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Tomographie à rayons X

Cédric Peignat

Sous la direction de M. Roman Novikov, chercheur au CMAP


Introduction

Comment fonctionne un IRM ? Comment, en bombardant le cerveau de rayons X,


peut-on reconstruire dèlement sa structure et repérer, par exemple, des tumeurs ?
C'est la théorie de la tomographie à rayons X, élaborée par Radon en 1917, qui
fournit la réponse à ces questions.
De façon simpliée, cette théorie étudie comment reconstruire un prol densitaire
(par exemple celui du cerveau) à l'aide de données intégrales sur ce prol. Dans le
cas qui nous intéresse, les données intégrales en question sont les intégrales de la
fonction de densité dans toutes les directions du plan ou de l'espace.

A supposer que le cerveau soit un milieu qui ne diuse pas les photons à haute
fréquence des rayons X, ou du moins qu'il ne les diuse que de façon négligeable, on
peut supposer qu'un rayon X traverse le cerveau de manière rectiligne. Aussi, il est
possible de mesurer la perte d'intensité d'un rayon selon une direction de l'espace,
ce qui donne indirectement, via une équation diérentielle d'absorption d'ordre 1,
l'intégrale du prol densitaire du cerveau dans cette direction. Ceci justie donc
le procédé IRM, qui consiste à bombarder le cerveau de rayons X dans un grand
nombre de directions et à mesurer leur intensité en sortie. En eet, le théorème de
Radon, énoncé en 1917, établit que la donnée des intégrales d'un prol dans toutes
les directions orientées du plan ou de l'espace permet de reconstituer dèlement ce
prol. Ceci permet par la suite de repérer d'éventuelles zones plus denses dans le
cerveau, notamment les tumeurs, qui évoluent dans un espace restreint et constituent
donc un pic densitaire dans le cerveau. Le procédé s'étend naturellement à d'autres
zones du corps humain, et est de ce fait utilisé pour repérer tous types de cancers.

Ainsi, nous nous intéresserons dans cet exposé au théorème de Radon (qui est
une conséquence du théorème d'inversion de Fourier) et à certains résultats annexes,
qui partent d'hypothèses plus faibles que la connaissance de toutes les intégrales lon-
gilignes, ce qui est une condition à l'évidence irréalisable en pratique. Cette étude
nous précisera quelles données sont en pratiques nécessaires et/ou susantes à l'éta-
blissement d'un prol densitaire dèle sinon exact.
Nous étudierons aussi de manière plus générale la transformée de Radon (la donnée
de toutes les intégrales selon des espaces de dimension nies, typiquement des droites
ou des plans dans le cas de l'espace à trois dimensions) et la formule d'inversion de
Radon, ainsi que certaines autres méthodes de radiographie utilisées en pratique et
qui reposent sur des résultats similaires au théorème de Radon.

2
Table des matières

Préliminaires 4

1. Inversion de la transformée de Radon 5


1.1 Inversion de la transformée de Fourier . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.2 Cas de la dimension 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.3 Cas de la dimension 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
2. Inversions de données partielles 8
2.1. Quantité de directions connues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2.2. Détermination locale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2.3. Trou dans la gure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
3. Espaces atteints par la transformée de Radon en dimension 2 13
3.1. Image de S(R ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2

3.2. Cas particulier des fonctions radiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13


Suppléments, bibliographie 15

3
Préliminaires

Fonction schwartzienne : On dit d'une fonction f : Rd → R qu'elle est schwart-


zienne (ce que l'on notera f ∈ S(Rd )) si elle est inniment dérivable et si elle est à
décroissance rapide, i.e.

∀P ∈ R[x1 , .., xd ], ∀α ∈ N, lim |P (x)| k∂ α f(x)k = 0


kx=(x1 ,..,xd )k→∞

On remarquera en particulier que les fonctions schwartziennes sont bornées, inté-


grables et de carré intégrable. Et également qu'une fonction inniment dérivable à
support compact, ce que l'on notera par la suite f ∈ Cc (Rd ), est de la classe de
Schwartz.

Transformée de Fourier vectorielle : On appelle transformée de Fourier d'une


fonction f : Rd → R au point ξ ∈ Rd la quantité
Z
1
fˆ(ξ) := eiξ.x f (x) dx
(2π)d/2
Rd

Espace des rayons orientés : L'espace des rayons orientés de Rd est en bijection
avec le bré tangent de la sphère unité

T Sd−1 := {(x, θ) ∈ Rd × Sd−1 | x.θ = 0}

selon la bijection qui à (x, θ) associe {x + sθ, s ∈ R}. Aussi la notation T Sd−1 se
référera-t-elle implicitement à l'espace des droites orientées par la suite, et les droites
considérées seront notées (x, θ) sans plus de précisions.

Coordonnées sphériques dans Rd : On rappelle la formule de changement de


coordonnées cartésiennes vers polaires dans Rd pour une fonction ϕ
Z Z Z
ϕ(x)dx = ϕ(rθ)rdrdθ
Rd R Sd−1

4
Inversion de la transformée de Radon

On considère f ∈ S(Rd ). On appelle transformation de Radon longiligne de f, la


fonction Pf dénie par la formule
P f : T Sd−1 −→ RR
(x, θ) 7−→ f (x + sθ) ds
R

la donnée des intégrales le long des droites orientées (x, θ) de l'espace Rd .

De manière plus générale, on pourra vouloir, dans un espace de dimension d,


intégrer le long d'espaces de dimension inférieure quelconque p>1. On utilisera le
cas échéant la notation Rd,p f . Le seul cas qui nous intéressera en pratique sera celui
des Rd,d−1 f , notamment celui de R3,2 f .

Dans le cas des intégrales longilignes on va plus particulièrement s'intéresser aux


transformées directionnelles
Pθ f (ξ) := P f (ξ, θ), θ ∈ Sd−1 , ξ ∈ θ⊥

Inversion de la transformée de Fourier


On considère toujours f ∈ S(Rd ). En particulier on sait que f ∈ L1 ∩ L2 d'après
la remarque formulée en préliminaire. En eet, l'hypothèse f schwartzienne impose f
continue donc bornée sur tout compact, et également |f (x)| ∈ Okxk→∞ (kxk2 ) Aussi,
la transformée de Fourier de f est inversible selon
Z
1
λ p.p. ξ, f (ξ) = e−iξ.x fˆ(x) dx
(2π)d/2
Rd

Lien avec la transformée de Radon : Soit θ ∈ Sd−1, on note


Z
1
P
g θ f (ξ) := eiξ.x Pθ f (x) dx, ξ ∈ θ⊥
(2π)(d−1)/2
x∈θ⊥

Proposition 1 : ∀θ ∈ Sd−1 , ∀ξ ∈ θ⊥ , P
g θ f (ξ) = 2π fˆ(ξ)

Démonstration :
Z Z Z Z Z Z
iξ.x iξx ξ∈θ⊥ iξ(x+sθ)
e Pθ f (x) dx = e f (x+sθ)dsdx = e f (x+sθ)dsdx = eiξ.y f (y) dy
θ⊥ θ⊥ R θ⊥ R Rd

Cette proposition fournit un élément de réponse quant à la question de l'inversion


de la transformée de Radon : connaître les transformées directionnelles, c'est par
extension connaître les Pg
θ f donc f , puis la fonction f. Il reste à le quantier.
ˆ

5
Cas de la dimension 2
Pour θ ∈ S1 , t ∈ R, s ∈ R, on note

qθ (t) := P f (sθ⊥ , θ)
Z
1 qθ (t)
qeθ (s) := p.v. dt
π s−t
R

Théorème 1 : (Radon, 1917) Pour f ∈ S(R2 ), la transformation de Radon s'inverse


selon Z
1
f (x) = θ⊥ ∇x qeθ (xθ⊥ )dθ

S1
Démonstration : On part de la formule d'inversion de la transformée de Fourier
que l'on écrit en coordonnées polaires, quitte à faire le changement r ← −r, θ ← −θ
Z Z
1 ⊥
f (x) = e−irθ x fˆ(rθ⊥ )(sg r)rdrdθ

S1 R

La propostion 1 nous permet d'écrire


√ 1
Z
2π fˆ(rθ⊥ ) = √ eirs qθ (s)ds

R

Qui se réinjecte dans la première formule selon :


Z Z Z
1 ⊥ x)
f (x) = 2 eir(s−θ qθ (s)ds(sg r)rdrdθ

S1 R R
Z Z Z
1 ⊥ ⊥ x)
= 2 θ ∇x eir(s−θ qθ (s)ds(−i sg r)drdθ

S1 R R

Que l'on intègre par rapport à r en premier lieu, ce qui fournit bien la formule
attendue  
Z Z
1 ⊥ 1 qθ (s)
f (x) = θ ∇x p.v. ds dθ
4π π xθ⊥ − s
S1 R

Ce théorème est l'un des plus importants en théorie de la tomographie puisqu'il


énonce que la transformée de Radon est eectivement inversible dans une dimension
usuelle. Au vu de la formule, l'inversion se fait à l'évidence informatiquement. Nous
allons voir que cette formule est utile vis-à-vis des autres questions théoriques que
nous soulèverons. En revanche, on sent dès ce point que, la donnée de la transformée
complète de Radon étant impossible à obtenir en pratique, il faudra reconstruire la
fonction de manière approchée à l'aide de procédés numériques dont par ailleurs
nous ne ferons pas mention faute de les avoir étudiés.

6
Cas de la dimension 3
On considère dans toute cette section que f ∈ S(R3 ).

Intégrales longilignes
Le cas où la donnée spectrale est l'ensemble des intégrales longilignes est assez
facile à traiter. En eet, le théorème 1 en dimension 2 permet de conclure immédia-
tement : en voyant un objet trois dimensions comme une superpositions de plans,
on reconstruit plan par plan le prol jusqu'à obtenir la reconstitution en trois di-
mensions.

Intégrales planaires
Le cas où la donnée spectrale est celle des intégrales planaires est déjà plus
compliqué à traiter, quoique très similaire au cas de la dimension 2.

On note cette fois R la donnée spectrale, qui sera un ensemble d'intégrales de


niveaux s dans la direction θ ∈ S2 , par dénition :
Z
2
∀s ∈ R, ∀θ ∈ S , Rf (s, θ) := f (x)dx
x.θ=s

Proposition 2 :
Z Z
2 ius
∀u ∈ R, ∀θ ∈ S , e Rf (s, θ)ds = eiuθ.x f (x)dx
R R3

Proposition qui peut d'ailleurs s'étendre au cas de Rd en prenant θ dans Sd−1 et qui
se démontre comme la proposition 1.

Théorème 2 : (Radon, 1917)


∂2
Z
3 1
∀x ∈ R , f (x) = − 2 Rf (xθ, θ)dθ
8π ∂x2
S2

Ce résultat est en fait un cas particulier du théorème de Radon d'inversion de Rd,d−1 f


pour d quelconque, dont la démonstration est compliquée. On notera pour la curio-
sité que le type de formule d'inversion dépend de la parité de d : à d pair, comme dans
le théorème 1, on verra intervenir une double intégration sur la donnée spectrale,
alors qu'à d impair, comme dans le théorème 2, une seule intégration interviendra.
De plus l'ordre de dérivation en x demeure toujours à d-1.
Cependant, on ne s'intéressera pas dans cet exposé à la formulation exacte de
ces formules d'inversion : les seuls cas utiles en pratique et donc étudiés pendant le
stage sont ceux des dimensions 2 et 3.
En conclusion de cette première partie, les données spectrales complètes susent
à reconstruire le prol f. Ceci étant, elles sont impossibles à collecter, ne serait-ce
que parce que l'IRM n'envoie qu'un nombre ni de rayons. Quelles données sont
donc nécessaires, susantes, ou les deux, à la reconstruction du prol f ?

7
Inversions de données partielles

Quantité de directions connues


On va travailler en dimension 2 pour commencer et étendre les résultats à la
dimension 3 par la suite. Cette partie commence par un théorème très utile, mais
également d'une démonstration dicile non étudiée ici.

Théorème 3 : (Cormack, 1963) Soit f ∈ S(R2 ). Considérons les développements


en séries de Fourier
l=+∞
X
f (rθ) := fl (r)eilϕ(θ) , r ∈ R∗+ , ϕ ∈ [0, 2π[
l=−∞

l=+∞
X
Pθ f (s) = P f (sθ⊥ , θ) := ql (s)eil(ϕ(θ)+π/2) , s ∈ R∗+
l=−∞

(pour les s négatifs on considérera la direction −θ)


Alors les coecients de Fourier associées fl (r) et ql (s) sont reliés selon :
Z+∞ −1/2
s2

ql (s) = 2 T|l| (s/r) 1 − 2 fl (r)dr
r
s

Z+∞
1
fl (r) = − (s2 − r2 ) T|l| (s/r) ql0 (s)ds
π
r
où Tn , n ∈ N est le polynôme de Tchebyshev d'ordre n. Ce résultat est assez puissant
puisqu'il relie les coecients de Fourier de f et de sa transformée un à un. Il implique
par ailleurs un analogue du théorème 1, puisqu'il permet d'inverser d'une autre façon
la transformée de Radon.

Proposition 3 : ∀θ ∈ S1 , ∃(f, g) ∈ S(R2 )2 tq Pθ f = Pθ g et f 6= g.


En d'autres termes, la donnée des intégrales dans une direction, par exemple de
toutes les intégrales horizontales, ne sut pas à déterminer la fonction à recons-
truire. Ce résultat assez simple s'étend facilement aux dimensions supérieures à 2
vu les arguments de la démonstration.

Démonstration : Soit θ ∈ S1 , considérons f := χD(0,1) ∈ Cc (R2 ) ⊆ S(R2 ) et,


notant τ2θ la translation de vecteur 2θ, considérons g := τ2θ f .

Il est alors assez clair que Pθ f = Pθ g puisque


Z Z

f (sθ + (t − 2)θ)dt = f (sθ⊥ + tθ)dt
R R

alors que f (0) = 1 6= 0 = g(0) donc f 6= g .

8
Proposition 4 : ∀n ∈ N, ∃(θ1 , .., θn ) ∈ (S1 )n , ∀f ∈ S(R2 ), ∃g ∈ S(R2 ) tq ∀i ∈
[|1, .., n|], Pθi f = Pθi g et f 6= g .
En d'autres termes, même un nombre ni quelconque de directions d'intégration
ne saurait déterminer uniquement la fonction à reconstruire. On remarquera que
la démonstration de ce théorème ne peut pas s'étendre aux dimensions supérieures
puisqu'elle s'appuie sur le théorème de Cormack.

Démonstration : Soit donc n ∈ N quelconque.


On remarquera que la linéarité du problème nous ramène à prendre f ≡ 0 et à
trouver θ1 , .., θn , g tels que g 6= 0 et Pθi g ≡ 0 ∀i ∈ [|1, .., n|].
On va utiliser le théorème 3 (qu'on appellera aussi théorème de Cormack dans la
suite) et chercher f sous la forme
f (rθ) = ρ(r)eip(ϕ−π/2) +ρ(r)e−ip(ϕ−π/2 ), p ∈ N inconnu et ρ ∈ Cc (R) de sorte que f ∈ S(R2 )

Alors le théorème de Cormack énonce que


Pθ f (s) = ψ(s)(eipϕ + e−ipϕ ) = 2ψ(s) cos(pϕ(θ)), ψ ∈ Cc (R)

Aussi, choisissant
p = 2n, φ1 := π/(2n), φ2 := π/(2n) + π/(2n), ..., φn := π

on dénit bien n directions distinctes dans lesquelles Pθi ≡ 0, alors qu'à l'évidence
f 6= 0, puisque choisissant sans restrictions ρ(1) = 1, on a

f = 2 cos(2n(φ − π/2) sur S1

Proposition 5 : ∀n ∈ N, ∀(θ1 , .., θn ) ∈ (S1 )n , ∀f ∈ Cc (R2 )∃g ∈ Cc (R2 ) tq ∀i ∈


[|1, .., n|], Pθi f = Pθi g et f 6= g .
Ce théorème améliore évidemment sensiblement le précédent : aucun set ni de di-
rections même particulier ne saurait déterminer la fonction à reconstruire (en tout
cas c'est ce que cette formulation plus forte du théorème implique puisqu'elle s'oc-
cupe de Cc (R2 )). On va voir que ce théorème s'étend naturellement aux dimensions
supérieures à 2. On pourra remplacer dans la démonstration R2 par Rn sans plus
d'égards.

Lemme 1 : Etant donné K un compact de R2 et f ∈ Cc (R2 ), Supp(f ) ⊆ K , ainsi


que θ1 , ..., θn ∈ Sn−1 . Alors pour tout compact K0 dans l'intérieur de K, il existe
f0 ∈ Cc (R2 ), Supp(f0 ) ⊆ K telle que f0 coïncide avec f sur K0 et que Pθi f ≡
0, ∀i ∈ [|1, .., n|].

Résultat préalable : Soit q : R2 → R fonction de ξ , soit ϕ une fonction quelconque


intégrable R2 → R et soit enn Q l'opérateur diérentiel obtenu à partir de q en
remplaçant ξ par le pseudo-opérateur −i∇. Alors
ˆ
Qφ(ξ) = q(ξ)φ̂(ξ)

Démonstration : Il s'agit d'une intégration par parties en dérivant l'exponentielle


dans la transformée de Fourier et en intégrant l'opération diérentielle Q sur φ.

9
Démonstration du lemme : Considérons donc maintenant
n
Y
q(ξ) := θk .ξ
k=1

et Q l'opérateur diérentiel associé. L'équation diérentielle Qy=f aboutit à une


solution (notée h) par théorème de Cauchy, sans formuler explicitement de condition
aux bords.
Soit maintenant ψ ∈ Cc (R2 ), Supp(ψ) ⊆ K tq ψ = 1 sur K0 .
Posons f0 := Qψh, on a bien f0 ∈ Cc (R2 ), Supp(ψ) ⊆ K , et f0 = Qh = f sur K0 .
De plus par la proposition 1 puis le résultat préliminaire précédent
√ √
∀i ∈ [|1, ..n|], ∀η ∈ θi⊥ , P
] θi f0 (η) = 2π fˆ0 (η) = ˆ
2πq(η)(ψh)(η) =0

De fait, par unicité de la transformée de Fourier, on aboutit à Pθi f0 ≡ 0 ∀i, ce qui


conclut.

Démonstration de la proposition : Comme dans le théorème précédent, on


mène la preuve pour f ≡ 0, la linéarité du problème conclut. On considère une
fonction non constamment nulle quelconque à support compact, mettons g dénie
sur K := D(0, 1), non nulle en zéro. On construit à partir du lemme une fonction g0
qui coïncide avec f sur, mettons, D(0, 1/2), donc non nulle en zéro. Le lemme indique
que Pθi g0 est nulle pour tout i dans [|1,..,n|] alors qu'elle est non constamment nulle,
ceci conclut.

Proposition 6 : Si f ∈ Cc (R2 ) a des intégrales nulles dans une innité de direc-


tions, alors f ≡ 0.
Aussi dans le cas d'une fonction à support compact, connaître les intégrales lon-
gilignes dans une innité de directions sut à reconstruire la fonction. Attention
cependant, ceci est faux dans le cas schwartzien général, cf le contre-exemple fourni
après la démonstration du résultat. En revanche ce résultat s'étend aux dimensions
supérieures sans plus de travail.

Démonstration : fˆ est une fonction holomorphe (par holomorphie sous le signe


intégral, d'où l'importance de l'hypothèse du support compact pour la domination)
donc analytique en zéro. Les transformées de f sont nulles dans une innité de
directions formant un set Θ.
La proposition 1. implique que
∀θ ∈ Θ, ∀η ∈ θ⊥ , fˆ(η) = 0

Aussi les termes de type η.θ apparaissent dans le développement en zéro de fˆ pour
tout θ dans Θ. Ce qui constitue un zéro d'ordre inni, donc fˆ ≡ 0, ce qui résulte en
f ≡ 0.

En revanche, ce résultat est absolument faux dans le cas schwartzien général.


Même dans le cas où l'innité de directions d'intégration connues est indénombrable,
le résultat ne saurait s'appliquer. Considérons le contre-exemple suivant :
Soit g une fonction S(R2 ) telle que g soit nulle dans les directions [π/2, π/2+ϕ1 ], ϕ1 >
0 quelconque. g ∈ L2 ∩ L1 car schwartzienne, aussi elle est la transformée de Fourier
d'une fonction f. La proposition 1. implique que ∀θ ∈ [0, ϕ1 ], Pθ f ≡ 0 alors même
que f n'est pas nulle par injectivité de la transformée de Fourier. Ceci conclut.

10
Détermination locale
Dans le même ordre d'idées que ce qu'on a pu voir dans la section précédente, où
nous avons étudié les intégrales directionnelles, on peut naturellement se demander
ce qui se produit quand on connaît les intégrales selon certaines lignes particulières,
plutôt que selon certaines directions. C'est un problème à la fois plus naturel et plus
compliqué, puisque les distributions possibles de lignes sont indénombrables. Nous
allons nous attacher à deux cas particuliers dans les sections qui suivent : le cas où
l'on désire déterminer le prol densitaire ponctuellement, à l'aide de données locales
autour du point d'étude, et le cas où l'on désire connaître le prol en dehors d'une
zone d'ombre. Les deux cas seront étudiés en dimensions 2 et 3, cas longilignes et/ou
planaire.

Proposition 7 : Soit f ∈ S(R3 ). Soit x ∈ R3 quelconque et r un réel strictement


positif. On suppose connaître la transforméee R selon les plans qui contiennent un
point de B(x,r). Alors f(x) est uniquement déterminée.

Démonstration : Soient x et r comme dans l'énoncé. On rappelle le théorème 2


d'inversion de la transformée de Radon planaire
∂2
Z
1
f (x) = − 2 Rf (xθ, θ)dθ
8π ∂x2
S2

L'étude de la forme de la formule d'inversion sut à conclure : la connaissance


de R sur un voisinage de x fournit annexement par dénition de la dérivation la
dérivée seconde de R par rapport à x dans toutes les directions θ, et donc l'intégrale
cherchée.

Les deux propositions longilignes, en dimensions 2 et 3, sont fausses. Pour la


dimension 2, ceci est assez naturel vu que la formule d'inversion de la transformée
de Radon fait intervenir une transformée de Hilbert (q˜θ ) qui fait appel aux données
de R2 tout entier.
Le contre-exemple en est d'ailleurs intéressant, même s'il fait intervenir un résultat
qui apparaît dans III) (le théorème 4).
On se place en x = 0, quitte à translater le problème. On va construire un contre-
exemple f radial, ce qui implique P f (sθ⊥ , θ) radial, on s'occupe donc donc des inté-
grales dans une seule direction, mettons l'horizontale, selon une fonction q(s) dénie
sur R. La formule d'inversion du théorème 1 donne directement
1
f (0) = q̃ 0 (0)
2
Aussi on construit q1 et q2 qui coïncident sur [−r, r] de sorte que les données inté-
grales coïncident bel et bien pour les fonctions f résultantes, mais on fait en sorte
qu'elles dièrent en-dehors, de sorte que leurs transformées de Hilbert dièrent et
donc que les valeurs des deux fonctions résultantes dièrent en zéro. On utilise le
théorème 4 dans ce raisonnement puisque l'on postule qu'il existe bien f1 et f2 dont
les transformées de Radon sont q1 et q2 , ce que le théorème permet en fait de prouver.
Ceci conclut.

11
Trou dans la gure
Dans certains cas, notamment lorsque le procédé de scan n'est plus appliqué au
corps humain mais bien à des objets inconnus, il arrive que le rayon ne pénètre pas
ou mal certaines zones de la gure, ce qui prive le scan d'une quantité énorme de
données, puisque toutes les lignes censées passer par cette zone sont impossibles à
étudier. Ceci amène tout naturellement à poser la question de la reconstruction d'un
prol densitaire en dehors d'un "trou de visibilité". C'est-à-dire reconstruire le prol
de l'objet en dehors de cette zone et sans les lignes qui la traversent.

Cas de la dimension 2

Proposition 8 : Soit D ⊆ R2 compact convexe et f ∈ S(R2 ). On note


Ω(D) = {(x, θ) ∈ T S1 tq D ∩ {x + sθ} = ∅}

Sous ces notations, P f |Ω(D) détermine uniquement f |R2 −D .

Démonstration : On peut se restreindre au cas où D est un disque fermé centré


en zéro. En eet, d'une le problème est invariant par translation, et de deux, pour
chaque x en dehors de D on peut trouver une boule contenant D et ne contenant
pas x, ceci conclut.
On considère donc D = B(0, r0 ), r0 ∈ R+ quelconque. Le théorème de Cormack
(théorème 3) répond à la question posée : ∀l ∈ Z, fl (r0 ) ne dépend que de la donnée
de ql (s), s > r0 , qui est connue car les intégrales Pθ f (s), s > r0 sont selon des
droites incluses dans Ω(D).

Cas de la dimension 3

Proposition 8 : Soit D ⊆ R3 compact convexe et f ∈ S(R3 ). On note


Ω(D) = {(x, θ) ∈ T S2 tq D ∩ {x + sθ} = ∅}

Sous ces notations, P f |Ω(D) détermine uniquement f |R3 −D .

Démonstration : Soit x ∈/ D. D est compact convexe, aussi soit P un plan tel que
x ∈ P et P ∩ D = ∅ (si l'on en veut un explicitement, on peut noter y le projeté
orthogonal de x sur D, puis prendre P orthogonal au vecteur xy~ et passant par x).
Par hypothèse, notant D(P) l'espace des droites de P, D(P ) ⊆ Ω(D), ce qui nous
ramène au cas d'inversion du théorème 1 et conclut à la détermination unique de
f(x).

En revanche, le résultat est faux en ce qui concerne les plans n'intersectant pas
D.

12
Espaces atteints par la transformée

de Radon en dimension 2

Image de S(R2)
On considère l'opérateur
Z
2 1
P : S(R ) → S(R × S ), P f (s, θ) = f (sθ⊥ + tθ)dt
R

D'ores et déjà, la proposition 1 énonce l'injectivité de la transformée de Radon. En


eet, si deux fonctions ont la même transformée de Radon, elles ont par extension la
même transformée de Fourier dont on sait par théorème qu'elle est injective. Mais
la transformée de Radon est-elle surjective ? A l'évidence l'espace S(R × S1 ) est bien
plus grand que S(R2 ), puisque R × S1 est une variété de dimension 3.

Théorème 4 : (Graev, 1960) P (S(R2 )) est l'ensemble des fonctions q ∈ S(R × S1 )


qui vérient
q(−s, −θ) = q(s, θ) (parite)
Z
∀m ∈ N, sm q(s, θ)ds = pm (θ)
R

où pm est un polynôme homogène en θ de degré m.

Il en résulte immédiatement que comme on s'en doutait la transformée de Radon


n'est pas surjective sur S(R×S1 ), l'exemple d'une fonction q impaire non nulle sut
à le prouver.
Il existe un résultat similaire en dimension 3, qui décrit explicitement P (S(R3 )) mais
sa formulation est beaucoup moins simple que celle-ci.

Cas particulier des fonctions radiales


Proposition 9 : P constitue une bijection entre les fonctions radiales de R2 et les
fonctions radiales de R × S1 .

Démonstration : On appelle fonction radiale de R × S1 toute fonction q telle que


∀s ∈ R, ∀θ ∈ S1 , q(s, θ) = q(|s|)

Déjà on remarque qu'une fonction radiale est nécessairement paire. De plus, toute
fonction radiale vérie bien la condition énoncée au théorème 4. En eet :
q est schwartzienne donc intégrable contre tout polynôme en s, et de plus en voyant
1̃ comme polynôme homogène en θ selon θ12 + θ22 , on aboutit à q ∈ P (S(R2 )).

13
De plus, il est assez clair que si f est radiale, alors Pf l'est, en eet
Z Z Z
P f (s, θ) = ⊥
f (sθ + tθ)dt = ⊥
f (R−θ (sθ + tθ))dt = f (s~j + t~i)dt = q(s)
R R R

Enn, si Pf est radiale, f l'est. En eet, dans ce cas, le développement de Pf en


série de Fourier se limite au terme d'ordre 0
P f (s, θ) = q0 (s)

et le théorème de Cormack (théorème 3) énonce alors que le développement en série


de Fourier de f est également réduit à son terme d'ordre zéro, donc que f est radiale.
Ceci conclut.

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Suppléments, bibliographie

L'essentiel de ce qui constituait la théorie de la transformation de Radon clas-


sique a été étudié dans ce papier. Les résultats manquants ont trait soit aux questions
d'image par la transformation de Radon inverse comme décrite en théorèmes 2 et 3,
soit aux problèmes de dimensions supérieures à 3, soit aux questions plus compli-
quées d'approximations numériques d'une reconstitution d'un prol inconnu.
De plus, on a omis faute de place d'évoquer les transformations similaires plus géné-
rales qui ont été abordées pendant le stage, notamment les transformations pondé-
rées (le prol densitaire est alors surchargé ponctuellement par des radiations, par
exemple). Ces transformations plus générales ne font l'objet que de trois théorèmes
étudiés succintement :
- le théorème de Novikov-2001, qui formule un résultat d'inversion de la trans-
formation Single Particle Emission Computerized Tomography
- la formule d'approximation de Chang, qui donne explicitement une formule
d'inversion approchée pour une transformation chargée quelconque
- le théorème de Novikov-2011, qui énonce à quelle condition, et à quelle condition
seulement, la formule d'apporoximation de Chang constitue une inversion exacte et
non approchée.
(Ces résultats sont consultables sur les prols HAL des intéressés.)

Le présent papier est basé sur les documents suivants :

The mathematics of computerized Tomography, de Franck Natterer, publication 2001


Cours de tomographie et analyse complexe, par Roman Novikov, chercher au CMAP.

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