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LE RACHAT PAR L’ETAT DES CONCESSIONS AUTOROUTIERES 1, Pourquoi racheter les concessions autoroutiéres ? a) Depuis leur privatisation les sociétés concessionnaires d’autoroutes sont devenues de véritables « vaches a lait » pour leurs actionnaires La privatisation des sociétés concessionnaires dautoroutes (SCA)' a eu pour résultat — prévisible — de placer la logique du profit au coeur de leurs préoccupations, au détriment, dans certains cas, de la qualité du service rendu mais aussi de accés du plus grand nombre a un service public de plus en plus cher. Les Francais acceptent d'autant plus mal augmentation des péages ~ entre 10 % et 20% selon les sociétés et les classes tarifaires sur la période 2005-2010 — qu'ls ont le sentiment — largement justifié — qu'une part croissante de ces hausses sert a enrichir les actionnaires privés. Les chitfres leur donnent raison, Ala faveur de la hausse continue et soutenue des péages autoroutiers, pourtant dénoneée par la Cour des comptes, la croissance du chifre d'affaires des concessionnaires ne s'est jamais démentie, y compris dans la période récente, malgré la baisse du trafic autoroutier liée a la crise, De sorte que les performances financiéres des SCA atteignent des niveaux exceptionnels. En 2010, fexcédent brut exploitation cumulé des 3 groupes privatisés a atteint 5,2 Mds€ pour un chiffre d'affaires global de 7,7 Mds€, soit une marge d’EBE moyenne de 68%/ Le bénéfice cumulé a augmenté de 30 % entre 2008 et 2009 de sorte qu’en 2010, les résultats nets additionnés des trois groupes privatisés s'élevaient a 1,4 Mdé, soit une marge nette moyenne annuelle de prés de 19%, cela alors que la durée résiduelle des concessions actuelles est de 20 ans et que essentie! du réseau est déjé amor b) Un niveau de profitabil problématique du point de vue social et politique Ces niveaux de profitabilté sont exceptionnels. Ils posent la question de lacceptabilté sociale et poltique de tels niveaux d'enrichissement au profit de quelques actionnaires privés dans exploitation d'un service public. lis conduisent a s'interroger sur le niveau de plus en plus confiscatoire des pages au détriment des ménages et de la collectivité publique dans un contexte aigu de crise des finances publiques et de stagnation du pouvoir d'achat des ménages. Enfin, la question se pose avec d'autant plus daouité quielle est la conséquence d'une permissivité tarifare qui a conduit a des augmentations de péage bien supérieures a linfation dont Feffet est o'évincer les usagers les moins fortunés, obligés de se détourner d'un service public devenu trop onéreux alors méme que 8s performances en termes de sécurité routiére sont depuis longtemps établies (e taux daccidentologie autoroutiére (accidents mortels) est § fois inférieur calul de la route). 1 En 2006, fe groune Eifare (Ettage associé au fond australion Macquarie) a reprise groupe APAR (APAIR et AREA. VINCI a pis le conirde du groupe ASF (ASF ot Eso0t3), dant i detenat deja 26% du capita. Le réseau du groupe Sane! [Senet et SAPN) ceviont a consortium HIT (Holding d'nfaestructures de Transport SAS) digé par Tontreprise espagnole Aberis. Enfin, en 2006. VINCI a prs les parts Gitage chez Cofroute car Eifage souhate tout invest chez APF, Ain! le groupe VINCI Concessions girige le pus Ge kklométres dautoroutes en France, avec ASF, Cofrouta, Escola ot Arcour 2 Lexcédent tru dexpltation est le solde entre les prozuts explotation et les charges dexplolation qui ont ét@ consommées pour ‘btenir ces produits. correspond done au résulat du processus dexpioltaon I difere du résutal axpiniaion dans la mesure ou ‘ne prend pas en compte les dotations aux amortssemens et les provisions pour orion act. UEBE ast una variabie-clé de "analyse du comple de résulat Les chfres donnes ici se référent &Téquivalentanglo-saxon de IEE, 4 savor 'EBITOA, ©) La triple erreur de la privatisation Ces données illustrent la triple erreur de la privatisation des autoroutes. 1°) Elle a conduit Etat & brader un actif autoroutier cédé pour moins de 15 Mds€ entre 2002 et 2006 alors que la valeur cumulée des dividendes futurs attendus (en euros courants) sur la durée des concessions (2006-2032) était estimée a 43,5 Mds€ et que la Cour des comptes, dans un rapport de 2008, faisait état dune valeur de 24 Mds€ pour les 7 000 kilometres de réseau concerné. 2") Elle a fait des usagers les grands perdants de la privatisation avec des hausses tarifaires abusives qui ont contribué & détourner les automobilistes de tautoroute. 3°) Elle ‘ privé les pouvoirs publics des leviers nécessaires a une gestion dynamique de la politique tarifaire alors _méme que linstauration de la taxe poids lourds sur les routes nationales et départementales en juillet 2013 va induire des reports de trafic poids lourds vers les autoroutes. 2. Racheter les concessions autoroutiéres : conjuquer I'efficacité privée et lintérét public fa) Dans ces conditions, alors que la durée résiduelle des concessions actuelles se situe entre 16 et 22 ans, il est proposé que I'Etat reprenne le contréle de l'exploitation des autoroutes. L'dée serait de résilier par anticipation les contrats de concession en cours pour moti dintéret général ‘apres indemnisation des actionnaires actuels des SCA sur la base dune valorisation qui pourrait se situer entre 20 et 25 Mds€ (estimation)”. Des contrats d’exploitation des autoroutes concernées seralent ensuite attribués aprés mise on concurrence & des exploitants sous la forme de contrats de « régie intéressée », (Volre do = contrats de partenariat »). Une loi prévoiait Fobligation Pour Tes futurs exploitants de reprendre les personnels on place. Lés sociétés prestataires seraient rémunérées pour leur mission de collacteurs du péage pour le compte de Etat, ainsi que pour exploitation et fentretien du réseau. Cette rémunération serait essentiellement fixe, assortie @und marge raisonnable (comme cans un marché de service). Une part variable (minoritaire) viendrait récompenser la performance sur la qualité et la disponibilté de (infrastructure, La Témunération dos futurs exploitants serait ainsi totalement déconnectée du montant des péages percus, dont les tarifs seraient fixés par Etat et dont le produit li reviendraitintégralement b) Une structure publique ad hoc serait chargée d'émetire les emprunts obligataires (sur 90 ou 40 fans) nécessaires & lindemnisation des actuels actionnaires des sociétés concessionnaires du falt de la résiiation de leurs contrats. La lol affecterait & cette entté le produit des péages. Le systéme serait déconsolidant dés lors que la dette de la structure de portage serait adossée des ‘recettes « commerciales » identifiées et quasi-certaines (7,7 Mds€lan). II conviendrait d/étudier le circuit de remontée des recettes & la structure et de voir quel réle on lui donnerait exactement vis- Avis des exploitants. En tout état de cause, lidée est de conserver des exploitants privés soumis des exigences defficacité mais « tenus en bride » sur les péages et la qualité du réseau, et non de nationaliser par le contréle du capital. II faudrait sans doute informer la Commission européenne et vérifier le fondement juridique de la pérennisation des péages. SW existe plusieurs manigres de calculer la valeur des contrats en cours. Schématiquement, lune consiste a mutiblier le cash flow annyel par ie nombre années restant 4 cour. autre s'appue sur la méthode des « multiples =, consistant & multe’ un agragat ‘eprésentatt (EBE ou résulst net) par un cooficentétabi parle analyst, valour dont on duit la Gate residue Ces methoces Conduisent a estimer Ia valeur cumulbe actuelle des 9 groupes privés dans Une fourcette comprise ets 1 et 25 Mose 6) La période dendettement de la structure publique étant res supérieure a la durée résiduelle des. Contrats de_concession (10 20 ans), une partie des revenus encaissés par la structure pourrait “étre immédiatement réinvestis dans le financement des réseaux diinfrastructures — ferroviaire, fluvial, voire routier ~ pour accélérer leur rénovation et soutenir la croissance. Sur le plan financier, la résiiation anticipée des contrats s'assimile & une opération de refinancement de la dette du secteur, & un taux probablement plus faible que ceux des SCA. Ainsi, en tenant compte du report du trafic des camions sur les autoroutes du fait de linstauration de la taxe poids lourds & compter de Neté 2013 sur la majorté des axes du réseau routler national et départemental (voir plus bas point @), le montage proposé devrait permettre de dégager chaque année, un montant de ressources disponibles pour l'investissement compris entre 500 ME et 1 Mdé* fiseerno. 3. Une mesure trés populaire dans l’opinion, politiquement difficile a contester a) Le resserrement du contrdle d'un bien public par la collectivité Poliiquement, la résilition des contrats de concession pour mettre fin a la privatisation de la rente autoroutiére serait @ coup str tr8s populaire chez une immense majorité de Francais : usagers (automobilistes et leurs représentants, transporteurs routiers, motards, associations de promotion de la sécurité routigre), le secteur des PME travaillant dans le BTP qui pourraient voir s‘ouvrir des opportunites Nouvelles dans l@ccs aux marchés de travaux et tous les partisans du retour de Etat dans la gestion de ‘services publics essentiels. b) Une mesure favorable au pouvoir d’achat et a la sécurité routiére Le projet serait justifié en insistant sur la modération tarifaire — on pourrait annoncer un gel des éages en euros constants, voire en euros courants, voire une baisse symbolique — qu‘on présenterait comme favorable au pouvoir d'achat des ménages et a la sécurité routiére (autos et motos). En revanche, il faudrait étre clair sur deux points : i) il ne s‘agit pas de « nationaliser » les autoroutes mais de ‘mattre fin a la rente ; 2°) il n'y aura pas suppression des péages — nécessaires pour rembourser la dette. ©) Une mesure favorable a l'investissement, a la croissance et a l'emploi Les ressources disponibles dagagées par lopération de refinancement permettront d'accélérer effort de rénovation des réseaux et d'enclencher une dynamique de croissance dans un secteur — les infrastructures — & effet multiplicateur élevé et fortement créateur d'emplois. Sur le quinquennat, en neutralisant l'année 2012 et une partie de l'année 2013, ce sont prés de 3 Mds€ supplémentaires qui ourraient étre dégagés pour l'investissement. En outre, la modération de I’évolution des péages aurait des effets indirects sur la croissance et l'emploi. “En supposant que la stusture publique ad hoc emprunte 2oMds€ sur 40 ans a 4.5%, fannité dfemprun (annuté constant) Feprésante environ 1,08 Mads. Compte tenu du résultat net dégagé chaque année par les trois groupes (environ 1,43 Mdbe en 2010), le solde disponible (net du coGt de la dette) est de Fordre de 360 ME, auxquels on peut sjouior enviton 400 ME de surcrot oe fevenu lié au report de trafic apres Iinsiauration de fa taxe poids lourds, sot 750 Mélan. optimisation wu financement deat permettredamétiore: encore ce montant. On suppose en oute que le niveau des péages resi constant sur 40 ans,

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