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Schopenhauer et la Mécanique Quantique

I. INTRODUCTION
Bonjour, j’écris ce message parce-que pendant le dernier Talk, je n’avais pas osé
exprimer le fond ma pensée. À part le fait que j’avais du mal à m’exprimer devant vous
(il faut que je m’habitue encore), c’était surtout le fait que je n’avais pas envie de vous
faire chier avec de longues explications, notamment après le Cours Magistral sur
Schopenhauer. Du coup, je vais écrire ici les réflexions que je me suis faites en lisant
Schopenhauer qui m’ont beaucoup rappelé la mécanique quantique. J’espère être
compris, sinon je me ferais un plaisir de répondre aux questions. Attention, ceci n’est ni
une thèse, ni un pamphlet, ce sont juste des réflexions qui ne vont pas forcément vers
un but précis (que ce soit valider ou contredire Schopenhauer). Je tiens à dire que pour
les connaissances en mécanique quantique, je me réfère aux quelques vagues souvenirs
de prépa scientifique, mais surtout au livre de Manjit Kumar, Le grand roman de
physique quantique (Quantum dans la version originale), paru en 2011 aux éditions
Champs Sciences. C’est un livre qui se lit comme un roman car il retrace de manière
chronologique comment la mécanique quantique s’est établie, et surtout, le débat entre
Einstein et Bohr sur la nature de la réalité (spoil : Bohr serait Schopenhauerien). Le plan
de mon texte est le suivant : tout d’abord je vais essayer d’ « expliquer » quelques bases
de la mécanique quantique (ça sera de la divulgation de divulgation, donc attention, ce
sera très approximatif, je vais sauter des passages, etc., mais l’important sera l’idée).
Puis, à partir de ces bases, expliquer en quoi on retrouve la philosophie de
Schopenhauer dans toutes ces recherches scientifiques, pour finir sur une petite
conclusion. Commençons …

Tout d’abord, expliquons quelques notions de physique générale et de mécanique


quantique.

II. NOTIONS DE MECANIQUE QUANTIQUE ET DE PHYSIQUE


CLASSIQUE

1. Quantification de la lumière

Ça ne vous aura pas échappé, la mécanique quantique vient du fait que l’on quantifie.
En effet, Max Planck au début du XXe siècle, pour résoudre un problème physique qui
posait problème pour la physique de l’époque (le rayonnement du corps noir pour ceux
que ça intéresse), se propose de quantifier les ondes qui s’échappent du corps noir afin
de pouvoir après intégrer tout ça et obtenir une solution. Depuis Newton, on considère
une onde comme quelque chose de continu (comme l’eau qui coule d’un robinet), qu’il
est impensable de quantifier. Même Max Planck qui pour la première fois quantifie ces
ondes, pense que c’est uniquement un artifice mathématique pour arriver à une
solution en accord avec la réalité. Il se refuse à croire que c’est la description d’une
réalité sous-jacente (comme dit le livre, il est révolutionnaire malgré lui). Le premier qui
propose une description de la réalité avec une quantification des ondes est Albert
Einstein, qui propose une quantification de la lumière (qui je le rappelle est une onde)
qu’on appellera quanta, et plus tard photon. Il faut supposer, qu’une onde est divisée
en petits paquets d’onde, qui comme ils sont infiniment petits et proches, forment une
onde continue en apparence.

2. Dualité Onde-Corpuscule

a) Nature Ondulatoire

Deuxième notion, la dualité onde-corpuscule des ondes. Depuis Newton, on déterminait


que la lumière (i.e. les ondes) comme un corpuscule (des particules). Cependant, XIXe,
les phénomènes que je vais décrire juste après ont fait que l’on considère la lumière
comme des ondes, et l’idée de corpuscule a été abandonnée parce qu’elle ne
correspondait avec l’expérience. Ainsi, les ondes sont définies par une amplitude (l’écart
entre son maximum et son minimum), et une longueur d’onde (la distance entre deux
pics, ou deux creux). Ceci a été démontré maintes fois par le phénomène de diffraction
et d’interférences. Le phénomène qui nous intéresse est le phénomène d’interférences
que je vais expliquer succinctement par l’expérience des fentes d’Young :

Si vous avez une fente fine dans une paroi par laquelle vous envoyez un faisceau de
lumière, le faisceau va être diffracté (je conseille de chercher une photo pour illustrer ce
concept, c’est très facile).

Si juste après l’on place une autre paroi avec deux fentes, l’onde diffractée va donc
traverser ces deux fentes et être encore une fois diffractée. Tout ça, on s’en fout, le fait
est que, les deux ondes diffractées par les deux fentes de la deuxième paroi, vont donc
se « toucher » et créer des interférences.
Comme dans une onde il y a des pics et des creux, lorsque les deux ondes vont se
« toucher », on aura parfois des pics d’une onde qui rencontrent des pics de l’autre, ou
des creux de l’autre, etc. Ainsi, tout ça va se sommer, pic+pic=double pic, pic+creux=
moyen, creux+creux=zéro. Si l’on place un écran après la deuxième paroi, on aura donc
ce qu’on appelle une figure d’interférences avec des « barres » brillantes où l’on a un
double pic, des barres moins brillantes où l’on a un « moyen » et une barre sombre où
l’on a un « zéro ». Ainsi, ce phénomène ne peut exister que si l’on suppose la nature
ondulatoire de la lumière (et des ondes).

b) Nature corpusculaire

Cependant, encore une fois Einstein va remettre au gout du jour la nature corpusculaire
et démontrer que la lumière peut aussi se comporter comme un corpuscule (une
particule qui a donc une masse). Pour démontrer la théorie de la relativité d’Einstein qui
n’avait pas fait mèche à son époque, un groupe de scientifiques se propose de calculer
la déviation de la lumière par le Soleil, ce qui en plus de démontrer sa théorie si la
déviation est celle qui est prévue, démontrerai que la lumière a une « masse » (ou du
moins peut se comporter comme tel), vu qu’elle serait déviée par la gravité d’une étoile
(rappelons que cette force s’applique à des objets qui ont une masse). Ainsi, ils vont
dans le site d’une prochaine éclipse 6 mois avant celle-ci pour observer une étoile
précise que je vais appeler X (qui lors de l’éclipse se trouvera proche de la position du
Soleil), et ils calculent la position de X précisément. 6 mois après, ils ont le même ciel
(sauf que le Soleil est entre la Terre et le ciel observé auparavant). Ils utilisent l’éclipse
et le fait que les étoiles sont visibles pendant celui-ci, pour observer la position de X qui
avait été choisie proche du Soleil pour voir s’il y avait une déviation. Ainsi, effectivement,
il y avait une déviation et Einstein se catapulta vers la renommée mondiale, car sa
théorie maintenant vérifiée était révolutionnaire.
Ainsi, les ondes et la lumière sont à la fois onde et corpuscule. Selon l’expérience que
l’on fait, elles peuvent se comporter soit comme une onde soit comme un corpuscule,
mais jamais les deux à la fois car ces deux phénomènes sont exclusifs.

III. APPLICATION DES NOTIONS À L’ATOME


Attaquons maintenant le cœur de la mécanique quantique. On va maintenant appliquer
toutes les connaissances que l’on vient d’établir sur les électrons.

1. Couches électroniques d’un atome

En gros, la possibilité de quantification des ondes et de la lumière a des conséquences


assez imprévues. En effet, on peut aussi appliquer ceci aux électrons, et quantifier les
niveaux d’énergie d’un électron dans un atome. L’électron ne peut pas orbiter un atome
à n’importe quelle distance de celui-ci sinon il s’effondrerait. Il y a donc des orbites
stables, qui correspondent à des niveaux d’énergie quantifiés. On doit ceci à Bohr et son
centre de recherche de Copenhague, et je vais maintenant utiliser le nom de cette ville
pour parler de son groupe (en vrai, on parle d’école de Copenhague). Du coup, lorsque
l’on excite un atome (c’est-à-dire que l’on lui fournit de l’énergie), un électron va se
déplacer d’une orbite inférieure à une orbite supérieure en absorbant cette énergie. Cet
atome excité va donc à un moment lambda se désexciter (ce qui est fascinant c’est que
l’on ne peut pas savoir exactement le moment précis de désexcitation, on sait qu’il va le
faire, mais pas quand), et en ce désexcitant, il va émettre une énergie qui est exactement
celle qu’il perd lorsqu’il descend de niveau d’énergie et donc d’orbite. Autre chose
fascinante, l’électron se déplace instantanément d’un niveau à un autre, il n’y a pas de
niveau intermédiaire. De plus, il n’y a pas forcément un électron par couche mais il y une
loi (le principe d’exclusion de Pauli) qui détermine combien d’électrons il y a par couche.

Ainsi, le comportement d’un atome va dépendre du nombre d’électrons de sa couche


extérieure (que l’on appelle électrons de valence) car c’est celle où les électrons vont se
déplacer le plus facilement (les couches inférieures sont toutes occupées). Pour donner
une idée, les gaz nobles qui sont ceux qui sont placés tout à droite dans la classification
périodique ont leur couche extérieure complète. C’est pour cela qu’il faut beaucoup
d’énergie pour les exciter car, l’atome est stable vu qu’il est complet. On utiliser donc
ces gaz pour isoler ; le Néon, l’Argon, le Xénon, etc. sont utilisés dans les lampes du fait
de leurs faible réactivité chimique. De la même manière, les atomes de la colonne juste
à gauche de celle des gaz nobles manque seulement un électron pour compléter la
couche, donc va réagir très facilement pour absorber un électron et ainsi compléter sa
couche. Inversement, dans la colonne tout à gauche de la classification périodique, la
couche extérieure présente uniquement un électron, Du coup, celui-ci va facilement
partir pour que la dernière couche de cet atome soit complète (il est plus facile de faire
partir un électron que de remplir la couche de plusieurs, et l’atome cherche la facilité).
Ces deux dernières colonnes vont donc facilement réagir chimiquement.
2. Dualité onde/particules sur les électrons

Deuxième idée de la mécanique quantique, de Broglie (un aristocrate français) va


proposer que la dualité onde/particule s’applique aussi aux électrons. Il démontre qu’en
considérant les électrons comme des ondes, on obtient justement ces niveaux d’énergie
(i.e. orbite). On sait que les électrons sont des particules avec une masse, mais il va falloir
démontrer qu’ils peuvent se comporter comme une onde. Ceci va pouvoir se démontrer
grâce à l’expérience des fentes d’Young expliquée précédemment. Au lieu d’envoyer un
faisceau de lumière, envoyons un électron un à un. Attention, cette expérience est l’une
des plus fascinantes de la mécanique quantique :

On suppose encore deux parois dont la première avec une fente, et la deuxième
avec deux fentes, puis un écran en fin de parcours. Lorsque l’on envoie un électron un a
un à travers les fentes, on obtient magiquement une figure d’interférences !!! Là où
précédemment on avait un double pic, on obtient beaucoup plus d’impacts d’électrons
alors que l’a où l’on avait un « zéro », on n’obtient pratiquement pas d’impacts.

En fait, la figure d’interférences correspond ici à la probabilité d’avoir un impact dans


cette zone. Cependant, on envoie les électrons un à un donc il est impossible qu’il ait pu
interagir avec un autre. Du coup, l’interprétation quantique est que l’électron est passé
par les DEUX fentes à la fois et qu’il a interagi avec lui-même. Ceci est uniquement
possible si l’on considère que l’électron s’est comporté comme une onde et non comme
une particule.

Du coup, on se demande quelle est la trajectoire de l’électron et on ferme une fente de


la deuxième paroi. Le résultat obtenu est consternant, on ne voit plus d’interférences
sur l’écran. On peut donc dire que l’électron sait que les deux parois sont ouvertes, car
lorsque l’on en ferme une, il n’y a plus d’interférences.

On refait une troisième expérience, on ouvre les deux fentes, et on observe la deuxième
paroi, afin de voir par quelle fente chaque électron passe. On obtient donc comme prévu
50% des électrons qui passent par une fente et 50% des autres électrons qui passent par
l’autre fente. Cependant, de manière étonnante, on n’obtient plus d’interférences sur
l’écran !! C’est comme si l’électron savait quel comportement il devait adopter et
dépendant de si l’on veut démontrer sa nature corpusculaire ou sa nature ondulatoire,
il se comporte différemment. Ainsi, quand on veut observer par quelle fente l’électron
passe, c’est un phénomène corpusculaire et il se comporte comme tel. Mais quand on
ne regarde pas, il agit comme une onde.

3. Principe d’incertitude d’Heisenberg

Pour finir sur la mécanique quantique, je voulais parler du principe d’incertitude


d’Heisenberg. Celui-ci dit qu’il est impossible de connaître la position et la quantité de
mouvement d’une particule en même temps. Vu que la particule élémentaire de lumière
est le photon (qui est donc aussi une particule), lorsque l’on observe une particule on la
perturbe car on envoie des photons qui la frappent. Du coup la deuxième mesure ne
sera pas effectuée sur exactement la même particule. Du coup on parle de probabilité
de position. On ne sait pas où l'électron est, on sait juste où il peut être. Du coup, on
pourrait arriver à la conclusion que finalement, cet électron n'a pas de position réelle,
et qu'en fait c'est l'expérimentateur qui en effectuant sa mesure détermine sa position.
C'est en gros ce que l'on appelle l'interprétation de Copenhague.

IV. NATURE DE LA RÉALITÉ


Je laisse un peu cette partie en suspens car je voudrais maintenant aborder la deuxième
partie de l'exposé qui est le débat sur la nature de la réalité et le rapport avec
Schopenhauer

Bohr et ses collègues de Copenhague avaient donc l'assurance que leur nouvelle
conception était une description complète de la réalité. C'est à dire que l'on avait
compris comment fonctionnait l'atome et que toutes les incertitudes sont dues au
caractère intrinsèque de la nature que l'on ne pourrait jamais éviter un procédé
probabiliste où l'on ne sache pas avec exactitude tous les paramètres d'une particule.
L'expérience confirmait cette théorie et toute la technologie que l'on connaît est basée
sur ces interprétations. Cependant, à cette époque une seule voix s'élevait contre :
Einstein. Sa fameuse phrase "Dieu ne joue pas aux dés" résumé justement son reproche.
Il comprenait la mécanique quantique (c'est d'ailleurs l'un des fondateurs), mais n'était
pas d'accord sur le fait que ce soir une description complète de la réalité. Il passa toute
sa vie à essayer de créer sa grande théorie qui puisse unifier la physique classique et la
mécanique quantique dont les bases sont complètement opposées (au XIXe Maxwell
avait réussi ce coup de maître en unifiant le magnétisme et l'électricité, en justifiant que
ce sont deux expressions du même phénomène, j'ai nommé l'électromagnétisme).
Cependant, il ne réussit pas et nous sommes encore en train de le faire. La théorie des
cordes serait la voie à suivre.
Einstein croyait fermement au fait qu'il existe une réalité qui existe au-delà de
l'expérience, et que la science pourrait et devrait pouvoir la découvrir. Il émis beaucoup
d'expériences de pensée que je pourrais vous proposer si vous voulez afin de contredire
la mécanique quantique de manière philosophique et non de manière mathématiques,
ce qui montre que le débat tenait plus de la conception du monde que des maths.
Bohr et ses collègues au contraire, soutenaient que la réalité n'existe que lorsque on
l'observe, et c'est le phénomène que l'on veut observer qui se manifeste. Contrairement
à Schopenhauer, ils ne se préoccupent pas de savoir si c'est par les humanités que l'on
accède à la réalité du monde, mais du moins ils proposent le fait que nous ne pouvons
observer que des phénomènes qui dépendent de nos sens ou de nos instruments.

V. CONCLUSION
Tout ça pour arriver enfin à la dernière partie, merci d'être arrivé jusqu'à ce point et je
n’espère pas avoir trop fais chier le monde. Ici je voulais juste rajouter l'hypothèse de la
volonté. Je ne sais pas si en lisant les notions de physique et de mécanique quantique
que j'ai énoncées, vous avez ressenti la même sensation que moi quant au fait que
finalement l'électron se comporte vraiment comme s'il était animé d'une volonté. Je ne
veux pas non plus tomber dans la croyance d'une force supérieure, mais finalement, le
monde de l'atome aime être stable et va tout chercher pour le devenir (une fois excité,
celui-ci se désexcite, mais quand il veut. Je ne l'ai pas évoqué mais il arrive de même
avec la radioactivité, je pourrais revenir dessus si l'on me le demande).
De même on peut se demander qu'est-ce qui meut la nature à chercher cette stabilité.
Paradoxalement, tous ces phénomènes compliqués sont beaucoup de fois régis par les
nombres entiers ce qui est, je trouve, vraiment beau.
De même, pour vous donner une idée du saut qu'a été cette théorie, je voudrais ajouter
que toutes les avancées primitives (celles qui ont établies les bases) en mécanique
quantique ont été effectuées de 1910 à 1930 alors que pendant la première décennie la
grande majorité des scientifiques ne croyaient pas en l'atome.
Voilà j'espère vous avoir pas trop fatigué et que si du moins vous n’avez pas trouvé le
rapport entre Schopenhauer et la mécanique quantique, vous aurez appris quelque
chose.
Merci et à la prochaine !

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