant le contradictoire du nécessaire, rien d’étonnant que les formes négatives des réalisateurs du nécessaire
réalisent le contingent.
30
« Il peut arriver que tu te trompes ».

13
(40) Paul devait y arriver, c’était fatal. (= « Paul doit (+va) y arriver, c’est fatal » pensait Jean (dont le
locuteur rapporte donc les pensées)). Style indirect libre.

(2) À propos de la notion de « cotexte (déjà) aléthique ».

Remarquer que, dans l’exemple du Petit Robert donné plus haut (Et il faut que ça arrive, c’est fatal), le
modalisateur il faut que n’est pas décisif à lui seul : le contenu propositionnel modalisé y joue aussi (arriver –
verbe factuel à sémantique de type aléthique, <CONTINGENT>).

Comparer à l’exemple suivant, où, en l’absence d’un tel indicateur au niveau du dictum, les deux lectures sont
possibles :
(41) Il faut que Paul réussisse à lui mettre la main dessus, c’est fatal. (lectures possibles : aléthique et
épistémique).

L’ajout d’un facteur favorisant l’une des interprétations est seul en mesure de lever cette ambiguïté :
(42) Il faut bien que Paul réussisse à lui mettre la main dessus, c’est fatal. (lecture épistémique seule, en
raison de l’adverbe bien).

(3) Possibilité aléthique et portée extra-prédicative

Selon Nicole Le Querler (2001), il se peut que est un marqueur modalité syntaxiquement extra-prédicative, donc
sémantiquement extra-prédicative aussi, donc épistémique (de <probabilité>). Cela revient à dire que le
<possible aléthique> est exclusif de portée extra-prédicative. Nous pensons que tel n’est pas le cas
systématiquement. En particulier, dans l’apodose (= assertion) d’une macrostructure conditionnelle, et
avec une protase (= supposition) et un prédicat (dictal) consistants avec la lecture de <possibilité
matérielle>, il se peut que, il peut arriver que, il peut se faire que etc. ne laissent pas de marquer le <possible
aléthique> plutôt que l’<éventualité épistémique>. Comparer :

(43) Si le ciel se couvre, il se peut qu’il pleuve. (prémisses non actuelles → possibilité matérielle31)
(44) Le ciel se couvre : il se peut qu’il pleuve. (prémisses in præsentia32 → probabilité)
(45) A : Quel temps fait-il à Londres aujourd’hui ?
B : Il se peut qu’il pleuve, je n’en sais rien. (prémisses de raisonnement au mieux implicites (topos33 du
temps pluvieux à Londres) → absence de certitude (valeur épistémique explicitée, renforcée par l’incise je n’en
sais rien): « peut-être bien qu’il pleuvra, peut-être qu’il ne pleuvra pas »)

(4) Verbes factuels et modalisation aléthique : le contingent actuel

(46) Comment se fait-il qu’il parte déjà (+ qu’il soit déjà parti) ? (P. Rob.)

Le subjonctif après comment se fait-il que s’explique par la remise en cause du contingent actuel : « je n’en
crois pas à mes yeux/ à mes oreilles ». Le contingent (aléthique) y est intégré à une stratégie discursive
épistémique (doute).

31
Exemple (18) plus haut.
32
Le locuteur constate de visu (i.e. de ses propres yeux) que le ciel se couvre.
33
Lieu commun.

14
5.2.2. La zone des modalités épistémiques et ses réalisateurs en français.

Carré épistémique :

Certain Exclu
100 % VRAI 100% FAUX
(=CERTAIN QUE P) (=EXCLU QUE P)
(=EXCLU QUE NON-P) (=CERTAIN QUE NON-P)

+INDICATIF +SUBJONCTIF

Probable Incertain
PLUS DE 50% VRAI (AU MIEUX)
(=PROBABLE QUE P) 50% VRAI/ 50% FAUX
(=NON CERTAIN QUE NON-P) (= NON CERTAIN QUE P)
(=NON EXCLU QUE P) (=NON EXCLU QUE NON-P)

De fait nous avons, dans l’épistémique, des valeurs modales en progression graduelle du certain vers l’exclu, en
dépit des équipollences métalinguistiques héritées de la tradition philosophique (qui avait connu de fait les seules
modalités de l’aléthique) :

certain> probable > // incertain> douteux> improbable >exclu


Si de fait l’improbable était équivalent de l’exclu, qui jouerait encore au Loto ?

CERTAIN

● Verbe modal dédié : savoir (vs croire, penser)

⮚ Je sais que Paul est malade. (= « je crois que Paul est malade et Paul est de fait malade » : savoir =
croyance vraie)

(a) Savoir est un verbe factif (vérité du dictum présupposée), croire et penser, non :

⮚ Je savais que Paul était malade. →34 Paul était malade.


⮚ Je ne savais pas que Paul était malade. → Paul était malade35.
⮚ Vous savez que Paul est parti. → Paul est parti.
⮚ Vous ne savez pas que Paul est parti. → Paul est parti.

⮚ Ni « Je crois que Paul est malade » ni « Je pense que Paul est malade » n’impliquent la vérité de « Paul
est malade ».

La croyance est donc (au mieux) un savoir faible, un savoir par défaut. D’où la possibilité de dire :
⮚ Je crois (+pense) que Paul est malade, mais je n’en suis pas sûr. (où il est évident que les verbes
modaux croire et penser n’expriment plus la certitude, fût-ce faiblement, mais la simple probabilité).

⮚ « Jean croit que Paul est malade » oriente plutôt vers le faux, du point de vue du locuteur (« je ne le
crois pas », « je sais que tel n’est pas le cas »).

⮚ « Jean pense que Paul est malade » ne préjuge en rien de l’opinion du locuteur.

34
La flèche se lira ici : « présuppose ».
35
Rappel : la présupposition est une relation d’implication non affectée par la négation de l’antécédent.
P implique Q (« si P vrai, alors Q vrai »). La vérité de la proposition « Pierre est étudiant » (P) implique la vérité de la proposition
« Pierre est un homme » (Q). Notée P  Q ou P  Q.
P présuppose Q : P implique Q et non-P implique toujours Q (la vérité de Q est une condition nécessaire de la vérité ou de la
fausseté de P). Notée P→ Q. Cf. Tuţescu 1978 : 224-225.

15
(b1) <X sait que p> → <Je sais que p>
(b2) <Je savais que p> → <Je sais que p>

Hiérarchie des univers de croyance (Martin 1987) :


L’univers de croyance du locuteur actuel (je) > l’univers de croyance d’autrui (« hétéro-univers ») : interlocuteur,
tiers ou locuteur lui-même par le passé.

⮚ « Jean sait que Paul est malade ». → « Je sais que Paul est malade ».
⮚ « Jean ne sait pas que Paul est malade ». → « Je sais que Paul est malade ».

⮚ « Je savais que Paul était malade » → « Je sais que Paul était malade ».
⮚ « Je ne savais pas que Paul était malade » → « Je sais que Paul était malade ».

La logique épistémique, inaugurée par les travaux de Hintikka36, se présente comme une logique de
l’épistémologie étudiant l’ensemble des conséquences logiques relatives aux affirmations de connaissance. Quelle
conséquence puis-je tirer par exemple du fait de savoir qu’il pleut dehors ? Si je sais que telle chose est vraie,
alors : je ne sais pas qu’elle n’est pas vraie, je crois qu’elle est vraie, je sais que je sais qu’elle est vraie, je
connais toutes les conséquences logiques de sa vérité, etc.

● Adjectifs opérateurs de phrase (il est… que + indicatif) : sûr, certain, incontestable, vrai, évident+
indicatif37

⮚ Il est sûr que les cours seront suspendus jusqu’à nouvel ordre.
⮚ Il est vrai que le mont Everest est le plus haut sommet du globe (Bordas).
⮚ Son mari l’ayant giflée, il est évident que votre fille le quittera.
⮚ Il est incontestable que ce trajet est plus pittoresque.

● Adverbes modaux : certes, certainement, assurément, sûrement, absolument, à coup sûr, évidemment,
manifestement

⮚ Les cours seront assurément suspendus jusqu’à nouvel ordre.


⮚ Cela étant, votre fille va évidemment quitter son mari.
⮚ Manifestement, votre fille a eu raison de quitter son ivrogne de mari.
⮚ Ce trajet est incontestablement plus pittoresque, même s’il est un peu plus long.
⮚ Incontestablement, le mont Everest est le plus haut sommet du globe.

● Négativisation de réalisateurs de l’incertitude38 : ne pas douter (+indicatif39), sans doute

⮚ Je ne doute pas qu’il est sincère (P.Rob). Je ne doute pas qu’il le fera (Hanse 1991 : 351).
⮚ Il est sans doute (+sans nul doute, +sans aucun doute) sincère.

● Mode indicatif – réalisateur grammatical typique de la certitude (modalité d’énonciation assertive) : fait
réel (Paul est parti, Il est encore là, Elle riait à gorge déployée), fait réalisable (Il va partir sous peu),
voire non réalisé (mais qui a été sur le point de l’être – imminence contrecarrée : Encore un pas et tu
tombais dans l’abîme).

PROBABLE

● Verbes modaux d’opinion et d’apparence : croire que, penser que; se douter que/ de ce que ; paraître
que, sembler que + indicatif (ou conditionnel)

⮚ Je crois que cet enfant sait déjà lire.

36
Jaakko Hintikka, « Knowledge and Belief (An Introduction into the Logic of the two Notions) », Ithaca Press, New York, 1962,
179 pages.
37
Noter cependant que il est exact que peut être suivi du subjonctif, en raison sans doute de son glissement vers l’évaluation
subjective (modalités axiologiques, thymiques) comme marqueur d’une « constatation vigoureuse » – cf. Mauger 1968 : 303,
citant à ce sujet G. Gougenheim, Structure et économie en linguistique.
38
Rappel du carré sémiotique : CERTAIN a INCERTAIN (DOUTEUX) pour contradictoire, PROBABLE a IMPROBABLE (EXCLU) pour
contradictoire (diagonales).
39
Pour insister sur la réalité de l’état de chose décrit dans la subordonnée. Car en principe, le subjonctif reste de mise après
douter, y compris à la forme négative ou interrogative: Je ne doute pas qu’il (ne) le fasse, Doutez-vous qu’il (ne) vienne ? (ne
dit « explétif » optionnel, aux formes négative et interrogative du verbe modal) – cf. Hanse 1991 : 351-352). Mais ces énoncés-
ci exprimeront une valeur modale de <probabilité> (voire de <probabilité faible> – cf. P. Rob. 2007, douter, 1°, ne pas douter
que : « avec subj., si la chose est très peu probable ») plutôt que de <certitude>.

16
⮚ Je pense que les étudiants ont compris votre explication.
⮚ Je me doute qu’il s’est trompé.
⮚ Il me paraît (« j’ai l’impression, je crois ») que Paul a tort.
⮚ Il me paraissait que le départ était proche.
⮚ Il paraît que cet enfant sait déjà lire (« d’après ce qu’on en dit »40).
⮚ Il me41 semble que vos bons amis vous laisseraient tomber volontiers, n’était-ce votre beau-père42.
(Comparer à la phrase racine43 correspondante, toujours au conditionnel: Vos bons amis vous
laisseraient tomber volontiers).
⮚ Il semble bien44 que Paul s’est rendu compte de votre trahison.
⮚ Il semblait45 que personne n’avait rien à leur reprocher.

● Verbes modaux à sémantique initiale non épistémique (polysémie de marqueurs) : pouvoir, devoir +inf.

⮚ Sylvie peut (bien) être rentrée à pied.


⮚ Les lumières sont éteintes : ils doivent être déjà partis.

● Adjectifs opérateurs de phrase (il est … que) : vraisemblable, probable + indicatif

⮚ Vu le nombre d’absents, il est probable que la réunion sera ajournée.


⮚ Il est vraisemblable que vos bons amis vous laisseront tomber sans crier gare, maintenant que votre
divorce vient d’être prononcé.

● Adverbes modaux : probablement, vraisemblablement, apparemment, peut-être ; peut-être que46 +


indicatif

⮚ Vos bons amis vous laisseront vraisemblablement tomber, maintenant que votre divorce vient d’être
prononcé.
⮚ La réunion sera probablement reportée à la semaine prochaine.
⮚ Peut-être que les étudiants ont compris votre explication.

Noter la « fuite vers le probable » de marqueurs à sens premier de certitude :


- les réalisateurs d’incertitude négativisés :
⮚ Sans doute est-il sincère.
⮚ Sans doute arrivera-t-elle demain. (apparemment, vraisemblablement, probablement)
⮚ Je ne doute pas qu’il (ne) soit sincère. (P. Rob.)
- tout autre adverbial de la série :
⮚ Il est sûrement parti (en l’absence d’évidence du contraire, mais aussi sans preuve de l’état de chose
décrit dans le dictum).

(INCERTAIN=) DOUTEUX

● Verbe modal dédié : douter47 + subjonctif

⮚ Paul doute que vous puissiez me remettre le mémoire à temps.

● Verbe d’apparence (réserve subjective) + subjonctif (« hésitation à affirmer »):

⮚ Il semble que nous nous soyons trompés.

● Formes négative et interrogative de croire, penser48 ; sembler, paraître + subjonctif

40
Probabilité alléguée. Forme de discours rapporté, avec effet de distanciation : refus du locuteur d’assumer la responsabilité du
dire rapporté.
41
L’opinion prend plus de crédit quand elle est rattachée à une personne déterminée : il semble que + subj. (<incertain>), il me
(te, lui…) semble que + indicatif (<probable>).
42
Macrostructure conditionnelle (n’était-ce = s’il n’y avait)
43
Non enchâssée.
44
L’adverbe épistémique (confirmatif) bien infléchit l’interprétation dans le sens de la certitude (plus exactement : vers la
probabilité).
45
Noter le tiroir verbal (l’imparfait) : le subjonctif domine nettement (toutes choses égales par ailleurs) après il semble que et
l’indicatif, dans la mesure où il convient aussi, est plus fréquent (sans toutefois s’imposer) en particulier après il semblait que –
cf. Hanse 1991 : 869.
46
Peut-être + inversion du sujet (Peut-être est-il parti plus tôt).
47
Définition lexicographique : « être dans l’incertitude de la réalité d’un fait, de la vérité d’une assertion » (P. Rob., douter, v.
tr. ind., 1).
48
Mais pas de se douter :
⮚ Elle ne s’était pas doutée qu’on l’observait.

17
⮚ Je ne crois pas qu’il sache jouer du piano.
⮚ Je ne pense pas que les étudiants aient compris votre explication.
⮚ Crois-tu que Marie revienne parmi nous avant Pâques ? (Comparer à : Tu crois donc que Marie reviendra
parmi nous avant Pâques).
⮚ Pensez-vous que la réunion doive être ajournée ?49 (Comparer à : Vous pensez donc que la réunion doit
être ajournée).
⮚ Le visage si froid, si parfaitement impassible qu’il ne semblait pas que le moindre sentiment pût l’habiter
(Vercors, Le silence de la mer, p. 67, apud Hanse 1991 : 869).
⮚ Semble-t-il seulement qu’on s’en soit aperçu ? (Hanse 1991 : 869)
⮚ Il ne me paraissait pas que le départ fût proche.
⮚ Il ne paraît pas que ce soit bien.

● Verbe modal à sémantique initiale aléthique (<possible>, <contingent> – polysémie de marqueurs) : il


se peut que, (y compris dans des structures de sur-modalisation : il se peut faire que, il peut se faire que
) + subjonctif

⮚ Le ciel est gris : il se peut qu’il pleuve cet après-midi.

● Adjectifs opérateurs (Il est/ paraît … que +subjonctif) : possible, douteux ; marqueurs de certitude
négativisés : il n’est pas certain que…, il ne paraît pas certain que…+subjonctif ; marqueur de probabilité
négativisé : il est improbable que…50

⮚ Il est possible qu’il vienne demain soir.


⮚ Il paraît douteux qu’il vienne.
⮚ Il ne me paraît pas certain qu’il vienne.
⮚ Il est improbable qu’il vienne.

En résumé (verbes d’apparence) :


Il paraît que + indicatif/ Il ne paraît pas que + subjonctif (impression produite par l’objet (état de chose), sur le
sujet) : TESTIMONIAL (mise à distance)

Il semble que + subjonctif (impression ressentie par le sujet)/ RÉSERVE SUBJECTIVE

Il me (te, lui…) semble que (« avoir l’impression » : affirme la réalité de notre pensée), Il me (te, lui…) paraît
que (« donner l’impression » : affirme la réalité de l’apparence) + indicatif/ Il ne me semble pas que, Il ne me
paraît pas que + subjonctif
Il semble bien que + indicatif
Il semblait que + indicatif51 (fréquent)/ subjonctif imparfait (plus rare)

(IMPROBABLE►) EXCLU

● Adjectifs opérateurs (ou locutions): (il est… que +subjonctif) : exclu, hors de question ; impossible
(attraction de l’aléthique vers l’épistémique)

⮚ Il est exclu que vous soyez licenciée dans ces conditions.


⮚ Il est impossible qu’il revienne avant midi.

5.2.3. Modalités aléthiques/ modalités épistémiques. Critères distributionnels distinctifs.

(IM)POSSIBLE aléthique/ « POSSIBLE épistémique » (INCERTAIN ; PROBABLE)

Marqueurs favorisant la lecture épistémique :


⮚ il se peut que + subjonctif,
⮚ peut-être (que/ +inversion du sujet), …peut-être…

⮚ Te doutais-tu qu’on t’observait ?


dont les formes négative ou interrogative ne seraient suivies du subjonctif que rarement (Hanse 1991 :352) : Il ne se doutait pas
qu’on eût des preuves contre lui.
49
Interprété à : « je ne pense pas que la réunion doive être ajournée » (question rhétorique), ou comme vraie question portant
sur les opinions de l’interlocuteur.
50
Qui ne fonctionne pas comme réalisateur de l’<EXCLU>, mais comme réalisateur de l’<INCERTAIN> (<DOUTEUX>). C’est plus
qu’improbable, c’est impossible (P. Rob). Le carré épistémique recèle une inexactitude en regard des langues naturelles: si
l’incertain peut être entendu en langue naturelle come synonyme de douteux, improbable ne peut pas être entendu comme
synonyme de exclu ; les valeurs épistémiques sont donc plutôt à ordonner sur un axe graduel (<certain-probable-incertain
(=douteux)-improbable (= très douteux)-exclu>).
51
Peut-être est-ce suite à l’éloignement du <moi-ici-maintenant> propre à l’imparfait, que l’expression connaît un affaiblissement
de son caractère fortement subjectif à l’origine de la sélection du subjonctif par ailleurs (sorte de glissement vers l’objectif).

18
Contextes favorisant la lecture épistémique de pouvoir non pronominal:
⮚ infinitif passé dictal : Sylvie peut être rentrée à pied52.
⮚ circonstancielle causale/ finale +infinitif passé dictal : Pour faire de l’exercice/ Comme elle aime faire de
l’exercice, elle peut être rentrée à pied (=il se peut qu’elle soit rentrée à pied).
⮚ adverbe épistémique bien : Elle peut bien être malade/ Elle peut bien venir à pied/ Elle peut bien être
venue à pied/ Que peut-elle bien vouloir dire par là ?/ Qui peut bien être venu à pied par un temps
pareil ?!
⮚ inférence à partir d’une protase (=première prémisse du syllogisme ; proposition conditionnelle) de
type véridictoire : Si ce que vous dites est vrai, elle peut être en train de préparer sa candidature à
un poste de maître de conférences.

Contextes barrant la lecture épistémique de pouvoir non pronominal:


⮚ négation53 : Comme elle a la jambe droite dans le plâtre, Sylvie ne peut pas être rentrée à pied54
(impossibilité aléthique : incapacité).
⮚ interrogation (totale : vrai appel d’information) : Peut-elle rentrer à pied, Docteur ? (appel d’information
concernant l’état de santé de la patiente, sa capacité de faire telle ou telle chose55)

(Autres) contextes favorisant la lecture aléthique intra-prédicative de pouvoir non pronominal:


⮚ question-QU (appel d’information) portant sur la manière56/ phrase assertive à complément de
manière → possibilité aléthique (possibilité matérielle ou bien capacité): Comment peut-elle rentrer ?
Elle peut rentrer en voiture ou par le train. Comment peut-elle résoudre tous ces exercices ? Elle peut
les résoudre en étudiant la bibliographie/ à l’aide d’un dictionnaire spécialisé, …
⮚ dans une subordonnée finale ou hypothétique : Enlevons ce plâtre, afin qu’elle puisse se dégourdir les
jambes. (capacité) Vous m’obligeriez si vous pouviez y aller de ce pas. (capacité→ requête)
⮚ infinitif (non perfectif), sous interrogation et/ ou exclamation : Moi, pouvoir grimper cette pente ?/ !/ ?!
Moi, pouvoir rater le bus ? / !/ ?!
⮚ pronominalisation en le du complément de pouvoir :
-Peut-elle venir à pied ?
-Elle le peut, sa jambe est déplâtrée.

Contextes favorisant même la lecture aléthique (→(im)possibilité matérielle) de pouvoir pronominal:

⮚ après puisque ou si conditionnel (sous interprétation diaphonique57 de la séquence modus+dictum):


PUISQU’’il se peut que le chien ne me laisse de toute manière pas entrer dans la salle de séjour sans
vous, ce n’est plus la peine de me presser./ S’il se peut que même votre fille tourne mal, que dire de
la mienne, Monsieur l’Agent ?
⮚ négation58 : Il ne se peut pas qu’elle soit rentrée à pied par un temps pareil.

NECESSAIRE aléthique/ PROBABLE épistémique

52
La forme perfective de l’infinitif dictal n’est qu’un indice faible en faveur d’une lecture épistémique, puisque cette
interprétation ne survit pas aux contextes normalement suspendant cette interprétation, telles l’interrogation (interrogation
totale, vraie question appel d’information) ou la négation.
Noter que Peut-elle être rentrée à pied ? n’est susceptible de lecture épistémique que sous interprétation délibérative de la
question même (question délibérative = question adressée à soi-même, en cas d’hésitation : « serait-elle rentrée à
pied ? »). Alors, la question délibérative pourra être entendue porter sur la manière dont Sylvie est rentrée (à pied, en voiture,
en métro, par le tram…) et non sur sa capacité d’être rentrée de cette manière : « je me demande si elle est rentrée à pied » et
non « je me demande si elle peut (= est capable de) l’avoir fait ».
De même, la question Peut-elle avoir fini sa thèse avant Noël? – entendue comme question délibérative – recevra une lecture
épistémique, si elle est prononcée au mois de février suivant Noël (« aurait-elle fini sa thèse avant Noël ? »), mais une lecture
aléthique si elle est prononcée au mois de novembre précédent (« sera-t-elle capable de finir sa thèse avant Noël ? »). Dans ce
second cas de figure, cette question peut même apparaître dans un contexte interrogatif standard, en tant que question appel
d’information (adressée à autrui).
53
Noter que la négation a le même effet sur se pouvoir (impersonnel pronominal), préservant ainsi l’acceptabilité d’énoncés
problématiques sous lecture épistémique (de il se peut) : Il ne se peut pas qu’elle soit rentrée à pied par un temps pareil
(impossibilité aléthique : impossibilité matérielle). Comparer à : ???Il se peut qu’elle soit rentrée à pied par un temps pareil (énoncé
à acceptabilité problématique pour des raisons sémantico-pragmatiques : par un temps pareil (mauvais temps) oriente vers NE
PAS RENTRER A PIED, voire NE PAS SORTIR, contrairement au modal il se peut que, qui exprime (par défaut) la <probabilité>
(valeur de « possible » épistémique)).
54
Noter l’apport de la négation contre un contexte normalement voué à interprétation épistémique.
55
Plutôt que demande de permission.
56
Comparer à une question-QU portant sur le temps : Quand peut-elle rentrer ?, davantage orientée vers la lecture « demande
de permission » que vers l’interprétation de vrai appel d’information, qui favorise la lecture aléthique (capacité, possibilité
matérielle).
57
Reprise à l’allocutaire ou à un tiers. En clair, l’allocutaire (ou bien un tiers) aura dit préalablement p (qui renferme le modus
et le dictum de la séquence puisque p, ou respectivement si p), ou au moins celui qui énonce puisque p/ si p lui attribue cette
pensée.
58
Voir note 2 supra.

19
Contextes barrant la lecture épistémique de devoir, mais compatibles avec la lecture aléthique :

⮚ interrogation partielle (question-QU) : Quand est-ce que Paul ne doit pas travailler, en tant que
catholique pratiquant ? avec, pour réponse attendue : En tant que catholique pratiquant, Paul ne doit
pas travailler le dimanche).59 Dans le cas de la question, la lecture épistémique est barrée, seule restant
disponible, au vu de la restriction en tant que catholique pratiquant (= « si Paul est un
catholique pratiquant »), la lecture aléthique de condition nécessaire (« ne pas travailler le dimanche »
est alors présenté comme condition nécessaire pour « être un catholique pratiquant »), telle que définie
dans Kronning 2001 : 79; comparer à l’effet de sens – toujours aléthique – nommé par Hans Kronning
« nécessité analytique argumentative » : Paul doit ne pas travailler le dimanche, ou ce n’est pas un vrai
catholique. Noter que, sortie du contexte immédiat de l’échange question-réponse, l’assertion En tant
que catholique pratiquant, Paul ne doit pas travailler le dimanche ne barre pas au même titre la lecture
épistémique (ainsi que l’atteste la possibilité de substitution de devoir par sans doute : En tant que
catholique pratiquant, Paul ne travaille sans doute pas le dimanche).
Comparer également la question (ou le couple question-réponse) à un énoncé tel: Pierre doit travailler
même le dimanche, maintenant – à lecture épistémique parfaitement licite.

Que doivent être l’homme et le monde pour que le rapport soit possible entre eux ? (Sartre, apud
Kronning 2001 : 73 ; lecture aléthique : condition nécessaire).

⮚ subordonnée en puisque : Pierre ne peut pas venir aujourd’hui, puisqu’il doit partir pour Londres ce
soir (lecture épistémique barrée (probabilité), lecture aléthique permise – nécessité aléthique (futur
aléthique : « va partir »)).
⮚ enchaînement sur des prémisses convoquées in absentia : D’après les prévisions météo, le temps
doit s’améliorer demain. (Kronnig 2001 : 76 : lecture épistémique barrée (probabilité), lecture aléthique
permise – futur aléthique « va s’améliorer »).

Contextes favorisant la lecture épistémique de devoir :

⮚ enchaînement sur des prémisses convoquées in praesentia : Le ciel se découvre. Le temps doit
être en train de s’améliorer.
⮚ adverbe épistémique bien : Paul doit bien travailler demain.

Références de la section:
Kleiber, G. (1983). « L’emploi ‘sporadique’ du verbe pouvoir en français », in J. David ; G. Kleiber, (éds), La
notion sémantico-logique de modalité. Paris : Klincksieck, Collection Recherches Linguistiques, vol. 8, 183-201.
Kronning H. (1996). Modalité, cognition et polysémie : sémantique du verbe modal « devoir », Uppsala ;
Stockholm : Acta Universitatis Upsaliensis : Almqvist & Wiksell International.
Kronning, H. (2001). « Pour une tripartition des emplois du modal devoir », Cahiers Chronos 8 : 67-84.
Le Querler, N. (1996). Typologie des modalités, Caen : Presses Universitaires de Caen.
Le Querler, N. (2001). « La place du verbe modal pouvoir dans une typologie des modalités », Cahiers Chronos
8, Amsterdam-Atlanta : Rodopi, 17-32.
Sueur, J.-P. (1979). Une analyse sémantique des verbes « devoir » et « pouvoir », Le français moderne 47.2 :
97-120.
Sueur, J.-P. (1983). Les verbes modaux sont-ils ambigus ?, in : J. David ; G. Kleiber, (éds), La notion sémantico-
logique de modalité, Paris : Klincksieck, Collection Recherches Linguistiques, vol. 8, 165-182.
Tutescu, Mariana (2005) – L’Auxiliation de modalité. Dix auxi-verbes modaux, Bucuresti : Editura Universitatii
din Bucuresti
Van der Auwera, J. ; Plungian, V. (1998). „Modality’s semantic map”, Linguistic Typology 2 : 79-124.

5.4.3. Modalités explicitant, dans le discours, la sous-catégorie <VRAI> : <vérifié>, <évident>,


<avéré>60.

qui s’impose à l’esprit


<évident>
qui est saisi par la perception/
constatation directe

<VRAI> - <vérifié> connu comme tel par l’affirmation


(faible, forte)
<avéré> connu comme tel par la
confirmation

59
Dans le cas de : Quand est-ce que les Chrétiens ne doivent pas travailler ? Les Chrétiens ne doivent pas travailler le dimanche,
la lecture par défaut de devoir sera déontique (modalité du faire). Voir infra 6.5.
60
Cf. Drăghicescu 1981.

20
connu comme tel par la
démonstration

Il est vrai que + indicatif/ est-il vrai que/ il n’est pas vrai que +indicatif !!! [analyse citationnelle __ vrai que
« p »]
Il est faux que + subjonctif
Il est faux de dire/ croire/ prétendre que + indicatif

5.2.4.5. Modalités épistémiques, sources du savoir et degrés d’adhésion. Le médiatif (ou :


testimonial, ou encore : évidentiel).

Dans l’espace anglophone, l’étude des « sources du savoir » redouble, en liséré, l’étude des modalités
épistémiques, sans pour autant s’y confondre. Savoir une chose et se donner les moyens de justifier cette
attitude épistémique restent choses distinctes.
C’est dans ce paradigme théorique que nous devons situer l’évidentiel (correspondant français de l’anglais
evidential). Ne pas ramener ce terme à la notion (au demeurant véridictoire) d’<évident>, qui ne correspond
(au mieux) qu’à un cas particulier d’évidentiel : « qui est saisi par la perception/ constatation directe »).
Équivalents français : testimonial (si le témoin invoqué est la source alléguée plutôt que le locuteur lui-même
au moment de la parole), médiatif (terme qui focalise sur l’entité « intermédiaire » du savoir)
Perception : Je me suis laissé dire que (+j’ai entendu dire
que) Paul était parti pour Londres.

Selon Nathalie, tout le monde est emballé par les


Fruits d’Or.
Il paraît que tout le monde est emballé par les
Sources du savoir Emprunt : Fruits d’Or.
Tout le monde est emballé par les Fruits d’Or, à
ce qu’il paraît (Sarraute 1963 :13361, apud
Cristea 1983 : 88).
Le Pape aurait quitté Bucarest vers quatre heures
de l’après-midi.

Inférence : La secrétaire ne répond pas au téléphone


[=prémisse de raisonnement]. Elle peut avoir été
appelée chez le directeur [=conclusion]62.
La notion de mode médiatif.
La notion de mode médiatif plonge ses racines dans une tradition étroitement liée à la description particulière des
langues (à l’instar de notions telles les notions d’aspect et de mode de procès (Aktionsart)). Certains auteurs
suggèrent d’intégrer le médiatif, aux modalités épistémiques, ne serait-ce que par extension :

« On peut étendre la notion de modalité épistémique aux cas où il s'agit de l'attitude du locuteur par rapport à
ce dont il parle, non pas au moment où il en parle, mais au moment où il en a pris connaissance. Un exemple
spectaculaire en est fourni par les systèmes verbaux comme celui du bulgare, où des formes différentes marquent
que le locuteur a ou n'a pas été lui-même témoin des faits qu'il présente. Dans le premier cas, les grammairiens
parlent de mode non médiatif, dans le second, de mode médiatif, ou, en anglais, d' evidentiality [sic]. À
l'intérieur de ce dernier, il peut y avoir encore des formes différentes selon que la connaissance a été obtenue
par ouï-dire, ou par déduction à partir d'indices (NB: on utilise souvent en français les termes testimonial et
non testimonial , mais le mot testimonial , construit à l'origine pour traduire l'anglais evidential , désigne aussi
quelquefois le mode non médiatif: l'ambiguïté tient à ce qu'on ne précise pas qui est le témoin: le locuteur lui-
même, ou la source à laquelle il se réfère?)
Ces distinctions ne sont pas aussi nettement marquées dans la morphologie du verbe français. Mais elles
existent dans la langue. Ainsi une phrase comme «Il paraît que Jean est à Paris» indique que la présence de Jean
a été signalée au locuteur par quelqu'un d'autre. L'intéressant, dans cette structure, est qu'elle ne relève pas du
simple discours rapporté: «Il paraît que...» ne sert pas à rapporter l'existence d'une opinion que l'on pourrait
ensuite, éventuellement, déclarer fausse. Au contraire le locuteur de «Il paraît que...» prend à son compte cette
opinion qui ne vient pas de lui: il fait comme si elle était juste, et il en tire des conclusions. («Il paraît que Jean
est à Paris, va le voir») » – Ducrot, Schaeffer, et al., 1995: 585 (apud Laureandeau 2004)63.

61
Nathalie Sarraute (1963) – Les Fruits d’Or, Paris : Gallimard.
62
Exemple emprunté à : Tutescu, Mariana (2005) – L’Auxiliation de modalité. Dix auxi-verbes modaux, Bucuresti : Editura
Universitatii din Bucuresti, p. 57.
63
Laurendeau, Paul (2004) – « Modalité, opération de modalisation et mode médiatif », Delamotte-Legrand. R. dir. Les
médiations langagières, Volume l, Des faits de langue aux discours, Dyalang CNRS, Publications de l'Université de Rouen, Rouen,
pp 83-95.

21
Les exemples strictement morphologiques de « médiatf » existent d'ailleurs bel et bien en français aussi: le
conditionnel dit « de distance » (ou encore : journalistique, selon l’emploi prototypique de cette forme verbale)
comporte bien la médiation implicite d'une source : Le premier ministre partirait pour Israël64. À la différence du
réalisateur lexical il paraît que (+ indicatif), avec le conditionnel de distance, le locuteur ne reprend pas à son
compte la croyance ou les dires de la source implicitée.

D’autres auteurs, au contraire, prennent le parti de distinguer médiation et modalités épistémiques :

« Dans la conception large, l’évidentialité englobe la notion de modalité comme expression de l’attitude
épistémique du locuteur. Dans la conception étroite, l’évidentialité est le pendant et le complément épistémique
de la modalité. Il nous semble qu’on ne peut que gagner en clarté si l’on oppose, plutôt qu’on n’intègre, les
concepts de modalité et d’évidentialité et qu’on réserve donc le terme de modalité à l’expression de l’attitude du
locuteur et celui d’évidentialité à l’expression du mode de création et/ ou de récolte de l’information, quitte à
utiliser éventuellement un autre terme – par exemple celui de marquage épistémique – comme hyperonyme
métalinguistique, pour souligner le lien naturel qui existe entre les deux phénomènes linguistiques. » – Dendale
& Tasmowski 199465, apud Tuţescu 200566 : 56.

La question des sources du savoir est également au cœur de la problématique, plus large, de l’adhésion du
locuteur aux informations qu’il présente. Notion graduelle s’il en est : adhésion totale < adhésion partielle <
réserve subjective < mise à distance < refus d’adhésion (non adhésion).
L’évidentiel (testimonial, médiatif) grammaticaliserait alors la « mise à distance » (Cristea 198367 : 82-84).

64
Exemple et commentaire empruntés à Laurendeau 2004.
65
Dendale, Patrick et Liliane Tasmowski (1994) – « Présentation », Langue Française 102, mai1994. Numéro dédié justement à
l’étude des marques linguistiques des sources du savoir.
66
Tutescu, Mariana (2005) – L’Auxiliation de modalité. Dix auxi-verbes modaux, Bucuresti : Editura Universitatii din Bucuresti.
67
Cristea, Teodora (1983) – « L’adhésion et ses réalisations linguistiques en français et en roumain », in : Cristea, Teodora et
Alexandra Cunita (1983) – Énonciation et contrastivité. Etudes contrastives, Bucuresti : TUB, 24-98.

22
5.2.5. La zone des modalités déontiques et ses réalisateurs en français

Pour la mémoire, le carré déontique :

Obligatoire Interdit

(=OBLIGATOIRE QUE P) (=NON PERMIS QUE P)


(=NON PERMIS QUE NON-P) (=OBLIGATOIRE QUE NON-P)

Permis Facultatif

(=PERMIS QUE P) (= NON OBLIGATOIRE QUE P)


(=NON OBLIGATOIRE QUE NON-P) (= PERMIS QUE NON-P)

OBLIGATOIRE (DEVOIR FAIRE, NE PAS POUVOIR NE PAS FAIRE)

● Verbes modaux

Obligation interne (morale) : se devoir de + inf., avoir à + inf., force m’(t’, lui, nous, vous, leur) est de + inf.,
il me (te, lui, nous, vous, leur) faut (fallait, faudra, faudrait, …) + inf. ;
falloir + subj., devoir + inf.

⮚ Je me dois de le prévenir.
⮚ Force lui fut de reconnaître qu’il avait tort.
⮚ J’ai à lui parler/ Je n’ai rien à faire/ Avoir des lettres68 à écrire
(Nouv. P. Rob.2007)

Obligation externe : devoir, falloir + inf., falloir + subj. ; être tenu à (+SN, +inf.)/de (+inf.), être forcé de,
être obligé de, être dans l’obligation de + inf.69; valoir mieux (il vaut mieux (+mieux vaut)) + inf., subj., il
convient de + inf. (« être conforme aux usages, aux nécessités, aux besoins »), il convient que, il est souhaitable
que + subj. ; n’avoir qu’à + inf.

⮚ Le médecin est tenu au secret professionnel. (« doit garder… »)


⮚ A l’impossible nul n’est tenu.
⮚ Le prince était tenu à ne pas quitter le sol de l’Inde (Lotti). 70
⮚ Ce devoir de refus et de rébellion est le dernier dont ils se croient tenus de s’acquitter (Caillois).
⮚ Il s’est cru obligé d’intervenir.
⮚ Vous n’êtes pas obligés de me croire.
⮚ Il convient de respecter une minute de silence.
⮚ Il convient que vous y alliez.
⮚ Vous n’avez qu’à tourner le bouton/ Tu n’as qu’à t’en aller, si ça ne te plaît pas/ Il n’a qu’à bien se tenir.
(Nouv. P. Rob.2007)

68
Où le syntagme nominal des lettres (en fait : un syntagme déterminant indéfini DP[-déf]) est objet direct dans le dictum (COD
de l’infinitif enchâssé sous à), et c’est la subordonnée infinitive introduite par à qui sera l’objet du verbe avoir (= dictum objet du
modus) :
Des lettres, j’ai à en écrire pas mal/ *Des lettres, j’en ai à écrire pas mal
Ces lettres, j’ai à les envoyer d’ici ce soir/ * Ces lettres, je les ai à envoyer d’ici ce soir
La préposition à joue ici le rôle de complémenteur plutôt que celui de préposition qui assigne à son complément un Cas Oblique
– la preuve, on ne peut pronominaliser la complétive par y : je n’arrive pas à résoudre ce problème/ je n’y arrive pas// je n’ai
pas à écrire de lettres /*je n’y ai pas (OK je n’ai pas à le faire).
69
En revanche, obliger qqn à faire qqch (en particulier avec un sujet animé) a un fonctionnement descriptif vs modal : Ses
parents l’ont obligé à travailler (Nouv. P. Rob. 2007). La chose est moins assurée avec un sujet générique (inanimé, abstrait) :
Tout nous oblige à admettre son existence (Paulhan, apud Nouv. P. Rob. 2007).
70
Dans le tour, juridique (droit commercial), Le preneur est tenu des dégradations, être tenu de + SN signifie «[ référent du SN]
est/sont à la charge du [référent du sujet] » (« les dégradations sont à la charge du preneur »).

23
■ déontique théorique :

⮚ Nous devons nous opposer à l’injustice autant que les lois le permettent (Montherlant, apud Kronning 2001 :
67).

■ déontique pratique (obligation pratique):

⮚ Pour atteindre le boulevard Montparnasse, j’ai dû me frayer un chemin à travers les couples dansants
(Mauriac, apud Kronning 2001 : 67).

⮚ Il faut manger pour vivre, non vivre pour manger (lecture générique vs spécifique → déontique théorique).
⮚ Il faut partir dès que possible.
=Il faut que l’on parte dès que possible (référence spécifique vague→ obligation pratique ou obligation interne).

● Adjectif opérateur de phrase dédié : obligatoire (il est obligatoire de+ inf., que + subj.).

⮚ Il est obligatoire de passer une visite médicale. (Nouv. P. Rob. 2007)

● Adverbe modalisateurs : obligatoirement.

⮚ Vous devez obligatoirement présenter votre passeport à la frontière. (Nouv. P. Rob. 2007).

PERMIS (POUVOIR FAIRE, NE PAS DEVOIR NE PAS FAIRE)

● Métalangue vs réalisateurs en langue naturelle : pouvoir faire (MAIS AUSSI : pouvoir ne pas faire71) ; ne pas
devoir faire (plutôt que : ne pas devoir ne pas faire, par trop analytique) ;
● lexèmes dédiés : permettre (à qqn, de faire qqch), autoriser qqn à faire qqch. ; tolérer, admettre, souffrir
supporter que + subj.

⮚ Je vous autorise à ne pas y aller (Nouv. P. Rob. 2007)


⮚ Vous pouvez y aller (si vous en avez envie)/ Vous pouvez ne pas y aller, si vous n’en avez pas envie.
⮚ Tu ne dois pas y aller, si tu ne veux pas.
⮚ Son patron lui a permis de ne pas venir travailler ce matin (Nouv. P. Rob. 2007)
⮚ Elle me permit plusieurs fois de lui donner un baiser (Rousseau, apud Nouv. P. Rob. 2007)

⮚ Ils n’auraient pas toléré qu’on fermât ce cercle [de jeu] (Morand, apud Nouv. P. Rob. 2007)
⮚ Il ne supporterait pas plus longtemps qu’on se fichât de lui (Gide, apud Nouv. P. Rob. 2007)
⮚ S’il m’arrivait de me ‘convertir’, je ne souffrirais pas que cette conversion fût publque (Gide, apud Nouv. P.
Rob. 2007)

INTERDIT (DEVOIR NE PAS FAIRE, NE PAS POUVOIR FAIRE)

● Métalangue vs réalisateurs en langue naturelle : ??devoir ne pas faire/ OK ne pas devoir faire ; ne pas pouvoir
faire ;
● Verbes dédiés : interdire, défendre (à qqn, de faire qqch) ; expression performative : défense de + infinitif.

FACULTATIF (NE PAS DEVOIR FAIRE, POUVOIR NE PAS FAIRE)

● Métalangue vs réalisateurs en langue naturelle : ne pas devoir faire (accent focal sur le modal plutôt que
sur la négation) ; pouvoir ne pas faire (MAIS AUSSI : pouvoir faire72), surtout en présence de l’adverbial
toujours

● Modaux dédiés (verbes + adv. toujours) : avoir (toujours) la faculté de + inf., pouvoir (toujours) + inf.

⮚ Vous avez toujours la faculté de refuser (Nouv. P. Rob. 2007)/ Vous pourrez toujours refuser/ Vous pourrez
toujours ne pas y aller.

⮚ Tu ne dois PAS y aller, quoi qu’il arrive (INTERDIT)


⮚ Tu ne dois PAS y aller si tu ne veux pas (PERMIS)
⮚ Tu ne DOIS pas y aller (FACULTATIF)73

71
Métalinguistiquement définitoire du FACULTATIF.
72
Métalinguistiquement définitoire du PERMIS.
73
Suite attendue : ____mais tu PEUX le faire.

24
Devoir déontique/ devoir épistémique : critères distinctifs

Classes de prédications (mode d’action et modalité) :


⮚ Elle est fatiguée. Elle doit manger/ partir/ rentrer (état activité/ événement dynamique : OBLIGATION
EXTERNE).
⮚ Elle est fatiguée. Elle doit dormir/ se reposer (état, état : OBLIGATION INTERNE)
Temporalité et modalité : état1 (passé : prémisse de raisonnement), état2 (inférence) :
⮚ Elle était fatiguée. Elle doit dormir/ se reposer (maintenant). : INFERENCE, PROBABILITE.

7. Adverbe74 de manière/ adverbe modalisateur. Portée sémantique et incidence syntaxique75.

Adverbe de manière : prédiqué secondairement du syntagme verbal.


⮚ Contribue au contenu propositionnel.
⮚ Reste dans le champ de la négation.
⮚ Est focalisable.

Adverbe modalisateur « de re » : incidence syntaxique dite « intra-prédicative ». MAIS :


⮚ Ne contribue pas au contenu propositionnel (exprime l’attitude de l’énonciateur par rapport à son propre
discours).
⮚ N’est pas dans le champ de la négation.
⮚ N’est pas focalisable.
⮚ Portée sémantique : commente plus l’énonciation que l’énoncé.

Quelle structure syntaxique ?

Adverbe de manière :

● ne V pas Adv (Obj)/ ne V pas Obj Adv


● ne Aux pas V Adv (Obj)/ ne Aux pas V Obj Adv/ RARE :
ne Aux pas Adv V Obj

⮚ Elle ne prononce PAS correctement votre nom./ Elle ne prononce PAS votre nom correctement./ Elle
ne prononce pas votre nom CORRECTEMENT, elle distord les voyelles nasales.
⮚ Elle ne fera PAS ce voyage d’une seule traite.
⮚ Il n’a PAS fait ce voyage d’une seule traite./ Il n’a pas fait ce voyage D’UNE SEULE TRAITE, il a passé
la nuit à Lille.
⮚ Il n’a PAS lu attentivement cette revue (« de manière attentive », « avec attention »).
⮚ Il n’a pas lu ATTENTIVEMENT cette revue, il l’a seulement feuilletée. / Il n’a PAS lu cette revue
attentivement.

⮚ Ce fichier n’a pas été ACCIDENTELLEMENT effacé (« d’une manière fortuite, imprévue », « par
hasard »). 76 Le fichier est effacé.
⮚ Il n’est PAS mort accidentellement (« par suite d’un accident »).  Il est mort.

Remarque. La distribution ne Aux pas Adv V Obj (fréquente avec des adverbiaux aspectuels : Ils ne sont pas
encore arrivés à la fac, Elle n’a pas encore lu le mode d’emploi du nouvel engin) reste relativement rare avec des
adverbes de manière:

⮚ Elle n’a PAS bien lu (*lu bien) le mode d’emploi du fer à repasser77.

Adverbe modalisateur :

● ne V Adv pas (Obj)/ Adv, ne V pas (Obj)


● ne Aux Adv pas V (Obj)/ Adv, ne Aux pas V (Obj)

74
Ou : adverbial – pour y inclure aussi les groupes prépositionnels (PP) de sémantique apparentée (accidentellement, mais aussi
par hasard, certainement, mais aussi sans nul doute).
75
Pour la distinction portée sémantique/ incidence syntaxique, cf. Le Querler 1996. Terme usuel en grammaire générative :
portée (angl. scope).
76
Lire ce symbole : « implique ».
77
Noter la difficulté de focaliser bien même dans l’emploi de manière.

25
⮚ Il ne lira certainement PAS cette revue.
⮚ Ce fichier n’a accidentellement PAS été effacé.  Le fichier n’a pas été effacé.
⮚ Tu n’as fatalement PAS la même qualité d’optique et de pixels

⮚ Certainement, il ne lira pas cette revue.


⮚ Accidentellement, ce fichier n’a pas été effacé.

26
TABLEAUX DE GRAMMAIRE
Modalités d’énoncé. Phrases à double prédication.

27
1. L’emploi du subjonctif (vs infinitif, vs indicatif)
dans les propositions complétives

[modalités aléthiques : <nécessaire>, modalités


déontiques : <obligatoire>]
IL FAUT (faudrait) QUE ... Il faut /Il (me, te, lui ... ) faut ...
IL EST NÉCESSAIRE QUE ... Il est nécessaire de ...
(obligatoire) (obligatoire)
On doit / Je (tu ... ) dois ...
+ SUBJONCTIF + INFINITIF
[modalités déontiques : <permis>, <interdit>]
Paul PERMET QUE78 (je/tu/Marc ... ) ... Paul me/ te/ lui … permet/ défend
(m’/ t’/ lui interdit) de …
+ INFINITIF
(à sujet PRO86 contrôlé par le complément
d’objet indirect du verbe principal)
ACCEPTE QUE79
ADMET QUE80
CONSENT QUE/ À CE QUE81
VEUT BIEN QUE82

[marqueurs de la valeur <permis>, à la forme négative :


<interdit>]
ne SUPPORTE(RAIT) pas QUE83 …
ne SOUFFRE (SOUFFRIRAIT) pas QUE84 …
ne TOLÈRE (TOLÉRERAIT) pas QUE85…

+ SUBJONCTIF (sujets différents)

[modalités désidératives87 : <+désirable>88, Paul accepte de91…

78
Maman, d’ordinaire intraitable sur les questions d’heure (…), permettait que je prolongeasse la veillée (Gide, Nouv. P. Rob.).
79
Ceux qui n’acceptent pas que la vie soit une partie qu’il faut toujours perdre (Mauriac, Nouv. P. Rob.).
80
Mais, avec le sens de « considérer comme vrai, réel », « reconnaître », l’indicatif est de mise : j’admets que j’ai eu tort (Nouv.
P. Rob.). Avec le sens de « supposer » (admettre seulement à titre provisoire comme vrai), subjonctif, à nouveau : en admettant
que cela soit vrai, admettons que ce soit vrai.
81
Je consens à ce qu’il y aille (Nouv. P. Rob.).
82
Le prof veut bien que vous remettiez le mémoire la semaine prochaine.
83
Il ne supporterait pas plus longtemps qu’on se fichât de lui (Gide, Nouv. P. Rob.). Dans cette acception, supporter veut dire
« subir de la part d’autrui sans réagir, sans se rebeller, sans interdire ». Par voie de conséquence, à la forme négative, le verbe
pourra signifier l’interdiction.
84
Je ne souffrirais pas que cette conversion fût publique (Gide, Nouv. P. Rob.).
85
Ils n’auraient pas toléré qu’on fermât ce cercle [de jeu] (Morand, Nouv. P. Rob.).
86
Pronom non épelé (=non prononcé, sans forme phonétique) sujet (argumental) d’un infinitif.
87
Ou : volitives, ou : boulestiques. Certains auteurs distinguent volitif et désidératif.
88
Si dictum [+favorable].
91
Il a accepté de venir, de nous aider (Nouv. P. Rob.).

28
<-désirable>89] consent à92…
veut bien93 …

ne supporte pas de94 …


+ INFINITIF (même sujet95)

Paul veut ...


Paul VEUT (voudrait) QUE (je / tu / Marc ... ) ... désire ...
DÉSIRE souhaite ...
SOUHAITE

Paul PREND GARDE QUE (je/tu/Marc/cela ... ) ... Paul prend garde (Prenez garde)
[= « veut que ... et fait en sorte que tel soit à ... [résultat à atteindre]
le cas » : résultat à atteindre]
Paul PREND GARDE QUE (je/tu/Marc/cela ... ) NE90 de ... [résultat à éviter]
[« ne veut pas que ... et fait en sorte que
cela n’arrive pas » : résultat à éviter]

Paul TIENT À CE QUE (je/tu/Marc ... ) ... Paul tient à ...


[= « veut que ... »] veille à ...
VEILLE À CE QUE s’oppose à ...
[= « veut que ... et fait en sorte que tel soit
le cas » : résultat à atteindre]
S’OPPOSE À CE QUE
[= « ne veut pas que ... »]
+ INFINITIF (même sujet)
+ SUBJONCTIF (sujets différents)
96
[modalités directives : <ordre>, <requête>,
<suggestion>]
ELLE EXIGE QUE (tu/vous/Marc ...) ... Elle lui (leur …) intime (l’ordre)
ELLE DEMANDE [= “ordonne”, “exige”] QUE ... de ...
ELLE ORDONNE QUE ... Elle te (vous ... ) demande de ...
ELLE PRÉTEND [= “ordonne”, “exige”] QUE ... ordonne de ...
ELLE DIT [= “ordonne”, “exige”] QUE ... dit de ...
ELLE SUGGÈRE QUE… Elle te (vous, …) suggère de …

89
Si dictum [−favorable].
90
NE dit “expletif” (= s` nu . . . ).
92
Il consent à coopérer (Nouv. P. Rob.).
93
Il veut bien coopérer.
94
Elle ne supporte pas de rester inactive (Nouv. P. Rob.).
95
Dans la construction à complétive infinitive et sujets référentiellement identiques, ces verbes ne participent plus des modalités
déontiques (permission/ interdiction), mais des modalités désidératives.
96
Actes de langage, en discours indirect (rapporté). À la première personne du singulier, au présent de l’indicatif, actes de
langage directs (verbes performatifs, qui réalisent (« performent ») l’acte qu’ils décrivent), et donc : modalités d’énoncé difficiles
de distinguer de la modalité d’énonciation correspondante (<injonctif>). Modalités intersubjectives dans Le Querler 1996.

29
+ SUBJONCTIF + INFINITIF
(sujets différents) (à sujet PRO97 contrôlé par le complément
d’objet indirect du verbe principal)
[modalités appréciatives (=évaluatives, axiologiques) ;
affectives (=thymiques) : <prospectif favorable>, <prospectif
défavorable>, <rétrospectif favorable>, <rétrospectif
défavorable>]

< favorable> (neutralisé du point de vue de la distinction


<prospectif>/ <rétrospectif>, résolue au niveau du dictum)
IL VAUT MIEUX QUE ... Il vaut (vaudrait) mieux (il aurait
mieux valu) ...
+ SUBJONCTIF98 + INFINITIF
IL VAUDRAIT MIEUX QUE… <prospectif>
IL AURAIT MIEUX VALU QUE… <rétrospectif>
+ SUBJONCTIF99

<favorable/ défavorable rétrospectif100>


IL EST BON/ MAUVAIS QUE ... Il est bon / mauvais de...
IL EST HEUREUX/ MALHEUREUX QUE ... Il est étrange de103…
DOMMAGE + INFINITIF
101
ÉTRANGE
+ SUBJONCTIF C’est normal de104…
Il est normal de105…
JE TROUVE NORMAL/ ÉTRANGE QUE (tu/Marc... ) … Il paraît normal de106…
DRÔLE

+ SUBJONCTIF (sujets
différents102) Il fait beau107
C’est beau de/ C’est laid de108…
Ce n’est pas beau de109, 110…

97
Pronom non épelé (=non prononcé, sans forme phonétique) sujet (argumental) d’un infinitif.
98
Il vaut mieux que (+ Il est bon que) vous l’ayez lu avant-hier [subjonctif passé & repères temporels d’antériorité dans la
complétive : rétrospectif]/ que vous le lisiez demain [subjonctif présent et repères temporels de postériorité : prospectif]. Noter
que mieux vaut n’est disponible que pour les emplois prospectifs : mieux vaut que vous le lisiez demain/ ???mieux vaut que
vous l’ayez lu hier.
99
Contre complétive non marquée pour l’antériorité (l’aspect perfectif), l’orientation prospective ou rétrospective de l’appréciation
se jouera dans le verbe principal. Il aurait mieux valu que vous arriviez à l’heure [conditionnel passé (irréel) du verbe principal
(prédicat appréciatif) : rétrospectif]/ Il vaudrait (+vaut) mieux que vous arriviez à l’heure [présent de l’indicatif ou conditionnel
présent du verbe principal (prédicat appréciatif) : prospectif].
100
Mais le jeu des formes verbales (dans la principale : au niveau du modus donc) et des repères temporels (notamment dans
la complétive) peut induire une orientation prospective : il serait bon de relire ce rapport demain, juste avant la réunion.
101
Cf. Nouv. P. Rob., sans exemple toutefois.
102
En principe, l’autre cas de figure (trouver normal/ étrange de + infinitif, contre identité référentielle des sujets) devrait être
attesté aussi. Le fait est que les dictionnaires consultés ne citent point de tels exemples. Soit : Tu trouves normal de boire trois
bières de suite ? (si le destinataire lui-même a bu les trois bières).
103
Cf. Nouv. P. Rob., sans exemple toutefois.
104
C’est normal de vouloir se reposer après un tel effort. (Nouv. P. Rob.).
105
Cf. Nouv. P. Rob., sans exemple toutefois.
106
Même remarque que précédemment.
107
Il fait beau croire aux prodiges lorsque les prodiges nous arrangent (Cocteau, Nouv. P. Rob. : « il est commode de »).
108
C’est laid de fourrer les doigts dans son nez. (Nouv. P. Rob.).
109
Ce n’est pas beau de mentir. (Nouv. P. Rob.).
110
Formules familières, hypocoristiques (utilisées quand on s’adresse à des enfants) dépourvues de corrélat impersonnel suivi
du subjonctif. Toute prédication appréciative ne donne pas lieu aux mêmes effets syntaxiques (ne se prête pas aux mêmes
constructions).

30
+ INFINITIF

<favorable prospectif>
J’ESPÈRE QUE… J’espère…121
J’ESCOMPTE QUE… J’escompte…
+INDICATIF111 (FUTUR112) +INFINITIF (même sujet)
<favorable rétrospectif>
JE ME RÉJOUIS113 QUE ... Je me réjouis de ...
JE SUIS RAVI(E) (ENCHANTÉ(E) etc.) QUE ... Je suis ravi(e) (enchanté(e)) de ...
J’AIME (MIEUX114) QUE115… Je me félicite de… (= je …, et je
m’en félicite)122
J’aime123 …
J’aime mieux … que …
+ SUBJONCTIF (sujets différents) J’aime à124 …
+ INFINITIF (même sujet)

<défavorable rétrospectif>
JE REGRETTE QUE (tu/Marc ... ) ...
JE SUIS DÉSOLÉ(E) QUE ... Je regrette de ...
JE REDOUTE QUE (tu/Marc/cela ... ) ... Je suis désolé(e) de ...
Je redoute de125 ...

111
« Qui espère, désire, mais tandis que le désir se fait sentir sans que la pensée ait accès au sentiment de probabilité,
l’espérance, au contraire, ne naît que de l’accès à ce sentiment, le désir étant maintenu. Sans une probabilité minima, il n’existe
aucune raison d’espérer, on peut désirer seulement » (Gustave Guillaume, Temps et verbe, p. 39, nous soulignons). L’analyse
psychomécanique du verbe espérer (vs désirer) explique le choix des modes (indicatif avec espérer, subjonctif, avec désirer) en
termes de relations à l’actualité : les deux verbes comportent un « quantum désidératif », mais celui de désirer l’empêche
d’atteindre à l’actualité, tandis que celui d’espérer, du fait de son ouverture vers la probabilité, « l’y porte ». Ce quantum
désidératif « non-interceptif » (qui n’empêche pas l’idée exprimée par le verbe d’atteindre à la « ligne d’actualité ») est
représenté comme parallèle à la ligne d’actualité, que la visée (représentée comme perpendiculaire sur cette ligne) peut ains i
atteindre sans obstacle, tandis que le « quantum interceptif » de désirer est représenté comme perpendiculaire sur la ligne
d’actualité, à l’instar de la visée, qu’il retient en deçà de cette ligne. Si les représentations graphiques de Guillaume vous semblent
par trop rébarbatives, vous retiendrez quand même l’idée que c’est la composante épistémique d’espérer (+probabilité) qui le
rend compatible avec l’indicatif, annulant en quelque sorte les effets syntaxiques de la composante évaluative de son signifié. Les
cas (somme toute, relativement rares) où espérer est suivi du subjonctif procèdent justement de la stratégie inverse : c’est alors
la composante évaluative (et virtualisante) qui l’emporte, le probable, c’est-à-dire « la confiance dans la réalisation du fait
espéré » étant revu(e) à la baisse. Emploi du subjonctif déconseillé en principe, par les grammaires normatives, sauf après
espérons que ou après on pourrait espérer que (cf. Hanse 1991 : 392-393), qui ‘virtualisent’ l’espoir au point de le convertir en
simple souhait.
112
J’espère qu’il arrivera à temps.
J’escompte qu’il réussira (Nouv. P. Rob.). Cela dit, le verbe espérer peut être suivi d’un temps passé, auquel cas il signifiera
« aimer à croire, à penser » : j’espère avoir fait ce qu’il fallait, il espère avoir réussi (Nouv. P. Rob.), j’espère que les enfants sont
arrivés sains et saufs ; suivi du présent ou du passé composé, il fonctionne comme formule de souhait (J’espère que tu vas bien,
Espérons qu’il n’a rien entendu – Nouv. P. Rob.).
113
Je me réjouis de ce que + indicatif [fait réel] : Je me réjouis de ce que la famille est réunie (Cristea 2000) / subjonctif [fait
supposé] : Je me réjouis de ce que ce projet de coopération soit mis en place le mois prochain. La perspective futurale est
essentielle à cet effet de sens (fait supposé vs réel), en l’absence de médiation. Si la chose vient d’être alléguée par autrui, le
subjonctif orientera l’interprétation vers la distanciation (médiation). Comparer : -Le projet va démarrer le mois prochain au plus
tard./ - Je me réjouis de ce que ce projet de coopération doive être mis en place le mois prochain. Si le verbe de sentiment est
au conditionnel, seul le subjonctif est de mise (expression du désir): Je me réjouirais de ce que ce projet de coopération soit
mis en place le mois prochain . Suite possible : Mais hélas, j’en doute.
114
Comme, en français contemporain du moins, en présence des deux termes de la comparaison le subjonctif sur le second
conjoint est exclu, on aura : J’aime mieux que vous partiez que si vous restez. J’aime mieux que vous partiez (plutôt) que de
rester – où le sujet de l’infinitif rester (dans le comparant) est coréférentiel au sujet du premier conjoint (du comparé). Mais
jamais : *J’aime mieux que vous partiez queCOMP queSUBJ vous restiez.
115
J’aime que les choses soient à leur place (Zola, Nouv. P. Rob.). Mais prospectif dans : J’aimerais bien que vous me jouiez
quelque chose (Nouv. P. Rob.). De même dans : J’aimerais mieux que vous le résolviez vous-même. Comparer à : J’aime mieux
que vous soyez parti avant son arrivée.
121
J’espère pouvoir revenir.
122
Je suis sévère, et je m’en félicite (Nouv. P. Rob.). Je me félicite d’être sévère.
123
J’aime danser.
124
J’aime à croire/ penser que (+ indicatif) : J’aime à croire que vous viendrez (Nouv. P. Rob.).
125
Comparer la rection des verbes concernés : je redoute, je crains + SN (le froid) // j’ai peur de + SN (du froid).

31
J’AI PEUR QUE NE1 J’ai peur de ...
... Je crains de ...
JE CRAINS QUE NE1
... + INFINITIF (même sujet)
(= “je ne veux pas que (tu/Marc/cela ... ) ...,
mais je crois que tel est le cas”)
JE M’INDIGNE QUE116
ELLE SE PLAINT QUE117
+ SUBJONCTIF (sujets différents)
Je me réjouis de …
<rétrospectif favorable>, <rétrospectif défavorable> [variantes Je m’indigne de …
syntaxiques à incidences sémantiques (interprétatives)] Je m’inquiète de …
Elle se plaint de…
JE ME RÉJOUIS DE CE QUE Elle souffre de…
JE M’INDIGNE DE CE QUE + INFINITIF (même sujet)
JE M’INQUIÈTE DE CE QUE
ELLE SE PLAINT (à quelqu’un : à son patron) DE CE Je lei hais de …
QUE118 + INFINITIF
ELLE SOUFFRE DE CE QUE (à sujet PROi contrôlé par
JE LE HAIS DE CE QUE119 le complément d’objet direct de haïr)

+INDICATIF (sujets identiques ou différents,


fait réel (réalisé))

Je me réjouis de ce que
Je m’indigne de ce que
Je m’inquiète de ce que
Elle se plaint (à quelqu’un : à son patron) de ce que120
Elle souffre de ce que
+ SUBJONCTIF (sujets différents,
fait supposé ou irréel (=pas encore réalisé))

[modalités épistémiques : <douteux>126] [modalités épistémiques :


JE DOUTE QUE ... <probable>, <certain>]
JE NE CROIS PAS QUE ...
PENSE Je me doute que ...
TROUVE Je crois que127 ...
N’ ESTIME pense
CROIS-TU QUE ... trouve
PENSES-TU QUE ... estime
TROUVES-TU QUE ...
ESTIMES-TU QUE ...

116
Je m’indigne qu’il soit si lâche (Nouv. P. Rob.).
117
On ne sait pas si la plainte est ou non justifiée (c’est-à-dire : si l’état de chose décrit dans la subordonnée est ou non réel) :
Elle se plaint qu’on l’ait calomniée (Nouv. P. Rob.). Dans le cas contraire, pour souligner la réalité de la plainte (le caractère réel
de l’état de chose au sujet duquel on se plaint), l’indicatif sera de mise : Mes maîtres se plaignaient que j’oubliais mon latin
(Stendhal, Nouv. P. Rob.).
118
Elle se plaint de ce que les enfants sont par trop impolis.
119
Elle le haïssait de ce qu’elle l’avait aimé (R. Rolland, Nouv. P. Rob.). Pas de corrélat avec le subjonctif, semble-t-il.
120
La femme de ménage se plaint doucement de ce qu’elle ait à nettoyer cette ordure. (Nouv. P. Rob.) – [fait pas encore
réalisé]. Comparer à : …de ce qu’elle a nettoyé toute cette ordure [fait réalisé].
126
= <incertain>.
127
JE M’ATTENDS À CE QUE . . . + SUBJONCTIF! (= “je crois que” + INDICATIF)

32
IL SEMBLE QUE … Il semble bien que …

IL NE (ME, TE, LUI…) PARAÎT PAS QUE … Il paraît que…


Il me (te, lui…) paraît que…
IL NE ME (TE, LUI…) SEMBLE PAS QUE … Il me (te, lui…) semble que…
+ SUBJONCTIF +INDICATIF

[modalités aléthiques : <possible>, <contingent>,


<impossible> → modalités épistémiques : <incertain>128,
<exclu>]
IL EST POSSIBLE QUE ... Il est PROBABLE que ...
IL SE PEUT QUE 129... Il est CERTAIN que ...
IL PEUT ARRIVER QUE ... Il est SÛR (et certain) que ...
IL ARRIVE QUE ...
IL EST (parfaitement) IMPOSSIBLE QUE ...
EXCLU QUE ...
HORS DE QUESTION QUE ...

+ SUBJONCTIF + INDICATIF

128
Ou : « possible épistémique ».
129
Mais: Peut-être que + INDICATIF!

33
2. L’emploi du subjonctif dans les PROPOSITIONS RELATIVES

Antécédent (Comparaison explicite/implicite) Relative (qualité superlative, rare)


LE/LA/LES PLUS/MOINS ... ...
MEILLEUR(e)(s) ...
PIRE(s) QUI ...
... QUE ...
MOINDRE(s) ... DONT ... +
(Adjectif au superlatif relatif) SUBJONCTIF
(Nom)
LE/LA/LES PREMIER,-ière,-s ... OÙ ...
DERNIER,-ière,-s ... AUQUEL ...
SEUL(e)(s) à laquelle, auxquel(le)s
... DUQUEL ...
L’ UNIQUE de laquelle, desquel(le)s
...
(Adjectif)
(Nom)

“Je souhaite(rais) bénéficier d’un placement qui soit à la fois hautement performant et
boursier exempt de risques.
[antécédent indéfini →qualité requise +
SUBJONCTIF]
- Eh bien, la BNP vous propose NATIO qui répond justement à vos exigences”.
PERFORMANCE - un placement [antécédent indéfini & qualité présentée comme réelle
+ INDICATIF]
“Avez-vous trouvé un placement qui vous convienne mieux?

- Non, il n’y a pas de placement qui réponde au même titre que celui-ci à
mes souhaits”.

“Si je connaissais une banque qui vous convienne mieux, je ne


manquerais pas de vous le dire!”
[antécédent (indéfini) en co-texte négatif,
interrogatif130 ou hypothétique →qualité incertaine +
SUBJONCTIF]

“Quel que soit le placement que vous souhaitiez, la BNP fera


parfaitement votre affaire!”
[antécédent en co-texte virtualisant (à subjonctif)
→qualité incertaine + SUBJONCTIF : subjonctif dit
“d’attraction”131]

130
Interrogation furtive y compris : je cherche quelqu’un qui fasse ce travail (« je le cherche, mais le trouverai-je ? »).
Comparer à : je trouverai bien quelqu’un qui fera ce travail (l’indicatif y marque la confiance du locuteur).
131
Après un autre subjonctif. Dans les énoncés du type de : Je regrette que ce soit lui qui ait été nommé il s’agirait moins
d’attraction modale que de relation sémantique avec le verbe principal – qui requiert lui-même le subjonctif (comme si l’on
disait : je regrette qu’il ait été nommé). Noter toutefois que le subjonctif reste optionnel, dans la relative (Je regrette que ce
soit lui qui a été nommé est toujours possible, pour souligner la réalité du fait), alors qu’il est obligatoire dans la complétive (on
ne peut pas dire : *je regrette qu’il a été nommé). Cf. Hanse 1991 : 903.

34
3. Modalités implicatives

3.1. Exprimer la CONDITION et l’HYPOTHÈSE


3.1.1. Le SI « conditionnel »132
SI vous voulez acheter une voiture neuve, VOUS CHOISIREZ une Renault.
(votre femme veut) VOUS CHOISISSEZ
CHOISISSEZ!/ (qu’elle choisisse)
vous avez acheté une Renault, vous AVEZ FAIT une bonne affaire.
vous vouliez vous CHOISIRIEZ
vous aviez voulu vous AURIEZ CHOISI/
(subordonnée : protase) (principale : apodose)133

SI PRÉSENT / passé composé de l’indicatif FUTUR <éventuel>, forte probabilité de réalisation


présent / passé composé
impératif/subjonctif présent (! 3e personne)
IMPARFAIT de l’indicatif CONDITIONNEL présent : <potentiel>134, réalisation
possible (mais plus douteuse)
PLUS-QUE-PARFAIT de l’indicatif CONDITIONNEL passé : <irréel>, réalisation exclue
CONDITION (HYPOTHÈSE) SITUATION

en français : en roumain :
* SI + FUTUR / CONDITIONNEL OK
- R135- DACĂ + VIITOR / CONDITIONAL

Condition vs hypothèse :
⮚ L’ordre des conjoints : [si p, (alors) q] favorise l’interprétation hypothétique (supposition : éventuel,
potentiel, irréel). [q, si p] favorise par contre la lecture conditionnelle. Comparer : S’il vient me
remplacer, je partirai./ Je partirai s’il vient me remplacer.
⮚ Les restrictifs bloquent la lecture hypothétique au profit de la lecture (bi)conditionnelle (« si et
seulement si »): q, seulement si p, [q …ne…] que si p. Comparer : Je partirai s’il vient me remplacer/ Je
partirai seulement s’il vient me remplacer, Je ne partirai que s’il vient me remplacer.

132
Qui fonctionne plus souvent, en langue naturelle, comme si hypothétique. D’où l’emploi des guillemets. Voir plus bas (dans
le texte) Condition vs hypothèse.
133
« Dans le cas des conditionnelles standard, la corrélation – ou en logique : l’implication – est bel et bien figurée comme
se déroulant (de la protase à l’apodose), i.e. comme un enchaînement temporellement ordonné (Si P alors Q), et qui s’inscrit
ainsi dans la mise en séquence du texte : […] + siP + alorsQ + […] ». (Achard-Bayle, Guy (2006) – « Connexité(s), Cadrages
co(n)textuels, Portée(s) », sur : http://edel.univ-poitiers.fr/corela/document.php?id=1278). Le terme de « conditionnelles » est
employé dans ce texte au sens des grammaires normatives (traditionnelles), sans égard pour la distinction sémantique condition/
hypothèse. Cela dit, l’ordre progressif protase + apodose caractérise ou bien les énoncés (métalinguistiques) de la logique formelle
(‘si p, alors q’), ou bien, en langue naturelle, les corrélations de type hypothétique (supposition vs condition au sens strict).
134
La distinction modale entre potentiel (avec une suite possible de type ‘espoir que tel sera le cas’ : s’il venait, je serais
contente – et j’espère qu’il viendra) et « irréel du présent » (avec une suite possible du type ‘regret que tel ne sera pas le
cas’ : s’il venait, je serais contente – mais hélas, il ne viendra pas) – cf. Le Querler 1996 : 108 – est (pour cette construction)
pragmatique plus que sémantique, c’est-à-dire émarge la sémantique de la construction grammaticale <si+ imparf., cond. prés.>,
même compte tenu de l’apport compositionnel des lexèmes qui la réalisent au cas par cas. La distinction est résolue en termes
de l’enchaînement (inter- voire transphrastique). L’attitude épistémique du locuteur, de <croyance forte que p> ou de <savoir
que non-p>, qui tranche l’interprétation, n’est accessible que co-textuellement (par la suite donnée au discours du locuteur) ou
en termes du contexte situationnel (dans l’exemple donné : s’il est mutuellement évident, pour le locuteur et son interlocuteur-
interprétant, que la personne en question ne saurait venir).
Nous distinguerons <potentiel (fait réalisable)> et <irréel du présent> en termes syntaxico-sémantiques. Une construction dé-
balancée (asymétrique), à conditionnel présent dans la principale, et plus-que-parfait de l’indicatif après si signifiera l’<irréel du
présent> : Je partirais volontiers [maintenant] s’il était venu me remplacer ; la construction balancée (symétrique) à conditionnel
présent dans la principale, et imparfait de l’indicatif après si codera pour le <potentiel (fait encore réalisable)> : Je partirais
volontiers s’il venait me remplacer (avec, pour suite possible, qui confirme, le cas échéant, l’interprétation sémantico-syntaxique
obtenue au niveau phrastique : ___et j’espère qu’il viendra) ; et la construction balancée à conditionnel passé dans la principale,
et plus-que-parfait de l’indicatif après si codera pour l’<irréel du passé> : Je serais volontiers partie [ce matin, hier] s’il était
venu me remplacer. Le caractère irréalisable du fait supposé est alors marqué dans la subordonnée hypothétique (par le plus-
que-parfait de l’indicatif), tant dans le cas de l’irréel du présent que dans celui de l’irréel du passé.
135
formes en -r- (radical du futur et du conditionnel)

35
Coordination : q, si p1 et que [+subjonctif =p2] : Si vous voulez acheter une voiture neuve et que vous ayez
besoin d’un financement complémentaire, vous souscrirez à cette carte de crédit.

3.1.2. Autres tours conditionnels/ hypothétiques


En cas de vol de votre carte bancaire, Protecarte couvre votre préjudice.
(Si votre carte bancaire a été volée . . . )
À défaut d’une assurance Protecarte, vous ne toucherez pas d’indemnité.
(Si vous n’avez pas d’assurance . . . )
À condition d’avoir souscrit à Protecarte, vos préjudices seront couverts.
(Si vous avez souscrit à Protecarte, ...)
(Faute d’avoir souscrit à Protecarte, vos préjudices ne seront pas couverts.)
(Si vous n’avez pas souscrit à Protecarte, ...)

CONDITION SUPPOSITION (hypothèse)


condition + réserve + restriction136
... à condition que ... ... si tant est que ... ... à moins que... ne137 ... À supposer que ..., ...
... pourvu que ... ... sous réserve que ... Supposé que ..., ...
En supposant que/ En
admettant que ..., ...
+ subjonctif + subjonctif + subjonctif + subjonctif
(sujet 1 = sujet 2) (sujet 1 = sujet 2) Au cas où ..., ...
... à condition de ... à moins de ...
+ infinitif (présent, passé) + infinitif + conditionnel
... sauf si ... en cas de + SN/ cas
+ indicatif (présent, auquel (auquel cas)
imparfait, plus-que-
parfait)138

136
Le fait exprimé par la proposition principale cesse d’être vrai si la condition est remplie (autrement dit ce fait EST LE CAS,
sous restriction que le fait exprimé par la subordonnée ne soit pas le cas)
137
NE dit “explétif” (sans valeur négative - cf., en roumain: M` tem s` nu vin` (= M` tem de faptul c` ar putea veni)🡺 Nu
vreau s` vin`).
138
Même règle de concordance que SI “conditionnel”.

36
3.2. Exprimer l’OPPOSITION

La Banque de France a ALORS QUE , dans la plupart des autres grands pays, l’institution
été créée en 1800 , (TANDIS QUE) équivalente ne date que de la seconde moitié du
XIXe siècle.
SI la Banque de France a été créée dans la plupart des autres grands pays, l’institution
(ALORS QUE) en 1800 , équivalente ne date que de la seconde moitié du
(TANDIS QUE) XIXe siècle.
La Haute Banque a PAR CONTRE, les grands établissements d’aujourd’hui se veulent
perpétué ses traditions. (AU CONTRAIRE,) “banques à tout faire”.
(EN CONTREPARTIE,)
(EN ÉCHANGE,)
(EN REVANCHE,)
... , MAIS

3.3. Exprimer la CONCESSION

MALGRÉ + SN
EN DÉPIT DE + SN
BIEN QUE / QUOIQUE + subjonctif
( . . . ) QUEL(LE) QUE soit le montant (la somme) engagé(e) ( . . . )
( . . . ) QUEL(LE)S QUE soient les risques (les circonstances) ( . . . )
( . . . ) QUI QUE vous soyez ( . . . )
( . . . ) QUOI QU’il arrive ( . . . )
( . . . ) OÙ QUE vous alliez ( . . . )
QUELQUE percutantes et claires QUE soient les informations hebdomadaires sur les marchés financiers, (…)
AUSSI intéressants QUE soient ces placements, (…)

FRANÇAIS ROUMAIN
quel(le)(s)) que oricare
qui que oricine
quoi que orice
où que oriunde
quelque (+ Adj. / Adv.) que oric@t de + Adj. / Adv.
+ SUBJONCTIF + CONDI|IONAL-OPTATIV
PREZUMTIV
INDICATIV

La BNP vous fait / fera


ferait bénéficier de 50% de ces progressions
aurait fait
baisse
MÊME SI l’indice boursier baissait
ultérieurement
avait baissé

37
3.4. Exprimer la CAUSE
3.4.1. Expliquer
● Pour répondre à une question portant sur la Parce que (P) (Q) parce que (P)
(les) cause(s) À cause de (SN) car
(POURQUOI?) (Q) à cause de (SN)
en raison de
● Pour mettre en vedette la cause C’EST parce que (P) que (Q)
(C’EST ... QUE ...) à cause de
en raison de (SN)
● Pour rectifier la cause (cause niée) CE N’EST PAS QUE
(CE N’EST PAS QUE, NON QUE + subjonctif !!!) (P : subjonctif) mais (Q :
indicatif)139
NON QUE
P et Q = phrases simples, propositions (P = la cause // Q = l’effet)

... à cause de l’augmentation de la masse ... parce que la masse monétaire allemande a
en raison de monétaire allemande = augmenté
suite à
... faute d’une baisse des taux d’intérêts allemands ... parce que les taux d’intérêts allemands n’ont
= pas été abaissés
... à force d’interventions sur les marchés = ... parce que (la Banque de France) est intervenue
à maintes reprises sur les marchés
Le SME est en danger Le calme a été ramené
À CAUSE DE la nouvelle crise monétaire GRÂCE À la Banque de France.
(effet (situation) défavorable) (effet (situation) favorable)

Si vous n’êtes pas à même de fournir une réponse à une question “Pourquoi?”, vous direz (comme pour
n’importe quelle question) :
Je ne sais pas / Aucune idée (= habar n-am)
Si vous ne voulez pas y répondre,
Si vous voulez narguer votre interlocuteur,
couper court à la conversation, vous direz :
Parce que (= De-aia/ Uite-aşa)

3.4.2. Consécuter
(Le point de vue de l’Interlocuteur)
Séquence  CAUSE EFFET
Acte  Fait (prémisse): connu(e) Conséquence: inconnue
Consécuter COMME je ne peux (pas) je rentabilise.
ÉTANT DONNÉ QUE épargner,
VU QUE
PUISQUE
PARCE QUE
FAUTE DE pouvoir épargner
Ne pouvANT pas épargner
GRÂCE À votre contrat Présence, vous bénéficiez de l’engagement de la BNP, sur
la qualité de ses services.
À FORCE D’études personnalisées, nos conseillers vous aident à gérer votre
budget au mieux de vos intérêts.
À CAUSE DE tous ces avantages, la plupart de nos clients adhèrent à Présence.

votre refus d’adhérer à nous sommes dans l’impossibilité de vous


Présence, consentir ce prêt à un tarif préférentiel.
SUITE À votre demande, nous vous envoyons ci-joint une formule
d’adhésion à Présence.
Rappeler le fait (= la prémisse) En indiquer la conséquence
(Le point de vue du Locuteur)

139
Elle accepta avec joie, non qu’il y eût entre nous beaucoup d’intimité, mais elle aimait nos enfants. (Mauriac, Nouv. P.
Rob.).

38
3.5. Exprimer la CONSÉQUENCE

. . . , DE SORTE QUE ( + Indicatif) . . .


. . . , DONC . . .
. . . . PAR CONSÉQUENT, . . .
EN CONSÉQUENCE, . . .
PAR VOIE DE CONSÉQUENCE, . . .

. . . . AUSSI
( + inversion du sujet) . . . .
AINSI

... TROP (PEU) + Adj. / Adv. + POUR QUE ( + subjonctif) . . .

3.6. Exprimer le BUT

... POUR + SN ... CONTRE + SN


EN VUE DE
(but) (but à éviter)
dans votre intérêt
dans le but de . . .
dans un but désintéressé
≠ à des fins lucratives
... POUR
AFIN DE + infinitif
EN VUE DE
histoire de
question de + infinitif
Verbe de déplacement + infinitif140
aller
venir
etc.
. . . POUR QUE
. . . AFIN QUE + Subjonctif (présent)
(but)
. . . DE SORTE QUE
(conséquence voulue)
CAUSE // BUT CONSÉQUENCE // BUT
POUR POUR ... TROP ... POUR ... POUR QUE
+ infinitif passé + infinitif présent QUE + Subjonctif + Subjonctif
Pour avoir souscrit une Vous avez souscrit une ... DE SORTE QUE ... DE SORTE QUE +
assurance-vie, vous assurance-vie pour payer + Indicatif Subjonctif
payez moins d’impôt. moins d’impôts.

140
Je vais (chez le boulanger) acheter du pain (« je vais chez le boulanger pour acheter du pain »). Construction à l’origine du
futur proche (j’achète du lait, puis je vais acheter du pain = « j’achèterai du pain tout de suite »).

39
4. Les REPÈRES TEMPORELS141
4.0. Indiquer le MOMENT
QUAND?
– Préposition + Préposition
● le 1er octobre, le 10 novembre, le vendredi 10 À, AU: au printemps, au mois de janvier (février, mars,
novembre, le 15 du mois; avril, mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre,
● les années 70; décembre); au XIXe siècle, à l’époque (= à cette époque-là),
● le soir, l’après-midi, le matin, la nuit, le jour, le à l’époque de Louis XV, à une époque dominée par ... ;
samedi; - le 10 mars au matin/soir;
le jour, le samedi, la semaine, le mois, l’été, - à midi/minuit (sans article!)
l’année, le moment,
la période où... DE/DU: (le/au) mois d’août, à 11 heures du soir, la réunion
● un (beau) jour/matin; de mercredi, l’après-midi du 15 mai, les difficultés
● lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi, économiques des années ‘30, les réformes de 1966 - 1967;
dimanche (Il passera te voir samedi); EN: en décembre, en été (automne, hiver), en 1995;
DANS: dans la matinée (la journée, la soirée, l’après-midi),
dans les années 90;
VERS: vers onze heures, vers midi;
APRÈS: après le repas / la guerre; l’après-guerre, l’après-
midi; après-demain;
SOUS: sous la Ve République, sous Louis XV;

● fin/début novembre, 2004; ● à la fin (de);


fin courant (= “à la fin du mois courant”). ● à l’issue de la réunion / la guerre;
● en fin de semaine (d’année) (sans article!);
● au milieu de (... du siècle dernier / du XIXe siècle / des
années ‘80);
● à la mi-janvier (février, ...);
● au début (de) (au début du chapitre), au
commencement (de) (au commencement du printemps);
● en début d’après-midi (d’année) (sans article!);
● dans le courant du mois de mai (Il repassera dans le
courant du mois de mai).

141
Chapitre non compris dans la matière à préparer pour l’examen, excepté les sections marquées d’un astérisque.

40
4.1. LOCALISER une action dans le temps, par rapport au MOMENT DE LA PAROLE*
avant AUJOURD’HUI après
JE DIS AUJOURD’HUI:
Il a fait beau Il fait beau Il fera beau
(hier) (en ce moment) (demain)
autrefois (jadis) maintenant plus tard
dans le passé en ce moment dans/à l’avenir
par le passé pour le moment ultérieurement
naguère à présent
de nos jours
ces temps-ci
ces derniers temps
avant ce jour-là AUJOURD’HUI après
JE DIS AUJOURD’HUI:
Il a fait beau Il a fait beau Il a fait beau
(la veille) (ce jour-là) (le lendemain)
● (un peu/ ● à ce moment-là ● (un peu / bien ) plus tard
beaucoup) plus ● à l’époque ● (peu / longtemps) après
tôt ● alors
● (peu/ bien)
avant
● auparavant

● IL Y A 3, 4, 5 ... jours/semaines/mois/ans la semaine (l’année) dernière (passée)


● AVANT-HIER le mois (l’an) dernier (passé)
(matin)
(après-midi)
(soir)
● HIER
ce soir
● AUJOURD’HUI cette semaine
ce mois(-ci)
cette année(-ci)
● DEMAIN la semaine (l’année) prochaine,
● APRÈS-DEMAIN le mois (l’an) prochain (qui vient / à venir)
● DANS/D’ICI 3, 4, 5 jours/semaines/mois /ans

4.2. LOCALISER une action dans le temps, par rapport à un MOMENT distinct du MOMENT DE LA
PAROLE*
● 3, 4, 5 ... jours (semaines, ans) AUPARAVANT / la semaine (l’année) précédente
PLUS TÔT le mois (l’an) précédent / d’avant
● L’AVANT-VEILLE
(au matin)
(dans l’après-midi)
(au soir)
● LA VEILLE
● CE JOUR-LÀ ce soir-là / ce jour-là / ce mois-là
(LE JOUR MÊME) cette semaine-là / cette année-là
● LE LENDEMAIN la semaine (l’année) suivante/ d’après
(matin) le mois (l’an) suivant/ d’après
(après-midi)
(soir)
● LE SURLENDEMAIN
● 3,4,5, jours (semaines, mois, ans)
APRÈS / PLUS TARD

4.3. Indiquer les LIMITES du procès, dans le temps


I. Limite initiale (point de départ II. Limite finale (point d’arrivée dans le III. Limites: initiale et finale
dans le temps) temps)

41
“dès 1971, la crise des changes “au terme de deux siècles d’activité” “De 1800 à 1914 (... ) la Banque
atténue la portée des mesures dispose d’une réelle
libérales” indépendance”
● à partir de (d’aujourd’hui, de ● au bout de, au terme de (3 jours / une ● de ... à ...
maintenant / du 15 avril; journée); ● du 1er mai au 15 juin;
● dès (aujourd’hui / maintenant / le ● jusqu’à présent / maintenant / une ● entre ... et ...
15 mai / lundi); époque récente / aujourd’hui / demain / ● entre le 2 et le 7 juin (entre
● d’ores et déjà (= “dès au matin etc.; les 2 et 7 juin).
maintenant”); ● jusqu’au jour où
● désormais, dorénavant (= “à ● jusque-là, jusqu’au bout
partir de maintenant”). ● d’ici-là (d’ici demain, d’ici Noël).

4.4. Indiquer la DURÉE


“au cours des années 70”
Limite initiale et durée: DEPUIS
(Je t’attends) depuis trois heures.
(Il est triste) depuis ton départ.
Durée: PENDANT (trois jours / la guerre)
DURANT (trois jours / la Deuxième Guerre)
(trois jours durant)
EN (trois heures) (Il a fini en trois heures.)
POUR (trois jours) (Je serai partie pour trois jours.)
AU COURS DE (des années 90, du premier semestre)
SUR (Le remboursement du prêt peut être étalé sur 7 ou 15 ans.)
Durée ≠ Moment: journée, matinée, soirée, année ≠ jour, matin, soir, an

Verbes : durer...; mettre... pour


La privatisation des grandes banques à réseau a duré quelques années.
Ils ont mis années pour privatiser les grandes banques à réseau. .

4.5. La SIMULTANÉITÉ
(Action 1) EN MÊME TEMPS
(Action 2)
... quand ... ∙
... lorsque ... ∙ / ... lors de + SN ∙
... au moment où ... ∙
... ∙ À ce moment-là, ... ∙
... alors que ... ∙
... ∙ Alors, ...
... comme ... ∙
... pendant que ... ∙ / ... pendant + SN ∙ / ... durant + SN ∙
... ∙ Pendant ce temps, ... ∙
... tandis que ... ∙
... (tout) en +V2 - ant (...) ∙
... et ... en même temps ∙ / ... en même temps que + SN142 ∙
... et ... au même moment ∙

142
Paul est sorti en même temps que toi, analysé comme simultanéité de la sortie de deux individus, donc comme
simultanéité de deux événements distincts.

42
Action 1
Action 2
Il est sorti PENDANT QUE je mangeais. SIMULTANÉITÉ
TANDIS QUE &
ALORS QUE DURÉE
(passé composé) (imparfait)
(présent) (présent)
Action 1
Action 2
Il est sorti COMME SIMULTANÉITÉ
j’arrivais.
(passé composé) (imparfait)
Il sort AU MOMENT OÙ SIMULTANÉITÉ
j’arrive.
(présent)
(présent)
Il sort (toujours) QUAND SIMULTANÉITÉ
j’arrive. & RÉPÉTITION
(présent)
(présent)
Verbe 1 Verbe 2
plus-que-parfait plus-que-parfait Il était sorti quand j’étais arrivé.
passé composé passé composé Il est sorti quand je suis arrivé.
imparfait imparfait Il sortait (toujours) quand j’arrivais.
présent présent Il sort quand j’arrive.
futur futur Il sortira quand j’arriverai.
... ... (il va sortir) (je vais arriver.)
(INDICATIF)
Verbe 1 Verbe 2
passé composé imparfait Il est sorti au moment où (quand) j’arrivais.
imparfait passé composé Il dormait quand (lorsque, au moment où) je suis arrivé.

4.6. La POSTÉRIORITÉ143
POSTÉRIORITÉ POSTÉRIORITÉ IMMÉDIATE
***Action 1 APRÈS Action 2 Action 1 TOUT DE SUITE Action 2
[fait réalisé144] APRÈS
*** ... quand ... ⏐ ... dès que ...
... lorsque ... ↓ ... aussitôt que ...
... après que ... [+ INDICATIF !] ... une fois que ...
(temps simple) (temps composé) (temps simple) (temps composé)
“Nous en reparlerons quand vous aurez régularisé “Je suis à vous dès que j’ai fini.”
votre situation”. “Je viendrai aussitôt que j’aurai fini ce rapport.”
“(D’habitude,) Quand il avait lu le courrier, il faisait “Il faisait (toujours) taper le rapport aussitôt qu’il l’avait
entrer le premier client”. rédigé.”
... APRÈS + infinitif passé Dès
(sujet 1 = sujet 2) (...)
“Je viendrai après avoir lu ce rapport.” Aussitôt + SN 1 + participe passé (...)
Une fois
(...)
“Aussitôt le rapport rédigé, il est monté me voir.”
... après + SN SITÔT dit, SITÔT fait.
... plus tard

143
Seules les cases marquées par *** feront l’objet de l’interrogation (emploi de l’indicatif pour marquer la réalité (le caractère
réalisé) du fait décrit dans la subordonnée temporelle (introduite notamment par après que), en tant qu’opposé au caractère
virtuel (inactuel, pas réel) du fait décrit dans la subordonnée introduite par avant que (cf. section L’ANTERIORITE).
144
Ou envisagé sous cet éclairage (pour les situations postérieures à t 0).

43
“Revenez après les Fêtes.”
“Nous verrons ça plus tard.”
... dès + SN
“Les problèmes ont commencé dès votre arrivée”
... ∙ Après (quoi), ... ∙
(et après)
... ∙ Ensuite, ... ∙
(et ensuite)
... ∙ Puis, ... ∙ ... ∙ Aussitôt, ... ∙
(et puis) ... ∙ Tout de suite (après), ... ∙
... ∙ Là-dessus, ... ∙ ... ∙ Immédiatement, ... ∙
(et là-dessus) (et (...) aussitôt / et (...) tout de suite / et (...)
... ∙ Sur ce, ... ∙ immédiatement)
(temps simple) (temps simple) (temps simple) (temps simple)
“Nous étudierons votre dossier. Puis, nous “Il rédigera le rapport. Madame Duranton le tapera
aviserons.” aussitôt.”
(temps composé) (temps composé) (temps composé) (temps composé)
“Il a rédigé son rapport. Après quoi, il a fait venir la “Il a rédigé son rapport. Tout de suite après, il a fait
secrétaire.” venir la secrétaire.”
À peine (+ inversion du sujet) . . . que . . .
(temps composé) (temps simple)
“À peine ai-je raccroché que le téléphone se met à
sonner.”

Postériorité immédiate Quasi - simultanéité


. . . dès que . . . . . . dès que . . .
. . . aussitôt que . . . . . . aussitôt que . . .
(temps simple) (temps composé) (temps simple) (temps simple)
“Je suis à vous dès que j’ai fini ce rapport.” “Dès que le téléphone sonne, elle se précipite pour
répondre.”

LA CONCORDANCE DES TEMPS

Action antérieure Action postérieure


SAVOIR DIRE passé composé présent
(postériorité (postériorité immédiate))
futur antérieur futur
plus-que-parfait imparfait
(postériorité (postériorité immédiate) & répétition)
“toutes les fois que”
“toujours”
“d’habitude”

COMPRENDRE “Après qu’il a eu rédigé son rapport, il l’a fait taper.”


(passé surcomposé) (passé composé)

“Quand il eut rédigé son rapport, il le fit taper.”


(passé antérieur) (passé simple)

LE PASSÉ SIMPLE

V1 er V2 ir V3
- ai - is - is - us - ins
- as - is - is - us - ins
-a - it - it - ut - int
-âmes - îmes - îmes - ûmes - înmes
- âtes - îtes - îtes - ûtes - întes
- èrent - irent - irent - urent - inrent

44
il paracheva ils accomplirent il fit ... ils firent il fut ... ils furent il vint ... ils vinrent
ils parachevèrent ils choisirent FAIRE ÊTRE VENIR
il bénéficia ils finirent ils vit ... ils virent il vécut ... .ils vécurent il tint ... ils tinrent
ils bénéficièrent ils fournirent VOIR VIVRE TENIR
il acheta ils réussirent il naquit ... ils naquirent il connut ... ils connurent (et leurs dérivés)
ils achetèrent ils blanchirent NAÎTRE CONNAÎTRE
il jeta
ils jetèrent
il gela
ils gelèrent
il souleva
ils soulevèrent
-a- / -è- -i- -i- -u- -in-

PASSÉ SIMPLE FUTUR PASSÉ SIMPLE PARTICIPE PASSÉ


il bénéficia il bénéficiera il eut (il a) EU
ils bénéficièrent ils bénéficieront il sut (il a) SU
ils finirent ils finiront il put (il a) PU
ils sortirent ils sortiront il voulut (il a) VOULU
il fallut (il a) FALLU
- AI - RAI il valut (il a) VALU
- AS - RAS je mis (j’ai) MIS
-A - RA je pris (j’ai) PRIS
- RENT - RONT il dit ... (j’ai) DIT
(ils dirent)

PASSÉ SIMPLE PRÉSENT DE L’INDICATIF


il sortit ... il SORT...
il perdit ... il PERD ...
il fit ... il FAIT ...

! MAIS: il accomplit ... il ACCOMPLIT


(ils accomplirent) (ils ACCOMPLISSENT)
(ALORS) (MAINTENANT)

!! Paul vit ALORS tous ses espoirs s’évanouir. (VOIR: passé simple)
Paul vit ACTUELLEMENT à Paris. (VIVRE: présent de l’indicatif)

4.7. L’ANTÉRIORITÉ*
(Action 1) AVANT (Action
2)
Avant que (ne*) + subjonctif (présent), . . . ANTÉRIORITÉ
Avant de + infinitif (présent), . . .
Avant + SN, . . .
Jusqu’à ce que + subjonctif (présent), . . . ANTÉRIORITÉ &
En attendant de + infinitif (présent / passé **), . . . DURÉE
Jusqu’à + SN / alors, . . .
En attendant ( + SN) , . . .
D’ici + SN / là, . . .
* ne explétif (voir supra)
** action achevée, accomplie

Mettre en vedette le repère temporel:


ÇA FAIT trois jours QUE je cherche à le joindre
IL Y A longtemps je ne l’ai pas vu
VOILÀ je l’attends

45
5. Le DISCOURS RAPPORTÉ

DISCOURS – JE travaille pour Sims, Dawson and Dick”, dit/a dit Paul à l’employé.
DIRECT – JE suis arrivé HIER des Etats-Unis” déclare/a déclaré Paul à l’employé.
(dialogue) – JOUEREZ-VOUS à la Bourse pour VOTRE propre compte?” lui demande/a demandé
l’employé.
– Comment pourrait-on briser ce monopole?” demande/a demandé Paul à l’employé.
DISCOURS Paul dit/a dit à l’employé QU’IL travaille/travaillait pour Sims, Dawson
INDIRECT and Dick.
Paul déclare/a déclaré à l’employé QU’IL est arrivé HIER / était arrivé LA
VEILLE.
L’employé LUI demande/a demandé S’IL jouera/jouerait (+allait jouer) à la Bourse
pour SON propre compte.
Paul demande/a demandé à l’employé COMMENT on pourrait/pouvait briser le
monopole des firmes déjà en place.
1.1. Mode d’emploi
● Verbes introducteurs:
- dire, affirmer, déclarer, maintenir, soutenir, annoncer, faire savoir, rétorquer, répliquer ...+QUE
- demander, vouloir savoir, s’enquérir ... + SI145 / OÙ / QUAND / COMMENT / QUI / CE QUE...
● Personnes
X s’adresse à TOI (VOUS): “Je” → IL (ELLE)
“Nous” → ILS (ELLES): “nous” = X + quelqu’un d’autre
→ NOUS: “nous” = X + TOI (VOUS).
“Tu” → JE
“Vous” → NOUS
JE (“vous” = pronom de politesse)
[indices syntaxiques : accord du verbe fléchi
formel (2pl), mais accord sémantique du participe
passé et de l’adjectif attribut du sujet, au sg.,
spécification du genre selon le genre naturel de
l’individu auquel on s’adresse]

X s’adresse à un TIERS: “Je”, “Tu”, “Il”, “Elle”,


→ IL, ELLE, ILS, ELLES
“Nous”, “Vous”, Ils”, “Elles”

● Concordance des temps (de l’indicatif)


Verbe introducteur Énoncé (de X)
au présent passé composé / imparfait: ANTÉRIORITÉ
(X dit que ...) présent: SIMULTANÉITÉ
futur (futur proche): POSTÉRIORITÉ
à un temps passé plus-que-parfait: ANTÉRIORITÉ
(X a dit / disait . . . que . . . ) imparfait: SIMULTANÉITÉ
conditionnel présent: POSTÉRIORITÉ 146

Discours direct Discours indirect


verbe introducteur
au présent à un temps passé
conditionnel présent147 conditionnel présent IMPARFAIT (indicatif)

Relateur Si “conditionnel” Si “dubitatif”


Forme verbale
FUTUR

145
SI “dubitatif” (vs. SI “conditionnel”)
146
à valeur temporelle (et non pas modale) de “futur du passé”; forme concurrente: ALLER (à l’imparfait) + infinitif (Il m’a fait
savoir que tu viendrais (+ allais venir) le surlendemain)
147
à valeur MODALE!

46
Futur proche — +
Futur du passé périph.
CONDITIONNEL

MÊME SI + présent / imparfait / plus-que-parfait (de l’indicatif)


Concordance des temps: cf. Si conditionnel

Le SI “dubitatif”
DOUTE Je ne sais/savais pas SI les firmes a) se sont emparées/s’étaient
(question Paul ne sait/savait pas déjà en emparées du marché.
cachée) Je me demande/me suis demandé place
question Paul me demande/m’a demandé b. ont/avaient le monopole du marché.
indirecte Paul veut (voudrait)/voulait savoir (= c. garderont/garderaient, allaient
(discours Paul ne sait/savait pas) garder leurs privilèges.
rapporté)
l’on d. pourrait/pouvait briser ce
monopole.
(a. = antériorité; b. = simultanéité; c. = postériorité; d. = conditionnel à valeur modale)

N.B. Même règle de concordance que celle qui est de mise après que, où, quand, comment etc. (discours
rapporté (style indirect)).

La concordance des temps est une forme de distanciation, en référence aux dires rapportés (en style indirect). Les
vérités éternelles, indiscutables (scientifiques, analytiques) s’y soustraient (Il maintenait que la terre tourne
autour du soleil).
S’y soustraient également les propositions décrivant des situations qui restent futures, du point de vue du
locuteur actuel (non seulement du point de vue du premier locuteur, dont les dires seront rapportés) : Il m’a dit
que la réunion commencera [plutôt que : commencerait, allait commencer] dans un petit quart d’heure. Quand
je suis arrivée à la fac, ce matin, il vous disait que Marie arrivera [plutôt que : arriverait, allait arriver] par le
train de 16h.

47

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