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Chapitre 1

Norbert a disparu
Jeudi 4 août, dix heures du matin.
Je m’appelle Lucas, j’ai quatorze ans, je viens de réussir mon
Brevet haut la main et je suis un inventeur génial. L'année prochaine, j’entre au lycée.
Je veux suivre une filière scientifique. J’adore tout ce qui est technique. Après mon 
bac, je ferai des études pour devenir ingénieur. 
J’habite à Cassis, dans le sud de la France. Attention ! Ça s'écrit « Cassis », mais ça 
se prononce « Cassi ». On n’entend pas le « s ». Exactement comme dans « une souris » 
ou « un tapis ». 
Le deuxième mois des vacances d’été a commencé depuis une semaine. Léa, Karim et
moi allons... travailler ! Hé oui, il faut travailler pour gagner un peu d’argent de 
poche ! Léa, c’est ma sœur. Elle a deux ans de plus que moi. Elle est plutôt cool pour 
une grande sœur. Elle a les cheveux roux et les yeux verts. Karim aussi a seize ans. Il 
habite en face de chez nous et nous faisons plein de choses ensemble. Je connais son 
secret : Karim est amoureux de Léa. Mais, pour ma sœur, c’est juste un très bon 
copain. Je crois que cela le rend un peu triste. 
Depuis deux ans, notre super plan pour gagner de l’argent s’appelle Norbert et 
Fanny. 
Ils ont environ soixante­dix ans et habitent sur la route entre Cassis et Marseille. 
Nous allons chez eux deux fois par semaine pour quelques heures. Léa garde leurs 
deux petits­enfants, moi, je m’occupe du jardin ou je fais du bricolage et Karim aide 
Norbert dans sa passion : l’informatique. 
Ce matin, lorsque nous arrivons chez aux vers dix heures, Fanny nous annonce une 
chose terrible : Norbert est parti hier en début de matinée et depuis, il ne donne plus 
signe de vie ! 
­ Où est­il allé ? demande Léa. 
­ Je ne sais pas ! Il m’ajuste dit : « Je vais découvrir un immense trésor ! ». Encore 
une de ses histoires ! 
Les chasses aux trésors de Norbert ! C’est son passe­temps préféré depuis vingt ans, 
mais il n’a jamais rien trouvé. 
­ Ne vous inquiétez pas, Fanny, il va revenir votre Norbert, dit Karim en riant. Il 
disparaît souvent plusieurs jours de suite... 
Fanny s'énerve : 
­ Mon Norbert ne perd pas la tête ! Un policier m’a dit la même chose : ne pas 
m’inquiéter, Norbert va bientôt me donner de ses nouvelles ; l’année dernière déjà, il 
est parti trois jours sans prévenir… Oh, excusez­moi les enfants, je vous crie dessus. 
Mais j'ai vraiment peur cette fois ! Il ne répond pas au téléphone. 
Nous décidons d’aider Fanny et de partir a la recherche de Norbert. Léa organise les 
opérations : 
­ Lucas tu cherches des indices dans l’atelier. Toi, Karim, tu fouilles dans son 
ordinateur. Moi, je m'occupe de la maison. Trouvons une piste ! 
L’atelier de Norbert est mal rangé. Comment fait­il pour trouver ses affaires ? Je 
cherche une demi­heure sans succès. Puis, je remarque un vieux pull accroché à un 
clou. Je trouve un papier très intéressant dans une poche. Je cours rejoindre les autres
pour partager ma découverte. 
­ Norbert devait rendre un livre a la médiathèque hier matin ! C'est écrit sur ce 
morceau de papier. 
­ Bravo s’enthousiasme Léa. Moi, je n’ai rien trouvé. Et toi, Karim ? 
­ Je suis bloqué par le mot de passe. Norbert le change souvent et je ne le connais 
pas.
­  « Edmond », dit Léa. 
­ Pourquoi ce prénom ? se demande Karim en le tapant sur le clavier. Raté ! 
­ « Dantès », alors. 
­ Encore raté. 
Elle enchaîne : 
­ « Mercédès ».
­ C’est quoi tous ces noms bizarres ? C’est pas le loto ! Hé, c’est le bon ! Tu es géniale !
Mais comment as­tu fait ? 
­ Ce sont des personnages du roman préféré de Norbert, Le Comte de Monte­Cristo. Il
en parle tout le temps ! 
Karim ouvre plusieurs fichiers, puis lit les derniers mails de Norbert. 
­ J’y pense : j’ai aidé Norbert à s’inscrire sur un forum spécialisé dans la chasse aux 
trésors. Son pseudo c’est... 
Je hurle : 
­ « Monte­Cristo » ! 
­ Perdu ! « Le comte », tout simplement. 
Norbert a participé à plusieurs discussions en ligne : une a pour titre L’or du 
Brigand. Un autre internaute, qui a pour pseudo Indi, a posté plusieurs messages 
dans cette discussion. 
­ Bingo ! Écoutez ça : Message de Indi au Comte : « RDV à la prison, demain a 11 
heures ».
Je ne comprends pas et demande : 
­ Un rendez­vous dans une prison ? Étrange, non ? 
­ Pas s'il s'agit du château dit, juste en face de Marseille. La prison du roman 
d'Alexandre Dumas, Le comte de Monte­Cristo. Tu ne lis pas les classiques ? me 
demande Léa. 
­ Je résume, dit Karim. Nous avons deux pistes : le rendez­vous au château d’If et la 
médiathèque. Je propose de commencer par cette dernière, on y sera vite en vélo. Pas 
de temps à perdre ! En avant, sur la piste de Norbert ! 
Chapitre 2
La liste de noms
Jeudi 4 août, midi.

Il faut faire quinze minutes de vélo pour aller de la maison de Fanny et Norbert à la 
médiathèque Marcel Pagnol, à Cassis. Léa, Karim et moi connaissons bien l’endroit. 
J'y emprunte surtout des livres techniques, Léa des romans et Karim des BD. Mais 
aujourd'hui, nous devons découvrir ce qu'a fait Norbert durant la journée d’hier. 
Madame Bibliaud, la directrice, nous accueille avec un grand sourire : 
­ Vous n’êtes pas à la plage avec ce soleil ? 
­ Pas le temps, répond Léa. Norbert Pastillet vous a­t­il rendu un livre hier? 
­ En voilà une question bien mystérieuse ! Pourquoi tu me demandes cela ? 
Nous lui expliquons sans donner tous les détails de notre enquête. 
­ Pauvre Fanny, elle doit être très inquiète. Attendez, je regarde sur l’ordinateur : il 
est venu hier matin à huit heures et demie précises. Il a rendu le livre Le Brigand de 
Cassis, légende ou réalité ? Norbert était en pleine forme, joyeux même, si je me 
souviens bien. 
­ D’autres personnes ont emprunté ce livre ? demande Karim. 
­ Je ne peux pas vous le dire, c’est la vie privée des gens. Mais vous pouvez consulter 
le livre si vous voulez. 
Nous nous dirigeons vers le panneau « Histoires de la région », quand Karim a une 
idée. Il s’installe devant un ordinateur à la disposition du public et me dit de surveiller
madame Bibliaud. 
­ Tu veux t’introduire dans le réseau de la médiathèque ? Mais c’est interdit !
Interdit mais, waouh ! C’est trop fort comme idée ! J’ai l’impression d‘être un pirate 
informatique, comme dans les films. Enfin, moi je fais le guet pour le vrai pirate. C'est 
déjà bien et je prends mon rôle très au sérieux. Mes yeux passent de l’écran de 
l’ordinateur au bureau d'accueil et du bureau d’accueil à l’écran. Karim tape très vite 
sur le clavier. Moi, je tape avec deux doigts, mais lui, c'est un vrai pianiste. L'écran 
d’accueil, « Bienvenue a la médiathèque Marcel Pagnol », laisse place a un écran noir. 
Karim écrit des lignes de caractères étranges. Il clique avec la souris, soupire, grimace,
tape sur le clavier, marmonne « Impossible ! », puis « J'y arrive pas ! » et «Allez, allez!»,
avant de s’exclamer : « Ça y est ! Rien ne me résiste ! » 
Il en rajoute un peu... Il entre le nom du livre et une liste de noms apparaît sur 
l'écran. Il lance l'impression et me demande d’aller chercher la feuille dans 
l’imprimante. 
­ Laquelle ? 
­ L'imprimante derrière le bureau de madame Bibliaud ! Fais vite ! 
Je me précipite vers le bureau d’accueil et là, derrière la directrice, sur l’imprimante,
une lampe rouge clignote et devient verte pour indiquer le début de l’impression. 
­ Tu veux quelque chose, Lucas ? me demande madame Bibliaud. 
Je ne sais pas quoi dire. Elle va se retourner, prendre la feuille et découvrir que nous
avons piraté le système informatique. Elle va appeler la police et nous allons être 
emprisonnés au château d'lf ! La feuille sort lentement de l’imprimante. J'invente 
n’importe quoi : 
­ Karim a un problème avec l’ordi : il y a un bug... 
Madame Bibliaud me regarde sans comprendre puis se lève et se dirige vers Karim :
­ Que racontes­tu ? Vous ne savez pas vous servir des technologies modernes ou 
quoi ? 
Sans perdre une seconde, je passe derrière le bureau et attrape la feuille. Ouf, elle 
n'a rien vu, nous sommes sauvés ! Non, pas encore : madame Bibliaud s’approche de 
Karim. Il a encore la tête dans l’écran et ne la voit pas arriver. Je dois le prévenir et 
hurle pour attirer son attention : 
­ Karim, la directrice vient t’aider avec l’ordinateur ! 
Karim pianote sur le clavier à toute vitesse puis lance un grand sourire à la 
directrice : 
­ Euh... finalement, tout va bien, merci, plus de bug ! 
Ouf, on a eu chaud ! Nous sortons en saluant la directrice avec nos plus beaux 
sourires. 
­ Bien joué les gars ! dit Léa. 
Ouais, mais la directrice va penser qu’on est vraiment bizarres maintenant... 
­ Quatre personnes ont emprunté Le Brigand de Cassis, légende ou réalité ? au cours 
du dernier mois : Norbert, Francis Granfont, Matthieu Beausite et Justine Balois. 
Nous avons même les adresses et les numéros de téléphone. 
­ J’ai feuilleté le livre, dit Léa. Le Brigand, de son vrai nom Félicien Duparc, est un 
célèbre voleur qui a vécu à Marseille au dix­neuvième siècle. Il a pillé les châteaux et 
les grandes maisons de la région. 
Il a été arrêté en 1764 avant d'être enfermé au château dit. Il est mort là­bas et son 
butin... 
­ na jamais été retrouvé, dis­je. 
­ Exactement ! Voilà le trésor qui intéresse Norbert. 
­ Et il n’est pas le seul. 
Notre enquête progresse très vite ! 
Nous retournons chez Fanny pour lui parler de nos découvertes. Lorsque nous 
arrivons chez elle, Fanny est excitée : 
­ Norbert est vivant ! Il a téléphoné ! 
­ Formidable ! Qu’est­ce qu’il a dit ? 
­ Je n’ai rien compris ! J'étais dans le jardin et je n’ai pas entendu le téléphone, alors 
le répondeur s’est déclenché. Venez écouter le message !

 
Chapitre 3
Un hélico d'enfer
Jeudi 4 août,
une heure et demi de l'après­midi.
Fanny nous fait écouter le message de Norbert. Mais l’enregistrement est très 
mauvais : 
­  jourri… ère...tard… asse… 
Léa résume ensuite pour Fanny nos découvertes : 
­ Hier matin, Norbert a rendu un livre à la médiathèque, Le Brigand de Cassis, 
légende ou réalité ?, puis il a rencontré une personne au château d’lf dont le pseudo est 
Indi. Cette personne a peut­être aussi emprunté ce livre à la médiathèque ? 
J’attrape la liste et lis les noms à voix haute : « Francis Granfont, Matthieu Beausite 
et Justine Balois ». 
­ J’adore Google, s’exclame Karim en pianotant sur le clavier de l’ordinateur de 
Norbert. On y trouve tout. Écoutez ça : Matthieu Beausite est guide touristique à 
Cassis. Devinez ce qu’il propose ? Des visites du château d’lf. Justine Balois a créé un 
site : 
« Les ancêtres de la famille Balois ». Elle est aussi fan de la page Facebook du 
«Château d’lf  ». Francis Granfont, lui, est moniteur de plongée à Port­Miou. Oh, 
regardez ! 
Sur la page d'accueil du site de l’école de plongée, un slogan en gros caractères 
rouges propose : « Devenez l’lndiana Jones des fonds marins ! ». 
­ Indiana comme Indi ! dis­je. Voilà trois pistes très intéressantes. On commence par 
laquelle ? 
­ Par le guide, propose Karim. C’est le dernier à avoir emprunté le livre. 
La maison de Matthieu Beausite se trouve sur les hauteurs de Cassis. Le vieux 
portail en fer n’est pas fermé et nous pénétrons facilement dans le jardin. 
Nous sonnons à la porte d’entrée, mais pas de réponse. Toutes les fenêtres du rez­de­
chaussée sont fermées. Nous faisons le tour de la maison et j’en aperçois une ouverte 
au premier étage. Je la montre du doigt à Karim. 
­ Tu veux grimper le long du mur et entrer dans la maison comme un voleur ? 
­ Moi non, mais mon super hélico, oui ! Je sors de mon sac à dos mon hélicoptère 
télécommandé et une tablette tactile. Je fais quelques réglages et, hop, décollage ! La 
caméra fixée sous l’hélico retransmet les images sur la tablette. Ma sœur et Karim 
sont épatés : 
­ Tu es bien un futur ingénieur, bravo ! s’exclame Karim. 
­ Super frérot ! 
J’espère qu’il va fonctionner, j’ai seulement fait deux essais dans ma chambre. Je 
dirige mon hélico vers le premier étage. Je me concentre : l’hélicoptère frôle les bords 
de la fenêtre et entre dans la maison. Je fais le tour de la pièce. Puis me stabilise au­
dessus d’une table. Il y a des papiers, des cartes de la région et, oh surprise !, plusieurs
exemplaires du livre Le Brigand de Cassis, légende ou réalité ? J’en compte six. 
Pourquoi autant ? Je perds le contact une seconde avec l’hélicoptère. Il tombe de dix 
centimètres et va s’écraser ! Out ! Je le rattrape au dernier moment. Je fais un tour 
au­dessus des cartes : il y a des flèches et des croix de différentes couleurs. Je survole 
le reste du bureau et remarque un agenda. Je passe au­dessus de dimanche, lundi, 
mardi. Des rendez­vous sont marqués. Je suis au­dessus de mercredi quand je lis :       
« Mercredi, 11 h, Château, Norbert ».
­ En voilà une preuve ! dit Karim, tu peux prendre une photo ?
­ Ne t’inquiète pas, je filme tout le vol.
 Soudain, le micro de la caméra retransmet des bruits de pas, puis de clés, et 
finalement d’une porte qui s’ouvre ! Je garde l’hélicoptère une minute immobile. 
Soudain, un visage apparaît en gros plan sur l’écran de la tablette ! Deux secondes 
plus tard, le même visage apparaît à la fenêtre. Un homme tient mon hélicoptère dans 
la main droite : 
­ Ne bougez pas ou j’appelle la police ! 
­ On fil ! hurle Karim. 
Mais je ne veux pas laisser mon hélico et l’homme nous rejoint déjà dans le jardin.
 ­ Nous allons tout vous expliquer, le calme Léa. 
Elle lui raconte la disparition de Norbert, notre passage à la médiathèque, le 
message sur le répondeur... 
­ Eh bien, quelle histoire !, dit­il avant de me rendre mon hélico. Il suffisait de me 
téléphoner. Norbert est un ami. Nous parlons souvent des histoires anciennes de la 
région. Je suis l’auteur du livre Le Brigand de Cassis. Je l’ai rencontré hier matin au 
château d’lf pour discuter du trésor du Brigand. Il n’est pas d’accord avec les 
conclusions de mon livre. 
­ Lesquelles ? demande Léa. 
­ Pour moi, on ne retrouvera jamais la carte du trésor. Norbert, lui, pense avoir une 
bonne piste. Nous nous sommes quittés vers midi. C’est tout ce que je peux vous 
apprendre. Mais je connais Norbert, il va bientôt réapparaître. 
Nous allons partir quand une question me vient : 
­ Vous connaissez madame Justine Balois ? 
­ Non, dit­il sans réfléchir. Qui est­ce ? 
­ Une de vos lectrices. 
Il éclate de rire : 
­ Je ne les connais pas toutes, heureusement ! 
­ Au fait, demande Léa, pourquoi empruntez­vous votre livre à la médiathèque ?
Matthieu Beausite rougit : 
­ Chaque samedi, madame Bibliaud met à jour le classement des livres les plus 
demandés. J'emprunte le mien pour 
montrer qu’il est très demandé... 
Une fois dans la rue, je me tourne vers 
Léa et Karim : 
­ Il a menti. 
Je sors ma tablette et montre le début du
film de l’hélicoptère. Je fais un arrêt sur 
image sur un post­it collé sur le bureau 
de Matthieu Beausite. 
­ Qu’est­ce que cela veut dire ? 
­ Je ne sais pas encore. Mais Matthieu 
Beausite connaît Justine Balois et 
recherche toujours la carte du trésor. Ne 
perdons pas de temps. Allons voir cette 
dame. 
Chapitre 4
Le chien Faria
Jeudi 4 août, deux heures et quart.
Justine Balois habite en plein centre de Cassis, dans un immeuble de six étages. Je 
cherche son nom sur l’interphone et appuie sur le bouton d’appel. Quelques secondes 
plus tard, la voix d’une dame âgée nous demande : 
­ Qui est­ce ? 
­ Bonjour madame, nous voulons vous parler de... 
­ Je n'entends pas bien, c’est vous, Matthieu ? 
­ Non. Mais nous sommes des amis de Matthieu. 
­ C’est au troisième. 
Nous prenons l’ascenseur et la vieille dame nous accueille devant sa porte avec un 
grand sourire. Justine Balois a l’air très gentille. À ses pieds, un horrible petit chien 
aboie. 
­ Tais­toi Faria, ce sont des amis. Vous venez de la part de Matthieu ? J’espère qu’il 
n’est pas malade. Entrez donc, les amis de Matthieu sont mes amis. Il est tellement 
gentil. Vous savez qu’il m’a fait tout mon arbre généalogique. Venez, je vous le montre.
Nous accompagnons madame Balois dans son salon. Je m’assois sur un fauteuil, Léa 
et Karim s’installent sur un canapé. Faria saute sur mes genoux et me fixe. J’adore les
gros chiens, mais je trouve les petits moches et sans intérêt. Mais je n'ose pas 
protester. La vieille dame attrape dans le tiroir d’une commode un épais dossier noir. 
Elle en sort des feuilles qu’elle dispose sur la table basse. 
Elle se met a nous raconter l’histoire de sa famille. Son arbre remonte jusqu’en 1603.
La date naissance, celle de décès et la profession de la plupart de ses ancêtres sont 
indiquées. 
­ Il manque beaucoup d’informations, regrette­t­elle. Mais c’est tout de même 
extraordinaire de penser que tous ces gens sont de ma famille. Et moi, je suis là. 
Nous perdons un bon quart d’heure à écouter des anecdotes inutiles avant que la 
vielle dame éveille notre attention : 
­ Matthieu s’intéresse beaucoup a mon ancêtre Jean Balois. Il était gardien à la 
prison du château d'lf. Ma cave est pleine de vieux documents de cette époque. Il passe
des heures à les feuilleter ! 
­ Vous parlez bien de Matthieu Beausite ? 
­ Bien sûr. Son dernier livre est passionnant. Je vais vous dire un secret : le Brigand 
a peut­être dévoilé à mon ancêtre l’emplacement de son trésor. Mais chut, ne le dites à
personne. Matthieu m’a fait jurer de ne pas en parler. Mais comme vous êtes ses 
amis... Il est si gentil. 
Madame Balois se tourne vers moi. 
­ Faria a l’air de bien vous aimer. Il adore jouer. 
Elle chiffonne un vieux papier et fait une boule qu’elle jette dans la pièce. Faria se 
précipite et me la rapporte.  
­ Je n’achète plus de balles en plastique. Il les crève toutes. Allez donc vous amuser 
avec lui un petit peu sur le balcon. Il cache toutes ces petites boules de papier dans sa 
niche. Lancez­lui, il adore ! 
Karim et Léa se moquent de moi. Ils me demandent discrètement si j'aime bien 
«jouer a la baballe avec un petit chienchien ». Je sors sur le balcon. Il fait une dizaine 
de mètres de long et donne sur un petit jardin. Faria aboie. Il m’énerve de plus en 
plus. Je lui lance la boule. Il l'attrape et la porte dans sa niche puis revient se planter 
devant moi en aboyant. Quel chien stupide ! Je me baisse pour examiner sa niche. Elle
est immense pour lui! Faria y pénètre et ressort avec autre boule de papier. Une 
facture de téléphone ! Le chien recommence et m’apporte une dizaine de boules. Il y a 
de tout : des pages de magazines, des cartes postales, des lettres et même un morceau 
de l’arbre généalogique ! Madame Balois ne fait vraiment pas attention à ses papiers. 
­ Bon fini de jouer Faria. On va tout remettre sinon ta maîtresse va ... 
Une boule attire mon attention. Le papier est très ancien. Je déplie la feuille. 
L'écriture est fine et penchée, très vieille aussi. Je n’arrive pas à tout lire, mais les 
mots «Château d’lf», « Félicien Duparc » et « Jean Balois » sont très nets. Il y a aussi ce
qui ressemble a un plan. Je me lève et respire fort : ai­je trouvé la carte du trésor du 
Brigand ? 
­ Hé toi, là­haut ! 
Je me penche vers le jardin. C’est Matthieu Beausite ! 
­ Encore le pilote d'hélicoptère ! Ne bouge pas. J’arrive. Et cette feuille dans ta main, 
qu’est­ce que c'est ? 
Je rentre aussitôt dans l'appartement : 
­ Matthieu Beausite est en bas ! 
­ Tant mieux, dit Justine. Il doit aller mieux alors. 
­ Vite, il faut partir ! 
­ Pourquoi ? Je vais faire du thé pour tout le monde. Nous quittons l’appartement 
sans attendre. Je crie : « Merci pour tout, on reviendra vous voir. » Je suis sincère, on 
expliquera tout à cette gentille dame, mais, pour l’instant, il faut échapper à Beausite. 
Il a pris l’ascenseur et nous descendons les marches de l’escalier quatre à quatre. Une 
fois dans la rue, nous enfourchons nos vélos. Matthieu Beausite apparaît au balcon de 
l’appartement de Justine Balois et nous hurle de rester où nous sommes. Nous 
pédalons à toute vitesse. Il ne pourra pas nous rattraper. 

Quand nous arrivons chez Fanny, nous la trouvons désespérée : elle a encore raté un 
appel de Norbert dans l’après­midi. Son message est aussi incompréhensible que le 
premier. Son téléphone sonne à nouveau. Elle décroche et met le haut­parleur : 
­ Norbert c’est toi ? 
­ Non, ce n’est pas Norbert, madame Pastillet. Si vous voulez revoir votre mari 
vivant, vos petits amis doivent me rendre ce qu’ils m’ont volé ! 
Chapitre 5
Un homme à la mer ?
Vendredi 5 août. Dix heures trente du matin.
Nous avons rendez­vous avec Matthieu Beausite à onze heures du matin au château 
d’lf. L’ancienne prison est sur une île en face de Marseille. Il y a beaucoup de touristes 
à cette époque de l'année. La traversée depuis le Vieux­Port dure vingt­cinq minutes. 
Nous le retrouvons au pied du phare qui se trouve à proximité du château. Matthieu 
Beausite parle d’une voix très sèche. 
­ Vous avez mon document ? 
­ Il appartient à Justine Balois, ose lui répondre Léa. 
­ Mais vous lui avez volé. 
­ Pas du tout ! 
­ Et vous êtes entrés chez moi sans permission. Je peux prévenir la police pour tout 
ça ! 
­ Nous ne faisons rien de mal, nous cherchons simplement Norbert. Où est­il ? 
­ Donnez­moi le document et je vous le dirai. 
Karim tend la feuille sans regret, il a fait une photo du document avec son téléphone 
portable ! Un large sourire illumine le visage du guide. 
­ Et Norbert ? 
­ Il est peut­être avec son copain Edmond Dantès ! dit­il avant de se mettre à courir.
Beausite atteint rapidement le bord de l’eau et monte dans un bateau à moteur. Je 
reconnais le logo de l’école de plongée de Francis Granfont. C'est deux­là sont donc 
complices. Le moteur rugit et le bateau s’éloigne rapidement. 
Pourquoi « Edmond Dantès », le héros du Comte de Monte­Cristo ? réfléchit Léa. Mais
bien sûr ! Suivez­moi ! 
Léa nous entraîne vers l'entrée du château. Nous suivons des flèches jusqu’à la 
cellule d’Edmond Dantès. Un grand panneau sur le mur explique l’histoire de ce 
prisonnier. Mais pas de Norbert dans la cellule. 
­ Il faut le trouver. Séparons­nous. 
Je parcours à toute vitesse les autres cellules. Il y a des escaliers en pierre partout. 
Ça monte, ça descend. Il fait chaud et je transpire. Je regarde par une lucarne qui 
donne sur la mer. Une tache noire sur le bleu de l’eau attire mon regard. Un sac ? 
Je me souviens alors des explications lues dix minutes plus tôt sur le panneau dans 
la cellule de Dantès : il s'est évadé de la prison dans un sac jeté à la mer, à la place du 
corps d’un autre prisonnier décédé, l’abbé Faria ! Beausite et Granfont ont fait pareil 
avec Norbert ! Il est peut­être déjà mort ! 
Je cours vers le rivage et plonge dans la mer. Je nage en direction du sac. Le vent est
fort, je dois me battre contre le courant et les vagues. Très vite, je n'ai presque plus de 
souffle. Plus je nage, plus le sac s'éloigne. J’ouvre grand la bouche pour respirer, mais 
j'avale de l’eau. Le sel me brûle la gorge. Je vais couler. Mes forces me lâchent. Le sac 
est trop loin maintenant. Je fais demi­tour. 
­ Tu es fou !, me dit Léa en m'aidant à sortir de l’eau. Tu pouvais te noyer. 
­ Mais le sac... Dantès. .. Norbert... 
­ C’est juste un vieux sac poubelle en plastique ! 
Je n’arrive pas a me calmer. Je pleure. Léa me prend dans ses bras. 
­ Tu es fou, mais très courageux. Regagnons Marseille, il faut prévenir la police.
Nous nous dirigeons vers l’entrée du château. Et là, assis à une table du petit café, 
qui vois­je ? Norbert, une glace à la main ! Nous le rejoignons et je le serre dans mes 
bras. 
­ Attention, tu es tout trempé ! 
Léa et Karim font de même. 
­ Mais que vous arrive­t­il ? 
­ On te croyait mort. Nous sommes si heureux ! Ils t’ont libéré ? 
­ De quoi parlez­vous ? 
Je lui raconte toute l’histoire. 
­ Je ne comprends pas, dit Norbert. J’ai laissé plusieurs messages à Fanny. 
­ Ils étaient incompréhensibles, dis­je. 
­ Il faut vite que je rentre à la maison pour la rassurer. 
Lorsque Fanny voit Norbert, elle se met à pleurer. Norbert l'enlace durant de 
longues minutes. 
Puis elle s'écarte et lui demande : 
­ Mon pauvre chéri, ils ne t'ont pas fait de mal ? 
­ Qui ? 
­ Ce Beausite et ce Granfont, tes ravisseurs ? 
Norbert sourit et lui explique : 
­ C’est une drôle d'histoire. J’ai bien rencontré Beausite au château d'lf mercredi 
matin. Nous avons parlé du Brigand. Mais il était avec un de ces amis, Granfont, que 
j’ai connu sur le forum. Ce type ne me plaît pas. Sur le Net, il est très aimable. Mais 
en réalité, il est prêt à tout pour trouver le trésor du Brigand. Nous nous sommes très 
vite quittés. Je suis alors parti en voiture au monastère de la Verne, à Collobrières. 
C’est à quatre­vingts kilomètres d’ici. Je pensais y trouver des informations sur le 
Brigand. Ils ont de magnifiques documents dans leur bibliothèque et mes recherches 
ont duré plus longtemps que prévu. J’ai donc dormi dans un petit hôtel là­bas. 
­ Tu as dormi dans un petit hôtel deux nuits de suite pendant que j'avais peur ? 
­ Je suis vraiment désolé ma chérie. Hier soir, Beausite m'a téléphoné. il savait donc 
que j’étais absent de Cassis. Je suis passé au Château d’lf ce matin pour vérifier une 
dernière chose avant de rentrer à la maison. Mon enlèvement est une invention de 
leur part pour vous faire peur. 
­ Et récupérer le précieux document de Jean Balois ! 
Fanny rouspète alors gentiment contre son mari : 
­ J'ai eu très peur. Deux nuits sans me prévenir... 
­ Je t’ai laissé plusieurs messages téléphoniques. 
Nous faisons écouter à Norbert ses messages. 
­  Incompréhensibles en effet ! Sans doute quelque chose comme « Bonjour ma chérie,
je suis au monastère de Collobrières, je t’appelle plus tard, je t’embrasse ». 
­ Et pourquoi tu ne réponds pas quand je t'appelle ? 
­ Je n’ai reçu aucun appel, se défend Norbert. Tu te souviens que j’ai un nouveau 
numéro depuis la semaine dernière, n’est­ce pas ? 
Fanny rougit, puis baisse les yeux : 
­ Oh mon dieu, j'ai toujours fait ton ancien numéro. 
­ Allez, oublions tout ça, propose Norbert. Le plus important est d’être de nouveau 
réunis. Mais nous n’en avons pas fini avec le Brigand. Il faut trouver son trésor avant 
Beausite et Granfont ! 
Chapitre 6
La carte mystérieuse

Vendredi 5 août. Treize heures.
Norbert étale sur la table tous ses documents sur le Brigand et son trésor. Il y a de 
nombreuses photocopies de livres anciens et des cartes. J’y ajoute la copie du 
document de Jean Balois. Norbert le lit à voix haute. Léa lui coupe la parole : 
­ Je crois que ce document est un faux. 
­ Pourquoi dit­elle cela ? Trouver un document vieux de plusieurs siècles dans une 
niche pour chien n’est pas habituel bien sûr. Mais la réaction de Matthieu Beausite 
quand je lui ai donné prouve qu’il est vrai. 
­ Oui, je sais, dit Léa, il est authentique mais c’est une fausse piste ! 
Vrai ou faux ? C'est quoi ce charabia ? 
­ Le Brigand avait­il une femme et des enfants ? demande­telle à Norbert. 
­ Un fils, Anselme, âgé de trois ans au moment de son arrestation. Sa femme, elle, 
est morte un an avant. 
­ Imaginons : je suis le Brigand. Je risque de me faire arrêter à chaque instant et de 
finir ma vie enfermé au château d'If. Je cache mon trésor dans un endroit introuvable. 
À qui je laisse le secret de la cachette ? À un gardien ? Bien sûr que non! À mon fils.
­ Son fils avait trois ans, dis­je. Impossible de lui expliquer. 
­ Très bien vu, frérot. Donc je lui laisse un message. Il le comprendra quand il sera 
grand. Ensuite, une fois en prison, je raconte n’importe quoi aux gardiens pour créer 
une fausse piste. Nous devons nous intéresser à Anselme et non pas au Brigand ou à 
Jean Balois. CQFD (ce qu'il faut démontrer)! 
Un silence, puis Norbert saute de joie : 
­ Bravo ! C'est une excellente démonstration ! 
Puis Norbert cherche dans ses notes et annonce : 
­ Les moines du monastère de Saint­Victor à Marseille ont élevé Anselme, après 
l’arrestation de son père. Il en est devenu le supérieur en 1801. Il a fait de très grands 
travaux dans le monastère. La nuit, Anselme priait seul, dans une grotte transformée 
en chapelle. Il est mort en 1871 sans révéler l’emplacement de la grotte. 
­ Donc, intervient Karim, si Anselme a découvert le trésor de son père et l’a caché 
dans cette grotte... 
­ ... le trésor y est peut­être encore caché, dis­je. Super ! 
Mais comment trouver la grotte ? Nous passons une heure et demie à reprendre les 
documents de Norbert. Vers quatorze heures trente, Fanny nous propose de déjeuner. 
C’est une bonne idée, je meurs de faim. Elle a préparé une grande salade niçoise. 
Nous nous remettons ensuite au travail. Deux heures plus tard, Fanny entre dans la 
pièce, un livre a la main. 
­ À qui est ce beau livre ? 
­ Je l’ai acheté hier au monastère de la Verne. Ce sont des reproductions des 
tableaux des églises de la région. Une merveille ! 
­ Il est magnifique en effet. J’adore le tableau de ce jeune Anselme devant ... 
­ Anselme ? Montre ! crions­nous en même temps. 
Le moine est représenté devant une fenêtre donnant sur la mer. Il est en train 
d’écrire sur un grand livre installé sur un écritoire devant lui. Karim prend une photo 
avec son téléphone et la transfert sur l'ordinateur de Norbert. Puis il zoome sur la 
page ouverte devant Anselme. Une carte apparaît alors clairement. 
­ Extraordinaire, dit Norbert, la voix pleine d’émotion. Anselme a dû laisser ces 
indications pour les moines du monastère. 
­ Vous croyez alors qu'ils ont trouvé le trésor après sa mort ? demande Karim. 
­ Une seule façon de le savoir : déchiffrer cette carte et aller vérifier par nous­
mêmes ! 
Karim imprime la carte en quatre exemplaires. Chacun prend le sien et le silence 
s’installe autour de la table. Tout le monde réfléchit et cherche une explication. Léa se 
lève, fouille dans les papiers de Norbert, attrape une carte de la région, lit un 
document, puis un autre. 
­ J’ai une piste, annonce­telle. Le Brigand a dit avant de mourir : « Je vous attends 
en enfer ». Le P écrit par Anselme est pour « Pater », « père » en latin. Regardez la 
carte : à l’ouest de Cassis, la côte a la même forme que le trait au­dessus du P. Cet 
endroit s’appelle « L'anse des enfers ». 
Nous vérifions sur une carte de la région. Léa a raison. Je suis fier de ma sœur. 
­ Les deux traits en haut ont la forme des falaises qu’on voit ici et ici sur la carte. Les
pointillés signifient peut­être qu'à la rencontre des deux falaises se trouve... 
­ L'entrée de la grotte, dit Norbert, admiratif. Tu es géniale, Léa ! Et les deux dessins
en forme de roue, ça veut dire quoi ? 
­ Apocalypsis, Numeri, Genesis, Exodus... C’est du chinois pour moi, dis­je. 
­ Du latin plutôt, me répond Karim en riant. Mais pourquoi les mots sont­ils écrits à 
l’envers dans l'eau ? 
­ J’ai une petite idée, répond Léa, mais je voudrais vérifier sur Internet d’abord ...
Nous partons tous les quatre le lendemain matin pour explorer la garrigue. Nous 
avons juré à Fanny de lui donner des nouvelles toutes les deux heures par téléphone et
de ne pas revenir trop tard. Les indications du tableau ne sont pas précises et la zone 
n’est pas facile d’accès. Mon super hélico survole le coin et prend des photos. Karim les
étudie sur son ordinateur portable. 
La première journée ne nous permet pas de trouver l’entrée de la grotte. Nous 
rentrons bredouilles la deuxième journée. Nous n’avons toujours rien le troisième jour.
Nous commençons à douter de l’idée géniale de Léa. La gravure d’Anselme est peut­
être elle aussi une fausse piste. 
Les recherches sont fatigantes et nous rentrons le soir épuisés chez nous. Nous ne 
racontons pas notre chasse au trésor à nos parents : ils sont capables de nous interdire
de suivre les idées un peu folles de Norbert ! Fanny doit s’occuper toute seule de ses 
petits­enfants mais elle est contente : son mari n’est pas seul et revient tous les soirs !
Et puis, le quatrième jour, vers seize heures, Norbert crie : 
­ Là ! 
Nous soulevons de nombreuses pierres et branchages. Après une heure d’effort, nous 
découvrons enfin l’entrée d'un passage souterrain. 
­ En avant pour l’aventure, s’enthousiasme Norbert. 
­ Ce n’est pas prudent, dit Léa. Il est tard et nous n'avons pas de lampes de poche. Et
puis nous avons promis à Fanny de rentrer tôt. Cachons l’entrée avec des branchages 
et revenons demain avec du matériel. 
­ Tu es raisonnable. C’est bien. Mais je vais mal dormir cette nuit ! 
Chapitre 7
Le trésor
Mercredi 10 août. Huit heures du matin.
Il pleut ce matin. La météo annonce de gros orages dans l’après­midi. Fanny essaie 
de nous retenir, mais nous sommes impatients et décidons d’aller inspecter la grotte. 
Elle nous prépare un pique­nique. Nous lui promettons de revenir avant la nuit. Nous 
vérifions le matériel et quittons la maison avec de lourds sacs à dos. 
Une heure plus tard, nous sommes devant l’entrée de la grotte. Une dernière 
vérification de notre matériel et c’est parti pour l'aventure ! Le passage est étroit et 
nous y passons avec difficulté. Plus loin, nous pouvons nous mettre debout. Nous 
franchissons facilement les cinquante mètres suivants et arrivons dans une grande 
salle. Nos torches électriques éclairent de magnifiques peintures sur les murs. Elles 
représentent des scènes de la Bible. Il n’y a pas de doute : nous sommes dans la 
chapelle d’Anselme. Nous restons de longues minutes silencieux devant ce spectacle. 
La lampe de poche de Karim éclaire une grande roue en bois accrochée au mur qui 
ressemble à un soleil avec huit rayons. Nous pensons tout de suite à la carte 
d'Anselme. Nous essayons de la tourner, mais elle est trop lourde. 
­ Ne la cassez pas, dit Norbert. Sinon, tout est perdu. 
­ Réfléchissons une minute, dit Léa. J’ai trouvé sur Internet à quoi correspondent les 
mots : « Exode », « Apocalypse », « Nombre » et « Genèse » sont quatre des livres de la 
Bible. 
­ Il faut bouger les barres suivant un ordre précis, imagine Norbert. Je propose 
l’ordre alphabétique. 
­ Trop simple, déclare Karim. 
­ L'ordre de la Bible alors, dis­je. 
Les autres approuvent. Je sors la copie de la gravure et je montre à Norbert la barre 
correspondant a Genèse. Il la saisit. 
­ Stop ! crie Léa. Je viens de comprendre ! 
Elle m’arrache la feuille des mains. 
­ Regardez les deux roues sur la carte. Une dans le ciel, comme un soleil, et l’autre 
dans la mer, comme son reflet sur l'eau. Les noms sont inscrits sur le reflet, comme 
dans un miroir, donc à l'envers. C’est sûrement un indice pour commencer par le 
dernier livre. 
­ Quelle analyse ! Bravo, Léa. Tu as découvert le secret d’Anselme ! dis­je avec 
admiration pour ma sœur. 
­ Pour les compliments, attendons de voir si j’ai raison, me répond Léa, prudente. 
Je montre alors à Norbert la barre qui correspond à « Apocalypse ». Il la pousse. Il 
fait la même chose avec « Nombres » et « Exode ». Il prend ensuite une grande 
respiration et pousse la barre « Genèse ». Nous entendons un déclic, puis un deuxième,
puis un troisième. La plaque tourne lentement sur elle­même. Un passage assez large 
pour un homme apparaît dans la roche. Nous nous y faufilons. La deuxième salle est 
plus petite. Quatre coffres en bois fermés par de grosses serrures nous attendent là 
depuis plus de deux cents ans. Norbert essaie de les ouvrir, mais les serrures résistent.
­ Cassons­les avec un marteau, propose Karim. 
­ Nous ne sommes pas des voleurs, dit Norbert, en colère. Les coffres aussi sont des 
trésors ! Il faut trouver les clés. 
Nous poussons avec difficulté les coffres jusque dans la chapelle : ils sont très 
lourds ! Où trouver leurs clés ? Je regarde la gravure encore une fois. Nous avons 
compris et utilisé tous les détails, sauf un : l'œil en dessous du « P». Pourquoi un seul 
œil ? 
­ Le Brigand était borgne, fait remarquer Norbert. 
­ Comme l'ange dessiné sur ce mur ? demande Karim. 
Nous observons la peinture de plus près. Elle est presque effacée, mais on distingue 
encore un visage. Norbert introduit deux doigts dans le trou à la place de l’œil. Il en 
retire un petit caillou et trouve une clé tout au fond. Hourra ! Cette clé permet d’ouvrir
les quatre coffres. Ils contiennent des pièces d’or et des bijoux. Norbert pleure de joie :
­ C’est le plus beau jour de ma vie ! 
­ Qu'allons­nous faire de tout ça ? demande Léa. 
Une voix derrière nous répond : 
­ J’ai ma petite idée. 
Nous nous retournons et découvrons Matthieu Beausite et Francis Granfont. Ce 
dernier pointe un pistolet vers nous. 
­ Bravo, vous êtes très forts ! J’ai eu une bonne idée de vous suivre. Allez au travail, 
je veux avoir fini avant l’orage ! 
Nous protestons. Granfont nous menace de son arme. Norbert essaie de convaincre 
Matthieu Beausite : il est un auteur et un guide connu dans la région, pas un pilleur 
de trésor. Mais Granfont s’impatiente. Il s'approche de Norbert et lui donne un coup de
poing dans le ventre. Karim se précipite pour défendre notre ami mais Granfont lui 
donne un violent coup au visage. 
­ Ça suffit maintenant. On se dépêche. Je ne veux plus entendre vos beaux discours. 
Ce trésor est à nous. Au travail ! 
Francis Granfont nous tend des sacs en toile. Nous faisons vingt allers­retours pour 
transporter le trésor à l'extérieur de la grotte. Quand tout est fini, Granfont nous 
menace de son arme : 
­ Allez hop, dans la chapelle. 
Norbert refuse. Granfont le frappe de nouveau violemment et le vieil homme tombe 
par terre. Nous l’aidons à se relever et obéissons aux ordres. Dix minutes plus tard, 
une forte détonation retentit, suivie d’un bruit d’éboulement de pierres. Nous nous 
précipitons vers l’entrée de la grotte. Elle n’existe plus. Nous sommes prisonniers sous 
terre ! 
 
Chapitre 8
Sauvés ?
Mercredi 10 août. Seize heures.
Nous sommes prisonniers dans une grotte que personne ne connaît. Nous n’avons 
même pas laissé d'indications à Fanny. Quels idiots ! Nous essayons de téléphoner : 
bien sûr pas de réseau ! 
­ Nous allons tous mourir, hurle Léa. 
Norbert essaie de la calmer. Karim, lui, cherche une solution : 
­ Il y a forcément un passage quelque part. 
Je retourne encore une fois dans la salle des coffres. J’y découvre au fond un passage 
au ras du sol. Il fait à peine un mètre de large et quatre­vingts centimètres de haut. 
C’est notre dernière chance. Karim s’y engage le premier et franchit la difficulté. 
­ Après une dizaine de mètres, on arrive dans une grande salle, c’est bon. Au suivant,
nous dit­il. 
Au tour de Norbert. Il avance lentement et réussit à passer. À moi. Je rampe comme 
un serpent sur la pierre froide et humide. Karim me tend la main pour le dernier 
mètre. 
­ À toi Léa. 
­ Je ne vais pas y arriver. Je préfère rester coincée ici ! 
Karim retourne la chercher. Je connais Léa : elle ne change pas facilement d’avis. 
Pourtant, cinq minutes plus tard, je vois Léa sortir du passage, suivie de Karim. Que 
lui a­t­il dit pour la convaincre ? 
Soudain, je sens de l’eau sur mes pieds. L’orage a éclaté et la grotte se remplit d’eau. 
Il faut faire vite. Nous traversons plusieurs salles, Karim marche en tête. Tout à un 
coup, Karim glisse et disparaît dans le sol. Nous l’entendons crier: « Ahhhhhhh », puis 
le bruit de plongeon dans l’eau, puis plus rien, puis : « Ça fait trop peur, mais c'est 
top ! ». 
Il se croit à la piscine ? 
­ Laissez­vous glisser comme sur un toboggan. Vous allez tomber dans un lac. C’est 
top ! 
Ma sœur n’a plus peur et se lance sans hésiter. Je ferme les yeux et la suis. Je glisse 
le long d’un tunnel pendant quelques instants avant de tomber dans le vide, puis de 
terminer dans l'eau. 
­ Cool, non ? 
Horrible, plutôt ! Norbert crie : « Ce n'est plus de mon âge ! » avant de se lancer et de 
nous rejoindre. 
L’eau du lac est salée : la mer n'est pas loin ! Karim plonge, revient plusieurs fois à la
surface, prend sa respiration et disparaît de nouveau. Il arrête après vingt minutes 
d’effort. 
­ Il y a un passage. J’ai besoin d’aide. 
Nous plongeons à tour de rôle pour déplacer des pierres et agrandir le passage. Cela 
dure une éternité. Nous ne savons pas où il mène et si nous pourrons tenir assez 
longtemps sans respirer, mais c'est notre seul espoir. Quand le passage semble 
suffisamment grand, nous prenons une grande inspiration et disparaissons sous l'eau. 
La suite se passe comme dans un rêve. Nous formons une longue chaîne et nageons, 
nageons, nageons. 

Je vis tout ça au ralenti. Je veux plusieurs fois abandonner car je n’ai plus de force, 
mais je continue. Soudain, un fort courant m’entraîne. Je ne peux pas lutter et me 
laisse porter. Combien de temps puis­je encore tenir sans respirer ? Je tourne sur moi­
même plusieurs fois, ma tête va exploser, il faut que je respire. Je ne peux plus 
résister et ouvre la bouche juste au moment où le courant me propulse à l'air libre. Je 
me retrouve au milieu de la mer. J'aperçois Léa et Karim. Ils sont aussi sains et 
saufs ? 
­ Norbert ? Où est Norbert ? crions­nous ensemble. 
­ Ici, derrière vous, dit­il d’une voix épuisée. 
Nous nageons jusqu'à la plage avec nos dernières forces. Nous reprenons notre 
souffle allongés dans le sable ; nous sommes sauvés ! 
Nous retrouvons Fanny vers vingt heures, comme promis avant la tombée de la nuit !
Norbert prévient la police et Fanny appelle nos parents pour qu’ils nous apportent des 
vêtements secs. Ils vont certainement nous demander de sérieuses explications. 
Fanny prépare une délicieuse bouillabaisse et nous dînons tous ensemble. Norbert, 
Léa, Karim et moi n’arrêtons pas de parler. Nous racontons chaque détail de notre 
enquête et de la découverte du trésor du Brigand de Cassis. Je crois que je trouve tout 
extraordinaire ce soir. 
Nous en sommes au dessert quand la police rappelle Norbert. Elle a arrêté Francis 
Granfont et Matthieu Beausite au club de plongée. Le trésor est intact. Nous 
accueillons la nouvelle avec des cris de joie et des applaudissements. 
Norbert repose le téléphone, mais il sonne à nouveau. C’est le maire de Cassis. Il 
prend des nouvelles de notre santé et nous félicite de notre découverte. Il veut nous 
voir demain à la mairie. 
­ Vous êtes entrés dans l’histoire de Cassis, M. Pastillet. Ce trésor va devenir la plus 
belle pièce de notre patrimoine régional et peut­être même entrer au MuCEM (Musée 
des Civilisation de l'Europe et de la Méditerranée à Marseille) ! lui dit­il avant de 
raccrocher.
Je crois que nous allons devenir célèbres. Il faudra prévenir madame Balois même si 
elle sera déçue de son « gentil Matthieu ». 
Nous quittons Norbert et Fanny vers minuit. Je suis tellement fatigué que, lorsque 
nous arrivons à la maison, j’oublie de demander à Léa ce que Karim lui a dit pour la 
faire changer d’avis dans la grotte. Mais, j’ai ma petite idée ... 

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