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UNIVERSITE PANTHEON-ASSAS (PARIS II)

Droit- Economie- Sciences sociales

L’INTERNET AU SERVICE DES OPERATIONS


BANCAIRES ET FINANCIERES

Thèse pour le Doctorat en Droit


(Arrêté du 30 mars 1992 modifié par l’arrêté du 25 avril 2002)
Présentée et soutenue publiquement le 17 mars 2006
devant le jury de l’Université Panthéon-Assas (Paris II)
par

Georges Daladier ABI-RIZK

JURY

Directeur de recherche : Monsieur Thierry BONNEAU


Professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris II)

Membres du jury : Monsieur Michel CASTEL


Directeur des établissements de crédit et des entreprises
d’investissement à la Banque de France

Monsieur Jean - Jacques DAIGRE


Professeur à l’Université Panthéon-Sorbonne (Paris I)

Monsieur Luc GRYNBAUM


Professeur à l’Université René Descartes (Paris V)

Monsieur Jérôme HUET


Professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris II)
L’UNIVERSITE PANTHEON-ASSAS (PARIS II) Droit – Economie – Sciences Sociales
n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses, ces
opinions devront être considérées comme propres à leurs auteurs.

II
RESUME

Le secteur des services bancaires et financiers se voit aujourd’hui être le théâtre d’une
concurrence exacerbée entre les établissements de crédits, désireux d'adjoindre l’Internet à
leur arsenal de techniques commerciales et de partir à la conquête du client internaute. La
prise en compte de la réalité et des potentialités économiques d’un marché « virtuel » par le
législateur européen l’a conduit à chercher à en assurer le bon fonctionnement et à développer
des outils pour parvenir à cette fin. Ainsi, la directive sur le « commerce électronique »,
favorable aux prestataires de services, est-elle venue garantir la liberté et la légalité de l’offre
de services financiers en ligne sur la base du principe de la loi du pays d’origine. L’Internet ne
modifie pas, pour autant, les obligations naturelles qui pèsent sur les établissements de crédit
mais autorise la possibilité de répondre aux attentes du marché tant en matière de sécurité
technique et juridique des transactions que d’innovations en ce qui concerne les moyens de
paiement. Le bon fonctionnement du marché résulte, en outre, d’une faculté à résoudre les
différends qu’il génère. Les litiges « électroniques bancaires », à forte consonance
internationale, s’accommodent mal des voies traditionnelles de résolution et l’Internet devrait
permettre l’émergence de modes alternatifs.
La protection du consommateur de services bancaires et financiers est également au centre des
priorités du législateur dont l’objectif est de gagner la confiance. En premier lieu, l’Internet
est à l’origine d’évolutions juridiques majeures autorisant la dématérialisation des contrats,
tout en préservant dans une certaine mesure les garanties protectrices du consommateur
traditionnellement dévolues à l’écrit. En deuxième lieu, la directive sur la commercialisation
des services financiers à distance a rééquilibré les relations entre l’établissement de crédit et le
consommateur au moyen d’une information substantielle ainsi que d’un certain nombre de
droits exorbitants qui lui sont accordés. En troisième lieu, de tels droits sont pareillement
consentis au consommateur quant il s’agit de la collecte et du traitement de ses données
personnelles à caractère financier ; le législateur cède alors le relais aux autorités de contrôle
dont l’action reste le meilleur gage de la bonne foi des établissements de crédit. In fine,
l’articulation des différents textes applicables à la prestation de services bancaires et
financiers en ligne offre au consommateur une protection cohérente.

III
PLAN SOMMAIRE

PREMIERE PARTIE
LA PRESTATION DE SERVICES BANCAIRES ET FINANCIERS SUR
L’INTERNET ET LE BON FONCTIONNEMENT DU MARCHE

TITRE 1 : La clause de marché intérieur comme fondement de la libre prestation de


services bancaires et financiers sur l’Internet

Chapitre 1er : Portée de la clause de marché intérieur


Chapitre 2 : L’impact de la clause de marché intérieur

Titre II – La sécurité technique et juridique des opérations bancaires et financières sur


l’Internet

Chapitre 1er : Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponses aux attentes
sécuritaires
Chapitre 2 : Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les
établissements bancaires et financiers

Titre III - La résolution des litiges internationaux relatifs aux opérations bancaires et
financières sur l’Internet

Chapitre 1er : Juge compétent et loi applicable aux litiges relatifs aux opérations bancaires et
financières sur l’Internet
Chapitre 2 : Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges

DEUXIEME PARTIE
LA PRESTATION DE SERVICES BANCAIRES ET FINANCIERES SUR
L’INTERNET ET LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS

Titre I : Le formalisme et la preuve des transactions bancaires et financières sur


l’Internet

Chapitre 1er : Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet
Chapitre 2 : De quelques exemples de contraintes spécifiques

Titre II – La réglementation des services bancaires et financiers à distance

Chapitre 1er : La protection du consommateur confrontée à l’offre de services bancaires et


financiers en ligne
Chapitre 2 : L’articulation des directives « commerce électronique » et « services financiers à
distance »

Titre III – La protection des données personnelles dans le cadre des opérations bancaires
et financières en ligne

Chapitre 1er : La protection par les droits accordés


Chapitre 2 : La protection par les obligations imposées

IV
PRINCIPALES ABREVIATIONS UTILISEES

A. et M. Revue auteurs et média


BRDA Bulletin rapide de droit des affaires
Bull. Bulletin
Cass. Arrêt de la Cour de cassation
CDE Cahiers de Droit Européen
CE Arrêt du Conseil d’état
Civ. Arrêt de la Cour de cassation (chambre civile)
CJCE Arrêt de la Cour de Justice des communautés
européennes
CNCC Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes
CNCC Compagnie nationale des commissaires aux comptes
Com. Arrêt de la Cour de cassation (chambre commerciale)
Comm. com. électr. Communication, commerce électronique
Contrats conc. consom. Contrats, concurrence, consommation
D. Recueil Dalloz
DAOR Revue Le droit des affaires – Het ondernemingsrecht
DIT Droit de l’Informatique et des Télécoms
EUREDIA La Revue Européenne de Droit Bancaire et Financier
Gaz. Pal. Gazette du Palais
Ibid. Ibidem, au même endroit
Inf. rap. Informations Rapides
J.-Cl. com. Jurisclasseur de droit commercial
J.T. Journal des tribunaux
JCP E La semaine juridique. Edition entreprises
JCP G La semaine juridique. Edition générale
JDI Journal du Droit International
JIBL Journal of International Banking Law
JO Journal Officiel de la République Française
JOCE Journal Officiel de la Communauté européenne
JTDE Journal des tribunaux- Droit européen
LPA Les petites affiches
M.B. Moniteur Belge
Op. cit. Opere citato- dans l’ouvrage cité
OPOCE Office de publication du journal officiel des
Communautés européennes remplacé par le Journal
Officiel de l'Union Européenne
RCDIP Revue critique de droit international privé
RDAI La Revue de Droit des Affaires Internationales
RDBF Revue de Droit Bancaire et de la Bourse devenue Revue
de Droit Bancaire et Financier
RDC Revue de Droit Commercial belge
RDPC Revue de droit pénal et de criminologie
RDUE Revue du droit de l’Union Européenne
Rec. Recueil des arrêts de la CJCE
REDC Revue européenne de droit de la consommation.
Rép. min. Réponse ministérielle
Rép. Répertoire
Rev. prat. soc. Revue pratique des sociétés commerciales et civiles

V
Rev. soc. Revue des sociétés
RGAT Revue Générale Assurances Terrestres
RIDC Revue International de Droit Comparé
RJDA Revue de Jurisprudence de Droit des Affaires
RLDI Revue Lamy de Doit Immatériel
RTD civ. Revue trimestrielle de droit civil
RTD com. Revue trimestrielle de droit commercial
RTD eur. Revue trimestrielle de droit européen
TGI Tribunal de Grande Instance

VI
A la mémoire de ceux qui, du Ciel, veillent sur moi :
mon père Daladier assassiné le 7 février 1980 dans des circonstances toujours non élucidées,
mon grand-père Jim doyen de la famille dont dépend la réussite de toute une génération,
et ma grand-mère Widad incarnant le dévouement sous sa plus belle forme, et qui rongée par
l’amertume, n’a pas tardé à répondre à l’appel de rejoindre son fils bien-aimé dans son voyage
éternel.

A mon oncle Elias, l’avocat qui a plaidé inlassablement ma cause mais encore celle de mes
deux frères, en sacrifiant sa vie, pour la réussite de la notre.

A mon frère Antoine, l’ami disponible et indéfectible.

A ma sœur Dalida, belle par son amour et sa patience inébranlables.

VII
INTRODUCTION

« La technologie comprend trois sortes de problèmes, résultant de trois points de vue sous
lesquels les techniques peuvent être envisagées: premièrement, il y a lieu de procéder à la
description analytique des arts, tels qu'ils existent à un moment donné dans une société
donné...Secondement, il y a lieu de rechercher sous quelles conditions, en vertu de quelles
lois, chaque groupe de règles entre en jeu, à quelles causes elles doivent leur efficacité
pratique...Troisièmement, il y a place à une étude du devenir de ces organes eux mêmes, soit
qu'elle porte sur la naissance, l'apogée et le déclin de chacun d'eux dans une société donnée,
soit qu'elle porte sur l'évolution de toute la série des techniques dans l'humanité... ».

ESPINAS A., Les Origines de la technologie, Revue philosophique, 1890, II, 115-116.

1. L’innovation technique. La technologie occupe une place prépondérante dans notre


quotidien. On examine ici certains aspects d’un nouveau né du progrès des techniques :
l’Internet. Ce dernier constitue le réseau informatique mondial et permet l’offre et l’utilisation
de très nombreux services. Tout particulièrement le commerce sous ses formes les plus
variées s’est forgé une place incontournable dans ce système ; il est passé à l’ère électronique.

2. Le potentiel économique. Tous les organismes privés et les institutions surveillant


l’évolution du commerce électronique s’accordent à lui attribuer une croissance fulgurante
depuis les trois dernières années. On trouve, par exemple, une confirmation officielle de cette
envolée dans la dernière version du tableau de bord établi par la Mission pour l’économie
numérique1. La même évolution peut être déduite des chiffres publiés par l’ACSEL2 : pour le
quatrième trimestre 2005, les achats en ligne ont enregistré une hausse de 49% pour un chiffre
d’affaires de 849,4 millions d’euros3. De même, selon l’indice du commerce électronique

1
« Durant l’année 2003, l’achat en ligne a connu une croissance 2,5 fois plus rapide que celle de la population
d’internautes, selon les baromètres Multimédia de Médiamétrie. Le nombre d’internautes a augmenté de 21 %,
passant de 18 millions à 21,8 alors que le nombre d’acheteurs en ligne grimpait de 5,4 millions à 8,3 millions
d’internautes (+54 %) », HEITZMANN R. et DAYAN M., Mission pour l’économie numérique, Tableau de
bord du commerce électronique, SESSI, 6ème éd., décembre 2004, disponible sur :
http://www.men.minefi.gouv.fr/webmen/themes/eco/tbce91204.pdf.
2
L'ACSEL (Association pour le Commerce et les Services En Ligne) est l'organisation française représentative
des acteurs du commerce électronique et des services en ligne. Créée en 1980, elle a conduit de nombreuses
actions en faveur du développement des services en ligne, en particulier auprès des pouvoirs publics, au profit de
l’ensemble des catégories d’acteurs concernés. Ses adhérents sont des entreprises et organismes : e-commerçants
(électronique, produits culturels, voyages, alimentation, produits financiers, etc.), banques, éditeurs, offreurs de
solutions. Informations disponibles sur : www.acsel.asso.fr.
3
Atelier groupe BNP Paribas, Commerce en ligne : une progression de 49% sur le marché français, 12 janvier
2006, disponible sur : http://www.atelier.fr/imprimer.php?artid=31241 .
Introduction 2

publié par la FEVAD4, les ventes de produits et services sur Internet ont progressé de 45% sur
le premier semestre 2005 par rapport à la même période en 20045. Effectivement, le nombre
des abonnés haut débit a connu une forte augmentation en France pour dépasser 9 millions fin
décembre 20056 et en Europe les internautes représentent désormais 55%7 de la population,
contribuant ainsi largement au développement du trafic – notion clé du commerce en ligne
quand on s’intéresse au taux de transformation du visiteur en client. Quelle que soit
l’exactitude des données chiffrées, la tendance est certaine et l’on peut réellement dire
aujourd’hui qu’un nouveau canal de distribution est né. Il convient alors d’en préciser les
contours.

3. Internet et commerce électronique. Selon la définition qu’en donne l’OCDE, le commerce


électronique désigne la vente ou l'achat de biens ou de services effectués par une entreprise,
un particulier, une administration ou toute autre entité publique ou privée, et réalisé au moyen
d'un réseau électronique8, fondé sur la transmission de données. Il peut couvrir des activités
très diverses, telles que le transfert électronique de fonds, les activités boursières, voire la
livraison en ligne d’informations numériques… Mais le commerce électronique ne se limite
pas à l’Internet puisqu’il inclut également le vidéotex, le téléachat, la vente sur Cd-rom, etc.
Pourtant, l’Internet occupe sans aucun doute une place prépondérante parmi les éléments du
commerce électronique et il présente des caractéristiques propres ; cependant il suscite aussi
de nombreuses interrogations quant à la réglementation qui s’y applique. On a pu à ce titre
entendre parler de « vide juridique en matière d’Internet ».

4. Internet et vente à distance. En tant que vecteur de commerce électronique, l’Internet


favorise la conclusion de transactions et, plus précisément, de contrats. Au regard d’une
taxinomie non contestable ces derniers s’inscrivent dans la catégorie des contrats entre

4
La FEVAD (Fédération des Entreprises de la Vente A Distance), rassemble les entreprises qui pratiquent la
vente à distance (VAD) de produits et de services, quels que soient la taille et le secteur : vente aux particuliers,
vente aux professionnels, vente entre particuliers. La Fevad accueille également, parmi ses adhérents, des
sociétés dont l’activité est directement liée à la fourniture de biens ou la prestation de services à des entreprises
de VAD. Rapport d’activité 2005, p. 4, disponible sur : http://www.fevad.com .
5
Rédaction ZDNet, E-commerce : croissance de 45% en France au premier semestre, 13 septembre 2005,
disponible sur : http://www.zdnet.fr/actualites/imprimer/0,50000200,39262116,00.htm
6
Atelier groupe BNP Paribas, Haut débit : le Royaume-Uni dépasse la France, 3 janvier 2006, disponible sur :
www.atelier.fr .
7
LEBLANC-WOHRER M., A quand une offre plus étoffée ?, AGEFI, du 25 novembre au 1er décembre 2005, p.
28.
8
COPPEL J., Le commerce électronique : conséquences et défis pour la politique économique, Document de
travail du Département des affaires économiques de l’OCDE, 13 juin 2000, disponible sur :
http://www.oecd.org/searchResult/0,2665,fr_2649_37443_1_1_1_1_37443,00.html.
Introduction 3

absents ou par correspondance, c’est-à-dire dans lesquels les parties (pollicitant et acceptant)
sont physiquement éloignées au moment de l’acceptation. Les contrats conclus via l’Internet
ne sont donc pas une nouveauté juridique, la vente par correspondance ayant depuis
longtemps contribué à la réglementation de tels contrats. En réalité, l’Internet se distingue
beaucoup plus de par une accessibilité techniquement facilitée à l’offre de contrat que par la
permanence de la sollicitation. Ainsi, de prime abord, il n’est pas évident qu’il justifie
juridiquement un traitement particulier : l’Internet est d’abord et simplement un mode de
vente à distance.

5. La banque et l’Internet. Les marchés électroniques se caractérisent par une transparence


élevée sur les prix. En effet, avec l’Internet, la recherche d’informations sur les prix est
facilitée, certains sites (Shopbots) sont même spécialisés dans la comparaison des offres9. Les
coûts de recherche d’information étant plus faibles que sur les marchés physiques, on constate
sans grande surprise que les vendeurs en ligne se livrent une concurrence plus intense. Une
conséquence de cette concurrence, que l’on peut qualifier d’exacerbée, mais qui est également
un des enjeux fondamentaux de l’Internet, est la fidélisation de la clientèle et, corollairement,
sa captation. Cette concurrence touche tous les secteurs de l’économie, et ceci s’est
particulièrement vérifié dans le secteur bancaire et financier qui est traditionnellement un des
secteurs les plus fidélisants ; l’Internet a ainsi permis la naissance de banques dites « 100%
Internet » comme, par exemple, ING Direct10 ou Egg11. Les établissements de crédit plus
traditionnels sont donc contraints de concevoir de nouvelles stratégies (multicanal)12 pour
contrer l’émergence de ces nouveaux concurrents : une véritable « bataille de l’Internet » s’est
engagée. Le témoignage le plus flagrant en est la stratégie dite « des coûts bas » pratiquée par
ces nouvelles banques, dont les infrastructures réduites leur permettent de limiter les charges
fixes et donc d’être plus concurrentielles. Inversement, l’Internet a donné lieu à la conclusion
de partenariats entre banques, et même entre banques et acteurs non bancaires.

9
Par exemple le site : www.kelkoo.fr
10
Pour plus d’informations sur cette banque, nous renvoyons sur : http://www.ingdirect.fr
11
En juillet 2004, la banque britannique a annoncé son retrait du marché français en raison d’importantes pertes
financières, bien qu’elle soit parfaitement rentable en Grande Bretagne : BEKY A., Les œufs sont cuits : Egg se
retire du marché français, NetEconomie, Société, 15 juillet 2004, disponible sur :
http://www.neteconomie.com/perl/navig.pl/neteconomie/infos/article/2004071514521
12
Pour être multicanal, un établissement doit en effet offrir des canaux intégrés, c’est-à-dire permettant un
échange fluide d’informations entre l’agence, le téléphone et Internet de telle sorte que tous les chargés de
clientèle puissent avoir accès aux mêmes données, et que le client soit en mesure de disposer d’une information
cohérente quel que soit son mode de contact avec la banque. Ces efforts ont suscité de lourds investissements qui
devraient atteindre, pour les acteurs français, 2,3 milliards de dollars en 2007. LEBLANC-WOHRER M., La
relation clients un défi technologique à relever, AGEFI, du 25 novembre au 1er décembre 2005, p. 32.
Introduction 4

6. L’influence. L’Internet a bouleversé le marché bancaire et financier mais reste, pour les
établissements de crédit, une formidable opportunité. En effet le coût des transactions,
traditionnellement réalisées en agence, déjà réduit par la généralisation des guichets
automatiques, diminue encore avec l’usage de l’Internet en raison de l’informatisation et de
l’automatisation des procédés ; de plus, l’investissement pour créer et maintenir un site
Internet est largement inférieur à celui nécessaire à l’ouverture et l’entretien d’une agence.
L’Internet a également vu l’émergence de nouveaux produits bancaires « sur mesure »,
réellement adaptés aux besoins du client13, qui s’opposent aux approches bancaires classiques.
Au regard de la nouvelle donne de l’Internet, dans laquelle se sont engagés les établissements
de crédit, certains services bancaires et opérations de banque se sont adaptés au contexte
dématérialisé14. Par exemple, en même temps que sont apparus des services personnalisés
fournis en ligne tels que la consultation des comptes, la réalisation d’opérations de virement,
l’édition de relevé d’identité bancaire (RIB) et l’envoi de relevés de comptes, ont émergé des
solutions de paiement en ligne permettant aux professionnels de facturer et d’obtenir le
paiement des biens ou services fournis directement par le biais de leur site Internet. Par
conséquent, l’impact de l’Internet sur le secteur bancaire et financier est double, puisqu’il ne
concerne pas que les établissements de crédit, mais affecte également tout le commerce
électronique, en tant qu’utilisateur de solutions bancaires et financières.

7. Droit bancaire. En d’autres termes, l’Internet affecte dans son ensemble le droit bancaire,
défini selon le Professeur T. BONNEAU, comme un « droit des acteurs et des activités15 ».
Comme le souligne l’auteur, il s’agit d’un droit des acteurs, car ses textes régissent les
conditions d’accès et d’exercice des activités des établissements de crédit, mais aussi un droit
des activités, car il précise celles que peuvent exercer ces mêmes établissements. Certaines
activités relèvent du monopole bancaire : il s’agit des opérations de banque. D’autres
opérations et services, qui ne sont pas concernées par ce monopole, pourront être confiées à
d’autres intermédiaires. Néanmoins, ces derniers sont, de la même manière, touchés par le

13
La banque BNP Paribas, par exemple, a même eu l’idée d’utiliser les espaces interactifs communément connus
sous le nom de « blogs » afin d’attirer les jeunes de 18 à 29 ans sur son site pour leur faire connaître l’offre de
nouveaux produits : HAQUANI S., BNP Paribas surfe sur les « blogs », AGEFI, du 25 novembre au 1er
décembre 2005, p. 47.
14
La dématérialisation permet d’offrir un service à valeur ajoutée pour les clients et trouve un équilibre
économique rapide compte tenu des économies réalisées, par exemple, sur l’édition et l’expédition des relevés :
LEBLANC-WOHRER M., Le cyberclient, un client à rentabiliser, AGEFI, du 25 novembre au 1er décembre
2005, p.34.
15
BONNEAU T., Droit bancaire, Paris, Montchrestien, 6ème éd., 2005, n°2, p.5.
Introduction 5

phénomène Internet. Ainsi, tout en opérant les distinctions qui s’avéreront nécessaires, c’est
l’ensemble de ces services bancaires et financiers qui retiendra notre attention.

8. Services bancaires et financiers. La directive du 23 septembre 200216, relative à la


commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, transposée par
l’ordonnance du 6 juin 200517, propose une définition volontairement large de ces services
bancaires et financiers ; il s’agit, selon elle, de : « tout service ayant trait à la banque, au
crédit, à l’assurance, aux retraites individuelles, aux investissements et aux paiements18 ». On
peut constater d’emblée une première difficulté au regard du champ d’application du Code
monétaire et financier. Ce dernier n’inclut pas, en effet, les services liés aux assurances ni
dans sa définition des opérations de banque de l’article L. 311-1, ni d’ailleurs dans celle des
services d’investissement de l’article L. 321-1, ni enfin dans celles des opérations ou des
services connexes envisagés aux articles L. 311-2 et L. 321-2. De telles opérations relèvent de
dispositions spécifiques en droit français. Aussi notre étude doit- elle nécessairement se
limiter à la conception française des opérations bancaires et financières.

9. L’objectif communautaire. Très tôt, les institutions communautaires ont pris conscience des
perspectives et du potentiel que représentait ce marché ; ainsi, l’objectif avoué de l’initiative
européenne en matière de commerce électronique précisé dans une communication de la
Commission du 18 avril 199719, est clairement de stimuler la croissance du commerce
électronique en Europe. La Commission envisage donc dès 1997 de réduire les prix et
d’instaurer des systèmes de tarification plus souples pour les entreprises afin d’améliorer
l’utilisation de l’Internet et, par là, de promouvoir le commerce électronique. Si l’on peut
affirmer que l’Internet s’est mis au service des opérations bancaires de telle sorte qu’il
constitue aujourd’hui un nouveau canal de distribution de ces produits, il n’en demeure pas
moins que des zones d’ombres ont accompagné l’apparition de ce nouvel outil. Plus
particulièrement, en raison de la nature transfrontalière des transactions, la question de la
règlementation applicable sur l’Internet se pose. Dans un tel contexte, au surplus dominé par
le sacro-saint principe de libre circulation des services [de la société de l’information], le rôle
16
Directive 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 concernant la
commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives
90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE.
17
Ordonnance n° 2005-648 du 6 juin 2005 relative à la commercialisation à distance de services financiers
auprès des consommateurs.
18
Article 2 b) de la directive de 2002.
19
Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au
Comité des régions, Une initiative européenne dans le domaine du commerce électronique, COM/97/0157 final.
Introduction 6

du législateur communautaire, ayant pour but dans ce domaine, comme dans d’autres,
d’établir un cadre réglementaire européen cohérent, est primordial. Ce souci se retrouve de
façon continue dans la législation communautaire, notamment à travers la directive sur le
commerce électronique du 8 juin 200020. « Créer la confiance pour gagner les milieux
d’affaires et les consommateurs à la cause du commerce électronique », la terminologie
employée en 1997 par la Commission se retrouve quasiment inchangée dans la directive de
2000 qui fonde le bon fonctionnement du marché sur un principe de confiance21.

10. Les acteurs. Deux groupes d’acteurs aux intérêts divergents s’installent dans la grande
balance européenne : d’un côté les consommateurs, de l’autre les milieux d’affaires que l’on
veut attirer vers le commerce sur l’Internet pour en assurer la croissance au moyen d’un
principe de confiance mutuelle qui, de surcroît, ne concernerait pas seulement les Etats
membres. Les premiers à souffrir d’un manque de confiance dans la sécurité des services
financiers sur l’Internet sont les consommateurs ; cette problématique est d’ailleurs évoquée
dans la directive 2002/65/CE (considérant 3) : « Afin d'assurer la liberté de choix des
consommateurs, qui est un droit essentiel de ceux-ci, un niveau élevé de protection des
consommateurs est nécessaire pour accroître leur confiance dans la vente à distance ». Il est
évident que l’objectif communautaire premier est de promouvoir un environnement
commercial favorable.

11. Problématiques. Si l’Internet ne se définit finalement que comme un nouveau support de


commercialisation pour le secteur bancaire et financier, comme un cas particulier de vente à
distance et un marché dématérialisé, il agit cependant comme un accélérateur des
problématiques traditionnelles. En effet il ne fait qu’accentuer les risques classiques liés aux
services bancaires et financiers en raison de ses adaptations, de ses spécificités, de la rapidité
des transactions, et de la concurrence exacerbée : sécurité des opérations, blanchiment
d’argent, protection du consommateur…, toutes ces problématiques ne sont pas récentes
certes mais trouvent un nouvel écho avec l’Internet. L’objectif premier de cette étude est
d’analyser l’impact de cette technique sur la réglementation bancaire et financière, tant
communautaire que nationale : la conclusion et l’exécution des transactions sont-elles
modifiées via l’Internet ? La spécificité des services bancaires et financiers en ligne nécessite-

20
Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects
juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché
intérieur (« directive sur le commerce électronique »).
21
Considérant 7 de la directive de 2000.
Introduction 7

t-elle une réglementation particulière ? Le cas échéant, il s’agit d’examiner la pertinence des
réponses juridiques apportées par le législateur européen et national aux problèmes éventuels
liés à la fourniture de ce type de prestations en ligne. Cette étude vise également à déterminer
les incertitudes juridiques ainsi que l’inadéquation éventuelle de certaines règles dont
l’application a été envisagée dans un contexte papier au phénomène de l’offre des opérations
bancaires et financières électroniques.

12. Plan. L’analyse de la prestation de services bancaires et financiers en ligne doit donc, pour
être exhaustive, prendre en considération tant les intérêts des établissements de crédit que
ceux des consommateurs. Techniquement, l’Internet permet à un établissement de crédit
d’offrir ses opérations aux ressortissants de tous les Etats, qu’ils soient membres ou tiers.
Aussi, la légalité de l’offre de contracter de ces établissements, la sécurité des transactions et
la résolution des litiges constituent-elles les conditions sine qua non du bon fonctionnement
du marché (partie I). Corrélativement, ces opérations seront conclues avec des internautes ; les
droits qui leur sont accordés et les obligations imposées à leurs cocontractants, forment un
corpus juridique visant à assurer la protection du consommateur (partie II).

Première partie : La prestation des services bancaires et financiers sur l’Internet et le


bon fonctionnement du marché.

Deuxième partie : La prestation des services bancaires et financiers sur l’Internet et la


protection des consommateurs.
PREMIERE PARTIE

LA PRESTATION DE SERVICES
BANCAIRES ET FINANCIERS SUR
L’INTERNET ET LE BON
FONCTIONNEMENT DU MARCHE
1ère Partie - La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et le bon fonctionnement du 9
marché

OBSERVATIONS PRELIMINAIRES

13. Evolution. Le marché unique des services financiers s’est construit à partir des années 1970.
Ainsi, une quinzaine de directives a été adoptée entre 1973 et 1997. Plus récemment, dans une
communication au Conseil du 11 mai 1999, la Commission européenne a mis en place un plan
d’action pour les services financiers (PASF) qui s’attache à mettre au jour les freins au
développement et à la fluidité d’un marché financier22 unique afin de mieux en définir les
règles de bon fonctionnement.

14. Définition. Le bon fonctionnement du marché dépend en réalité davantage d’intérêts


économiques que juridiques. En effet, le marché n’évoluera effectivement que s’il répond aux
attentes en terme de chiffre d’affaires ou en nombre de transactions réalisées, preuve que les
parties sont rassurées. En amont, seul un système juridique efficace et transparent serait
capable de stimuler le marché et gagner la confiance de ses acteurs. Ainsi, dans l’esprit du
législateur communautaire, le marché bancaire et financier ne peut-il fonctionner
correctement que s’il est décloisonné (a), accessible et sûr (b), et enfin surveillé (c).

a. Un marché décloisonné : implique que les investisseurs, les prestataires de services, voire
les intermédiaires doivent pouvoir accéder à tous les « marchés nationaux » au travers d’un
seul point d'accès : le leur. Dès lors, les prestataires de services bancaires, financiers et
notamment les établissements de crédit peuvent offrir leurs services sur une base
transfrontalière sans se heurter à des entraves inutiles, c’est-à-dire des obstacles administratifs
ou juridiques.

b. Un marché accessible et sûr : il s’agit de donner aux cocontractants les outils


(informations) et les garanties (droits clairement établis et procédures efficaces de règlement
des litiges) nécessaires pour participer pleinement et activement au marché unique des
services financiers. L’objectif est d’aboutir à l’harmonisation des règles de protection des
différents intervenants afin de réduire les entraves aux échanges transfrontaliers. De ce point

22
LAGARDE X., Le droit des marchés financiers présente-t-il un particularisme ?, JCP G, 2 novembre 2005, n°
44 – 45, p. 2045. A travers cette analyse l’auteur nous révèle que « le droit des marches financier n’est pas
seulement un agrégat de mesures disparates destinées à servir des besoins de financement, des appétits de
spéculation, ou encore, des intentions de couverture. Il met en place des mécanismes qui partagent en commun
de permettre aux investisseurs la maîtrise de risques que ceux-ci prennent volontairement; telle est sa profonde
originalité ».
1ère Partie - La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et le bon fonctionnement du 10
marché

de vue, le bon fonctionnement du marché passe également par l'exploitation des nouveaux
circuits de distribution et des nouvelles technologies servant la vente à distance. De même, il
s’agit d’encourager la mise en place de systèmes de paiements économiques sûrs qui
permettent aux citoyens d'effectuer des règlements transfrontaliers de faible valeur sans avoir
à acquitter des frais d’un montant dissuasif.

c. Un marché surveillé : le bon fonctionnement du marché implique également une


intensification de la concurrence. Cependant cette dernière doit s’effectuer au sein d’un cadre
contrôlé et surveillé. Pour ce faire il paraît nécessaire d’éliminer les lacunes dues aux
nouveaux types d'opérations financières ou de la mondialisation qui pourraient apparaître
dans la législation prudentielle de l'Union européenne afin de renforcer la stabilité et la
confiance du marché européen des services financiers. In fine, ce dernier montrera son
efficacité s’il permet à l'Union européenne d'assumer un rôle clé dans la définition de critères
mondiaux exigeants en matière de réglementation et de surveillance.

15. La problématique de l’Internet. La réunion de ces trois conditions doit conduire au bon
fonctionnement du marché des services bancaires et financiers, lequel doit intégrer les
nouvelles techniques de communication dont l’Internet, de par sa nature mondialisée, fait
naturellement partie. Ainsi, au regard des opportunités offertes pour les secteurs concernés, la
corrélation entre le bon comportement du marché et la prestation des services bancaires et
financiers sur l’Internet paraît évidente voire fondamentale.

16. Au regard du secteur bancaire. En réalité, les activités financières en ligne se situent à la
croisée de deux plans de régulation communautaire : l’un axé sur l’instauration d’un marché
commun pour les services financiers, l’autre visant l’optimisation des nouveaux moyens de
communication caractéristiques de la société dite de l’information. L’Internet, dont la forte
croissance est très récente, avec les opportunités et les menaces qu’il comporte, ne risque-t-il
pas de remettre en cause l’œuvre déjà entreprise ? En effet, l’Internet constitue à lui seul un
catalyseur des problématiques traditionnelles liées aux prestations bancaires et financières. Et,
s’il n’est pas maîtrisé (en termes de cadre juridique approprié), cet outil peut rapidement
devenir la cause du dysfonctionnement du marché des services bancaires et financiers.

17. Les attentes des professionnels. L’Internet, que certains considèrent comme étant à lui seul
un véritable marché, est le vecteur d’ambitions de premier ordre pour les professionnels du
1ère Partie - La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et le bon fonctionnement du 11
marché

secteur bancaire et financier. En effet, il présente une double potentialité pour ces
prestataires : réduire leurs coûts de fonctionnement, et accroître leurs clientèles, tout en
limitant leurs frais de communication. Autrement dit, les prestataires de services sont les
premiers intéressés par le bon fonctionnement du marché des services financiers sur l’Internet.
Depuis un seul point : leurs postes informatiques ou le serveur hébergeant leur site Internet,
ils ont accès à l’intégralité du marché communautaire et aussi à tous les Etats reliés au réseau
et à leurs ressortissants. Sur la seule Communauté européenne, l’Internet permet à ces
professionnels de contacter virtuellement des millions d’internautes qui sont également des
clients potentiels. Dès lors, on comprend aisément l’intérêt et les attentes que l’Internet
représente pour les prestataires de services bancaires et financiers. Enfin il paraît utile
d’ajouter que les transactions effectuées via l’Internet, au moyen de cartes de paiement ou
autrement, font généralement l’objet d’une commission payée par le professionnel utilisateur
du service de paiement à l’établissement de crédit ; cela explique pourquoi ce dernier est
intéressé à double titre par l’essor du commerce sur l’Internet.

18. Les positions communautaires et nationales. Considérant que les interférences entre les
régimes de régulation constituent des entraves à la réussite du marché unique des services
financiers et des investissements, le Conseil de Lisbonne a décidé en mars 2000 d’encourager
la poursuite de la réforme en profondeur de la réglementation communautaire en la matière. Il
a ainsi réaffirmé l’importance des marchés financiers pour la prospérité économique et a fixé
2005 comme date butoir pour l’instauration de marchés financiers efficients et intégrés. La
France s’est-elle aussi engagée dans un processus favorisant l’économie numérique. Rompant
avec la logique des « grands plans », le plan RE/SO 200723 a d'ores et déjà donné lieu à
d'importantes applications, avec notamment la loi pour la confiance dans l'économie
numérique (transposant la directive sur le commerce électronique)24, la loi pour l'initiative
économique25, l'adoption de nouvelles orientations pour accélérer l'aménagement numérique
du territoire lors du Comité interministériel ad hoc le 13 décembre 2002 et le plan innovation
destiné entre autres à aider les jeunes entreprises innovantes à accroître leurs efforts pour la
Recherche et le Développement. Notons également le rôle de l’Autorité des marchés

23
Le plan RE/SO 2007 - pour une REpublique numérique dans la SOciété de l'information - a été présenté par le
Premier ministre le 12 novembre 2002.
24
Loi n° 2004 - 575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LEN). JO 22 juin 2004,
p.11168. V. MATHEY N., Le commerce électronique dans la Loi n° 2004 - 575 du 21 juin 2004 pour la
confiance dans l’économie numérique, Contrats conc. consom., octobre 2004, p. 7.
25
Loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique.
1ère Partie - La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et le bon fonctionnement du 12
marché

financiers (AMF)26, pour ses compétences en matière de réglementation des marchés


d’instruments financiers, favorisant ainsi leurs bons fonctionnements.

19. Libre circulation. Face aux démarches déjà entreprises par les institutions communautaires
en matière de construction d’un marché unifié des services financiers et compte tenu de
l’évolution du cadre juridique des prestations bancaires et financières à distance, l’adoption de
la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 sur le commerce électronique peut paraître risquée. En
effet, cette dernière a adapté aux services de la société de l’information le principe de libre
circulation des services consacré par la clause de marché intérieur (titre 1). Celui-ci est
naturellement assorti d’une interdiction de restriction, mais pour autant la pratique montre
encore l’inquiétude des prestataires. Ainsi à l’intérieur de la Communauté la meilleure
stratégie de lancement d’opérations financières auprès des internautes reste souvent
l’ouverture d’une filiale constituée sur le territoire de la Communauté qui, après agrément des
autorités de l’État membre de constitution se voit la possibilité d’offrir ses services au sein de
celle-ci.

20. Le besoin de sécurité. Parallèlement, le bon fonctionnement général du marché des services
bancaires et financiers sur l’Internet n’est pas uniquement lié à un principe de reconnaissance
de la libre prestation de services, mais est également sous-tendu par une adaptation correcte
des techniques employées. En effet, le bon comportement du marché suppose la confiance de
ses acteurs dans le support technique qu’ils manient (l’Internet). Ainsi les institutions
communautaires semblent tenir compte de cette réalité dans leurs tractations visant à attirer
tant les investisseurs que les prestataires. A cette fin, la réalisation des transactions bancaires
et financières en ligne implique nécessairement un niveau de sécurité, technique et juridique,
élevé (titre 2).

21. La résolution des litiges. Mais encore, gagner la confiance des acteurs du marché bancaire et
financier suppose l’instauration de règles de résolution des litiges (titre 3) adaptées à ce
nouveau support de communication. Il s’agit d’une condition sine qua non du bon
26
Crée par la loi n° 2003-706 de sécurité financière du 1er août 2003, l'Autorité des marchés financiers est issue
de la fusion de la Commission des opérations de bourse (COB), du Conseil des marchés financiers (CMF) et du
Conseil de discipline de la gestion financière (CDGF). Pour une présentation détaillée de l’AMF, nous
renvoyons sur : www.amf-france.org . Il a fallu attendre presqu’un an pour que l’AMF soit dotée d’un
Règlement général qui fût publié par un arrêté du 12 novembre 2004. Sur ce nouveau texte v., LEFEVRE V., Le
Règlement général de l’AMF : un texte en évolution, Revue Banque, février 2005, n° 666, p. 48 ; DE
VAUPLANE H., Publication du nouveau règlement général de l’AMF, Revue Banque, février 2005, n° 666, p.
86.
1ère Partie - La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et le bon fonctionnement du 13
marché

fonctionnement du marché : l’investisseur contractant avec un prestataire d’un autre Etat


membre que le sien doit être rassuré en termes de protection juridique. Le coût de la
résolution judiciaire du litige est souvent disproportionné par rapport à la valeur absolue de ce
dernier. Dans la mesure où les transactions bancaires et financières sont facilitées avec
l’Internet, les modes de résolution des litiges devraient également l’être, d’autant plus qu’une
solution amiable est souvent préférable à un procès coûteux en terme de temps et d’image. Ici,
on se heurte alors à la problématique de la communication « sur » ces modes et réseaux de
résolution des litiges, lesquels restant en réalité peu connus alors même qu’ils jouent un rôle
de premier plan dans la sécurisation des rapports entre les différents acteurs du marché des
services bancaires et financiers.
TITRE 1

LA CLAUSE DE MARCHE INTERIEUR


COMME FONDEMENT DE LA LIBRE
PRESTATION DE SERVICES
BANCAIRES ET FINANCIERS SUR
L’INTERNET
22. Définition. La construction d’une Europe financière repose sur deux piliers : le premier a
pour base le principe de la libre circulation des capitaux tandis que le second correspond à
l’action coordinatrice menée par les autorités communautaires notamment dans le domaine
des services d’investissements ainsi que celui des opérations bancaires et financières. Dans le
cadre de la mise en œuvre de cette liberté de prestation de services, conformément aux articles
44, 47 et 52 du Traité de Rome, les autorités communautaires veillent à la suppression d’une
part, des obstacles discriminatoires et, d’autre part, des réglementations indistinctement
applicables. Aujourd’hui, via l’Internet, cette liberté de prestation de services est assurée par
la clause de marché intérieur issue de la directive 2000/31/CE sur le commerce électronique
du 8 juin 2000.

23. Construction européenne. Dans le domaine bancaire et financier, de nombreuses directives


dites de coordination des législations nationales ont été adoptées. Ainsi, grâce à la
reconnaissance mutuelle des agréments prévue initialement par la deuxième directive bancaire
du 15 décembre 198927, tout établissement de crédit communautaire peut proposer ses services
dans toute la Communauté. De même, les articles L. 511-22 et L.511-2428 du Code monétaire
et financier envisagent notamment la libre prestation par voie de succursale. Par conséquent,
les opérations bancaires et financières « classiques » semblent bénéficier d’un cadre juridique
de la libre prestation de services. Pourtant, l’Internet entraîne une prise de conscience
particulière des institutions communautaires et nationales.

27
Aujourd’hui dans la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 concernant
l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice
28
Dernièrement modifiés par la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, dite de sécurité financière.
1ère Partie : Titre 1 - La clause de marché intérieur comme fondement de la libre prestation des services 15
bancaires et financiers sur l’Internet

24. La logique concurrentielle du marché. En raison de l’objectif d’intégration économique


qu’il se fixe, le marché communautaire semble résolument se construire autour de concepts
fondamentaux et interdépendants, notamment la libre circulation et la libre concurrence. Il se
caractérise également par sa complexité et son évolutivité pour s’adapter sans cesse aux faits
économiques. Ces libertés sont tout à la fois principes directeurs et conditions du bon
fonctionnement du marché. Ainsi l’article 3, g du traité instituant la Communauté Européenne
prévoit l’instauration « d’un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée dans le
marché intérieur ». L’Internet trouve naturellement sa place dans cette logique de libre
concurrence ; le réseau commercial qu’il crée n’est pas seulement communautaire mais
mondial. Réduction des distances entre prestataires et clients, rapidité des transactions : il
apparaît dès lors comme un instrument de la libre concurrence entre les prestataires de
services, a fortiori entre les établissements de crédits. En raison de la facilité de collecte des
informations relatives aux concurrents, de la réactivité accrue des prestataires puis enfin de
l’augmentation des attentes des clients, la concurrence est plus encore exacerbée grâce à
l’Internet. Assurer le bon fonctionnement du marché des prestations bancaires et financières
sur la toile revient donc à garantir le jeu de la libre concurrence entre établissements de crédits
et à supprimer les entraves au commerce en ligne. De plus, il représente un enjeu tel qu’a été
adoptée une directive sur le commerce électronique venant assurer la libre prestation de
services sur l’Internet.

25. La directive commerce électronique. Ainsi, la volonté communautaire d’établir un cadre


réglementaire européen cohérent pour les services de la société de l’information29 (par voie
électronique) s’est traduite par l’adoption de la directive 2000/31/CE du Parlement Européen
et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de
l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (ci-après la
directive sur le commerce électronique). Cette directive est dite horizontale en ce qu’elle ne
concerne pas seulement les services bancaires et financiers, par opposition aux directives dites
verticales propres à ce secteur et ne concernant pas spécifiquement l’Internet.
Particulièrement, l’article 3 de cette directive énonce la clause de marché intérieur et consacre
la libre circulation des services de la société de l’information notamment par voie d’Internet,

29
Toujours dans la même perspective, la Commission européenne a lancé son plan d’action « i2010 » pour
stimuler la croissance de la société européenne de l’information. V. Atelier groupe BNP Paribas, L’Europe fixe
un plan quinquennal pour dynamiser l’économie numérique, 2 juin 2005, disponible sur : www.atelier.fr;
DUMOUT E., Société de l’information : Bruxelles se fixe des objectifs ambitieux pour 2010, 3 juin 2005,
disponible sur : www.zdnet.fr .
1ère Partie : Titre 1 - La clause de marché intérieur comme fondement de la libre prestation des services 16
bancaires et financiers sur l’Internet

(article 3, §2) et soumet ses services à la législation du pays d’établissement du prestataire


(article 3, §1).

26. Problématique. En adoptant cette directive, le législateur communautaire a souhaité favoriser


la libre prestation de services par voie électronique ainsi que le bon fonctionnement du
marché. Au regard de la clause de marché intérieur, deux problèmes peuvent être identifiés :
l’acquis communautaire en matière de services bancaires et financiers est-il remis en cause
(a) ? Et, via l’Internet, dans quelle mesure la liberté de prestation de services bancaires et
financiers s’exerce-t-elle (b) ?

a. La remise en cause des acquis communautaires en matière bancaire et financière

27. Constat. S’agissant des services bancaires et financiers, la spécificité de l’Internet et la


détermination de la réglementation applicable induisent le recoupement de deux catégories de
règles. A ce titre, on remarque que le nombre important de dispositions contraignantes en la
matière crée des incertitudes quant à l’articulation entre, d’une part, l’acquis communautaire
dans le domaine des services financiers en général30 et, d’autre part, les règles31 mises en place
par la directive 2000/31/CE du Parlement Européen et du Conseil du 8 juin 2000 sur le
commerce électronique dans le marché intérieur.

28. Sécurité juridique. Cette articulation suscite, en effet, beaucoup de questions et


d’incertitudes. Or l’on sait que la Cour européenne de Justice considère que « les principes de
sécurité juridique et de protection des particuliers exigent que, dans les domaines couverts
par le droit communautaire, les règles du droit des Etats membres soient formulées de
manière non équivoque qui permette aux personnes concernées de connaître leurs droits et
obligations d’une manière claire et précise et aux juridictions nationales d’en assurer le
respect »32, par conséquent « la législation communautaire doit être certaine et son

30
On pense notamment à la première et deuxième directives bancaires, désormais coordonnées par la directive
2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 concernant l’accès à l’activité des
établissements de crédit et son exercice, ainsi qu’aux directives ayant trait aux services d’investissement
(directive 85/611/CE du Conseil du 20 décembre 1985 portant coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières
(OPCVM) ; directive 93/22/CEE du Conseil du 10 mai 1993, concernant les services d’investissement dans le
domaine des valeurs mobilières). Dans la mesure où il fait l’objet d’une exclusion particulière de la clause
« marché intérieur », nous n’aborderons pas le secteur des assurances.
31
Spécialement l’article 3 relatif à la clause « marché intérieur ».
32
CJCE, 21 juin 1988, Commission/Italie, aff. 257/88, Rec., 3249.
1ère Partie : Titre 1 - La clause de marché intérieur comme fondement de la libre prestation des services 17
bancaires et financiers sur l’Internet

application prévisible pour les justiciables. Cet impératif de sécurité juridique s’impose avec
une rigueur particulière lorsqu’il s’agit d’une réglementation susceptible de comporter des
conséquences financières, afin de permettre aux intéressés de connaître avec exactitude
l’étendue des obligations qu’elle leur impose »33. Par nature, ceci est le cas dans le domaine
des services bancaires et financiers.

b. L’exercice de la libre prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet

29. Ambiguïté. Dans la mesure où le site d’un prestataire issu d’un Etat membre est
automatiquement accessible dans l’ensemble des Etats membres, l’Internet complique
singulièrement la donne traditionnelle dans les services bancaires et financiers, comme
d’ailleurs dans les autres secteurs. Pour autant, si le libre établissement et la libre prestation de
service « classique » impliquent nécessairement une intention d’opérer dans un autre Etat de
la Communauté, l’Internet offre aux prestataires d’un Etat membre la possibilité de contracter
avec des résidents d’autres Etats européens sans l’avoir souhaité (du moins officiellement –
pour exemple, les conditions générales de vente du site Internet de la Caisse d’Epargne34
limitant leur offre aux domiciliés en France).

30. Clarification. Par conséquent, la Commission a été amenée à réagir et à publier une
communication concernant le commerce électronique et les services financiers35. Cette
dernière tente d’apporter des éclaircissements sur la vision de la Commission à propos des
questions et incertitudes ainsi que sur les actions qu’elle entend mener pour résoudre les
divers problèmes ayant été mis au jour. Quoi qu’il en soit, en adoptant cette directive, le
législateur européen opte pour un cadre juridique capable d’assurer la circulation des services
de la société de l’information, tout en précisant qu’il est important « d’éviter la
surréglementation, de se baser sur les libertés du marché intérieur, de tenir compte des
réalités commerciales et d’assurer une protection efficace et effective des objectifs d’intérêts
généraux »36. La difficulté de la tâche consiste donc à préciser les règles visant à assurer la
libre circulation des services tout en bouleversant le moins possible le cadre communautaire
existant. C’est l’objet principal de l’article 3 de la directive « commerce électronique »

33
CJCE, 15 décembre 1987, Commission/Irlande, aff. 239/86, Rec., 5271.
34
Conditions générales de vente consultables sur : www.caisse-epargne.fr.
35
Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen, Commerce électronique et services
financiers, COM (2001) 66, 7 février 2001.
36
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à certains aspects du commerce
électronique dans le marché intérieur, 18/11/1999, COM (1998) 586 final, p. 6.
1ère Partie : Titre 1 - La clause de marché intérieur comme fondement de la libre prestation des services 18
bancaires et financiers sur l’Internet

consacrant la clause dite de « marché intérieur ». Cette dernière, qui doit être considérée
comme le moteur de la directive, fonctionne sur la base du principe du pays d’origine et de la
reconnaissance mutuelle, ceci est assorti d’une série de limites générales et particulières tout
en étant naturellement sous-tendu par un principe de confiance entre les Etats membres,
condition indispensable au bon fonctionnement du marché.

31. Plan. Etant donné les difficultés d’interprétation que présente la clause « marché intérieur »,
une étude approfondie doit être menée. Il s’agira d’envisager la portée de cette clause
(chapitre 1) avant d’en étudier l’impact (chapitre 2).
CHAPITRE 1er
PORTEE DE LA CLAUSE DE MARCHE INTERIEUR

32. Le contexte. L’origine de la clause de marché intérieur est liée au manque de clarté
concernant le cadre juridique existant. En effet, l’Internet dans sa dimension bancaire et
financière notamment, implique la rencontre d’acteurs éloignés physiquement, résidents dans
des Etats membres différents. Se pose alors le problème de leur localisation et par voie de
conséquence celui du droit applicable, tant à la relation contractuelle (mais ce problème n’est
pas résolu par la directive sur le commerce électronique) qu’au prestataire de services
bancaires et financiers (légalité des services qu’il propose). Comme le rappelle la
Commission en 1998, ces services « ne se développent pas dans un vide juridique mais au
contraire sont déjà soumis à une série de réglementations nationales », la question étant de
savoir laquelle s’applique...

33. Les acteurs. Apparaissent ici deux éléments soupesés de la balance européenne, il s’agit
d’assurer un équilibre entre les intérêts contradictoires de deux familles d’acteurs : les
consommateurs d’un côté et les milieux d’affaires de l’autre (les établissements de crédits)
puisque la confiance entre les deux est indispensable au bon développement du commerce sur
l’Internet. Laisser perdurer des incertitudes juridiques pour le prestataire bancaire et financier,
dans un secteur particulièrement réglementé, risquait de poser d’importants problèmes
d’organisation et de développement de son activité et d’engendrer des frais non négligeables
d’analyse juridique.

34. La règle établie. Aux termes de l’article 3 de la directive sur le commerce électronique :
1. « chaque État membre veille à ce que les services de la société de l'information fournis
par un prestataire établi sur son territoire respectent les dispositions nationales
applicables dans cet État membre relevant du domaine coordonné.
2. Les État membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné,
restreindre la libre circulation des services de la société de l'information en provenance
d'un autre État membre ».
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 20

35. La satisfaction des prestataires. Les institutions communautaires ont clairement pris parti en
faveur des prestataires de services qui se voient consacrée la possibilité de proposer leurs
opérations à toute la Communauté sur la base de la loi de leurs pays d’origine. La
communication de la Commission du 7 février 2001 justifiant ce choix rappelle qu’« exiger
d’un prestataire de services financiers qu’il se conforme à quinze régimes juridiques
différents serait excessivement lourd. Si tel était néanmoins le cas, les prestataires de services
financiers se verraient obligés de respecter les exigences propres à chaque Etat membre, ce
qui découragerait les initiatives de commerce électronique couvrant l’ensemble de l’Union
européenne. Les choix proposés à la clientèle en seraient limités et, plus gravement encore,
les prestataires pourraient tendre à privilégier les marchés nationaux les plus importants, au
détriment des Etats membres de plus petite taille. Quant aux consommateurs de l’UE, ils se
reporteraient sur le reste du monde pour leurs transactions électroniques ».

36. Le scepticisme des Etats. Les principes émis ont été bien accueillis par les représentants du
secteur, ils les considèrent en effet comme un impératif pour le développement du commerce
électronique37. De leur côté, certains Etats membres sont toujours sceptiques quant à
l’application de la clause dite de marché intérieur, à tel point qu’au deuxième trimestre 2003,
une sorte de délai de transition (en attendant une harmonisation plus poussée des législations
en matière bancaire et financière) avait été sollicitée et aussitôt rejetée par la Commission au
motif que « la directive sur la commerce électronique offre des garanties suffisantes aux
Etats membres38 ».

37. Problématique. En fin de compte, la balance a penché pour cette fois en faveur du
professionnel et c’est au consommateur qu’il appartient de se renseigner sur la légalité de la
prestation qui lui est proposée. Cette option paraît contestable au regard du degré
d’information du consommateur qui semble être moindre que celui du professionnel. Le
prestataire peut, quant à lui, proposer ses services aux ressortissants des autres Etats membres
à conditions que ceux-ci respectent les lois de son propre pays d’établissement. S’agissant de
créer un cadre juridique cohérent et transparent, ceci pose évidemment un problème de
contrôle de la légalité de ces services. En effet, si le §2 de l’article 3 de la directive sur le

37
Sur les craintes formulées par les organismes de défense des intérêts des consommateurs, cf. Bureau Européen
des Unions de Consommateurs (BEUC), Jurisdiction and applicable law on cross-border consumer contracts, 8
octobre 1999, p. 7-8, disponible sur : http://www.beuc.org/public/xfiles2000/x2000/x019e.pdf.
38
Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et à la Banque centrale européenne,
L’application aux services financiers des articles 3§4 à 3§6 de la directive sur le commerce électronique, du 14
mai 2003, COM (2003) 259 final, 1, p.2.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 21

commerce électronique consacre pour l’Internet, un principe de libre circulation des services,
le §1 semble en attribuer la sauvegarde et le contrôle à l’Etat d’origine. Pour autant, cela veut-
il dire que cet article instaure une règle juridictionnelle pour précisément assurer le respect de
ce principe s’opposant ainsi avec les solutions juridictionnelles déjà en vigueur ? Plus loin, le
principe posé par la clause de marché intérieur est immédiatement assorti d’exceptions
cependant, se pose la question de savoir si elles sont de nature à le remettre en cause car la
problématique globale est bien celle de l’efficience du nouveau dispositif législatif intégré
dans un corpus juridique déjà actif.

38. Les concepts de base. Afin d’énoncer les principes des §§ 1 et 2 de la clause de marché
intérieur, la directive se réfère particulièrement à trois concepts : les services de la société de
l’information (a), le prestataire établi (b) et le domaine coordonné (c). Ces notions, délimitent
le champ d’application de la clause de marché intérieur.

a. Services de la société de l’information : distinction entre prestation de services et


mouvement de capitaux

39. Définition. La notion de « service de la société de l’information » n’est pas définie


directement dans la directive sur le commerce électronique mais seulement par renvoi à
l’article 1er§ 2, de la directive 98/34/CE39, modifiée par la directive 98/48/CE et vu le
considérant 19 de la directive, par référence à l’article 50 du Traité. Ainsi, il s’agit « de tout
service fourni, normalement contre rémunération, à distance au moyen d’équipement
électronique de traitement (y compris la compression numérique) et de stockage de données à
la demande individuelle d’un destinataire de service » et les prestations sont considérées
comme des services « dans la mesure où elles ne sont pas régies par les dispositions relatives
à la libre circulation des marchandises, des capitaux et des personnes ». Cette notion de
services ayant clairement un caractère résiduel40, se pose alors la question de savoir dans
quelle mesure la directive s’applique dès lors que l’on est en présence d’un mouvement de
capital au sens du Traité relevant de la libre circulation des capitaux. Notons d’ailleurs que
l’article 51, § 2 du Traité établit une prééminence des règles relatives à la libre circulation des

39
Directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure
d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de
la société de l’information modifiée par la directive 98/48/CE.
40
V. par exemple CJCE, 4 décembre 1986, Commission c/ Allemagne, C-205/84, Rec., I-1986, p. 3755 et CJCE,
31 janvier 1984, Luisi et Carbone, C-286/82, et 26/83, Rec., I-1984, p. 377.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 22

capitaux sur les règles relatives à la libre prestation de services. Allant plus loin, l’annexe I de
la directive 88/361/CEE du Conseil du 24 juin 1988 établit une nomenclature des
mouvements de capitaux qui vise en réalité la plupart des services financiers (opérations en
compte courant et de dépôts auprès des établissements financiers, prêts et crédits financiers,
cautionnement et autres garanties, transferts en exécution de contrats d’assurances,
mouvements de capitaux à caractère personnel, etc.).

40. Conséquences. L’application combinée des deux catégories de disposition devrait permettre
de suivre une approche identifiant trois hypothèses :
1. Soit il s’agit d’un service bancaire pur et dans ce cas seules les dispositions du Traité sur
la liberté de prestation de services s’appliquent.
2. Soit il s’agit d’une opération impliquant uniquement un mouvement de capital, auquel
cas elle ne peut être considérée comme un service et dès lors seules les règles spécifiques sur
les mouvements de capitaux s’appliquent.
3. Soit l’opération implique un service bancaire lié à un mouvement de capital, et cette
opération doit donc être réalisée au fur et à mesure de la libération des mouvements de
capitaux41.

41. Applicabilité de la directive. Il faudra donc, dans chaque cas d’espèce, vérifier s’il s’agit
d’un « pur » service, auquel cas la directive sur le commerce électronique pourra avoir
vocation à s’appliquer, d’un « pur » mouvement de capital, ne devant alors logiquement pas
s’appliquer ou enfin d’un service lié à un mouvement de capital. La nomenclature précitée
laisse clairement entrevoir la difficulté de la tâche dans la mesure où la plupart des
transactions relèveront bien souvent de la troisième catégorie… Des restrictions qui ne
pourraient être admises au titre de la libre circulation des services en raison de l’application de
la directive sur le commerce électronique risqueraient donc toutefois d’être maintenues au
titre de la libre circulation des capitaux et influer, dès lors, sur le mouvement du service
financier qui sous-tend le mouvement de capital.

41
MOHAMED S., European Community law on the free movement of capital and the EMU, Kluwer Law
International, Stockholm, 1999, p. 183.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 23

b. Le prestataire établi à l’origine de la loi applicable

42. Problèmes posés. Selon l’article 2, point c), de la directive, le prestataire établi s’entend
comme celui « qui exerce d’une manière effective une activité économique au moyen d’une
installation stable pour une durée indéterminée. La présence et l’utilisation des moyens
techniques et des technologies requis pour fournir le service ne constituent pas en tant que
telles un établissement du prestataire ». Cette définition pose au minimum trois problèmes :
1. Tout d’abord, celui de la stabilité de l’installation, notion très délicate dans le monde de
l’Internet.
2. Ensuite, celui d’une activité exercée pour une durée illimitée, ce qui ne coïncide pas
toujours avec l’éventuelle limitation dans le temps des sociétés commerciales.
3. Et enfin, celui de la multiplicité des lieux d’établissement du prestataire.

43. Solutions. Selon le considérant 19 de la directive, il est admis qu’une société constituée pour
une période donnée répond à l’exigence d’activité exercée pour une durée illimitée, et ce
malgré la contradiction in terminis ! Par ailleurs, le lieu d’établissement d’une société
fournissant des services par le biais d’Internet n’est pas le lieu de l’installation technologique
servant de support au site, ni le lieu où celui-ci est accessible mais celui où elle exerce son
activité économique42. Enfin, lorsque le prestataire a plusieurs lieux d’établissement, il est
important de déterminer celui à partir duquel le service concerné est fourni. Lorsque ce
dernier est difficile à identifier, il se trouve être celui au sein duquel le prestataire a le centre
de ses activités43 pour ce service spécifique.

c. Notion de domaine coordonné : les exigences relatives aux services et aux prestataires

44. Champ d’application. Le domaine coordonné détermine les exigences que le prestataire doit
satisfaire en ce qui concerne l’accès à l’activité d’un service de la société de l’information
(SSI), telles qu’en matière de qualification, d’autorisation ou de notification. Doit-on dès lors

42
« Toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné par une entreprise,
indépendamment du statut juridique de cette dernière ou de son mode de fonctionnement », (CJCE, 23 avril
1991, Höfner et Else ; 23 mars 2000, Pavel Pavlov) ; notion indifférente du caractère lucratif ou non de
l’opérateur (CJCE, 25 octobre 2001, Ambulanz Glöckner).
43
C’est-à-dire le lieu où le prestataire effectue ses principaux investissements, où elle possède le siège de ses
affaires ou le centre de ses activités professionnelles, d’où elle administre ses biens et prend ses décisions.
Comp. CJCE, 5 juin 1997, Communauté flamande de Belgique, où la Cour juge sur le visa de la directive
« télévision sans frontière » que le centre des activités d’un radiodiffuseur est celui, notamment, où sont prises
les décisions de programmation.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 24

comprendre par la règle du principe du pays d’origine que son champ d’application inclut non
seulement les dispositions nationales ayant trait aux services, mais également celles qui se
rapportent aux prestataires eux-mêmes ? Cette question est d’autant plus importante que
l’article 3, § 2, prévoit que « les Etats membres ne peuvent, pour des raisons relevant du
domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de
l’information en provenance d’un autre Etat membre », hormis pour les motifs et dans les
conditions restrictives signifiées par le paragraphe 4 du même article. Considérant que le
premier et le second paragraphe de l’article 3 semblent viser essentiellement les services de la
société de l’information et ne font nulle mention du prestataire, la question mérite d’être
posée. Il est toutefois indispensable de relever que les exigences légales concernant le
prestataire bénéficient également de la « clause de marché intérieur » et dans la mesure où le
législateur communautaire a jugé nécessaire de préciser la notion de domaine coordonné en
insérant un point visant spécifiquement les règles ayant trait au prestataire, et non directement
aux services fournis par celui-ci, il y a lieu de donner au texte une interprétation conforme à
cette précision.

45. Les difficultés d’interprétation. La définition des SSI44 pose en outre une question
subséquente : pourrait-on considérer que seules les règles qui s’appliquent quand il y a une
demande individuelle sont concernées par la clause marché intérieur, et que par conséquent
les règles s’appliquant aux prestataires avant cette demande individuelle ne sont pas
affectées ? Cette question n’est pas sans portée pratique en ce qui concerne les services
financiers : il existe, par exemple, des règles qui imposent un agrément avant de pouvoir
commencer une activité, des règles qui régissent l’usage de certains termes protégés, des
règles qui imposent un contrôle préalable des contrats. Pourrait-on considérer que ces
exigences ne relèvent pas de la clause de marché intérieur dès lors qu’elles s’appliquent aux
prestataires avant toute demande individuelle ? Une telle interprétation restrictive ne semble
pas pouvoir être suivie. En effet, la définition du domaine coordonné vise expressément
« l’accès à l’activité d’un service de la société de l’information, telles que les exigences en
matière de qualification, d’autorisation ou de notification » ainsi que « l’exercice de l’activité
de la société de l’information, telles que (…) le contenu du service ». La volonté du
législateur communautaire a, sans conteste, été de donner la définition la plus large possible
du domaine coordonné, sans égard pour les moments où ces règles étaient susceptibles

44
Cf. supra n° 39.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 25

d’entrer en œuvre. Par conséquent, ces règles, dont l’application précède toute demande
individuelle paraissent devoir être interprétées comme ressortissantes du domaine coordonné.

46. Bilan. Le mécanisme de l'article 3 de la directive ne constitue pas une innovation en droit
communautaire. En effet, la technique du contrôle exclusif par l'État membre d'origine
couplée à la reconnaissance mutuelle des contrôles a déjà été utilisée à diverses reprises en
droit communautaire dérivé. On ne peut évidemment imaginer un marché unique décloisonné
si les prestataires de services établis dans un État membre de l'Union européenne sont soumis
à des contrôles nationaux dès qu’ils veulent s'établir ou fournir des services dans d'autres
États membres. Dans ce flou relatif, on constate que le rôle de la coopération entre les
autorités de contrôle d’une part, et de la Commission d’autre part, sera déterminant et devra
conduire à une réflexion plus large sur l’opportunité de formes nouvelles de contrôle n’étant
plus seulement nationales.

47. Illustrations. Ainsi, la réglementation des activités bancaires au sein du marché intérieur
comporte une série de références à cette technique, notamment en matière d'agrément et de
contrôle des établissements bancaires, de services d'investissement dans le domaine des
valeurs mobilières45 ou encore de protection des dépôts46. La directive « télévision sans
frontière » prévoit elle aussi le contrôle exclusif par l'État membre d'origine de l'organisme de
radiodiffusion47. Sans prétendre à aucune exhaustivité, citons encore la directive sur la
signature électronique48 qui recourt partiellement à ce mécanisme.

48. Plan. Si le contrôle exclusif par l'État membre d'origine couplé à la reconnaissance mutuelle
des contrôles n’est pas innovant, il convient cependant d’observer que la clause de marché
intérieur de la directive sur le commerce électronique présente une particularité importante en
ce qui concerne la définition du champ d'application du principe du pays d'origine. Il convient

45
Cf. FERON B. et WOUTERS H., La directive 93/22 concernant les services d'investissement dans le domaine
des valeurs mobilières et son impact sur la loi du 4 décembre 1990, Rev. prat. soc., 1994, pp. 226 et s. et pp. 234
et s.
46
Cf. WILMS W., Les succursales bancaires et les systèmes de protection des dépôts, in Les succursales
bancaires, Cahiers AEDBF, Bruxelles, Bruylant, 1996, pp. 61 et s.
47
Directive 89/552/CEE du Conseil du 3 octobre 1989 visant à la coordination de certaines dispositions
législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de
radiodiffusion télévisuelle. Cette directive a été modifiée par la directive 97/36/CE du Parlement européen et du
Conseil du 30 juin 1997.
48
Directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire
pour les signatures électroniques.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 26

donc, d’en étudier le contenu (section 1). Ce mécanisme n’est pas cependant absolu et peut
faire l’objet de dérogations tant générales que particulières (section 2).

Section 1 : Le contenu de la clause de marché intérieur

49. Plan. L’objet de la clause de marché intérieur est d’établir le principe de la libre circulation
des services de la société de l’information fournis via l’Internet. Ce principe applicable aux
prestations bancaires et financières s’effectuant sur la base du respect de la loi du pays
d’établissement (§1) est le principal acquis de la directive sur le commerce électronique. Ce
dernier soulève un certain nombre de problèmes quant à son articulation avec le corpus
législatif existant en matière bancaire et financière et les règles générales de droit
communautaire. Se pose alors maintenant la question concernant ses conséquences (§2).

§1. La libre prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet

50. Le texte. L’article 3, § 1, énonce que « chaque État membre veille à ce que les services de la
société de l'information fournis par un prestataire établi sur son territoire respectent les
dispositions nationales applicables dans cet État membre relevant du domaine coordonné ».
L’article 3, § 2, indique quant à lui que « les État membres ne peuvent, pour des raisons
relevant du domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de
l'information en provenance d'un autre État membre ». Autrement dit, le principe (A) de la
libre prestation des services bancaires et financiers sur l’Internet reçoit, par-là, un champ
d’application très large (B).

A. Le principe

51. L’utilité du principe. La liberté de circulation des services sur l’Internet est consacrée par la
lettre même de la clause de marché intérieur. Dans la mesure où le principe général de libre
prestation de services et a fortiori en matière bancaire et financière est déjà acquis en droit
communautaire (l’article 3 § 2 de la directive ne fait que répéter dans le contexte particulier
du commerce électronique le principe contenu dans l’article 49 du Traité) la question de son
utilité peut légitimement se poser. De même, la lecture du § 1 de la clause de marché intérieur
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 27

peut surprendre car on envisage difficilement qu’un professionnel exerce en toute illégalité
dans son propre Etat qui, de surcroît, ne le contrôlerait pas. Aussi ce principe ne présente-t-il
pas réellement d’intérêt que dans la mesure où il lui faut régler une contrainte technique :
assurer la légalité d’un site Internet, quel que soit l’Etat à partir duquel on le visionne. En
effet, en raison de la disparité des législations et vu les offres qu’ils proposent, certains sites
apparaîtraient purement et simplement illégaux au regard du droit de cet Etat. Par conséquent,
l’établissement de crédit devrait se conformer à la législation de chaque Etat membre. Et
quand bien même ce prestataire créerait de multiples sites, ses versions illégales seraient
néanmoins accessibles. C’est donc bien la spécificité technique de l’outil Internet qui a
entraîné l’adoption d’une législation communautaire.

52. La question du contrôle. Plus encore, ce principe de libre circulation des services via
l’Internet repose non seulement sur un contrôle de la légalité de la prestation par l’Etat
d’établissement mais aussi, aux yeux de la Commission, sur le principe de la reconnaissance
mutuelle des contrôles effectués par les États d’origine, sur la base de leurs législations
nationales. Il en ressort que cette libre circulation ne peut être effective que sur la base d’une
confiance réciproque entre les Etats. Au-delà de la règle juridique, l’intérêt du principe est
d’imposer cette confiance et donc bien de favoriser le bon fonctionnement du marché.

53. Applicabilité aux services bancaires et financiers. Selon le législateur européen, le contrôle
doit être exercé « à la source » de l’activité pour assurer son efficacité49. Le principe consacré
à l’article 3, § 1 est donc bien d’enjoindre l’État membre d’origine à exercer un contrôle de
légalité. Par son caractère englobant, cette disposition s’applique aux opérations bancaires et
financières réalisés via l’Internet. En d’autres termes les services d’un établissement de crédit
proposés par l’Internet doivent respecter la législation de l’Etat membre au sein duquel ce
prestataire est établi, et c’est à cet Etat qu’incombe le devoir de veiller à cette légalité. Dans le
secteur particulier des services bancaires et financiers s’imposeront a priori toutes les
législations nationales concernant, par exemple, les règles exigeant un agrément avant de
pouvoir commencer une activité ou celles régissant l’usage de certains termes protégés et

49
Cf. le considérant n° 22 : « Le contrôle des services de la société de l'information doit se faire à la source de
l'activité pour assurer une protection efficace des objectifs d'intérêt général. Pour cela, il est nécessaire de
garantir que l'autorité compétente assure cette protection non seulement pour les citoyens de son propre pays,
mais aussi pour l'ensemble des citoyens de la Communauté. Pour améliorer la confiance mutuelle entre les États
membres, il est indispensable de préciser clairement cette responsabilité de l'État membre d'origine des services
(…) ».
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 28

enfin celles requérant un contrôle préalable des contrats. L’article 3, §1 renvoie aux
dispositions nationales applicables dans l’État membre d’origine « relevant du domaine
coordonné ». Il semble donc que le champ d’application du principe du pays d’origine doit
être déterminé sur la base de la définition du « domaine coordonné ».

B. Champ d’application

54. Le domaine coordonné. Selon l’article 2, h, de la directive sur le commerce électronique, il


faut entendre par domaine coordonné : « les exigences prévues par les systèmes juridiques des
États membres et applicables aux prestataires des services de la société de l'information ou
aux services de la société de l'information, qu'elles revêtent un caractère général ou qu'elles
aient été spécifiquement conçues pour eux ».
Le domaine coordonné caractérise des exigences que le prestataire doit satisfaire et qui
concernent :
* L'accès à l'activité d'un service de la société de l'information telles qu’en matière de
qualification, d'autorisation ou de notification.
* L'exercice de l'activité d'un service de la société de l'information, telles que celles
portant sur le comportement du prestataire, la qualité ou le contenu du service en matière de
publicité et de contrat ou enfin sur la responsabilité du prestataire.
La définition du domaine coordonné concerne toutes les exigences générales ou spécifiques
applicables à l’accès et à l’exercice de l’activité d’un service de la société de l’information.
Force est de constater qu’au-delà des seules questions harmonisées par la directive, le
caractère exemplaire de l’énumération contenu à l'article 2, h, i) indique clairement que
l’ensemble du droit matériel applicable à un prestataire pour son activité en ligne 50 est visé.

55. La portée. Selon le législateur communautaire, la portée du domaine coordonné doit être
aussi large que possible (au-delà des seules règles harmonisées par la directive) afin de
garantir un contrôle efficace des activités des prestataires de services de la société de
l’information ainsi qu’une circulation véritablement libre de ces services, tout en évitant que
les États de destination puissent invoquer leurs dispositions nationales sur des questions
n’ayant pas été traitées dans la directive mais s’intéressant néanmoins aux activités des

50
Ibid. Cf. également le considérant n° 21. Contra, FRANCQ S., op. cit., pp. 66-67 (qui estime que la règle du
pays d’origine ne s’applique qu’aux questions harmonisées par la directive). Cette dernière position est
cependant difficilement conciliable avec l’énumération contenue dans l’article 2, h.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 29

prestataires des services de la société de l’information51. Ce champ d'application étendu


constitue incontestablement une particularité marquante du mécanisme de la clause de marché
intérieur de la directive. En effet, on considère généralement que l'imposition de ce type de
clause requiert un degré suffisant d'harmonisation des différents droits nationaux des États
membres. Ainsi le champ d'application de ces clauses est logiquement restreint aux questions
harmonisées par l'instrument communautaire qui les contient52. Dès lors, le choix du
législateur communautaire en faveur d'une définition très large du domaine coordonné peut
aisément s'expliquer. Compte tenu de l'objet limité de la directive53, il n'était évidemment pas
question d'adopter des dispositions afférentes aux activités ne pouvant être considérées
comme des services de la société de l'information. Mais il était par ailleurs tout aussi évident
que des dispositions régissant des activités de type « traditionnel » pourraient s'appliquer de
manière incidente à certains services de la société de l'information présentant un lien plus ou
moins étroit avec les dites activités54. Aussi les divergences entre les législations nationales
régissant des activités traditionnelles risquaient-elles de réduire à néant les avantages
découlant de l'œuvre de coordination communautaire portée par la directive ainsi que de
constituer un obstacle au développement du commerce électronique lié à ces activités. En
outre, les incertitudes affectant le règlement des conflits de lois pouvaient accentuer cette
crainte.

56. L’objectif. Il devenait donc nécessaire de mettre sur pied un régime permettant de limiter,
autant que possible les obstacles à l'usage du commerce électronique par les opérateurs
économiques existants. Compte tenu de l'impossibilité de soustraire les services de la société
de l'information à l'application de toute règle juridique de droit commun, le législateur
européen a choisi le mécanisme de la clause de marché intérieur pour tous les aspects
juridiques afférents à l'activité consistant à fournir des services de la société de l'information y
compris les aspects non harmonisés par la directive.

57. Les limites. Malgré le champ large du domaine coordonné, l’article 2, h, ii, précise toutefois
qu’il ne concerne que les activités en ligne du prestataire de services de la société de
l’information. Les exigences relatives aux biens en tant que tels, à leurs livraisons ou aux

51
A ce sujet v., CRABIT E., « L’univers de la directive sur le commerce électronique », op. cit., p. 9.
52
Cf. la directive sur la signature électronique, article 4, qui limite les effets de sa clause de marché intérieur.
53
Harmonisation de certains aspects juridiques des services de la société de l'information.
54
Tel est le cas, par exemple, d’un site Web assurant la promotion des activités d'un constructeur de voitures,
d’un site Web permettant d'acquérir en ligne un bijou, etc.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 30

services non fournis par voie électronique sont exclues de son domaine d’application55. Cette
exclusion est la conséquence logique de l'objet de la directive qui vise à établir un cadre
juridique pour la libre circulation des services de la société de l'information. Dans la mesure
où la définition de ces services ne couvre pas ces éléments, il s'imposait de les écarter de la
clause de marché intérieur. Cette définition permet d'ailleurs à elle seule d'exclure du champ
d'application de la directive les activités qui ne s'exercent pas en ligne56. Le rappel de cette
exclusion à l'article 2, h, n'était alors pas indispensable. Enfin, il convient de préciser que le
principe du pays d’origine ne s’applique que dans les relations entre États membres. Dans
l’hypothèse où les services de la société de l’information émanant d’un pays d’origine non
membre de la Communauté, la règle de l’article 3, § 1er, n’est pas valable et il sera donc
nécessaire de faire appel au droit international privé pour déterminer la loi applicable57. En
bref, en cas d’atteinte à la législation française et de dommage commis en France, le juge
national appliquera le principe de la lex loci delicti afin d’établir la responsabilité de l’Etat
tiers d’où émane les offres électroniques.

§2. Conséquences et incertitudes induites par la clause de marché intérieur

58. Plan. La technique de la clause de marché intérieur présente l’avantage de permettre aux
opérateurs économiques de développer des services via l’Internet sans rencontrer d’obstacles
juridiques majeurs. En effet, dans la mesure où l’activité en ligne sera en principe régie par le
seul droit matériel du pays d’origine et si l'activité économique traditionnelle est conforme à
la législation du pays d'origine, il est possible d'étendre cette activité par l'usage du commerce
électronique sans contrainte juridique supplémentaire. D’une part, sur ou plutôt par l’Internet,
chacune des législations des Etats membres trouve à s’appliquer concurremment (A), ceci ne
va d’ailleurs pas sans poser un problème d’harmonisation en matière bancaire et financière
(B). D’autre part, la directive fait peser de facto une véritable responsabilité sur le destinataire

55
Cf. le considérant n° 21 précise que « (…) le domaine coordonné ne couvre que les exigences relatives aux
activités en ligne, telles que l'information en ligne, la publicité en ligne, les achats en ligne, la conclusion de
contrats en ligne et ne concerne pas les exigences juridiques des États membres relatives aux biens telles que les
normes en matière de sécurité, les obligations en matière d'étiquetage ou la responsabilité du fait des produits,
ni les exigences des États membres relatives à la livraison ou au transport de biens, y compris la distribution de
médicaments. Le domaine coordonné ne couvre pas l'exercice du droit de préemption par les pouvoirs publics
concernant certains biens tels que les œuvres d'art ».
56
Cf. notamment le considérant n° 18.
57
V. infra n° 73 à propos des exceptions à l’article 3, § 1er.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 31

des services (C). En effet, elle ne consacre pas de règle juridictionnelle soumettant les
services à la loi du pays d’origine (D).

A. Une concurrence réglementaire « à la baisse »

59. L’enjeu. On peut, il est vrai, constater que ce choix législatif, qui s'imposait en vue d'assurer
une libre circulation effective des services de la société de l'information, n'est pas exempt de
dangers : c’est là toute la difficulté de l’article 3. En effet, il pourrait entraîner une
concurrence réglementaire « à la baisse » entre États membres sur les questions non
harmonisées par la directive. Ainsi, par le jeu de la clause de marché intérieur, les prestataires
bénéficient de l'application communautaire de la législation nationale de leur État membre
d'établissement. La concurrence qui en résulte peut amener les États membres à s'aligner sur
les exigences réglementaires les moins contraignantes pour les prestataires de services afin
d'éviter que certains États membres ne puissent offrir aux opérateurs économiques une
législation substantiellement plus permissive influençant par là leurs choix d’établissement.
C’est un risque à ne pas négliger. Il est alors légitime de se poser la question suivante : la
réglementation des services de la société de l'information est-elle suffisamment harmonisée au
niveau communautaire ?

B. La question de l’harmonisation

60. Le manque d’intégration. Certes, la directive sur le commerce électronique constitue une
avancée de premier plan dans l'harmonisation des règles spécifiques aux services de la société
de l'information. Selon les considérants, le législateur européen estime que la directive permet
d'atteindre un « niveau élevé d'intégration communautaire »58 sur « certaines questions
spécifiques qui soulèvent des problèmes pour le marché intérieur »59. La directive crée donc
un cadre juridique qui permet d'assurer la libre circulation des services de la société de
l'information. Néanmoins l’harmonisation reste imparfaite au sein du secteur bancaire et
financier. Il est, à cet égard, intéressant d’étudier l’exemple des comptes rémunérés dont
l’affaire CAIXA BANK a récemment illustré. En effet, contrairement aux Allemands, aux
Néerlandais ou aux Belges qui ont déjà la possibilité de percevoir des intérêts sur comptes, la
législation applicable aux résidents en France (ainsi qu’en Grèce) interdisait la rémunération

58
Considérant n° 4.
59
Considérant n° 6.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 32

de ces derniers. A titre de rappel, la CAIXA BANK avait introduit un système de


rémunération des comptes à vue le 18 février 2002, allant à l’encontre de la règle
traditionnelle du « ni-ni »60 et de l’article L.312-3 du Code monétaire et financier qui avec un
règlement du CRBF du 14 mai 1986 avaient fixé le taux de rémunération de ces comptes à
zéro. S’en est suivi une décision de la Commission bancaire le 16 avril 200261, enjoignant la
CAIXA BANK de cesser ses pratiques. Aussitôt cette dernière a introduit un recours devant le
Conseil d’Etat qui, le 6 novembre 200262 s’est prononcé pour un rejet du sursis demandé,
rejoignant par là la position du commissaire du gouvernement sur la nécessité d’une question
préjudicielle à la CJCE. Par ailleurs, dans l’ordre judiciaire, la Cour de cassation sembla elle
aussi s’opposer à la possibilité d’une telle rémunération, rejetant ainsi un recours formé par
une société contre la décision de refus de sa banque de rémunérer ses comptes à vues63 .
Cependant, de manière ambiguë, la Cour fondait sa décision sur l’absence de convention de
rémunération entre les parties, et non sur la réglementation en vigueur, de sorte qu’il était dès
lors tentant de penser que cette rémunération fut envisageable.

61. Analyse. Au regard du Traité et de son article 47, la question reste de savoir si cette
interdiction est constitutive d’une restriction au principe de libre établissement (accès ou bien
exercice des activités). F. LAMY64, commissaire du gouvernement dans l’affaire précitée,
tend à considérer que cette interdiction de rémunérer les comptes à vue « prive les entreprises
[qui souhaitent s’implanter en France] d’un instrument concurrentiel essentiel qu’est le taux
d’intérêt, pour attirer à elles la clientèle ». Comme le souligne le Professeur T. BONNEAU,
on peut toutefois se demander si « un argument commercial, tiré d’une règle relevant de la
législation économique, peut constituer une restriction au sens de l’article 43 du Traité65 ».
Pourtant cette disposition peut encore être justifiée par des « raisons impérieuses d’intérêt
général »66. Néanmoins, on ne peut que rejoindre cet auteur qui précise au contraire qu’il y va
de l’intérêt des clients de voir leurs comptes à vue rémunérés. De même, on peut douter de la
réelle corrélation entre la facturation du chèque et la rémunération des comptes à vue67. Il en

60
ALFANDARI E., La rémunération des comptes à vue : la fin du « ni-ni » français, JCP E, 2 décembre 2004,
n° 49, p. 1897.
61
LPA, 23 octobre 2002, p.11 ; note IDOT L.
62
CE 6 novembre 2002 : JCP G 2003, IV, 1716, obs. ROUAULT M.Ch ; LPA 6 décembre 2002, p.6, concl.
LAMY F.
63
Cass. com. 3 juin 2003: Juris-Data n°2003-019286 ; JCP E 2004, 289, note FORGUES F. ; JCP E 2004, 736,
§11, obs. STOUFFLET J. ; D. 2003 p.2007.
64
LAMY F., Conclusions à propos de CE, 6 novembre 2002, LPA, n°244, 6 décembre 2002.
65
BONNEAU T., Chronique de Droit Bancaire, Banque et Droit, mars avril 2003, n° 88.
66
LAMY F., Concl. préc.
67
ALFANDARI E., art. préc., p. 1898.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 33

résulte que par voie de libre établissement – par filiale – les organismes de crédit en France et
donc soumis à la loi française, ne peuvent ni proposer une telle rémunération, ni conclure des
conventions la prévoyant. Cependant, dans la mesure où il ne s’agit pas d’une loi de police,
ces mêmes établissements peuvent depuis leur Etat d’origine (l’Espagne par exemple) l’offrir
par voie de libre prestation de services. On peut dès lors en conclure que les établissements de
crédit établis en France sont « désavantagés » dans la course à la clientèle sur l’Internet.

62. Position de la CJCE : la fin d’une exception française. Comme certains auteurs l’avaient
envisagé68, par une décision du 5 octobre 200469, la CJCE prend le contre-pied de la solution
française70. Ainsi sur le visa unique de l’article 47 du Traité, cette dernière met l’accent sur la
gêne créée pour les établissements de crédit et juge l’interdiction absolue de rémunérer les
comptes à vue disproportionnée. Cette décision a pour conséquence de mettre fin à
l’interdiction de rémunération de ces comptes71. Cependant la gratuité des chèques subsiste en
France. Les deux éléments sont donc dissociés et c’est d’ailleurs dans cette voie que la Caisse
d’Epargne72 s’est engagée en proposant la rémunération de ces comptes sans jusqu’à présent
facturer les chèques à ses clients. Pourtant, il est possible de penser que cette décision se
prononce aussi sur la facturation des chèques, dans la mesure où elle condamne les
interdictions absolues et où la gestion de ces comptes entraîne des coûts pour les
établissements de crédit73.

C. Une responsabilité pesant sur le destinataire.

63. Le problème. La directive oriente résolument vers le décloisonnement du marché intérieur.


Alors que l’AMF, dans une recommandation 99-0274, suggère aux sociétés qui choisissent
d’ouvrir un site Internet de promotion et/ou de commercialisation de produits de placement
collectif ou de services de gestion sous mandat, de veiller à ce que leur offre respecte les
règles en vigueur dans les territoires visés, le principe de la loi du pays d’origine dégagé par la

68
T. BONNEAU, Chron. préc.
69
CJCE, 5 octobre 2004 : JCP E 2004, 1520 ; D 2004, act. jurispr., p.2646.
70
FRISON-ROCHE A., Droit de la régulation bancaire, LPA, 4 avril 205, n°66, p.7.
71
Arrêté du 8 mars 2005 relatif à l’abrogation des textes réglementaires interdisant la rémunération des comptes
de dépôt à vue.
72
Qui se vante d’être la première banque à pratiquer une telle rémunération, faisant fi, par-là, du rôle de la
CAIXA BANK.
73
AGUILA Y., Rémunération des comptes à vue, Banque et Droit, mars-avril 2005, n° 100, p.3.
74
Recommandation n°99-02 du 3 septembre 1999, relative à la promotion ou à la vente de placement collectif ou
de services de gestion sous mandat via Internet.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 34

directive commerce électronique permet de ne pas s’en préoccuper. Ainsi, l’application de ce


principe peut soulever des difficultés non négligeables pour le destinataire des services. En
effet, face à une offre d’un établissement de crédit présentée sur l’Internet, il appartient à
l’investisseur de prendre connaissance du contenu d’un droit étranger, au minimum pour
s’assurer de la légalité de l’offre proposée dans l’Etat du prestataire… C’est dire le peu
d’importance qui est ici accordé à la notion de confiance. Aussi à supposer que l’offre soit
irréprochable en terme de légalité, l’investisseur peut-il y souscrire ? En théorie, eu égard à
l’ouverture revendiquée par le marché européen, on ne peut qu’apporter une réponse positive.
En réalité, dans le cadre d’un secteur non encore complètement harmonisé, comme le secteur
bancaire et financier la question peut paraître beaucoup plus complexe juridiquement.

64. L’étendue du problème. Sachant que dans ce domaine, certains services ou pratiques sont
interdits en France alors qu’ils sont légaux dans d’autres Etats membres, l’Internet – mode de
libre prestation de service – permet-il purement et simplement d’avoir accès à des prestations
illégales ? Réciproquement, l’établissement financier, via l’Internet, peut-il ne pas respecter
les lois dites de « police » qui s’imposent à tout prestataire opérant sur le territoire national ?
Une réponse affirmative à cette question n’est pas concevable. Aussi, l’intention de rentrer en
relation avec les internautes d’un autre Etat membre que celui du prestataire est-elle
primordiale pour mettre au jour la nécessité du respect des dispositions impératives de l’Etat
destinataire de l’offre de produits ou de services financiers. Cependant, on peut légitimement
s’interroger sur l’issue des conflits de réglementations, lorsque la législation de l’Etat
destinataire ne peut être qualifiée de loi de police. Le consommateur français assumerait alors
la responsabilité (voire en cas de rupture ou annulation ultérieure d’un contrat) de savoir s’il
peut ou non contracter et souscrire les produits qui lui sont proposés. En effet, par le biais de
la clause de marché intérieur et concernant les aspects précontractuels, l’investisseur se
retrouve soumis aux dispositions en vigueur dans le pays d’origine du prestataire. De cette
façon et sous réserve que l’Etat en question n’invoque l’article 3, § 4 à 6 de la directive75,
relatif à l’intérêt général, le client peut légalement avoir accès à des produits ou services
financiers qui ne lui sont pas proposés (ou à de telles conditions) dans son propre Etat parce
que contraires à sa loi nationale.

75
Cf. infra n° 86 et s.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 35

D. La question de la compétence de juridiction

65. Le principe. En affirmant que les services fournis au moyen de l’Internet sont soumis à la loi
du pays d’établissement, et que ce dernier doit veiller à ce qu’ils respectent les dispositions
nationales, la clause de marché intérieur semble poser deux principes : la compétence
juridictionnelle et la loi applicable. En d’autres termes, la directive règlerait pour les services
de la société de l’information les questions relevant du Règlement communautaire de 200076
pour le juge compétent et de la Convention de Rome77 pour la loi applicable.

66. Les ambiguïtés. La portée de l’article 3, §1, ne s’est pas d’emblée dégagée. En effet, les
travaux préparatoires révélaient les confusions et hésitations des différentes institutions
communautaires, face à ces ambiguïtés (sur lesquelles, par souci de concision, nous ne
reviendrons pas), certains auteurs ont tenté de proposer quelques interprétations de l’article 3,
§1, parfois diverses. Il est généralement admis que cet article ne traite pas de la compétence
des juridictions78. Pour une majorité d’observateur, l’article 3, §1 établit le principe de
l’application de la loi du pays d’origine79. Par contre, la nature incertaine de la disposition de
l’article 3, §1 est à l’origine de vives controverses80. Pourtant, l’article 1, §4 ne laisse planer
aucun doute à ce propos : « la présente directive n’établit pas de règles additionnelles de
droit international privé ».

67. L’absence de règles juridictionnelles. L’article 1, § 4 de la directive sur le commerce


électronique énonce clairement que « la présente directive ne traite pas de la compétence des
juridictions ». Au-delà des controverses théoriques entourant la nature de la disposition de
l’article 3, §1, l’interprétation qui apparaît comme étant la plus fidèle à la volonté du
législateur consiste à considérer que cette disposition impose le contrôle des services de la

76
Règlement communautaire 44/2001 du 22 décembre 2000 relatif à la compétence, à la reconnaissance et à
l’exécution des jugements en matière civile et commerciale, entré en vigueur le 1er mars 2002, remplaçant la
Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 et en adaptant les règles au commerce électronique. Les clauses
attributives de juridiction transmises par voie électronique seront valides.
77
Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles.
78
V. notamment : OLIVIER M. et CAPARROS A., Pays d’origine et consommateur électronique. Défense des
intérêts des entreprises et des consommateurs européens, Gaz. Pal., 1999, n° 321-322, pp. 7-8 ; CRABIT E.,
L’univers de la directive sur le commerce électronique, contribution au colloque L’Internet et le droit, organisé
les 25-26 septembre 2000 par l’Université de Paris I, pp. 4 et s. ; STROWEL A., IDE N. et VERHOESTRAETE
F., La directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique : un cadre juridique pour l’Internet, J.T., 2001,
n° 6000, pp. 135-137 ; FRANCQ S., Internet : un monde sans frontière ? La loi applicable aux contrats conclus
sur Internet, Ubiquité, n° 7, décembre 2000, pp. 57-67.
79
Ibid.
80
Ibid.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 36

société de l’information par le pays d’origine, en application de sa législation nationale pour


toutes les questions relevant du domaine coordonné81. Les arguments en faveur de cette
approche paraissent solides.

68. Les justifications. Cette interprétation semble s’imposer au nom de la cohérence du dispositif
de la directive. D’une part, les exceptions contenues dans l’annexe deviendraient inutiles si
l’article 3, §1 n’affectait pas les règles de conflit de lois du droit international privé. En effet,
dans le cadre de contrats conclus avec les consommateurs et lorsque les parties à un contrat
ont désigné la loi applicable à leurs relations contractuelles, le législateur communautaire n’a
alors aucune raison d’écarter l’application de l’article 3, §1. L’énonciation de ces exceptions
démontre bien que le législateur a voulu préserver les principes régissant les conflits de lois
dans ces deux cas spécifiques82. L’impact de l’article 3, §1 sur le droit international privé est
par conséquent incontestable. D’autre part, la définition du domaine coordonné83 ne trouverait
pas sa place dans un tel contexte. Ainsi, selon Monsieur E. CRABIT84, si l’ajout de l’article 1,
§4 s’explique par des raisons politiques et par la différence de nature entre la disposition de
l’article 3, §1 et les règles traditionnelles de conflit de lois ; en aucun cas il ne peut être vu
comme indiquant que l’article 3 n’affecte pas l’application du droit international privé85.

69. Les applications. Les travaux de transposition de certains États membres vont dans ce sens.
ƒ Au Luxembourg. La loi luxembourgeoise du 14 août 2000 relative au commerce
électronique86 précise, en son article 2, § 4, que « la loi du lieu d’établissement du prestataire
de services de la société de l’information s’applique aux prestataires et aux services qu’ils

81
Cf. supra n° 44 pour cette notion.
82
Cf. considérant n° 55 : « La présente directive ne porte pas atteinte au droit applicable aux obligations
contractuelles relatives aux contrats conclus par les consommateurs. En conséquence, la présente directive ne
saurait avoir pour effet de priver le consommateur de la protection que lui procurent les règles impératives
relatives aux obligations contractuelles prévues par le droit de l'État membre dans lequel il a sa résidence
habituelle ». V. également le considérant n° 56 : « En ce qui concerne la dérogation prévue par la présente
directive pour les obligations contractuelles dans les contrats conclus par les consommateurs, celles-ci doivent
être interprétées comme comprenant les informations sur les éléments essentiels du contenu du contrat, y
compris les droits du consommateur, ayant une influence déterminante sur la décision de contracter ».
83
Art. 2, h.
84
Administrateur principal à la Commission européenne, Direction générale du Marché intérieur.
85
CRABIT E., La directive sur le commerce électronique. Le projet « Méditerranée », RDUE, 2000/4, pp. 798-
799. En ce sens, le même auteur rappelle la suppression des considérants précisant que la directive est sans
préjudice des règles de droit international privé ou ne les affecte pas (ibid., p. 803).
86
Loi du 14 août 2000 relative au commerce électronique modifiant le code civil, le nouveau code de procédure
civile, le code de commerce, le code pénal et transposant la directive 1999/93 relative à un cadre communautaire
pour les signatures électroniques, la directive relative à certains aspects juridiques des services de la société de
l’information, certaines dispositions de la directive 97/7/CEE concernant la vente à distance des biens et services
autres que les services financiers, Mémorial, 8 septembre 2000, p. 2176.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 37

prestent, sans préjudice de la liberté des parties de choisir le droit applicable à leur
contrat ».
ƒ En Belgique. La loi belge du 11 mars 2003 sur certains aspects juridiques des services
de la société de l’information87 indique, en son article 5 de la section : « Principe de libre
prestation de services », que « la fourniture de services de la société de l’information par un
prestataire établi sur le territoire belge doit être conforme aux exigences applicables en
Belgique. La libre circulation, sur le territoire belge, des services de la société de
l’information fournis par un prestataire établi dans un autre Etat membre de l’Union
européenne n’est pas restreinte en raison des exigences applicables en Belgique ou dans
d’autres pays ». Enonçant les dérogations au principe de libre prestation de services, l’article
6 de la même loi précise que « l’article 5 ne s’applique pas : 1° à la liberté des parties de
choisir le droit applicable à leur contrat (…) ».
ƒ En France. L’article 7 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique stipule
notamment que « l’activité définie à l’article 6, lorsqu’elle est assurée par des personnes
établies dans un Etat membre de la Communauté européenne autre que la France, s’exerce
librement sur le territoire national (…) ». Le commentaire des articles 6 et 7 précisant
clairement que le prestataire qui se soumet à la loi de l’Etat membre dans lequel il est établi,
peut exercer librement ses activités sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne.

70. La position de la CE. Enfin, la Direction Générale Marché intérieur de la Commission


européenne soutient avec force cette interprétation de l’article 3, §1 de la directive. Dans sa
récente communication sur le commerce électronique et les services financiers, la
Commission insiste sur l’importance de la clause dite de marché intérieur qui « permet aux
prestataires de services de la société de l’information de proposer leurs services dans toute
l’Union sur la base des règles et règlements appliqués par l’État membre dans lequel ils sont
établis (le pays d’origine) »88. Dans la mesure où c’est cette même Direction générale qui est à
l’origine de la directive et qui in fine en contrôlera la juste transposition89, cette opinion
constitue évidemment un élément de poids.

87
M. B., 17 mars 2003.
88
Communication du 7 février 2001 de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur le commerce
électronique et les services financiers, COM (2001) 66 Final, p. 7.
89
Observons cependant que la décision d'initier une procédure en manquement est une décision politique de la
Commission qui ne peut être prise par la DG Marché intérieur seule.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 38

71. Bilan. Afin de s’intégrer au corpus juridique existant, la directive sur le commerce
électronique choisit de ne pas empiéter matériellement sur la compétence du Règlement de
2000 et de la Convention de Rome. En effet, deux niveaux doivent être distingués : d’une
part, la légalité a priori des services et d’autre part, les aspects contractuels. Les parties
restent libres de choisir la loi applicable à leur contrat et d’insérer une clause attributive de
juridiction. De même, en dehors de choix précis, la directive sur le commerce électronique ne
remet pas non plus en cause les principes de règlement de conflits de lois établis par ces
textes. Le principe étant que la loi applicable est, sauf exception, celle du pays ayant le lien le
plus étroit avec le contrat. Néanmoins, en dehors du cas où le consommateur pourra
revendiquer une protection au titre de sa loi nationale, en matière électronique et en raison de
la dématérialisation de la prestation, le lien étroit sera difficile à caractériser.

72. Incertitudes restantes. En théorie, la directive n’établit pas de règle additionnelle de droit
international privé. Cependant on remarque que la directive sur le commerce électronique
concurrence sur certains points la Convention de Rome, particulièrement en ce qui concerne
la formation du contrat, c’est-à-dire son existence et sa validité de fond (consentement, objet,
cause). En effet, la directive indique que le prestataire doit seulement respecter la loi du pays
d’établissement, faisant ainsi peser de tout son poids la responsabilité de savoir s’il est
possible de contracter sur le destinataire lui-même (si le service ne lui est pas accessible, c’est
qu’il n’a pas la capacité de contracter ou que l’objet du contrat est illicite). Ici il apparaît que
d’un côté, la directive sur le commerce électronique arrête les aspects précontractuels à la loi
du pays d’origine alors que de l’autre, l’article 8, § 1 de la Convention de Rome soumet
l'existence et la validité du contrat ou d'une disposition de celui-ci à la loi qui serait applicable
si le contrat ou la disposition étaient valables soit, en d’autres termes, à la loi avec laquelle le
contrat a les liens les plus étroits. Il conviendrait, dans le cadre d’un conflit, de garder à
l’esprit qu’en matière juridique la convention prévaut sur la directive.

Section 2. Les dérogations à la clause de marché intérieur

73. Des exceptions classiques. La libre circulation du service conforme au droit du pays
d’origine et la reconnaissance mutuelle deviennent « automatiques », sous réserve des
limitations prévues par la directive. Ce principe correspond au mode de fonctionnement du
droit communautaire classique : il y a application de la reconnaissance mutuelle hormis les
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 39

restrictions prévues par le traité et par la jurisprudence de la Cour de Justice. Ici, c’est le
domaine des exceptions issu du traité et de la jurisprudence qui se voit réduit à la portion
congrue dictée par la directive. Ainsi, deux types de dérogations au principe du pays d’origine
sont-ils admis : d’une part, les dérogations générales prévues à l’annexe à laquelle renvoie
l'article 3, §3 (§ 1) et d’autre part, les dérogations particulières rendues possibles en vertu des
§§ 4 à 6 de l’article 3. Ces dernières relèvent du fait de l’Etat destinataire des services
bancaires et financiers tout en étant strictement limitées au cadre des objectifs
communautaires poursuivis (§ 2).

§ 1. Dérogations générales visées à l’annexe

74. Remarque préliminaire. L’exclusion du champ d’application de la clause de marché


intérieur des différents domaines visés à l’annexe n’implique pas automatiquement
l’application du droit du pays de destination et de sa faculté de restreindre la libre circulation
des services en provenance des autres Etats membres. A moins qu’une règle communautaire
particulière ne prévoie l’application du droit du pays de destination90, la règle pour ces
domaines est celle des principes communautaires « traditionnels ». Ainsi celui de la
reconnaissance mutuelle s’applique tandis que la libre circulation peut être soumise au respect
de la législation du pays de destination, pour autant que cette dernière énonce des règles
d’intérêt général et que sur le plan de leur admissibilité (en matière de causalité, nécessité et
proportionnalité), elle respecte les critères fixés par la Cour de justice.

75. La conformité au droit communautaire. Concernant les dérogations générales à la clause


de marché intérieur, le juge devra contrôler, en vertu des règles générales de droit
international privé91, la conformité de la loi déclarée applicable avec le droit communautaire.
Selon le considérant n° 23, cela semble impliquer que les éventuelles restrictions à la libre
circulation des services de la société de l’information devront être jugées au regard des
conditions strictes définies à l’article 3 § 492. Il est toutefois possible de nuancer quelque peu

90
Comme par exemple l’article 44, § 2, de la directive OPCVM, en matière de publicité. Toutefois, même dans
un tel cas, l’application par l’Etat d’accueil de ses dispositions est subordonnée au respect du droit
communautaire général.
91
En ce sens, CRABIT E., L’univers de la directive sur le commerce électronique, op. cit., p. 7.
92
Cf. le considérant n° 23 de la directive qui précise notamment que « les dispositions du droit applicable
désigné par les règles de droit international privé ne doivent pas restreindre la libre prestation des services de
la société de l’information telle que prévue par la présente directive ».
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 40

ce point de vue. En effet, dans la logique de la directive, l'article 3, § 4 ne concerne que les
dérogations spécifiques : le cas d’hypothèses où la clause de marché intérieur s'applique en
principe. Tel n'est pas le cas des domaines visés dans l'annexe à laquelle renvoie l’article 3, §
3. Ce n'est donc pas tant au regard des critères de l'article 3, § 4 mais plutôt en fonction de
ceux posés par la jurisprudence de la Cour de justice que sera évaluée la conformité avec le
droit communautaire de l'éventuelle restriction à la libre circulation, même s’ils sont
identiques.

76. Les restrictions. Par ailleurs, peut-on parler véritablement de restriction à la libre circulation
des services lorsque la loi applicable est désignée en fonction de la volonté (explicite ou
implicite) des parties ? Cette interprétation doit être confirmée mais il est possible de
considérer que le juge ne devrait contrôler l’existence et la légalité d’une éventuelle restriction
à cette liberté seulement dans les hypothèses où la loi du pays de destination du service régit
la situation de manière impérative ou bien lorsque le juge l’appliquerait en vertu des articles 7
(lois de police) ou 16 (exception d’ordre public) de la convention de Rome. L’article 3, § 3
énonce que les §§ 1 et 2 de l’article 3 (principe du pays d’origine et interdiction de toute
mesure restrictive de la libre circulation des services de la société de l’information provenant
d’un autre État membre) ne sont pas applicables aux domaines visés dans l’annexe.

77. Les domaines de l’annexe. L’annexe renvoie ainsi à huit domaines spécifiques :
ƒ les droits de propriété intellectuelle.
ƒ l’émission de monnaie électronique par des institutions couvertes par une dérogation
prévue à l’article 8, § 1er, de la directive 2000/46/CE.
ƒ la publicité afférente à la commercialisation des parts des organismes de placement
collectif en valeurs mobilières.
ƒ les assurances, dans le cas où les directives harmonisant ce secteur ont établi des
règles spécifiques concernant la reconnaissance des agréments et également concernant les
conflits de lois ?
ƒ la validité formelle des contrats créant ou transférant des droits réels sur un bien
immeuble lorsque des exigences formelles impératives sont imposées par le droit de l’Etat
membre où est situé le bien concerné.
ƒ l’autorisation de l’envoi de communications commerciales non sollicitées par courrier
électronique.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 41

ƒ les contrats, dans le cadre où les parties conviennent de déroger à l’application de la


clause de marché intérieur.
ƒ les obligations contractuelles dans les contrats conclus avec les consommateurs.
Dans la mesure où l’ensemble de ces dérogations générales ne présente pas de lien direct ou
indirect avec notre sujet, il semble inutile de commenter les premier et cinquième tirets.
L’émission de monnaie électronique (A), la publicité afférente à la commercialisation des
parts des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (B), les assurances (C),
l’envoi de communications commerciales non sollicitées (D), le droit applicable aux contrats
(E) et les obligations contractuelles dans les contrats conclus avec les consommateurs (F)
seront successivement abordés.

A. L’émission de monnaie électronique

78. Inapplicabilité de l’article 3. La clause de marché intérieur énoncée par l'article 3 de la


directive n’est pas applicable en matière d’émission de monnaie électronique par des
institutions pour lesquelles les États membres auront appliqué une des dérogations prévues à
l’article 8, § 1er de la directive relative à la monnaie électronique93 qui permet l’exemption
d’établissements de monnaie électronique de tout ou partie des dispositions de la directive,
ainsi que des obligations découlant de la directive sur les établissements de crédit94. Ce dernier
instrument prévoit précisément une clause de marché intérieur en vertu de laquelle les
activités d’un établissement de crédit agréé et contrôlé par un État membre (État membre
d’origine) peuvent être librement exercées dans les autres États membres tant par voie
d’établissement de succursales (liberté d’établissement) que par voie de prestation de services
(libre circulation des services)95. Mais l’article 8, § 2 de la directive monnaie électronique
stipule qu’en cas d’exemption accordée conformément à l’article 8, § 1er il sera dérogé au
régime de reconnaissance mutuelle instauré par la directive sur les établissements de crédit.
Dans la mesure où ces instruments prévoient un régime de reconnaissance mutuelle assorti
d’une faculté de dérogation, il était logique qu’un instrument général tel que la directive sur le
commerce électronique respecte ce régime spécifique.

93
Directive 2000/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 septembre 2000 concernant l’accès à
l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces
établissements.
94
Directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 concernant l'accès à l'activité des
établissements de crédit et son exercice.
95
Article 18 de la directive 2000/12/CE, précitée. Cf. également les articles 22, 26 et 27 concernant les pouvoirs
respectifs des pays d’origine et d’accueil.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 42

B. La publicité afférente à la commercialisation des OPCVM

79. La spécificité du régime OPCVM. En vue d’assurer une libre circulation entre les États
membres des parts des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), la
directive 85/611/CEE96 coordonnant les dispositions applicables en la matière comporte une
clause de marché intérieur dont les effets sont limités aux aspects harmonisés par la directive.
L’article 44, § 2 de cette directive précise ainsi que « tout OPCVM peut faire de la publicité
dans l'État membre de commercialisation. Il doit respecter les dispositions régissant la
publicité dans cet État97 ». Le législateur européen a veillé à ne pas porter atteinte à la
cohérence de ce régime spécifique dans le cadre du régime plus transversal de la directive sur
le commerce électronique. Ici également, la clause de marché intérieur est donc écartée.

C. Le secteur des assurances

80. Le régime propre des assurances. Le législateur communautaire a aussi réalisé une
harmonisation minimale en matière d’assurances, « (…) nécessaire et suffisante pour parvenir
à une reconnaissance mutuelle des agréments et des systèmes de contrôle prudentiel, qui
permette l’octroi d’un agrément unique valable dans toute la Communauté et l’application du
principe du contrôle par l’État membre d’origine »98. L’article 5 de la directive 92/49/CEE
prévoit que l’agrément obtenu dans l’État membre d’origine est valable pour l’ensemble de la
Communauté permettant ainsi à l’entreprise titulaire d’y exercer ses activités, que ce soit en
régime de libre établissement ou de libre prestation de services. Néanmoins, compte tenu des
particularités de l’activité concernée99, des mesures spécifiques (de notification notamment)
sont prévues afin d’encadrer le système de reconnaissance mutuelle. Par ailleurs, les
directives 88/357/CEE (art. 7 et 8)100 et 90/619/CEE (art. 4)101 contiennent des dispositions

96
Directive 85/611/CEE du Conseil du 20 décembre 1985 portant coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières.
97
Cf. également le considérant n° 5, qui précise que l’application des règles communes minimales établies par la
directive « constitue une garantie suffisante pour permettre (…) aux organismes de placement collectif situés
dans un État membre de commercialiser leurs parts dans les autres États membres sans que ces derniers
puissent soumettre ces organismes ou leurs parts à quelque disposition que ce soit, sauf celles qui, dans ces
États, ne relèvent pas des domaines régis par la présente directive (…) ».
98
Directive 92/49/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les
directives 73/239/CEE et 88/357/CEE (troisième directive « assurance non vie »), considérant n° 5.
99
Des dispositions similaires sont édictées dans le titre IV de la directive 92/96/CEE du Conseil du 10 novembre
1992, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance
directe sur la vie et modifiant les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE.
100
Deuxième directive 88/357/CEE du Conseil du 22 juin 1988 portant coordination des dispositions
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 43

relatives au conflit de lois. Ici encore, la directive sur le commerce électronique ne pouvait
pas porter préjudice aux régimes spécifiques instaurés dans le cadre de la réglementation
d’activités particulières.

D. L’envoi des communications non sollicitées

81. Liberté de choix concernant l’e-mailing. Concernant les communications commerciales102,


il convient de préciser que la directive ne règle pas la question de l'autorisation de l’envoi des
communications commerciales non sollicitées par courrier électronique. Le législateur
européen a clairement voulu laisser les États membres régler cette question sans que les choix
des uns s’imposent aux autres par le biais de la clause de marché intérieur103 (on pourrait
toutefois discuter de l’opportunité de limiter ces pratiques en vertu des dérogations
particulières permises afin de protéger les consommateurs). Dans la mesure où cette question
est régie par les règles classiques de droit international privé et où les lois protectrices des
consommateurs sont généralement considérées comme des lois de police, il est probable que,
compte tenu de la dérogation à la clause de marché intérieur, ce soit la loi du pays de
résidence du consommateur qui s’applique. Le choix d’intégrer cette dérogation indique bien
que parallèlement à l’imposition d’une clause de marché intérieur, une harmonisation
minimale est requise afin d’éviter un alignement sur les législations les plus permissives ou
encore un recours trop systématique aux dérogations particulières. Peut-on pour autant
considérer que la LEN a pris parti pour le régime de « l’opt in » au sein duquel l’autorisation

législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie,
fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la
directive 73/239/CEE.
101
Deuxième directive 90/619/CEE du Conseil du 8 novembre 1990, portant coordination des dispositions
législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, fixant les dispositions
destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 79/267/CEE.
102
Dans son article 2, f, la directive définit la communication commerciale comme : « toute forme de
communication destinée à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services, ou l’image d’une
entreprise, d’une organisation ou d’une personne ayant une activité commerciale, industrielle, artisanale ou
exerçant une profession réglementée. Ne constituent pas en tant que telles des communications commerciales : -
les informations permettant l’accès direct à l’activité de l’entreprise, de l’organisation ou de la personne,
notamment un nom de domaine ou une adresse de courrier électronique ; - les communications relatives aux
biens, aux services ou à l’image de l’entreprise, de l’organisation ou de la personne élaborées d’une manière
indépendante, en particulier lorsqu’elles sont fournies sans contrepartie financière ».
103
Cf. le considérant n° 30, qui précise que « (…) la question du consentement du destinataire pour certaines
formes de communication commerciale non sollicitée n'est pas traitée dans la présente directive, mais a déjà été
traitée, en particulier, dans la directive 97/7/CE et dans la directive 97/66/CE. Dans les États membres qui
autorisent l'envoi par courrier électronique de communications commerciales non sollicitées, la mise en place
de dispositifs approprié de filtrage par les entreprises doit être encouragée et facilitée. Il faut en outre, en toute
hypothèse, que les communications commerciales non sollicitées soient clairement identifiables en tant que telles
afin d'améliorer la transparence et de faciliter le fonctionnement de tels dispositifs mis en place par les
entreprises (...) ».
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 44

préalable du destinataire est, sauf cas particulier, requise avant l’envoi ? Ici la différenciation
du régime juridique d’envoi de document publicitaire selon le support, numérique (« opt in »)
ou papier (en quelque sorte « opt out » puisqu’il faut manifester son refus) démontre bien la
prise en compte de la spécificité de l’Internet en matière de rapidité et d’efficacité du transfert
des données. La transformation du régime antérieur à la LEN (« opt out »), si elle est justifiée
par la pratique abusive du « spam »104, montre l’incohérence d’un système plus pragmatique
que juridique.

E. Le droit applicable aux contrats

82. L’autonomie de la volonté. La clause de marché intérieur ne prive nullement les parties de
leur faculté de choisir le droit applicable à leurs relations contractuelles. Cette exception
rappelle donc le caractère supplétif de la règle du pays d’origine en matière contractuelle.
Pourtant très claire dans son énoncé, cette disposition connaît quelques difficultés au sujet de
sa mise en oeuvre. En ce qui concerne l’application de la clause de marché intérieur à la phase
contractuelle, nous avons vu qu’elle risquait d’opposer une concurrence aux principes
classiques de droit international, mais qu’elle devrait s’effacer devant la convention.

F. Les obligations contractuelles dans les contrats conclus avec le consommateur

83. La protection des consommateurs. La règle du pays d’origine ne s’applique pas aux contrats
conclus avec les consommateurs. Sur ce point, il est renvoyé au droit commun105, c’est-à-dire
à l’application de la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations
contractuelles106. On peut s’interroger sur la portée exacte de cette dérogation. En effet, le
considérant 56 énonce que, « en ce qui concerne la dérogation prévue par la présente
directive pour les obligations contractuelles dans les contrats conclus par les consommateurs,

104
Le courier indésirable (ou spam) est, selon la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL),
« l'envoi massif, et parfois répété, de courriers électroniques non sollicités, à des personnes avec lesquelles
l'expéditeur n'a jamais eu de contact et dont il a capté l'adresse électronique de façon irrégulière », définition
disponible sur : http://www.cnil.fr/index.php?id=1533 . Pour la lutte contre cette pratique, v. HERBIN C., Les
stratégies de lutte contre le courrier indésirable, 14 avril 2004, disponible sur : www.droit-ntic.com .
105
Le considérant n° 55 rappelle ainsi que « la présente directive ne porte pas atteinte au droit applicable aux
obligations contractuelles relatives aux contrats conclus par les consommateurs. En conséquence, la présente
directive ne saurait avoir pour effet de priver le consommateur de la protection que lui procurent les règles
impératives relatives aux obligations contractuelles prévues par le droit de l'État membre dans lequel il a sa
résidence habituelle ».
106
Sur cette question, nous renvoyons le lecteur au titre 3 de la présente partie.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 45

celles-ci doivent être interprétées comme comprenant les informations sur les éléments
essentiels du contenu du contrat, y compris les droits du consommateur, ayant une influence
déterminante sur la décision de contracter ». Faut-il en déduire que la dérogation couvre non
seulement le contrat en lui-même mais également les aspects précontractuels ? Plusieurs
éléments peuvent en réalité être avancés pour ou contre une telle interprétation.
- Concernant les dérogations au principe du pays d'origine, il pourrait tout d'abord être
soutenu que les dispositions de l'annexe sont de stricte interprétation. Ceci irait fatalement à
l'encontre d'une inclusion du domaine précontractuel dans le champ de l'exception relative
aux contrats de consommation107.
- On peut toutefois se demander si l'harmonisation partielle des règles régissant la phase
précontractuelle (obligations d'information en particulier) est suffisante pour pouvoir s'en
remettre au principe du contrôle par le pays d'origine dans une matière aussi sensible que celle
des contrats de consommation. Ainsi, l'absence d'harmonisation de la notion d'offre pourrait
poser problème dans le contexte de l'application de la clause de marché intérieur. En effet, à
défaut de règles communes imposées par la directive, il existe un risque de glissement vers les
standards législatifs les plus favorables aux prestataires de services. Cet élément semble
devoir plaider pour une interprétation large de l'exception.

84. Une interprétation restrictive. Néanmoins, deux autres éléments devraient conduire à
privilégier une interprétation restrictive de l'exception relative aux « obligations
contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs ».
Premièrement, il convient de considérer la cohérence interne du dispositif de la directive. En
effet, l'article 3, § 4 permet aux États membres d'adopter des mesures spécifiques restrictives
de la libre circulation des services de la société de l'information, notamment lorsque les
objectifs de protection du consommateur sont menacés. Si la dérogation de l'annexe relative
aux contrats conclus par les consommateurs couvrait également les aspects précontractuels et
compte tenu de leurs portées générales, la possibilité de dérogations spécifiques offerte aux
États membres par l'article 3, § 4 n'aurait alors aucune raison d'être. Une interprétation
restreignant le champ de la dérogation portant sur les contrats conclus par les consommateurs
aux seuls aspects contractuels permet de préserver la cohérence de la directive.

107
En ce sens, v. PILETTE A.: La directive commerce électronique: un bref commentaire, A. et M., 2001/1,
p. 37.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 46

Deuxièmement, la réalisation des objectifs de la directive repose en grande partie sur le


mécanisme de la clause de marché intérieur108. Il conviendrait donc de jouer le jeu de la
directive en donnant plein effet à la clause de marché intérieur et dès lors d'éviter la tentation,
qui pourrait apparaître chez certains adversaires de la logique d'intégration portée par la
directive, d’exploiter la moindre faiblesse rédactionnelle de la directive en vue d'en interpréter
les dispositions dans un sens limitant la portée de la clause de marché intérieur.

85. Bilan. Il semble donc que cette dérogation ne couvre que les questions contractuelles109. En
outre, comme l’indique Monsieur E. CRABIT, en visant spécifiquement les « obligations
contractuelles », le législateur a manifesté sa volonté de préserver l’application de l’article 3
pour des questions telles que la capacité des parties ou la validité formelle des contrats (sauf
en matière immobilière dans les cas prévus par l’annexe)110.

§ 2. Les dérogations du fait de l’Etat destinataire et les objectifs


communautaires

86. L’intérêt des Etats. Le texte de la directive sur le commerce électronique permet également à
la clause de marché intérieur d’être écartée si des circonstances particulières tenant à la
préservation d’intérêts essentiels de l’État destinataire du service de la société de
l’information, le justifient. Ces dérogations doivent être soigneusement analysées. En effet, on
comprend aisément le risque que représentent ces dérogations particulières pour le principe de
libre circulation des services qui pourraient rapidement couvrir certaines mesures en réalité
protectionnistes. Dans le domaine particulier des services bancaires et financiers, au cours des
négociations de la directive 2002/65/CE sur la commercialisation à distance des services
financiers, les Etats membres ont exprimé des inquiétudes à propos de l’application de la
clause de marché intérieur, et à cet effet certains Etats ont considéré que, dans l’attente d’une
convergence plus poussée dans certains domaines (règles de conduite pour les services
d’investissement et les fonds non harmonisés notamment), ils devraient encore pouvoir
imposer leurs règles aux services entrant par voie électronique. Ainsi au sein d’une

108
Cf. notamment PILETTE A., op. cit., p. 36.
109
En ce qui concerne le considérant 56, celui-ci devrait être lu comme se référant aux règles d'information
présentant un lien étroit avec le contrat. Tel sera le cas lorsque la loi régissant le contrat impose l'information du
consommateur sur certains aspects de la relation contractuelle. En pareille circonstance, il serait en effet absurde
que la loi du pays d'origine régisse l'information préalable sur des points qui sont couverts par la loi du contrat.
110
CRABIT E., La directive sur le commerce électronique. Le projet « Méditerranée », op. cit., p. 797.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 47

communication au Conseil, au Parlement européen et à la Banque Centrale européenne du 14


mai 2003, la Commission précise l’application aux services financiers des articles 3, §4 à 3,
§6 de la directive sur le commerce électronique.

87. L'injonction/interdiction. Rappelons que l'article 3 de la directive sur le commerce


électronique repose principalement sur le double mécanisme de l'injonction/interdiction :
d’une part, injonction à l'encontre de l'État membre d'origine d'assurer le respect de sa
législation nationale par les prestataires établis sur son territoire, et d’autre part, interdiction
aux États membres de réception d'entraver la libre circulation des services de la société de
l'information fournis par des prestataires établis dans d'autres États membres. Si la logique
d'intégration communautaire tend à l'abolition des frontières au sein du marché intérieur et
dans la mesure où la mise à l'écart des réglementations nationales des États membres de
destination contraires à la libre circulation n'est pas toujours compensée par une
réglementation au niveau communautaire111, celle-ci peut cependant conduire de manière
incidente à une certaine déréglementation. C’est la raison pour laquelle, en vue de garantir la
défense de l'intérêt général, des exceptions en faveur de la compétence de l'État d'origine sont
tolérées.

88. Plan. A cet égard, l'article 3, § 4 de la directive sur le commerce électronique est visiblement
calqué sur la jurisprudence de la Cour de justice en matière d'exigences impérieuses (C). Cette
disposition prévoit en outre une procédure préalable de notification (B). Différentes
conditions doivent, en effet, être observées afin que les mesures adoptées par l’État de
destination puissent être considérées comme une dérogation licite au principe, et non comme
une entrave injustifiée à la libre circulation des services de la société de l’information. Ceci
nous conduit à analyser le champ d’application de cet article (A).
Selon l’article 3, § 4 les mesures doivent être :
ƒ nécessaires pour une des raisons suivantes :
l’ordre public112,
la protection de la santé publique,
la sécurité publique, y compris la protection de la sécurité et de la défense nationales,

111
A ce propos, v. BERNARD N., La libre circulation des marchandises, des personnes et des services dans le
traité CE sous l'angle de la compétence, CDE, 1998, pp. 12 et 25-31.
112
L’article 3, § 4, précise la notion d’ordre public en visant « en particulier la prévention, les investigations, la
détection et les poursuites en matière pénale, notamment la protection des mineurs et la lutte contre l'incitation
à la haine pour des raisons de race, de sexe, de religion ou de nationalité et contre les atteintes à la dignité de la
personne humaine ».
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 48

la protection des consommateurs, y compris des investisseurs113,


ƒ prises à l’encontre d’un service de la société de l’information qui porte atteinte aux
objectifs précités « ou qui constitue un risque sérieux et grave d’atteinte à ces
objectifs »,
ƒ proportionnelles à ces objectifs.
En pratique, la difficile réunion de ces différentes conditions aura probablement pour
conséquence que ces dérogations particulières ne seront possibles que dans des cas
exceptionnels.

A. Analyse de l’article 3, §4

89. La protection des investisseurs. Outre les motifs couverts par l'article 46 du Traité (ordre
public, sécurité publique et santé publique) l'article 3, §4 limite l'autorisation de porter atteinte
à la libre circulation des services à un seul objectif : la protection des consommateurs y
compris des investisseurs. Notons tout d’abord que la directive sur le commerce électronique
définit le consommateur comme « toute personne physique agissant à des fins qui n'entrent
pas dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale ». Il ressort donc du texte
qu'une personne morale ne peut être considérée comme « consommateur ». Ensuite, la notion
d’investisseurs n’est pas définie, mais le libellé de l'article indique clairement que seuls ceux
entrant dans la définition du « consommateur » sont concernés. Toute mesure concernant des
investisseurs personnes morales ou des particuliers agissant dans le cadre de leur profession
n'entrent pas dans le champ de l'article 3, §4114.

90. L’ampleur du risque. La cour a jugé que le secteur des assurances115 et le secteur bancaire116
constituaient un domaine particulièrement sensible du point de vue de la protection des
consommateurs. Ainsi, les mesures peuvent aussi être prises lorsqu'il existe un risque sérieux
et grave de porter atteinte à l'un des objectifs ci-dessus. Le libellé de l’article 3, § 4 présente
par ailleurs une ambiguïté quant à la portée de la faculté de dérogation. En effet, en autorisant
les États membres à prendre des mesures dérogatoires à la clause de marché intérieur vis-à-vis

113
Ce point intéresse particulièrement le sujet de cet ouvrage car il devrait permettre à un Etat membre de
prendre des mesures en vue d’assurer la protection de l’investisseur, et de tempérer ainsi les effets de la clause de
marché intérieur.
114
CJCE 22/11/2001, C541/99 Cape et Idealservice MN RE – Rec. 2001 p. I 9049.
115
CJCE 04/12/1986, 205/84 Commission c/ Allemagne Rec. 1986 p. 3755.
116
CJCE 09/07/1997, C222/95 SCI Parodi c/ Banque H. Albert de Bary et Cie – BICC 457 15/09/1997 ; Rec.
1997 p. I 3899.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 49

« d’un service donné de la société de l’information », il n’est pas certain que le législateur
européen ait exclu la possibilité d’adopter des mesures de portée générale affectant une
catégorie déterminée de services. L’exclusion des mesures de portée générale aurait été claire
si le législateur avait uniquement permis les mesures à l’encontre d’un prestataire donné.
Dans le doute, l’exception devrait cependant s’interpréter restrictivement. De plus, la logique
de la clause de marché intérieur voudrait que les dérogations ne puissent être adoptées qu’au
cas par cas, et non par le biais de mesures générales. L’ajout du terme « donné » indique aussi
une approche individuelle plutôt que générale. Enfin, la jurisprudence de la Cour de justice
dont s'est largement inspiré le législateur communautaire ne permet pas à un État membre
« d'exclure de façon générale que certains services puissent être fournis par des opérateurs
établis dans d'autres États membres », car cela reviendrait à supprimer la libre prestation de
services117. L’article 3, § 4 devrait dès lors ne permettre que des dérogations de portée
particulière, excluant ainsi celles de portée générale118 119.

91. Le refus des mesures générales. Cette analyse est d’ailleurs confirmée par la communication
de la Commission du 14 mai 2003 qui en propose un exemple : « il pourrait s’agir d’une
mesure, comme un avertissement ou une astreinte, prise par un pays de destination à l’égard
d’une banque proposant, à partir de son site situé dans un autre pays de l’Union Européenne,
des services d’investissements non harmonisés aux résidents du pays en question. Ces
mesures pourraient, par exemple, être prises au motif que la banque ne respecte pas certaines
règles de conduite destinées, dans le pays de destination, à protéger le consommateur ». Il en
ressort clairement que dans le cadre de l’article 3, §4, l’Etat membre de destination ne peut
pas prendre de mesures générales.

117
CJCE, 16 déc. 1992, aff. Commission c./ Belgique, C-211/91, Rec., 1992, p. I-6757, pt. 12.
118
Cf. CRABIT E., « L’univers de la directive sur le commerce électronique », op. cit., p. 22 (selon qui « les
États membres peuvent prendre des mesures à l’encontre d’un prestataire de services donné établi dans un autre
État membre (dérogations au cas par cas) si elles poursuivent une des quatre raisons spécifiées (…) et si elles
respectent certaines conditions de fond et de procédure (article 3, §§ 4 à 6) »).
119
Ceci étant dit, les États membres conservent la possibilité d'adopter des mesures de portée générale, mais
alors dans le respect des exigences de la directive sur la transparence réglementaire, qui prévoit elle-même une
procédure de notification et de consultation précédant l'adoption de toute réglementation nationale régissant les
services de la société de l'information : directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 juillet
1998 portant modification de la directive 98/34/CE prévoyant une procédure d’information dans le domaine des
normes et réglementations techniques.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 50

B. Procédure de l’article 3, §4

92. La démarche. Dès lors, en cas de prise de mesures par un Etat destinataire, celui-ci doit aux
termes de l’article 3, §4 b :
- avoir demandé en vain à l'Etat membre d'établissement du prestataire de prendre des
mesures,
- avoir notifié à la Commission et à l'Etat membre d'établissement son intention de
prendre de telles dispositions.

93. Notification préalable et cas d’urgence. L'Etat membre d’établissement doit donc avoir été
informé et sommé de régler le problème à son niveau. La notification à la Commission doit
lui permettre de mettre en œuvre les compétences qu'elle tient de l'article 3, §6. Il n'est prévu
aucun délai à ce propos, mais l'article 19, §3 précise que les Etats membres doivent fournir
assistance et informations dans les « plus brefs » délais. Cette procédure de notification
n'empêche donc pas les autorités compétentes des États membres de destination des services
de la société de l'information d'entreprendre toute procédure préalable d'enquête ou
d'investigation en vue de détecter et le cas échéant, sanctionner les infractions pénales120. Il
convient enfin de préciser qu’il ne s’agit pas d’une simple notification formelle mais plutôt
d’une véritable demande impliquant que l’État de destination doit effectivement laisser à
l’État membre d’origine la possibilité de réagir121. L’Etat membre de destination peut prendre
toutes les mesures nécessaires sans notification préalable, pour autant qu’il informe la
Commission et l’État d’origine dans les plus brefs délais des mesures adoptées ainsi que des
raisons ayant justifié l’urgence (art. 3 § 5).

94. La préservation des objectifs communautaires. Ayant pris conscience de la nécessité de


protéger – dans le cadre de l'action communautaire –, certains objectifs qui pourraient être
affectés par la réalisation du marché intérieur, la Cour de justice a développé une
jurisprudence autorisant dans certaines limites le maintien de mesures restrictives de la libre
circulation adoptées par les États membres122. Ces derniers peuvent adopter et maintenir des
dispositions restreignant le principe de la libre prestation de service, pour autant qu’elles

120
Cf. le considérant n° 26.
121
A ce propos, cf. CRABIT E., La directive sur le commerce électronique. Le projet « Méditerranée », op. cit.,
p. 791.
122
HATZOPOULOS V., Exigences essentielles, impératives ou impérieuses : une théorie, des théories ou pas de
théorie du tout ?, RTD eur., 1998, pp. 194-196.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 51

respectent quatre conditions. L’article 3, §6 doit être examiné au regard non seulement du
paragraphe 4, mais aussi sur la base de cette jurisprudence.

C. Analyse de la jurisprudence de la CJCE

95. Conditions. Si l'on se base sur la jurisprudence constante de la CJCE123, les mesures
nationales qui portent atteinte à l'exercice d'une liberté garantie doivent remplir quatre
conditions pour échapper à la sanction des juges :
- elles ne doivent pas être discriminatoires (a),
- elles doivent être justifiées par des raisons d'intérêt général (b),
- elles doivent être de nature à remplir l'objectif poursuivi par l'Etat de respecter la
primauté du droit communautaire dérivé (c),
- elles doivent être strictement limitées et proportionnelles au but poursuivi 124(d).
Les mesures prises par les Etats membres destinataires à l’encontre de services bancaires et
financiers entrants seront donc examinées à travers le prisme de ces quatre conditions.

a. Des mesures non discriminatoires

96. Définition. Brièvement, la Cour définit la discrimination comme une « application de règles
différentes à des situations comparables, ou l'application d'une même règle à des situations
différentes »125. Elle se fonde sur des éléments objectifs. Cela signifie que les mesures
restrictives ne peuvent constituer une discrimination basée sur la nationalité du prestataire ou
sur la circonstance qu'il serait établi dans un autre État membre126. Des mesures nationales
discriminatoires sont en effet contraires à la lettre du Traité et ne peuvent être tolérées que
dans le cadre limité des exceptions expressément prévues par le Traité lui-même127. La
discrimination reste toutefois assez rare dans les services financiers, néanmoins il ne faut pas
exclure certaines possibilités.

123
CJCE 30/11/1995, Gebhard, Rec.1995, p.I-4165.
124
Cf. notamment FALLON M., Droit matériel général des Communautés européennes, Bruxelles, Bruylant,
1997, p. 159.
125
CJCE 27 juin 1996, Asscher, Rec.1996, p.I-3089.
126
CJCE, 25 juillet 1991, aff. Commission c./ Pays-Bas (Mediawet), Rec. 1991, p. I-4069, pt. 14.
127
Ibid., pt. 15. V. également HATZOPOULOS V., op. cit., p. 198.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 52

b. Des mesures poursuivant un but d'intérêt général

97. L’intérêt général. Les mesures nationales portant atteinte à la libre prestation de services
doivent être justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général128. On notera qu’au fil du
temps et de la jurisprudence de la Cour de justice, les mesures admises au titre de l’intérêt
général se sont diversifiées129. La Commission, jugeant qu’il s’agissait d’une source de dérive
néfaste à la réalisation du marché intérieur130 et après avoir tenté à plusieurs reprises de limiter
l’application de cette jurisprudence131, a décidé de porter un coup d’arrêt à celle-ci. Il
apparaîtra plus loin que la directive renverse donc cette tendance en limitant strictement les
raisons pour lesquelles une mesure dérogatoire est désormais admise. Ainsi, les raisons tenant
par exemple à la réputation du secteur, à la loyauté des transactions commerciales et à la
cohérence fiscale pourtant conçues par la Cour de justice comme relevant de mesure d’intérêt
général, sont – avec la directive commerce électronique – désormais exclues. L'intérêt général
est donc contrôlé strictement, la communication de la Commission du 14 mai 2003 précise
d’ailleurs à ce sujet que la mesure doit relever de la liste exhaustive établie par l'article 3, §4.

c. Des mesures respectant le droit communautaire dérivé

98. La primauté du droit dérivé. En effet, les mesures nationales ne peuvent être en
contradiction avec les dispositions d'une directive ou d'un règlement132. Le principe de la
primauté du droit communautaire joue dans tous les domaines de compétence mixte. L'action
unilatérale des États membres ne pourra être tolérée « que dans la mesure et aussi longtemps
que la législation communautaire fait défaut »133.

128
CJCE, 25 juillet 1991, préc., pts. 17 et 18. Pour une énumération des intérêts retenus par la jurisprudence, cf.
HATZOPOULOS V., op. cit., pp. 200-201.
129
V. Commission européenne, La libre circulation des services : Guide de la jurisprudence de la Cour de Justice
des CE relative aux articles 59 et suivants du Traité, Action Robert Schumann, OPOCE, 1er janvier 1997.
130
Exposé des motifs de la directive sur le commerce électronique, pp. 7 et 8.
131
V. notamment les communications interprétatives de la Commission sur la liberté de prestation de services et
l’intérêt général dans la deuxième directive bancaire (SEC (97) 1193 du 20 juin 1997) ainsi que dans le secteur
des assurances (C (99) 5046 du 2 février 2000).
132
FALLON M., Droit matériel général des Communautés européennes, op. cit., p. 159.
133
HATZOPOULOS V., op. cit., p. 203. Dans le même sens, v. HUGLO J.-G., « Liberté d'établissement et libre
prestation de services : chronique (juillet 1997-juillet 1998) », RTD eur., 1998, p. 580.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 53

d. Des mesures nécessaires et adéquates

99. Conditions d’application. Le critère de nécessité peut lui-même être décomposé en deux
éléments : la pertinence ainsi que le caractère indispensable des mesures nationales134.
i) Les mesures nationales doivent être pertinentes, c'est-à-dire qu'elles doivent présenter
un lien de causalité avec l'objectif poursuivi. La Commission devra donc contrôler si le
régime juridique existant dans le pays d'origine répond aux attentes de l'Etat destinataire. Si
tel est le cas, l’objectif est déjà rempli par la législation de l’Etat d’origine (non duplication
des mesures). Ainsi, un des buts communautaires majeurs est d’harmoniser certains secteurs
et il est probable que par là, on aboutisse à une véritable concurrence, voire confrontation des
législations des Etats membres dont la « minimale » – au sens communautaire – ressortira
nécessairement vainqueur.
ii) Les mesures nationales doivent également être indispensables, c’est-à-dire que,
comme l’a souligné la Cour, les mesures doivent être propres « à garantir la réalisation de
l’objectif qu’elles visent et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu’il soit atteint;
en d'autres termes, il faut que le même résultat ne puisse pas être obtenu par des règles moins
contraignantes »135. Cela signifie, notamment, que les mesures nationales ne peuvent faire
double emploi avec des dispositions du droit de l’État d’origine des services, qui
permettraient d’atteindre les objectifs poursuivis. En ce sens, le principe de reconnaissance
mutuelle constitue donc le fondement du principe de proportionnalité136. Les mesures
nationales doivent être relatives au but poursuivi, c’est-à-dire que même si elles sont
nécessaires et indispensables, elles ne peuvent être tolérées si elles provoquent des
désagréments disproportionnés par rapport à l’objectif qu’elles permettent d'atteindre137. Dans
son arrêt du 9 mars 2000, Commission c/ Belgique, la Cour juge ainsi que : « En exigeant de
toutes les entreprises qu'elles remplissent les mêmes conditions pour l'obtention d'une
autorisation ou d'un agrément préalable, la législation belge exclut qu'il soit tenu compte des
obligations auxquelles le prestataire est déjà soumis dans l'Etat membre dans lequel il est
établi. » Dès lors, si l'Etat de destination impose ses propres règles de conduite à un service
d'investissement fourni à l'un de ses résidents, la Commission examinera si les règles de l'Etat
d'origine ne sont pas équivalentes. Ces mesures peuvent être recherchées dans la législation

134
En ce sens, VAN GERVEN W., Principe de proportionnalité, abus de droit et droits fondamentaux, J.T.,
1992, p. 305.
135
CJCE, 25 juillet 1991, préc., pt. 19.
136
HATZOPOULOS V., op. cit., p. 207.
137
W. VAN GERVEN, op. cit., p. 305.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 54

des Etats membres au sein desquels des dispositions moins restrictives peuvent servir de
source de proposition.

100. Les mesures protectionnistes. Compte tenu du fait que l'information constitue une exigence
principale de protection des consommateurs, un Etat membre imposant des règles qui limitent
l'accès de ces derniers à certaines informations ne peut invoquer la protection des
consommateurs pour se justifier138. L'Etat membre ne doit pas sous-estimer la capacité de
jugement de l’utilisateur normalement informé et raisonnablement avisé. En effet, sous
couvert de cet objectif, les mesures envisagées servent souvent à protéger le marché national.
Nous pouvons d’ailleurs constater que le législateur a anticipé ce fait dans la directive
2002/65/CE concernant la commercialisation à distance de services financiers en instaurant
un socle de base définissant la règle minimum à respecter : à chaque fois que cette dernière
sera suivie par l’Etat d’établissement, l’Etat destinataire ne pourra invoquer un manque de
protection du consommateur. Sur ce point, la Cour estime le besoin de protection en fonction
des services en cause. Ainsi, dans le domaine des services bancaires, elle juge qu’ « (…) une
distinction doit être faite selon la nature de l'activité bancaire en cause et du risque encouru
par le destinataire de service. Ainsi, la conclusion d'un contrat de prêt hypothécaire présente
pour le consommateur des risques différents de ceux du dépôt de fonds auprès d'un
établissement de crédit. Or à cet égard, la nécessité de protéger l'emprunteur varie en
fonction de la nature des prêts hypothécaires, étant observé que, dans certaines situations, en
raison précisément des caractéristiques du prêt octroyé et de la qualité de l'emprunteur, il n'y
a aucun besoin de protéger celui-ci par l'application des règles impératives de son droit
national. » 139

101. Conséquences. La décision de la Commission s'impose à l'Etat qui doit, en cas de non-
conformité de sa mesure avec les dispositions de l'article 3, s'abstenir de l’appliquer ou y
mettre fin immédiatement. A l'inverse, si la mesure est jugée compatible avec le droit
communautaire, l'Etat membre pourra poursuivre (ou entamer) l'exécution de celle-ci à
l'encontre de l'entreprise communautaire en cause.

102. Les exigences impérieuses. Se pose donc la question de l'impact du dispositif de la directive
sur le commerce électronique quant à la possibilité pour les États membres d'invoquer la

138
CJCE, , 7 mars 1990, GB-INNO-BM, Rec .1990 p . I-667.
139
CJCE, 9 juillet 1997, Parodi, Rec.1997, p.I-3899.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 55

jurisprudence relative aux exigences impérieuses dans le but de justifier l'application de leurs
législations nationales aux services de la société de l'information fournis par des prestataires
établis dans d'autres États membres. La réponse à cette question pourrait se trouver au cœur
de la jurisprudence de la Cour qui impose pour maintien licite de mesures restreignant la libre
circulation, le respect de la primauté du droit communautaire dérivé. Sur la base cette
jurisprudence, il conviendrait de faire une distinction en fonction du degré d'harmonisation140.
Mais la directive sur le commerce électronique présente une particularité importante par
rapport à celle nommée « télévision sans frontière »141 à l’égard de laquelle la Cour a
essentiellement eu l’occasion de développer sa jurisprudence : sa définition très large du
« domaine coordonné » englobant nombre de questions sur lesquelles le dispositif de la
directive n'opère aucune harmonisation. S'il est patent que le « domaine coordonné » par la
directive sur le commerce électronique n'est pas, loin s'en faut, complètement harmonisé par
cette directive, il est cependant difficile de nier l'existence d'une réelle et importante
intervention communautaire qui s’est faite par le biais de l'imposition d'une clause consacrant
la compétence de principe de l'État membre d'origine. Dès lors, selon les critères posés par
cette jurisprudence, les éventuelles mesures nationales restreignant la libre circulation des
services de la société de l'information ne devraient pouvoir être licitement maintenues que
dans la mesure où elles ne vont pas à l'encontre de cette intervention du législateur
communautaire. Il semble donc difficile d'admettre des restrictions à la libre circulation en
dehors des hypothèses limitativement prévues par le dispositif de la directive142. La
circonstance que la jurisprudence relative aux exigences impérieuses constitue une exception
à une des libertés fondatrices du marché intérieur devrait également plaider pour une approche
restrictive.

103. La réserve de fraude. A première vue, la jurisprudence relative à la réserve de la fraude ne


trouverait pas davantage sa place, en dehors des cas prévus par la directive sur le commerce

140
CJCE, 9 juillet 1997, aff. De Agostini, Forlag et TV-Shop, Rec. C.J.C.E., 1997, p. I-3843. V. aussi DURAND
C.-F. et VAN RAEPENBUSCH S., Les principaux développements de la jurisprudence de la Cour de justice et
du Tribunal de Première Instance, CDE, 1998, pp. 441-442 ; HUGLO J.-G., op. cit., pp. 580-581.
141
Directive 89/552/CEE du Conseil, du 3 oct. 1989, visant la coordination de certaines dispositions législatives,
réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion
télévisuelle, et directive 97/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 juin 1997, modifiant la directive
89/552/CEE du Conseil, du 3 oct. 1989, visant la coordination de certaines dispositions législatives,
réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion
télévisuelle.
142
En ce sens, cf. le considérant n° 24 qui énonce qu'il apparaît légitime que les États membres prennent des
mesures limitant la libre circulation des services de la société de l'information « dans les conditions prévues par
la directive ».
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 56

électronique, dans la mesure où, à l'inverse du dispositif de la directive « télévision sans


frontière », l'article 3 devrait permettre la prise en compte des cas de fraude. Toutefois, le
considérant n°57 précise très clairement que comme le permet la jurisprudence de la Cour143,
les États membres conservent la possibilité de prendre des mesures en cas de fraude.
Cependant, ces considérations appellent une confirmation jurisprudentielle. A cet égard, un
récent arrêt de la Cour de justice144 semble aller à l'encontre de certains principes de l'article 3.
La Haute juridiction a été saisie d'un recours préjudiciel dans le cadre d'un litige portant sur
l'interdiction par la législation suédoise de la publicité pour les boissons alcoolisées dans un
magazine destiné aux professionnels de l'alimentation et de la restauration. Elle reconnaît la
restriction à la libre prestation de services et admet les impératifs de santé publique pour la
justifier145. Un élément nous interpelle particulièrement dans cette décision puisqu’il est
expressément rappelé que, sur le plan de la compétence, « il revient à la juridiction de renvoi
d'apprécier si, dans les circonstances de droit et de fait qui caractérisent la situation dans
l'État membre concerné, l'interdiction de la publicité en cause au principal répond à la
condition de proportionnalité requise pour que la dérogation à la libre prestation de services
puisse être justifiée »146. C’est donc à la juridiction nationale de renvoi de statuer sur la
question du respect de la proportionnalité, en fonction des circonstances de la cause. On
constate en conséquent que cette prise de position de la Cour va partiellement à l'encontre du
dispositif de la directive sur le commerce électronique qui confère à la Commission, la
compétence de contrôler le respect du droit communautaire.

143
Considérant n°57 : « Conformément à une jurisprudence constante de la Cour de justice, un État membre
conserve le droit de prendre des mesures à l'encontre d'un prestataire établi dans un autre État membre, mais
dont l'activité est entièrement ou principalement tournée vers le territoire du premier État membre, lorsque le
choix de cet établissement a été fait en vue de se soustraire aux règles qui seraient applicables à ce prestataire
s'il s'était établi sur le territoire du premier État membre ».
144
CJCE, 8 mars 2001, aff. Gourmet International Products AB (GIP), Rec.2001 I-1795, non encore publié.
145
Ibid., pts. 39 et 40.
146
CJCE, 8 mars 2001, op. cit., pt. 41.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Portée de la clause de marché intérieur 57

CONCLUSION

104. Une libre prestation garantie. La libre prestation de services bancaires et financiers est
réellement assurée sur l’Internet par l’adoption de la directive sur le commerce électronique.
Certes, celle-ci n’est pas propre au secteur bancaire et financier mais elle consacre le
fondement de la libre prestation de service sur les réseaux. De surcroît, elle conditionne la
légalité des services bancaires et financiers dématérialisés au respect de la législation du pays
d’origine. Mais ce principe va probablement entraîner une concurrence des législations au
profit de la moins contraignante.

105. Un cadre juridique favorable. Néanmoins, l’objectif de ces dispositions est de créer un
cadre juridique favorable au bon fonctionnement du marché. Elles apparaissent naturellement
propices aux prestataires de services bancaires et financiers dont l’accès au marché
communautaire électronique se trouve largement simplifié. Dans la mesure où l’Internet est
un nouveau mode de communication et de commercialisation prometteur, les institutions
communautaires doivent veiller au respect de la règle de non restriction. Mais il est clair que
la clause de marché intérieur apparaît plus favorable aux établissements de crédit qu’aux
investisseurs. Directement, les premiers voient leur situation clarifiée et simplifiée : ils
doivent respecter la législation de leur pays d’origine ; les seconds, quant à eux, sont
davantage dans l’expectative. L’intérêt de la clause de marché intérieur pour les investisseurs
est plus indirect et moins juridique qu’économique (en effet, ils ne sont littéralement
concernés par la clause de marché intérieur que par exception) ; en permettant la libre
circulation des services bancaires et financiers via l’Internet, la directive permet une
accessibilité renforcée de ces opérations, de même qu’une comparaison plus aisée. En
d’autres termes, elle accentue la concurrence et cette situation paraît favorable à
l’investisseur.

106. Conséquences matérielles. On peut in fine s’interroger sur les conséquences pratiques de la
clause de marché intérieur sur le marché des services bancaires et financiers. En effet, si les
incidences sont indéniables, l’activité de ce secteur est traditionnellement très réglementée. Le
fondement de la libre prestation de services sur l’Internet étant précisé, il s’agit maintenant de
savoir si en ce qu’elle prévoit une interdiction des restrictions, la clause de marché intérieur
remet en cause les réglementations classiques de l’agrément des règles spécifiques au secteur
bancaire et financier. En d’autres termes, il s’agit d’en étudier l’impact.
CHAPITRE 2
L’IMPACT DE LA CLAUSE DE MARCHE INTERIEUR

107. La directive comme moyen. A l’instar des directives bancaires, la directive sur le commerce
électronique tente de régler les problèmes du concours de compétence entre les Etats membres
en ce qui concerne l’exercice de la libre prestation des services de la société de l’information.
Cependant, contrairement aux directives bancaires et financières qui présentent un caractère
sectoriel que l’on peut aussi qualifier de « vertical », la directive sur le commerce électronique
se veut horizontale et englobe, parmi l’ensemble des services de la société de l’information
(terminologie choisie par la directive sur le commerce électronique pour désigner entre autres
les services proposés via l’Internet, ci-après SSI), les services bancaires et financiers qui sont
fournis sous la forme de SSI. Selon l’article 1er de la directive sur le commerce électronique,
son objectif est de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur en assurant la libre
circulation des services de la société de l’information entre les Etats membres. Le cœur de la
directive est constitué par un principe qui est lui-même au fondement du droit
communautaire : la reconnaissance mutuelle combinée au principe du pays d’origine. Ce
principe fait l’objet des dispositions de l’article 3 de la directive.

108. « Lex specialis » ou « lex posterior ». S’interroger sur l’articulation de deux textes implique
de préciser si l’un l’emporte sur l’autre, s’ils sont concurrents ou bien s’ils sont
complémentaires. Partant, l’articulation de la directive sur le commerce électronique avec les
directives traitant des services financiers peut-elle être résolue par une application du principe
« lex specialis » ? On se doit de constater que ce principe ne fonctionne pas en l’espèce. En
effet, les directives « services financiers » dérogent au droit général, mais traitent les services
financiers sans considération du mode de distribution (en ligne ou hors ligne). Par contre, la
directive commerce électronique ne vise qu’un mode de distribution (en ligne) mais traite
indifféremment l’ensemble des services, quels qu’ils soient, susceptibles d’être distribués
électroniquement. Il semble dès lors inévitable de considérer que l’application du principe
« lex posterior derogat priori » l’emporte147. La directive sur le commerce électronique

147
DUPUY P. M., Droit International Public, Dalloz, Paris, 2ème éd., 1995, p. 238 ; v. aussi les conclusions de
l’avocat général COLOMER, 23 février 1999, dans l’affaire du 9septembre 1999 (C-64/98), Rec., I, 1999, p.
5187 et les conclusions de l’avocat général VAN GERVEN, 27 octobre 1993, dans l’affaire du 13avril 1994 (C-
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 59

comporte un certain nombre d’indications dans le sens d’une application de la « lex


posterior ». Dans la mesure où elle prévoit certaines exceptions à l’application de la clause de
marché intérieur qui ont trait à d’autres directives, cela signifie que cette clause s’applique
pour le surplus aux dispositions de ces mêmes textes non visées à l’annexe, et dès lors
l’application du contrôle du pays d’origine se substitue aux règles prévoyant un autre
mécanisme. Il faut considérer qu’elle modifie donc les directives existantes et plus
particulièrement celles relatives aux services financiers, sous réserve de ces exceptions.

109. La question des succursales. La directive sur le commerce électronique influe sur la
problématique des succursales, et la question du cumul de l’établissement d’une succursale et
de la libre prestation de service n’est pas sans poser problème148. En effet, on peut notamment
se demander quel est le droit applicable dans l’hypothèse où un établissement de crédit est
établi dans un pays déterminé, que ce même établissement a une succursale dans un autre
pays, et que cette succursale vend par Internet un service financier à un consommateur
domicilié dans un troisième pays.

Eléments de réponse. La Communication de la Commission du 7 février 2001 apporte


certains éléments de réponse à cette question : « Même si, pour les succursales, la directive
sur le commerce électronique dispose que ce sont les autorités du pays d’établissement du
prestataire du service de la société de l’information qui ont compétence pour veiller au
respect des règles prudentielles applicables, cela n’affecte pas les transferts de compétences
entre États membres déjà prévus par la législation sur les services financiers actuellement en
vigueur. Dans ces conditions, les transferts de compétence du pays d’accueil au pays
d’origine déjà réalisés (par exemple en matière d’agrément, de contrôle prudentiel, de dépôt
de garantie et de surveillance des succursales) restent intégralement d’application. Par
conséquent, du fait des transferts de compétences déjà explicitement opérés par les directives
sectorielles de l’UE, le contrôle prudentiel des succursales continue à relever du « pays
d’origine » au sens de ces directives sectorielles ».

Interprétation. La question du droit applicable n’est toutefois pas directement tranchée.


On peut, cependant, tenter l’interprétation suivante. Eu égard à la définition de prestataire

128/92), Rec., I, 1994, p. 1209.


148
SOUSI-ROUBI B., op. cit., p. 136-137 ; v. également ROEGES L.,L’exercice de l’activité bancaire par la
voie d’une succursale après la deuxième directive bancaire, RDBF, 1994, pp. 17 et 113.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 60

établi au sens de la directive « commerce électronique »149 et des termes de l’article 3, § 1150, il
semble que l’autorité de contrôle du pays où est établi l’établissement de crédit (pays
d’origine au sens des directives bancaires) soit désormais tenue de veiller au respect des
règles qui relèvent du domaine coordonné applicables dans l’Etat membre du pays où est
située la succursale (pays d’origine au sens de la directive sur le commerce électronique). Si
une telle interprétation est autorisée, il va sans dire que le rôle des autorités de contrôle va
s’en trouver singulièrement compliqué.

110. L’intérêt général. Concernant les règles relatives à l’intérêt général, la clause de marché
intérieur implique également des conséquences non négligeables.

Les restrictions. Rappelons que l’article 22, § 5, de la directive 2000/12/CE


coordonnant les directives « bancaires » énonce que « les dispositions des paragraphes 1 à 4
(de l’article 22) n’affectent pas le pouvoir de l’Etat membre d’accueil de prendre des mesures
appropriées pour prévenir ou réprimer sur son territoire les actes qui sont contraires aux
dispositions qu’il a arrêtées pour des raisons d’intérêt général... ». L’article 44, § 1, de la
directive OPCVM dispose quant à lui qu’un « OPCVM qui commercialise ses parts dans un
autre Etat membre doit respecter les dispositions législatives, réglementaires et
administratives qui sont en vigueur dans cet Etat et qui ne relèvent pas du domaine régi par
la présente directive ». Enfin, l’article 11, § 2, de la directive « services d’investissement »
prévoit que « sans préjudice des dispositions à prendre dans le cadre d’une harmonisation
des règles de conduite, la mise en œuvre et le contrôle du respect de celles-ci demeurent de la
compétence de l’Etat membre où le service est fourni ». La directive sur le commerce
électronique restreint désormais grandement les possibilités d’application par l’Etat membre
de destination de ses règles d’intérêt général. La procédure prévue par l’article 3, §§ 4 à 6,
vient dès à présent se substituer, dans le cadre de ce mode de distribution, aux règles
précitées. Rappelons toutefois que ces dispositions demeurent applicables pour les services
qui ne sont pas fournis en ligne, ou qui ne relèvent pas de la directive sur le commerce
électronique.

149
« Prestataire qui exerce d’une manière effective une activité économique au moyen d’une installation stable
pour une durée indéterminée ».
150
« Chaque Etat membre veille à ce que les services de la société de l’information fournis par un prestataire
établi sur son territoire respectent les dispositions nationales applicables dans cet Etat membre relevant du
domaine coordonné ».
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 61

111. Plan. Ainsi, on peut se demander quelles sont les conséquences des dispositions de cette
directive, et particulièrement de sa clause de marché intérieur, sur les agréments et le principe
de reconnaissance mutuelle qui l’accompagnent (section 1), sur les procédures liées à la
notion de libre prestation de service – à savoir les procédures de notification– (section 2) et,
enfin, sur les règles relatives à la publicité (section 3).

Section 1. Les agréments et le principe de reconnaissance mutuelle confrontés


à la clause de marché intérieur

112. La règle. Traditionnellement, l’activité bancaire et financière réglementée est soumise à un


agrément des autorités nationales compétentes qui ne se réduit pas seulement à la délivrance
d’une autorisation d’exercer. Les procédures prévues à cet effet sont destinées à garantir
l’aptitude des opérateurs à exercer en toute sécurité des activités liées à la manipulation
d’avoirs monétaires ou de titres pour le compte de leur clientèle. Les autorités doivent donc
veiller au respect par les prestataires d’un certain nombre d’exigences portant sur le montant
de leurs ressources et la solidité de leur actionnariat, sur l’honorabilité et l’expérience de leurs
dirigeants, ainsi que sur les moyens techniques de leur organisation.

113. Les conditions de l’agrément. Pour sa part, le Code monétaire et financier français précise
dans son article L. 511-10 « qu’avant d’exercer leur activité, les établissements de crédit
doivent obtenir l’agrément délivré par le comité des établissements de crédit et des
entreprises d’investissement mentionné à l’article L. 612-1 »151. Dans le cadre des missions
qui lui sont dévolues par la loi152, le Comité des établissements de crédit et des entreprises
d’investissement (CECEI) joue un rôle primordial dans le cadre du contrôle du secteur
bancaire. Il procède à un examen approfondi tant du programme d’activités et des moyens
techniques et financiers appelés à être mis en oeuvre que de l’aptitude des candidats à réaliser
des objectifs de développement dans des conditions compatibles avec le bon fonctionnement
du système bancaire153. Parallèlement, et conformément à la loi de modernisation des activités

151
Récemment l’assemblée plénière de la Cour de cassation a déclaré que la seule méconnaissance par un
établissement de crédit de l’exigence de l’agrément n’est pas de nature à entraîner la nullité des contrats qu’il a
conclus. Cass. ass. plén., 4 mars 2005, JCP E, 5 mai 2005, n° 18-19, p. 766 note BONNEAU T. ; JCP G, 18 mai
2005, n°20, p.903 note DE GOUTTES R. Egalement, STOUFFLET J., Le défaut d’agrément bancaire n’entraîne
pas la nullité des contrats conclus, RDBF, mai-juin 2005, p.48
152
Article L. 511-9 du code monétaire et financier.
153
Toutefois, un auteur conteste la légitimité de cette autorité et considère que les principales controverses
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 62

financières n° 96-597 du 2 juillet 1996, le CECEI réalise un examen similaire lors de


l’agrément relatif à la prestation de services d’investissement, sur la base d’une approbation
des programmes d’activités par l'Autorité des marchés financiers. Il en est de même, par
exemple, en droit belge154.

114. Le régime « vertical ». Le régime communautaire mis en place en matière de services


financiers repose, pour l’essentiel, sur un modèle identique à la clause de marché intérieur,
c’est-à-dire fondé sur l’octroi d’un agrément par les autorités de contrôle du pays d’origine et
la reconnaissance mutuelle par les autres Etats membres. Tel est le cas pour les établissements
de crédit au sens des première et deuxième directives bancaires, pour les OPC et pour les
services d’investissement. Une remarque préliminaire s’impose : les établissements qui ne
relèvent pas, pour une raison ou une autre, des directives bancaires, ou les OPC non
coordonnées, ou encore les entreprises d’investissement qui ne seraient pas couvertes par la
directive « services d’investissement » peuvent – même s’ils ne disposent pas du passeport
qui peut leur être délivré en vertu des directives d’harmonisation – exercer sur la base des
dispositions du Traité, c’est-à-dire dans le respect du droit communautaire général155. De
même, vis-à-vis des Etats tiers, la reconnaissance des agréments s’applique sous réserve du
principe de réciprocité : les banques de ces pays peuvent accéder au marché européen à
condition qu’aucune mesure discriminatoire ne soit prise chez elles à l’encontre des banques
de la Communauté – dans ce sens l’article L.511-12 du code monétaire et financier français.

115. Constat. La liberté de circulation existait déjà avant l’entrée en vigueur de la directive
« commerce électronique ». Ce texte modifie en revanche les limites précédemment admises à
l’exercice de cette liberté, notamment sur le plan des restrictions admises au titre du droit
communautaire général ; celles-ci ne s’appliquent plus, sous réserve des exceptions prévues
par la directive elle-même.

concernent le déficit de transparence ainsi que l’autonomie de contrôle. V. DAMY G., Le contrôle du Comité
des établissements de crédit et des entreprises d’investissement : une légitimité critiquée, JCP G, 30 novembre
2005, n° 48, p. 2206.
154
La CBFA, née de l’intégration de l’Office de contrôle des assurances (OCA) au sein de la Commission
bancaire et financière (CBF) est, depuis le 1er janvier 2004, l’autorité de contrôle unique du secteur financier
belge.
155
En d’autres termes, selon les libertés octroyées par le droit communautaire, et en conformité avec les
restrictions admises par le droit communautaire à l’exercice de ces libertés. V.. SOUSI-ROUBI B., Droit
bancaire européen, Paris, Dalloz, 1995.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 63

116. Maintien de l’agrément ? La problématique de l’agrément est issue des articles 3 § 2 et 4 de


la directive « commerce électronique » : d’une part, on ne peut restreindre la libre circulation
des services bancaires et financiers sur l’Internet et, d’autre part, on ne saurait soumettre
l’accès et l’exercice de l’activité d’un prestataire à un quelconque régime d’autorisation. Une
question se pose alors : l’agrément tient-il toujours en ce qui concerne les prestations
bancaires et financières sur l’Internet ? La solution est retenue par les différentes directives
(§1), l’Internet n’étant qu’un mode d’expression de la libre prestation des services bancaires
et financiers (§2).

§1. Solution posée par les directives

117. La législation horizontale. En réalité, la directive de 2000 sur le « commerce électronique »


apporte elle-même la solution à cette question, tout d’abord par le champ prévu du domaine
coordonné et ensuite textuellement dans le § 2 de l’article 4, ce dernier précisant : « sans
préjudice des régimes d’autorisation ». Il faut garder à l’esprit que l’Internet n’est qu’un
nouveau mode de communication ; en tant que support technique de commercialisation, son
accès ne peut effectivement pas être restreint, mais la légalité d’une activité doit être
distinguée de ses conditions d’exercice.

118. La législation spéciale. L’article 4, relatif à l’agrément156, de la Directive 2000/12/CE du


Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 concernant l'accès à l'activité des
établissements de crédit et son exercice précise bien que : « les États membres prévoient que
les établissements de crédit doivent avoir reçu un agrément avant de commencer leurs
activités. Ils en fixent les conditions, sous réserve des articles 5 à 9, et les notifient à la
Commission ainsi qu'au comité consultatif bancaire ». L’article 18, relatif aux établissements
de crédit, précise ensuite que « les États membres prévoient que les activités dont la liste
figure à l'annexe I peuvent être exercées sur leur territoire, selon les dispositions de l'article
20, paragraphes 1 à 6, de l'article 21, paragraphes 1 et 2, et de l'article 22 tant au moyen de
l'établissement d'une succursale que par voie de prestation de services par tout établissement
de crédit agréé et contrôlé par les autorités compétentes d'un autre État membre, sous réserve
que ces activités soient couvertes par l'agrément ».

156
Au sens de la directive un « agrément »est un acte émanant des autorités, quelle qu'en soit la forme, d'où
découle la faculté d'exercer l'activité d'établissement de crédit.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 64

119. Articulation. La directive sur le « commerce électronique » n’a pas vocation à revenir sur les
acquis communautaires en matière d’agrément des services bancaires et financiers. Ainsi, le
paragraphe 2 de l’article 4 de cette directive complète et limite le paragraphe 1 en excluant
son application dans le cas des régimes d’autorisation « qui ne visent pas spécifiquement et
exclusivement les services de la société de l’information » (c’est-à-dire proposés via
l’Internet). Or, en matière bancaire et financière, on est typiquement en présence de
prestations qui ne visent pas spécifiquement et exclusivement les services de la société de
l’information. En fait, l’exercice de prestation bancaire et financière en ligne implique
nécessairement l’existence d’un établissement de crédit au préalable agréé.

120. Les banques « en ligne ». L’existence de banque dites 100% Internet n’est pas même de
nature à troubler l’analyse : rappelons que la directive de 2000, dans son article 6 § 2, que les
États membres exigent :
« - des établissements de crédit qui sont des personnes morales et qui ont, conformément à
leur droit national, un siège statutaire, que leur administration centrale soit située dans le
même État membre que leur siège statutaire,
- des autres établissements de crédit que leur administration centrale soit située dans l'État
membre qui a délivré l'agrément et dans lequel ils opèrent de manière effective ».
Ainsi, la dématérialisation physique des agences bancaires n’entraîne pas la disparition ni de
la personnalité juridique, ni de la nationalité du prestataire et de son rattachement à un Etat
membre qui, en tout état de cause, existe. Effectivement, avant de pouvoir proposer ses
services en ligne, l’établissement de crédit doit bel et bien exister et, la nouveauté
commerciale d’un canal de distribution ne saurait remettre en cause l’existence juridique
antérieure d’un prestataire. En réalité, l’Internet ne modifie pas les règles classiques de
l’agrément par le pays d’origine en ce sens qu’il n’est qu’un moyen, un canal de libre
prestation de services.

§2. L’Internet comme mode d’expression de la libre prestation de services


bancaires

121. Les données en France. Le Code monétaire et financier indique que : « dans la limite des
services qu’il est autorisé à fournir sur le territoire d’un Etat membre autre que la France où
il a son siège social et en fonction de l’agrément qu’il y a reçu, tout établissement de crédit
peut, sur le territoire de la France…intervenir en libre prestation de services… ». En France,
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 65

pas moins de 440 établissements de crédit sont identifiés, en application de l'article L. 511-22
du Code monétaire et financier, par le CECEI comme exerçant leur activité en France par voie
de libre prestation de services157.

122. Illustrations. Ainsi, à titre d’exemple, la banque Fortis, domiciliée à Bruxelles, exerce ses
activités, en France, par voie de libre prestation. Cette banque propose ses services en ligne158
mais a bel et bien été agréée par la Commission Bancaire et Financière belge. La situation est
la même dans le cadre des conditions générales de vente du site Internet de la banque en ligne
ING Direct France, succursale de ING Direct N.V. ING Direct qui est une société anonyme
de droit néerlandais exerçant donc son activité en France par voie de succursale159 en libre
établissement. L’Internet n’apporte pas de ce point de vue de nouveauté. Il constitue
« simplement » une opportunité commerciale et concurrentielle pour les organismes de crédit
qui peuvent réduire leur coût de structure. Reste que l’influence de la clause de marché
intérieur est importante : c’est à l’internaute de s’assurer qu’il est juridiquement autorisé à
contracter, que sa réglementation nationale ne lui interdit pas de souscrire tel produit ou tel
service.

123. Les pays tiers. Concernant, enfin, les prestataires provenant d’Etats tiers, la Banque de
France160 identifie plusieurs cas applicables relativement à la réglementation française pour
déterminer la nécessité d’un agrément des prestataires en ligne :

« Site destiné aux Français. Le prestataire ouvre en France un site Web présenté en
français, en y localisant un serveur et en affichant éventuellement à la clientèle française un
nom de domaine en .fr. Il souhaite ainsi cibler la clientèle française en lui présentant une
offre adaptée au marché français et en la rassurant sur l’origine géographique de son offre,
alors que les opérations bancaires ou financières pourront continuer à être in fine réalisées
au lieu où le prestataire a son administration et son système de gestion. Dès lors que la

157
Liste des établissements de crédit publiée au 31 juin 2005 par le CECEI qui recense 820 établissements de
crédit agréés en France, disponible sur : http://www.banque-france.fr/fr/supervi/telechar/popetscred/lisetcre.pdf.
158
www.fr.fortisbank.com.
159
Au sens le la directive de 2000 la succursale est un siège d'exploitation qui constitue une partie dépourvue de
personnalité juridique d'un établissement de crédit et qui effectue directement, en tout ou en partie, les opérations
inhérentes à l'activité d'établissement de crédit; plusieurs sièges d'exploitation créés dans le même État membre
par un établissement de crédit ayant son siège social dans un autre État membre sont considérés comme une
seule succursale.
160
INTERNET, quelles conséquences prudentielles, Livre blanc de la Banque de France, Secrétariat général de
la Commission bancaire, décembre 2000, p. 14 et s.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 66

localisation géographique en France de l’installation serait certaine, et que l’on pourrait


considérer que la clientèle française n’a dès lors qu’à s’adresser au serveur situé en France
pour conclure valablement des opérations avec le prestataire, le serveur pourrait être
assimilé à une présence permanente de l’opérateur en France. Un tel dispositif obligerait le
prestataire, conformément aux critères posés par le CECEI, à requérir l’ouverture d’une
filiale ou d’une succursale dûment agréée ».

« Site d’information. De la même façon, le prestataire peut ouvrir un site en France


mais en destinant celui-ci à la simple information du public et non à la réalisation
d’opérations de banque ou de services d’investissement. Il s’agira ainsi, par exemple, de
diffuser des communications relatives à la société. Le site remplirait alors la fonction
habituelle d’un bureau de représentation et devrait donc, conformément à la loi, notifier son
ouverture au CECEI (Article L532-14 et L532-15 du Code monétaire et financier) ».

« Le lien hypertexte. L’inscription sur un site portail français d’un lien hypertexte
renvoyant vers le site d’un prestataire étranger est plus difficile à caractériser. En effet, un tel
lien n’est pas toujours établi sur demande ou même accord du site destinataire. De nombreux
annuaires ou portails composent eux-mêmes de véritables bouquets de services, de sorte qu’il
est difficile de déterminer si le prestataire a réellement souhaité être présent par ce moyen sur
les sites du réseau localisables en France. Cela pourrait toutefois être le cas si le lien
hypertexte était accompagné par exemple des signes commerciaux distinctifs de
l’établissement étranger (logo, message commercial) car ce type d’affichage est le plus
souvent caractéristique d’un véritable partenariat entre le portail et le prestataire. La
question se pose alors de savoir si l’opérateur, dont le site lui-même reste localisé à
l’étranger, remplit les critères posés par le CECEI pour déterminer une présence permanente
en France. Même si une analyse des situations particulières est nécessaire, il semble que dans
ce type de relation, le client ne peut conclure avec l’intermédiaire un contrat engageant
valablement l’opérateur étranger. Il ne dispose de fait que d’un accès simplifié au site de
celui-ci mais il doit prendre l’initiative de s’y connecter. Les critères posés par le CECEI ne
seront donc vraisemblablement pas remplis. En revanche, à défaut de présence permanente il
pourra quand même s’agir d’une sollicitation de la clientèle française exercée sur le
territoire français. Celle-ci entrerait alors dans le champ des dispositions relatives à la
publicité et au démarchage. Il se peut également que, sur la base de partenariats avec des
établissements de crédit ou des entreprises d’investissement français disposant de sites
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 67

Internet, le prestataire soit accessible aux clients français de ces sites par un lien hypertexte.
Dans cette hypothèse, le site du prestataire français proposerait la commercialisation de
services réalisés par le prestataire étranger. En la matière, le CECEI a jusqu’à présent
réservé sa position et n’a pas considéré que le recours à un partenariat avec un établissement
dûment agréé devait requérir une habilitation quelconque en France du prestataire
étranger ».

124. La notion de site dirigé. La directive sur le commerce électronique ne fait aucune référence à
la notion de « site dirigé », de site « accessible », ou encore de site « actif » ou « passif ».
Cette notion n’est toutefois ni inconnue ni sans importance dans la réglementation des
activités commerciales sur Internet, et plus particulièrement dans le domaine des services
financiers161. Cette notion pourrait sans nul doute faciliter la détermination de l’intention du
prestataire. Aussi confrontées au problème particulièrement aigu de la définition de leur
compétence de contrôle à l’égard des activités menées sur Internet, les autorités de contrôle
des valeurs mobilières se sont-elles penchées sur la définition d’un certain nombre de
principes en la matière, que l’on retrouve dans un rapport du Comité Technique de l’OICV-
IOSCO de 1998162. Dans ce document, l’OICV aborde la question des critères163 qui
permettent à une autorité de contrôle de se déclarer compétente ou non face à une offre de
services financiers par Internet.

125. Bilan. Ici, en matière d’agrément, la spécificité des activités bancaires et financières prime sur
celle de l’Internet. Il faut donc considérer que les articles 3§2 et 4§1 énoncent simplement une
interdiction de restreindre l’accès à l’Internet pour proposer les services bancaires et
financiers. Cette proposition est d’ailleurs, si l’on reprend nos propos introductifs, tout à fait
en adéquation avec l’objectif premier des institutions communautaires : stimuler la croissance
du commerce électronique, notamment par l’Internet. On peut ainsi considérer que la directive

161
V. sur cette question ROLIN JACQUEMYNS L. et VERBIEST T., L’offre de services et produits financiers
sur Internet, RDC, n° 2000/2, pp. 71-89.
162
Organisation Internationale des Commissions de Valeurs / International Organization of Securities
Commissions, Securities activity on the Internet, 1998, disponible sur : http://www.iosco.org/docs-public/1998-
internet_security.html.
163
Parmi les critères qui permettent de déterminer la compétence des autorités de contrôle, figurent notamment
le fait que l’information soit dirigée vers les résidents du ressort de l’autorité, le fait que le fournisseur de
services accepte des transactions émanant de ces résidents ou encore, le fait que le fournisseur utilise des
techniques de communication pour « pousser » l’information vers ces derniers. Par contre, si le fournisseur de
services précise clairement à qui s’adresse son offre, que le site Web contient une liste des pays dans lesquels le
prestataire est autorisé (ou non) à fournir ses services ou qu’il prend les mesures raisonnables pour empêcher la
fourniture de services à des résidents relevant du ressort de l’autorité de contrôle, celle-ci ne devrait pas se
déclarer compétente.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 68

va permettre aux prestataires de services financiers de fournir leurs services par Internet dans
l’ensemble des autres Etats membres, traite évidemment de la légalité des ces opérations et les
rattache à la loi du pays d’établissement. Il s’agit néanmoins, pour elle de prendre en compte
les divergences actuelles de ces législations, qui sont accentuées avec l’Internet. Cependant,
elle ne remet pas en cause les harmonisations acquises en matière bancaire et financière. La
problématique de l’agrément laisse place finalement à celle, plus délicate, du régime de
notification préalable puisqu’un prestataire bancaire mettant en ligne ses produits et services
diffuse de facto son offre à toute la Communauté (pour s’y limiter) sans nécessairement
vouloir contracter avec des résidents d’autres Etats membres.

Section 2. La clause de marché intérieur et la procédure de notification de


libre prestation de service

126. Les stratégies bancaires et l’Internet. Aujourd’hui, les stratégies des banques sont dites
« multicanales » et l’Internet occupe désormais une place importante dans leur élaboration
compte tenu de la potentialité de clientèle. Les services mis en ligne peuvent, à l’origine, être
destinés à toute la Communauté, voire au monde entier ou bien, plus modestement, se
restreindre à l’Etat membre d’établissement. Précisément, grâce à l’Internet (ou à cause de
lui), ces services sont accessibles n’importe où, indépendamment de leur destination initiale.

127. La procédure de notification. Or l’on sait que la réglementation communautaire (article 21


de la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 concernant
l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice) impose à tout établissement de
crédit qui désire exercer pour la première fois ses activités sur le territoire d'un autre État
membre par voie de libre prestation, de notifier son projet à l'autorité compétente de l'État
membre d'origine. Par suite, cette dernière communique à celle de l'État membre d'accueil la
notification susvisée, dans un délai d'un mois à compter de sa réception.

128. Le problème d’articulation. Quelques questions demeurent en suspens : la mise en ligne de


prestations bancaires et financières conduit-elle nécessairement l’organisme prestataire à
exercer par voie de libre prestation de services, ce qui impliquerait une notification ? L’article
21 de la directive de coordination bancaire 2000/12/CE a-t-il été modifié – tacitement – par la
directive sur le commerce électronique ? L’opposition entre les institutions communautaires et
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 69

les Etats membres (§1) pourrait être levée par la recherche de l’intention du prestataire (§2).
Néanmoins, la controverse subsiste à tel point que l’on peut s’interroger sur ses conséquences
pratiques (§3).

§1. L’opposition existante

129. Pour la Commission. La Commission européenne a pris position dans sa communication


interprétative relative à la libre prestation de services et à l’intérêt général dans la deuxième
directive de coordination bancaire (10/7/97). Elle a considéré que la fourniture de services
bancaires à distance, notamment par l’Internet, ne devrait pas nécessiter de notification
préalable dans la mesure où le prestataire ne peut être considéré comme exerçant ses activités
sur le territoire du client. Elle ajoutait immédiatement être consciente du fait que cette
solution nécessitera une analyse au cas par cas, qui peut s’avérer difficile.

130. Pour les Etats membres. L’interprétation proposée par la Commission a donné lieu à de
nombreux débats et, à vrai dire, n’a pas recueilli l’unanimité parmi les autorités de contrôle
des Etats membres164. La Commission Bancaire et Financière belge, par exemple, a clairement
exprimé sa désapprobation dans son rapport annuel 1997-1998, et a confirmé sa position dans
une circulaire concernant les services financiers et Internet165 en indiquant que même en ligne,
l’établissement devait se plier aux obligations de notification que lui impose son statut légal,
tout en admettant que la situation pourrait changer avec l’adoption de la directive sur le
« commerce électronique ».

§2. L’intention du prestataire

131. Le problème d’interprétation. Le CECEI et les autres autorités françaises compétentes


considèrent, pour leur part (dans un rapport de novembre 1998 intitulé « la libre prestation de
services en matière de services d’investissement »), que conformément aux principes posés
par le Comité, il est important d’apprécier la réalité de la volonté du prestataire d’entrer en
relation d’affaires avec une clientèle non résidente. L’offre par Internet pourrait donc

164
V. notamment ROEGES L., Quelques réflexions critiques sur le cadre légal pour la libre prestation de
services bancaires et financiers, Euredia, 2/2000, p. 149 ; LEROUGE J.-F., La libre prestation des services
bancaires virtuels, JTDE, 1999, n° 59, pp. 111-114 ; M. TISON, Lecture critique de la communication
interprétative, Revue de la Banque, 1998/3, pp. 162 à 173.
165
Disponible sur : www.cbf.be.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 70

s’apparenter à une libre prestation de services dès lors que l’intention du prestataire est
caractérisée. Il s’agirait, dès lors, de déterminer l’obligation de notification. Et, quand bien
même l’intuitu ferait défaut, l’organisme prestataire pourrait se trouver confronté aux règles
en matière de démarchage dans le domaine bancaire et financier.

132. La solution. La Banque de France, dans son « livre blanc » de décembre 2000, propose à
cette fin la considération d’un faisceau d’indices permettant de caractériser l’exercice
d’activités réglementées en France, l’intention d’opérer en France et, par là, la nécessité d’une
notification. La difficulté juridique est de savoir si un prestataire a eu l’intention d’exercer son
activité sur le territoire d’un autre État membre. Afin de mieux caractériser les cas entrant
dans le champ de la libre prestation de services au sein de l’Espace économique européen, la
Banque de France propose166 « qu’à défaut de manifestation expresse de cette volonté par
l’établissement lui-même, les autorités d’agrément et de contrôle considèrent que le
prestataire désire exercer pour la première fois ses activités sur le territoire d’un autre État
membre dès lors que sont réunis tout ou partie des indices suivants :
ƒ la conclusion d’opérations bancaires ou financières peut être réalisée à distance sur
le site du prestataire par un client non résident, sans que celui-ci soit obligé d’établir au
préalable en agence une première relation contractuelle comme l’ouverture d’un
compte ;
ƒ le prestataire propose des services via un correspondant dans le pays du client ;
ƒ le site est présenté dans la langue du pays du client ;
ƒ le site du prestataire est accessible via des portails localisés dans le pays du client ;
ƒ le site du prestataire est référencé dans les moteurs de recherche du pays du client ;
ƒ le prestataire a recours à des bandeaux publicitaires associés à un lien hypertexte sur
des sites du pays du client ;
ƒ le prestataire a recours à des envois de mailings auprès de clients résidant dans
d’autres États membres ;
ƒ le prestataire se fait connaître sur les forums de discussion spécialisés en matière
bancaire et financière dans le pays du client ;
ƒ le prestataire tend à introduire un doute quant à sa localisation géographique précise
en utilisant un nom de domaine permettant de penser qu’il est installé dans le pays du
client d’un autre État membre ».

166
INTERNET, quelles conséquences prudentielles, Livre blanc, précité, p. 41.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 71

133. La nécessité de plusieurs éléments. Les éléments figurant ci-dessus ne sont pas tous de la
même importance et c’est plutôt leur réunion qui permet la constitution d’un faisceau
d’indices. Leur liste n’est pas limitative et peut être revue par les autorités compétentes en
fonction de l’évolution des techniques et des pratiques utilisées sur le réseau. Les autorités
françaises rechercheront l’adhésion des autres membres de l’Espace économique européen
pour parvenir à une interprétation homogène des textes en vigueur. Réciproquement, il peut
exister des relations d’affaires transfrontalières sans que les indices énumérés ci-dessus soient
réunis, de telle façon qu’il n’est pas possible de penser que le prestataire a souhaité exercer
son activité sur le territoire du client. Il faudra alors considérer que le client est entré de lui-
même en relation avec le prestataire, et que ce dernier n’a pas à effectuer la déclaration de
libre prestation de services auprès des organismes compétents.

134. Persistance de la controverse. L’article 4, § 2, de la directive « commerce électronique »


vise à préserver les régimes d’autorisation – de droit national ou communautaire – qui ont un
caractère général et indépendant du mode de distribution choisi, comme par exemple dans le
secteur bancaire. La définition du domaine coordonné, quant à elle, comprend explicitement
« les exigences (…) de notification », pour lesquelles les Etats ne peuvent restreindre la libre
circulation des SSI en provenance d’un autre Etat membre, dès lors que les règles du pays
d’origine sont respectées par les prestataires (art. 3 §§ 1 et 2). Ces dispositions incluent les
directives relatives aux services financiers, et donc, par voie de conséquences, les obligations
de notification qu’elles comportent. On en déduit donc logiquement que, sous réserve de
savoir si la prestation de services financiers sur l’Internet constitue ou non une prestation de
services sur le territoire d’un autre Etat membre, ces obligations perdurent. Par conséquent il
apparaît que la controverse antérieure subsiste, et l’on ne peut dès lors qu’espérer qu’elle soit
tranchée par la Cour de justice.

§3. Implications pratiques

135. Promouvoir ses services. Dès lors, il est permis de s’interroger, en pratique, sur la manière
de procéder pour les prestataires qui veulent offrir leurs services financiers à destination
d’autres Etats membres. Si la prestation en question peut être considérée comme un SSI au
sens de la directive « commerce électronique », ce sont ses mécanismes qui s’appliquent en
vertu du principe de la lex posterior. On doit alors faire la différence entre les obligations
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 72

relatives aux déclarations qui doivent être faites à l’Etat membre d’origine et celles qui
doivent être faites aux Etats membres de destination.

136. Déclaration à l’Etat d’origine. Le prestataire doit respecter les dispositions nationales
applicables relevant du domaine coordonné dans l’Etat membre où il est établi et en
particulier l’obligation dans certains cas de notifier à l’autorité de contrôle son intention de
fournir des services sur le territoire d’un autre Etat membre.

137. Déclaration à l’Etat destinataire. On sait que certaines obligations d’informations sont
prévues au profit de l’Etat membre d’accueil167. Seule la communication aux autorités de
l’Etat membre dans lequel le prestataire est établi étant nécessaire, doit-on considérer que ces
règles sont modifiées par la directive commerce électronique ? La Communication
interprétative précitée de la Commission permet de défendre cette thèse. A l’inverse, on
pourrait avancer que l’article 1.3 de la directive sur le commerce électronique dispose que « la
présente directive complète le droit communautaire applicable aux services de la société de
l’information sans préjudice du niveau de protection (…) établi par les instruments
communautaires et la législation nationale les mettant en œuvre dans la mesure où cela ne
restreint pas la libre prestation de services de la société de l’information ». Cependant, il
semble difficile de prétendre que cette directive n’affecte pas celle relative aux OPCVM alors
qu’elle exclut explicitement dans l’annexe un paragraphe d’un article de cette directive168. Par
ailleurs, il ne s’agit apparemment pas d’un régime d’autorisation qui pourrait être exempté au
titre de l’article 4, § 2.

138. Conclusion. Ces éléments nous invitent à penser que cette notification à l’Etat d’accueil n’est
plus nécessaire. Si l’on peut considérer que le mécanisme présente une relative cohérence
lorsqu’il s’agit d’un service proposé par voie électronique, il n’en reste pas moins qu’il
subsistera un régime différent pour les services opérés par voie électronique et pour ceux qui
ne le sont pas.

167
On pense par exemple à l’article 46 de la directive 85/611/CE du Conseil du 20 décembre 1985 portant
coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de
placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).
168
En l’espèce, l’article 44, § 2, de la directive OPCVM.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 73

Section 3. Les règles relatives à la publicité et au démarchage au regard de la


clause de marché intérieur

139. Démarchage, sollicitation et publicité : distinction. Quand bien même la mise en ligne de
prestations bancaires et financières ne pourrait s’analyser en libre prestation de services, parce
que la possibilité de souscrire via l’Internet est absente (si l’on retient cette analyse de la
Banque de France), l’organisme de crédit peut néanmoins, en promouvant ses produits169, se
retrouver confronté aux règles de publicité170. Pour reprendre les termes employés par le
Professeur T. BONNEAU, le démarchage implique « une initiative de son auteur [par le
biais] de procédés identifiés »171 et fait donc partie de la notion plus large de sollicitation172.
L’auteur distingue la « sollicitation active » présente dans le cadre de la sollicitation et du
démarchage, d’une « sollicitation passive qui suppose une initiative des tiers »173. De plus,
pour l’AMF, « toute technique de commercialisation visant une personne déterminée ou le
public en général peut être qualifiée de sollicitation »174. La publicité serait donc une forme de
sollicitation. Ce qui distingue, enfin, le démarchage de la publicité est à juste titre selon
l’auteur « la prise de contact nominative ».

140. Un nouveau démarchage. L’Internet introduit un élément fondamental de distanciation et de


dématérialisation. Il constitue à cet égard le vecteur de nouveaux moyens de contact avec des
clients potentiels, qui tendent à estomper les frontières entre publicité et démarchage, tels que
le courtage en ligne, la vente de crédits par l’Internet, les sites des établissements de crédit, les
« bannières » permettant d'accéder à des sites à partir de portails généralistes, les courriers
électroniques personnalisés ou le « spamming »175. Ces techniques qui modifient
l'environnement du démarchage, l'approche traditionnelle fondée sur la carte matérialisée, le
déplacement physique du démarcheur et la communication par voie orale, ne permettent plus
169
Sur le « marketing » bancaire, v. GIRARDIN R. et GRISON C., Les techniques de vente et de promotion des
produits et services bancaires, Contrats conc. consom., décembre 2004, p.11.
170
JOLY S., Commerce électronique et publicité en ligne, J.-Cl. Com., 2004, fasc. 810.
171
BONNEAU T., Démarchage et Internet, RDBF, n°5, septembre/octobre 2001 p. 271.
172
PRAICHEUX S. Les caractéristiques juridiques de l’opération de démarchage bancaire ou financier, Banque
et Droit, janvier-février 2005, n° 99, p.15 ; MATSOPOULOU H., Le démarchage bancaire et financier, RDBF,
n°6, novembre-décembre 2003, p.379 ; BERTIN-MOUROT O. et FATIER B., La réforme du démarchage
bancaire et financier, LPA, 14 août 2003, n°162, p.4 ; PIEDELIEVRE S., Remarques sur les nouvelles règles
relatives au démarchage bancaire et financier, Gaz. Pal., 26-27 septembre 2003, p. 2. ; GOYET C.,
RONTCHEVSKY N., STORCK M., Droit des marchés financiers, RTD com., octobre-décembre 2004, p.776.
173
BONNEAU T., Démarchage et Internet, ibid.
174
Rapport COB pour 1994 p. 224 « La sollicitation du public pour des produits financiers ou des opérations sur
les marchés étrangers », Bull Cob, n°290, avril 1995.
175
Publipostage électronique abusif et non sollicité auprès d'un très grand nombre de personnes. Pour une
définition détaillée, v. Lamy droit de l’informatique et des réseaux 2005, n° 2424, p. 1368.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 74

d'appréhender cette nouvelle réalité. Si le bon fonctionnement du marché tient à l’existence


d’une concurrence fût-elle exacerbée, cette concurrence s’exerce forcément par une
communication accrue et donc l’emploi de toutes les techniques permises par l’Internet.

141. Un cadre classique. Au niveau communautaire, certaines directives bancaires et financières


contiennent des dispositions concernant la publicité. Ainsi la directive 85/611/CEE sur les
OPCVM176 comporte un chapitre 8 concernant les dispositions spéciales applicables aux
OPCVM qui commercialisent leurs parts dans des Etats membres autres que ceux où ils sont
situés. L’article 44, § 2, de cette directive dispose que : « tout OPCVM peut faire de la
publicité dans l’État membre de commercialisation. Il doit respecter les dispositions régissant
la publicité dans cet État ».

142. L’impact de la directive de 2000. Cette disposition va connaître un sort différent à la suite de
l’adoption de la directive commerce électronique. En effet, le paragraphe 2 de l’article 44 de
la directive OPCVM figure à l’annexe de la directive commerce électronique et relève, dès
lors, des exceptions aux paragraphes 1 et 2 de l’article 3 de celle-ci. En conséquence, la
compétence en matière de publicité, telle qu’elle est formulée dans l’article 44, § 2, demeure
du ressort de l’Etat membre d’accueil.

143. Exemple français. Le démarchage177 et la publicité relatifs à certains types d’offres sont
soumis à conditions, le principe général étant que ces activités doivent être réservées à des
entreprises habilitées à fournir les services correspondants sur le territoire français, ou à leurs
intermédiaires. Lorsqu’elles ont pour objet une offre de certains services bancaires ou
financiers, strictement réservés à des entités disposant d’un agrément, ces activités font
toujours l’objet d’un strict encadrement juridique. C’est l’objet du nouvel article L. 341-3 du
Code monétaire et financier (issu de la loi de sécurité financière du 1er août 2003) : « ne

176
Directive 85/611/CEE du Conseil du 20 décembre 1985 portant coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières
(OPCVM).
177
La loi de sécurité financière du 1er août 2003 fournit désormais une définition unique du démarchage, qu’il
soit bancaire ou financier, qu’il porte sur des biens divers ou sur la fourniture d’une prestation de conseil en
investissement - activité qui, jusqu’à présent, ne faisait l’objet d’aucune réglementation. Le démarchage bancaire
ou financier sera dorénavant constitué par « toute prise de contact non sollicitée, par quelque moyen que ce soit,
avec une personne physique ou morale déterminée, en vue d’obtenir de sa part un accord sur la réalisation […]
d’une opération sur l’un des instruments financiers énumérés à l’article L 211-1, […] d’une opération de
banque ou d’une opération connexe, […] fourniture d’un service d’investissement ou d’un service connexe,
d’une opération sur biens divers […], ou sur la fourniture […] d’une prestation de conseil en investissement ».
(article L. 341-1 modifié du Code monétaire et financier).
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 75

peuvent recourir ou se livrer à l'activité de démarchage bancaire ou financier, dans la limite


des dispositions particulières qui les régissent, que […] les établissements et entreprises
équivalents agréés dans un autre Etat membre de la Communauté européenne et habilités à
intervenir sur le territoire français ». La loi sur la sécurité financière178 donne volontairement
une définition très large du démarchage, incluant la prise de contact par l’Internet. Ainsi, elle
devrait éviter l’écueil de l'ancienne loi du 3 janvier1972 qui ne visait expressément que
certains moyens de démarchage et qui fut vite dépassée par l’évolution des techniques de
l’information et de la communication. De ce point de vue, on peut dire que l’évolution de ces
techniques et particulièrement celle de l’Internet, a contribué à une évolution de la législation
communautaire et, par voie de conséquence, de la législation française [cette dernière étant
d’inspiration européenne (notamment par la transposition des dispositions relatives au délai de
rétractation des consommateurs issues de la directive du 23 septembre 2002)]179.

144. Le démarchage interdit. Quoi qu’il en soit, l’article L. 341-10 du Code monétaire et
financier énumère les produits ne pouvant faire l’objet de démarchage180. Comme sous
l’empire de la loi du 3 janvier1972, les instruments financiers non admis aux négociations sur
un marché réglementé européen ou sur un marché étranger reconnu sont exclus du
démarchage, à l’exception des parts ou actions d’OPCVM faisant appel public à l’épargne,
des titres émis par des sociétés de capital-risque et des produits d’épargne salariale proposés
dans le cadre de l’un des dispositifs du Titre IV du Livre IV du Code du travail. Cette
interdiction s’applique désormais, que les instruments financiers soient déjà émis ou non (art.
L.341-10-4° modifié du Code monétaire et financier). De même, demeurent exclus du
démarchage, les produits non autorisés à la commercialisation sur le territoire français (art.
L.341-10-2° modifié du Code monétaire et financier). La loi écarte également les parts de
fonds communs de créance (FCC) et des fonds communs d’intervention sur les marchés à
terme (FCIMT), considérées comme étant des placements trop risqués pour des investisseurs
non avertis (art. L. 341-10-3° modifié du Code monétaire et financier).

178
Il convient toutefois de noter la publication de 3 textes d’application de cette loi, et que par souci de concision
nous nous limiterons uniquement à les citer : Décret n° 2004-1018 du 28 septembre 2004 relatif au fichier des
personnes habilitées à exercer une activité de démarchage bancaire ou financier ; Décret n° 2004-1019 du 28
septembre 2004 relatif au démarchage bancaire ou financier et l’arrêté pris par le ministre de l’Economie, des
Finances et de l’industrie le 28 septembre 2004 relatif à la carte de démarchage. V. sur ces textes, DONDERO
B.,- sous la direction de DAIGRE J.-J. et DEPREZ-GRAFF A.-, JCP E, 3 mars 2005, n° 9, p. 374.
179
V. à ce sujet, le titre 2 de la deuxième partie de cet ouvrage.
180
BONNEAU T., Le démarchage : définition et produit concernés, Banque et Droit, janvier-février 2004, n° 93,
p.13.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 76

145. L’absence de démarchage. En ce qui concerne le démarchage via l’Internet, Monsieur


P. MARINI, rapporteur de la loi de 2003 au Sénat, considère que devraient être exclus du
champ d’application du démarchage les contacts noués à la suite d’une recherche active
conduite par le client sur l’Internet, que ce soit directement, à la suite d’une publicité, ou
indirectement, au moyen de liens hypertextes181. Cette position est plus libérale que celle que
l’autorité du marché semblait avoir adoptée à l’égard des liens hypertextes ; le recours à ceux-
ci pouvait en effet, selon elle, être analysé comme du démarchage182. Allant plus loin et
revenant aux distinctions et définitions déjà abordées suite aux commentaires du Professeur
T. BONNEAU, la publicité faite pour un produit ou un service financier dans le cadre d’un
forum de discussion sur l’Internet non destiné à l’offre de tels produits et services ne relève
pas du démarchage dans la mesure où elle n’est pas nominative. L’internaute n’est pas
« spécifiquement visé » ; « il s’agit certes d’une prise de contact non sollicitée mais
l’internaute a eu une démarche active en se connectant au forum de discussion » En ce qui
concerne les bandeaux publicitaires et les liens hypertextes, le raisonnement est identiques :
« ils supposent un comportement actif de l’internaute et ne sont pas nominatifs » 183. Il en
serait de même pour les messages interstitiels et le FTP (File Transfer Protocol)184.

146. Questions en suspens. Toutefois une série de questions très pratiques doit être posée :
comment l’Etat membre d’établissement pourra-t-il contrôler toute la publicité qui est
« émise » par des prestataires établis sur son territoire, mais qui ne concerne par exemple que
des destinataires établis dans d’autres Etats membres ? Comment l’Etat membre
d’établissement pourra-t-il contrôler la publicité sachant que les installations informatiques
peuvent ne pas être situées dans ce même Etat ? Enfin, quel sort réserver à un service qui n’est
pas fourni sur demande individuelle, comme par exemple un envoi de courrier électronique
non sollicité qui propose un produit du type OPCVM ? Si l’on devait être amené à considérer
qu’une communication non sollicitée ne rentre pas dans la définition de service de la société
de l’information, parce que n’étant pas sur demande individuelle, il serait donc régi non pas
par la directive commerce électronique mais par la directive sur les OPCVM.

181
Cf. Rapport Marini, Sénat, Commission des Finances, n° 206, Tome 1.
182
Cf. Recommandation de la COB n° 2000-02 relative à la diffusion d’informations financières sur les forums
de discussion et les sites Internet dédiés à l’information ou au conseil financier ; Rapport COB de novembre
1998, bull. Cob n°329, p. 87 et 93.
183
BONNEAU T., Démarchage et Internet, art préc.
184
VERBIEST T., les nouvelles obligations en matière de publicités et de marketing réalisées par le biais des
nouvelles technologies, juillet 2003, disponible sur : www.droit-technologie.org .
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 77

CONCLUSION

147. Un dispositif intégré. La réalisation d’un marché intégré des services financiers repose
notamment sur la directive commerce électronique, et spécialement sur son article 3
consacrant la clause dite de marché intérieur. Avec l’adoption de ce texte, le législateur
européen a réussi, selon nous, à préciser les règles visant à assurer la libre circulation des
services en tentant de bouleverser le moins possible le cadre communautaire existant
(agrément notamment). Cette clause fonctionne sur la base du principe du pays d’origine et de
la reconnaissance mutuelle, principe qui est assorti d’une série de limites générales et
particulières. Le principe du droit du pays d’origine est désormais clairement établi par cette
directive, principe que la Commission souhaiterait – comme elle l’indique dans sa
communication du 7 février 2001 sur les services financiers et le commerce électronique –
étendre plus largement, tant aux services financiers hors ligne qu’aux services en général185.

148. Des objectifs atteints ? Le but recherché par les professionnels de la banque est bien entendu
de pouvoir bénéficier pleinement du nouveau canal de l’Internet en offrant leurs services à
tous les consommateurs de l’Union Européenne. Cet objectif a conduit les autorités
communautaires à mettre en œuvre un certain nombres de moyens afin d’assurer le bon
fonctionnement du marché via l’Internet. La clause de marché intérieur constitue ainsi un
outil juridique servant une cause économique. Il s’agit d’un instrument général dans la mesure
où elle est applicable indépendamment du type d’opération. D’autres éléments plus
spécifiques aux services bancaires et financiers sont également mis en œuvre186 dans le but de
favoriser la création du marché intérieur.

149. Des incertitudes. Les conséquences de l’application de la directive sur le commerce


électronique et du principe du pays d’origine restent néanmoins, sur de nombreux points,
incertaines dans le secteur des services bancaires et financiers, même si l’on sait que la
Communication précitée du 7 février 2001 avait pour objectif de lever certaines de ces
incertitudes. Dès lors, on peut s’attendre à ce que la Cour de justice soit régulièrement
sollicitée pour apporter les éclaircissements nécessaires sur l’interprétation à donner à ces
textes. De manière assez étonnante, on constate aussi que les entraves qui demeurent à la libre
185
V. Communication de la Commission, Une stratégie pour le marché intérieur des services, COM (2000) 888
du 29 décembre 2000.
186
Cf. supra Partie II, n° 617 et s.
1ère Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – L’impact de la clause de marché intérieur 78

circulation des services financiers en ligne affectent essentiellement les usagers. Ceux-ci
rencontrent encore beaucoup de difficultés à traiter au moyen d’une sécurité juridique
satisfaisante avec les opérateurs établis dans d’autres Etats membres, dans la mesure où ils
doivent eux-mêmes se renseigner sur le contenu du droit du pays d’établissement du
prestataire187.

150. Une condition nécessaire mais pas suffisante. La libre prestation de services bancaires et
financiers est, tout naturellement, une condition essentielle au bon fonctionnement du marché
sur l’Internet. Elle n’est cependant pas suffisante en raison des spécificités de ce nouveau
canal de distribution. Les institutions communautaires l’ont d’ailleurs bien compris : si l’on
veut stimuler la croissance du marché en ralliant à sa cause les différents contractants, il est
important qu’existe un cadre technique sécurisé [juridiquement] pour la réalisation des
paiements des transactions sur l’Internet (titre 2). En effet, à l’heure actuelle, cette insécurité,
qu’elle soit réelle ou virtuelle, est le premier obstacle au paiement dans l’esprit des
internautes.

187
Une telle situation appelait une plus grande harmonisation, à tout le moins des législations protectrices des
consommateurs. C’est l’objet de la directive 2002/65/CE du 23 septembre 2002 concernant la commercialisation
de services financiers auprès des consommateurs. Cf. Titre 2 de la deuxième partie.
TITRE 2

LA SECURITE TECHNIQUE ET
JURIDIQUE DES TRANSACTIONS
BANCAIRES ET FINANCIERES SUR
L’INTERNET
151. Hypothèse de départ. En témoignent les différentes études menées sur ce sujet : l’Internet
n’est pas considéré comme techniquement et juridiquement sûr ; si l’on excepte les
transmissions de virus informatiques, cette insécurité concerne plus particulièrement les
paiements. Car, au fond, l’essentiel est là : instaurer une sécurité, tant technique que juridique,
pour qu’il n’y ait plus de frein au paiement. Les opérations réalisées par le canal de l’Internet
sont considérées comme suspectes pour l’homme de la rue. Il est vrai que par hypothèse la
toile est un réseau ouvert et, de ce fait, les risques quant à l’interception de données circulant
sur le Web ne peuvent être écartés par les acteurs de ce nouveau support.

152. Condition du bon fonctionnement du marché communautaire. Le développement d’un


contexte de confiance passe par la création d’un cadre technique et juridique sécurisé. Il s’agit
de ce point de vue d’une condition du bon fonctionnement du marché. En effet, les opérations
bancaires et financières - fortement concernées par ce souci de sécurité - ne peuvent se
développer que si un cadre technique et juridique bien sécurisé vient dissiper toutes
éventuelles contraintes. Afin d’assurer le développement harmonieux « du réseau des
réseaux », plusieurs techniques spécifiques ou non à l’Internet, permettent de gagner la
confiance des utilisateurs d’Internet.

153. Risques et problématiques non spécifiques. Il n’en demeure pas moins que ces risques
d’atteinte à la sécurité des communications existent également en dehors du réseau Internet.
Les professionnels du secteur bancaire et financier sont particulièrement au fait de ces notions
que sont le secret des affaires ou le respect des correspondances privées, et coutumiers des
problématiques de blanchiment d’argent. S’agissant des opérations bancaires et financières, ce
risque d’atteinte à la sécurité existe quel que soit le canal utilisé ; il s’agit nécessairement pour
1ère Partie : Titre 2 – La sécurité technique et juridique des transactions bancaires et financières sur l’Internet 80

les établissements de le limiter. Pour ce faire, ils peuvent valablement utiliser l’argument de la
sécurité comme moyen de communication mais également recourir aux récentes technologies
mises à leur disposition comme vecteur de développement. Les moyens de paiement
électroniques apparaissent comme de nouvelles opportunités pour les établissements bancaires
et financiers.

154. Adaptation. Si cette problématique n’est pas propre à l’Internet, elle l’est au secteur bancaire
et financier ; en témoigne la lettre même des articles L. 311-1 et 311-3 du code monétaire et
financier : les opérations de banque consistent dans la mise à disposition et la gestion des
moyens de paiement, étant considérés comme moyens de paiement « tous les instruments qui
permettent à toute personne de transférer des fonds, quel que soit le support ou le procédé
technique utilisé ». Néanmoins, la problématique classique de sécurité fait l’objet d’une
adaptation au cadre particulier de l’Internet. En effet celui-ci accentue largement les risques
traditionnels, en raison de la rapidité des transactions et du relatif anonymat qui y préside. Le
besoin de sécurité y est d’autant plus important qu’il s’agit d’un « nouveau » mode de
consommation. Des moyens spécifiques ont donc été développés ou transposés
électroniquement.

155. Moyens utilisés. La cryptologie est supposée répondre aux attentes sécuritaires des différents
acteurs de l’Internet en assurant la confidentialité, l’authentification et l’intégrité des
opérations effectuées dans le domaine bancaire et financier, très sensible à la moindre
défaillance technique. Il en est de même pour la facture qui est un outil indispensable pour
pouvoir justifier la réalité et le contenu notamment d'une transaction bancaire et/ou financière
(par exemple, les données d'un crédit, l'achat de différentes actions ou la souscription d'une
police d'assurance spécifique) (chapitre 1). Ensuite, les perspectives de développement de
paiement à distance sur les réseaux de communication à forte capacité permettent d’envisager
un recours intensif aux nouveaux modes de paiement. La Communauté européenne,
consciente de l’importance de ce phénomène, a veillé à encadrer juridiquement ce nouveau
service financier (chapitre 2).
CHAPITRE 1er
CRYPTOLOGIE ET FACTURATION PAR VOIE ELECTRONIQUE
COMME REPONSE AUX ATTENTES SECURITAIRES

156. Objectifs. La sécurité vise à offrir des garanties suffisantes pour protéger le flux de données
bancaires et financières transmis par le réseau. Plus précisément, le système doit offrir des
solutions qui permettent de vérifier que tant le client que l’organisme bancaire et financier,
sont bien ceux qu’ils prétendent être, et que le contenu du message transmis n’a pas été
modifié (modification par exemple du montant ayant fait l’objet d’un virement, voire du
nombre d’actions vendues ou achetées), de préserver la confidentialité des données transmises
lors d’un échange ou d’un ordre (identité des parties, numéro de compte ou de carte bancaire,
objet et montant de la transaction, etc.) et, enfin, d’assurer que l’une ou l’autre partie n’est pas
en mesure de « répudier » la transaction effectuée (c’est-à-dire de contester après coup
l’existence et/ou la nature de l’opération).

157. Une nécessité. Dans un secteur aussi sensible que celui des transactions bancaires et
financières, les établissements ont très rapidement ressenti la nécessité de mettre en place des
mesures particulières188, afin de créer un environnement de confiance et de sécurité au moins
comparable à celui qui prévaut lorsque les transactions sont réalisées avec la présence
physique des parties ou, à tout le moins, à l’aide d’un support matériel, généralement papier.
Consciente de l’engouement suscité par les services de banque en ligne, la Commission
nationale de l’informatique et des libertés (CNIL)189 a effectué un audit auprès des dix
principaux sites Internet français afin de vérifier dans quelle mesure la confidentialité et la
sécurité des données étaient respectées190. Le résultat rendu public le 29 novembre 2005
montre que 70% d’entre eux sont jugés assez sûrs même si des améliorations restent à
venir191.

188
V. par exemple l’initiative prise par la BNP et le CCF, GARCIA A., Des claviers virtuels pour défendre la
banque sur Internet, 4 avril 2005, disponible sur www.01net.com
189
V. sur les moyens à la disposition de cet organisme pour l’exercice de ses prérogatives, PALLEZ C., La loi du
6 août 2004 : l’expertise la CNIL, Revue Lamy droit de l’immatériel, octobre 2005, n° 9, p. 56.
190
C.N.I.L., 7 banques sur 10 assurent une confidentialité et une sécurité correctes sur leur site Internet, 29
novembre 2005, disponible sur : www.cnil.fr .
191
Atelier groupe BNP Paribas, Banque en ligne : 70% des sites sont assez sûrs selon la Cnil, 30 novembre 2005,
disponible sur : www.atelier.fr .
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 82
attentes sécuritaires

158. Spécificités. Au rang des mesures particulières mises en place, la cryptologie joue un rôle
prépondérant. En effet, son utilisation permet, dans ses différentes variantes, d’offrir les
garanties précitées, dans un domaine où le moindre « trou de sécurité » peut engendrer des
conséquences fortement préjudiciables. De même, dans le secteur des services bancaires et
financiers en ligne, la création de plates-formes électroniques, permettant aux utilisateurs de
passer des transactions bancaires et financières dématérialisées, s’est accompagnée de la mise
à disposition de modules offrant la possibilité de transmettre, de consulter et d’imprimer
directement en ligne les factures, ou autres justificatifs en tenant lieu, afférentes aux
opérations précitées. La facture est un document qui présente une importance considérable
dans les relations d’affaires. Si elle revêt une utilité particulière en matière fiscale –
notamment eu égard à la législation relative à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après TVA) –
elle répond également à d’autres fins. La facture est soumise à diverses réglementations
comptables, fiscales, commerciales (par exemple en matière de faillite) et même parfois
linguistiques. En droit français, elle ne fait pas l’objet d’une définition légale, et les
réglementations qui l’envisagent n’en traitent pas de façon systématique, ce qui pose des
difficultés quant à l’étude de son régime juridique. Par ailleurs, les difficultés liées à cadre
légal de la facture sont renforcées par le développement récent de système de facturation
électronique.

159. Plan. Il est rapidement apparu que la mise en place des systèmes de facturation électronique
s’inscrivait dans un contexte d’insécurité juridique, spécialement pour les grandes entreprises
qui disposent de branches d’activités dans différents pays. En effet, en raison de l’absence
d’un cadre juridique communautaire en la matière, la facturation électronique est soumise
dans les différents Etats membres à des règles très diverses, oscillant de l’interdiction totale à
la plus grande flexibilité. Il en résulte, d’une part, une situation d’une grande complexité pour
les opérateurs et, d’autre part, une inadaptation évidente des législations aux récents
développements technologiques. Ces éléments sont de nature à constituer un frein à la mise en
place des systèmes électroniques de facturation, mais aussi un obstacle au bon fonctionnement
du marché intérieur. La cryptologie (section 1) ainsi que le recours à la transmission des
factures par voie électronique (section 2), loin d’altérer les règles applicables aux opérations
bancaires et financières, en assurent le développement.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 83
attentes sécuritaires

Section 1ère. La cryptologie, outil de libéralisation des opérations bancaires et


financières

160. Plan. La sécurité par voie électronique des transactions bancaires et financières repose
largement sur l’utilisation de moyens de chiffrement des échanges pour en assurer la
confidentialité. La nécessaire utilisation des différents types de produits de cryptologie par le
secteur bancaire et financier (§ 1) a incité le législateur à réglementer ces produits. Cet
encadrement juridique a influé sur le développement des activités bancaires et financières en
ligne (§ 2).

§ 1. La nécessaire utilisation de la cryptologie dans le secteur bancaire et


financier

161. Fil conducteur. Condition du bon fonctionnement du marché communautaire, la sécurité est
le motif déterminant du recours à la cryptologie (B) par le secteur bancaire et financier. Mais,
afin d’en comprendre les enjeux, il convient au préalable de préciser le concept (A). En effet,
la cryptologie n’est pas une technique nouvelle : elle existe depuis des siècles !
Historiquement, les romains chiffraient déjà les messages qu’ils envoyaient par un système de
décalage des lettres dans l’alphabet192. En droit interne, la cryptologie reposait sur des textes193
répertoriant les équipements de cryptophonie ou de cryptographie comme matériels de guerre
de deuxième catégorie. Cette réglementation fit l'objet de nombreuses précisions sur la
définition des procédés techniques de cryptologie concernés194, ainsi que sur les conditions de
fabrication, de commerce, d'acquisition, de détention et d'utilisation de moyens de cryptologie
destinés à des fins professionnelles ou privées sur le territoire national195.

A. Précisions relatives à la cryptologie

162. Terminologie. Les techniques de chiffrement font l’objet d’une terminologie variée : on parle
de cryptage, de cryptographie, de cryptologie, de chiffrement… En pratique, et par souci de
192
PIETTE-COUDOL T., Echanges électroniques, Certification et Sécurité, Paris, Litec, 2000, p. 15.
193
Décret-loi du 18 avril 1939 complété par le décret n°73-364 du 12 mars 1973 relatif à l'application du décret-
loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions.
194
Décret n°86-250 du 18 février 1986.
195
Arrêté du 2 juillet 1990 modifiant l'arrêté du 18 février 1986 relatif à la fabrication, au commerce, à
l'acquisition, à la détention et à l'utilisation de moyens de cryptologie destinés à des fins professionnelles ou
privées sur le territoire national.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 84
attentes sécuritaires

simplification, on doit les considérer comme équivalentes196. Dans la logique, le premier terme
qui devrait être retenu est celui de « chiffrement ». On entend par chiffrement l’opération qui
consiste en la transformation d'un message dit « en clair » en une chaîne de caractères
alphanumériques qui ne sont compréhensibles que pour la personne autorisée.

163. Définition. Le législateur français a opté quant à lui pour le terme cryptologie. En effet,
l’article 28 I de la loi n° 90-1170 du 29 décembre 1990197 définit les prestations de cryptologie
comme celles « visant à transformer à l’aide de conventions secrètes198 des informations ou
signaux clairs en informations ou signaux inintelligibles pour des tiers, ou à réaliser
l’opération inverse, grâce à des moyens matériels ou logiciels conçus à cet effet » et la notion
de moyen de cryptologie comme « tout matériel ou logiciel conçu ou modifié dans le même
objectif ». De nos jours, les systèmes cryptographiques sont variés et sont basés sur
l’utilisation d’algorithmes mathématiques puissants. Ils verrouillent totalement les messages
pour les rendre incompréhensibles. La plupart des systèmes nécessitent pour leur
fonctionnement, l’introduction d’une « clé », qui n’est rien d’autre qu’une donnée numérique
nécessaire au lancement des algorithmes mathématiques.

164. Distinction. Il existe deux grandes familles de produits cryptographiques : la cryptographie


symétrique (a), d’une part, et la cryptographie asymétrique (b), d’autre part199. Les produits
relevant de ces deux familles permettent, séparément ou en combinaison, d’assurer tant la
fonction de signature (authentification et intégrité) que celle de chiffrement (confidentialité).
Cette distinction a une importance non négligeable en ce qui concerne le régime juridique
applicable à l’utilisation de produits de cryptographie.

a. Cryptographie symétrique

165. Fonctionnement. La cryptographie symétrique est un système à clé unique (ou à clé secrète)
utilisant un algorithme qui, comme le suggère son nom, chiffre et déchiffre un message à
l'aide d'une seule clé. Ce type de chiffrement est généralement réalisé à l'aide de produits,
196
Lamy droit de l’informatique et des réseaux, Guide, éd. 2002, p. 1724, n° 3086.
197
Modifiée par la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996.
198
On entend par convention secrète la clé cryptographique secrète utilisée pour déchiffrer (et éventuellement
chiffrer au préalable) le message.
199
Pour une explication détaillée, PARISIEN S. et TRUDEL P., L'identification et la certification dans le
commerce électronique, Québec, Ed. Yvon Blais Inc., 1996, pp. 93-113; PIETTE-COUDOL T., op.cit. ; HUBIN
J., La sécurité informatique, entre technique et droit, Cahiers du C.R.I.D., n° 14, E. Story-Scientia, 1998, spéc.
pp. 68-112.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 85
attentes sécuritaires

fondés, pour la plupart, sur le Data Encryption Standard (DES) lequel est encore largement
répandu dans le secteur bancaire. Un tel procédé est surtout efficace dans les réseaux fermés
et dans un but de recherche de confidentialité ; la nécessité de faire connaître la clé à son
destinataire, avec les inévitables risques d'interception lors de sa transmission, le rend
inadapté aux réseaux ouverts ou à une utilisation à des fins, non de confidentialité, mais de
signature. En effet, on comprend qu’il puisse être dangereux de transmettre cette clé secrète
par une voie incertaine. Notamment sur un réseau informatique, un tiers interceptant la clé
pourra sans difficulté déchiffrer le message qui l’accompagne – de même que tout autre
message protégé par cette clé – mais aussi modifier le contenu du message pour ensuite le
renvoyer chiffré. Par ailleurs, le partage d’une même clé entre l’expéditeur et le destinataire
ouvre le risque de répudiation de l’une ou l’autre partie. La cryptographie asymétrique permet
d’apporter des solutions à ces différents problèmes.

166. Un niveau élevé de sécurité. Le milieu de l’informatique considère que le DES offre un
niveau de sécurité relativement élevé en ce sens qu’il est capable de résister à la plupart des
attaques provenant d’individus. Plus précisément, on considère qu’il est généralement trop
coûteux de mettre en place un système informatique pouvant briser une clé secrète, ou bien
que cela ne peut se faire dans un laps de temps raisonnable.

167. Un risque subsistant. Néanmoins, avec l’évolution constante du matériel, toujours plus
puissant et rapide, le risque de telles attaques apparaît de plus en plus élevé. C’est pour cela
l’utilisation du triple DES s’est généralisée. Celui-ci suppose le chiffrement de chaque bloc de
message sous trois clés différentes. Cette technique permet de contrer les attaques les plus
musclées mais en contrepartie augmente le temps nécessaire au chiffrement et déchiffrement
des messages, ce qui ralentit la vitesse d’exécution des transactions bancaires et financières en
ligne. Cette lenteur apparaît problématique pour les transactions boursières !

b. Cryptographie asymétrique

168. Description. La cryptographie asymétrique, ou bien « à clé publique » permet non seulement
d'expédier des messages confidentiels dans de meilleures conditions de sécurité, mais aussi de
réaliser des signatures numériques (dans le but d’authentifier le signataire et d’assurer
l’intégrité du contenu du message). Le mécanisme repose sur l'utilisation d'une paire de clés,
l'une secrète et l'autre publique, unies entre elles par une formule mathématique. Elle
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 86
attentes sécuritaires

nécessite aussi l’utilisation d’un certificat numérique délivré par un tiers de confiance appelé
prestataire de service de certification. L'application la plus répandue de cryptographie à clé
publique est le R.S.A., du nom de ses concepteurs200.

169. Procédé. Dans un système à clé publique, la réalisation de la fonction de chiffrement à des
fins de confidentialité suppose qu’une personne dispose de deux clés mathématiques
complémentaires : une clé privée, dont le caractère secret doit effectivement être préservé, et
une clé publique, qui peut être librement distribuée. Ces deux clés sont générées sur la base
d’une fonction mathématique telle qu’il est impossible dans un laps de temps raisonnable de
déduire de la clé publique la clé privée correspondante. Afin d’assurer la confidentialité d'un
échange, l'expéditeur procédera comme suit : il chiffrera le message à l'aide de la clé publique
du destinataire, qui pourra uniquement le déchiffrer au moyen de sa propre clé secrète. Ainsi
il sera le seul à pouvoir prendre connaissance du message. L’opération de décodage
s’effectue, en pratique, selon le principe de la complémentarité des clés : un message encodé
avec une clé publique ne peut être décodé qu’avec sa clé privée complémentaire. L’expéditeur
est quant à lui informé de l’identité du destinataire grâce au certificat, émis par un PSC, qui
atteste de l’identité du titulaire du certificat (le destinataire) et assure que la clé publique en
question lui appartient effectivement.

170. Le tiers certificateur. Reste à préciser que l'utilisation de la cryptographie à clé publique
suppose l'organisation de la publicité des clés publiques et l'instauration d'un mécanisme de
contrôle visant à s'assurer en permanence que celles-ci correspondent bien aux personnes qui
s'en prétendent titulaires. Cette double mission de publicité et de certification est actuellement
assumée par un tiers certificateur (appelé « prestataire de service de certification » ou encore
« autorité de certification ») qui tient à jour un registre accessible en temps réel contenant les
certificats délivrés par lui.

171. Bilan. Les deux types de cryptographies – symétrique et asymétrique – permettent de chiffrer
les messages de manière relativement sécurisée afin d’assurer leur transmission en toute
confidentialité. Si ces messages portent sur un ordre de paiement, de bourse ou sur d’autres
données bancaires et financières, on comprend aisément la nécessité d’utiliser de telles
techniques. Néanmoins, si la technique de cryptographie est uniquement utilisée à des fins de

200
C'est en 1977 au Massachusetts Institute of Technology (MIT) que trois amis, les informaticiens Rivest,
Shamir et le théoricien des nombres Adleman ont conçu leur système.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 87
attentes sécuritaires

confidentialité, on constate que le recours au DES (cryptographie symétrique) l’emporte


encore largement sur celui du RSA (cryptographie asymétrique), notamment dans le monde
bancaire et financier. En effet, le principal inconvénient du RSA se situe au niveau de la
vitesse d’exécution des fonctions de chiffrement et de déchiffrement. A titre de comparaison,
installé sous forme de logiciel, le DES permet de réaliser ces fonctions cent fois plus
rapidement que le logiciel RSA, alors que dans le cas du matériel, le DES s’avère cette fois de
mille à dix mille fois plus rapide201 !

172. Sécurité supplémentaire. Enfin, il convient d’ajouter que les outils de cryptographie sont
rarement utilisés seuls mais doivent généralement être complétés par l’utilisation d’outils
supplémentaires. Il en résulte que le degré de sécurité offert par les mécanismes de
cryptographie ne dépend pas uniquement de leurs qualités technologiques intrinsèques mais
est également fonction des techniques de sécurité entourant leur utilisation. Ainsi, des outils
techniques tels que les jetons, cartes et codes permettent de réaliser et de maximiser le
potentiel de sécurité offert par les mécanismes de chiffrement.

173. Illustration. Les cartes et les codes présentent une utilité particulière. En effet, il n’est pas
aisé pour un utilisateur de mémoriser la clé privée, qui n’est qu’une suite de chiffres et de
lettres mais il n’empêche que la clé privée ne doit jamais être conservée en format texte au vu
de tous ou être directement accessible par l’intermédiaire d’un réseau informatique. L’une des
solutions pour conserver ces données de façon sécurisée et les transporter facilement consiste
à les stocker sur une « carte à mémoire » dont l’accès est protégé par un mot de passe ou NIP
(Numéro d’Identification Personnel). Dans ce scénario, la confidentialité du mot de passe doit
bien évidemment être préservée. Or, en pratique, le monde bancaire est confronté à la
difficulté de conscientiser et responsabiliser ses clients afin que ceux-ci veillent à ne pas
divulguer le NIP à un tiers, fût-t-il un membre de sa famille ou de son entourage. Les pouvoirs
publics ont peut-être également un rôle pédagogique à jouer à cet égard.

174. Problème. L’importance pour le secteur bancaire et financier d’utiliser des produits de
cryptologie dans le cadre de ses services n’est plus à démontrer, mais le régime légal de la
cryptologie fait peser sur les organismes de ce secteur de nombreuses contraintes pratiques et
juridiques.

201
PARISIEN S. et TRUDEL P., op.cit., p. 112.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 88
attentes sécuritaires

B. La sécurité en tant que motif déterminant du recours à la cryptologie

175. Principe de confiance. La sécurité constitue une composante fondamentale dans la relation
entre l’organisme bancaire et financier et son client, mais aussi dans la construction et
l’évolution de son système informatique. Cela est d’autant plus vrai que le développement des
opérations bancaires en ligne se substitue peu à peu aux relations « physiques » de contact. Le
client ne se rend plus systématiquement à l’agence pendant les heures de bureau pour
demander à son agent d’effectuer un paiement, d’exécuter un ordre de bourse ou de souscrire
un contrat d’assurance vie. Désormais, il peut matériellement accomplir ces opérations en
ligne, depuis un poste informatique, quel que soit le jour de la semaine ou l’heure.

176. Utilité. En conséquence, il convient de protéger le système, les applications informatiques,


ainsi que toutes les données qui s’y trouvent, contre les intrusions de tiers mal intentionnés.
Par définition, l’Internet est un réseau ouvert et permet un accès externe à des bases de
données sur un serveur web. L’organisme bancaire et financier doit veiller à utiliser les outils
qui permettent de bloquer et de repousser des fraudeurs qui tenteraient d’accéder aux données
sensibles conservées et traitées par ses serveurs. Il doit également développer des solutions
alternatives afin de faire face à des attaques – tant externes qu’internes – qui auraient pour
effet d’entraîner une indisponibilité prolongée du service. De surcroît, le risque de
détournement de sites – qui constitue une nouvelle menace induite par l’usage d’Internet – ne
doit pas être négligé. Il consiste à substituer à des sites « officiels » (d’une banque par
exemple) et parfaitement honorables, des services visant à nuire à l’image des premiers, voire
d’organiser un système de fraude202.

177. Identification. Par ailleurs, il convient également de protéger le client qui se connecte à
distance à des données bancaires et financières. Il doit être en mesure de s’authentifier
correctement (tout en étant certain qu’un tiers ne puisse usurper son identité) et d’accéder à
l’ensemble des données le concernant. Il doit en outre être assuré que, lorsqu’il transmettra
des données de son terminal vers le serveur de la banque, la confidentialité et l’intégrité de
celles-ci seront préservées. Ces impératifs sont d’autant plus importants que les données
manipulées ont un caractère sensible.

202
Infra n° 1108, sur la pratique du « phishing ».
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 89
attentes sécuritaires

178. Problème de l’externalisation. La problématique de la sécurité gagne en complexité dès lors


que les établissements externalisent tout ou partie du développement des applications
bancaires et financières électroniques. Dans ce cas, ceux-ci n’assurent plus toujours une
maîtrise directe des aspects de sécurité. Or un établissement bancaire et financier qui
négligerait ces précautions lors du développement de ses activités en ligne pourrait voir
engager sa responsabilité afin de réparer le préjudice subi par ses clients, et mettre en péril
non seulement sa réputation mais aussi celle de tout le secteur. Ces graves
dysfonctionnements peuvent susciter une perte de confiance de la part de la clientèle et, par
propagation, porter préjudice à l’ensemble de la communauté financière.

179. Une action commune. Nul doute que dans ce contexte, l’ensemble des établissements du
secteur bancaire et financier collabore en vue de s’accorder sur les standards de sécurité à
développer. L’utilisation des produits de cryptologie contribue à réduire fortement le risque de
survenance des multiples menaces précédemment énoncées. En effet, avec les architectures
centralisées des débuts de l’informatique, une protection physique du centre de calcul suffisait
généralement pour éviter les dommages. Désormais, il est indispensable de disposer de
moyens de sécurité beaucoup plus souples afin de faire face aux problèmes créés par
l’émergence d’une informatique plus éclectique, plus répandue et surtout plus distribuée.
Ainsi, on ressent de plus en plus la nécessité de protéger logiquement les systèmes
informatiques. Quoi qu’il en soit, la cryptographie ou cryptologie offre un moyen efficace de
protéger les informations. Les techniques de cryptage sont variées et permettent de garantir
diverses fonctions.

§ 2. Le régime juridique français de la cryptologie et ses conséquences pour le


secteur bancaire et financier

180. Evolutions. Le régime juridique de la cryptographie a été revu par la Loi de Réforme des
Télécommunications (LRT). Pour la première fois, le législateur reconnaît que cet outil peut
efficacement contribuer à la sécurisation des télécommunications. Le droit positif de la
cryptologie, issu désormais du remaniement effectué par la Loi pour la Confiance dans
l'Economie Numérique (B), a supplanté le régime critiqué de la loi de 1990 modifiée (A).
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 90
attentes sécuritaires

A. Régime issu de la loi LRT de 1990

181. Synthèse du régime. Le mouvement de libéralisation de la cryptographie a été amorcé par la


loi n° 90-1170 du 29 décembre 1990 sur la réglementation des télécommunications, réformée
par la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996. Le dispositif mis en place oscille entre la pleine liberté
(a), le recours à des tiers agréés (b) et le recours à des formalités préalables (c). La loi
française légitime le système mis en place par des considérations de sécurité nationale et le
fait que la circulation de messages cryptés présente des dangers évidents sur le plan de la
défense et du grand banditisme203 204.

a. Le régime de la cryptologie « libre »

182. Principe de liberté. La loi de 1990 a très largement libéralisé l’utilisation des moyens de
cryptologie lorsqu’ils sont utilisés exclusivement pour la signature électronique, c’est-à-dire à
des fins d’authentification des messages, de non répudiation et de maintien de l’intégrité de
ceux-ci (article 28, I, de la loi du 29 décembre 1990). Un décret de 1998 précise et complète
ce principe libéral. Il en résulte que le système mis en place ne prévoit la liberté d’utilisation
que dans deux hypothèses précises visées par le texte.
ƒ Soit les outils de cryptographie sont utilisés strictement dans le but d’exercer une
fonction d’authentification et/ou de préservation de l’intégrité des messages, mais sans que
ceux-ci soient rendus opaques. Le texte précise néanmoins que ces outils peuvent chiffrer les
mots de passe, les codes d’identification, ce qui fut heureux pour le secteur bancaire et
financier qui est un important utilisateur de ces moyens d’authentification. A l’instar du
Professeur E.A. CAPRIOLI, nous pouvons dire que cette hypothèse vise notamment les
systèmes d’identification utilisés par les cartes bancaires et les logiciels de signature
électronique205.

203
Article 28 I, alinéa 2, de la loi du 29 décembre 1990 que les règles posées le sont « pour préserver les intérêts
de la défense nationale et de la sécurité intérieure ou extérieure de l’Etat, tout en permettant la protection des
informations et le développement des communications et transactions sécurisées ».
204
Selon WARUSFEL M., deux objectifs visés par le texte peuvent être identifiés : « D’une part, l’Etat
souhaitait conserver un quasi-monopole pour l’usage de certaines technologies cryptologiques de haut niveau
nécessaires pour assurer la sécurité de ses communications gouvernementales (chiffres militaire et diplomatique
essentiellement) ; d’autre part, ce contrôle vise également à ce que les moyens cryptologiques employés par les
personnes privées n’empêchent pas les autorités administratives et judiciaires d’effectuer les interceptions que
la loi du 10 juillet 1991 les autorise à mettre en œuvre ». WARUSFEL B., Les conditions juridiques de la
sécurité sur Internet et le régime juridique de la cryptologie en France , in Internet saisi par le droit, éd. des
Parques, 1997, p. 199 et s., spéc. p. 206. V. aussi GRANIER T. et JAFFEUX C., Internet et transactions
financières, Ed. Economica, Paris, 2002, pp. 108-112.
205
CAPRIOLI E. A., Le régime juridique des paiements sur Internet in Internet saisi par le Droit, Ed. des
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 91
attentes sécuritaires

ƒ Soit les outils de cryptographie permettent de chiffrer, et donc de rendre confidentiels


les messages, tout en sachant que l’intervention d’un tiers agréé justifie le caractère libre de
l’utilisation.

183. Limite et interrogations. Dans les hypothèses autres que les deux précitées – notamment
l’utilisation de moyens de cryptologie à des fins de confidentialité sans intervention d’un tiers,
ainsi que la fourniture, l’importation ou l’exportation de tels moyens (sous réserve des effets
du décret du 17 mars 1999 visé ci-après) –, il est nécessaire soit d’obtenir une autorisation
préalable du Premier ministre, soit de procéder simplement à une déclaration préalable. Le
décret du 17 mars 1999206, quant à lui, dresse une liste concrète des moyens ou prestations
« libérés », c’est-à-dire dispensés de toutes formalités préalables, que ce soit une autorisation
ou une simple déclaration. Plusieurs points de ce décret intéressent particulièrement le secteur
bancaire et financier. En effet, sont dispensées d’une formalité préalable l’utilisation mais
aussi la fourniture, l’exportation et l’importation de moyens ou prestations de cryptologie
notamment les « équipements de contrôle d’accès, tels que machines automatiques de
distribution de billets, imprimantes libre-service de relevés de compte ou terminaux de points
de vente, protégeant les mots de passe, numéros d’identification personnels ou autres données
similaires empêchant l’accès non autorisé à des installations, mais ne permettant pas le
chiffrement des fichiers ou des textes, sauf lorsqu’il est directement lié à la protection des
mots de passe ou des numéros d’identification personnels ». La dernière partie de la phrase
pose, selon nous, quelques difficultés d’interprétation. En effet, lors d’un retrait d’argent
auprès d’un distributeur de billets ou lors de la passation d’une transaction bancaire ou
financière en ligne, les données qui vont être transmises sont, certes, les données
d’identification, mais concernent aussi d’autres informations telles que la nature ou le montant
de la transaction (virement d’argent avec une éventuelle communication, ordre de bourse,
souscription à tel ou tel produit d’assurance). Il est évident que les parties n’entendent pas
uniquement utiliser le moyen de cryptologie pour chiffrer les données d’identification et le
mot de passe mais également pour chiffrer les autres données liées à la transaction. Ainsi, le
chiffrement de ces derniers peut-il être considéré comme un chiffrement « directement lié à la
protection des mots de passe ou des numéros d’identification personnels » au sens du texte
précité ? La réponse à cette question est importante car elle permet de déterminer si

Parques, 1997, p. 61 et s., spéc. p. 92.


206
Décret n° 99-200 du 17 mars 1999 définissant les catégories de moyens et de prestations de cryptologie
dispensées de toute formalité préalable.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 92
attentes sécuritaires

l’utilisation du moyen de cryptologie à cet effet bénéficie du régime de liberté ou non. Si le


texte n’apporte aucun élément de réponse, il convient déjà, selon nous, d’apporter une réponse
affirmative dans la mesure où le contenu d’une transaction bancaire ou financière est toujours
directement lié à une donnée d’identification et à un mot de passe. Il s’agit donc de crypter le
tout comme un ensemble cohérent. La même dispense d’autorisation est également prévue
pour l’utilisation, la fourniture, l’exportation et l’importation de « cartes à microprocesseur
personnalisées ou leurs composants (…) » ainsi que de « systèmes de gestion de facturation
inclus dans les dispositifs de relevés de compteurs dont les fonctions de chiffrement sont
directement liées au comptage », qui sont des éléments également largement utilisés dans le
secteur bancaire et financier.

b. Le régime des tiers agréés

184. Le recours. Sous le régime de la loi du 29 décembre 1990, si un organisme bancaire ou


financier entend utiliser des outils permettant de chiffrer les transactions – et pour autant que
ces outils ne bénéficient pas du point a), article 1er, du décret n° 98-101 du 24 février 1998 –,
il doit nécessairement se rapprocher, s’il souhaite bénéficier du régime de liberté d’utilisation,
d’un tiers chargé de gérer pour le compte d’autrui les conventions secrètes de moyens ou de
prestations de cryptologie permettant d’assurer la fonction de confidentialité207. Pour le reste,
aucune démarche administrative n’est cependant imposée à l’utilisateur potentiel. Il s’agit,
dans l’esprit du législateur, de « tiers de confiance »208, agréés - ou non - par le Premier
ministre. En effet il suffit que « l’organisme compte, parmi son personnel, un nombre
suffisant de personnes habilitées pour être en mesure de satisfaire aux obligations du décret
du 12 mai 1981 »209.

185. Rôle et incertitudes. Une fois agréé, le tiers de confiance est investi d’une fonction définie
par la loi. En effet, pour rappel, l’article 28 II de la loi du 29 décembre 1990 indique que les
organismes sont « chargés de gérer pour le compte d’autrui les conventions secrètes de
moyens ou prestations de cryptologie permettant d’assurer des fonctions de

207
Ils font l’objet des dispositions de l’article 28 II de la loi n° 90-1170 du 29 décembre 1990, modifiée par la loi
n° 96-659 du 26 juillet 1996, ainsi que du décret n° 98-102 du 24 février 1998 définissant les conditions dans
lesquelles sont agréés les organismes gérant pour le compte d’autrui des conventions secrètes de cryptologie,
ainsi que d’arrêtés en date du 13 mars 1998.
208
On a même pu parler, de « tiers de défiance » !, v. SÉDALLIAN V., op.cit., p. 184.
209
Décret n° 81-514 relatif à l’organisation de la protection des secrets et des informations concernant la défense
nationale et la sûreté de l’Etat.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 93
attentes sécuritaires

confidentialité…) ». On s’interroge sur cette fonction de « gestion pour le compte d’autrui ».


Il est évident que cela exclut une gestion pour soi-même. Mais dans le monde bancaire et,
plus généralement, de l’entreprise, quelle peut-être la juste définition de cette « altérité » : qui
est « l’autrui » visé par le texte ? Le texte ne donne aucun élément de réponse et l’absence de
pratique en la matière ne facilite pas le raisonnement. Pourtant, on pourrait comprendre que le
secteur bancaire et financier - dans le souci de veiller au respect du secret bancaire - cherche à
conserver une maîtrise minimale sur le tiers dépositaire des clés, ou à tout le moins, ait un
droit de regard sur celui-ci afin de s’assurer qu’il accomplisse sa mission dans le respect de la
plus grande confidentialité. Certes, ces tiers de confiance agréés sont tenus au respect du
secret professionnel, mais on sait par ailleurs que les principes juridiques ont leurs limites. On
pourrait donc comprendre que le monde bancaire ne soit pas favorable à l’utilisation d’un tel
système. De plus pèse sur lui une obligation d’information justifiée par le souci de sécurité
publique qui anime tout le dispositif légal210. En pratique, force est de constater que ce
nouveau métier n’a pas attiré une foule de candidatures puisque, seul la Direction centrale de
la sécurité des systèmes d'information (DCSSI)211 a été désignée comme tiers agréé. Cela ne
démontre-t-il pas le peu d’enthousiasme du marché pour cette initiative réglementaire ?

c. Le régime de la cryptologie « soumise à formalité préalable »

186. Autorisation et déclaration. Certaines utilisations de moyens ou de prestations de


cryptologie sont soumises à l’accomplissement d’une formalité préalable (autorisation212 ou
simple déclaration). En effet, l’article 28 I de la loi du 29 décembre 1990, indique que

210
Dans le même ordre d’idée, l’article 203-1 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité
quotidienne énonce que « lorsqu'il apparaît que des données saisies ou obtenues au cours de l'enquête ou de
l'instruction ont fait l'objet d'opérations de transformation empêchant d'accéder aux informations en clair
qu'elles contiennent ou de les comprendre, le procureur de la République, la juridiction d'instruction ou la
juridiction de jugement saisie de l'affaire peut désigner toute personne physique ou morale qualifiée, en vue
d'effectuer les opérations techniques permettant d'obtenir la version en clair de ces informations ainsi que, dans
le cas où un moyen de cryptologie a été utilisé, la convention secrète de déchiffrement, si cela apparaît
nécessaire ».
211
Héritière du Service central de la sécurité des systèmes d'information, centre focal de l' État pour la sécurité
des systèmes d'information, la DCSSI a été instituée par le décret n° 2001-693 du 31 juillet 2001. Elle est placée
sous l'autorité du Secrétaire général de la défense nationale. Les deux arrêtés du 15 mars 2002, (JO du 17 mars
2002, p. 4838 et 4839) en précisent l'organisation, disponible sur : http://www.ssi.gouv.fr/fr/dcssi/index.html .
212
La notion d’autorisation doit être nuancée car elle peut parfois être remplacée par une simple déclaration
préalable. En effet, un décret du 17 mars 1999 prévoit que certains matériels, logiciels ou équipements, bien
qu’assurant une fonction de confidentialité, ont été jugés pouvoir échapper à la politique de contrôle. En
conséquence, ces éléments ne sont soumis qu’à simple déclaration. Ainsi en est-il des « matériels ou logiciels
offrant un service de confidentialité mis en œuvre par un algorithme dont la clé est d’une longueur supérieure à
40 bits et inférieure ou égale à 128 bits ». Au-delà de 128 bits, l’utilisation est soumise à une autorisation
préalable. En deçà de 41 bits, l’utilisation est libre. Entre les deux, l’utilisation est soumise à déclaration
préalable.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 94
attentes sécuritaires

« L’utilisation d’un moyen ou d’une prestation de cryptologie est : (…) ; b) soumise à


l’autorisation du Premier ministre dans les autres cas ». Il s’agit des hypothèses dans
lesquels la cryptologie est utilisée pour la fonction de confidentialité et où aucun recours à un
tiers de séquestre n’est envisagé.

187. Importations et exportations. L’usage ou l’« utilisation » de produit de cryptologie est une
opération envisagée par la loi. Mais celle-ci se préoccupe également dans son article 28-2 de
la fourniture, de l’importation d’un pays n’appartenant pas à la Communauté européenne
(auquel il s’agit d’ajouter l’Espace économique européen), ainsi que de l’exportation des
moyens et prestations de cryptologie.

188. Problème. Dans la mesure où, pour des raisons évidentes de sécurité, les outils
cryptologiques permettant d’assurer la confidentialité sont largement utilisés dans le secteur
bancaire et financier, une question importante se pose. Un organisme bancaire qui intègre un
algorithme de confidentialité dans le cadre de ses opérations en ligne est-il considéré comme
simple utilisateur ou comme fournisseur de produits cryptographiques à l’égard de ses clients-
utilisateurs ? La réponse à cette question déterminera l’étendue des obligations pesant sur
l’organisme bancaire.

189. Réponse ? La loi ne répond pas à cette question, mais une réponse ministérielle précise ce
qu’il faut entendre par fournisseur et fourniture213. Celle-ci semble exclure la qualification de
fournisseur et entend par « fourniture : contrat par lequel une personne, appelée fournisseur,
s’engage à approvisionner pendant un certain temps de manière ponctuelle, périodique ou
continue, en moyens ou en services, une autre personne ». On doit reconnaître que la relation
banque-client demeure régie par un document contractuel et qu’on ne se trouve pas dans une
telle logique « d’approvisionnement durant un certain temps », le logiciel étant fourni une
fois pour toutes lors de la souscription au service. Cette interprétation est confirmée par la
même réponse qui indique que le fournisseur est « typiquement le fabricant du produit ». On
en conclut qu’un organisme bancaire ou financier qui intègre des moyens de cryptologie dans
le cadre du développement de ses applications informatiques ne doit pas être considéré
comme un fournisseur – et échappe donc aux obligations à la charge de ce dernier -, mais doit
être simplement considéré comme un utilisateur.

213
Rép. min. n° 154458, JOANO, 5 octobre 1998, p. 5451.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 95
attentes sécuritaires

190. Terminologie. D’un point de vue purement terminologique, le vocabulaire adopté par la
réglementation n’est pas satisfaisant car juridiquement inadéquat. En effet, il est difficile de
parler de « l’exportation » d’une prestation, c’est-à-dire de ce qui relève d’une « mise à
disposition » à l’étranger. Peu importe le canal de celle-ci : une mise à disposition en ligne est
également concernée par le texte214. Cette remarque étant faite, nous ne pensons pas que le
secteur bancaire et financier souhaite s’engager dans l’exportation de moyens et de prestations
de cryptologie.

191. Bilan. Sous la loi de 1990, des contraintes pèsent sur les utilisateurs – organisme bancaire et
financier ainsi que, le cas échéant, leurs clients – de moyens et de prestations de cryptologie.
Par ailleurs, qu’en est-il d’un utilisateur français qui souhaite augmenter le niveau de sécurité
proposé par sa banque en téléchargeant un logiciel de cryptologie de 512 bits sur un site Web
asiatique ? Un téléchargement en ligne peut être considéré comme une importation au sens de
la loi et déclencher son application. En pratique, comment contrôler le fait qu’il y a eu
téléchargement… sauf à entrer dans une logique policière ? Faut-il vraiment croire que les
professionnels du crime naviguant sur les réseaux vont se plier à la loi française ? Et, s’ils ne
le font pas, qui donc, en définitive, se trouve handicapé par ces dispositions215 ?

192. Une solution marginale et critiquée. Cela étant dit, nous ne pouvons que rejoindre les
commentateurs qui ont critiqué le caractère largement irréaliste216 des dispositions légales
françaises. En effet, qui peut être assez naïf pour croire que l’interdiction, ou simplement la
mise en place d’un système d’autorisation préalable, empêchera les criminels ou autres
terroristes de se procurer les logiciels nécessaires et de les utiliser. On constate donc que la loi
ne permet pas d’atteindre l’objectif souhaité mais à l’inverse pénalise par l’excès de
contraintes qu’elle crée, les organismes bancaires et financiers qui doivent utiliser les outils de
cryptographie dans le cadre de leurs activités. Dans un rapport remarqué du 2 juillet 1998, le
Conseil d’Etat a également largement critiqué la réglementation de la cryptographie, qui
n’avait pourtant que quelques mois d’application à l’époque217. Le Conseil d’Etat relève que
les critiques convergent vers la mise en place et le rôle de « tiers de séquestre ». A cet égard,
la première préoccupation tient à la singularité de la position française par rapport à celle des

214
Lamy droit de l’informatique et des réseaux, Guide, éd. 2002, p. 1727, n° 3092.
215
Lamy droit de l’informatique et des réseaux, op. cit., p. 1730, n° 3098.
216
PIETTE-COUDOL T., op.cit., pp. 26-32 ; SÉDALLIAN V., Droit de l’Internet, Ed. Net Press éd., 1997, p.
181 et s. ; Lamy droit de l’informatique et des réseaux, Guide, éd. 2002, p. 1730, n° 3098, et les références.
217
Le rapport du Conseil d’Etat « Internet et les réseaux numériques » du 2 juillet 1998 est disponible sur :
http://www.internet.gouv.fr/francais/textesref/rapce98/accueil.htm.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 96
attentes sécuritaires

autres pays dans le domaine de la cryptologie. En effet, la France est la seule à avoir instauré
un système de « tiers de séquestre ». Or un tel mécanisme suppose le recours à des produits et
une technologie très spécifique, puisqu'il est nécessaire de prévoir la remise automatique des
clés de chiffrement à un organisme tiers, alors que quasiment aucun produit de cryptologie
(logiciels notamment) commercialisé dans le monde ne le permettait en 1998.

193. Une efficacité douteuse. Par ailleurs, selon le Conseil d’Etat, la seconde interrogation que
l'on pouvait avoir à l'égard du dispositif retenu par le Gouvernement218 pour régir la
cryptologie tenait à son efficacité. Le système des « tiers de séquestre » était relativement
contraignant pour les utilisateurs, et potentiellement coûteux pour les entreprises. Or, il était à
craindre que les délinquants se refusent à remettre leurs clés à des « tiers de séquestre » ou
utilisent des méthodes de chiffrement difficilement détectables, par exemple par des procédés
de stéganographie (i.e. incorporation de messages codés dans des images numériques
transmises apparemment « en clair »)219.

B. Les apports de la loi pour la confiance dans l’économie numérique

194. Objectifs. La loi pour la Confiance dans l'Economie numérique (LEN)220, dite également loi
Fontaine, a pour objet de donner une nouvelle impulsion au commerce électronique et à la
sécurité des transactions électroniques. Elle constitue le premier élément du plan RE/SO 2007
(Pour une République Numérique dans la société de l’Information) présenté en novembre
2002 par le Premier ministre, décrivant la politique du Gouvernement pour favoriser le
développement des technologies de l'information. Ce texte vise à créer un climat de confiance
en fixant des règles du jeu claires pour les fournisseurs et en assurant une protection efficace
des utilisateurs.

195. Constat. La législation antérieure ne répondant pas aux problèmes nouveaux qu'elle a fait
surgir dans une période très courte, il devenait urgent de combler les vides laissés par les
textes afin d’assurer la sécurité juridique sans laquelle les énergies ne pourront se développer

218
Lors d’une conférence de presse en février 1999, le Premier ministre indique enfin que les dispositions
relatives à la cryptologie « restreignent fortement l’usage de la cryptologie dans notre pays, sans pour autant
permettre aux pouvoirs publics de lutter efficacement contre des agissements criminels dont le chiffrement
pourrait faciliter la dissimulation. Elles font en outre apparaître un risque d’isolement de la France par rapport
à ses principaux partenaires », cité par PIETTE-COUDOL T., op.cit., p. 29.
219
Rapport du Conseil d’Etat « Internet et les réseaux numériques » du 2 juillet 1998, op.cit., pp. 73-77.
220
Loi n° 2004 - 575 du 21 juin 2004.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 97
attentes sécuritaires

dans ce secteur particulièrement porteur. La LEN n’abroge pas formellement la loi du 26


juillet 1996, mais en modifie substantiellement la partie relative à la cryptologie.

196. Problématiques. Les principales dispositions de la loi visent les problématiques suivantes :
1. Renforcer la confiance dans le commerce électronique et la lutte contre les publicités
indésirables ;
2. Définir précisément les conditions de responsabilité des intermédiaires techniques, à
savoir les hébergeurs de sites, les fournisseurs d’accès Internet et les opérateurs de
telecommunications ;
3. Mettre en place des règles de gestion des adresses françaises de l’Internet renforçant la
liberté de la communication publique en ligne en France ;
4. Libéraliser l’utilisation de la cryptologie pour renforcer la sécurité des échanges et
amplifier les moyens de lutte contre la cybercriminalité.
Ce texte met fin au retard, de plus d’un an, de la France dans la transposition de la directive
européenne 2000/31/CE du 8 juin 2000 sur le commerce électronique221, qui aurait dû être
transposée avant le 17 janvier 2002222.

197. « Champ d’application ». Les dispositions proposées par le projet de loi LEN s’articulent
autour de cinq thèmes ordonnés en autant de titres :
ƒ Un titre I portant sur la liberté de communication en ligne, qui définit les règles
applicables en matière de responsabilité des prestataires techniques et met en place une
gestion des adresses française de l’Internet (le suffixe« .fr ») ;
ƒ Un titre II portant sur le commerce en ligne, sur la publicité en ligne223 et sur les contrats
par voie électronique ;
ƒ Un titre III portant sur un assouplissement du contrôle des moyens de cryptologie pour
permettre le renforcement de la sécurité des transactions et des mesures permettant
d’améliorer la lutte contre la cybercriminalité (notamment en ce qui concerne la
transmission de virus informatique) ;

221
La plupart des dispositions de cette directive avaient été reprises dans le projet de Loi sur la Société de
l’Information (LSI) présenté en juin 2001 par le précédant gouvernement. Mais bien qu’approuvé en Conseil de
Ministres et déposé à l’Assemblée Nationale, le projet LSI est devenu caduc avec la fin de la législature.
222
L’article 22 de la directive énonce que « Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives,
réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive avant le 17 janvier 2002.
Ils en informent immédiatement la Commission ».
223
Il est utile de signaler que la Chambre du commerce internationale a actualisé ses règles de bonne conduite
relative à la publicité faite via Internet ou plus généralement par tout média, par un rapport publié le 6 avril 2005.
Le texte de ces nouvelles lignes directrices est disponible sur : http://www.iccwbo.org/iccigc/index.html .
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 98
attentes sécuritaires

ƒ Un titre IV portant sur la mise en place d’une réglementation sur les fréquences des
systèmes à satellites rendue nécessaire par la disparition des monopoles publics ;
ƒ Un titre V sur le développement des technologies de l’information et de la
communication.
Dans la mesure où les titres I, II, IV et V ne concernent pas le présent chapitre, nous ne
traiterons que le titre III relatif à « la sécurité dans l’économie numérique ».

198. Principes. Par rapport aux décrets de mars 1999, le texte de loi va encore plus loin dans le
mouvement de libéralisation des moyens et des prestations de cryptologie224. En effet, l’article
30 I énonce que « L’utilisation des moyens de cryptologie est libre ». Le texte ne fait plus de
distinction selon que le moyen assure exclusivement des fonctions d’authentification et de
contrôle d’intégrité ou si, plus largement, il assure une fonction de confidentialité. Par
ailleurs, il ne précise plus une longueur maximale de la clé. L’utilisation reste libre dans
l’hypothèse même où la clé dépasserait 128 bits et aurait une longueur de 512 bits voire 1024
bits225. Ainsi, l'utilisation des moyens de cryptologie est entièrement libéralisée. Les personnes
physiques comme les entreprises pourront utiliser librement selon la nouvelle définition
consacrée « tout matériel ou logiciel conçu ou modifié pour transformer des données, qu'il
s'agisse d'informations ou de signaux, à l'aide de conventions secrètes ou pour réaliser
l'opération inverse avec ou sans convention secrète ». Est également libre la fourniture, le
transfert vers ou depuis un Etat membre de la communauté européenne ou l'importation et
l'exportation des moyens de cryptologie dont la seule fonction cryptologique est une fonction
d'authentification ou de contrôle d'intégrité, notamment à des fins de signature électronique.

199. Responsabilité. En contrepartie de cette libéralisation, les prestataires qui assurent des
prestations de cryptologie à des fins de confidentialité, sont présumés responsables, jusqu'à
preuve du contraire, et malgré toute disposition contractuelle contraire, du « préjudice causé
aux personnes leur confiant la gestion de leurs conventions secrètes en cas d'atteinte à

224
L’article 29 de la LEN définit le moyen de cryptologie comme « tout matériel ou logiciel conçu ou modifié
pour transformer des données, qu'il s'agisse d'informations ou de signaux, à l'aide de conventions secrètes ou
pour réaliser l'opération inverse avec ou sans convention secrète. Ces moyens de cryptologie ont principalement
pour objet de garantir la sécurité du stockage ou de la transmission des données en permettant d’assurer leur
confidentialité, des données, leur authentification ou le contrôle de leur intégrité » et la prestation de
cryptologie comme toute « toute opération visant à la mise en œuvre, pour le compte d’autrui, de moyens de
cryptologie. »
225
Cette solution est heureuse du point de vue de la sécurité. En effet, on considère qu’il est temporellement
impossible de casser une clé aussi longue et donc de pouvoir déchiffrer le message chiffré sans disposer de cette
clé.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux 99
attentes sécuritaires

l'intégrité, à la confidentialité ou à la disponibilité des données transformées à l'aide de ces


conventions ». Cette présomption ne pourra être levée par ledit prestataire que s'il est en
mesure de démontrer qu'il n'a commis aucune faute intentionnelle ou de négligence. Le texte
précise également l'étendue de la responsabilité des prestataires de certification électronique,
que l'on retrouve essentiellement dans la réglementation du 13 mars 2000 et ses décrets.
Ainsi ces prestataires :
ƒ Sont présumés responsables du préjudice causé aux personnes qui se sont fiées
raisonnablement aux certificats présentés comme qualifiés alors qu’ils ne le sont pas ;
ƒ Doivent justifier d'une garantie financière suffisante, spécialement affectée au paiement
des sommes qu'ils pourraient devoir aux personnes s'étant fiées raisonnablement aux
certificats qualifiés qu'elles délivrent, ou d'une assurance garantissant les conséquences
pécuniaires de leur responsabilité professionnelle.
Cependant lesdits prestataires :
ƒ Peuvent lever la présomption énoncée ci-dessus en apportant la preuve qu'ils n'ont
commis aucune faute intentionnelle ou de négligence ;
ƒ Ne sont pas responsables du préjudice causé par un usage du certificat dépassant les
limites fixées à son utilisation ou la valeur des transactions pour lesquelles il peut être
utilisé, à la condition que ces limites aient été clairement portées à la connaissance des
utilisateurs dans le certificat.

200. Remarque. On notera que la notion de « garantie suffisante » n'est pas assez explicite, pas
plus que ne le sont les notions de faute intentionnelle ou de négligence en cette matière
nouvelle et spécifique. On constatera également que, curieusement et sans véritable
justification, si pour la responsabilité des prestataires de signature électronique les termes de
la responsabilité s'appliquent « nonobstant toute stipulation contractuelle contraire », cette
précision textuelle n'existe pas dans l'article relatif à la responsabilité de prestataires de
certification ce qui, en conséquence, permettrait de conférer une pleine valeur aux clauses
attribuant ou limitant la responsabilité des contrats conclus avec des tiers certificateurs.

201. Résultat. L’avancée proposée est particulièrement heureuse pour le secteur bancaire et
financier. Une banque peut elle aussi développer des applications hautement sécurisées, dans
son intérêt et dans celui de ses clients, sans devoir au préalable demander une autorisation au
Premier ministre (sauf transfert vers un Etat membre de la communauté européenne ou
l'exportation de moyens de cryptologie lorsqu'ils assurent d'autres fonctions que celle
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux100
attentes sécuritaires

d'authentification ou de contrôle d'intégrité). En conséquence, il suffira de procéder à une


déclaration préalable, voire de recourir à un tiers de séquestre. A noter que dans les deux cas,
les conditions de déclaration ou d'autorisation feront l'objet d'un décret pour leur mise en
œuvre, la loi prévoyant par avance que le décret pourrait être l'occasion de dresser une liste de
catégories de moyens qui pourraient être exonérés de formalité ou contraints à une obligation
moindre.

202. Conséquences. Désormais, une banque française ou un utilisateur peut télécharger en toute
liberté un logiciel permettant de générer des signatures électroniques. Si, en revanche, le
logiciel n’assure pas exclusivement des fonctions d’authentification ou de contrôle d’intégrité
mais permet en outre de rendre les messages confidentiels, « la fourniture, le transfert depuis
un Etat membre de la Communauté européenne ou l'importation d’un moyen de cryptologie »
ne seront libres que s’«ils sont soumis à une déclaration préalable auprès du Premier
ministre » et dans ce cas « le fournisseur ou la personne procédant au transfert ou à
l'importation tiennent à la disposition du Premier ministre une description des
caractéristiques techniques de ce moyen de cryptologie », et cela sans considération de la
longueur de la clé (art. 30, IV)226. Il semble que l’ensemble des dispositions prévues par la
LEN, puissent être utilisées par les établissements bancaires et financiers, tant pour leur
propre compte que pour le compte de leur client. Ainsi, à la question de savoir si les
opérations bancaires et financières, eu égard à leur caractère sensible devaient faire l’objet de
dispositions spéciales, nous répondons par la négative car le cadre instauré apparaît
suffisamment protecteur, et la mise en place d’une spécificité bancaire et financière aurait
contribué à la complexification de ce secteur. En revanche, s’agissant de la répression pénale,
cette explication n’est à notre sens pas de mise et il aurait sans doute été opportun d’ériger en
infraction spéciale la fraude et/ou l’atteinte au secret bancaire, afin que la sanction de ce type
de comportement soit rendue comminatoire.

203. Politique de sécurité. La libéralisation s’accompagne d’un régime de responsabilité


renforcée227 pour les prestataires de services de cryptologie (art.32) et de certification

226
A noter toutefois, que la définition et le champ d’application de ce cadre général basé, comme précité, sur
trois régimes : un régime de liberté, un régime de déclaration et un régime d’autorisation, sont renvoyés à des
décrets en Conseil d’Etat.
227
Nonobstant toute disposition contractuelle contraire, présomption de responsabilité ne pouvant être écartée
que par la preuve de faute intentionnelle ou de négligence.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux101
attentes sécuritaires

électronique (art. 33)228 mais également d’une politique de sécurité visant à accroître les
moyens de lutte contre l’utilisation de la cryptologie à des fins délictueuses. Ainsi, à la
différence de bon nombre de dispositions de la LEN, celles relatives à la cryptologie sont
assorties de sanctions pénales particulièrement dissuasives puisqu'elles comportent des peines
d'emprisonnement passibles de un ans à deux ans. Pour ce faire, l'article 36 détaille en plus de
cinq aliénas les compétences et moyens d'investigation des autorités compétentes dans la
recherche d'éventuelles infractions sur la législation applicable en matière de cryptologie.

204. Aggravation des peines. De même, la loi relève les peines encourues au titre d'une infraction
dès lors que son auteur aura utilisé un moyen de cryptologie pour faciliter la préparation ou la
commission de celle-ci. Cela ne s'applique pas lorsque l'auteur ou le complice de l'infraction
remet, à leur demande, aux autorités judiciaires ou administratives « la version en clair des
messages chiffrés ainsi que les conventions secrètes nécessaires au déchiffrement ». Ainsi,
l’arsenal des mesures est rendu pleinement effectif par le renforcement des pouvoirs du juge.
A noter que la loi emporte modification et précision de la loi relative à la sécurité quotidienne
au titre de la possibilité pour les autorités judiciaires de faire procéder à la « mise au clair des
données chiffrées nécessaires à la manifestation de la vérité ». A nouveau, les contraintes
s’amenuisent considérablement au profit d’une utilisation, d’une fourniture et d’une
importation plus étendues des moyens et des prestations de cryptologie réputés sécurisés.

205. Cyber criminalité. S'agissant de la lutte contre la cybercrimalité, la loi propose deux
améliorations. La première vise à procéder à un « toilettage » du Code de Procédure Pénale en
y ajoutant un certain nombre d'articles relatifs aux investigations. Par ailleurs, la LEN
renforce doublement la loi Godfrain, relative aux dispositions du Code Pénal en matière
d'infraction dites informatiques en procédant à deux modifications :
ƒ En renforçant les peines prévues aux articles L.323-1 et L.323-2 du Code pénal ;
ƒ En créant une nouvelle incrimination à l'attention des personnes qui détiennent, offrent,
cèdent ou mettent à disposition un équipement, un instrument, un programme
informatique ou toute donnée conçue ou spécialement adaptée pour commettre une ou
plusieurs infractions prévues aux articles L.323-1 à L.323-3 du Code pénal.

228
Ce qui complète le décret d’application de la loi du 13 mars 2000 et assure la transposition de la directive
1999/93/CE du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux102
attentes sécuritaires

206. Bilan. A l’analyse des dispositions de la loi on constate sans ambiguïté que la sécurité sur
l’Internet se trouve au centre des préoccupations. Présentée comme liberticide sous d’autres
aspects, la LEN, dans son volet cryptologie, a clairement pour objet de permettre la mise en
place des procédures sécuritaires propres aux nouvelles technologies de l’information et de la
communication. En effet, d’un côté elle libéralise les procédés de cryptologie et, de l’autre,
notamment, elle renforce le dispositif répressif en cas de fraude. Ces dispositions bénéficient
tant aux établissements de crédits qu’aux investisseurs229 (si l’on y ajoute de surcroît, le
« tapage médiatique » qui a entouré l’adoption de cette loi).

Section 2 : La transmission des factures par voie électronique au service des


opérations bancaires et financières

207. L’œuvre communautaire. La Commission européenne a préparé une proposition de directive


visant à simplifier, moderniser et harmoniser les conditions imposées à la facturation en
matière de TVA230. Après avoir obtenu l’avis du Parlement européen et du Comité
économique et social, le Conseil a adopté le texte, sensiblement modifié sur certains points, à
la fin de la présidence belge, pour ainsi donner naissance à la directive 2001/115/CE du
Conseil du 20 décembre 2001231.

208. Création d’un cadre juridique. En sus de l’harmonisation, des mentions obligatoires devant
être indiquées sur les factures au regard de la législation TVA, la directive crée un cadre
juridique communautaire, inexistant jusqu’alors, relatif à la facturation électronique et
l’autofacturation. Aux dires de la Commission, ce texte vise à constituer un équilibre entre la
simplification des obligations des opérateurs et les besoins légitimes des administrations en
termes de contrôle fiscal. La directive communautaire 2001/115/CE du 20 décembre 2001 a
été transposée en droit interne par l’article 17 de la loi de finances rectificative pour 2002232 et
par deux décrets en 2003233.

229
Les investisseurs bénéficient de la sécurité procurée par la cryptologie, mais d’autres dispositions les
protègent en tant que consommateurs – cf. Partie II, n°659 et s..
230
Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en vue de simplifier, moderniser et
harmoniser les conditions imposées à la facturation en matière de taxe sur la valeur ajoutée, COM (2000) 650
final.
231
Directive 2001/115/CE du Conseil du 20 décembre 2001 modifiant la directive 77/388/CEE en vue de
simplifier, moderniser et harmoniser les conditions imposées à la facturation en matière de taxe sur la valeur
ajoutée.
232
Loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002.
233
Décret n° 2003-632 du 7 juillet 2003 et décret n° 2003-659 du 18 juillet 2003.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux103
attentes sécuritaires

209. Diversité des régimes. Certes, toutes les transactions bancaires et financières ne sont pas
soumises à la TVA. Ainsi, si certains services financiers, tels que l’exécution d’un ordre de
bourse ou la souscription à une police d’assurance en ligne, sont soumis à un autre régime de
taxation que celui de la TVA, notamment à la taxe pour les opérations boursières ou la taxe
d’assurance, d’autres tels que la consultation des comptes en ligne via une application
logicielle et/ou Internet, l’exécution de virements nationaux ou internationaux, la demande
d’une carte de crédit, l’encaissement de chèques étrangers sont des services qui font l’objet de
« frais bancaires » eux-mêmes soumis à la TVA. La prestation de ces services donne donc lieu
à l’établissement d’une facture.

210. Sécurité réciproque. Ainsi, la possibilité de transmettre par voie électronique des factures
apparaît comme un moyen mis à la disposition des établissements bancaires et financiers pour
simplifier leur logistique, et ainsi limiter leurs charges, mais aussi de se prémunir contre les
éventuelles contestations de leurs clients au titre du rôle probatoire joué par ce document.
Véritable outil au service des établissements bancaires et financiers, la nouvelle
réglementation organise l’opération de transmission des factures par voie électronique (§2) et
révèle la notion de facture indépendante de son support (§1), le rôle probatoire joué par la
facture dépendant de l’application conforme de la législation (§3).

§ 1. La notion de facture indépendante de son support

211. Principe et définition. S’opposant à toute interprétation conservatrice de la notion de facture,


le point e), de l’article 22, §3, énonce sans ambiguïté que : « pour les besoins de la présente
directive, les Etats membres acceptent comme factures tous documents ou messages sur
papier ou sous format électronique remplissant les conditions déterminées par le présent
paragraphe [c’est-à-dire le paragraphe 3] ». Par ailleurs, le même point précise qu’on entend
par transmission et stockage d’une facture « par voie électronique » : « une transmission ou
une mise à disposition du destinataire et un stockage effectués au moyen d’équipements
électroniques de traitement (y compris la compression numérique) et de stockage de données,
et en utilisant le fil, la radio, les moyens optiques ou d’autres moyens électromagnétiques ».

212. Une définition large. Dès lors, il n’est pas indispensable qu’il y ait une transmission effective
de la facture (par courrier électronique par exemple) pour que la définition s’applique. Une
simple mise à disposition du destinataire par des moyens électroniques suffit : cela vise par
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux104
attentes sécuritaires

exemple le cas où le client peut accéder, suite à l’introduction d’un code utilisateur et d’un
mot de passe, à ses factures conservées sur le serveur Web du fournisseur et les imprimer
librement. C’est souvent le cas en matière bancaire sur l’Internet. Les instances
communautaires contribuent ainsi au bon fonctionnement du marché et la mise en œuvre de
ces mesures générales est pleinement profitable aux services bancaires et financiers, qui
peuvent utiliser à leur profit cette législation propre à la facturation.

§ 2. La transmission de la facture électronique

213. Multi-supports. Le point c) du paragraphe 3 de l'article 22 de la directive pose le principe


général selon lequel une facture peut-être transmise sur tout support, qu'il soit matériel
(papier) ou électronique. La transmission de factures par des moyens électroniques est
toutefois soumise à plusieurs conditions :
- D’une part, la facturation électronique ne peut se faire que « sous réserve de
l’acceptation du destinataire ». Faute de précision du texte, il semble que l’acceptation
puisse être expresse ou simplement tacite. Toutefois, il nous semble qu’elle doit être
préalable à la transmission de la première facture par voie électronique, ce qui suppose à
tout le moins une information claire du destinataire sur le caractère électronique du
mode de facturation et une absence de réaction de sa part pour que l’on puisse en
déduire son acceptation tacite.

- D’autre part, la transmission de factures électroniques nécessite le respect de deux


conditions de fond, dont l’objectif avoué par l’exposé des motifs de la proposition de
directive est d’en assurer la sécurité technique, dans l’intérêt tant de l’administration
fiscale que des opérateurs. Ces conditions sont la garantie de l'authenticité de l'origine
de la facture (de manière à ce que le destinataire de la facture soit certain que cette
dernière provienne bien de son émetteur), ainsi que la garantie de l'intégrité du contenu
des factures (l'ensemble des mentions, y compris le numéro de facture234). Soit dit en
passant, on constate que ces fonctions s’apparentent partiellement à celles reconnues
traditionnellement à la signature235.

234
Sur les mentions obligatoires devant figurer dans une facture, v. WERY E., Facture, monnaie et paiement
électronique, Litec, 2003, n° 79, p.30.
235
Sur les fonctions reconnues à la signature, v. LARRIEU J.,Les nouveaux moyens de preuve: pour ou contre
l’identification des documents informatiques à des écrits sous seing privé, Cahiers Lamy Droit de l’informatique,
1988, H, pp. 8-19 et I, pp. 26-34 ; GOBERT D. et MONTERO E., La signature dans les contrats et les paiements
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux105
attentes sécuritaires

214. Un socle minimum. Le texte de la directive énonce un catalogue de technologies jugées


acceptables, tout en permettant aux Etats membres de requérir des conditions
supplémentaires. En effet, le deuxième alinéa de l’article 22, §3, point c), précise que « les
factures transmises par voie électronique sont acceptées par les Etats membres à condition
que l’authenticité de leur origine et l’intégrité de leur contenu soient garanties236 :
ƒ soit au moyen d’une signature électronique avancée au sens du point 2) de l’article 2 de
la directive du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures
électroniques237 (…). [Suivant le Code général des impôts (article 96 F, I, annexe III)
cette signature doit répondre aux caractéristiques légales du droit fiscal, à savoir : « être
propre au signataire, permettre de l’identifier, être créée par des moyens tels que le
signataire puisse la garder sous son contrôle exclusif et garantir le lien avec les factures
auxquelles elles s’attachent »238].
ƒ soit au moyen d’un échange de données informatisées (EDI), tel que défini à l’article 2
de la recommandation 1994/820/CE de la Commission du 19 octobre 1994 concernant
les aspects juridiques de l’échange de données informatisées239, lorsque l’accord relatif
à cet échange prévoit l’utilisation de procédures garantissant l’authenticité de l’origine
et l’intégrité des données240. (…) ». Ces normes EDI devront respecter également les
exigences du Code général des impôts lesquelles sont : « identité du message transmis et
reçu, constitution d’une liste récapitulative et d’un fichier des partenaires, et
l’archivage des données puis restitution de celle-ci en langage clair »241.

électroniques : l'approche fonctionnelle, DAOR, 2000, n° 53, pp. 17-39 ; PRÜM A., L’acte sous seing privé
électronique : réflexions sur une démarche de reconnaissance, in Mélanges Michel CABRILLAC, Paris, Litec,
1999, p. 265 ; LINANT DE BELLEFONDS X., L'Internet et la preuve des actes juridiques, Expertises, 1997, p.
226.
236
Sur ce principe de fiabilité, v. WERY E., op. cit., n° 88 et s., p. 33.
237
Remarquons qu’en pratique il n’est pas aisé pour une entreprise de déterminer quelles techniques
informatiques peuvent être considérées comme une signature électronique avancée car, en définitive, il
appartient au juge d’apprécier, au cas par cas, si la technique utilisée répond aux conditions stipulées par la
définition légale de cette notion !
238
MATHIEU M.-E., Les services bancaires et financiers en ligne, Ed. Revue Banque, 2005, n° 296, p. 279.
239
L’article 2 de cette recommandation définit l’échange de données informatisées comme « le transfert
électronique, d’un ordinateur à un autre, de données commerciales et administratives sous la forme d’un
message EDI structuré conformément à une norme agréée ». Le même article définit le message EDI comme
« un ensemble de segments, structurés selon une norme agréée, se présentant sous forme permettant une lecture
par ordinateur et pouvant être traités automatiquement et de manière univoque ». Cette dernière définition a été
reprise par le Code général des impôts à l’article 289 bis.
240
Cette exigence est, selon nous, redondante avec les dispositions de la recommandation du 19 octobre 1994
puisque celle-ci prévoit en son article 6 que l’accord pour l’échange de données informatisées doit contenir un
engagement des parties de mettre en oeuvre et de maintenir des procédures de sécurité relatives notamment à
l’origine et à l’intégrité des messages EDI.
241
MATHIEU M.-E., op. cit., n° 301, p. 281.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux106
attentes sécuritaires

215. Risque inhérent. Ces exigences apparaissent comme minimales, mais cette option laissée à la
discrétion des Etats membres ne risque-t-elle pas de porter un coup d’arrêt à l’harmonisation
qui est recherchée par le texte européen ? En effet, alors que certains Etats se satisferont d’une
signature électronique avancée, d’autres exigeront des conditions plus strictes, qui de surcroît
ne sont pas sans créer quelques contraintes – de nature organisationnelle et financière –
supplémentaires pour les entreprises. Cette harmonisation sera d’autant moins assurée que
l’alinéa 3), du point c), ouvre en outre la porte à d’autres technologies. En effet, « les factures
peuvent, toutefois, être transmises par voie électronique selon d’autres méthodes, sous
réserve de leur acceptation par le ou les Etats membres concernés ». Nous présumons que ces
autres méthodes doivent permettre, à l’instar de celles visées expressément par la disposition,
de garantir l’authenticité de l’origine et l’intégrité du contenu des factures242.

216. Adaptation du régime. Il est prévu que la « Commission présentera, au plus tard le 31
décembre 2008, un rapport accompagné, le cas échéant, d’une proposition modifiant les
conditions applicables à la facturation électronique afin de tenir compte de l’évolution
technologique future dans ce domaine ». Dès lors, s’il apparaît éventuellement, à l’usage, que
la solution proposée par la directive n’est pas satisfaisante, le législateur européen pourra
procéder aux réformes nécessaires.

217. Formalités. Une troisième condition, d’ordre procédural, ne concerne pas les opérateurs eux-
mêmes mais les Etats membres. Il est prévu qu'aucun système d'autorisation préalable à
l’utilisation d’un mécanisme de facturation électronique ne peut être mis en place, dans la
mesure où il s'agirait d'une entrave trop lourde au développement de la facturation
électronique. Seule une simple notification préalable – sur option de chaque Etat membre –
peut être envisagée, sans aucune possibilité de refus a priori par l'administration fiscale.
Néanmoins, si un Etat opte pour un système de notification préalable, ce dernier devra être
provisoire. En effet, le texte indique qu'il n’est plus possible d'y avoir recours après le 31
décembre 2005.

242
Cette interprétation peut partiellement trouver son fondement dans l’article 22, §3, point d), al. 3.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux107
attentes sécuritaires

§ 3. Le rôle probatoire de la facture

218. Objectifs. Si la facture apparaît comme un document unique, elle poursuit en réalité plusieurs
finalités. On lui reconnaît principalement trois fonctions243 :
ƒ La facture constitue une affirmation (unilatérale) de l’existence d’une créance de
l’expéditeur sur le destinataire et une invitation, pour ce dernier, à honorer sa dette ;
ƒ La facture joue le rôle d’un moyen de preuve, que ce soit en matière civile, commerciale
ou fiscale ;
ƒ La facture exerce une fonction spécifique dans le régime de la taxe sur la valeur ajoutée.

219. Importance. En conséquence, ce document peut jouer un rôle probatoire non négligeable : la
facture peut notamment constituer la preuve de l’existence d’un contrat, et particulièrement la
preuve d’une transaction bancaire ou financière et ainsi, la question de la (non) signature
électronique de la facture mérite d’être examinée. La nécessité consacrée par la directive de
sécuriser la transmission et le stockage de la facture électronique au moyen notamment d’une
signature électronique avancée – voire d’une signature électronique qualifiée244 –, aux yeux de
la réglementation TVA ne peut faire l’économie d’une réflexion plus large sur les
conséquences probatoires d’une telle exigence.

220. Valeur. Il n’est nullement nécessaire que la facture soit signée par le fournisseur pour qu’elle
ait une valeur probatoire245, en effet sauf dans certains cas particuliers246, il n’existe pas
d’obligation légale de signer la facture. Néanmoins, si le fournisseur la signe, il s’agit alors
d’un moyen de preuve qui s’élève au rang de l’acte sous seing privé (art. 1341 C. civ.). Il en
résulte que si le fournisseur dénie la signature apposée sur la facture, le client doit entamer la
procédure en vérification d’écriture (art. 1324 C. civ.), sans pouvoir recourir à d’autres
moyens de preuve. En revanche, si le fournisseur ne conteste ni son écriture ni sa signature ou

243
SAVATIER R., La facture et la polyvalence de ses rôles juridiques en droit contemporain, RDC, 1973, 1 ;
RIPERT G. et ROBLOT R., Traité de droit commercial, L.G.D.J., Paris, 16èmeEd., t.1, n° 447 ; DIRIX E. et
BALLON G.L., La facture, Bruxelles, Kluwer Editions Juridiques, 1996, pp. 4-6.
244
A l’instar de certains auteurs (MONTERO E., op.cit., Formation permanente CUP, Vol. 54, p. 47, n° 6), on
entend par signature électronique qualifiée une signature électronique avancée réalisée sur la base d’un certificat
qualifié et conçue au moyen d’un dispositif sécurisé de création de signature électronique. Divers auteurs
utilisent d’autres raccourcis pour désigner ce type de signature : « signature électronique parfaite » (LECOCQ P.
et VANBRABANT B.) ou encore « signature électronique sécurisée » (DAVIO E.). Pour notre part, nous nous
limiterons à utiliser le concept de signature électronique qualifiée.
245
DIRIX E. et BALLON G.L., op.cit., p. 129, n° 187.
246
Par exemple en matière de marché public ou pour des lois particulières dans le domaine de la faillite ou des
sûretés réelles.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux108
attentes sécuritaires

que la procédure en vérification démontre que la signature est bien celle du fournisseur, la
facture signée a la même valeur probatoire que l’acte authentique (art. 1322, al. 1er C. civ.).
Ainsi, en matière civile, la preuve contre le contenu de cette facture signée ne peut être
administrée qu’au moyen d’un autre écrit, par aveu ou serment, ce qui exclut les témoignages
ou présomptions (art. 1341 C. civ.). En matière commerciale, la preuve est libre mais en
pratique « la prééminence de l’écrit247 » demeure.

221. Le nouveau régime de TVA. Il faut enfin ajouter, au-delà des aspects relatifs à la facturation
électronique proprement dite, les incidences de la directive du 7 mai 2002248, dénommée TVA
sur le commerce électronique sur les établissements bancaires, en ce qui nous concerne. En
effet, ces dispositions rétablissent l’égalité entre les prestataires des Etats membres et les
prestataires des Etats tiers à l’Union Européenne. Auparavant, les prestataires établis dans des
pays tiers fournissant, par voie électronique, des non assujettis de pays membres étaient
exemptés de TVA, alors qu’à l’inverse, un prestataire d’un Etat membre devait appliquer cette
taxe à ces services, étant donné que le lieu de prestations est normalement l’endroit où le
prestataire est établi. Désormais, la TVA est appliquée à l’endroit où le preneur a sa résidence
habituelle – c’est-à-dire au lieu de consommation. Ainsi, La France par exemple, pourrait
collecter la TVA sur les prestations numériques consommées sur son territoire et notamment
sur les services financiers en ligne lesquels sont régis par le nouveau régime issu de la
transposition de la directive TVA en droit interne249. La situation a donc évolué dans le cas
d’un prestataire d’un Etat tiers fournissant ses services à un non assujetti d’un Etat membre
(consommateur) ; dorénavant le prestataire devra s’acquitter de la TVA dans l’Etat membre
de son client. Inversement, le prestataire d’un Etat membre fournissant ses services via
l’Internet à un consommateur d’un pays tiers appliquera le régime de ce pays (0% pour les
Etats-Unis)250. Seul bémol à ce système, cela supposerait que les entreprises de commerce en
ligne soient préalablement inscrites auprès des administrations fiscales de chacun des Etats de
l’Union Européenne. Force est de constater que cette « condition peut s’avérer quelque peu
dissuasive pour des sociétés établies hors l’UE » surtout lorsqu’on apprend que la procédure

247
On entend par là « écrit signé », qu’il soit sous seing privé ou authentique. V. à cet égard GOBERT D. et
MONTERO E., op.cit., J.T., n° 6000, pp. 114-128.
248
Directive 2002/38/ce du conseil du 7 mai 2002 modifiant, en partie à titre temporaire, la directive
77/388/CEE en ce qui concerne le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux services de radiodiffusion
et de télévision et à certains services fournis par voie électronique.
249
MATHIEU M.-E., op. cit., n° 286, p. 275.
250
WERY E., Le nouveau système TVA sur le commerce électronique entre en vigueur aujourd'hui,
1 Juillet 2003, document disponible à l’adresse http://www.droit-technologie.org/1_2.asp?actu_id=782.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux109
attentes sécuritaires

d’enregistrement auprès de l’administration fiscale nationale est uniquement disponible en


français251.

251
ARPAGIAN N., Malgré la directive européenne, l’e-TVA peine à voir le jour en France, 14 octobre 2003,
disponible sur : www.01net.com/outils/imprimer.php?article=218720
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux110
attentes sécuritaires

CONCLUSION

222. La sécurité : une obligation. La recherche d’une sécurité maximale est un objectif
incontournable pour le secteur bancaire et financier qui ne peut se permettre de développer
des opérations en ligne sans se préoccuper des risques tels que des accès non autorisés ou de
fraudes. Il se doit d’organiser les parades contre ces risques. Le cas échéant, l’organisme qui
ne le ferait pas démontrerait une grande irresponsabilité et risquerait en outre de déstabiliser la
place financière toute entière si l’un ou l’autre « trou de sécurité » venait à être exploité à
grande échelle par un pirate informatique.

223. Réduire les risques. Afin de réduire ces risques à un niveau quasi nul, le monde bancaire et
financier a très tôt utilisé et intégré dans ses applications informatiques des produits de
cryptologie. Ceux-ci permettent avec une certaine efficacité de garantir et de vérifier l’identité
des parties à la transaction bancaire et financière, et par voie de conséquence d’éviter une
éventuelle répudiation de l’une d’entre elles, de garantir que le contenu du message transmis
n’a pas été modifié et enfin d’assurer la confidentialité des données transmises.

224. Libéralisation progressive. Il est évident que le monde bancaire et financier ne peut utiliser
les produits de cryptologie que dans le respect de la réglementation française en la matière.
Fort heureusement, celle-ci très stricte d’avant les années 1990 a cédé peu à peu le pas à un
mouvement progressif de libéralisation de la cryptologie. Les premières réglementations ont,
à juste titre, été largement critiquées au motif qu’elles créaient des contraintes considérables
pour les entreprises françaises qui jouaient le jeu de la démocratie et du respect des lois, alors
que le but recherché par la réglementation – à savoir préserver les intérêts de la défense
nationale et de la sécurité intérieure ou extérieure de l’Etat – n’a jamais pu être atteint
efficacement, en raison du non respect de cette réglementation par les criminels en puissance.

225. Incertitudes. Par ailleurs, on constate que les derniers décrets de mars 1999 qui visent à
accélérer la libéralisation de l’utilisation de moyens de cryptologie posent toujours certains
problèmes, tant pour le secteur bancaire et financier que pour les autres secteurs, notamment
en raison des difficultés d’interprétation qui ne permettent pas toujours de déterminer de façon
précise le champ d’application et l’étendue des dispositions réglementaires. Nous pensons que
ces difficultés et contraintes ne devraient disparaître qu’avec la libéralisation totale de
l’utilisation des produits de cryptologie.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponse aux111
attentes sécuritaires

226. Une réelle opportunité. La facture électronique devrait permettre de réduire


considérablement les coûts de traitements jusqu'alors réputés incompressibles. En effet, pour
un investissement minimal il est désormais possible de réduire le coût et le temps d’envoi,
puisque la réception de la facture est instantanée, tout en permettant une amélioration
quantitative et qualitative du suivi de la facturation. La dématérialisation permet de garantir la
réception et ainsi de limiter les litiges, mais également assure une véritable souplesse de
fonctionnement et un gain de productivité. Si un nombre croissant d’entreprises peut être
séduit par le système de facturation électronique, au premier rang desquelles les institutions
bancaires et financières, néanmoins, elles se lanceront dans l’aventure pour autant qu’elles ne
seront pas soumises à des contraintes techniques excessives et que le système s’inscrira dans
un contexte juridique sécurisé et harmonisé. Si les nouvelles technologies et les
réglementations y afférentes, qui ne sont pas propres au domaine bancaire et financier,
peuvent valablement être mises à profit dans des opérations bancaires et financières, un
impératif doit systématiquement être assuré ; celui de la sécurité, afin que les perspectives
d’utilisation ne demeurent pas vaines. Ces réglementations, de par leur caractère technique,
ont essentiellement pour but de rassurer les prestataires, c’est-à-dire les établissements de
crédit. D’un autre côté, si l’on veut attirer les investisseurs, c’est l’ensemble des différents
moyens de paiement dont il faut prouver la sécurisation.
CHAPITRE 2
MOYENS DE PAIEMENT EN LIGNE COMME NOUVELLES
OPPORTUNITES POUR LES ETABLISSEMENTS BANCAIRES ET
FINANCIERS

227. La volonté d’un espace unique des moyens de paiements. La Commission européenne a
présenté le 1er décembre 2005 sa proposition de directive sur les services de paiement dans le
marché intérieur, qui fixera les grands principes régissant les relations banques/clients252. Ce
texte devrait permettre de renforcer l’efficacité et la sûreté des moyens et systèmes de
paiement pour l’ensemble des Européens et de garantir une concurrence équitable avec des
règles du jeu simples et égales pour tous. Il établit également des règles communes pour les
Vingt-cinq concernant les délais d'exécution des ordres de paiement, les conditions de
révocabilité, les conditions d'exercice sur ce marché253. La Fédération Bancaire Française
(FBF) avait déjà soutenu les orientations de la Commission européenne visant à l’information
des clients, au renforcement de la sécurité et à la protection des données254. Elle avait aussi
rappelé que la priorité d’un espace unique des paiements doit prendre en compte les attentes
des utilisateurs, les exigences réglementaires dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et
les détails techniques inhérents à la réalisation des différentes actions.

228. Diversité et insécurité. Le développement considérable du commerce électronique s’est


accompagné ces dernières années d’un foisonnement d’initiatives en matière d’offre de
nouvelles méthodes de paiement permettant de régler les transactions en ligne. Actuellement,
la diversité des moyens de paiement sur l’Internet est source de troubles, et bien que le taux
de fraude reste marginal, le paiement sur la toile jouit toujours d’une très mauvaise image
auprès du grand public. D’autre part, l’évolution du télépaiement sur l’Internet dépendra en
partie de la résolution des problèmes juridiques latents ayant trait principalement à l’atteinte
au monopole bancaire, à l’irrévocabilité, au risque et à la preuve du paiement.

252
FBF, Nouveau cadre juridique des paiements en Europe : les banques françaises saluent la publication du
projet de directive mais attendent des améliorations, notamment sur la sécurité, 1 décembre 2005, disponible
sur : www.fbf.fr
253
PINSON G., La Commission pousse à la création de l’Europe des moyens de paiement, La tribune, 30
novembre 2005, disponible sur : www.latribune.fr
254
FBF, Moyens de paiement : les banques françaises favorables à un cadre juridique européen, 8 décembre
2003, disponible sur : www.fbf.fr
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les113
établissements bancaires et financiers

229. Le bon fonctionnement du marché communautaire. L’industrie y a vu une opportunité de


répondre aux attentes, principalement sécuritaires des acteurs du réseau. Depuis longtemps,
assurer la confiance apparaît en effet, comme une des priorités destinées à permettre le
développement des transactions en ligne. Comment, en effet, concevoir un commerce
« ultrarapide » et technologiquement avancé, si celui-ci dépend d'anciens systèmes de
paiement inadéquats ? L’Internet n’est-il pas un nouveau canal permettant un renouvellement
des moyens de paiement classique et une stimulation des propositions d’offres de services des
établissements bancaires ? Les méthodes de paiement se sont donc largement diversifiées : en
sus des solutions dites « classiques », se sont développées des solutions « modernes » dans le
sens où elles se servent des nouvelles technologies. Ces préoccupations d’ordre sécuritaire ont
été au fil du temps communes non seulement aux autorités européennes255 mais également à
une certaine doctrine américaine256.

230. Une préoccupation européenne. Dès 1997, les autorités européennes ont proposé, au travers
d’une recommandation et d’une communication257, un régime juridique non contraignant
destiné à renforcer la protection et la confiance du consommateur, en encourageant l’industrie
à adopter un régime juridique clair et efficace. L’idée consistait à contraindre les émetteurs à
répartir de manière équilibrée, dans leurs conditions générales, les droits et obligations des
titulaires et émetteurs des instruments de paiement électronique. La société Kleline258 fut le
premier établissement français à être constitué pour émettre et gérer un tel moyen de
paiement259. Les aspects liés à la création, à la gestion et au contrôle des institutions émettrices
de ces nouveaux moyens de paiement n’avaient à l’époque pas suscité outre mesure
l’attention du législateur européen. Ce manque d’intérêt se justifiait notamment par le fait que
l’émission des moyens de paiements électroniques était concentrée entre les mains des
établissements de crédit, déjà largement réglementés. Avec l’essor de la nouvelle économie,
de nombreuses « start-up » privées, aujourd’hui disparues, se sont à leur tour engagées dans
ce type d’entreprise jugée rentable et prometteuse. En France, la situation est sans aucune

255
ROLIN JACQUEMYNS L., Quelques réflexions sur la monnaie électronique, DIT, 1999/4, p.6
256
V. notamment KONVISSER J.B., Coins, notes, and bits: the case for legal tender on the Internet, 10
Harv.J.Law & Tec 321 (1997). V. également BENOIT M. A, Privacy and electronic commerce, 52 Consumer
Fin. L. Q. Rep. 384 (1998).
257
V. Recommandation 97/489/CE de la Commission du 30 juillet 1997 concernant les opérations effectuées au
moyen d’instruments de paiement électronique, en particulier la relation entre émetteur et titulaire et la
Communication « Services financiers : renforcer la confiance des consommateurs », COM (97) 353 ainsi que les
développements consacrés à ce sujet, dans la deuxième partie de cet ouvrage
258
Projet abandonné à la suite de la fusion entre BNP et Paribas, http://www.kleline.com
259
ANDRIES M., Développements récents en matière de monnaie électronique, Bulletin de la banque de France,
n° 72, décembre 1999, p.87
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les114
établissements bancaires et financiers

ambiguïté : la gestion de fonds reçus du public comme l’émission et la gestion de moyens de


paiement, ici sous forme de PME260 ou de PMV261, sont des opérations de banque au sens de la
loi bancaire262 et nécessitent, dans tous les cas, un statut d’établissement de crédit263.

231. Les enjeux d’une cyber monnaie. La Commission européenne, suivie ensuite par les Etats
membres, a pris assez tardivement conscience qu’ « une monnaie de réseau », ou « cyber-
argent »264, était susceptible de s’affirmer comme l’instrument de paiement par excellence
d’un commerce électronique en pleine expansion et à terme de remplacer une proportion
importante des paiements en espèces. Il convenait dès lors de veiller au développement de
cette catégorie particulière de services financiers au sein de l’Union européenne en
l’encadrant juridiquement de façon à en faciliter l’offre dans des conditions sereines et
protectrices. Différents objectifs étaient poursuivis par la Commission et notamment :
(i) Garantir l’intégrité financière des émetteurs de monnaie électronique et leurs
opérations en assurant leur solidité et stabilité ;
(ii) Supprimer les entraves à l’exercice d’activités financières transfrontalières,
notamment en imposant des contrôles prudentiels minimum et en évitant les
distorsions de concurrence entre émetteurs ;
(iii) Eviter que les Etats membres n’adoptent des approches nationales différentes
rendant l’harmonisation plus difficile.

232. Conséquences. La volonté de la Commission européenne fut relayée le 27 octobre 2000 par
l’adoption de deux directives du Parlement européen et du Conseil265. La première modifie la
définition d’établissement de crédit donnée par la première directive bancaire266 en créant une

260
Porte-monnaie électronique.
261
Porte-monnaie virtuel.
262
V. sur l’importance de cette loi pour le secteur bancaire, CASSOU P.-H., La Loi bancaire : sa genèse et ses
apports, Banque magazine, octobre 2004, n° 662, p. 29 et s. ; La contribution de la loi bancaire à la stabilité du
système bancaire français, Bulletin de la Commission bancaire, novembre 2004, n° 31, p. 39 et s.
263
MORAU M., Monnaie électronique : contraindre ou accompagner ? , Banque Stratégie, octobre 1996, n° 131,
p.10 ; et dans ce sens aussi v. SAHUT J.-M., Le paiement : enjeu du e-commerce , Banque Stratégie, février
2000, n° 168, p.28.
264
Nous reprenons ici les termes utilisés dans l’exposé des motifs de la proposition de la Commission de
directives du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès à l’activité des institutions de monnaie
électronique et son exercice, ainsi que la surveillance prudentielle de ces institutions, disponible sur :
http://europa.eu.int/comm/internal_market/fr/finances/general/727.htm,
265
Directive 2000/28/CE du parlement européen et du Conseil du 18 septembre 2000 modifiant la directive
2000/12/CE concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et son exercice ; Directive 2000/46/CE
du Parlement européen et du Conseil du 18 septembre 2000 concernant l’accès à l’activité des établissements de
monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements.
266
Première directive 77/780/CEE du Conseil du 12 décembre 1977 visant à la coordination des dispositions
législatives, réglementaires et administratives concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et son
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les115
établissements bancaires et financiers

nouvelle sous-catégorie pour les institutions de monnaie électronique. La seconde instaure la


notion « d’institutions de monnaie électronique » et introduit son régime juridique corrélatif.

233. Plan. Si, à ce stade de nos propos, il apparaît déterminant de décrire le régime juridique
instauré par la directive 2000/46/CE (ci-après dénommée « la directive »), il en va
différemment de l’étude de la directive 2000/28/CE, celle-ci se bornant à élargir la définition
d’établissement de crédit pour y inclure les établissements de monnaie électronique267 et poser
l’exigence de remboursabilité268. Afin de mettre en exergue les nouvelles opportunités et
contraintes qui se présentent aux établissements bancaires et financiers, il s’agit d’envisager le
cadre juridique relatif à la monnaie électronique et son degré d’implémentation instauré par le
législateur européen (section 3). Auparavant, il apparaît fondamental de cerner la place de
cette monnaie dans l’environnement des paiements électroniques (section 1), ainsi que son
régime juridique (section 2).

Section 1 : Typologie des moyens de paiement sur l’Internet

234. Entrave au développement. Le paiement électronique constitue l’un des principaux freins au
développement du commerce en ligne. Aujourd’hui encore, le grand public perçoit
généralement l’Internet comme un espace non sécurisé, où les numéros de carte bancaire
peuvent être facilement volés. Cette peur, facilement compréhensible, est pourtant en partie
exagérée dans le sens où donner son numéro de carte sur le Web n’est pas plus dangereux que
de le donner par téléphone ou que de confier sa carte à un serveur au restaurant. Le risque est
peut être plus présent après la transaction, si ces numéros sont imprudemment stockés sur un
serveur269.

exercice.
267
L’idée est de permettre aux établissements qui ne souhaitent pas devenir des banques universelles d’émettre
de la monnaie électronique selon les règles fondamentales régissant tous les autres établissements de crédit afin
notamment d’éviter les distorsions de concurrence entre les établissements de crédit.
268
Nous reviendrons sur cette notion dans notre section 3 de ce chapitre.
269
En témoigne, la plus importante attaque de données bancaires à la suite du piratage de 40 millions de numéros
de cartes de crédit stockés sur les serveurs du sous-traitant de Visa et Mastercard. V. GUILLEMIN C., Le
manquement aux règles de sécurité a favorisé le piratage des cartes de crédit, 21 juin 2005, disponible sur :
www.zdnet.fr ; EVERS J., Plus de 40 millions de numéros de cartes Mastercard et Visas piratés, 20 juin 2005,
disponible sur : www.zdnet.fr. D’ailleurs quelques jours après ce vol, les établissements financiers ont annoncé
la mise en place d’un standard de sécurité international, v. GUILLEMIN C., Entrée en vigueur d’un standard
international pour la sécurité des données bancaires, 30 juin 2005, disponible sur : www.zdnet.fr .
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les116
établissements bancaires et financiers

235. Classification et viabilité des procédés. Selon une typologie désormais classique270, on
retrouve deux grandes catégories de paiement sur l’Internet. La première se compose de
moyens de paiements usuels ou d’une adaptation de ceux-ci. La seconde englobe les
nouveaux moyens de paiement généralement propres à l’Internet. C’est au sein de cette
seconde catégorie que l’on retrouve la monnaie électronique, aux côtés des paiements
effectués par des intermédiaires. En conséquence, la monnaie électronique n’est qu’une
facette de l’univers des paiements électroniques sur l’Internet. Le succès de chacun de ces
moyens de paiement dépend généralement de trois critères : la sécurité, la « portabilité » et la
généralisation de l’instrument (ou interopérabilité)271.

§ 1er. Les moyens de paiement usuels

236. Plan. Les instruments de paiement classiques ne sont pas propres à l’Internet. Ils ont
simplement trouvé un nouveau terrain d’application par l’intermédiaire d’un nouveau mode
de communication. Ainsi, cartes de crédit (A) et chèques (B) sont traditionnellement les
instruments de paiement les plus répandus. Le cadre des opérations de banque consistant dans
la fourniture et la gestion de moyens de paiement ne se trouve donc pas, de ce point de vue,
bouleversé par l’Internet. Il reste néanmoins à comparer l’efficacité et le degré de sécurisation
entre une utilisation classique et un usage opéré via l’Internet de ces moyens de paiement.

A. La carte de crédit

237. Définition. Selon l’article L.132-1 du Code monétaire et financier, la carte de paiement est
émise par un établissement de crédit ou par une institution ou un service mentionné à l'article
L. 518-1 et permet à son titulaire de retirer ou de transférer des fonds. En revanche, une carte
de retrait est issue par les mêmes organismes précités mais autorise exclusivement son
détenteur, à retirer des fonds. L’article L.132-2 ajoute que l'ordre ou l'engagement de payer
donné au moyen d'une carte de paiement est irrévocable. Il ne peut être fait opposition au

270
V. par exemple, BUYL J.-P., POELMANS E et O., Description des moyens de paiement en réseau ouvert,
Cahier du C.R.I.D., n°12, p. 88 et suivante, reprise notamment par VERBIEST T. et WERY E. (avec la
collaboration de SALAÜN A. et GOBERT D.), Droit de l’Internet et de la société de l’information, Larcier,
Bruxelles, 2001, p. 311 et s., et par LEROUGE J.-F., Le paiement sur Internet et le respect de la vie privée ,
DAOR, n°58, 2001, p.88.
271
L’importance de ces trois critères a été clairement mise en évidence dans l’article de L. ROLIN (ROLIN L.,
Comment payer par Internet aujourd’hui : le choix du système adéquat, Revue Ubiquïté n°7, 2000, pp. 91-97).
Par portabilité, on entend la possibilité d’utiliser n’importe quelle machine reliée au réseau sans avoir besoin de
matériel supplémentaire.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les117
établissements bancaires et financiers

paiement qu'en cas de perte, de vol ou d'utilisation frauduleuse de la carte ou des données
liées à son utilisation, de redressement ou de liquidation judiciaires du bénéficiaire. La carte
de paiement regroupe généralement les deux fonctions prévues par la loi (paiement et retrait),
auxquelles s’ajoute celle de crédit si l’on tient compte des délais de débit prévus par les
conventions de compte272. L’Internet ne modifie pas les fonctions de la carte en dehors, bien
entendu, de la fonction de retrait dans la mesure où il s’agit uniquement de relations à
distance.

238. Avantages. Le développement de la carte bancaire a été si spectaculaire que les plus
enthousiastes, à la fin des années quatre-vingt, parlaient de cashless society, société dans
laquelle les espèces auraient disparu273. Selon une récente étude274, la carte de crédit qui
effraye tant d’utilisateurs est paradoxalement le moyen de paiement privilégié par les
internautes (80%). En effet, la carte de crédit275 présente un grand nombre d’avantages :
ƒ Son utilisation est mondialement généralisée tant au niveau des utilisateurs qu’au niveau
des commerçants276. Par ailleurs, elle ne demande aucun investissement particulier en
termes d’équipement.
ƒ Son système est tellement pratique qu’il ne nécessite pas de module ou d’intermédiaire
pour le consommateur, à la différence des systèmes concurrents que sont les porte-
monnaie électroniques ou les systèmes de monnaie électronique277.
ƒ Les délais de paiement sont raccourcis par rapport au chèque ou à d’autres moyens de
paiement.

239. Utilisation de la carte sur l’Internet : inconvénients. Traditionnellement, comme le


rappelle le Professeur T. BONNEAU278, les cartes étant généralement embossées et
informatiques, l’utilisation peut en être faite que le commerçant dispose ou non d’un terminal

272
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°441, p 310.
273
ROBERT-PEILLARD M., Cartes de paiement : les besoins et l’offre, Banque Stratégie, octobre 1996, n°
131, p. 7.
274
Forum des droits sur l’Internet, Septième matinée d’information juridique « Paiements sur l’Internet :
protection du consommateur, protection du vendeur », 18 octobre 2005, disponible sur : www.foruminternet.org
275
Pour une analyse juridique du mécanisme de paiement par carte de crédit, v. par exemple KILESTE P., Le
titulaire d’une carte de crédit est-il engagé par déclaration unilatérale de volonté ?, RDC, 1986, p. 495; DAL
G.A. et CORBISIER I., Les instruments de paiement et de crédit (chronique), J.T., 1990, p. 440, n°77, cités par
BUYLE J.-P., op.cit., p. 92 .
276
Une réponse ministérielle n°26751, JOANQ, 12 avril 2005, p.3782, est venue préciser les conditions de
l’acceptation par un commerçant français d’une carte de paiement américaine.
277
V. pour le distinguer, JEAN-BAPTISTE M., Créer et exploiter un commerce électronique , in Coll. Litec,
avril 1988, p.129 et s.
278
T. BONNEAU, Droit bancaire, op.cit., n°441, p.310.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les118
établissements bancaires et financiers

de paiement ; la différence étant que sans matériel informatique, le client signe la facturette,
alors qu’en présence de matériel informatique, le code confidentiel opère la signature
électronique de l’ordre. Le problème, évident avec la dématérialisation de l’Internet, est que
cette signature est absente : physiquement, le client ne peut pas signer et il ne communique
jamais son code confidentiel. En règle générale, le paiement par carte sur l’Internet se limite à
la fourniture des informations faciales qui permettent d’identifier le titulaire (comme dans le
cas précité d’un paiement sans terminal, mais à la différence que le client ne peut pas signer la
facturette). Identification du titulaire ne veut cependant pas dire que c’est bien le titulaire qui
utilise la carte ou les informations qui s’y trouvent. La question incidente qui se pose est alors
de savoir si les informations demandées pour valider la commande sont suffisantes. Allant
plus loin, le texte même de l’article L.518-1 du Code monétaire et financier suppose
l’utilisation et la présence physique du support. En matière d’Internet, rien n’est moins sûr :
on peut très bien ne pas être en présence d’une carte ; de même, les procédés purement
logiciels qui reproduisent le fonctionnement de la carte sont-ils exclus279 ? De plus, en réseau
ouvert, les risques de fraude liés à une utilisation malveillante du numéro facial sont
multipliés. Les établissements bancaires et financiers, conscients de la nécessité commerciale
de proposer des produits sûrs, mais également afin de limiter leur responsabilité, ont
conjointement développé plusieurs techniques de sécurisation280. En effet, l’utilisation
frauduleuse de la carte ne peut être imputée à son propriétaire que si la preuve de sa
négligence est rapportée. A défaut, c’est le banquier qui en assume les conséquences puisque
la loi sur la sécurité quotidienne (LSQ)281 énonce que la responsabilité du porteur sera dégagée
si le paiement contesté a été effectué frauduleusement, à distance, sans utilisation physique de
la carte ; les sommes contestées seront alors recréditées sur le compte du client, sans
franchise282.

279
WERY E., paiements électroniques : ce que change la LSQ, 2 avril 2003, disponible sur :
http://www.journaldunet.com/juridique/juridique030402.shtml.
280
Pour plus de détails, nous renvoyons à SUTTER G., Electronic Commerce Legal Issues Platform, Law and
Technology Convergence: Electronic Payment Systems, Delverable 2.2.6., Projet Esprit 27028, disponible sur:
<http://www.jura.uni-muenster.de/eclip/>.
281
Loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001. Pour un exemple en droit belge, v. GOFFARD O., Des risques
encourues par le titulaire et l’émetteur d’un instrument de transfert électronique de fonds, spécialement lorsque
l’instrument est utilisé sans présentation physique et sans identification électronique : application au paiement
sur Internet, Revue de Droit Commercial Belge, janvier 2005, p. 11.
282
JOUDI J., Le règlement des risques de transfert de fonds, RDBF, juillet-août 2005, p. 57. Egalement, Cass.
Com., 11 janvier 2005, JCP E, 3 mars 2005, n° 9, p. 351, note BOUTEILLER P.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les119
établissements bancaires et financiers

240. Le protocole SSL. Le protocole (Secure Socket Layer Protocol) permet d’assurer la
transmission cryptée des coordonnées bancaires afin de minimiser les risques d’interception
frauduleuse par des tiers. Cette façon de faire est idéale pour les transactions ponctuelles
puisqu’il n’y a aucune formalité à effectuer avant le paiement. Ce système intégré dans les
logiciels récents de navigation sur Internet283 présentait également l’avantage d’être simple à
utiliser et de ne pas requérir d’équipement particulier. Malheureusement, le protocole SSL ne
permettait pas aux parties de s’assurer de leurs identités respectives, ce qui a notamment pour
inconvénient de ne pas mettre l’utilisateur à l’abri d’un commerçant indélicat, créateur de
sites fictifs créés uniquement dans l’optique de récolter des numéros de cartes de crédit à des
fins frauduleuses. Dans le même ordre d’idée, le protocole SSL, censé protéger quasiment
toutes les transactions courantes sur l’Internet (acheter des billets de train, réserver un
spectacle, commander un livre), a été récemment cassé par des chercheurs suisses de l’Ecole
polytechnique fédérale de Lausanne (EPFA)284.

241. Le protocole SET. En réponse à ces problèmes, un autre protocole a été développé, le
protocole SET ou Secure Electronic Transaction Standard (SET)285. Celui-ci a été lancé en
1996 par Visa et MasterCard et déposé dans le domaine public afin de permettre le
développement de logiciels compatibles. Tout comme SSL, SET a recours à la cryptographie
asymétrique pour répondre aux impératifs de sécurité et de confidentialité. Ce protocole offre
à la fois l’avantage d’identifier chacune des parties de la transaction et celui de garantir
l’intégrité de la communication. Grâce à ce fonctionnement, le commerçant reçoit une
autorisation avant de procéder au paiement et il est assuré d’être payé, même en cas de fraude.
L’utilisateur est, quant à lui, certain que le commerçant est effectivement enregistré auprès
des organismes gestionnaires de carte de crédit. Le défaut essentiel de ce système consiste
dans sa lourdeur de fonctionnement, synonyme de multiplication des coûts et des
procédures286, du fait de l’installation supplémentaire des logiciels serveurs et clients et de la
multiplicité des opérations effectuées au moment de la transaction.

283
Les logiciels de navigation les plus utilisés sont : MS Internet Explorer et Netscape.
284
WERY E., Le protocole SSL a été cassé par des chercheurs suisses, 21 février 2003, disponible sur :
http://www.droit-technologie.org,
285
V. http://www.setco.org/ et également http://www.mastercard.com/shoponline/set.
286
EDGAR L.,Electronic Payment Systems , deliverable 2.1.6., p. 6 et 7 (1999), disponible sur :
http://www.eclip.org/documents/deliverable_2_1_6_electronic_payments.pdf
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les120
établissements bancaires et financiers

242. Position française. Face à la progression importante du nombre de délits constatés en matière
d’utilisation frauduleuse de cartes bancaires287, notamment sur l’Internet, le législateur
français a adopté la loi relative à la sécurité quotidienne (LSQ)288. Ce texte introduit dans le
Code monétaire et financier de nouvelles dispositions289 afin de renforcer l’arsenal législatif
lié au paiement à distance. Le législateur confie aussi à la Banque de France une mission
générale d’« assurer la sécurité des moyens de paiement »290. De même, la loi :
ƒ Institue un Observatoire de la sécurité des cartes de paiement291.
ƒ Elargit le champ du titulaire d’une carte pour faire opposition.
ƒ Définit les responsabilités respectives du titulaire et de l’établissement émetteur en cas
de vol ou d’utilisation frauduleuse292.
ƒ Erige de nouvelles infractions inhérentes aux fraudes de cartes bancaires293.

287
Il est intéressant de citer la définition de la fraude telle qu’elle est énoncée par L’Observatoire de la sécurité
des cartes de paiements. Il s’agit de : « tout acte concourant à la préparation, à la réalisation, à l’utilisation
illégitime et/ou l’utilisation illégitime d’une carte de paiement ou des données qui lui sont attachées :
1. ayant pour conséquence un préjudice pour le banquier teneur de compte qu’il s’agisse du banquier du porteur
de la carte ou de celui de l’accepteur (commerçant, administration… pour son propre compte ou au sein d’un
système de paiement), le porteur, l’accepteur, l’émetteur, un assureur, un tiers de confiance ou tout intervenant
dans la chaîne de conception, de fabrication, de transport, de distribution de données physiques ou logiques,
dont la responsabilité civile, commerciale ou pénale pourrait être engagée ;
2. quels que soient :
─ les moyens employés pour récupérer, sans motif légitime, les données ou le support de la carte (vol,
détournement du support de la carte, des données physiques ou logiques, des données de personnalisation et/ou
récupération du code secret, et/ou du cryptogramme, piratage de la piste magnétique et/ou de la puce…) ;
─ les modalités d’utilisation de la carte ou des données qui lui sont attachées (paiement ou retrait, en face à face
ou à distance, par utilisation physique de la carte ou du numéro de carte, sur automates…) ;
─ la zone géographique d’émission ou d’utilisation de la carte ou des données qui lui sont attachées :
• émetteur français et carte utilisée en France,
• émetteur étranger et carte utilisée en France,
• émetteur français et carte utilisée à l’étranger ;
─ le type de carte de paiement, tel que défini à l’article L. 132-1 du Code monétaire et financier y compris les
porte-monnaie électroniques ;
3. que le fraudeur soit un tiers, le banquier teneur de compte, le porteur de la carte lui-même (dans le cas par
exemple d’une utilisation après déclaration de vol ou de perte, ou d’une dénonciation abusive de transactions),
l’accepteur, l’émetteur, un assureur, un tiers de confiance ». Rapport annuel 2003, p.21.
288
V. Banque et droit, 2002, n°81, p.44, obs. BONNEAU T. ;
289
Le législateur a ainsi transposé la directive 97/7/CE du 20 mai 1997 concernant la protection des
consommateurs en matière de contrats à distance, aux articles L. 312-2 et s. qui instaurent un mécanisme au
profit du titulaire de la carte de paiement lui permettant de faire opposition dans le cas « d’utilisation frauduleuse
de la carte ou des données liées à son utilisation ».
290
V. sur le renforcement du rôle de la Banque de France, ANDRIES M. et MARTIN C., La surveillance des
moyens scripturaux : objectifs et modalités de mise en oeuvre, Banque de France, Revue de la stabilité
financière, novembre 2004, n° 5, p. 91 et s.; BEAU D. et MARTIN C., La sécurité des moyens de paiement sur
Internet, Bulletin de la Banque de France, février 2002, n° 98, p. 43.
291
Pour d’amples renseignements sur cet organisme, nous renvoyons sur : www.banque-france.fr/observatoire
292
Pour une étude juridique sur cette relation, v. GAVALDA C. et STOUFFLET J., Instruments de paiement de
crédit, Paris, Litec, 2003, 5ème éd., n° 415 et s., p. 430.
293
LASSERRE CAPDEVILLE J., La répression de la fraude à la carte bancaire : état des lieux, Banque et droit,
mai-juin 2005, n° 101, p. 27.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les121
établissements bancaires et financiers

Ce nouveau dispositif est-il uniquement applicable aux opérations classiques ou doit-il être
étendu aux opérations via le réseau Internet ? A notre sens, il résulte des objectifs de la loi que
ces nouvelles mesures doivent nécessairement s’appliquer à ce nouveau canal afin, d’une part,
de contribuer à sa sécurisation et, d’autre part, de renforcer son image auprès de ses
utilisateurs et ainsi de contribuer à son développement. A tout le moins, le commerce
électronique a-t-il motivé la LSQ ; en effet, le GIE Cartes Bancaires avait constaté, à
l’époque, une augmentation des fraudes parallèlement à l’essor du commerce électronique294.
Si cette loi n’est pas un outil propre à l’Internet, elle apparaît en revanche fortement teintée de
« dématérialisation » ; ce texte renforce la protection du titulaire par une « profonde
modification de l’opposition au paiement »295 : la LSQ ajoute en effet la fraude au cas
d’opposition existant. On peut dire, en bref, que la sécurisation, véritable condition du bon
fonctionnement du marché, opère sur un double niveau : en amont par la fiabilité technique et
juridique des moyens utilisés mais également en aval, par la sécurisation des paiements
réalisés. D’ailleurs les chiffres publiés en juillet 2005296 réconfortent cette tendance et
montrent une baisse significative du taux global de la fraude. Celui-ci est estimé pour 2004 à
0,07% ; ce taux était de 0,086% en 2003 et de 0,082% en 2002.

243. Situation en Europe. En effet, ici comme ailleurs, la loi joue un double rôle de répression et
de prévention. Une étude du droit comparé297 révèle que certains pays, notamment l’Espagne
ou le Royaume Uni, préfèrent, pour assurer la sécurité de ce moyen de paiement, recourir à
des mesures d’ordre déontologiques (codes de bonne conduite du secteur bancaire européen,
code de bonne conduite des banques, labellisation des sites Internet298 garantissant la sécurité
des paiements) plutôt que de légiférer. Une démarche de « privatisation du droit » axée sur
l’autorégulation a aussi été privilégiée. Ainsi, l’Allemagne n’a pas jugé nécessaire d’adopter
une législation spécifique afin de garantir la sécurité des transactions réalisées par cartes
bancaires. Les règles du droit des contrats s’appliquent en la matière car elles sont jugées
suffisamment souples et malléables pour régir la situation spécifique de la sécurité des
transactions réalisées par carte bancaire. Cependant, avec l’entrée en vigueur de la loi relative

294
SCHOSTECK, rapport de, au nom de la commission des lois du Sénat n° 329 (2000-2001). Le montant des
fraudes est chiffré à 1,750 millions de francs, soit une augmentation de 75% sur les trois dernières années.
295
LEPLAT F., La réforme des cartes bancaires par la loi du 15 novembre 2001, LPA 24 janvier 2002, n °18.
296
Observatoire de la sécurité des cartes de paiement, Rapport d’activité 2004, p.15
297
Disponible sur : http://www.senat.fr/lc/lc125/lc1250.html .
298
On distingue la labellisation interne, dans laquelle le titulaire du site s’engage à respecter certains critères
destinés à assurer un meilleur niveau de confiance au profit du consommateur, de la labellisation externe qui
peut être définie comme une garantie octroyée par un tiers indépendant quant au respect par le titulaire des
critères.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les122
établissements bancaires et financiers

aux achats à distance en date du 1er juillet 2000, certaines mesures propres à la sécurité de la
carte bancaire ont été introduites. A l’inverse, la Belgique a mis en place un dispositif
juridique précis pour assurer la sécurité des transactions réalisées par carte bancaire afin de
parvenir à une confiance totale des utilisateurs et d’assurer un degré élevé de protection des
titulaires d’instruments de paiement dans l’utilisation des moyens de paiement électroniques.

B. Le chèque

244. Procédé. Le chèque traditionnel est défini comme l’écrit par lequel une personne, le tireur,
donne l’ordre à un établissement de crédit, le tiré, de payer à vue une certaine somme à une
troisième personne, le bénéficiaire, ou à son ordre299. Il constitue le moyen de paiement
scriptural le plus utilisé300 et surtout, le plus polyvalent301. Après avoir fait l’objet d’une
informatisation pour automatiser les procédures de traitement, désormais il est adapté afin de
s’intégrer au monde virtuel en prenant la forme électronique302. En effet, un outil tel que le
chèque, adapté aux paiements électroniques, devient particulièrement intéressant car il permet
au marchand de ne contacter la banque qu'une fois par jour afin d'y déposer les chèques et,
donc, d'effectuer une économie sur les communications téléphoniques. Le coût de paiement
du chèque serait moins élevé que celui découlant d'un paiement par carte. En conséquence, il
constitue un mécanisme de paiement efficace, simple à utiliser et peu coûteux. Aujourd’hui, le
chèque représenterait 15% des transactions en ligne303.

245. Applications. Jusqu’à maintenant, le chèque électronique n’a pas remporté un vif succès
auprès des acteurs du commerce électronique. A l’heure actuelle, il existe très peu
d’initiatives en la matière. Deux systèmes se distinguent de la concurrence. Il s’agit des
projets eCheck (i) du FSTC (Financial Services Technology Consortium) et de NetChex (ii).

i. ECheck. Le chèque proposé par eCheck304 est l’équivalent électronique du chèque


papier. Le client dispose d’un livret de chèques qu’il peut visualiser et remplir. La seule
différence a trait à la signature manuelle qui est remplacée par une signature électronique. On
299
PEROCHON F. et BONHOMME R, Entreprises en difficultés, instruments de crédits et de paiement, LGDJ,
Paris, 6ème éd., 2003, n°780 p.633.
300
La France est le pays européen qui utilise - de loin - le plus grand nombre de chèques, avec plus de 4 milliards
de chèques émis en 2004. V. le dossier dédié au chèque, 18 août 2005, disponible sur : www.fbf.fr.
301
BERTIN P., « Les moyens de paiement et leur avenir », Banque Stratégie, octobre 1996, n° 131, p.2.
302
SUTTER G., op. cit., p.15
303
Dossier « moyens de paiement », 29 octobre 2003, disponible sur : www.journaldunet.com .
304
Pour plus de détails, nous renvoyons sur : http://www.echeck.org/.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les123
établissements bancaires et financiers

peut donc prétendre que ce mécanisme de paiement est plus sécuritaire que son homologue
papier, si l’on considère la signature électronique plus fiable que la signature traditionnelle.
C’est sans aucun doute ce qui explique l’appui donné à ce système par de nombreux
intervenants du milieu financier et par le ministère du trésor américain qui l’utilise déjà pour
de nombreux paiements. En revanche, ce mécanisme possède l’inconvénient de ne pas
garantir au commerçant la disponibilité des fonds immédiatement. Aussi la technologie
eCheck semble-t-elle mieux adaptée au contexte des transactions régulières entre des
partenaires commerciaux.

ii. Netchex. Le chèque proposé par Netchex305 constitue plutôt une adaptation du modèle
traditionnel au contexte des environnements dématérialisés. Selon ce système, client et
commerçant doivent enregistrer leurs informations bancaires auprès de Netchex. Ainsi,
lorsque le chèque est transmis à Netchex via l’Internet, il ne contient pas ces renseignements.
Au moment de la réception, Netchex se charge de vérifier l’authenticité du document et de le
compléter avec les informations de sa base de données. La transaction est ensuite transférée
sur le réseau fermé du système bancaire, comme pour un chèque papier. Enfin, Netchex
confirme le bon déroulement du processus aux parties. Ce processus, certes plus sécuritaire,
possède les inconvénients de nécessiter un enregistrement antérieur et d’ajouter la
participation d’un tiers à toutes les transactions digitales.

iii. Autre alternative. Il est à noter qu’au cours du premier trimestre 2003,
Chequeboutique.com (tiers de confiance et prestataire spécialisé dans l'e-commerce) et la
Caisse d'Epargne ont proposé un nouveau moyen de paiement en ligne. En cours de
lancement, la solution Checkkey n'est pas encore disponible pour les internautes, et afin d’y
souscrire, les e-commerçants doivent disposer d'un compte à la Caisse d'Epargne et d'un
contrat de vente à distance avec l'établissement bancaire. Les Checkeys s'apparentent à des
chèques « papier » dont les talons disposent d'un numéro à usage unique qui couplé à un
identifiant personnel, permet de valider une commande en ligne et de débiter le montant sur
un compte associé. Cette nouvelle solution s'appuie sur la technologie de paiement certifiée
par identification électronique, ID-Tronic, mise au point par la Caisse d'Epargne. Pour
l'utiliser, l'internaute doit au préalable s'inscrire sur l'espace e-commerce de la Caisse
d'Epargne (Spplus.net) et fournir les coordonnées bancaires du compte sur lequel il veut être

305
Pour plus de détails, nous renvoyons sur : http://www.netchex.org et http://www.virtualpaymentsystems.com/
virtualchecks.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les124
établissements bancaires et financiers

débité. En échange, il reçoit un identifiant qui est l'équivalent d'un code personnel. Afin de
garantir la sécurité du système, les Checkeys sont envoyés inactivés à l'internaute qui en a fait
la demande. Pour s'en servir, le client doit se connecter à Spplus.net, donner son identifiant et
le numéro du carnet afin que la série de dix chèques soit associée à son code personnel.

246. Droit cambiaire et chèque électronique. Peut-on assimiler juridiquement le chèque


électronique au chèque papier ? Autrement dit, le chèque électronique remplit-il les conditions
de validité du chèque papier ? Si la définition même du chèque suppose un écrit (les formules
de chèque, elles-mêmes conditionnées par l’ouverture d’un compte), aucun texte n’oblige
d’utiliser les formules délivrées par le banquier, c’est-à-dire que le support importe peu du
moment que d’autres conditions sont remplies. Le chèque traditionnel est en effet soumis à
deux exigences. Les conditions de fond n’appellent pas de développements particuliers : les
règles de capacité, de consentement, relatives au pouvoir du tireur et à la provision ne sont pas
propres à l’instrument. Ces conditions doivent certes être vérifiées, mais l’Internet n’y change
rien, à partir du moment où les vérifications avant délivrance des formules ont été effectuées.

247. La forme du chèque. En ce qui concerne, en revanche, les conditions de forme, on est bien
en présence d’un changement de support : de physique, il devient dématérialisé. Le chèque
doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires306 pour la plupart déjà pré-
imprimées sur les formules ; la mention manuscrite n’est nullement requise ad validitatem.
D’autres mentions sont à compléter par le tireur307, mais seule la signature doit théoriquement
et obligatoirement être manuscrite ; ainsi, pour le lieu, l’article 2 du décret-loi de 1935 précise
même des règles de suppléance légales en cas d’omission. Si l’absence des autres mentions
est sanctionnée par la nullité du chèque en tant que tel308, rien n’oblige le tireur à les compléter
de manière manuscrite. Aussi, le chèque n’en est-il pas moins valable s’il est signé alors qu’il
serait pré-rempli.

248. Les apports législatifs. D’une part, les développements législatifs relatifs à la signature
électronique309 permettent valablement de substituer une signature dématérialisée à une

306
Article 1er du décret-loi du 30 octobre 1935.
307
La détermination de la somme à payer, l’indication de la date, du lieu et sa signature. PEROCHON F. et
BONHOMME R, op. cit., n°787 et s. p638.
308
Il peut néanmoins valoir promesse de payer ou commencement de preuve par écrit de la dette du tireur envers
le bénéficiaire. Civ 1ère, 26 janvier 1988, Bull. civ. I, n°23. PEROCHON F. et BONHOMME R, Ibid.
309
Nouvel article 1316-4 du code civil issu de la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 et du décret d’application
n° 2001-272 du 30 mars 2001.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les125
établissements bancaires et financiers

signature manuscrite lors d’une relation électronique. D’autre part, les nouvelles règles
applicables à la preuve électronique reconnaissent au document électronique la même force
probante qu’au sacro-saint document papier310. Le papier n’étant pas une condition de validité,
l’ensemble de ces éléments nous amène à penser que le chèque électronique a désormais
toutes les caractéristiques du chèque papier (en dehors du papier lui-même !), à partir du
moment où le tiré est un établissement de crédit ou assimilé311. Ce constat a donc pour
conséquence l’application du régime juridique du chèque au chèque électronique : l’ordre de
payer donné au tiré est irrévocable312.Il n’en reste pas moins que les cas d’opposition
diffèreront pratiquement, dans la mesure où la perte et le vol resteront difficiles à mettre en
œuvre (il demeurera néanmoins l’utilisation frauduleuse). Ainsi, le droit du porteur sur la
provision s’acquiert dès le jour de l’émission. De même, les règles de police bancaire313
paraissent tout à fait applicables au chèque électronique. En conséquence, le chèque
électronique reste, comme le chèque papier, un instrument de paiement – il ne se confond pas
avec la monnaie scripturale – cependant, s’il dispose de l’avantage de la rapidité de son
traitement, en revanche les règles du droit du chèque inhérentes au titre papier – tradition,
endossement – ne semblent pas pouvoir lui être applicables. Mais alors, on peut légitimement
se demander si le chèque électronique ne se rapproche pas in fine de l’ordre de paiement.

§ 2. Les nouveaux moyens de paiements

249. Spécificité. A côté des moyens classiques de paiement « détournés » de leur utilisation
classique afin de permettre leur adaptation à l’Internet, le paiement par intermédiaire virtuel
(A) et la monnaie électronique (B) constituent autant de nouveaux moyens de paiements que
les établissements bancaires et financiers doivent maîtriser pour le premier et développer pour
le second. Ces modes de paiement concernent directement les opérations de banque, et sont
spécifiques au paiement électronique. Ils sont en partie développés dans le but de fournir des
instruments à l’aspect sécurisé.

310
Nouvel article 1316-1 du code civil issu de la loi n°2000-230 du 13 mars 2000.
311
Article 3 du décret-loi de 1935.
312
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit. n°436, p 285.
313
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit. n°443, p 293.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les126
établissements bancaires et financiers

A. Le paiement par intermédiaire virtuel

250. Principe et illustrations. La principale caractéristique du paiement par intermédiaire


« virtuel » est qu’il a lieu à travers une société qui n’est pas elle-même opérateur bancaire,
mais intermédiaire entre le vendeur et le client pour le paiement”314. Plusieurs sociétés ont
proposé ce mode particulier de règlement. On pense entre autres aux sociétés First Virtual et
Globe ID315. En France, un accord avait été conclu – sans grand succès commercial - entre le
groupe France Telecom et la société iPIN, une start-up de la Silicon Valley, aux termes
duquel le groupe français prenait l’engagement d’intégrer les solutions de paiement en ligne
de la start-up dans l’offre commerciale de la société Wanadoo316 317
. Ce type de paiement ne
présente pas les mêmes enjeux que la monnaie électronique.

B. La monnaie électronique

251. Diversité. Si la monnaie électronique ne constitue qu’un nouveau type de moyen de paiement
via l’Internet, les variétés de monnaie électronique se multiplient afin de proposer diverses
réponses aux utilisateurs, telles que les cartes à puce (a) ou le porte monnaie virtuel (b).
Cependant, ces instruments « n’aboutissent pas encore à la création d’une nouvelle monnaie
puisque [ces instruments] sont liés à des comptes bancaires »318.

314
VERBIEST T. et WERY E., op.cit., p.14.
315
Pour plus de détails, nous renvoyons à l’article de CAPRIOLI E., Le régime juridique des paiements sur
Internet, in Internet saisi par le droit, travaux de l’A.F.D.I.T., p. 69 et s.
316
Les Echos n°18.253, 9octobre2000, p.54.V.également http://www.ipin.com/france/company/about/4.html. La
Commission européenne semble toutefois décourager le recours à de telles pratiques, estimant que, « pour
protéger la vie privée des utilisateurs, les Etats membres doivent encourager la mise au point, dans le domaine
de services de communications électroniques, d’options telles que de nouvelles formules de paiement permettant
d’accéder de manière anonyme ou strictement privée aux services de communications électronique accessibles
au public, par exemple des télécartes et des facilités de paiement par carte de crédit ».
317
V. Sur ce point l’article 7 de la Directive du Parlement européen et du conseil concernant le traitement de
données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques,
Directive 2002/58/CE, JOCE, 31 juillet 2002, disponible sur :http://europa.eu.int/information_society/topics/tele
coms/regulatory/new_rf/documents/l_20120020731fr00370047.pdf, et le considérant 16 de la proposition initiale
de cette directive : Proposition du Parlement européen et du conseil concernant le traitement de données à
caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, Bruxelles,
12 juillet 2000, COM(2000), 385, disponible sur :http://europa.eu.int/comm/information_society/policy/framewo
rk/pdf/com2000385_fr.pdf.
318
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°428, p 283.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les127
établissements bancaires et financiers

a. Les cartes à puce ou cartes prépayées

252. Fonctionnement. La carte à puce, brevetée en 1975 par R. MORENO, a commencé d’être
utilisée pour les appels téléphoniques pour devenir plus tard une carte à microprocesseur, un
ordinateur miniature qui peut effectuer des calculs et sauvegarder des données en mémoire.
On la retrouve dans de nombreux domaines (carte bancaire, Vitale, professionnelles,
JavaCards319 permettant aux informaticiens lambda de les programmer). Simple d’usage, elle
est déjà largement plébiscitée : plus de 50 millions de cartes étaient en circulation en France
en 2005320. La carte à puce est une carte qui peut être chargée à concurrence d’une certaine
valeur monétaire, et qui permet ensuite au consommateur de régler l’acquisition de biens ou
de services auprès de l’émetteur lui-même ou des commerçants participant au système.321 La
sécurité de ces cartes est basée sur la difficulté à violer la puce pourvue d’un mécanisme de
protection qui s'active en cas de tentative ; ainsi la puce d'une carte bleue se bloque si l'on ne
donne pas le bon code trois fois consécutives.

253. Applications et bilan. Les applications commercialisées les plus connues sont les cartes
Proton, Mondex et Visa Cash322. Depuis 1998, il est possible d’utiliser la carte Proton pour
effectuer des paiements sur l’Internet au moyen d’un équipement spécifique, développé par la
société belge Banksys et appelé C-ZAM/PC, qui consiste en un lecteur de carte relié au PC323.
Mais comme tout coffre fort, la sécurité n'est jamais totale, comme cela a été démontré
dernièrement lorsque la clé privée d'authentification de la véracité d'une carte bleue a été
diffusée sur l’Internet, rendant possible la création de « fausses vraies cartes324 ». Toutefois, au
mois d’octobre 2003, le service de législation comparée du Sénat a rendu publique une étude
relative à la sécurité des transactions réalisées par carte bancaire. Elle examine les principales
dispositions adoptées par plusieurs pays européens (Allemagne, Belgique, Danemark,

319
C’est un environnement de programmation qui permet aux applications d’être créées, stockées ou supprimées
des cartes à puce, ce qui veut dire que les cartes à puce « taillées sur mesure » seront une réalité et les porteurs de
carte sélectionneront les applications sur leur carte selon leurs conditions et leurs besoins personnels. Pour plus
de détails, nous renvoyons sur : http://www.javacard.org
320
Cartes bancaires : records tous azimuts en France avant Noël en nombre de transactions, 26 décembre 2005,
disponible sur : http://fr.biz.yahoo.com/26122005/202/cartes-bancaires-records-tous-azimuts-en-france-avant-
noel-en.html.
321
MOURLON BEERNAERT F., « Les cartes prépayées (pre-paid cards): un nouvel instrument de paiement? »,
J.T., 1997, p.377 et s.
322
Pour une étude sur l’utilisation des cartes Mondex et Visa Cash aux USA et leur régime juridique, v.
VARTANIAN T., LEDIG R. et BRUNEAU L., 21st Century Money, Banking & Commerce, éd. Fried, Frank,
Harris, Schriver & Jacobson, 1998, p. 475 et s.
323
ROLIN L., op.cit., p.6. V. aussi http://www.banksys.be/czampc/fr/index.htm.
324
Cf. l’affaire Humpich sur l’adresse suivante : http://www.parodie.com/humpich.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les128
établissements bancaires et financiers

Espagne et Royaume-Uni) pour garantir la sécurité des transactions réalisées par carte.
L’étude révèle que les résultats obtenus en France grâce à la technologie à puce sont
unanimement vantés par nos voisins et les principaux réseaux de cartes bancaires ont décidé
de procéder à l’introduction progressive de la carte à puce dans tous les pays de l’Union
Européenne.

b. Les porte-monnaie virtuels

254. Principe. Les porte-monnaie virtuels, comme leur nom l’indique, se caractérisent par une
dématérialisation de l’instrument monétaire. La valeur monétaire ne se trouve plus stockée sur
un instrument mais l’est directement dans la mémoire de l’ordinateur. La banque de France en
a fourni en 1999 un rapport détaillé325 : « l’encours de monnaie électronique au sein de la
zone euro a crû de 100 % en 1998 et atteignait 120 millions d’euros au 1er janvier 1999. Les
principaux porte-monnaie électroniques existent sous forme de cartes prépayées et sont
opérationnels en Allemagne (Geldkarte – 58 millions d’euros), en Belgique (Proton – 24
millions d’euros) et aux Pays-Bas (Proton et Chipper – 25 millions d’euros). En France, à
l’exception du porte-monnaie électronique sur Internet Kleline, qui a connu jusqu’à présent
un succès modeste et qui doit, en conséquence, redéfinir son offre, trois projets de cartes
présentés par des groupes d’établissements de crédit sont en cours de réalisation et
d’expérimentation. Il s’agit de Modéus…, Monéo… [et] Mondex… C’est dans ce contexte que
le Groupement cartes bancaires a suscité l’idée de la création de la Société financière du
porte-monnaie électronique interbancaire, chargée d’émettre la monnaie électronique en
premier niveau et laissant la distribution de celle-ci auprès du public aux groupements
d’établissements de crédit responsables d’un PME... Le CECEI a agréé le 30 septembre
dernier la SFPMEI en qualité de société financière pour émettre et gérer ce nouveau moyen
de paiement, après examen détaillé des caractéristiques techniques et financières du projet
par la direction des Établissements de crédit et des Entreprises d’investissement’ ».

255. Evolution. Le système le plus connu est le système Ecash développé par la défunte société
hollandaise DigiCash326. Le logiciel Ecash convertit l’argent en une forme digitale ; l’argent

325
ANDRIES M., Développement récents en matière de monnaie électronique, Bulletin de la Banque de France,
n° 72, décembre 1999, Etudes, p. 87 et s.
326
VARTANIAN T., LEDIG R. et BRUNEAU L., 21st Century Money, Banking & Commerce.,Ed. Fried,
Frank, Harris, Schriver & Jacobson, p.485 (1998); pour une description détaillée du produit et des raisons de
l’échec de Digicash, v. notamment, http://www.arraydev.com/commerce/JIBC/9601-5.htm,
http://www.heise.de/tp/english/inhalt/te/1643/1.html
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les129
établissements bancaires et financiers

devient une suite de numéros susceptible d’être transmis par tout moyen de
télécommunication. La transaction réalisée au moyen du système Ecash est en principe
entièrement anonyme. Par ailleurs, à côté de l’émission et de la gestion de la monnaie
électronique proprement dite se développent aujourd’hui des formules associant opérateurs de
télécommunication ou fournisseurs d’accès à Internet avec des fournisseurs de prestations
permettant aux utilisateurs l’achat et le paiement en ligne de biens ou de services immatériels.
À ce titre, la société financière w-HA a fait l’objet d’une décision d’agrément en 2001 en vue
d’offrir aux internautes, via des fournisseurs d’accès à Internet, un moyen de paiement pour
l’achat de biens et de services en ligne de faibles montants327.

256. Bilan. Reprenant l’analyse du Professeur T. BONNEAU, « le préchargement de l’instrument


implique le débit du compte et le paiement réalisé avec son aide doit être suivi du crédit du
compte bénéficiaire, ils permettent seulement le transfert de la monnaie scripturale328 ». Il ne
s’agit donc pas d’une nouvelle forme de monnaie ; néanmoins la typologie des moyens de
paiement montre la multiplicité et la diversité des instruments financiers destinés à assurer le
paiement sur l’Internet et sa sécurisation. En effet, ce dernier est une condition sine qua non
du bon fonctionnement du marché ; il ne s’agit pas d’une nouveauté propre à l’Internet en ce
qu’il participe au principe général de sécurité juridique : tout créancier, via l’Internet ou
autrement, doit pouvoir être assuré d’être payé et, réciproquement l’acheteur doit pouvoir
payer sans risque de fraude. En revanche, le marché de l’Internet lui-même réagit par rapport
à l’attente sécuritaire et développe ses propres solutions et moyens. La technicité toujours plus
élaborée de ces moyens permet de lever l’obstacle finalement psychologique du paiement via
l’Internet, de rassurer investisseurs et établissements de crédit et créer un cadre technique et
juridique favorable à la croissance du marché. Aussi, peut-on se demander si ce n’est pas
justement cette multiplication des procédés techniques qui met en péril la confiance tant
recherchée.

327
Pour en connaître davantage sur cette société, nous renvoyons sur : www.w-ha.com .
328
BONNEAU T., Droit bancaire, op.cit., n°428, p 283-284.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les130
établissements bancaires et financiers

Section 2 : Le régime juridique de la monnaie électronique

257. Les interrogations. À ce stade la monnaie électronique n’en est encore qu’à ses débuts et
soulève une multitude de questions dont les plus importantes concernent sa définition (§1), sa
qualification (§2) et le risque de blanchiment (§3). Intrinsèquement, la monnaie électronique –
via l’Internet – dans l’instrument de paiement qu’elle constitue, comporte des avantages
considérables pour les établissements de crédits et les investisseurs. Il existe à ce stade une
présomption de bon fonctionnement liée à son potentiel de développement.

§1. Définition

258. Notion. La monnaie électronique est définie329 comme une valeur monétaire représentant une
créance sur l’émetteur, qui est :
i. stockée sur un support électronique ;
ii. émise contre la remise de fonds d’un montant dont la valeur n’est pas inférieure à la
valeur monétaire émise ;
iii. acceptée comme moyen de paiement par des entreprises autres que l’émetteur.
Cette définition est le résultat d’un compromis destiné à assurer le caractère « techniquement
neutre » de la directive de manière à permettre le développement sans encombre de cette
« monnaie ». Le premier projet de directive précisait en effet la notion de « support
électronique » en nous fournissant l’exemple de la carte à puce ou de la mémoire d’un
ordinateur. Ces exemples ont par la suite été supprimés afin d’éviter de porter atteinte à cette
neutralité. A l’heure actuelle, ces deux dernières techniques demeurent néanmoins les
meilleures représentantes du concept. L’idée du législateur européen consiste à faire de la
monnaie électronique un réel « substitut électronique » des pièces et billets de banque330. Ce
faisant, il écarte clairement l’idée que le chèque électronique, qui ne se caractérise pas par un
transfert de fonds, puisse entrer dans le champ d’application de la directive331. En
conséquence, le chèque électronique se rapprocherait davantage de l’ordre de paiement et
ainsi du transfert électronique.

329
Article 3 de la Directive 2000/46/CE.
330
Considérant n°3 de la Directive 2000/46/CE.
331
En ce sens, CHUAT J., « The new E.U. Directives to Regulate Electronic Money Institutions- A critique of
the E.U.’s approach to Electronic Money », JIBL, 2000, p. 181.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les131
établissements bancaires et financiers

259. Le monopole bancaire. En adoptant la conception selon laquelle la monnaie électronique est
une variante numérique des espèces, le législateur européen semble accepter l’idée que la
technologie contribue au développement d’une monnaie qui ne relève plus du pouvoir de
contrôle des banques centrales332. En effet, on distingue classiquement les banques qui ont une
compétence générale333 (elles peuvent effectuer toute opération de banque) des autres
établissements de crédits à compétences limitées (réception des fonds à vue et limite imposées
pour l’accomplissement des opérations de banque334). Ces critères devraient, sous l’effet des
directives, être complétés par un autre : « l’émission de moyens de paiement sous forme de
monnaie électronique » 335. Sachant que la mise à disposition de moyens de paiement est une
opération de banque, s’agit-il d’une nouvelle dérogation au monopole bancaire336 ? L’arrêté du
10 janvier 2003337 semble imposer une réponse affirmative dans la mesure où la monnaie
électronique, nouvel instrument de paiement, est singularisée ; l’article 2 de l’arrêté précise,
en outre, que les établissements limitant leur activité à l’émission, la mise à disposition du
public ou la gestion de monnaie électronique, sont désignés « établissement de monnaie
électronique ». Autrement dit, il s’agirait bien d’un statut particulier, pouvant exister en
dehors de toute réalisation d’autres opérations de banque. Si ces établissements sont rangés
dans la catégorie des établissements de crédit (car l’opération suppose encore la réception des
fonds, la monnaie électronique est émise contre la remise de fonds selon l’article 1er alinéa 2
de l’arrêté), ils peuvent limiter leur activité à la seule monnaie électronique (ou presque). Ils
sont alors soumis à un régime prudentiel dérogatoire (titre II de l’arrêté). En plus, donc, d’un
nouvel instrument, c’est une nouvelle catégorie d’établissement de crédit qui est ainsi créée.
Reste alors à déterminer la qualification juridique de la monnaie électronique.

332
ORLIN GRABBE J., Digital Cash and Regulators, document disponible sur: www.aci.net/kalliste/dcreg.htm
V. également CHUAT J., op.cit.,p. 181.
333
Article L511-9, al 3 du Code monétaire et financier.
334
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°123 et s, p 79.
335
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°127 p 81.
336
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°205 et s. p 123 et s.
337
Arrêté du 10 janvier 2003 portant homologation du règlement n°2002-13 du Comité de la réglementation
bancaire et financière.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les132
établissements bancaires et financiers

§2- Qualification

260. Problème posé et analyse. Désormais la monnaie électronique338 se définit comme, toute
valeur monétaire représentant une créance sur un émetteur qui est stockée sur un support
électronique. Cette définition conduit-elle à la création d’un nouveau type de monnaie
s’ajoutant à ceux qui existent déjà, à savoir la monnaie métallique, fiduciaire et scripturale ?
Remarquons d’emblée, qu’il faut distinguer entre la monnaie et le support : « tous les moyens
de paiement ne s’identifient pas avec la monnaie… [de même] la monnaie scripturale est
seulement une monnaie sans être un moyen de paiement »339. Pour que la monnaie
électronique soit considérée comme une nouvelle forme de monnaie, elle doit réunir
cumulativement les trois fonctions juridiques de la monnaie340 . Elle doit ainsi être une unité
de compte (A), un nouveau moyen de paiement (B) et un nouvel instrument monétaire (C).

A. Une unité de compte

261. Notion de valeur. Selon cette conception, la monnaie est une unité de compte permettant
d’apprécier la valeur des services et des choses dont on a besoin, indépendamment de sa
matérialisation par son incorporation dans un support341. La monnaie électronique peut remplir
cette fonction en permettant au porteur d’acquitter ses achats chez un commerçant. Bien
entendu, il incombe à ce dernier de réclamer à l’émetteur une somme qui représente
exactement le montant de la vente.

B. Un nouveau moyen de paiement

262. Extinction de la dette. La monnaie électronique constitue bien un instrument de paiement car
elle permet d’éteindre la dette née entre le commerçant et le titulaire. La nouveauté réside
dans l’absence d’incertitude quant à l’existence de la provision du paiement. C’est une
caractéristique qui résulte de la technique du prépaiement.

338
V. pour une étude détaillée sue ce sujet, LANSKOY S., La nature juridique de la monnaie électronique,
Bulletin de la Banque de France, octobre 1999, n° 70, p.45 et GARANCE M. MENAIS A., Les enjeux de la
monnaie électronique, réflexions juridiques après l’adoption de la directive monnaie électronique, 26 juillet
2001, disponible sur : http://www.droit-technologie.org. C’est en s’appuyant, principalement, sur ces 2 articles et
aux différentes références qui y sont citées, que le présent titre a été développé.
339
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°428, p 282.
340
RIVES-LANGE J.-L., La monnaie scripturale (contribution à une étude juridique) , Etudes de droit
commercial à la mémoire de Henri CABRILLAC, Litec, 1968, cité par LANSKOY S., op.cit., p.47.
341
LANSKOY S., op. cit., p.47.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les133
établissements bancaires et financiers

C. Un nouvel instrument monétaire

263. Fonction instrumentale. Jusqu’à présent, la monnaie était incorporée dans trois instruments
monétaires : les pièces métalliques et les billets de banque (monnaie fiduciaire), et dans les
comptes bancaires (monnaie scripturale). En effet, c’est à partir du moment où les billets ont
été dotés du cours légal, donc déclarés inconvertibles en or et tirant leur valeur de leur seule
valeur faciale, qu’ils ont été considérés comme une véritable monnaie. Les soldes figurant sur
les comptes bancaires ont été qualifiés de « monnaie scripturale » à partir du moment où l’on
a réalisé qu’ils pouvaient être transférés de compte en compte sans être convertis en monnaie
fiduciaire342. Pour que la monnaie électronique soit considérée comme une nouvelle forme
juridique de monnaie, elle doit également remplir cette fonction d’instrument monétaire. Or,
la monnaie électronique ne dispose pas du régime du cours légal ou forcé. Sa valeur et son
régime dépendent essentiellement des dispositions contractuelles soumises par l’émetteur au
titulaire343. Toutefois, cela n’exclut pas le droit du porteur de demander à l’émetteur la
conversion des unités électroniques contenues dans le PME, en monnaie fiduciaire ou
scripturale.

264. Bilan : un titre de créance ? En conclusion, c’est le compte global de l’émetteur qui joue la
fonction de réserve de valeur. La monnaie électronique représente seulement une créance sur
ce compte, donc une créance de monnaie scripturale. Elle n’est pas une nouvelle forme
d’instrument monétaire mais seulement un nouveau moyen de paiement. A cet égard, elle peut
être qualifiée de titre de créance344. A ce stade de nos développements, il convient de
s’interroger avec certains auteurs345 sur le point de savoir si la monnaie électronique constitue
un nouveau titre de créance par assimilation au régime du chèque de banque et à celui du
chèque de voyage. En France, le régime juridique du chèque est régi par le code monétaire et
financier. Les articles L. 131-2 et L. 131-3 du code précité exigent, sous peine de nullité, le
respect d’un certain formalisme. Ainsi, de nombreuses mentions obligatoires telles que
l’indication de la date, du lieu d’émission ou du nom du tiré, doivent être stipulées afin que
l’écrit soit considéré comme chèque de banque. Or, force est de constater que la monnaie

342
Ibid.
343
SIMON P., Du billet de banque à la monnaie électronique, Banque, 1997, n°577, p.62. V. également
GUSTIN M., Les paiements électroniques, in Le commerce électronique : un nouveau mode de contracter ?,
Actes du Colloque organisé par la Faculté de Droit de l’Université de Liège et la conférence libre du jeune
Barreau de Liège (Belgique) le 19 avril 2001, Ed. Jeune Barreau de Liège, 2001, p. 239 et les références citées.
344
LANSKOY S., op. cit., p.57 ; MATHIAS G. et MENAIS A., op. cit., p.5.
345
Ibid.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les134
établissements bancaires et financiers

électronique ne remplit pas les conditions de forme requises par le législateur ; il convient
donc de réfuter l’assimilation de la monnaie électronique au chèque de banque.

265. Comparaison. La Cour de cassation a qualifié le chèque de voyage dans un arrêt du 16


janvier 1963346 en énonçant qu’il : « exprime un engagement de payer contracté par le
banquier émetteur et constitue non un billet de banque, mais un titre de créance à vue ou à
court terme ». Auparavant, un arrêt de la Chambre criminelle du 8 novembre 1950347 avait
estimé que les chèques de voyage « s’ils en ont les apparences extérieures, ne répondent pas
à la qualification juridique du chèque et expriment non pas un mandat mais seulement un
engagement de payer contracté par le banquier émetteur ». On pourrait être tenté d’assimiler
la monnaie électronique à cet instrument de paiement, fondé lui aussi sur le prépaiement ;
cette approche se révèle toutefois inappropriée car à la différence du chèque de voyage
concrétisé sur support papier et qui n’est jamais anonyme – du fait de l’exigence de la double
signature du titulaire des chèques – la monnaie électronique reste un titre anonyme348
incorporé dans un microprocesseur. L’anonymat existe au moment de son utilisation comme
moyen de paiement et non au moment de sa collecte ou de son encaissement.

266. Doctrine. Selon Monsieur S. LANSKOY349, la monnaie électronique n’est pas une nouvelle
forme de monnaie, mais un titre de créance qui permet de faciliter la circulation de la monnaie
scripturale. Le système de paiement en monnaie électronique est une nouvelle manière de
gérer la monnaie, dans lequel le moyen de paiement est une carte chargée d’unités
électroniques. Sur le terrain juridique, chaque unité est donc un titre de créance incorporé
dans un instrument électronique et accepté comme un moyen de paiement par des tiers autres
que l’émetteur. Le Professeur T.BONNEAU conclut également à l’absence de création d’une
nouvelle forme de monnaie : « un porte-monnaie électronique peut être remis contre remise
de fonds non inscrits au compte du porteur et des transfert de fonds peuvent être réalisés de
porte-monnaie à porte-monnaie, donc sans intervention du banquier, sans que l’on puisse
conclure à l’existence d’une nouvelle forme de monnaie puisque le bénéficiaire final de la
monnaie électronique peut en demander la conversion en monnaie métallique ou fiduciaire
auprès de l’émetteur »350.

346
D. 1963, p.517, note DESPAX.
347
RTD civ., 1956, p.91.
348
Sur les nuances qu’il convient d’apporter à cette affirmation, v. LEROUGE J.-F., op.cit., n. 7.
349
LANSKOY S., op. cit., p. 61.
350
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°428, p 284.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les135
établissements bancaires et financiers

267. Positions de la BCE et de la BDF. Par ailleurs, ainsi que l’énonce l’article 3 de la directive,
la monnaie électronique doit être remboursable à la valeur nominale en pièces et en billets de
banque. Comme le souligne la Banque Centrale Européenne, elle ne constitue par conséquent
qu’un type nouveau de monnaie scripturale351 générée ou gérée électroniquement352. De même,
La Banque de France, dans son Bulletin n° 70, d’octobre 1999, a défini la monnaie
électronique comme un simple titre de créance sur son émetteur.

268. Classification. Faut-il dès lors, à défaut de la faire entrer dans une construction juridique
cohérente, en conclure qu’elle n’entre dans aucune qualification juridique et qu’elle est la
résultante d’une construction contractuelle sui generis ? En droit français, il semble que cette
conclusion doive être retenue, en l’absence d’une loi assimilant la monnaie électronique à la
monnaie scripturale. Il n’en demeure pas moins qu’un raisonnement par analogie avec la
monnaie scripturale s’impose.

269. Monnaie scripturale. Cette approche s’est développée après la loi du 13 mars 2000353 relative
à la preuve électronique qui a donné naissance à la monnaie électronique scripturale. Jusqu’à
cette loi, la doctrine insistait, à juste titre, sur le fait que le signe monétaire constituant la
monnaie scripturale était l’écrit, de sorte que même si une opération était en totalité traitée par
recours à l’informatique, le signe monétaire demeurait l’écrit papier354. Déterminante jusqu’à
la loi du 13 mars 2000, l’observation a perdu toute portée depuis, puisque par l’effet de cette
loi le support électronique est devenu un support original au même titre que le support papier.
L’écrit pouvant être électronique, la monnaie scripturale peut être écrite sur un support
électronique. La monnaie électronique scripturale est donc bien née355. Certains auteurs
relèvent toutefois que la monnaie électronique ne pourra pas être assimilée à de la monnaie
scripturale tant qu’une loi adoptée par le Parlement français ne l’aura pas décidé356. A ce jour
une telle loi n’a, à notre connaissance, toujours pas été adoptée357.

351
European Central Bank, « Report on electronic money », août 1998, spéc p.15 et s., disponible sur :
http://www.ecb.int/pub/pdf/emoney.pdf.
352
VASSEUR M., Le paiement électronique, JCP G 1985, I, n° 3206, n°6 ; J-P. BUYLE, La carte de paiement
électronique, in La revue de droit bancaire et de droit du crédit de l’épargne et de la bourse, janvier-février 1988,
n°5, p.16.
353
Loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 : JCP G 2000, III, 20, 259.
354
LUCAS de LEYSSAC C. et LACAZE X., Le paiement en ligne, Comm. com. électr., février 2001, p.13.
355
Ibid
356
GARANCE M. et MENAIS A., op. cit., p.3.
357
V. la proposition de résolution n°97, Sénat français, session ordinaire 1998-1999, annexe au procès verbal de
la séance du 3 février 1999.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les136
établissements bancaires et financiers

§ 3- Le risque de blanchiment de la monnaie électronique

270. Constat. Madame A. OBOLENSKY, directrice générale de la Fédération Bancaire Française


le rappelait encore récemment358 : la lutte contre le blanchiment d’argent est une « ardente
obligation » pour la profession bancaire. Cependant, la nature des opérations bancaires est
revue de fond en comble, en raison des nouvelles techniques et des nouvelles formes de
services de paiement. Les risques de blanchiment d’argent ne sont pas propres à l’Internet359,
mais la toile offre un nouveau moyen de « lessiver » les capitaux d’origine douteuse. Or, à
l’intérieur d’un cadre visant à garantir la sécurité maximale des transactions, il nous semble
que c’est également aux établissements bancaires et financiers de prendre les mesures
techniques nécessaires, notamment préventives, afin de limiter les risques de dérives de
l’Internet.

271. Problématique. En matière d’Internet, la problématique reste la même ; elle se confronte


simplement à un nouveau support et à une nouvelle technologie. « La lutte ne peut être
efficace que si on neutralise les moyens qui permettent aux trafiquants de dissimuler l’origine
des fonds…et [sachant que les trafiquants utilisent largement le système bancaire et son
fameux secret] il faut lever au moins partiellement le secret bancaire »360. Il reste donc à
savoir si l’Internet constitue effectivement un nouveau canal de blanchiment, si la « monnaie
électronique » comporte les mêmes risques de blanchiment et, enfin, si l’anonymat relatif de
l’Internet contribue à renforcer le secret.

272. Plan. Historiquement la notion de blanchiment d’argent est apparue dans les années 1920 aux
Etats-Unis, à l’époque de la Prohibition. La première technique consistait à utiliser les laveries
automatiques, commerce où les paiements se font par nature en monnaie fiduciaire, afin de
mêler l’argent « sale », provenant de la vente illégale d’alcool, à de l’argent « propre », issu
des revenus réguliers de l’activité de blanchisserie. Pour expliquer cet enjeu, il convient avant
toute chose de comprendre le fonctionnement du blanchiment d’argent (A) avant d’analyser
les techniques afférentes à la monnaie électronique (B).

358
Colloque organisé par la Banque de France à l’Ecole Nationale de la Magistrature – 12 décembre 2003 – sur
le thème « lutte contre le blanchiment ».
359
Mission d’information commune sur les obstacles au contrôle et à la répression de la délinquance financière
et du blanchiment des capitaux en Europe, Rapport d’information : La lutte contre le blanchiment des capitaux
en France : un combat à poursuivre, 11 avril 2002, Assemblée nationale, Tome II, Vol. 1 ; DAVOUST D., La
lutte contre le blanchiment de capitaux : une action menée au plan international, européen et national, LPA, 5
août 2002, n°155, p.4.
360
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°249, p 147.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les137
établissements bancaires et financiers

A. Définitions du blanchiment d’argent

273. Cadre légal361. En France, le blanchiment de l’argent fait l’objet d’un titre entier du Code
monétaire et financier (Livre V, titre VI) qui instaure un certain nombre d’obligations de
vigilance. Ainsi l’article L.562-2362 impose aux organismes financiers de déclarer au service
« Tracfin »363 les sommes inscrites dans leurs livres qui pourraient provenir du trafic de
stupéfiants, de la fraude aux intérêts financiers des Communautés européennes, de la
corruption ou d'activités criminelles organisées, de même que les opérations qui portent sur
des sommes lorsque celles-ci pourraient provenir du trafic de stupéfiants, de la fraude aux
intérêts financiers des Communautés européennes, de la corruption ou d'activités criminelles
organisées. Les banques sont également tenus de déclarer à ce service toute opération dont
l'identité du donneur d'ordre ou du bénéficiaire reste douteuse malgré les diligences effectuées
et les opérations effectuées par les organismes financiers pour compte propre ou pour compte
de tiers avec des personnes physiques ou morales, y compris leurs filiales ou établissements,
agissant sous forme ou pour le compte de fonds fiduciaires ou de tout autre instrument de
gestion d'un patrimoine d'affectation dont l'identité des constituants ou des bénéficiaires n'est
pas connue.

274. Sanction pénale. En outre, le blanchiment est réprimé par l’article 324-1 du nouveau Code
Pénal, qui le définit comme « le fait de faciliter, par tout moyens, la justification mensongère
de l'origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à
celui-ci un profit direct ou indirect». Ainsi, afin d’obtenir une condamnation, le ministère
public doit démontrer que l'accusé s'est livré à des transactions financières, ou qu'il a
transporté des fonds d'un pays à un autre, en rapport avec une activité illicite établie. La liste

361
Sur les obstacles à la lutte contre le blanchiment, v. Le rapport public de la mission parlementaire
d’information commune sur les obstacles au contrôle et à la répression de la délinquance financière et du
blanchiment des capitaux en Europe, rendu au Sénat le 11 avril 2002, disponible sur : www.assemblee-
nationale.fr/rap-info/2311-611.asp .
362
Dont la dernière modification est issue de la loi nº 2004-130 du 11 février 2004 art. 70 III.
363
La cellule de renseignement financier française, dénommée Tracfin ( Traitement du Renseignement et Action
contre les Circuits Financiers clandestins) est à la fois un centre de collecte de renseignements sur les circuits
financiers clandestins, un service d’expertise financière et un service opérationnel de lutte contre le blanchiment.
A ce dernier titre, essentiel, il reçoit les déclarations de soupçons – clés de voûte du dispositif français anti-
blanchiment- émises par les établissements financiers et diverses professions non financières. (179 déclarations
en 1991, 7000 en 2002 et 10000 en 2003, dont 80% émanent des banques). Le rapport d’activité Tracfin 2004
qui nous sert de référence pour la rédaction de cette note, montre une hausse quantitative des déclarations de
soupçons (de l’ordre de 20% : 10842 contre 9019 en 2003) provenant essentiellement des banques et des
établissements de crédit. Le Tracfin a en outre transmis 347 dossiers à l’autorité judiciaire, (ce qui constitue une
augmentation de 12,5% par rapport à 2003). Pour d’amples renseignements sur ce sujet nous renvoyons sur :
www.tracfin.minefi.gouv.fr/ressources/raptracfin2004.pdf .
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les138
établissements bancaires et financiers

de ces activités est extrêmement longue ; elle inclut notamment les pots-de-vin, la contrefaçon
de monnaie, le trafic de stupéfiants, l'espionnage, l'extorsion, la fraude, le meurtre, les rapts,
l'escroquerie et certaines pratiques bancaires364. Par ailleurs, le Groupe d’action financière sur
le blanchiment de capitaux (GAFI)365, recommande aux institutions financières d’apporter une
attention particulière aux menaces de blanchiment de capitaux inhérentes aux nouvelles
technologies et qui risquent de favoriser l’anonymat366. C’est dans ce sens que le nouvel
article L. 563-1367 du Code monétaire et financier impose aux organismes financiers de
prendre des dispositions pour contrer le risque « accru » de blanchiment de capitaux en cas de
relations contractuelles avec un client qui n’est pas physiquement présent. Enfin, l’arrêté du
31 mars 2005 modifiant le règlement du CRBF n° 97-02 du 21 février 1997, enjoint les
établissements de crédits à se doter d’un contrôle interne368.

275. Des activités lucratives. Dans le même sens, le GAFI a affirmé que369 : « de nombreux actes
criminels visent à générer des bénéfices pour l'individu ou le groupe qui les commet. Le
blanchiment de capitaux consiste à retraiter ces produits d'origine criminelle pour en
masquer l'origine illégale. Ce processus revêt une importance essentielle puisqu'il permet au
criminel de profiter de ces bénéfices tout en protégeant leur source. Les ventes illégales
d'armes, la contrebande et les activités de la criminalité organisée, notamment le trafic de
stupéfiants et les réseaux de prostitution, peuvent générer des sommes importantes.
L'escroquerie, les délits d'initiés, la corruption ou la fraude informatique permettent
également de dégager des bénéfices importants, ce qui incite les délinquants à «légitimer» ces
gains mal acquis grâce au blanchiment de capitaux ».

364
BAUER P. et ULLMANN R., Comprendre le cycle du blanchiment des capitaux, in « La lutte contre le
blanchiment des capitaux », Perspectives économiques. Revue électronique du département d'État des États-
Unis, vol. 6, no 2, mai 2001, disponible sur : http://usinfo.state.gov/journals/ites/0501/ijef/ijef0501.htm.
365
Le Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI) a été créé au sommet du G-7 à Paris en
1989, en réponse à des préoccupations croissantes au sujet du blanchiment de capitaux. Il a reçu pour mission
d'examiner les techniques et les tendances du blanchiment de capitaux, d'analyser les actions qui ont été menées
au plan national ou international et d'énoncer les mesures qui restent à prendre pour lutter contre le blanchiment.
Pour plus de détails sur le GAFI et son travail, nous renvoyons sur : www.fatf-gafi.org.
366
GAFI, les quarante recommandations, 20 juin 2003, recommandation n°8.
367
Issu de la loi n°2004-130 du 11 févier 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou
juridique, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en vente aux enchères
publiques.
368
Arrêté du 31 mars 2005 modifiant le règlement du Comité de la réglementation bancaire et financière n° 97-
02 du 21 février 1997relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises d’investissement.
(J.O n° 83 du 9 avril 2005 p. 6418)
369
Tout sur le blanchiment des capitaux, une étude réalisée par les services du GAFI et disponible sur :
http://www1.oecd.org/fatf
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les139
établissements bancaires et financiers

276. Masquer les sources. En effet, lorsqu’une activité criminelle génère des bénéfices
substantiels, l’individu ou le groupe impliqué doit trouver un moyen de contrôler les fonds
sans attirer l’attention sur son activité criminelle ou sur les personnes impliquées. Les
criminels s’emploient donc à masquer les sources, en agissant sur la forme que revêtent les
fonds ou en les déplaçant vers des lieux leur permettant de moins attirer l’attention. Les
marchés des instruments dérivés et des valeurs mobilières semblent particulièrement
vulnérables au recyclage de l’argent sale, tant les contrôles sont faciles à brouiller.

277. L’essor de l’Internet. La croissance exponentielle des marchés financiers internationaux370,


favorisée par l'essor des technologies de l'information et de la communication, a ainsi facilité
le blanchiment371. Dans un contexte actuel marqué par la globalisation et l'immédiateté des
échanges, les services offerts par les multiples établissements bancaires implantés dans les
paradis réglementaires et les centres financiers off-shore sont particulièrement appréciés par
les blanchisseurs372. Il est à noter que ces territoires sont surtout connus pour leurs avantages
fiscaux ; cela étant, ils attirent d'abord les blanchisseurs en raison de l'extrême simplicité des
règles applicables pour la création et la gestion des sociétés de tous types. Il en résulte que
plusieurs millions de sociétés sont aujourd'hui domiciliées dans quelques dizaines de paradis
financiers ; la très grande majorité d'entre elles peut être qualifié de sociétés écran, c’est-à-
dire d'entités dont l'existence a pour but de dissimuler l'identité de ceux qui les possèdent ou
les contrôlent. Généralement, les blanchisseurs ont tendance à rechercher des zones dans
lesquelles ils courent peu de risque de détection en raison du laxisme ou de l’inefficacité du
dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux. Etant donné que les malfaiteurs ont tout
intérêt à dissimuler leurs activités, il n'existe évidemment pas de statistiques fiables sur le
volume total du blanchiment des capitaux, mais le Fonds monétaire international le situe dans
une fourchette allant de 2 à 5% de la production mondiale373. Selon certaines estimations, le
montant des narcodollars blanchis à l'échelle internationale atteint à lui seul des sommes
variant entre 300 milliards à 600 milliards de dollars par année (exclusion faite du produit
d'autres types de criminalité)374.

370
V. MALABAT V., Les aspects internationaux du blanchiment, RDBF, juillet-aôut 2005, p.41 et s.
371
PLOIX H., Ethique et marchés financiers, Rapport moral sur l'argent dans le monde, Montchrestien, 1996, p.
341 et 342.
372
BERNASCONI P., La criminalité transfrontière : sophistications financières et faiblesse judiciaire, Les
Cahiers de la sécurité intérieure, n° 19, 1995.
373
DAVOUST D., La lutte contre la blanchiment de capitaux : une action menée au plan international, européen
et national, LPA, 5 août 2002, n° 155, p.4.
374
LYON J., « Le blanchiment d’argent », in Le Banquier, Volume 27, numéro 4 - Quatrième trimestre 2000,
disponible à l’adresse suivante : http://www.cba.ca/fr/magazine/getArticle.asp?at_id=205
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les140
établissements bancaires et financiers

B. Les techniques de blanchiment de la monnaie électronique

278. Le risque. Les nouvelles technologies de paiements - cartes pré chargées, banque sur
l’Internet et monnaie électronique - peuvent théoriquement augmenter les possibilités de
blanchiment. En effet, si l’institution financière en ligne est établie dans une zone connue
pour la rigueur du secret bancaire et qui exige peu, de preuves d’identité pour l’ouverture d’un
compte, voire aucune, il suffit au blanchisseur de transférer des capitaux depuis son
ordinateur. De même, certains systèmes de cartes pré chargées ou porte-monnaie
électroniques présentent un risque dans la mesure où aucune limite maximale de montant
n’est fixée à leurs opérations. De plus, si la plupart des ces systèmes ne permet pas encore de
transactions directes de carte à carte, d’autres systèmes auront peut-être la capacité de
transmettre des fonds sans recours à un intermédiaire financier. En l'absence de normes
cohérentes et de surveillance appropriée de la part des autorités de tutelle, ces nouvelles
technologies de paiement pourraient se révéler propices aux opérations de blanchiment de
capitaux. La création de monnaie électronique peut paraître inquiétante, car en convertissant
des billets en données binaires, ils font perdre techniquement toute trace de ces billets
auxquels on ne peut plus associer de numéros de série (question de la dématérialisation de la
monnaie). Pourtant nous pensons que, pour l'instant, le risque de blanchiment de la monnaie
électronique reste faible.

279. Au plan international. « La lutte contre le blanchiment est une préoccupation


internationale375 » ; en témoignent les nombreux textes adoptés376. Cependant, à l’heure
actuelle, les pays du G-10377 n'ont rien noté qui puisse indiquer qu'il y ait des activités de
blanchiment d'argent en rapport avec la technologie de la monnaie électronique. Si cette
technologie était utilisée à grande échelle, il est concevable que les criminels puissent
chercher à en tirer parti pour le transfert de fonds illicites378. En effet, les criminels sont
toujours à l’affût d’un nouveau type de détergent afin de toujours mieux lessiver leur argent.
Jusqu'ici, il ne leur a fallu que peu de temps pour tirer profit de chaque nouvelle méthode de

375
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°250, p 147.
376
Déclaration de principe du Comité de Bâle de décembre 1988, convention de Vienne du 19 décembre 1988,
convention de Strasbourg du 8 novembre 1990.
377
Le G-10 s’est formé en 1961 et il constitue en quelque sorte un groupe de travail de l’ OCDE (Organisation
de Coopération et de Développement Economiques), comprenant les officiels des banques centrales et les
ministres des 10 « plus importants » pays membres de l’OCDE auxquels on ajoute la Suisse.
378
Groupe des Dix, « Electronic money : Consumer proyection, Law enforcement, Supervisory and Cross
Border Issues », Rapport du Groupe de travail sur la monnaie électronique, 1997, disponible sur :
http://www.bis.org.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les141
établissements bancaires et financiers

transfert financier. Dans les années 1980 et 1990, les virements télégraphiques sont devenus
populaires pour le transfert de fonds tant à des fins légitimes qu'à des fins illégitimes. Le
même phénomène pourrait se produire dans le cas de la monnaie électronique379.

280. Au plan européen. Les blanchisseurs seront attirés par cette monnaie du fait que l'argent se
déplace à la vitesse « du clic » d'une institution financière à une autre dans quasiment le
monde entier et qu’en conséquence, le suivi des mouvements de fonds est un défi très
complexe. Pourtant, si l’on pouvait être pessimiste il y a quatre ou cinq ans, on note
aujourd’hui l’essor de la coopération policière et judiciaire européenne. Un telle collaboration
semble tout à fait significative d’une prise de conscience et d’une volonté politique
incontestable. Dans cette optique, les parlementaires de l'Union européenne se sont réunis à
Paris le 8 février 2002 pour une conférence contre le blanchiment. Dans le cadre des
discussions, ils ont décidé de :
ƒ Créer un registre central des comptes bancaires ;
ƒ Prévoir l'identification par les fournisseurs d'accès des auteurs de transactions
financières sur l’Internet ;
ƒ Interdire aux établissements des pays membres de l'Union européenne d'ouvrir des
bureaux dans les pays non coopératifs dans la lutte contre le blanchiment ;
ƒ Veiller à l'application rapide du mandat d'arrêt européen ;
ƒ Limiter les paiements en espèces au-delà d'un certain montant et prévoir l'agrément
obligatoire auprès de l'autorité de régulation des services financiers des agents
appartenant à un réseau de transferts de fonds, des agents de création de sociétés, des
bureaux de change et des intermédiaires actifs sur l’Internet.

281. Illustration. Pour illustrer le problème que pose l'utilisation de la monnaie électronique, il est
nécessaire de distinguer les trois étapes de base du blanchiment d’argent, qui parfois se
chevauchent : il s'agit du placement (lavage -a-), de l'empilement (l’empilage -b-) et de
l'intégration (essorage -c-).

379
« Le blanchiment de la monnaie électronique : analyse de l’environnement », étude réalisée par le ministère
du Solliciteur général du Canada, octobre 1988, p.10.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les142
établissements bancaires et financiers

a. Le placement

282. Conversion et anonymat. La première phase - celle du placement - consiste à convertir les
fonds afin d’en masquer l'origine illicite. Par exemple, les recettes tirées du trafic des
stupéfiants sont converties en chèques ou en d'autres instruments monétaires négociables. En
pratique ce sont les entreprises qui manipulent beaucoup d'argent liquide (tels les restaurants,
les hôtels, les sociétés de gestion de distributeurs automatiques, les casinos, les laveries de
voitures) qui sont utilisées comme couverture. Dans le cas du blanchiment de la monnaie
électronique, des sommes d'argent peuvent être déposées dans une institution financière. Le
placement se réalise en achetant, par exemple, des devises étrangères au moyen d'un
ordinateur personnel, tout en ayant recours à un cryptage complexe pour assurer l'anonymat
des opérations. Les transactions sont rendues d’autant moins décelables qu’elles portent sur
des montants faibles.

b. L’empilement

283. Le transfert. Pendant la phase de l'empilement, le blanchisseur entreprend une série de


transactions financières complexes destinées à éloigner les fonds de leur source. Ceux qui ont
d’importantes sommes à blanchir créent des entreprises fictives dans des pays réputés soit
pour avoir des lois strictes en matière de secret bancaire, soit pour appliquer avec laxisme
celles qui régissent le blanchiment. Les fonds d'origine douteuse sont ainsi transférés d'une
société à l'autre jusqu'à ce qu'ils aient une apparence légitime. Ces manipulations doivent être
déguisées pour se fondre dans les transactions légitimes qui se déroulent quotidiennement
(virements, chèques de voyage).

284. Autres techniques. Différentes méthodes consistent dans l’achats de biens coûteux (valeurs
mobilières, voitures, avions, titres de transport, etc.) en les enregistrant au nom d'un ami pour
éloigner encore davantage les fonds de leurs origines illicites. Les blanchisseurs font parfois
appel aux casinos parce que ces établissements manipulent l'argent liquide en grande quantité.
Dans les systèmes de monnaie électronique, des virements successifs peuvent être effectués
au moyen d'un simple ordinateur personnel. Ces opérations ne laissent généralement aucune
piste vérifiable. De plus, les systèmes de monnaie électronique permettent des virements de
fonds instantanés, dans un cadre où il n'y a pas de frontières.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les143
établissements bancaires et financiers

c. L’intégration

285. Les investissements. La dernière phase, celle de l'intégration, est la plus payante pour le
blanchisseur. A ce stade, il est en mesure d'investir les fonds dans des activités économiques
légitimes, qu'il s'agisse d'investissements commerciaux, de l'acquisition d'immeubles ou de
l'achat de produits de luxe. Diverses techniques sont traditionnellement utilisées, notamment
le recours à des sociétés écrans qui « prêtent » aux blanchisseurs des sommes d'argent qu'ils y
ont placées, ou encore l'utilisation de fonds déposés dans des institutions financières à
l'étranger pour garantir des prêts au pays.

286. Via l’Internet. Dans le blanchiment de la monnaie électronique, le criminel peut réaliser
l'intégration des produits de la criminalité en se servant d'un ordinateur personnel pour réaliser
des placements ou acheter des biens sans recourir aux services d'une institution financière.
Les nouvelles technologies établissent donc un vecteur de rapidité et de complexité
supplémentaires des activités de blanchiment d’argent, que les autorités doivent affronter (en
utilisant le même vecteur de rapidité et de coordination) ; mais ces nouvelles technologies
constituent-elles une remise en cause à la fois des techniques « traditionnelles » de
blanchiment et des obstacles auxquels la lutte contre le blanchiment est confrontée « depuis
toujours » ? Dés lors, l’on pourrait constater que la lutte contre le blanchiment d’argent se
heurte aux mêmes problèmes qu’auparavant, malgré les nouveaux instruments développés
pour y faire face.

287. La méfiance de rigueur. Les blanchisseurs ont démontré à maintes reprises leur ingéniosité à
contourner les dispositifs de sécurité mis en place. Aucune raison à priori ne laisse à penser
qu’il n’en sera plus ainsi pour la monnaie électronique. De ce fait, il est impérieux de
concentrer tous les efforts nécessaires afin d’acquérir une expérience et une connaissance
aussi approfondies que possible des méthodes et techniques de blanchiment de l’argent.
Pourtant, à l’heure actuelle, les magistrats ne sont pas suffisamment équipés pour lutter
efficacement contre la délinquance organisée, par nature transfrontalière. Les tendances du
blanchiment au niveau des entreprises et des professions non financières ainsi que de
nouvelles technologies de paiement devront notamment faire l’objet d’une attention
particulière de la part du législateur national et européen. Comme le propose E. DE
MONTGOLFIER, pourquoi ne pas instituer un procureur de l'Union, premier organe de
poursuites ?
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les144
établissements bancaires et financiers

Section 3. Analyse du cadre instauré par la directive 2000/28/CE du


Parlement européen.

288. Objectif. L’Europe s’est dotée d’un dispositif réglementaire en matière d’émission de
monnaie électronique afin de garantir tout dérapage sur le plan prudentiel et de préserver
l’efficacité de la politique monétaire unique dans la zone euro. La directive s’applique aux
entreprises ou personnes morales qui émettent des moyens de paiement sous la forme de
monnaie électronique. En revanche, elle ne s’applique pas aux établissements de crédit tels
que nouvellement définis par la directive 2000/28/CE380, ci-après dénommée « la directive ».
L’objectif avoué de ce texte est de créer un régime juridique sur mesure pour une nouvelle
activité économique : l’activité d’émetteur de monnaie électronique. Avant d’analyser la
transposition de la directive (§2), il est nécessaire d’en cerner les principes directeurs (§1).

§1. Principes directeurs

289. Les principes. La directive fixe le régime juridique des établissements de monnaie
électronique (A) et s’articule autours de différents principes directeurs : remboursabilité (B),
garantie de solvabilité (C), contrôle prudentiel (D), libre prestation de services (E) et
exemption (F).

A. Limitation des activités des établissements de monnaie électronique

290. La restriction. L’article 1.5 de la directive dispose que les établissements de monnaie
électronique ne peuvent entreprendre d’autres activités que celles liées à l’émission de
monnaie électronique, sauf dans certaines limites, à savoir :
- la fourniture de services financiers et non financiers étroitement liés à l’émission de
monnaie électronique. La directive cite, à titre d’exemples non limitatifs, la gestion de
monnaie électronique, l’exercice de fonctions opérationnelles ou accessoires en rapport
avec l’émission de monnaie électronique, l’émission et la gestion d’autres moyens de
paiement ;
- le stockage de données sur le support électronique pour le compte d’autres entreprises
ou institutions publiques.

380
Comme exposé ci-dessus, la définition d’établissement de crédit a été modifiée par la directive 2000/28 pour
y inclure la notion d’établissement de monnaie électronique au sens de la directive 2000/46/CE.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les145
établissements bancaires et financiers

291. Exception. De plus, il est interdit à un établissement de monnaie électronique de se livrer à


des activités de crédit ou de détenir des participations dans d’autres entreprises.
Exceptionnellement, une participation dans une autre entreprise sera tolérée dans la mesure où
elle exerce des fonctions opérationnelles ou d’autres fonctions accessoires liées à la monnaie
électronique émise ou distribuée par l’établissement concerné.

B. Remboursabilité

292. Renforcer la confiance. Dans un souci manifeste de protection du consommateur,


notamment en cas de défaillance de l’instrument de monnaie électronique, la directive exige
de l’émetteur qu’il rembourse le porteur de monnaie électronique « à la valeur nominale en
pièces et en billets de banque ou par virement à un compte »381 sur simple demande de sa part.
L'objectif est de renforcer la confiance, en évitant qu'une personne ne se retrouve
« prisonnière » d'une monnaie électronique dont elle n’a pas l’utilité382. Cette obligation de
remboursement connaît néanmoins deux limites.
ƒ La première suspend la « remboursabilité » à la validité de la monnaie électronique.
Cette condition semble donc conférer indirectement à l’émetteur le droit de restreindre
dans le temps l’utilisation de la monnaie électronique. Cette limitation pourrait selon
nous s’avérer, dans certaines circonstances, préjudiciables. En effet, il est tout à fait
concevable que la monnaie électronique soit émise avec des capacités restreintes
d’utilisation. Ainsi, imaginons qu’un nombre illimité de fonds puisse être stocké sur le
support électronique. Est-il acceptable qu’à une date déterminée, la valeur monétaire
stockée ne soit plus remboursable et l’instrument pas davantage utilisable ? Certes il
appartient au titulaire d’être vigilant et de veiller à ne pas stocker plus que ses besoins ne
le demandent. Néanmoins, il nous semble qu’il persiste ici un risque d’abus.
ƒ La seconde limite concerne les frais liés à l’opération de remboursement. La directive
précise que le remboursement doit se faire « sans autres frais que ceux qui sont
strictement nécessaires à la réalisation de l’opération ». Ce critère est-il suffisamment
objectif et tolérable ? Comment quantifier les frais qui sont « strictement nécessaires » à
la réalisation de l’opération de ceux qui ne le sont pas ?

381
Article 3 de la directive.
382
WERY E., La monnaie électronique reçoit un cadre juridique européen, 8 Novembre 2000, disponible sur :
http://www.droit-technologie.org.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les146
établissements bancaires et financiers

293. Bilan. Enfin, on pourrait s’interroger sur le fait de savoir si la « remboursabilité » ne devient
pas un élément de la définition de la monnaie électronique383. Pour certains, la
« remboursabilité doit être considérée comme une mesure protectrice du porteur applicable à
tous les moyens de paiements réunissant les caractères énumérés à l’article 1§3b de la
directive »384. L’affirmation n’est certainement pas erronée. La « remboursabilité » peut à
notre avis également être considérée comme une mesure de sauvegarde du pouvoir de
contrôle des banques centrales385.

C. Garantie de solvabilité

294. Risque de faillite : comparaison. Le troisième objectif principal de la directive consiste à


veiller à ce que les établissements de monnaie électronique présentent des garanties
minimales de solvabilité. Il convenait en effet de favoriser la création de la monnaie
électronique tout en veillant à se prémunir contre les risques inhérents à la faillite de ces
nouvelles entreprises qui, si elles devaient se produire en chaîne dans un pays membre,
pourraient avoir des conséquences économiques désastreuses pour celui-ci, mais également
pour les pays avec lesquels il entretient des relations économiques et financières étroites. La
directive impose par conséquent des exigences minimales en terme de capital initial et de
fonds propres permanents (a) ainsi qu’en matière de limitations des placements (b). Ces
exigences diffèrent substantiellement de celles qui s’appliquent aux banques. La Commission
justifie ces différences, estimant qu’il « est d’une part essentiel de fixer une exigence de
capital initial qui ne décourage pas les nouvelles entrées sur le marché et qui reflète les
risques relatifs encourus ; d’autre part, il importe de limiter l’exigence de fonds propre à un
niveau qui n’affecte pas la rentabilité. L’application de seuils plus bas aux institutions de
monnaie électronique est compensée par l’imposition de limites strictes sur le portefeuille de
placements »386.

383
MATHIAS G. et MENAIS A., op.cit., p.6.
384
Ibid.
385
En ce sens, European Central Bank, Report on electronic money, op. cit., p.19 ; la banque centrale déclarant
que « a redeemability requirement for electronic money would guarantee that central banks continue to issue the
final settlement medium in the interbank market ».
386
Exposé des motifs de la directive, p.6.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les147
établissements bancaires et financiers

a. Exigences en matière de capital et de fonds propres permanents

295. Conditions. Aux termes de l’article 4 de la directive, les établissements de monnaie


électronique doivent avoir un capital initial et des fonds propres qui ne descendent pas en deçà
du seuil d’un million d’euros. Par ailleurs, « les fonds propres des établissements de monnaie
électronique doivent à tout moment être égaux ou supérieurs à 2% du plus élevé des deux
montants suivants : le montant courant ou le montant moyen, au cours des six mois qui
précèdent, du total des engagements financiers liés à la monnaie électronique en
circulation »387. Cette deuxième exigence vise principalement à ajuster la première condition
dans l’hypothèse où le montant total de la monnaie électronique en circulation devait devenir
considérable.

b. Limitation des placements

296. Obligations. La directive édicte également une série de contraintes liées aux placements que
les établissements de monnaie électronique peuvent effectuer388. Il leur est ainsi exigé qu’ils
opèrent des placements d’un montant au moins égal à leurs engagements financiers liés à la
monnaie électronique. A l’obligation de placement s’ajoute une limitation dans la liberté du
choix des placements envisagés. Les actifs qui font l’objet de placements sont limitativement
énumérés par la directive. Il s’agit essentiellement de dépôts à vue auprès des établissements
de crédit de la zone A au sens de la directive 2000/12/CE389, des actifs répondant à un ratio de
solvabilité au sens de l’article 43 de la directive précitée, ainsi que des titres de créance
répondant à un certain nombre de conditions390.

D. Contrôle prudentiel

297. L’agrément. Les établissements de monnaie électronique sont soumis au contrôle prudentiel
des autorités nationales de leur pays d’origine et à leur agrément préalable. Cette exigence est
directement liée au principe de la libre prestation de service et au passeport européen.
387
Article 4.2 de la directive.
388
Article 5 de la directive.
389
Par Zone A, on entend tous les Etats membres et tous les autres pays membres à part entière de l’OCDE ainsi
que les pays qui ont conclu des accords spéciaux de prêt avec le FMI et dans le cadre des accords généraux
d’emprunt du FMI. Il est entendu que tout pays qui rééchelonne sa dette publique extérieure ne peut faire partie
de la zone A pendant une période de cinq ans (Art. 1 point 12 de la directive 2000/12/CE du Parlement européen
et du conseil du 20 mars 2000 concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et son exercice.
390
Ces conditions sont fixées à l’article 5.1 c) de la directive 2000/46 (« la directive »).
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les148
établissements bancaires et financiers

E. Libre prestation de services

298. Stimuler la concurrence. La directive applique dans son article 2 le concept de passeport
unique aux établissements de monnaie électronique pour les activités liées à l’émission de
monnaie électronique. Pour la Commission, il s’agissait par cet article de contribuer non
seulement à assurer la sécurité juridique, mais également de stimuler la concurrence et ainsi
de favoriser le développement des initiatives en la matière.

F. Exemptions

299. Le risque. La directive laisse aux Etats membres la possibilité d’exempter un établissement
de monnaie électronique de tout ou partie de ses obligations lorsque le montant total de ses
engagements financiers liés à la monnaie électronique n’excède pas « normalement cinq
millions d’euros et jamais 6 millions d’euros »391. D’autres exceptions existent lorsque la
monnaie électronique n’est acceptée comme moyen de paiement que par un nombre limité
d’entreprises392. Le maintien de l’exemption est conditionné par la fourniture d’un rapport
périodique de l’établissement concerné. L’idée d’exempter les entreprises dont les
engagements financiers sont limités a, à juste titre, été critiquée393. Cette exemption nous
semble en effet peu compatible avec la volonté de présenter au utilisateur un régime juridique
sans faille, destiné à développer sa confiance. Reste à espérer que peu d’Etats membres feront
usage de cette exception.

§2. Transposition de la directive

300. Un enthousiasme limité. L’article 10 de la directive impose sa transposition dans les ordres
nationaux pour le 27 avril 2002 au plus tard. A notre connaissance seuls le Luxembourg394, la
Suède, la Belgique et la France feraient à l’heure actuelle figure de bon élève. Le Luxembourg
a en effet transposé la directive par la loi du 14 mai 2002395. La Suède396 ainsi que la

391
Article 8 de la directive.
392
Article 8b et 8c.
393
CHUAT J., op.cit., p.184.
394
Pour un commentaire de cette loi au Luxembourg, v. OSSOLA C., La nouvelle loi luxembourgeoise sur les
établissements de monnaie électronique, disponible sur : http://www.droit-technologie.org, 9 juillet 2002.
395
Pour le Luxembourg, il s’agit de le loi du 14 mai 2002 portant transposition dans la loi modifiée du 5 avril
1993 relative au secteur financier, (1) de la directive 2000/28/CE modifiant la directive 2000/12/CE concernant
l’accès à l’activité des établissements de crédit et son exercice, et (2) de la directive 2000/46/CE concernant
l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance
prudentielle de ces établissements, Mémorial, 22 mai 2002, A - n° 51, p. 881, disponible sur :
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les149
établissements bancaires et financiers

Belgique397 firent de même. Le peu d’enthousiasme pour une implantation rapide de ce


nouveau cadre législatif s’explique sans doute par l’éclatement de la nouvelle économie et la
faillite consécutive de nombreuses sociétés qui proposaient de nouvelles méthodes de
paiement en ligne.

301. Cas français. L'article L. 511-1 du Code monétaire et financier énonce que les établissements
de crédit sont des personnes morales qui effectuent à titre de profession habituelle des
opérations de banque au sens de l'article L. 311-1. C'est le critère de leurs activités (désignées
sous le terme générique « d'opérations de banque ») qui définit selon la loi, les établissements
de crédit, c’est-à-dire la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que la
mise à la disposition de la clientèle ou la gestion de moyens de paiement. La France a intégré
les directives européennes en matière de monnaie électronique par un arrêté ministériel en
date du 10 janvier 2003398 complété par des instructions de la Commission bancaire399.
L’article 2 de l’arrêté précité présente deux types d'établissements, deux types de fonctions
qui peuvent être remplies par un établissement de crédit dans le domaine de la monnaie
électronique :
ƒ L'établissement émetteur est celui « débiteur de la créance incorporée dans l'instrument
électronique (…) »
ƒ L'établissement distributeur est « celui offrant à la clientèle un service de chargement,
de rechargement ou d'encaissement (…) ».
Tous les deux sont soumis au titre premier du règlement (dispositions générales relatives à la
monnaie électronique). S'ils limitent leur activité à l'émission, la mise à la disposition du
public ou la gestion de monnaie électronique, ces établissements sont qualifiés
« d'établissements de monnaie électronique » : ils sont alors soumis au titre deuxième (régime
prudentiel). Il faut raisonner a contrario et comprendre que s'ils ne limitent pas leurs activités

http://www.droittechnologie.org/legislations/luxembourg_loi_140502_etablissements_monnaie_electronique.pdf
396
Pour la Suède, il s’agit de l’ « Electronic Money Publishing Act » (SFS 2002 :149), le résumé de cette loi
transposant fidèlement la directive est disponible sur le site du cabinet d’avocats Bird & Bird :
http://www.twobirds.com/NewsAndPublications/BooksAndArticles/article.cfm?objectid=AC7DFB37-D4D9-
11D6-838800D0B740A4E7&language=en.
397
Pour la Belgique, il s’agit de la loi du 25 février 2003, loi modifiant la loi du 22 mars 1993 relative au statut et
au contrôle des établissements de crédits et transposant la directive 2000/28/CE.
398
Arrêté du 10 janvier 2003 portant homologation du règlement n° 2002-13 du Comité de la réglementation
bancaire et financière N° 2002-13 relatif à la monnaie électronique et aux établissements de monnaie
électronique, JO, 1er février 2003, p. 2003. V. aussi, La transposition de la directive relative à la monnaie
électronique et aux établissements de monnaie électronique, Bulletin de la Commission bancaire, avril 2003, n°
28, p. 23 et s.
399
Monnaie électronique et établissements de monnaie électronique. Présentation des instructions n° 2004-02,
2004-03, 2004-04 et 2004-05. Bulletin de la Commission bancaire, novembre 2004, n° 31, p.7.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les150
établissements bancaires et financiers

de la sorte, ces établissements seront assujettis au corpus juridique complet des établissements
de crédit.

302. Définition. Au terme du règlement, la monnaie électronique est composée d'unités de valeur.
Selon l'article L. 311-3 du Code monétaire et financier chaque unité constitue un titre de
créance incorporé dans un instrument électronique et accepté comme moyen de paiement par
des tiers autres que l'émetteur. La définition de la monnaie électronique est donc la plus large
possible et inclut les unités de valeur stockées aussi bien sur un support de monnaie
électronique physique sous forme de carte à puce (porte-monnaie électronique)400 que virtuel
sur une mémoire d’ordinateur (porte-monnaie virtuel).La monnaie électronique est émise
contre la remise de fonds et ne peut avoir une valeur supérieure à celle des fonds reçus en
contrepartie.

303. Clauses minimales. Conformément à l’article 3 du texte, la remboursabilité implique que le


porteur de monnaie électronique peut, pendant la période de validité, exiger de l'émetteur qu'il
le rembourse à la valeur nominale en pièces et en billets de banque, ou par virement à un
compte sans autres frais que ceux qui sont strictement nécessaires à la réalisation de
l'opération. Le règlement précise les clauses obligatoires qui doivent figurer dans le contrat
liant l’établissement émetteur au porteur, en particulier les modalités de remboursement des
unités de monnaie électronique non utilisées. Le contrat peut organiser les modalités de
remboursement et prévoir un montant minimal pour le remboursement, qui ne peut être
supérieur à 10 €. De même, il doit établir clairement les conditions de remboursement lequel
sera effectué en espèces ou sur un compte selon le souhait du client ; au-delà de 30 € s’impose
l'identification du porteur.

304. La traçabilité. L’article 6 de l’arrêté introduit le principe de selon lequel l'établissement


émetteur doit assurer la traçabilité pendant deux ans des chargements et des encaissements des
unités de monnaie électronique et veiller à disposer de moyens lui permettant d'assurer, en cas
d'atteintes à la sécurité de tout ou partie du système, la traçabilité des transactions suspectes.
De plus, l’arrêté impose aux établissements distributeurs d’apporter leur concours à
l'établissement émetteur afin d’assurer efficacement cette tâche.

400
Le célèbre moteur de recherche Google serait le point d’offrir son propre moyen de paiement. V. LONG S.,
Google planche sur un porte-monnaie électronique, 22 juin 2005, disponible sur : www.01net.com .
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les151
établissements bancaires et financiers

305. Le contrôle interne. Les articles 7 et 8 du règlement précisent et adaptent au cas particulier
de la monnaie électronique les dispositions en matière de contrôle interne et de lutte anti-
blanchiment applicables aux établissements de crédit. Le système de contrôle interne doit être
adapté au cas d’espèce et comporter un programme spécifique de vérification des diligences
définies en matière de monnaie électronique portant, en particulier, sur l’identification de la
clientèle et les caractéristiques techniques. De même, l’article 50 de la loi relative à la sécurité
financière en date du 1er août 2003 étend l’application aux émetteurs de moyens de paiement
dispensés d'agrément des obligations relatives à la lutte contre le blanchiment. Ainsi, l'article
L. 562-1 du code monétaire et financier, qui énumère les personnes soumises à l'obligation de
déclaration de sommes ou d'opérations soupçonnées d'être d'origine illicite, est complété afin
de soumettre à ses exigences les entreprises émettrices de moyens de paiement électronique
ou non, bénéficiant de la dispense d'agrément en application des nouvelles dispositions du 1°
de cet article.

306. Limites. Le titre deuxième de l’arrêté relatif aux régime prudentiel des établissements de
monnaie électronique précise qu’ils sont en partie dispensés du respect des instruments
techniques de surveillance prudentielle applicables aux établissements de crédit, mais qu’ils
ne sont pas libres pour autant de fonctionner à leur guise. En effet, pour être qualifiés
d'établissement de monnaie électronique, ils doivent restreindre leurs activités commerciales.
De même, ils supportent des contraintes quant à leur mode de fonctionnement afin de limiter
autant que faire se peut les risques d'insolvabilité.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les152
établissements bancaires et financiers

CONCLUSION

307. Le traditionnel dématérialisé. Dans le contexte actuel de foisonnement des initiatives en


matière d’instrument de paiement sur l’Internet, la monnaie électronique, par les enjeux
qu’elle induit, a plus particulièrement retenu notre attention. Elle n’est pas une nouvelle forme
de monnaie mais seulement un nouveau moyen de paiement. Les autres procédés développés
reposent pour la plupart sur les concepts traditionnels (compte bancaire). On peut ainsi en
conclure qu’ils sont davantage des « instruments-procédés techniques »401. Malgré les efforts
législatifs et techniques, ces nouvelles méthodes ne sont pas suffisamment autonomes pour
relever d’un droit spécifique de l’Internet.

308. Un moyen supplémentaire. Le nouveau régime juridique applicable aux émetteurs de


monnaie électronique, destiné principalement à supprimer les entraves à la libre prestation de
cette nouvelle activité financière sur le territoire européen, a pour conséquence de conférer
une place de choix à la monnaie électronique dans l’univers des paiements via l’Internet.
Cette réglementation est en réalité un moyen additionnel mis en place par le législateur
communautaire pour parvenir à l’objectif principal de bon fonctionnement du marché.

309. Bilan. On pourrait affirmer que la directive répond aux objectifs qu’elle s’était fixés. Le
régime juridique instauré apparaît cohérent et contribue adéquatement à éviter le
développement sauvage d’émetteurs de monnaie électronique n’offrant aucune garantie.
L’utilisateur se voit donc rassuré d’avoir face à lui des entreprises sérieuses et solvables. Les
Etats membres, dans le but de proposer de façon uniforme des instruments de paiement virtuel
sûrs et donc de contribuer au développement de ce nouveau produit à la disposition des
établissements bancaires et financiers, auront sans nul doute à cœur de transposer
prochainement la directive, même si la question de l’émission de nouvelles formes de
monnaie électronique apparaît moins urgente.

310. Problème restant. Le paiement via l’Internet, s’il n’est globalement pas plus risqué qu’un
paiement traditionnel, ne fait pas l’unanimité auprès des clients potentiels du marché de
l’Internet. Pourtant, les efforts communautaires, voire nationaux, sont indéniables pour créer
un cadre juridique favorable et sécuriser les transactions. Il faut peut être alors rechercher

401
Selon la terminologie de BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°428 in fine, p 285.
1ère Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les153
établissements bancaires et financiers

dans ce constat des origines plus psychologiques et notamment la peur inhérente à la


nouveauté et à la diversité des offres ; c’est pourquoi, il est probable qu’il faille laisser le
temps agir pour familiariser l’utilisateur ou l’investisseur avec ces nouvelles techniques et
renforcer la communication afin de gagner leur confiance. De ce point de vue, l’Internet est au
service des opérations bancaires et financières dans la mesure où il entraîne l’émergence de
nouvelles techniques de paiement et est censé faciliter, de même que multiplier les échanges ;
aujourd’hui néanmoins, ce rêve reste du domaine du possible.

311. La 3ème condition. Après avoir créé un cadre juridique garantissant la libre circulation des
services sur l’Internet et répondu aux besoins de sécurité concernant le paiement en ligne, il
convient, dans le but d’assurer le bon fonctionnement du marché et d’attirer tant les
prestataires que les investisseurs, d’assurer la transparence sur la question du règlement des
litiges [internationaux] en matière d’opérations bancaires et financières. En effet, la réduction
des distances par l’Internet ne fait pas oublier le caractère international (c’est bien l’objectif
des établissements de crédit) des relations commerciales ; et, sans moyens juridiques de
recours, tout le système mis en place est susceptible de s’effondrer faute de sanction et
d’exécution forcée. La question se pose alors de savoir sur quelles bases et avec quels moyens
ces litiges peuvent être résolus.
TITRE 3

LA RESOLUTION DES LITIGES


INTERNATIONAUX RELATIFS AUX
OPERATIONS BANCAIRES ET
FINANCIERES SUR L’INTERNET

312. Le caractère transnational. Par essence, l’Internet met régulièrement en relation des parties
localisées dans des Etats différents, membres ou non de l’Union Européenne. On se trouve en
effet dans un environnement essentiellement international qui ignore les frontières. Sur
l’Internet, chaque message publicitaire, chaque offre commerciale est accessible par
n’importe quel internaute, où qu’il se trouve dans le monde. Si ces offres débouchent sur la
conclusion de contrats en ligne, l’on peut se trouver face à une multitude de lois applicables,
qui peuvent, le cas échéant, avoir des contenus divergents voire contradictoires. En matière
financière, certains opérateurs essayent parfois d’exploiter ces divergences pour apparaître à
l’égard de l’investisseur comme plus attrayant d’un point de vue commercial.

313. Le litige. Dans une optique de bon fonctionnement du marché, on ne peut concevoir un
système juridique réglementé sans prévoir les conditions pour en assurer le respect, c’est-à-
dire le règlement des conflits. Une multitude de litiges est susceptible de naître en matière
d’Internet, et pour attirer tant les investisseurs que les prestataires, un système de règlement
des conflits doit exister afin de rassurer ces acteurs. Ainsi, lorsqu’un litige relatif à une
transaction financière conclue par le biais de l’Internet vient à naître, il convient de résoudre
les conflits de juridictions et de lois applicables qui peuvent en résulter. Le droit international
privé a pour vocation d’apporter des solutions à ces difficultés. L'élément d'extranéité présent
dans la plupart des contrats électroniques, impose toujours le recours aux règles du droit
international privé, plus particulièrement à celles conçues pour les contrats « papiers »
internationaux.

314. Problématique. L’absence de règles particulières soumet de facto les litiges internationaux
relatifs aux opérations bancaires et financières sur l’Internet aux règles classiques du Droit
1ère Partie : Titre 3 – La résolution des litiges internationaux relatifs aux opérations bancaires et financières155
sur l’Internet

International Privé (DIP). Se pose alors la question de l’adaptation de ces dispositions


traditionnelles à la nouvelle réalité numérique. L’Internet peut-il valablement être soumis à
ces lois, ou bien est-il préférable de développer d’autres modes de règlement des différends
(les MARD) ? Dès lors, la dématérialisation des échanges et le caractère international des
réseaux ont rendu nécessaire un ajustement des règles classiques du DIP pour répondre aux
particularités du contrat électronique.

315. Plan. En premier lieu, la question, classique, de la détermination de la juridiction compétente


et de la loi applicable se pose naturellement avec l’Internet (chapitre 1). D’abord, la question
de la détermination du juge compétent devant lequel le litige devra être porté se pose. En
effet, la dimension tant nationale qu’internationale du réseau implique que la localisation de la
juridiction compétente sera généralement en cause. Ce sont donc des problèmes liés à la
compétence territoriale qu’il faudra résoudre. Ensuite, le caractère international du réseau
conduit à la deuxième question, celle de la loi applicable au litige né entre les parties. En fait,
le développement du commerce électronique est freiné par la suspicion dont ce dernier est
entouré. Ce manque de confiance envers un éventuel contrat international peut avoir comme
origine l’élément «risque» qui y réside, mais se trouve d'autant plus accentué que ce dernier
est conclu via l’Internet. La relation de confiance, pourtant si essentielle au bon
fonctionnement du marché, n’est envisageable en l’espèce que dans les cas où chacune des
parties peut s’appuyer sur des législations internationales sûres. En second lieu, partant de la
constatation selon laquelle la mise en œuvre des modes traditionnels de traitement judiciaire
des contestations présente de nombreuses incertitudes, il convient de présenter et de montrer
l’utilité de recourir à des modes alternatifs de règlement des litiges. Ceux-ci se présentent
véritablement comme une alternative et une solution efficaces pour les litiges relatifs à des
transactions financières conclues via l’Internet. Par ailleurs, il apparaît qu’ils font l’objet
d’une attention particulière, tant du marché que du législateur européen qui entend
promouvoir leur utilisation (chapitre 2).
CHAPITRE 1er
JUGE COMPETENT ET LOI APPLICABLE EN MATIERE
D’OPERATIONS BANCAIRES ET FINANCIERES SUR L’INTERNET

316. Les litiges internationaux. La naissance de litiges est inévitable dans les échanges
commerciaux. Dans le contexte particulier de l’Internet, vu sa vocation globalisante, ces
différends seront pour la plupart internationaux en ce qu’ils présenteront quasi
systématiquement un élément d’extranéité. La reconnaissance d’un droit et, par-là, l’efficacité
d’un système juridique passe par son aptitude à se faire respecter d’une part, mais aussi à être
prévisible. Cet objectif participe du principe de sécurité juridique indispensable au bon
déroulement des transactions bancaires et financières.

317. Droit applicable et problématique. Les règles applicables aux litiges internationaux ont une
portée qui dépasse l’activité bancaire402 de même que le canal de l’Internet. En effet, dans le
cadre d’un litige transnational, les conflits de juridictions, sont traditionnellement soumis à la
convention de Bruxelles aujourd’hui communautarisée dans le Règlement de 2000. En
revanche, les conflits de lois, relèvent classiquement de la convention de Rome de 1980.
Comme le souligne le Professeur T. BONNEAU : « l’internationalisation de l’activité
bancaire se traduit rarement par de nouvelles règles applicables aux opérations
bancaires »403. Cette affirmation est particulièrement vérifiée avec l’Internet, qui est
indéniablement un outil favorisant l’internationalisation des activités bancaires (paiements
transnationaux), en matière de règlement des conflits internationaux. La question est donc de
savoir si, à défaut d’être les mêmes, ces règles sont réellement adaptées aux litiges issus
d’opérations bancaires réalisées via l’Internet.

318. Le bon fonctionnement du marché. L’objectif des institutions communautaires, clairement


affiché, vise à développer – sur le plan économique – le marché de l’Internet ; de leur côté, les
prestataires bancaires et financiers souhaitent profiter de cette opportunité. Néanmoins, la
confiance des investisseurs doit aussi être recherchée dans le cadre d’un commerce orienté de
professionnel à consommateur. De ce point de vue, la détermination de la juridiction
compétente pour connaître des litiges relatifs aux opérations bancaires et financières
402
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°14, p 14.
403
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°36, p 30.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 157
financières sur l’Internet

(section 1ère) et celle de la loi applicable à ces litiges (section 2), c’est-à-dire finalement le
système juridique de règlement international des conflits, apparaît comme un véritable outil
voué à l’objectif de bon fonctionnement du marché, nécessaire à rassurer tant les investisseurs
que les prestataires.

Section 1ère. La juridiction compétente pour trancher les conflits relatifs aux
opérations bancaires et financières sur l’Internet

319. Distinction. En matière de conflit de juridictions, les solutions apportées par le législateur tant
européen que national diffèrent généralement suivant que le litige est né durant la période qui
précède la conclusion du contrat – appelée période précontractuelle – ou qu’il est né en cours
d’exécution du contrat, et donc après la conclusion de ce dernier. Ainsi, en matière bancaire et
financière, il convient systématiquement de vérifier si le litige trouve sa cause avant ou après
la conclusion de la transaction. Dans le premier cas, le litige relève de la matière délictuelle
(§1), dans le second il relève de la matière contractuelle (§2).

§1. En matière délictuelle

320. Types de litiges. On peut légitimement se demander quels types de litiges à caractère
bancaire ou financier peuvent naître durant la phase précontractuelle, et relever ainsi des
règles applicables en matière délictuelle. En réalité, ceux-ci peuvent être nombreux,
notamment parce que le Code monétaire et financier ainsi que le Code de la consommation
réglementent largement la période préalable à la conclusion du contrat et que ces règles ne
sont pas toujours respectées. On peut citer comme exemple les dispositions relatives au droit
au compte, à la communication des tarifs, à l’information des clients404 ou bien encore les
règles concernant le démarchage405 de même, le code de la consommation trouve à
s’appliquer soit directement, soit par référence au code monétaire et financier : sur la
conclusion des contrat et l’information des consommateurs406. Enfin, les règles du Code civil
relatives à la formation du contrat 407 ont également vocation à intervenir. A titre d’illustration,
deux exemples précis peuvent être examinés : la réglementation de la publicité et celle du

404
Articles L. 312-1-1 et L. 312-1-2 du Code monétaire et financier
405
Article L. 341-1 et suivants du Code monétaire et financier
406
Article L121-21 et L113-3 du Code de la consommation renvoyant à l’article L.518-1 du Code monétaire et
financier
407
Article 1108 et suivants du code civil.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 158
financières sur l’Internet

démarchage des produits financiers. L’harmonisation européenne des règles applicables en


matière financière dans la période précontractuelle a elle-même été jugée importante dans la
mesure où est intervenue la directive 2002/65/CE du 23 septembre 2002 relative à la
commercialisation de services financiers auprès des consommateurs408. Sans aller plus loin, il
est effectivement primordial pour la construction d’un marché commun des services
financiers qu’un socle de base – minimum – soit fixé.

321. La publicité. Au regard du droit commun, la publicité peut être définie comme « toute forme
de communication faite dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale ou
libérale dans le but de promouvoir la fourniture de biens et de services, y compris les biens
immeubles, les droits et les obligations »409. La nouvelle terminologie européenne utilise le
terme « communication commerciale », qui s’entend comme « toute forme de communication
destinée à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services, ou l’image
d’une entreprise, d’une organisation ou d’une personne ayant une activité commerciale,
industrielle, artisanale ou exerçant une profession réglementée »410. On le voit, ces définitions
sont suffisamment larges pour englober toutes les formes de publicité, y compris celles
effectuées sur l’Internet411. Il en résulte que les nombreuses dispositions du droit commun qui
réglementent la publicité (principe d’identification, de transparence et de loyauté,
d’interdiction de la publicité trompeuse, etc.) s’appliquent également à l’activité publicitaire
sur l’Internet, que celle-ci se rapporte à un produit financier ou non.

322. Spécificités. En outre, le droit financier prévoit des dispositions spécifiques applicables à la
publicité des produits financiers en vue soit de la surveiller étroitement, soit de l’interdire. A
titre d’exemple, la loi française interdit que les fonds communs d’intervention sur les marchés
à terme fassent l’objet d’une présentation par voie de publicité en vue d’inciter à la
souscription de leurs parts412. Que se passe-t-il si un pays étranger ne prévoit pas de telles

408
Cf. infra n° 621 et s. pour la protection des consommateurs.
409
Directive CEE n° 84-450 du 10 septembre 1984 sur la publicité trompeuse.
410
Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects
juridiques de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur
(« directive sur le commerce électronique »).
411
En ce sens, Lamy droit de l’informatique et des réseaux, Guide, éd. 2001, p. 1403, n° 2489 ; GOBERT D., La
publicité sur Internet – Le droit en (r)évolution, Revue Ubiquité, décembre 2000, n° 7, pp. 71 à 90 ; ANTOINE
M., L’objet et le domaine de la directive sur le commerce électronique, in Le commerce électronique sur les
rails ? Analyse et propositions de mise en œuvre de la directive sur le commerce électronique, Cahiers du CRID,
n° 19, Bruxelles, Bruylant, 2001, pp. 20 et s.
412
Article L. 214-42 du Code monétaire et financier.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 159
financières sur l’Internet

contraintes, et qu’un prestataire établi dans celui-ci touche néanmoins l’investisseur français
par le biais d’une publicité faite sur l’Internet ?

323. Le démarchage. Concernant les opérations de démarchage, il n’est pas lieu de nous étendre
sur les définitions légales relatives au démarchage financier413. Indiquons simplement que ce
procédé consiste pour un opérateur à entrer en contact avec un tiers pour lui proposer une
opération financière. En raison de l’interprétation large que la jurisprudence a faite à propos
de la définition légale du démarchage, il ne fait aucun doute que les sollicitations par
l’Internet entrent dans le champ d’application de cette définition414. Etant donné le danger que
présente le démarchage financier pour les épargnants, le législateur français a été amené à
interdire certaines opérations de démarchage415 et à réglementer fortement les autres. Par
ailleurs, il détermine limitativement les personnes exclusivement autorisées à effectuer des
opérations de démarchage (il s’agit des établissements financiers au sens large du terme ayant
soit un statut spécial leur permettant d’accomplir des actes de démarchage, soit une
habilitation par une autorité de marché416).

324. Plan. Il est clair que ces différentes contraintes ou interdictions légales, dont certaines vont
varier d’un pays à l’autre, peuvent être génératrices de litiges si elles ne sont pas respectées.
Dans ce cadre, des actions en justice à caractère civil ou pénal sont envisageables en cas de
non respect de ces réglementations. Le cas échéant, il convient de déterminer le juge
compétent pour connaître du litige. Tant les textes européens (A) que nationaux (B) apportent
des éléments de réponse.

A. La réponse apportée par les textes européens

325. Le droit conventionnel. La convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, aujourd’hui


communautarisée par le Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000
concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière
civile et commerciale, complétée par celle de Lugano du 16 septembre 1988 – traitant de la
compétence internationale, de la reconnaissance et de l’exécution des jugements en Europe –
établit les règles concernant la compétence judiciaire et l’exécution des jugements en matière

413
Pour un commentaire approfondi, v. GRANIER T. et JAFFEUX C., Internet et Transactions Financières, Ed.
Economica, Paris, 2002, p. 130 et s. et cf. BONNEAU T., Démarchage et Internet infra n°139.
414
Ibid.
415
Article L. 341-10 du Code monétaire et financier.
416
Articles L. 341-3 et s du Code monétaire et financier.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 160
financières sur l’Internet

civile et commerciale417. Ces conventions s’appliquent pour autant que le défendeur ait son
domicile, s’il s’agit d’une personne physique, ou son siège social, s’il s’agit d’une personne
morale, dans l’Union européenne (Règlement (CE) n° 44/2001) ou dans un Etat de l’AELE418
(Convention de Lugano). La détermination du juge compétent est parfois difficile à mettre en
œuvre lorsqu’un litige est né par le biais de l’Internet. Le Règlement établit deux critères de
compétence : l’un général (a) l’autre spécial (b). Précisons d’emblée qu’en la matière est visée
toute demande mettant en jeu la responsabilité d’un défendeur et qui a pour objet de la
condamner à réparer les dommages directs causés à la victime par son acte ou son omission.

a. Critère général de compétence

326. Principe. L’article 2 du Règlement indique qu’il s’agit du domicile du défendeur : « les
personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat contractant sont attraites, quelle que soit
leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat ». L’application de ce critère amène à se
poser une question : lorsqu’une publicité interdite, par exemple, est diffusée via l’Internet,
comment déterminer l’identité et le domicile du défendeur ? D’une manière générale, la
réponse sera aisément apportée dans la mesure où les législations en matière financière ainsi
que les autorités de marché exigent une identification claire des acteurs. Ce principe
d’identification a été confirmé par la directive sur le « commerce électronique » dans son
article 5 prévoyant que le prestataire doit rendre possible un accès facile, direct et permanent,
pour les destinataires de service mais aussi pour les autorités compétentes, à diverses
informations telles le nom du prestataire de service, l’adresse géographique à laquelle il est
établi. Cette obligation de transparence devrait réduire le risque « d’anonymat » du défendeur.

327. Spécificité de l’Internet. Une seconde question se pose : les notions de domicile ou de siège
social sont-elles susceptibles d’englober le lieu de localisation du serveur sur lequel le
défendeur a hébergé le site contenant la publicité litigieuse ou à partir duquel il a envoyé des
courriers électroniques visant à démarcher des investisseurs potentiels ? Le Règlement ne
répond pas précisément à cette question et des interprétations en sens divers peuvent être
défendues. Il nous semble toutefois que l’article 2, c, de la directive sur le « commerce
électronique » apporte des éléments susceptibles de lever l’ambiguïté : le lieu d’établissement

417
Pour un commentaire approfondi de ces conventions, v. GAUDEMENT-TALLON H., Les conventions de
Bruxelles et Lugano, LGDJ, 1996.
418
Pour rappel, il s’agit de l’Association européenne de libre-échange (AELE). Créée en 1959 elle ne compte
plus que quatre pays : Islande Liechtenstein, Norvège, Suisse.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 161
financières sur l’Internet

du prestataire est l’endroit où un opérateur « exerce d’une manière effective une activité
économique au moyen d’une installation stable pour une durée indéterminée ». L’article
ajoute utilement que « la présence et l’utilisation des moyens technologiques requis pour
fournir le service ne constituent pas en tant que telles un établissement du prestataire ». En
supposant que cette définition puisse être étendue au Règlement, on en conclut que la
localisation d’un serveur Web ou de courrier électronique est insuffisante pour déterminer le
domicile ou le siège social du défendeur419, voire se substituer à lui !

b. Critère spécial de compétence

328. Le lieu du dommage. Le Règlement prévoit en outre un critère spécial d’attribution de


compétence lorsque l’on se trouve en matière délictuelle. En effet, selon son article 5, alinéa
3, le défendeur domicilié sur le territoire d’un Etat contractant peut être attrait, outre devant
les juridictions de cet Etat comme exposé ci-avant, devant « le tribunal du lieu où le fait
dommageable s’est produit ou risque de se produire »420. Selon la jurisprudence constante de
la Cour de Justice des Communautés, ce lieu vise à la fois le lieu de l’événement causal et le
lieu où le dommage est survenu421. De même, le texte permet désormais la mise en jeu
d’actions préventives. Il en résulte que si la victime d’un préjudice souhaite obtenir réparation
de celui-ci, elle a le choix entre porter l’affaire devant le tribunal du lieu d’établissement de
l’auteur du dommage ou devant celui où le dommage s’est produit ou risque de se produire.

329. Illustration. C’est à l’occasion de l’affaire Payline422 que pour la première fois, un jugement
français avait affirmé la compétence des tribunaux français pour connaître d'un litige dans
lequel une société française reproche une violation de sa marque à une société étrangère423. Le
juge estime que424 : « … selon l’article 5-3° de la Convention de Bruxelles, en matière
délictuelle, le demandeur doit saisir le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ;
que cette expression doit s’entendre en ce sens qu’elle vise à la fois le lieu où le dommage est

419
En ce sens, VERBIEST T. et WERY E., Le droit de l’Internet et de la société de l’information – Droits
européen, belge et français, Larcier, Bruxelles, 2001, p. 473.
420
Précisons toutefois que la compétence de l’article 5 ne s’impose pas au demandeur, qui conserve le droit
d’assigner le défendeur devant un tribunal sur le territoire de son domicile.
421
CJCE, 30 novembre 1976, Rec. 1976, p. 1735.
422
V. pour un commentaire de cette affaire, DIETRICH Y., Commentaires sur l’affaire Payline, juillet 1998,
disponible sur : http://www.juriscom.net/pro/1/ndm19980701.htm.
423
WERY E., Compétence des juridictions nationales en matière d’Internet – France, 10 août 1998, disponible
sur : http://www.droit-technologie.org/1_2.asp?actu_id=104.
424
TGI Nanterre, référé, 13 octobre 1997, affaire société SG2 c/ Brokat Informations Systeme GmbH
(Allemagne).
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 162
financières sur l’Internet

survenu, et le lieu de l'événement causal ; qu’il en résulte que le défendeur peut être attrait
devant le tribunal du lieu où le dommage est survenu ou du lieu de l'événement à l’origine du
dommage; (…) Que la diffusion d’Internet étant par nature mondiale et accessible en France,
le dommage a lieu sur le territoire français (…) ».

330. Précision. Toutefois, la Cour de Justice a été amenée à préciser dans une affaire de
diffamation internationale par voie de presse que seul le premier tribunal est compétent pour
imposer la réparation de l’intégralité des dommages résultant de la diffamation. Par contre, si
le préjudice a été subi sur plusieurs territoires et que le second critère d’attribution de
compétence est adopté, il convient de porter l’affaire devant la juridiction de chaque Etat dans
lequel la publication litigieuse a été diffusée et où la victime prétend avoir subi un dommage,
étant entendu que ces juridictions ne sont compétentes que pour la portion du dommage subi
sur le territoire dont ces dernières relèvent425.

331. Conséquence. Si une telle interprétation devait également être retenue pour des litiges en
matière bancaire et financière, on comprend que cela risque de réduire considérablement
l’intérêt pratique du choix du second critère. Imaginons en effet la diffusion sur l’Internet à
partir de la Suède de fausses informations à propos d’une société française cotée en bourse,
ayant pour effet de nuire immédiatement à réputation sur plusieurs places financières.
L’application stricte de la jurisprudence de la Cour de Justice signifie que si la société
française souhaite obtenir aisément réparation intégrale de son préjudice, elle n’aura d’autre
choix que de porter le conflit devant une juridiction suédoise ou … devant les juridictions sur
les territoires desquels la fausse information a été diffusée et donc sur lesquels elle estime
avoir subi une atteinte à sa réputation. Le problème réside dans le fait que lorsqu’un dommage
est causé par un média, ce dommage est ressenti, selon la vision de la Cour de Justice, dans
toute la zone de diffusion de l’information litigieuse, et pas uniquement au seul lieu d’édition
ou d’émission ou encore du siège social de la société préjudiciée. Avec l’Internet, cette zone
de diffusion devient mondiale…Or, en réalité, l’intégralité de son préjudice a été subi en
France, lieu de sa résidence fiscale et du siège de ses affaires, et c’est plutôt devant une
juridiction française que la société devrait pouvoir introduire son recours.

425
CJCE, 7 mars 1995, ( C 68/93), Rec. 1995, p. 1415.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 163
financières sur l’Internet

332. Bilan. L’application des principes juridiques à la réalité de l’Internet n’est pas toujours facile.
Le nouveau règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, qui remplace les
Conventions de 1969 et de 1988 en les « communitarisant »426 constitue la première pierre de
l’édifice d’un droit communautaire judiciaire et est entré en vigueur au 1er mars 2002 pour
tous les Etats membres de l’Union européenne, à l’exception du Danemark qui a décidé de ne
pas souscrire à cette réglementation427. Ce nouveau texte couvre tous les domaines du droit
civil et commercial, mis à part quelques exceptions (état et capacité des personnes, régimes
matrimoniaux, successions, faillites, sécurité sociale et arbitrage).

333. Le bon fonctionnement du marché. Ce règlement s’est fixé comme objectif « de maintenir
et de développer un espace de liberté, de sécurité et de justice au sein duquel la libre
circulation des personnes est assurée ». Pour cela « il convient que la Communauté adopte,
entre autres, les mesures dans le domaine de la coopération judiciaire en matière civile qui
sont nécessaires au bon fonctionnement du marché intérieur » (préambule, point 1). En effet,
ce règlement prévoit que le défendeur pourra être attrait devant le tribunal du lieu où le fait
dommageable s’est produit « ou risque de se produire ». Il est difficile à ce stade de
déterminer la portée et les conséquences que ces quelques mots auront sur les délits civils
commis par le truchement de l’Internet. On peut toutefois s’attendre à un éclatement de la
compétence juridictionnelle. Quoi qu’il en soit, le législateur national apporte lui aussi des
réponses à ce type de conflit de juridictions ; celles-ci sont d’ailleurs très proches de celles du
législateur européen.

B. La réponse apportée par le législateur français

334. Textes et convergence des législations. En droit français, la compétence territoriale des
juridictions est régie par les articles 42 à 48 du nouveau code de procédure civile (NCPC). A
l’instar du Règlement, l’article 42 du NCPC pose le principe général de compétence de la
juridiction du lieu de résidence du défendeur. En matière délictuelle, l’article 46 du NCPC
précise que le demandeur peut également saisir, à son choix, la juridiction du lieu du fait
dommageable ou celle dans le ressort duquel le dommage a été subi. Cet article 46 rejoint

426
PANSIER F.-J., Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions en matière civile et
commerciale : un Règlement du 22 décembre 2000 remplace la Convention de Bruxelles, LPA, 29 janvier 2001,
n° 20, p.5
427
LOUSKI R., Compétence judiciaire pour l’e-commerce : le nouveau Règlement européen est adopté et publié,
disponible sur : http://www.droit-technologie.org/1_2.asp?actu_id=380, 19 janvier 2001.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 164
financières sur l’Internet

donc la solution proposée par l’article 5, alinéa 3, du Règlement et l’interprétation extensive


qu’en a faite la Cour de Justice. Il convient d’ajouter que cette option de compétence
consacrée par une disposition de droit français peut aussi être mise en œuvre dans un conflit
dont l’une au moins des parties n’a pas la nationalité française428. Dès lors, on en conclut que
ces règles sont transposables à l’échelle internationale429.

335. Illustration. La jurisprudence française a déjà eu l’occasion à plusieurs reprises de mettre en


œuvre cette option issue de l’article 46 du NCPC dans des affaires mettant en jeu la
responsabilité délictuelle sur l’Internet430, considérant ainsi que le juge compétent était celui
du territoire sur lequel le dommage a été subi. Dans la célèbre affaire Yahoo ! Inc. relative à
la mise en vente aux enchères d’objets nazis, qui a donné lieu à trois ordonnances du tribunal
de grande instance de Paris431, la même solution a été retenue. La société Yahoo ! Inc. souleva
bien évidemment une exception d’incompétence, mais celle-ci fut rejetée par le tribunal au
motif qu’en « permettant la visualisation en France de ces objets et la participation
éventuelle d’un internaute installé en France à une telle exposition vente, Yahoo ! Inc.
commet donc une faute sur le territoire français, faute dont le caractère non intentionnel est
avéré mais qui est à l’origine d’un dommage tant pour la LICRA que pour l’Union des
étudiants Juifs de France … ». Le tribunal en conclut que « le dommage étant subi en France,
notre juridiction est donc compétente pour connaître du présent litige en application de
l’article 46 du NCPC ». Cette solution fut confirmée dans sa dernière ordonnance du 20
novembre 2000.

336. En matière bancaire et financière. Il ne fait pas de doute que dans le cadre d’un litige à
caractère bancaire et financier, un juge pourrait se déclarer compétent en vertu de l’article 46
du nouveau code de procédure civile à l’occasion d’un préjudice subi suite à une publicité
interdite – ou non conforme à la loi – ou à un démarchage de produits financiers par
l’Internet. Un arrêt de la Cour de cassation du 25 octobre 1995432, dans une affaire non
financière certes, a reconnu la compétence d’un juge dans le ressort duquel avait été diffusée
une publicité illicite, et cela sans s’inquiéter de ce que le fait dommageable se soit également

428
GRANIER T. et JAFFEUX C., op.cit., p. 157.
429
CADIET L., Droit judiciaire privé, Litec, 1998, p. 238.
430
V. par exemple CA Paris, 1er mars 2000, D. 2000, inf. rap., p. 104 ; Cass. com., 7 mars 2000, Expertises, oct.
2000, p. 316. V. aussi STAUB S., Responsabilité délictuelle via internet et compétence, Expertises, octobre
2000, p. 307 et s.
431
TGI Paris, 22 mai, 11 août et 20 novembre 2000, D., inf. rap., p. 172.
432
Cass. civ., 25 octobre 1995, JCP G, IV, 2622.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 165
financières sur l’Internet

produit dans le ressort d’autres tribunaux. Il n’ y a aucune raison que cette solution ne soit pas
reprise pour une publicité ou un démarchage illicite de produits financiers sur l’Internet.

337. Sanctions spécifiques. L’hypothèse abordée ci-avant vise la détermination de la juridiction


compétente pour les litiges en matière civile. Il faut en outre préciser que le non-respect des
dispositions légales en matière financière peut faire l’objet de sanctions pénales. A titre
d’exemple, rappelons que le démarchage des valeurs mobilières se voit largement réglementé
et même parfois interdit. Si un opérateur venait néanmoins à procéder à un démarchage en
outrepassant ces réglementations ou interdictions, il est passible des sanctions pénales prévues
par les articles L. 353-3, 4 et 5 du Code monétaire et financier. Ainsi on peut se demander si
un opérateur étranger pourrait se voir assigner devant une juridiction française, alors que le
serveur contenant la page Web incriminée ou envoyant un courrier électronique en vue de
démarcher un investisseur français est localisé à l’étranger. La réponse à cette question ne
pose pas de difficultés dans la mesure où les règles de compétence en matière pénale sont
limpides. En effet, l’article 113-2 du Code pénal français édicte que la loi pénale française
s’applique à toute infraction commise sur le territoire français, tout en précisant que
l’infraction est réputée commise sur ce territoire dès lors qu’un des faits constitutifs y est
intervenu.

338. Illustration. Dans une affaire de presse, le Tribunal de grande instance de Paris433, en réponse
au prévenu qui déclinait la compétence des juridictions françaises au motif que le site litigieux
est américain, a estimé que « selon l'article 113-2 (2ème alinéa) du code pénal, une infraction
est réputée commise sur le territoire de la République dès lors qu'un de ses faits constitutifs a
eu lieu sur ce territoire. En matière de presse, il est constant que le délit est réputé commis
partout où l'écrit a été diffusé, l'émission entendue ou vue. En l'espèce, dès lors que le texte
incriminé, diffusé depuis un site étranger, a été reçu et vu dans le ressort territorial du
Tribunal de Paris, ainsi qu'il ressort de l'enquête, celui-ci est compétent pour connaître de la
poursuite. L'exception d'incompétence sera rejetée ».

339. Bilan. On déduit de cette disposition une compétence large du juge français. Ainsi, tout
démarchage interdit, réalisé par le truchement de l’Internet et susceptible d’être effectué
auprès d’investisseurs français, peut être poursuivi pénalement devant une juridiction

433
TGI Paris, 13 novembre 1998 (affaire Faurisson).
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 166
financières sur l’Internet

française. Plus spécifiquement, il en sera ainsi si le courrier électronique de démarchage est


envoyé à des adresses de courrier électronique d’investisseurs français ou si la page Web de
démarchage est accessible en France et, en outre, rédigée en français. Dans ces cas, on peut
considérer qu’un des faits constitutifs de l’infraction est intervenu sur le territoire de la
République. L’opérateur étranger, quant à lui, ne pourra, pas récuser la compétence de la
juridiction française au motif qu’il n’aurait pas son siège social en France, ou que son serveur
Web ou de courrier électronique ne serait pas localisé sur le territoire français434.

340. Perspectives. Les règles traditionnelles de compétence juridictionnelle en matière délictuelle


s’articulent donc autour de ces principes. On constate néanmoins que les difficultés liées aux
publicités ou offres de transactions sur le réseau des réseaux ne sont pas encore surmontées de
manière claire435. Selon certains auteurs, certaines de ces difficultés restent même à
découvrir436. Par ailleurs, rappelons qu’en matière financière, il faut ajouter à la compétence
des juridictions classiques la compétence éventuelle des autorités de régulation, qui ont non
seulement des attributions administratives et réglementaires, mais aussi quasi juridictionnelles
en ce quelles peuvent sanctionner pécuniairement un opérateur économique dans certaines
circonstances. L’impact du phénomène de l’Internet sur la problématique du partage des
compétences n’a d’ailleurs pas échappé à ces autorités. Pour s’en convaincre, il suffit de
consulter la rubrique dédiée au « partage des compétences entre autorités pour les activités
transfrontières réalisées par le biais de l’Internet » que l’Organisation Internationale des
Commissions de Valeur a consacrée dans ses recommandations relatives aux activités
financières via l’Internet437. Ce texte prévoit notamment qu’une autorité régulatrice peut se
déclarer compétente et imposer ses règles à un émetteur de titres ou à un prestataire de
services d’investissement qui réaliserait une offre de l’étranger dont l’impact serait significatif
sur les investisseurs ou les marchés de sa zone d’intervention. Cela démontre la volonté de ces
autorités de ne pas laisser la possibilité aux opérateurs d’exploiter les zones de flou liées au
développement des activités financières sur l’Internet. Le principe de l’existence d’un système
de règlement des conflits de juridiction nationale est également vrai quel que soit l’Etat, qui a
ses règles propres, membre ou non de l’Union Européenne. Simplement, entre les Etats
membres, le Règlement communautaire trouvera à s’appliquer. Le principe de liberté
contractuelle permet en effet aux parties de recourir aux clauses attributives de juridiction,

434
En ce sens également, GRANIER T. et JAFFEUX C., op.cit., p. 159.
435
VIVANT M., Cybermonde : droit et droit des réseaux, JCP G, 1996, I, 3969, n° 12 à 14.
436
GRANIER T. et JAFFEUX C, op.cit., p. 130 et s.
437
Ces recommandations sont disponibles sur : http://www.iosco.org.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 167
financières sur l’Internet

voire à l’arbitrage pour trancher un litige. En l’absence de précisions contractuelles, certains


principes retrouveront leur force.

§. 2. En matière contractuelle

341. Distinction. Dès lors que l’opération bancaire est conclue, que ce soit par le biais de l’Internet
ou par un autre moyen, celle-ci prend un caractère contractuel. Terminologiquement,
l’expression d’opération bancaire vise principalement les contrats bancaires438. Le Professeur
T. BONNEAU remarque d’ailleurs que le flou relatif de cette notion a néanmoins « le mérite
de tenir compte de l’éventuelle complexité de la relation bancaire439 ». Tout conflit à caractère
international relatif à la conclusion ou à l’exécution d’une telle transaction bancaire et
financière sera alors soumis aux règles de compétence en matière contractuelle, distinctes des
règles applicables en matière délictuelle précédemment vues. Ces litiges peuvent être divers :
non paiement du prix, préjudice subi suite à la vente tardive d’un titre demandé par
l’investisseur, non respect des clauses contractuelles relatives à la responsabilité ou à la
preuve…

342. Diversité des règles. Les règles qui permettent de déterminer la juridiction compétente dans
un contrat électronique, relèvent de nombreuses dispositions qui se trouvent dans des textes
divers. La Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence
judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale a été, depuis sa mise
en vigueur, la référence incontournable en Europe pour la détermination de la juridiction
compétente dans les contrats internationaux. Cependant, le Règlement n°44/2001/CE du
Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et
l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, est appelé à devenir l’instrument
législatif le plus adapté pour la détermination de la compétence judiciaire pour le commerce
électronique.

343. Directive commerce électronique et plan. Le Règlement, entré en vigueur le 1er mars 2002,
remplace la Convention. Pourtant, la Directive 2000/31 sur le commerce électronique, dans
son article 1.4, souligne que «la présente n’établit pas des règles additionnelles de droit
international privé et ne traite pas de la compétence des juridictions» ; elle renvoie plutôt à

438
MATTOUT J.-P., Droit bancaire international, La revue banque éditeur, 2ème éd., 1996, n°8.
439
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°87, p 61.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 168
financières sur l’Internet

l’application des Conventions de Bruxelles et de Rome. Dans l'optique de la détermination de


la juridiction compétente, une distinction importante doit être faite entre l’hypothèse dans
laquelle le contrat entre les parties ne comporte pas de clause attributive de compétence (A) et
celle dans laquelle les parties ont convenu d’une telle clause de détermination du juge
compétent (B).

A. En l’absence d’une clause attributive de compétence

344. Critère du domicile. Indiquons que l’article 2 du Règlement consacrant le critère général de
compétence basé sur le domicile du défendeur est également d’application dans cette
hypothèse : « les personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat contractant sont attraites,
quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat ».

345. L’exécution de l’obligation et problème spécifique. A ce critère général, s’ajoute un critère


spécial de compétence en matière contractuelle consacré par l’article 5, alinéa 1, du
Règlement : ce dernier donne compétence « au tribunal du lieu où l’obligation qui sert de
base à l’action a été ou doit être exécutée », en tenant compte d'un lien particulièrement étroit
entre le tribunal et le litige. En pratique, le lieu d’exécution de l’obligation litigieuse ne sera
pas toujours aisé à déterminer lorsque l’exécution a lieu sur l’Internet440. Imaginons, par
exemple, le téléchargement d’un logiciel de simulation financière ou d’une revue
d’informations financières sur l’Internet. Le lieu d’exécution de l’obligation de « transfert »
du logiciel ou de la revue d’informations financières est-il celui du serveur du fournisseur,
voire de son hébergeur, depuis lequel le téléchargement est réalisé ? Ou, s’agit-il plutôt du
lieu où l’ordinateur de l’investisseur qui va recevoir le logiciel ou la revue téléchargé est
localisé ? Dans les deux cas, on constate que l’exécution d’une même obligation (le
téléchargement du logiciel ou de la revue) implique des lieux différents. Suivant
l’interprétation retenue de cette disposition, on peut se retrouver dans une situation de
multiplication des juges compétents ou, à l’inverse, dans une situation de conflit négatif de
compétences441. Selon nous, le lieu retenu devrait être celui de localisation de l’ordinateur de
l’investisseur dans la mesure où l’obligation à exécuter consiste en la livraison du logiciel ou

440
Sauf à préciser contractuellement le lieu d’exécution de l’obligation. La Cour de Justice des Communautés
européennes a en effet jugé que le lieu d’exécution d’une obligation pouvait être déterminé volontairement par
les parties par une clause du contrat (Arrêt du 17 janvier 1980, Rec., 1980, p. 89). On remarquera qu’une telle
possibilité contractuelle permet indirectement de désigner le tribunal compétent, sans être toutefois tenu de
respecter les conditions de formes relatives aux clauses attributives de compétence.
441
GAUDEMENT-TALLON H., op.cit., p. 117.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 169
financières sur l’Internet

de la revue à destination de l’investisseur. Remarquons toutefois que retenir un tel critère peut
avoir des conséquences surprenantes lorsque la livraison est réalisée par le biais de l’Internet.
En effet, il se peut que l’investisseur français télécharge un tel logiciel … alors qu’il se trouve
dans un hôtel situé à Rome, par exemple.

346. Eléments de solution. Le règlement communautaire n° 44-2001 du 22 décembre 2000,


apporte des précisions permettant de résoudre partiellement cette problématique. En effet, ce
règlement qui reprend l’article 5, alinéa 1, de la Convention de Bruxelles vient en outre
préciser le critère du « lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande » et
distingue suivant qu’il s’agit d’une vente de marchandises : le lieu d'exécution sera à ce
moment là celui où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées
ou d’une fourniture de services : ce lieu sera alors celui où les services ont été ou auraient dû
être fournis. Dans notre cas, on pourrait considérer que le logiciel « aurait dû être livré » en
France, même si occasionnellement l’investisseur français a téléchargé ce logiciel dans un
autre territoire. Le juge compétent est donc celui de réception des données téléchargées, et
non le juge du lieu depuis lequel elles ont été envoyées.

347. Difficultés propres à l’Internet. Il reviendra évidemment à la jurisprudence de confirmer ou


d’infirmer une telle interprétation. Plus largement, celle-ci devra à l’avenir faire œuvre
d’éclaircissement des nouvelles dispositions. En effet, il a déjà été souligné que le nouveau
dispositif mis en œuvre par le Règlement communautaire n’était pas un exemple de clarté
notamment parce qu’il n’est pas fait de distinction suivant que l’action est formée par le client
ou par le fournisseur, alors que l’obligation qui sert de base à la demande n’est pas forcément
la même dans les deux cas442. Par ailleurs, l’application de ces règles aux transactions
financières réalisées par le biais de l’Internet est rendue plus délicate encore en raison
notamment de la dématérialisation des titres, de la multiplication des intermédiaires pour
certains types de transactions financières mais aussi par l’extrême célérité des opérations sur
les réseaux. Aussi est-il souvent difficile d’identifier avec précision et à un moment donné le
prestataire de service, la prestation de service ainsi que son lieu d’exécution ou le lieu de
livraison de la chose443.

442
CROZE H., Aperçu rapide du règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence
judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, JCP E, 2001, p. 437.
443
LANGLET P.-H. et MARLY P.-G., La localisation des instruments financiers , Banque et Droit, septembre-
octobre 2000, p. 3.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 170
financières sur l’Internet

348. Le droit interne. Le droit français ne prévoit pas de règles différentes de celles applicables en
droit international. L’article 46 du NCPC dispose qu’en matière contractuelle, le demandeur
dans un litige peut assigner le défendeur, soit – sur la base du critère général d’attribution de
compétence – devant le tribunal du lieu de son domicile, ou de son siège social s’il s’agit
d’une personne morale, soit – sur la base du critère spécial – devant le tribunal du lieu
d’exécution de la prestation de services ou celui du lieu de livraison effective de la chose. A
l’instar de la matière délictuelle, ce principe de droit interne s’applique également en matière
de compétence internationale. En matière de prestation de services financiers par Internet, une
présomption a été posée par la jurisprudence quant au lieu d’exécution : « la prestation
contractuellement convenue s’exécute non à l’adresse à laquelle est souscrit l’abonnement
mais au domicile de l’abonné d’où il se connecte »444.On le voit, la similitude des règles de
droit interne ne permet pas de dissiper les problèmes évoqués à l’occasion du commentaire
des règles du Règlement communautaire.

349. Perspectives. La future convention de La Haye sur la compétence et les jugements étrangers
en matière civile et commerciale, actuellement en cours d'élaboration, présente dans son
article 6-B d'importantes nouveautés en ce qui concerne la compétence juridictionnelle. Elle
propose en effet des règles de compétence internationale en matière contractuelle, lorsque le
contrat est passé entre professionnels :
« Art. 6 – Contrats
Le demandeur peut introduire une action contractuelle devant les tribunaux de l’État dans
lequel :
a) en matière de fourniture d’objets mobiliers corporels, ceux-ci ont été fournis en tout ou
en partie;
b) en matière de prestation de services, les services ont été rendus en tout ou en partie;
c) en matière de contrats portant à la fois une fourniture d’objets mobiliers et une
prestation de services, l’obligation principale a été exécutée en tout ou en partie ».

350. Champ d’application. Plusieurs experts ont admis que cet article peut être applicable sans
problèmes aux « contrats conclus en ligne et exécutés hors-ligne ». Pourtant, une disposition

444
MATHIEU M.-E., op. cit., n° 327, p. 309.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 171
financières sur l’Internet

complémentaire pourrait être nécessaire pour les « contrats conclus et exécutés en ligne »445.
Certains d’entre eux ont précisé que pour la compétence d’un tribunal donné, la nature –
produits ou services – de ce qui est échangé par les parties au contrat importe peu ; à noter que
l’article 6 actuel ne s’applique pas au contrat exécuté en ligne. On constate que les problèmes
les plus importants se posent toujours au sujet des ces contrats. Ces experts proposent pour le
contenu d’une règle supplémentaire un concept de présomption simple de localisation au lieu
de livraison de l’information. Ils s’inspirent de l’article 15.4 de la loi-type de la CNUDCI de
1996.

351. La loi-type. L’article 15 de cette loi résout certains problèmes concernant le moment et le lieu
de l’expédition et de la réception d’un message de données. L’article 15.4 présume que, sauf
convention contraire entre l’expéditeur et le destinataire, le message de données est réputé
avoir été reçu au lieu où le destinataire a son établissement. Cet article énonce également des
principes pour la détermination de l’établissement aux fins de l’application de cette règle,
spécialement conçue pour résoudre les problèmes posés par le commerce électronique quand
les contrats sont exécutés en ligne. A l’heure actuelle, l'incertitude étant par nature malvenue
dans un contrat, les parties préfèrent généralement éviter tout problème en utilisant des
clauses dites « attributives de compétence ».

B. En présence d’une clause attributive de compétence

352. Définition. Une clause attributive de compétence juridictionnelle – ou aussi de prorogation de


compétence ou d’élection de for – est une stipulation par laquelle les parties sont convenues
du juge compétent pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion de la conclusion,
de l’exécution ou de l’interprétation du contrat liant ces parties. Une telle clause a pour effet –
par application du principe de la convention loi – d’imposer la compétence exclusive d’une
juridiction et d’exclure les autres possibilités que pourrait offrir le droit judiciaire privé
international446. Ce principe est confirmé l’article 23 du Règlement qui soumet son application
à la condition que l'une des parties ait son domicile ou son siège sur le territoire d'un Etat de la

445
Réunion d’experts destinée à explorer les questions posées par le commerce électronique et la compétence
juridictionnelle internationale : « Commerce électronique et compétence juridictionnelle internationale » Ottawa,
du 28 février au 1er mars 2000, disponible sur : www.hcch.net .
446
A l’exception, bien entendu, des cas de compétence exclusive et de protection spéciale du consommateur qui
prévalent sur les clauses de prorogation de compétence. Ajoutons également que si la clause n’est stipulée qu’en
faveur d’une seule des parties, celle-ci conserve le droit de saisir tout autre tribunal compétent sur la base des
règles édictées par le texte européen.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 172
financières sur l’Internet

communauté, et que la clause désigne un ou plusieurs tribunaux d'un Etat contractant. La


juridiction choisie peut être différente de celle qui serait compétente en vertu d'autres
dispositions du Règlement, à l'exception des cas de compétences exclusives (article 22) et des
cas issus de contrats conclus avec des consommateurs (article 15 et suivants).

353. Condition. Le texte européen impose toutefois le respect de l'une des conditions de forme –
peu contraignantes il est vrai – pour que la clause attributive de juridiction soit valable. En
effet, celle-ci doit être conclue :
• Soit par écrit ou verbalement avec confirmation écrite ;
• Soit sous une forme conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles ;
• Soit, dans l’hypothèse du commerce international, sous une forme conforme à un usage
dont les parties avaient connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans
ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale
considérée.

354. Applicabilité à l’Internet. Peut-on considérer qu’une clause attributive de compétence


conclue directement en ligne répond à la condition d’être consacrée par écrit ? Selon la
jurisprudence de la Cour de Justice, une interprétation souple de la condition d’écrit doit être
adoptée, estimant que la ratio legis de cette condition est avant tout d’établir le consentement
des parties447. Cette jurisprudence devrait désormais être renforcée par l’article 9 de la
directive sur le « commerce électronique ». Celui-ci dispose en effet que les Etats membres
doivent faire en sorte que « leur système juridique rende possible la conclusion des contrats
par voie électronique ». A ce titre, ils doivent notamment veiller « à ce que le régime
juridique applicable au processus contractuel ne fasse pas obstacle à l’utilisation des
contrats électroniques ni ne conduise à priver d’effets et de validité juridiques de tels contrats
pour le motif qu’ils sont passés par voie électronique ». Ainsi, pour ce qui concerne la notion
d’écrit, la directive n’exige pas la suppression de cette formalité mais impose d’adopter une
conception large de cette notion afin de reconnaître que l’écrit puisse également prendre la
forme électronique448.

447
CJCE, 10 mars 1982, Rec. 1982, t.1, p. 1745.
448
DEMOULIN M. et MONTERO E., La conclusion des contrats par voie électronique, FONTAINE M. (sous la
direction de), Le processus de formation du contrat – Contributions comparatives et interdisciplinaires à
l’harmonisation du droit européen, Bruxelles, Bruylant et Paris, L.G.D.J., 2002, pp. 693-788 ; GOBERT D. et
MONTERO E., Le traitement des obstacles formels aux contrats en ligne in Le commerce électronique sur les
rails ? Analyse et propositions de mise en œuvre de la directive sur le commerce électronique, sous la direction
du Professeur MONTERO E., Cahiers du CRID, n° 19, Bruxelles, Bruylant, 2001, pp. 199-244.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 173
financières sur l’Internet

355. Volonté communautaire. Le Règlement communautaire est venu confirmer cette vision des
choses dans son article 23, qui reprend et complète l’article 17 de la Convention de Bruxelles.
En effet, il ajoute que « toute transmission par voie électronique qui permet de consigner
durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite », ce qui permet
d'établir une totale équivalence avec une convention papier. Enfin, l'avant-projet de
Convention de La Haye sur la compétence et jugements étrangers en matière civile et
commerciale énonce, dans son article 4, les conditions de validité des clauses d'élection de
for. Ainsi, l'article 4.2.b) dispose qu'une telle clause est valable dans sa forme si elle a été
conclue ou confirmée «par tout moyen de communication qui rende l'information accessible
pour être consultée ultérieurement», reprenant ainsi les dispositions de la loi-type de 1996 de
la CNUDCI sur le commerce électronique.

356. Validité. Si l’une des parties venait néanmoins à contester la validité d’une telle clause
conclue par voie électronique au regard de la notion d’écrit, cette clause pourrait malgré tout
être validée si elle répond à l’une des deux autres conditions précitées, et notamment si elle
s’inscrit dans un courant d’affaires qui s’opère habituellement entre les parties par des moyens
électroniques – ce qui serait le cas si des transactions financières sont conclues de manière
répétée sur l’Internet – ou si elle est d’usage dans la branche commerciale considérée. Ainsi,
sous réserve du respect des conditions précitées, la licéité de la clause d’élection du for dans
l’ordre international n’est généralement pas mise en doute, même si les contractants ne sont
pas tous commerçants. La jurisprudence française admet d’ailleurs le principe de la validité de
ces clauses, sous réserve toutefois que le litige ait un caractère réellement international, que le
consentement des parties soit certain et que la clause ne tienne pas en échec une compétence
territoriale française impérative449.

357. En droit interne. En revanche, les clauses dérogatoires de compétence ne sont pas très
favorablement perçues dans l’ordre interne. C’est ainsi que l’article 48 du NCPC soumet la
validité de ces clauses à des conditions relativement strictes et dispose en effet que « toute
clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est
réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes
contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans
l’engagement de la partie à qui elle est opposée ». On en conclut qu’en droit français, cette

449
Cass. 1re civ., 17 décembre 1985, RCDIP, 1986, p. 537, note GAUDEMET-TALLON H..
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 174
financières sur l’Internet

clause est par principe non valable, sauf si deux conditions sont remplies. D’une part, il faut
d’abord qu’elle ait été stipulée entre commerçants, ce qui exclut les clauses conclues entre
personnes civiles ainsi que celles figurant dans les actes mixtes. A titre d’exemple, ne serait
pas valide la clause entre un opérateur financier commerçant et un investisseur qui serait une
société civile d’experts comptables ou de médecins. D’autre part, le texte énonce que la clause
ait été spécifiée de manière très apparente. Les tribunaux sont relativement exigeants sur ce
point, ainsi la clause imprimée au verso non paraphé d’un bon de commande450 se verra privée
d’effet. Il en serait probablement de même si la clause se trouvait enfouie sur une page Web
difficilement accessible par l’internaute et/ou diluée dans un texte contenant des informations
diverses.

Section 2. La loi applicable aux conflits relatifs aux opérations bancaires et


financières sur l’Internet

358. Distinction. Selon le Professeur T. BONNEAU, il y a lieu de distinguer, concernant la


question au sens large de la loi applicable aux opérations bancaires internationales, les règles
substantielles des règles de conflits.
1. Les règles substantielles, « celles qui régissent directement le fond du droit » selon
l’auteur, se subdivisent elles-mêmes en trois catégories. La première catégorie comprend les
règles indistinctement applicables aux relations internes et internationales (Convention de
Genève des 7 juin 1930 et 19 mars 1931 sur les effets de commerce et les chèques, introduite
dans le code de commerce451 et le code monétaire et financier). La deuxième catégorie
regroupe des règles ne concernant que des opérations internationales (par exemple la
Convention d’Ottawa du 28 mai 1988 sur le crédit-bail international). Enfin, la troisième
catégorie comprend les pratiques non contraignantes (règles relatives au crédit
documentaire)452.
2. Les règles de conflits, celles qui « se bornent à déterminer la loi applicable sans
énoncer de dispositions concernant le fond du droit », sont aujourd’hui contenues, sauf
exception, dans la convention de Rome.

450
Lamy droit de l’informatique et des réseaux, Guide, éd. 2001, p. 951, n° 1664.
451
Article L. 511-1 et s du Code de commerce.
452
Sur tous ces aspects, BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°88 p 62-63.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 175
financières sur l’Internet

359. Définition. Le conflit de lois surgit dès que les législations de deux Etats, voire plus, ont
vocation à régir de manière cumulative une même question de droit privé. Dans le cadre d’un
litige à caractère international, il est nécessaire de se demander si la loi de l’Etat dans lequel le
juge est saisi ne doit pas être écartée au profit d’une loi étrangère, cela avant toute discussion
sur le fond du litige, que ce dernier soit à caractère financier ou non. Ce domaine de la loi
applicable ne connaît pas non plus de réglementation spécifique à l’Internet. Il convient donc
de faire application des règles classiques de droit international privé dès lors que la
transaction présente un caractère international, ce qui est régulièrement le cas pour les
services financiers en ligne qui ne connaissent généralement pas les frontières. Néanmoins, en
matière bancaire453, la question revient à la détermination de la « loi de la banque », eu égard
aux solutions jurisprudentielles antérieures à la Convention de Rome qui conduisaient le plus
souvent à l’application de la loi de l’Etat de l’établissement de crédit454. A l’instar de la
détermination du juge compétent, une distinction doit être faite entre le régime applicable aux
obligations délictuelles (§1) et celui applicable aux obligations contractuelles (§2).

§1. En matière délictuelle

360. Principes. Si le règlement communautaire de 2000 s’applique indistinctement en matière


contractuelle et extracontractuelle, la problématique de la loi applicable à la responsabilité
délictuelle et quasi délictuelle n’est envisagée par aucune convention internationale. Il
convient donc de se tourner vers le droit interne. La Cour de cassation a estimé que l’article 3,
alinéa 1er, du Code civil, décidant que « les lois de police et de sûreté obligent tous ceux qui
habitent sur le territoire », consacre une règle de droit international privé en matière de
responsabilité délictuelle. Elle juge en effet que les lois de police d’un Etat, auxquelles sont
assimilées les lois relatives à la responsabilité civile, sont applicables aux faits commis sur le
territoire de cet Etat, quelle que soit la nationalité des personnes concernées. La Cour retient
le critère du lieu où le fait dommageable s’est produit, tout en admettant que ce critère peut
aussi viser le « lieu de réalisation du dommage »455 - lex loci delicti commissi. Ce critère
permet de retenir l’application de la loi française dans de très nombreux cas si un recours en

453
FALLON M. et MEEUSEN J., Le commerce électronique, la directive 2000/31/CE et le droit international
privé, RCDIP, 2002, p. 437.
454
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°90 p 63.
455
Cass., civ. 1ère, 8 février 1983, Clunet, 1984, p. 123, note LEGIER G.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 176
financières sur l’Internet

responsabilité délictuelle, lié à une publicité pour un produit bancaire ou financier sur
l’Internet par exemple, est introduit456.

361. Evolutions. La Commission européenne a rendu public le 22 juillet 2003 une proposition de
règlement qui vise à harmoniser les règles concernant la loi applicable aux obligations non-
contractuelles (Rome II). Compte tenu de la nature internationale de l’Internet, ce texte aura
largement vocation à s’appliquer même s’il ne lui est pas propre. L’article 3 de la proposition
dispose que « la loi applicable à l’obligation non-contractuelle est celle du pays où le
dommage survient ou menace de survenir ». En d’autres termes, serait consacrée une nouvelle
fois la règle du lex loci delicti commissi. On remarquera l’influence du règlement
communautaire de 2000 dans la rédaction de la deuxième partie de l’article « menace de
survenir » afin de permettre des actions préventives et de s’aligner sur les règles applicables
en matière de juge compétent. En matière d’Internet, on peut dire que le dommage est
cumulativement survenu dans chaque pays ; la loi applicable sera donc celle du pays de
résidence de la victime. La proposition de règlement prévoit encore deux exceptions à ce
principe. D’une part, lorsque la personne dont la responsabilité est recherchée et la victime
ont leur résidence habituelle dans le même pays au moment de la survenance du dommage, la
loi applicable est celle de ce pays. D’autre part, s’il résulte de l’ensemble des circonstances
que l’obligation non-contractuelle présente des liens manifestement plus étroits avec un autre
pays, c’est la loi de ce dernier qui s’applique à l’obligation.

§. 2. En matière contractuelle

362. Principe. Au niveau européen, c’est la Convention de Rome du 19 juin 1980, en vigueur en
France depuis le 1er avril 1991 qui instaure les règles communes de désignation de la loi
applicable aux obligations contractuelles. L’article 3 de cette Convention consacre le principe
fondamental de l’autonomie de la volonté : les parties sont en principe libres de choisir la loi
qui régira leurs relations contractuelles, et ce même si la loi qu’elles désignent n’a aucun lien
avec le contrat. Ce principe ne sera bousculé qu’en cas de fraude à la loi457 ou si la loi choisie
par les parties doit céder le pas à une législation nationale impérative458. En effet, l’article 7 de

456
Dans la mesure où ce critère a déjà été commenté, nous renvoyons le lecteur à ce dernier, v. supra n° 328 et s.
457
La fraude à la loi consiste à user d’un mécanisme licite pour atteindre un but illicite, tel dans notre cas tenter
d’éviter l’application d’une règle jugée par les parties comme trop contraignante.
458
LOUSSOUARN Y. et BOURREL P., Droit international privé, Dalloz, 1999, p. 189 et s. ; AUDIT B., Droit
international privé, Economica, 1997, p. 144 et s.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 177
financières sur l’Internet

la Convention de Rome prévoit que la loi des parties peut éventuellement être écartée en
présence de lois de police à caractère impératif édictées par un Etat qui présente un lien étroit
avec la situation contractuelle459. Il est évident que ce principe s’applique également à toutes
les transactions financières ayant un fondement contractuel et un caractère international. En
d’autres termes, « la loi de la banque résulte [si elle n’est directement exclue] soit de la
volonté des parties, soit, à défaut de choix, de la localisation objective du contrat460 ».

363. Précisions. L’article 3 précise le principe de l’autonomie de la volonté comme suit : « ce


choix [de la loi applicable] doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du
contrat ou des circonstances de la cause ». Le choix des parties sera considéré comme tel dès
lors que les parties ont prévu et signé une clause spécifique de désignation de la loi applicable
dans le contrat négocié, que ce dernier soit sous forme papier ou électronique. Ce choix peut
également être tacite pour autant qu’il résulte de façon certaine « des dispositions du
contrat ». Il peut porter soit « sur la loi de la banque, soit sur une autre loi ne présentant
aucun lien avec le contrat461 ». On doit pouvoir considérer que cette condition est remplie si
une disposition claire est intégrée dans les conditions générales et que celles-ci font l’objet
d’une prise de connaissance et d’une acceptation certaine par les parties. En pratique, le
respect de cette condition doit être apprécié par le juge suivant les circonstances de la cause.
Enfin, ce choix peut également être tacite pour autant qu’il résulte de façon certaine « des
circonstances de la cause ». Différents indices peuvent aider à définir la loi choisie par les
parties au contrat électronique, comme l'utilisation d'un contrat type rédigé conformément à
un système juridique déterminé, la référence ponctuelle à une loi dans une clause quelconque
du contrat, une clause qui attribue compétence à une juridiction déterminée sans préciser la loi
applicable (dans ce cas il apparaît normal que le juge applique sa propre loi) « son
appartenance à un groupe de contrats, la loi n’ayant été choisie que pour le contrat de
base462 ». La langue du contrat est, en revanche, un indice non pertinent à lui seul, il a été
régulièrement jugé qu'il est insuffisant pour déterminer la loi applicable463.

459
Pour un commentaire approfondi de cette disposition, voy. JACQUET J. M. et DELEBECQUE P., Droit du
commerce international, Dalloz, 2000, p. 102 et s.
460
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°93 p 64.
461
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°94 p 64.
462
BONNEAU T., Droit bancaire, op.cit., n°94 p 65.
463
ITEANU O., Internet et le Droit : Aspects juridiques du commerce électronique, Ed. Eyrolles, 1996, p. 42.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 178
financières sur l’Internet

364. Difficultés contextuelles. Sur l’Internet, les « circonstances de la cause » sont par nature
multiples et internationales, ce qui rendra malaisé l’appréciation de cette condition464. Ainsi,
en cas d’absence de volonté expresse des parties sur la loi applicable, on pourra difficilement
déterminer de façon certaine ladite volonté des parties. Imaginons simplement une transaction
impliquant l’éditeur d’une revue financière établi au Japon mais dont le site est hébergé en
Allemagne, contractant avec un acheteur français en vue du téléchargement payant
d’informations financières. On admet que dans ce cas de figure, il devient plus difficile de
déduire des circonstances de la cause, la volonté implicite, mais certaine, des parties de
soumettre leur contrat à telle ou telle loi.

365. Multiplicité contractuelle des lois. L’article 3 permet également aux parties de recourir à la
technique dite du « dépeçage » du contrat465 en précisant que « par ce choix, les parties
peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie de leur contrat ». Il en résulte
que les parties peuvent désigner la loi de la banque uniquement pour certaines des
dispositions du contrat et maintenir le silence pour les autres466. Elles pourraient également
opter pour l’application de différentes lois, chacune se rapportant aux dispositions du contrat
distinctes les unes des autres et dont l’application est la plus favorable.

366. Négociation et CGV. On doit reconnaître que les particularités du commerce électronique ont
fait naître de nombreuses hésitations au regard de l’application du principe de l’autonomie de
la volonté467. Ainsi, on admet que la technique du « dépeçage » du contrat présuppose que les
parties prennent le temps de négocier afin de pouvoir déterminer les clauses du contrat
soumises à des lois distinctes. Or s’agissant de contrats d’adhésion, la conclusion d’un accord
en ligne est très généralement dépourvue de toute période de pourparlers, car les parties
recherchent avant tout la rapidité, spécialement dans le domaine des transactions financières.
Il faut toutefois remarquer que le Code monétaire et financier, dans son nouvel article L. 312-
1-1 issu de la loi du 1er août 2003, impose la conclusion d’une convention précisant les
conditions de fonctionnement du compte (en vertu de la loi de la banque) ; de même, le décret
n° 84-708 du 24 juillet 1984 pris pour l'application de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984

464
VERBIEST T. et WERY E., op .cit., p. 495-496.
465
GRANIER T. et JAFFEUX C., op. .cit., p. 162.
466
BONNEAU T, Droit bancaire, op. cit., n°94 in fine p 65.
467
Indiquons que les règles classiques de droit international privé sont également applicables au commerce
électronique comme le confirme l’article 1.4. de la directive sur le commerce électronique (Directive n° 2000/31
du 8 juin 2000) qui indique que la directive n’établit pas de règles additionnelles de droit international privé et ne
traite pas de la compétence.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 179
financières sur l’Internet

relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, précise dans son article 7 que
les établissements de crédit sont tenus de porter à la connaissance de leur clientèle et du
public les conditions générales de banque régissant les opérations effectuées, et de préciser la
loi applicable aux conventions signées. Enfin, la nouvelle directive 2002/65/CE du 23
septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des
consommateurs impose dans son article 3, 1. 3) e) la communication de « l’Etat membre sur
la législation duquel le fournisseur se fonde pour établir ses relations ». Par conséquent, à
défaut d’être négociée, la loi de la banque sera connue. Par ailleurs, la rédaction pratique de
ces conditions générales peut poser problème. En effet, on sait que la possibilité pour les
parties de choisir une loi applicable est soumise à certaines limites, dont celle de ne pas
écarter une législation impérative nationale. Rappelons que ces législations impératives
peuvent varier de pays à pays : certaines pratiques contractuelles pouvant être admises dans
un état mais réprimées dans un autre. Ainsi, comment s’assurer que la loi choisie dans les
conditions générales soit conforme aux dispositions impératives de l’ensemble des pays du
monde ? Ceci conduit à penser que la continuation de l’harmonisation des législations est
devenue indispensable ; associée dans la plupart des cas à la détermination volontaire de la loi
de la banque, elle devrait limiter les problèmes de conflits de loi en matière bancaire et
financière sur l’Internet468.

367. Moment du choix. L’article 3.2 de la Convention de Rome permet un choix contemporain à
la conclusion du contrat, mais aussi un choix tardif – et même modifié par les parties – de la
loi applicable au contrat, avec certaines limites. Cette possibilité permet d'envisager une des
particularités des contrats électroniques internationaux : leur caractère de « processus » plutôt
que d’acte, ce qui permet la mise à jour de leurs clauses, dont celle portant sur la loi
applicable si les parties en conviennent. La loi applicable au contrat pourra ainsi être amenée
à varier, les parties choisissant ainsi les règles les plus favorables à leur contrat.

368. Les liens étroits. Dans l’hypothèse où les parties n’ont pas recouru au principe de
l’autonomie de la volonté et dès lors pas effectué de choix de la loi applicable au fond du
contrat, le principe général retenu par l’article 4, alinéa 1, de la Convention de Rome est la
mise en œuvre de la loi « du pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits ».

468
V. aussi COSTES L., La délicate question du droit applicable aux contrats du commerce électronique , Cahier
Lamy droit de l’informatique et des réseaux, n° 128, août-septembre 2000, p. 21 ; JACQUET J.-M. et
DELEBECQUE P., op.cit., p. 93.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 180
financières sur l’Internet

L’alinéa 2 du même article vient préciser que « le contrat présente les liens les plus étroits
avec le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la
conclusion du contrat, sa résidence habituelle ou, s’il s’agit d’une société, association ou
personne morale, son administration centrale. Toutefois, si le contrat est conclu dans
l’exercice de l’activité professionnelle de cette partie, ce pays est celui où est situé son
principal établissement ou, si, selon le contrat, la prestation doit être fournie par un
établissement autre que l’établissement principal, celui où est situé cet autre établissement ».

369. La prestation caractéristique. Pour le Professeur M.-E. ANCEL, celle-ci « œuvre pour la
reconnaissance de l’unité du rapport contractuel et pour la prise en considération de la
diversité des rapports contractuels tant en droit interne qu’en droit international privé »469.
Elle a été définie par les Professeurs M. GIULIANO et P. LAGARDE comme « la prestation
pour laquelle le paiement est dû »470 et qui constitue « le centre de gravité et la fonction socio-
économique du contrat471 ». Ainsi, pour désigner celle des deux parties dont il faut prendre en
compte la résidence ou l’établissement, il convient de déterminer la partie qui doit fournir la
« prestation caractéristique ». On constate en effet que dans un contrat la prestation de l’une
des parties est jugée caractéristique (transfert de propriété et livraison d’un produit financier,
téléchargement d’un logiciel de simulations boursières, fourniture d’informations
financières…) alors que celle de l’autre partie ne constitue que le paiement de la prestation de
la première (paiement du prix). Dès lors, si un investisseur français télécharge un logiciel de
simulations financières vendu par un prestataire établi en Italie, la loi applicable sera donc
celle du domicile de la partie qui est tenue de la prestation caractéristique, à savoir celle du
vendeur italien. L’Internet ne change donc pas la donne, « cette présomption conduit,
lorsqu’il s’agit d’opérations bancaires, à retenir la loi de la banque, parce que c’est la
banque qui fournit généralement la prestation caractéristique du contrat472 ». Avec ce
principe, on peut abandonner les références au lieu d’exécution de la prestation ou de celui de
la conclusion de l’accord, qui sont particulièrement délicates à mettre en œuvre,
spécifiquement pour les transactions conclues sur l’Internet473. Par ailleurs, il ne faut pas
oublier que l’article 4.5 de la Convention de Rome a prévu une méthode subsidiaire qui

469
ANCEL M.-E., La prestation caractéristique du contrat, Ed. Economica, 2002, p. 371.
470
Telle était également la définition donnée par ANCEL M.-E., op. cit., p. 371.
471
GIULIANO M. et LAGARDE P., Rapport concernant la convention sur la loi applicable aux obligations
contractuelles, JOCE n°C 282/1, du 31 octobre 1980, p 10.
472
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°95, p 65.
473
AUDIT B., op.cit., p. 154 ; GRANIER T. et JAFFEUX C., op.cit., p. 162.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 181
financières sur l’Internet

permet au juge d’écarter la présomption de prestation caractéristique pour choisir alors la loi
du pays avec lequel le contrat a les liens plus étroits.

370. Forme du contrat. Quant à la détermination de la loi applicable à la forme, et non plus au
fond du contrat, la Convention de Rome permet également d’appliquer la loi du lieu de sa
conclusion. Ainsi, selon l’article 9, alinéa 1, lorsque le contrat est conclu entre des parties se
trouvant dans un même pays, il est considéré comme valable en la forme s’il satisfait aux
conditions de la loi qui le régit quant au fond, ou de la loi du pays dans lequel il a été conclu.
Si le contrat est conclu entre des personnes qui ne résident pas dans le même pays, l’accord
est également valable en la forme s’il satisfait aux conditions de forme de la loi qui régit le
fond ou celle de l’un de ces pays (art. 9, alinéa 2). On avouera que pour la conclusion d’une
transaction financière sur l’Internet, la localisation de la conclusion physique de l’accord
n’est, en pratique, pas évidente à déterminer car les partenaires ne sont pas matériellement
présents en même temps dans un lieu précis. La désignation d’un tel lieu de passation du
contrat, si elle est effectuée, revêt nécessairement un caractère artificiel474.

371. Limite. Indiquons néanmoins que ce principe de l’article 9, alinéas 1 et 2, souffre une limite
lorsque le contrat est conclu par une partie ayant la qualité de consommateur : dans ce cas,
l’article 9, alinéa 5, précise que la forme de ces accords est régie par la loi du pays dans lequel
le consommateur a sa résidence habituelle. Cette précision est importante en matière
financière car on sait que de nombreuses réglementations financières exigent le respect de
conditions de forme visant notamment à permettre au consommateur investisseur de conserver
des moyens de preuve et d’être pleinement informé quant à la nature, à l’importance et aux
conséquences éventuelles de l’opération financière qu’il se propose de passer. Le champ
d’application de la limite évoquée ci-dessus est en réalité plus large. En effet, même si les
parties ont fait le choix de la loi applicable au contrat, l’article 5 de la Convention de Rome
indique que la mise en œuvre de ce principe de l’autonomie de la volonté ne saurait priver le
consommateur de la protection de son droit national – c’est-à-dire de la loi du pays dans
lequel il a sa résidence habituelle – dès lors que l’une des hypothèses suivantes est rencontrée,
s’agissant de l’Internet :

474
COSTES L., op.cit., p. 24 ; Lamy droit de l’informatique et des réseaux, Guide, éd. 2001, p. 937, n° 1642-
1644.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 182
financières sur l’Internet

• La conclusion du contrat a été précédée dans ce pays d’une proposition spécialement


faite ou d’une publicité, et si le consommateur a accompli dans ce pays les actes nécessaires
à la conclusion du contrat ;
• Le cocontractant du consommateur ou son représentant a reçu la commande du
consommateur dans ce pays475.
Ce principe protecteur a été repris par la LEN énonçant à l’article 17 que l’application de la
loi du pays d’origine ne pourrait avoir pour effet de priver un résidant en France de la
protection assurée par les dispositions nationales relatives aux obligations contractuelles. De
même cette protection a été consacrée par le Code la consommation lorsque le contrat est régi
par la loi d’un pays tiers sous réserve que le consommateur réside dans un Etat membre et que
le contrat présente un lien étroit avec cet Etat476.

372. Hypothèses. Le commerce électronique étant par nature immatériel et difficilement


localisable, cette disposition ne sera pas facile à mettre en œuvre. En effet, sur l’Internet, il
n’est pas toujours aisé de déterminer si le contrat conclu en ligne a été précédé d’une
proposition spécialement faite ou d’une publicité par voie électronique. On avance
généralement deux hypothèses. Soit l’investisseur décide de se rendre volontairement sur un
site permettant d’effectuer des transactions financières – qu’il connaît ou qu’il a cherché via
un moteur de recherches – et de conclure l’opération. Dans ce cas, on ne peut pas dire que le
prestataire a eu une attitude active, et on devrait considérer que l’article 5 n’a pas lieu de
s’appliquer : la loi applicable reste celle de la banque. Soit le prestataire envoie une offre non
sollicitée par courrier électronique à l’investisseur dans son pays. On pourrait alors considérer
que la première condition est remplie. A l’analyse toutefois, on constate que la problématique
est beaucoup plus complexe et que les techniques de marketing utilisées sur l’Internet nous
empêchent de raisonner de manière aussi simpliste. Il est désormais possible de personnaliser
les bannières publicitaires qui sont présentées à l’internaute lorsqu’il consulte tel ou tel site

475
L’article 5, alinéa 2, prévoit une troisième hypothèse mais limitée aux ventes de marchandises. Celle-ci
n’ayant pas d’intérêt pour notre propos, nous nous proposons de ne pas la commenter.
476
« Lorsque les parties ont choisi la loi d'un Etat non membre de la Communauté européenne pour régir le
contrat, le juge devant lequel est invoquée cette loi est tenu d'en écarter l'application au profit des dispositions
plus protectrices de la loi de la résidence habituelle du consommateur assurant la transposition de la directive
97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en
matière de contrats à distance et de la directive 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil du
23 septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des
consommateurs, lorsque le contrat présente un lien étroit avec le territoire d'un ou plusieurs Etats membres de
la Communauté européenne ; cette condition est présumée remplie si la résidence des consommateurs est située
dans un Etat membre ». Article L. 121-20-15 du Code la consommation inséré par l’ordonnance nº 2005-648 du
6 juin 2005.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 183
financières sur l’Internet

Web477. On pourra toutefois apporter une solution au cas par cas selon les analyses des
différents procédés de communication réalisés via l’Internet retenues par la doctrine.

373. Analyse. Seule la première condition est susceptible de poser problème sur l’Internet,
notamment en raison des termes « proposition spécialement faite ou publicité ». Cette notion
rappelle la définition du démarchage qui implique « une initiative de son auteur [par le biais]
de procédés identifiés »478. En effet, une « proposition spécialement faite » induit
nécessairement une initiative de son auteur. Donc, en cas de démarchage caractérisé, la loi de
la banque sera écartée. C’est justement cette notion d’initiative qui, distingue le démarchage
de la publicité ; cette dernière implique en effet un comportement actif de l’internaute pour
souscrire à une offre de produits ou de services. Ainsi, la plupart des procédés (que nous
avons déjà analysés) utilisés sur l’Internet relèvent davantage de la publicité. En conséquence,
à ce stade de la lecture du texte, chaque fois (sauf exception particulière tenant à la nature de
l’opération financière – par exemple le financement d’un appartement) qu’un client conclurait
une opération bancaire par l’intermédiaire d’un « clic » sur une bannière, voire sur un lien
publicitaire, la loi de la banque serait exclue, en dépit des conditions générales de vente
communiquées ultérieurement. Néanmoins, contrairement à certains auteurs479 et eu égard à
l’analyse précédente, il ne nous semble pas soutenable de considérer que toute publicité
susceptible d’être reçue dans l’Etat de l’investisseur justifie la mise en œuvre de la protection
spéciale instituée par l’article 5 de la Convention. Encore faut-il, précise le texte
cumulativement, que l’internaute ait « accompli dans ce pays les actes nécessaires à la
conclusion du contrat ». Se pose alors, dans ce cas, la question de la localisation de la
signature effective de la convention ou de l’envoi de la commande. Si le client télécharge un
document, qu’il doit compléter et signer, sur son propre ordinateur, il aura signé le contrat sur
le territoire de son Etat de résidence ; mais s’il signe un formulaire sur le site du prestataire,
faut-il considérer qu’il n’accomplit pas dans ce pays les actes nécessaires à la conclusion du
contrat ? Le cas échéant, qu’en est-il s’il accomplit les mêmes actes sur son ordinateur
portable dans un autre pays ? Les mêmes réflexions peuvent être faites concernant la
détermination du lieu exact de la réception de la commande qui, pour que l’article 5 soit
d’application, doit être dans le pays du consommateur. L’application de cet article est donc

477
Pour une explication détaillée de ces possibilités, v. La publicité sur Internet, Ouvrage collectif sous la
coordination de HUSSHERR F. X., Dunod, 1999, pp. 155 et s.
478
BONNEAU T., Démarchage et Internet, art. préc., p. 271.
479
CARLIER J. Y., Guide des litiges transfrontières en Europe, Institut National de la Consommation, Paris,
1993, p. 98 ; FALLON M., Problématique du contentieux de la consommation transfrontalière en Europe,
REDC, 1988, p. 261, note 14.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 184
financières sur l’Internet

sujette à nombreuses discussions et interprétations, ce qui a pour effet de créer une insécurité
juridique en la matière. Il apparaît donc nécessaire que les conditions de la mise en œuvre de
la protection des consommateurs établie par la Convention de Rome soient revues480. Il
conviendrait sans doute d’envisager l’extension de l’exception de l’article 5 (qui ne s’applique
pas aux contrats de fourniture de services lorsque ces prestations doivent être fournies
exclusivement dans un pays différent du lieu de résidence) pour revenir alors à l’application
de la loi de la banque fournisseur. Il faut enfin rajouter le problème conséquent de preuve en
cas de litige portant sur l’application de l’article 5, notamment, car les techniques sont
rarement visibles pour l’internaute. Ce dernier élément implique qu’il sera souvent difficile,
voire impossible, pour l’investisseur de prouver qu’il a acheté tel produit ou souscrit à tel
service suite à l’apparition d’une bannière publicitaire par exemple481.

374. Lois de police. La loi de la banque est enfin écartée en présence de lois de police, c’est-à-dire
de dispositions légales impératives (article 7, 1°). Cette notion de loi de police a toujours été
difficile à définir car en matière bancaire « les lois de police intéressent l’organisation
économique de l’Etat, notamment le crédit et la monnaie482 ». L’exemple souvent cité est celui
des règles applicables en matière d’usure. L’Internet ne déroge pas à la règle, mais la question
reste la même : savoir quelles sont effectivement ces lois de police. Les établissements de
crédit, pourtant soumis à la loi de leur pays d’établissement pour la légalité de leurs
prestations fournies via l’Internet (directive sur le commerce électronique), ne pourront pas
faire l’économie d’une conformité avec ces dispositions impératives, dans la mesure où ils
voudront profiter du réseau pour proposer leurs services dans tous les Etats membres. On
constate donc que la convention de Rome ruine quelque peu les efforts réalisés par la directive
de 2000 – qui déclare ne pas édicter de règles additionnelles au droit international privé –
puisqu’elle oblige quand même les prestataires à se conformer à autant de régimes de loi de
police que d’Etats membres. Il reste néanmoins à espérer que pour le bon fonctionnement du
marché, certains législateurs ne fassent un usage abusif de la possibilité de qualifier leurs
normes de lois de police, faussant de la sorte le jeu normal des règles de conflit. Dans ce
domaine, il convient désormais de tenir compte de la jurisprudence Arblade de la Cour de

480
En ce sens également, HUET J., Aspects juridiques du commerce électronique : approche internationale,
LPA, n° 116, 26 septembre 1997 ; J. HUET, Commerce électronique, loi applicable et règlement des litiges :
propositions des grandes entreprises, JCP G, 1999, octobre, p. 1761.
481
VERBIEST T., La responsabilité des outils de recherche sur Internet en droit français et droit belge, Lamy
Droit de l’informatique et des réseaux, op. cit., p. 6 et s.
482
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°106, p 70.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 185
financières sur l’Internet

Justice483, qui a souligné que le respect du droit communautaire s’impose aux législateurs
nationaux dans l’édiction des lois de police comme dans tout autre domaine. La Haute
juridiction ajoute que « l’appartenance des règles nationales à la catégorie des lois de police
et de sûreté ne les soustrait pas au respect des dispositions du Traité ». Une loi de police
nationale pourra ainsi être écartée si elle est jugée constituer une entrave aux libertés de droit
communautaire (liberté d’établissement, liberté de circulation), sauf si elle est justifiée par un
motif impérieux d’intérêt général.

483
CJCE 23 novembre 1999, Arblade, aff. jointes C-369/96 et C-376/96. Cet arrêt définit les lois de police
comme « les dispositions nationales dont l’observation a été jugée cruciale (…) au point d’en imposer le respect
à toute personne se trouvant sur le territoire national de cet Etat membre ou à tout rapport juridique localisé
dans celui-ci ».
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 186
financières sur l’Internet

CONCLUSION

375. Le règlement des conflits. Un système de règlement des litiges existe bel et bien en matière
de transactions bancaires et financières sur l’Internet. La question essentielle à se poser, in
fine, est de savoir s’il est de nature à rassurer les acteurs du commerce électronique, étant
entendu que l’existence d’un tel système est une condition sine qua non du bon
fonctionnement du marché. En effet il est difficile de concevoir d’investir dans un flou
juridique. Ainsi, l’on peut répondre que le système actuel de règlement des litiges a le mérite
de se référer à des principes classiques bien connus ; néanmoins, il souffre parfois d’une
inadaptation au particularisme de l’outil Internet.

376. Pour le secteur bancaire. En matière bancaire et financière, spécialement, on serait tenté
d’affirmer que c’est le secteur bancaire et financier lui-même qui vient au secours de
l’Internet. En effet, les réglementations classiques sectorielles rendent l’identification des
acteurs bien plus aisée, ce qui simplifie les questions du juge compétent et de la loi applicable
en ligne. La notion de domicile du défendeur est matériellement identifiable (résidence
habituelle) pour les particuliers, quelle que soit leur localisation réelle, de même que pour les
sociétés (siège social enregistré ou autre critère). Reste que ces règles classiques devraient
faire l’objet d’une simplification, notamment lors qu’elles introduisent un choix possible,
mais il ne s’agit pas d’un problème propre à l’Internet. En matière de loi applicable, la
présomption rattachant les liens étroits à la loi du pays où est fournie la prestation
caractéristique conduit à l’application de la loi de la banque qui, malgré la dématérialisation
d’Internet, reste agréée, contrôlée, identifiée.

377. Bilan. La détermination du juge compétent et celle de la loi applicable sur l’Internet ne posent
donc globalement pas plus de problèmes que dans les relations internationales classiques.
Cependant, la question importante de la loi applicable aux contrats conclus avec des
consommateurs reste en suspens en raison de l’ambiguïté de l’article 5 de la convention de
Rome ; cette difficulté pourrait néanmoins être facilement surmontée. Par ailleurs, le manque
d’harmonisation suffisant des statuts des produits financiers est source de complexité,
spécialement à l’égard des règles qui ont pour but de protéger l’investisseur – partie faible à
l’opération – ou de veiller à la sauvegarde de l’épargne nationale. Ces règles étant
généralement considérées comme impératives, elles auront pour effet d’écarter la législation
du prestataire étranger au profit de la loi du lieu de résidence de l’investisseur consommateur
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – Juge compétent et la loi applicable en matière d’opérations bancaires et 187
financières sur l’Internet

ou de la loi du lieu du marché réglementé. Ces disparités constituent sans nul doute un frein
au développement des transactions financières transfrontières484. Il convient donc de se tourner
vers d’autres modes de règlement des litiges, extrajudiciaires, dits modes alternatifs. Rapides
et efficaces, ils sont de nature à renforcer la confiance dans le système de règlement des litiges
en évitant les préjugés traditionnels liés à la justice elle-même.

484
De VAUPLANE H. et BORNET J. P., Droit des marchés financiers, Litec, 1998, p. 1050.
CHAPITRE 2

LES MODES DE REGLEMENT EXTRAJUDICIAIRE DES LITIGES

378. Multiplication des conflits. La croissance du marché financier en ligne devra


immanquablement multiplier les opérations à caractère international. Etant donné la diversité
des systèmes judiciaires dans le monde, la résolution des conflits risquera inévitablement de
se compliquer. De ce fait, les difficultés de compétence et de loi applicable, loin d’être
totalement résolues en matière de transactions bancaires et financières, vont certainement
s’accroître. Le développement des opérations financières en ligne, ainsi que le bon
fonctionnement du marché, dépend de la confiance accordée par les usagers à ce même
marché.

379. Les « Mard ». Cette confiance est renforcée par l’assurance d’un mécanisme de règlement
des litiges efficaces. Ainsi, à l’instar de ce qui se passe dans à l’échelle international, « les
modes alternatifs de règlement des différends (Mard) » sont appelés à connaître un nouvel
essor dans les années à venir, spécialement pour les litiges nés de transactions en ligne. Dans
certains domaines ces procédures ont été repensées pour s’adapter à cette nouvelle donne et
leur réussite fût si remarquable que l’on pourrait désormais se demander si elles
constitueraient la voie de recours ordinaire pour trancher ce genre de conflits et ce au
détriment des juridictions étatiques485. En effet, ils présentent de nombreux avantages par
rapport aux circuits judiciaires classiques, comme la simplicité, la rapidité et l’accessibilité.
Aussi, ces modes, vu leur diversité et l’intérêt de leur utilisation dans le secteur bancaire et
financier (section 1ère), sont-ils largement encouragés par le législateur européen (section 2).

485
L’illustration de ce succès grandissant de ces modes concerne les litiges relatifs aux droits de propriété
intellectuelle. V. pour une étude détaillée à ce sujet, GILLIERON P., Les méthodes alternatives de résolution des
conflits comme voie ordinaire pour résoudre les litiges relatifs aux droits de propriété intellectuelle dans le
cyberespace ?, RLDI, juin 2005, n°6, p. 56.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 189

Section 1ère. Aperçu sur les modes alternatifs de règlement des litiges

380. Définition. La notion de Mard ou encore de « Alternative Dispute Resolution (ADR) »


désigne le « processus de négociation qui, sous des appellations diverses, et souvent grâce à
l’intervention d’un tiers neutre et indépendant – médiateur ou conciliateur - tend à recueillir
l’adhésion des parties en litige à un accord ou à une transaction qui règle leurs
différends »486. A strictement parler, cette définition n’englobe pas l’arbitrage (volontaire ou
forcé). Pourtant, l’approche européenne invite à adopter une conception plus large de cette
notion en vue d’englober également l’arbitrage. En effet, la Recommandation 98/257/CE de la
Commission du 30 mars 1998 concernant les principes applicables aux organes responsables
pour la résolution extrajudiciaire des litiges487 vise les modes de règlement des litiges par
l’intervention active d’une tierce personne qui propose ou impose une solution.

381. Avantages. Selon Maître V. D’HUART ils correspondent à la recherche de solutions plus en
adéquation avec une certaine idée de « cohésion sociale et d’adaptation à la modernité »488.
Quoi qu’il en soit, les modes alternatifs de résolution des litiges présentent de nombreux
avantages par rapport à la procédure judiciaire classique. On peut ainsi relever : la célérité,
l'absence de formalisme, la confidentialité, le coût raisonnable ou à tout le moins négociable
de la procédure, l’économie de débats purement juridiques ou processuels (conflits de lois ou
de juridictions, procédure), la recherche avant tout d’une solution qui satisfasse à l’équité et
aux intérêts économiques des parties, la préservation des susceptibilités des Etats ou des
particuliers qui ne désirent pas être entraînés devant un tribunal, la disponibilité et la
compétence irréprochable du tiers par rapport au juge qui est astreint aux contraintes d’un rôle
encombré ou au respect d’horaires fixes d’audience et au devoir maîtriser non sans mal, un
volume impressionnant de domaines juridiques, l’opportunité de ne pas être tenu par le carcan
des règles de preuve du système juridique du for et de pouvoir élaborer ensemble (arbitre et
parties) la procédure de réception des preuves la mieux adaptée au cas particulier.

486
EL-HAKIM J., Les modes alternatifs de règlement des conflits dans le droit des contrats, R.I.D.C., 1997,
p. 347.
487
Recommandation 98/257/CE de la Commission concernant les principes applicables aux organes
responsables pour la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation. DG XXIV, 30 mars 1998, disponible
sur: http://europa.eu.int/comm/consumers/policy/developments/acce_just/acce_just02_fr.html.
488
D’HUART V., Arbitrage et modes alternatifs de règlement des conflits, CUP 2002, vol. 59, pp. 5-56, pp. 12-
17.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 190

382. Fréquence d’utilisation. En raison de ces multiples avantages, ces modes de résolution des
litiges, qui connaissent un succès important aux Etats-Unis depuis plus de vingt ans, gagnent
peu à peu le continent européen. Des centres de médiation et d’arbitrage fleurissent dans
différents secteurs en réponse à une demande pour pallier les inconvénients et la lourdeur du
système judiciaire489. On peut s’attendre à ce que ces avantages soient également exploités
dans le domaine des transactions bancaires et financières. Les MARD agissent en
complémentarité de la justice étatique plus qu’ils ne s’y substituent : il en va de la
préservation de l’Etat de droit.

383. Inconvénients. Il est néanmoins important de souligner que si les modes alternatifs de
résolution des litiges offrent de nombreux avantages, particulièrement dans le domaine du
commerce électronique, ils comportent également certains risques comme, par exemple, la
mise à l’écart des règles de preuve. De plus, il peut exister un danger de confusion dans
l’esprit du justiciable entre les règlements judiciaires et extrajudiciaires des litiges. Il apparaît
donc primordial d’insister sur les différences fondamentales qui existent entre ces deux types
de règlement des litiges pour, d’une part, éviter la confusion et, d’autre part, préserver
l’efficacité et l’autonomie de ces modes alternatifs de résolution des conflits.

384. Garanties. Pour ces raisons, les procédures extrajudiciaires doivent être soumises à des
critères minimaux de garanties procédurales, dont l’importance peut varier selon le caractère
contraignant de l’intervention et de la décision du tiers (arbitrage ou simple médiation). C’est
l’objet de la recommandation précitée du 30 mars 1998, qui tend à encourager et à définir le
respect de certains principes essentiels par les organes offrant des modes alternatifs de
règlement des litiges, afin d’assurer la protection des droits des consommateurs et d’accroître
leur confiance dans ces systèmes. La diversité des MARD (§1) et l’intérêt qu’ils présentent,
s’ils trouvent naturellement à s’appliquer dans ce domaine, ne sont néanmoins pas très
répandus dans le domaine bancaire et financier (§2).

489
Pour un exemple de mode alternatif de résolution des litiges en ligne, v. GAUTRAIS V., BENYEKHLEF K.
et TRUDEL P., Cybermédiation et cyberarbitrage : l’exemple du CyberTribunal, DIT, 1998/4, p. 46.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 191

§ 1er. La diversité des modes alternatifs de règlement des différends

385. Ressemblances et distinctions. Les modes de résolution extrajudiciaire des litiges sont
nombreux et divers. Leur point commun est de se dérouler en dehors des cours et tribunaux
étatiques. Les modes les plus connus sont la médiation, la conciliation et l’arbitrage. Au-delà
de ces modes, il existe d’autres méthodes de règlement des litiges qui consistent soit en une
variante, soit en une combinaison des trois modes principaux. La conciliation et la médiation
sont très similaires et les distinguer est malaisé. Toutes deux supposent l’intervention d’un
tiers, neutre et indépendant, qui va essayer de rapprocher les parties, d’examiner les solutions
possibles et d’aider celles-ci à parvenir à un accord qu’elles jugent mutuellement acceptable.
Pour une partie de la doctrine, le rôle du conciliateur se limite à aider les parties à chercher un
accord sans proposer de solutions, tandis que le médiateur irait au-delà de la simple
conciliation en proposant des solutions au règlement du différend. Le médiateur est en
quelque sorte un « conciliateur particulièrement actif »490. D’autres auteurs pensent que le
médiateur, à l’inverse du conciliateur, s’abstient de faire des recommandations491. Quoi qu’il
en soit, dans l’un et l’autre cas, le but ultime de ces processus est de pacifier un conflit et
d'aboutir à une solution. Nous proposons donc d’utiliser ces termes indifféremment.
Indiquons toutefois que, selon l’optique de la recommandation de la Commission du 30 mars
1998, les principes s’appliquent uniquement au règlement du litige par la proposition d’une
solution et non par la simple tentative de rapprochement des parties.

386. L’arbitrage492. Il s’agit d’une méthode privée de résolution des litiges aux termes de laquelle
les parties confient volontairement la résolution définitive de leur différend à des arbitres
privés. C’est un « mode de juridiction non-étatique, à base conventionnelle par lequel les
parties choisissent une ou plusieurs personnes privées ; le tribunal arbitral généralement
composé d’un ou de trois arbitres, est investi de la mission de juger, au besoin en équité
(amiable composition493), le différend qui les oppose »494. Le recours à l’arbitrage peut

490
CARLE G., L’A.D.R. a-t-elle un avenir en Belgique ? Quel rôle pour le juriste d’entreprise, in Liber
Amicorum, Commission droit et vie des affaires, 40ème anniversaire (1957-1997), Bruxelles, Bruylant, 1998,
p. 369.
491
SHWARTZ E., La conciliation internationale et la C.C.I., Bull. Cour int. d’arbitrage de la C.C.I., nov. 1994,
p. 6.
492
Pour une distinction entre « arbitrage contractuel » et « arbitrage juridictionnel », v. l’arrêt de la cour d’appel
de Versailles, 1ère ch., 4 mars 2004, obs. BEGUIN J., JCP G, 27 avril 2005, n° 17, p. 779.
493
La clause d’amiable composition donne une large liberté d’appréciation aux arbitres qui sont habilités à
trouver une solution honnête et équitable sans être tenus d’appliquer strictement la règle du droit. (CARLES G.,
op. cit., p. 365).
494
DE LEVAL G., Institutions judiciaires. Introduction au droit judiciaire privé, Ed. Collection scientifique de
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 192

intervenir soit à la suite à d’une clause compromissoire, soit à la suite d’un compromis, selon
que le litige est à naître ou bien déjà né.

387. Autres MARD. Outre la médiation/conciliation et l’arbitrage, il existe toute une série de
méthodes de règlement des litiges qui constituent soit une variante, soit une combinaison de
ces trois modes. Parmi les variétés les plus courantes des procédés de règlement amiable, on
peut notamment relever la « co-médiation » (A), la « last-offer mediation » (B), la « med-
arb » (C), le « conseiller neutre » et les « Dispute review board » (D), le « mini-trial » (E) et
la « tierce décision obligatoire » (F). A côté de ces MARD, se sont développés les ODR
(online dispute résolution) comme mode de résolution des litiges en ligne (G). Ce nouvel outil
est à la fois plus efficace, moins onéreux et plus flexible.

A. La « co-médiation »

388. Description. La « co-médiation » fait intervenir deux médiateurs qui ont en principe des
compétences différentes et complémentaires dans la conduite des pourparlers.

B. La « last-offer mediation »

389. Définition. La « last-offer mediation » est un procédé par lequel chacune des parties présente
à un tiers une proposition, le tiers devant obligatoirement choisir l’une d’elles. Cette méthode
a pour avantage d’inciter chacune des parties à soumettre une proposition raisonnable, de
crainte que le tiers ne tranche en faveur de la proposition de l’autre partie.

C. La « med-arb »

390. Procédé intermédiaire. La « med-arb » se situe entre la médiation et l’arbitrage et vise le


procédé par lequel les parties stipulent dans leur convention de médiation qu’à défaut
d’accord des parties à l’issue de celle-ci, le conflit sera tranché soit par une transaction, soit
par une sentence arbitrale495, par le médiateur lui-même ou un tiers. Remarquons qu’en cas de

la Faculté de Droit de Liège, 1992, p. 21, n° 7.


495
La notion de sentence arbitrale consacrée jusqu’ici par la cour d’appel de Paris (MAYER P., note sous CA
Paris, 29 avril 2003 : JDI 2004, p. 511, spéc. p. 518) était critiquée parce qu’elle excluait, à tort, de son champ
certaines décisions. La cour d’appel de Paris a élargit la portée de sa définition de sentence arbitrale dans un arrêt
du 7 octobre 2004, JCP G, 27 avril 2004, n° 17, obs. ORTSCHEIDT J.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 193

succès de la médiation, la possibilité de transformer l’accord obtenu en sentence arbitrale peut


poser problème au regard du principe du contentieux des attributions de l’arbitre. Ce dernier
n’est valablement saisi qu’en cas de litige et il ne peut prendre acte de la transaction par
laquelle les parties mettent fin au litige qu’à la condition d’avoir été saisi de la contestation. Si
les parties ont déjà résolu la contestation avec l’aide du médiateur, elles ne peuvent dès lors
décider d’un arbitrage496. Par contre, en cas d’échec de la médiation et si la convention prévoit
un cumul de la fonction de médiateur et d’arbitre, la légalité de cette méthode se pose au
regard du principe de l’impartialité de l’arbitre. En outre, elle risque de fausser le
fonctionnement normal de la médiation par l’appréhension des parties de voir utiliser des
pièces ou des informations fournies par celles-ci dans l’arbitrage subséquent, même si la
confidentialité inhérente à la médiation interdit à l’arbitre d’utiliser dans la procédure arbitrale
des éléments de fait et de preuve réunis au cours de la médiation. En revanche, si l’arbitre est
distinct du médiateur, la question de son impartialité ne pose plus de problème. De même, le
contentieux de ses attributions ne risque pas d’être mis en cause puisque, par hypothèse, la
contestation n’a pas été résolue497.

D. Le « conseiller neutre » et le « Dispute review board »

391. Exécution du contrat. Le « conseiller neutre » est un expert neutre et impartial qui, pour
prévenir les conflits qui pourraient survenir au cours de l’exécution d’un projet, donne des
avis et recommandations qui ne lient pas les parties498. Dans une même optique, par les
« Dispute review board », les parties prévoient un collège de médiateurs indépendants qui
traite des différends qui surgissent au cours de l’exécution même du contrat et donne des
recommandations non contraignantes pour les parties499.

E. Le « mini-trial »

392. La simulation. Par le « mini-trial », les parties, éventuellement assistées de leurs conseils,
simulent devant un animateur impartial un procès judiciaire afin qu'elles se fassent une idée

496
THILLY A. et VAN COMPERNOLLE J., Les modes de pacification extra-judiciaires, heurs et malheurs,
R.I.D.C., 1998, p. 89.
497
Ibid., p. 90.
498
EL-HAKIM J., op. cit., p. 349.
499
THILLY A. et VAN COMPERNOLLE J., op. cit., p .65.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 194

de leur litige comme le ferait le tribunal et qu’elles puissent ainsi en évaluer les risques et
conclure une transaction acceptable qu’elles négocient sous la conduite de l’animateur.

F. La « tierce décision obligatoire »

393. L’évaluation. La « tierce décision obligatoire » suppose que les parties donnent pour mission
à des tiers de procéder à une évaluation qu’elles s’engagent à accepter définitivement.
L’évaluation est donc considérée comme un avis obligatoire ou contraignant. Pareil procédé
doit être considéré comme une convention sui generis tirant sa force obligatoire de l’article
1134 du Code civil.

394. Bilan. Ces modes alternatifs de règlement des différends constituent donc une catégorie
ouverte dont le noyau central est l’existence d’un litige et l’intervention d’un tiers qui propose
– voire impose – une solution acceptable pour les parties. Il est évident que ces divers
mécanismes pourraient, selon le besoin des parties, être utilisés pour les litiges dans le
domaine des transactions bancaires et financières. Néanmoins, ils sont caractérisés par une
présence physique des parties ou des tiers intervenants, ce qui peut paraître paradoxal avec la
réalité dématérialisée de l’internet. C’est pourquoi les ODR se sont développés500.

G. Les systèmes d’ODR

395. L’adaptation des modes de résolution à l’Internet. Tous les modes de communication sont
mis à la disposition des parties pour favoriser la solution du différend : courriels, chats,
visioconférence… Il y a quatre principaux systèmes d’ODR501 : la négociation automatique
(automated negociation), la négociation assistée par ordinateur, la médiation en ligne,
l’arbitrage en ligne. La ressemblance est évidente avec les MARD précédemment évoqués et
les ODR peuvent paraître particulièrement adaptés aux micro-litiges internationaux nés en
ligne. Il reste que pour l’arbitrage en ligne, les sentences ne sont pas encore juridiquement
reconnues. Les avantages de ces modes de résolution sont indéniables : rapidité, économies,
confort, une absence de rattachement à un ordre juridique national ; en revanche, certains

500
Pour in inventaire détaillé de ces pratiques, v. MATHIEU M.-E., op. cit., n° 311 et s., p. 291.
501
RUVET C., la procédure UDRP (Uniform Domaine Name Dispute Resolution Policy) au sein des modes
complémentaires de règlement des différends : aspects procéduraux, 2002-2003. , DEA en Propriété
intellectuelle et Nouvelles Technologies, Ulg-Faculté de Droit, p. 16., disponible sur : l’http://www.droit-
technologie.org/2_1.asp?dossier_id=112.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 195

inconvénients persistent : les parties ne sont pas face-à-face, le respect des garanties
minimales n’est pas assuré, et on peut souvent reprocher un manque d’investigation. S’ils
semblent remporter un certain succès et s’ils participent d’un mouvement « d’autorégulation
du cyberespace502 », il n’est pas évident que, s’agissant de litiges issus d’opérations bancaires
et financières, les parties souhaitent s’éloigner d’un cadre institutionnel.

§ 2. L’utilisation des modes alternatifs de règlement des litiges dans le secteur


bancaire et financier

396. Un recours limité. Les modes alternatifs de règlement des litiges sont nombreux. Il faut
néanmoins constater que les mécanismes les plus élaborés et utilisés sont l’arbitrage ainsi que
la médiation. Il est évident que les litiges en matière bancaire et financière peuvent aussi faire
l’objet d’une procédure d’arbitrage ou simplement de médiation503. En effet, l’efficacité, la
rapidité et la confidentialité généralement reconnues à ces procédés devraient être de nature à
attirer les investisseurs et opérateurs. Il semble que, pour l’instant, le recours à ces
mécanismes reste limité sur les marchés financiers français504.Quant à la médiation bancaire
déjà adoptée par plusieurs grandes banques depuis les années 1990, elle a été étendue à tous
les établissements de crédit par la loi MURCEF505. Désormais, chaque client en conflit avec sa
banque a le droit de saisir un médiateur, généralement choisi en raison de sa compétence et de
son impartialité pour examiner sa requête506. La procédure de médiation est gratuite et l’avis
rendu à l’occasion d’un litige sera respecté par l’établissement concerné.

397. L’ordre public. En ce qui concerne l’arbitrage, l’explication de ce manque de succès trouve
probablement sa principale cause dans la question de la validité de l’arbitrabilité d’un litige507.
En effet, on sait que le concept d’ordre public est souvent présent dans le domaine de la
législation financière. Or, l’article 2060 du Code civil interdit le compromis dans toutes les

502
RUVET C, Ibid.
503
Un arrêt de la cour de cassation du 30 mars 2004 portant sur une question de démarchage, est venu confirmer
la percée de l’arbitrage international dans les litiges impliquant un consommateur, JCP G, 27 avril 2005, n° 17,
p. 779, obs. SERAGLINI C.
504
GRANIER T. et JAFFEUX C., op.cit., p. 169. On peut citer par exemple les deux règlements d’arbitrage qui
ont été établis par le Conseil des marchés financiers pour les opérations réalisées sur le MATIF et pour la
compensation d’opérations par Clearnet SA ainsi que la procédure de médiation proposée par la Commission des
opérations de bourse.
505
CONSTANS E., Les progrès de la relation banques-consommateurs, Banque magazine, octobre 2004, n° 662,
p. 35.
506
Article L.312-1-3 du Code monétaire et financier
507
MARINI P., Arbitrage, médiation et marchés financiers, RJ. Com., 2000, p. 155 et s.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 196

matières qui intéressent l’ordre public mais cela ne devra pas conduire à écarter
automatiquement la compétence de l’arbitre. L’interprétation généralement donnée à l’article
2060 du Code civil ouvre partiellement la voie à l’arbitrabilité des litiges dans la matière des
marchés financiers508. Il convient néanmoins d’analyser au cas par cas le caractère d’ordre
public ou non des règles dont l’application est demandée à l’arbitre.

398. Les autorités de marchés. Comme le soulignent les Professeurs T. GRANIER et


C. JAFFEUX, un autre problème plus crucial se pose. Il s’agit des limites de l’arbitrage qui
résultent des attributions exclusives des autorités du marché. Ainsi elles peuvent, par exemple,
prononcer des injonctions, des sanctions et exercent ce faisant un pouvoir de police que le
législateur leur a accordé. Un arbitre ne peut se substituer à ces autorités dans leur domaine de
compétence509.

399. Le caractère professionnel. Une troisième limite au recours à l’arbitrage peut exister
lorsqu’il est envisagé à l’égard d’un investisseur « ordinaire ». En effet, l’article 2061 du
Code civil, qui a été modifié récemment par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sur les
nouvelles régulations économiques, dispose que : « sous réserve des dispositions législatives
particulières, la clause compromissoire est valable dans les contrats conclu à raison d’une
activité professionnelle ». Contrairement à la précédente mouture de l’article 2061 du Code
civil, le critère d’appréciation de la validité d’une clause compromissoire n’est plus celui de la
« commercialité de l’acte »510 mais celui du « caractère professionnel ou non de l’activité »511.
Désormais, il convient de distinguer entre l’investisseur qui réalise une transaction financière
dans un cadre professionnel et celui qui la conclut dans un cadre privé. Dès lors, si un
établissement financier insère une clause d’arbitrage dans un contrat établi avec un
investisseur réputé non professionnel, sa nullité pourrait être soulevée devant le juge. Le nœud
du problème réside cependant dans l’étendue de l’expression « à raison d’une activité
professionnelle ». Faut-il que la conclusion de transactions financières relève de la profession
de l’investisseur ? Ou bien suffit-il que l’investisseur, dans le cadre de la gestion de son
patrimoine financier, donne des ordres financiers dans le contexte d’une activité
508
Ibid.
509
GRANIER T. et JAFFEUX C., op.cit., p. 169.
510
En effet, l’investisseur ordinaire étant réputé comme un investisseur ne donnant pas des ordres de bourse de
façon régulière, les actes qu’il accomplissait n’étaient pas considérés comme commerciaux. Dès lors, un juge
aurait très probablement annulé une clause compromissoire insérée dans les conditions générales applicables à
cet investisseur.
511
JAROSSON C. H., Le nouvel essor de la clause compromissoire après la loi du 15 mai 2001, JCP G, 2001, I,
333.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 197

professionnelle ayant éventuellement un autre objet que le secteur financier ? Il appartiendra à


la jurisprudence, au gré des affaires qui lui sont présentées, de répondre à ces questions.

400. La clause compromissoire512. Hormis ces trois réserves, le recours à l’arbitrage ne doit pas
rencontrer de problèmes particuliers en matière financière. On envisage donc aisément
l’introduction de clause compromissoire dans les contrats conclus entre des opérateurs
professionnels, mais aussi dans ceux conclus entre des opérateurs professionnels et des
investisseurs « qualifiés » au sens de l’article L. 411-1 du Code monétaire et financier. En
effet, l’investisseur qualifié est considéré comme un investisseur averti des risques des
marchés car il accomplit de manière habituelle – et probablement de manière professionnelle
– des opérations financières. La validité de la clause d’arbitrage ne devrait, dans ce cas de
figure, pas être remise en cause.

401. La médiation. Pour ce qui est de la médiation, le recours à ce mode de règlement alternatif de
résolution des litiges pose bien moins de problèmes que l’arbitrage513. Cela s’explique par le
caractère contractuel de la solution donnée par les parties au litige. En effet, contrairement à
l’arbitrage, le tiers intervient non pas pour imposer son avis, mais simplement pour proposer
aux parties un projet de solution. C’est seulement si l’issue convient aux parties que celles-ci
l’adopteront sous la forme d’une transaction. La force obligatoire de la solution trouve donc
son origine dans la rencontre de volonté des parties sur celle-ci. On comprend que les
restrictions qui existaient pour l’arbitrage – tant sur le plan de la matière en cause que sur
celui des personnes susceptibles d’y participer – ne sont pas d’application pour la médiation,
qui a de ce fait un bel avenir en matière de marchés financiers.

402. Bilan. L’insuccès relatif des modes alternatifs de règlement des conflits dans le secteur
financier pourrait prendre un nouveau tournant, car on peut s’attendre à ce que la place
française s’aligne sur celles de ses homologues anglo-saxonnes, qui exploitent déjà largement
ces mécanismes. L’accroissement des transactions en ligne devrait aussi stimuler l’intérêt des
parties de recourir à ces modes. Enfin, le législateur européen a pris des mesures en vue
d’encourager le recours aux modes alternatifs de règlement des litiges.

512
La cour d’appel de Versailles a jugé dans un arrêt du 31 mars 2005 qu’un litige né de pourparlers ultérieurs au
contrat contenant la clause compromissoire n’est pas arbitrable si les pourparlers ne forment pas avec le contrat
un « ensemble contractuel unique », JCP G, 19 octobre 2005, n° 42, p.1946, obs. BEGUIN J.
513
Médiation et conciliation : de nouveaux horizons pour les professionnels du droit, dossier in Droit et
Patrimoine, 1999, n° 77, p. 35 et s.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 198

Section 2. Le développement des modes alternatifs de règlement des litiges


encouragé par le législateur européen

403. Les MARD comme outil de la confiance. L’Union européenne, soucieuse de promouvoir la
confiance mais aussi le développement du commerce électronique, souligne la nécessité de
pouvoir régler les litiges de manière efficace et adéquate par la voie de procédures
extrajudiciaires ou d’autres procédures comparables. C’est en effet une condition essentielle
pour que les parties puissent jouir totalement des possibilités offertes par le marché intérieur.

404. La création d’un réseau. Pour la plupart des services bancaires et financiers, et
contrairement aux pratiques de nombreux autres secteurs, un large éventail de solutions
extrajudiciaires est, d'ores et déjà, proposé à l'échelon national. Plutôt que de recréer ce qui
existe déjà, le plan d'action pour les services financiers (COM 1999/232) a suggéré que la
Commission étudie la possibilité de recourir aux infrastructures actuelles pour régler les
litiges transfrontaliers, en reliant les organes nationaux compétents en un réseau européen ad
hoc. Cette proposition se fonde sur la Recommandation n° 98/257 de la Commission du 30
mars 1998 concernant les principes applicables aux organes responsables pour la résolution
extrajudiciaire de litiges de consommation.

405. Objectifs. Le but d'un tel réseau européen est de faciliter l'accès des préjudiciables à des
procédures extrajudiciaires pour la résolution de litiges transfrontaliers, dans le cas où le
fournisseur de services financiers est établi dans un État membre autre que le leur. L'idée
fondamentale est d'instaurer une reconnaissance mutuelle et un échange d'informations entre
les organes nationaux compétents. Cette coopération vise essentiellement à permettre à tout
utilisateur de services bancaires ou financiers transfrontaliers d'en appeler à l'arbitrage d'une
tierce partie en cas de litige et ce même si le fournisseur n'est pas lié par le système de
règlement des litiges en vigueur dans le pays de résidence du préjudiciable.

406. Un accès national. A cette fin, la personne lésée se voit garantir l'accès à l'organe de
règlement des litiges auquel est soumis le fournisseur de services, via l'organe compétent de
son propre pays de résidence. Les systèmes de règlement extrajudiciaire des litiges portant sur
la fourniture de services financiers prennent des formes différentes, selon les États membres.
Certains pays ont opté pour une centralisation à l'échelon national, d'autres pour une
décentralisation régionale, voire locale. Par ailleurs, il existe aussi bien des systèmes publics
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 199

que privés. Le statut des décisions arrêtées par ces systèmes varie également, de simples
recommandations pour les deux parties (émanant, par exemple, de l'office national suédois
pour les réclamations de consommateurs ou du service des réclamations de la Banque
d'Espagne), à des décisions ayant un caractère contraignant pour le fournisseur de services
(typiques de la plupart des instances privées de médiation dans le secteur bancaire et celui des
assurances). Il convient ici de souligner qu'à l'exception de quelques procédures d'arbitrage
spécifiques, les dispositifs de règlement extrajudiciaire des litiges ne privent jamais les
contractants de leur droit d'intenter une action en justice, s'ils jugent insatisfaisante la décision
de résolution amiable.

407. L’encouragement. La directive européenne du 8 juin 2000 sur le « commerce


électronique »514 consacre également un article 17, qui montre clairement la volonté de
garantir de meilleurs moyens de recours en rendant possible l’utilisation en ligne des
mécanismes extrajudiciaires de règlement des différends (médiation, arbitrage…)515. Cette
voie a été encouragée par une recommandation de l’OCDE puis relayée par la CNUCDI dans
le cadre de sa loi type sur la conciliation commerciale internationale516. Plus loin, c’est la
directive des services financiers à distance qui s’est attelée à cette tâche en demandant aux
Etats membres de mettre en place des procédures extra-judiciares de réclamation517.
L’encouragement au recours aux modes alternatifs de règlement des conflits vaut également
en matière financière comme le confirme une communication du 7 février 2001 de la
commission européenne sur le commerce électronique et les services financiers518. L’objectif
de l’article 17 de la directive sur le commerce électronique est de permettre une utilisation
effective des mécanismes de règlement extrajudiciaire des litiges, en particulier par voie
électronique. A cette fin, il impose aux Etats membres, d’une part, une obligation de résultat
de supprimer ou de modifier dans leurs législations les obstacles à cette utilisation (§ 1er) et,

514
Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects
juridiques de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur
(« directive sur le commerce électronique »).
515
Ibidem, p. 18.
516
MATHIEU M.-E., op. cit., n° 305, p. 286.
517
Ibid
518
De BROUWER F. et MARTY C., La communication de la commission européenne en matière de commerce
électronique et de services financiers, Banque et Droit, mars-avril 2001, n° 76, p. 16 et s. On notera également
que la Commission a lancé des initiatives comme la mise en place du réseau EEJ-NET (réseau européen
extrajudiciaire) ayant pour objet de relier les systèmes européens alternatifs de résolution des litiges nationaux
notifiés à la Commission. Dans le secteur des services financiers, le réseau FIN-NET (Financial Services
complaints Network) a été lancé et vise à relier les systèmes chargés au niveau national de la résolution
extrajudiciaire des plaintes concernant les services financiers, cités par GRANIER T. et JAFFEUX C., op.cit., p.
172.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 200

d’autre part, une obligation de moyens de veiller à ce que les organes de règlement
extrajudiciaire assurent le respect des garanties procédurales appropriées (§ 2).

§ 1er. Utilisation des modes alternatifs de règlement des litiges en ligne :


obligation de résultat de mettre fin aux obstacles juridiques

408. Les obstacles. L’article 17, §1er, de la directive sur le « commerce électronique » impose aux
Etats membres de « veille(r) à ce qu’en cas de désaccord entre un prestataire de services de
la société de l’information et le destinataire du service, leur législation ne fasse pas obstacle
à l’utilisation des mécanismes de règlement extrajudiciaire pour le règlement des différends,
disponibles dans le droit national, y compris par des moyens électroniques appropriés ».

409. Justification. Cette obligation trouve sa justification dans deux constats :


• Premièrement, la difficulté d’accès à la justice pour un nombre important de personnes
se heurte généralement à deux types d’entraves : d’une part, l’obstacle financier
résultant de la disproportion entre la valeur limitée de l’affaire et le coût d’une
procédure judiciaire aura un impact dissuasif sur le préjudiciable. D’autre part, les
barrières socio-culturelles et psychologiques inhérentes à la difficulté d’intervenir
localement en cas de litige avec un prestataire établi dans un pays tiers. En outre, les
difficultés linguistiques sont susceptibles de poser des problèmes dans le cadre de
relations transfrontières. Enfin, le manque de connaissance des droits étrangers et du
fonctionnement du système judiciaire des autres Etats décourage le citoyen d’intenter
une action afin de faire valoir ses droits. Face à ces obstacles, la mise en place de
procédures simples, rapides et efficaces s’avère nécessaire.
• Deuxièmement, l’insuffisance d’efficacité ou d’adaptation des mesures judiciaires et
extrajudiciaires au commerce électronique. Ainsi, il a été constaté que « certaines
mesures judiciaires ou extrajudiciaires qui peuvent être prises pour faire face à des
comportements illicites ou à des litiges sur Internet ne sont pas toujours suffisamment
efficaces ou adaptées pour pouvoir convaincre les prestataires de fournir des services
et les destinataires, en particulier les consommateurs, de les utiliser »519.

519
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à certains aspects juridiques du
commerce électronique dans le Marché intérieur, Exposé des motifs, COM (1998) 586 final, p. 13.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 201

410. Modification des législations. L’objectif de l’article 17, §1er, est de permettre une utilisation
effective des mécanismes de règlement extrajudiciaire des litiges, en particulier par voie
électronique520. Dans cette optique, le considérant n° 51 de la directive sur le commerce
électronique précise que « chaque Etat membre doit modifier toute législation susceptible de
gêner l’utilisation de mécanismes de règlement extrajudiciaire des litiges par les voies
électroniques. Le résultat de cette modification doit être de rendre réellement et effectivement
possible, en droit et dans la pratique, le fonctionnement de tels mécanismes, y compris dans
les situations transfrontalières ».

411. Une obligation de résultat. La directive oblige donc les Etats membres à faire un examen de
leur législation et à l’adapter, si nécessaire, afin de rendre possible le règlement extrajudiciaire
des litiges en ligne. Cette obligation est particulièrement contraignante en ce qu’elle s’analyse
en une obligation de résultat. Ainsi par exemple, si la législation nationale exige que la clause
compromissoire soit constatée par écrit, l’Etat membre doit faire en sorte que l’écrit en
question puisse revêtir tant la forme électronique que papier.

412. Valeur de l’accord. Si l’accord conclu par les parties suite à une médiation doit être signé par
celles-ci, le législateur national doit faire en sorte que l’on puisse reconnaître la même valeur
juridique à l’accord signé électroniquement que celle reconnue à un accord signé
manuscritement. Il convient également de veiller à ce que l’interprétation des notions de
notification, de dépôt, d’audience, de réunion, de descente sur les lieux, etc. ne fasse pas
obstacle à la validité juridique d’une procédure de règlement alternatif des litiges menée par
voie électronique. On constate une large similitude entre la rédaction de l’article 17, § 1er, de
la directive et celle de son article 9 qui fait obligation aux Etats membres de supprimer de
leurs législations tous les obstacles à la conclusion de contrats par voie électronique521.

520
Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative à certains aspects juridiques
du commerce électronique dans le marché intérieur, COM (1999) 427 final, p. 29.
521
Cet article 9 faisant l’objet d’un commentaire approfondi dans la seconde partie de cet ouvrage, nous
renvoyons le lecteur à celui-ci, v. infra n° 478 et s.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 202

§ 2. Conservation des garanties procédurales dans les mécanismes alternatifs


de règlement des litiges : obligation de moyens

413. Recommandations. Dans un souci d’une bonne administration de la justice, la directive sur le
commerce électronique insiste sur la nécessité pour les organes de règlement extrajudiciaire
des litiges de consommation d’appliquer les principes d’indépendance, de transparence, du
contradictoire, de l’efficacité de la procédure, de la légalité de la décision, de la liberté des
parties et de représentation dans le respect du droit communautaire522. Ces principes sont, en
réalité, ceux consacrés par la Recommandation 98/257/CE de la Commission du 30 mars
1998 concernant les principes applicables aux organes responsables pour la résolution
extrajudiciaire des litiges de consommation523. Dans cet esprit, le paragraphe 2 de l’article 17
de la directive précise que « les Etats membres encouragent les organes de règlement
extrajudiciaire, notamment en ce qui concerne les litiges en matière de consommation, à
fonctionner de manière à assurer les garanties procédurales appropriées pour les parties
concernées ».

414. Une obligation de moyens. Une version préliminaire de la directive imposait l’obligation
pour les Etats membres de veiller à ce que les organes de règlement extrajudiciaire des litiges
de consommation appliquent ces principes524. L’obligation « de veiller » a été remplacée dans
le texte définitif par une simple mention « d’encourager ». Néanmoins, on peut en déduire que
cette disposition suppose une intervention active de la part des Etats membres. Cette idée
ressort d’une version préliminaire de la directive qui fait référence à un « encadrement
juridique dans les Etats membres de ces mécanismes de règlement de différends »525. On peut
donc raisonnablement en déduire une obligation de moyens par laquelle les Etats membres
doivent mettre en place des mécanismes ou des ressources qui tendent à assurer le respect de
ces garanties procédurales par les organes de règlement extrajudiciaire des litiges de
consommation.

522
Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative à certains aspects juridiques
du commerce électronique dans le marché intérieur, COM (1999) 427 final, p. 29.
523
Recommandation 98/257/CE de la Commission concernant les principes applicables aux organes
responsables pour la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation. DG XXIV, 30 mars 1998, disponible
sur :http://europa.eu.int/comm/consumers/policy/developments/acce_just/acce_just02_fr.html.
524
Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative à certains aspects juridiques
du commerce électronique dans le marché intérieur, op. cit., p. 29.
525
Ibid., p. 10.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 203

415. Exigences. Il parait clair qu’une telle obligation nécessite un suivi des effets engendrés par les
mesures prises. Afin de pouvoir évaluer l’impact de l’utilisation et de l’application de
mécanismes de règlement extrajudiciaire de conflits dans le commerce électronique, le
paragraphe 3 de l’article 17 dispose que « les Etats Membres encouragent les organes de
règlement extrajudiciaire des litiges à communiquer à la Commission les décisions
importantes qu’ils prennent en matière de services de la société de l’information ainsi que
toute autre information sur les pratiques, les us ou les coutumes relatifs au commerce
électronique ». Dans la mesure où la directive sur le commerce électronique fait explicitement
référence aux principes posés par la Recommandation 98/257/CE, il est nécessaire d’examiner
les garanties procédurales que les organes de règlement extrajudiciaire des litiges sont invités
à respecter et les moyens que l’Etat pourrait mettre en œuvre afin d’assurer le respect de
celles-ci par les organes de règlement extrajudiciaire des différends (ceux-ci agissent « en
ligne » ou « hors ligne »).

416. Examen des principes. Principes de transparence (A), du contradictoire (B), d’indépendance
(C), d’efficacité (D), de liberté (E), de légalité (F) et de représentation (G) : l’examen des
différents principes mentionnés par la recommandation européenne s’inspire notamment de
divers rapports réalisés sur les modes alternatifs de résolution des litiges. Ces rapports sont le
Trans Atlantic Consumer Dialogue526, Consumers International 527
et le Global Business
Dialogue on electronic commerce528.

A. Principe de transparence

417. Contenu. L’organe qui intervient dans le cadre d’un mécanisme de règlement extrajudiciaire
des litiges doit tout mettre en œuvre en vue d’assurer la transparence de la procédure. Ainsi, la
Recommandation 98/257/CE dispose ce qui suit : « des moyens appropriés sont instaurés afin
de garantir la transparence de la procédure. Ces moyens comportent :
a. La communication par écrit ou sous toute autre forme appropriée, à toute personne qui
le demande, des informations suivantes :

526
Alternative Dispute Resolution in the Context of Electronic Commerce, février 2000, disponible sur :
http://www.tacd.org/papers/ecommerce/Ecom-12-00.rtf
527
Consumers International Disputes in Cyberspace. Online Dispute resolution for consumers in cross-border
disputes – an international survey, disponible sur : http://www.consumersinternational.org , p. 3.
528
Alternative Dispute Resolution and e-Confidence, Recommendations, 24 août 2000.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 204

- une description précise des types de litiges qui peuvent être soumis à l'organe ainsi
que les limites éventuellement existantes par rapport à la couverture territoriale et à
la valeur de l'objet des litiges ;
- les règles relatives à la saisine de l'organe, y compris les démarches préalables
éventuellement imposées au consommateur ainsi que d'autres règles procédurales,
notamment celles relatives au caractère écrit ou oral de la procédure, à la
comparution personnelle et aux langues de la procédure ;
- le coût éventuel de la procédure pour les parties, y compris les règles concernant le
partage des frais à l'issue de la procédure ;
- le type de règles sur lequel se fondent les décisions de l'organe (dispositions légales,
équité, codes de conduite, etc.) ;
- les modalités de prise de décision au sein de l'organe ;
- la valeur juridique de la décision, en précisant clairement si elle est ou non de
nature contraignante, pour le professionnel ou pour les deux parties. Si la décision
est d'une nature contraignante, les sanctions applicables en cas de non-respect de la
décision doivent être précisées. Il en est de même des voies de recours
éventuellement existantes pour la partie qui n'a pas obtenu satisfaction.
b. La publication, par l'organe compétent, d'un rapport annuel relatif aux décisions
rendues, permettant d'évaluer les résultats obtenus et d'identifier la nature des litiges
qui lui ont été soumis ».

418. Implications. La condition de transparence ne pose pas de problèmes majeurs. La priorité


devra être donnée à la mise à disposition de l'information requise au moyen des technologies
de l'information. Les outils informatiques actuels permettent aux parties de consulter à tout
moment et à n’importe quel endroit l’état d’avancement de la procédure, les documents
rédigés, etc. Ces techniques permettent également de prévenir automatiquement, une partie
par courrier électronique par exemple, lorsque son dossier est incomplet ou qu’un document y
a été déposé à son attention. Il faudra cependant veiller à ce que cette information puisse être
fournie par d'autres moyens afin d'informer également ceux qui n'ont pas un accès facile et
régulier à ces technologies.

419. Risque. Il convient toutefois de ne pas communiquer une trop grande quantité de
renseignements, au risque de supprimer l’objectif de transparence. L'information doit par
conséquent être structurée, indexée pour faciliter la recherche, claire et compréhensible pour
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 205

le préjudiciable, sachant que ce dernier n’est pas nécessairement familiarisé avec les modes
extrajudiciaires de résolution des conflits en ligne.

420. Rapport annuel. Enfin, on note l'intérêt évident de la publication d'un rapport annuel par
l'organe concerné. L'autorité devra veiller à la diffusion la plus large de ce rapport sur
l’Internet. A l'instar de ce que la Commission publie sur son site en matière d'accès à la
justice, les centres de modes alternatifs de résolution des litiges en France pourraient être
invités à publier un ensemble d’informations sur le site même de l'autorité publique.

B. Le principe du contradictoire

421. Définition. La recommandation 98/257/CE mentionne que : « la procédure à suivre comporte


la possibilité, pour toutes les parties concernées, de faire connaître leur point de vue à
l'organe compétent et de prendre connaissance de toutes les positions et de tous les faits
avancés par l'autre partie ainsi que, le cas échéant, des déclarations des experts ».

422. Le « caucus ». Ce principe – qui doit être lu en parallèle avec celui de transparence – ne
semble pas poser de problème quant à son application en ligne, si ce n'est la possibilité pour
les parties d'avoir recours au « caucus »529 en matière de médiation. Il semble toutefois que ce
procédé est peu fréquent en matière de médiation concernant des litiges de consommation.

C. Le principe d’indépendance

423. L’absence de liens. L'organe qui intervient en vue de proposer, voire d’imposer, une solution
aux parties doit offrir des garanties d’indépendance qui se caractérisent par « l’absence de
liens, notamment hiérarchiques ou financiers avec les parties, et l’absence d’intérêt personnel
à la solution du litige »530. Cela suppose une impartialité du tiers entendue comme « la faculté
que doit avoir l’arbitre, ne fût-il point parfaitement neutre, d’examiner en toute objectivité les
éléments qui lui sont soumis par les parties et d’en tirer les conséquences, en toute
conscience, sur le plan de la solution à donner au litige, sans se laisser influencer par le

529
Le « caucus » utilisé dans certaines médiations permet au médiateur d'avoir une entrevue confidentielle avec
une des parties.
530
Ibid., p. 54, n° 24.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 206

sentiment de connivence qu’il peut éprouver, par exemple, avec la partie qui l’a désigné »531
ou aussi comme « le fait de n’être pas favorablement ou au contraire défavorablement
prédisposé à l’égard de l’une ou de l’autre des parties au procès »532.

424. Une nécessité. La Recommandation 98/257/CE prévoit explicitement que l'indépendance en


matière de résolution extrajudiciaire des conflits de consommation est nécessaire dans le chef
du tiers intervenant qui aide les parties à trouver une solution ou qui rend lui-même une
décision : « lorsque la décision est prise de façon individuelle, cette indépendance est
notamment garantie par les mesures suivantes :
La personne désignée doit posséder la capacité, l’expérience et la compétence nécessaires
notamment en matière juridique ;
La personne désignée doit jouir d’un mandat d’une durée suffisante pour assurer
l’indépendance de son action sans pouvoir être destituée sans juste motif ;
Lorsque la personne désignée est nommée ou payée par une association professionnelle ou
par une entreprise, elle ne doit pas avoir travaillé au cours des trois dernières années
précédant son entrée en fonction, pour cette association professionnelle ou un de ses
membres pour l’entreprise en cause ;
Lorsque la décision est faite d’une façon collégiale, l’indépendance de l’organe responsable
pour la prise de décision peut être assurée par la représentation paritaire des consommateurs
et des professionnels ou par le respect des critères énoncés ci-dessus ».

425. Compétence du médiateur. Le médiateur doit pouvoir démontrer sa compétence et sa


connaissance de la matière sur laquelle porte le litige. Cette condition revêt une importance
particulière dans la matière bancaire et financière caractérisée par sa complexité et sa
technicité. De préférence, il doit avoir une expérience suffisante en matière judiciaire ou
arbitrale pour assister utilement les parties. En plus, il doit faire preuve de neutralité et
d’indépendance pour établir une relation de confiance avec les parties. Il ne peut avoir
d’intérêt personnel dans l’affaire et ne peut avoir de liens fonctionnels qui puissent faire
douter les parties de son objectivité dans le traitement du litige. La procédure de médiation est
caractérisée par sa souplesse et doit idéalement aboutir à un accord entre les parties.

531
Ibid., p. 53, n° 23.
532
LINSMEAU J., L’arbitrage sectoriel et les principes généraux du droit, in BUYLE J-P., LALIVE d'EPINAY
P., LINSMEAU J. et STORME M., Les modes non judiciaires de règlement des conflits : actes de la journée
d'études du 27 avril 1994,Bruylant, 1995, n° 23, p. 53.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 207

426. Garanties de l’arbitre. Tout comme le médiateur, l'arbitre doit être compétent et connaître la
matière sur laquelle porte le litige. Il doit également offrir des garanties d’impartialité et
d’indépendance. Par contre la procédure d'arbitrage est plus rigide que celle relative à la
médiation, en ce que l'arbitre a un rôle de juge dans la mesure où il rend une décision qui
s'impose aux parties.

427. Les organes de gestion des plaintes. La Recommandation 98/257/CE ne vise pas
expressément l'indépendance du service responsable de la gestion des plaintes et de leur
transmission à ces tiers intervenants, médiateur ou arbitre. Elle nous semble néanmoins
primordiale dans la mesure où ce service – semblable à un greffe ou un secrétariat – est dans
certains cas chargé de nommer les tiers intervenants, d’assurer le suivi des plaintes, de
connaître et de traiter les documents – souvent confidentiels – de la procédure.
L’indépendance de cet organe nous paraît par conséquent essentielle.

428. Coût et financement. En matière de conflits de consommation, les montants en jeu sont
généralement peu élevés. Il est unanimement reconnu, tant par les associations de
consommateurs que par les associations de professionnels, que la participation financière des
consommateurs à la mise en œuvre du mécanisme de règlement du litige doit être limitée
voire inexistante533. On peut raisonnablement penser que la compensation financière viendra
du secteur professionnel, ce qui risquerait cependant de créer un déséquilibre dans le
financement de l'organe et faire naître des craintes quant à la réelle indépendance de l’organe.
Il nous semble qu'à ce niveau, l'autorité publique a un rôle à jouer pour garantir cette
neutralité, notamment par exemple par l’octroi de subventions. Par contre, on peut se
demander si le postulat de base s’applique pour les transactions financières avec des
investisseurs privés. Les litiges relatifs à celles-ci pourraient régulièrement porter sur des
montants conséquents. Il ne semble donc plus excessif de demander une participation
financière à l’investisseur qui compte recourir à une procédure alternative.

D. Le principe de l’efficacité

429. Intérêt du Mard. Un des intérêts pour les parties de recourir à un mode alternatif de
règlement des litiges plutôt que de recourir à la procédure judiciaire traditionnelle consiste en

533
V. les études susmentionnées du TACD, Consumers International, GBDe et la Recommandation 98/257CE de
la Commission européenne, supra n° 416.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 208

l’efficacité du premier. En vue de poursuivre cet objectif, la Recommandation 98/257/CE


précise que : « l'efficacité de la procédure est assurée par des mesures garantissant :
- l'accès du consommateur à la procédure, sans être obligé d'utiliser un représentant
légal ;
- la gratuité de la procédure ou la fixation de coûts modérés ;
- la fixation de délais courts entre la saisine de l'organe et la prise de la décision ;
- l'attribution d'un rôle actif à l'organe compétent, lui permettant de prendre en
considération tout élément utile à la résolution du litige ».

430. Accessibilité et simplicité. Le caractère accessible de la procédure implique une simplicité


d'utilisation. Si la procédure de médiation semble accessible pour un justiciable sans qu’il
doive recourir à l’assistance d'un représentant légal, il n'en va pas nécessairement de même
pour l'arbitrage, spécialement si l’on se trouve en matière financière. Il n’empêche qu’il
appartient aux responsables de mécanisme alternatif de règlement des litiges de réduire autant
que possible les obstacles formels et contraintes inutiles qui pourraient réduire l’efficacité de
la procédure.

431. Gratuité. La gratuité de la procédure ou des faibles coûts est un des points les plus sensibles
de cette recommandation. Il est vrai tout d’abord que les conflits concernent généralement des
montants peu élevés. Le préjudiciable n'est en outre pas prêt à payer un service qu'il
considère comme lui étant acquis, à savoir celui de la défense et de la reconnaissance de ses
droits. Sur cette question, il convient pour l'autorité publique de s’interroger sur l’opportunité
de poser ou non un acte politique consistant à soutenir financièrement un organe de résolution
des litiges en matière de conflit de consommation sur Internet.

432. Rapidité. La résolution en ligne des litiges devrait assurer la rapidité de la procédure. En
matière d'arbitrage, cependant, il faudra veiller à ce que la rapidité de la procédure n’ait pas
pour effet de malmener le respect du principe du contradictoire.

E. Le principe de liberté

433. Implications. La Recommandation 98/257/CE prévoit que : « la décision de l'organe ne peut


être contraignante à l'égard des parties que si celles-ci en ont été préalablement informées et
l'ont expressément acceptée. L'adhésion du consommateur à la procédure extrajudiciaire ne
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 209

peut pas résulter d'un engagement antérieur à la naissance du différend, lorsque cet
engagement a comme effet de priver le consommateur de son droit de saisir les juridictions
compétentes pour le règlement judiciaire du litige ».

434. Conséquences. Ce principe insiste tout d’abord sur le caractère volontaire du recours à ces
modes extrajudiciaires. Il est étroitement lié au principe de transparence des services offerts
par l'organe de résolution des conflits. Ensuite, il prévoit que le contractant ne peut être lié par
une clause d'arbitrage qu'il aurait contractée avant la naissance du litige. Il conserve dans ce
cas le droit de saisir les juridictions publiques compétentes pour connaître de son litige. A
contrario, il semble pouvoir être obligé d’accepter une clause de médiation ou de conciliation
conclue avant la naissance du litige.

F. Le principe de légalité

435. Les dispositions impératives. La Recommandation 98/257/CE dispose que :« la décision de


l'organe ne peut avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui
assurent les dispositions impératives de la loi de l'Etat sur le territoire duquel l'organe est
établi. S'agissant de litiges transfrontaliers, la décision de l'organe ne peut avoir pour
résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions
impératives de la loi de l'Etat membre dans lequel le consommateur a sa résidence habituelle,
dans les cas prévus à l'article 5 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles. Toute décision est motivée et communiquée par
écrit ou sous toute autre forme appropriée aux parties concernées, dans les meilleurs
délais ».

436. Ambiguïtés. La rédaction de ce principe est particulièrement malheureuse et prête à


confusion. Doit-on déduire du texte que le préjudiciable bénéficie au minimum des
dispositions impératives de la loi sur le territoire duquel l'organe est établi et de celles de sa
résidence habituelle ; ces lois pouvant être éventuellement contradictoires ? Doit-on
également supposer qu’une différence est établie entre un litige national et un litige
transfrontalier ? Dans le doute, il semble plus adéquat de privilégier l'interprétation la plus
classique selon laquelle la décision de l'organe ne peut avoir pour résultat de priver le
justiciable de la protection assurée par la loi de l'Etat de sa résidence. La communication
électronique de la décision motivée doit pouvoir être acceptée suivant ce principe qui prévoit
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 210

la communication par écrit « ou sous toute autre forme appropriée » dans les meilleurs délais
de la décision.

G. Le principe de représentation

437. L’utilité. La Recommandation 98/257/CE prévoit que : « la procédure ne peut pas priver les
parties du droit de se faire représenter ou accompagner par un tiers à tout stade de la
procédure ». Dans l'hypothèse de la résolution des conflits en ligne, ce principe doit
déboucher sur la possibilité, notamment au niveau technique pour un tiers (un proche, un
avocat, une association de consommateurs ou de professionnels), de représenter ou
d'accompagner les parties. Ce principe revêt une importance particulière pour les litiges en
matière financière. En effet, en raison de la complexité de la matière, l’investisseur préjudicié
souhaitera souvent s’adjoindre les conseils d’un expert en ce domaine.
1ère Partie : Titre 3 : Chapitre 2 - Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges 211

CONCLUSION

438. Initiatives. On a vu qu’en matière bancaire et financière, des centres de médiation et/ou
d’arbitrage ont déjà été mis en place, que ce soit au niveau national ou européen. Ces organes
sont invités à mettre en œuvre les moyens raisonnables afin d’assurer le respect des principes
qui viennent d’être commentés. Il y va tant de leur crédibilité que de la protection du
justiciable.

439. Une accréditation ? Afin d’encourager ces différents organes de règlement extrajudiciaire
des litiges à respecter les garanties procédurales, l’Etat pourrait mettre sur pied un mécanisme
d’accréditation volontaire, à l’instar de ce qui se fait pour les prestataires de service de
certification en matière de signature électronique. Les centres qui le souhaitent seraient
soumis au contrôle de l’Etat ou d’une instance qu’il déléguerait à cette fin. L’accréditation
pourrait être invoquée par ces organes afin d’assurer les justiciables de leur sérieux et de leur
fiabilité, mais aussi du respect strict des principes consacrés par la Recommandation précitée.
Le contrôle pourrait porter sur les modalités de fonctionnement de ces organes, la désignation
des médiateurs et arbitres, etc.

440. Des subventions ? Une autre mesure d’encouragement pourrait aussi consister en l’octroi de
subsides aux organes accrédités. En outre, cette subvention renforcerait l’impartialité des
arbitres et médiateurs en évitant que ceux-ci soient rémunérés essentiellement par le secteur
professionnel. En plus, un tel système de subventions rendrait l’accès à ces procédures moins
onéreux pour le préjudiciable.

441. Bilan. L’octroi de l’accréditation ou des subsides soumettrait l’organisme responsable du


règlement extrajudiciaire des litiges à l’obligation d’établir un rapport annuel contenant les
décisions rendues en la matière, sans toutefois que les parties en cause puissent être
identifiées. Il appartiendra au législateur français de s’inspirer de ces mesures s’il le juge utile.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

442. Des outils pour le bon fonctionnement du marché. Décloisonné, accessible et sûr ainsi que
surveillé : telles sont les hypothèses principales à vérifier pour caractériser le bon
fonctionnement du marché communautaire des prestations bancaires et financières sur
l’Internet afin de parvenir à l’objectif d’en stimuler la croissance laquelle passe
inévitablement par la confiance des acteurs (investisseurs et établissement de crédit
notamment) dans ce marché. Ainsi, sur le plan juridique, il s’agit de créer un système
performant dans lequel les transactions bancaires et financières vont pouvoir se développer.
Dès lors, les différentes législations et réglementations apparaissent clairement comme des
moyens, des outils au service entier de l’objectif de confiance et, partant, de croissance du
marché. Cette construction s’appuie non seulement sur un socle de règles déjà en place mais
aussi sur des outils spécialement créés à cette fin.

443. Les particularismes. Un double particularisme participe à la difficulté de cette tâche. D’une
part, cette réglementation concerne le secteur particulier bancaire et financière, déjà
amplement réglementé, fermé, et souvent empreint d’ordre public. D’autre part, elle vise
l’Internet, nouveau mode de communication et de commercialisation encore non maîtrisé à
l’heure actuelle.

444. Une nouvelle appréhension. L’Internet agit comme catalyseur et accélérateur des
problématiques traditionnelles. Ces dernières ne sont pas propres à l’Internet et se retrouvent
dans le domaine bancaire et financier matérialisé (blanchiment, règlement des litiges…) ;
simplement, les caractéristiques de ce nouvel instrument de communication imposent une
appréhension différente de ces problèmes. Les relations investisseurs/prestataires – si elles
sont matériellement simplifiées et plus rapides – sont juridiquement complexifiées et
internationalisées à outrance ; de même, de nouveaux intermédiaires apparaissent
(certificateurs…) et la localisation des intervenants est rendue plus difficile. Mais il ne faut
pas céder aux peurs inhérentes à un nouveau canal de distribution. Même si la vision est
réductrice, juridiquement, c’est la définition de l’Internet.

445. Synthèse. Des solutions juridiques sont développées sur la base de textes anciens, éprouvés,
ce qui exclut quoi qu’il en soit l’appellation de zone de non droit. Toutefois, ces législations
Conclusion de la première partie 213

souffrent parfois d’un manque d’adaptation face à la réalité de l’Internet. Certains principes
pourtant clés dans telle législation sont souvent inopportuns (domicile) ; d’autres en revanche
mériteraient une consécration légale (intention du prestataire). Par ailleurs, les
réglementations propres au commerce électronique se veulent transversales et se heurtent à la
réglementation sectorielle du domaine bancaire et financier (agrément).

Bilan.

446. Le marché est-il décloisonné et accessible ? Au regard de la récente directive sur le


commerce électronique, on peut répondre globalement par l’affirmative. Le principe de la
circulation des services bancaires et financiers via l’Internet est consacré. Chaque prestataire –
établissement de crédit – peut, sur la base de la législation de son pays d’établissement,
proposer ses services à chaque ressortissant de chaque Etat membre de l’Union européenne, à
partir de son propre Etat d’établissement, c’est-à-dire en fin de compte, à partir de son propre
ordinateur. Les attentes des professionnels de la banque ont bien été entendues. Mais il ne faut
pas s’y tromper, si, théoriquement, ils peuvent pleinement bénéficier de l’opportunité de
l’Internet, l’accès aux marchés nationaux passe inévitablement par la conformité aux droits
nationaux. L’Internet est soumis aux mêmes contraintes que le marché matérialisé, à savoir :
agrément, règles de publicité, lois de police. Pratiquement, pour ne pas risquer une action en
responsabilité (lieu où s’est produit le dommage), les établissements de crédit, en l’absence
d’une harmonisation plus poussée, devront calquer leur offre sur le droit du pays destinataire,
en créant un site spécialement dédié aux ressortissants de ce pays ou bien, réciproquement,
limiter leur offre à un certain territoire.

447. Le marché est-il juridiquement sûr ? Cette question regroupe en réalité d’une part la
sécurité des transactions bancaires et financières et, d’autre part, l’existence d’un niveau élevé
de sécurité juridique, tant dans la prévisibilité des règles applicables que dans la résolution des
litiges.
Sur le premier point, la sécurité est relativement assurée : des garanties juridiques existent en
ce qui concerne la monnaie électronique, un paiement réalisé sur l’Internet n’est en fait pas
plus risqué, juridiquement et techniquement, qu’un paiement traditionnel : les moyens de
cryptologie utilisés par les établissements de crédit et leur libéralisation contribuent à rassurer
le grand public. Enfin les dispositions de la LEN instaurent un cadre juridique très sécurisé
(cadre répressif).
Conclusion de la première partie 214

Sur le second point, les législations traditionnelles s’accommodent tant bien que mal de la
réalité de l’Internet ; grâce à la réglementation sectorielle bancaire et financière, les notions de
« domicile » et « de liens les plus étroits » permettent d’identifier le juge compétent et
d’appliquer la loi de la banque aux litiges internationaux sur l’Internet. Mais, les MARD et
ORD, spécifiquement développés par et pour l’Internet, sont encore insuffisamment utilisés et
les parties à un conflit continuent de privilégier une résolution judiciaire de leurs différends.
Néanmoins, les encouragements des institutions communautaires pour ces types de résolution
des litiges devraient aboutir à une meilleure diffusion de ces procédures dont l’intérêt est
indiscutable. Pour autant, la rapidité (les ORD le montrent) tant recherchée ne doit pas, dans
le cadre de la résolution des litiges, être privilégiée par rapport aux garanties minimales
(contradictoire, investigations), gages d’une résolution efficace du conflit. Canal de
communication, voire de distribution, l’Internet ne remet pas en cause les prérogatives
régulières de l’Etat en matière législative.

448. Et le consommateur ? L’accessibilité et la sécurité sont des enjeux fondamentaux afin


d’attirer tant les établissements de crédit que les investisseurs sur le marché des transactions
bancaires et financières. L’investisseur doit pouvoir, grâce à un point d’entrée unique, avoir
accès à l’ensemble du marché communautaire ; l’analyse des législations nous fait pencher
plutôt en faveur de réglementations privilégiant les établissements de crédit car l’on fait peser
sur l’investisseur la responsabilité de savoir s’il peut ou non contracter. Ainsi, il paraissait
indispensable, dans la logique consumériste qui prédomine à l’heure actuelle, de renforcer la
protection de la partie économiquement faible aux transactions : le consommateur –
investisseur. C’est le but notamment de la récente directive 2002/65/CE du Parlement
européen et du Conseil du 23 septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de
services financiers auprès des consommateurs. La protection du consommateur est en effet au
cœur de la réglementation relative à la prestation des services bancaires et financiers sur
l’Internet.
DEUXIEME PARTIE

LA PRESTATION DE SERVICES
BANCAIRES ET FINANCIERS SUR
L’INTERNET ET LA PROTECTION
DES CONSOMMATEURS
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 216

OBSERVATIONS PRELIMINAIRES

449. La cyberconsommation. « Le pot de terre contre le pot de fer », c’est l’image reçue de la
situation du consommateur face au professionnel. Or, avec la place prise par le canal de
distribution qu’est l’Internet, ne doit-on pas désormais parler du « cyber pot de terre contre le
cyber pot de fer » ? En effet, si les premiers sites Internet se présentaient essentiellement sous
la forme de sites informationnels, désormais il s’agit de véritables boutiques virtuelles
permettant à l’internaute de faire son achat grâce à un « panier virtuel ». La vente à distance
présente l’indéniable avantage d’éviter le déplacement, mais permet également de réfléchir
avant de prendre la décision d’acheter. En contrepartie, le consommateur ne détermine son
choix qu’à la vue d’images ou de descriptions et s’expose de ce fait, au risque de ne pas être
satisfait. De même, en cas de défaut, il sera difficile de faire valoir des droits contre un
professionnel géographiquement éloigné. Il est également possible qu’après avoir passé et
payé sa commande, le consommateur ne reçoive rien. De plus, l’engouement pour le
commerce électronique participe au développement de la consommation transfrontière, et il
est désormais courant qu’un consommateur domicilié dans un pays conclue un contrat avec un
professionnel établi dans un autre pays. En matière bancaire et financière,
l’internationalisation des marchés constitue à la fois la cause et la conséquence des
innovations techniques et technologiques. En conséquence, les établissements de crédit
bénéficient cumulativement d’une augmentation du volume des transactions, d’un
élargissement spatial des opérations et d’une accélération dans la vitesse de réalisation des
opérations qui deviennent quasi instantanées, et qui peuvent être effectuées 24 heures sur 24.
Dans cet environnement dématérialisé et à dimension internationale, le cyber-
consommateur534 s’expose à devenir une « proie relativement facile » pour les cyber-
commerçants peu scrupuleux. Si l’autodiscipline des professionnels de la cyber-
consommation a permis d’assurer la protection, et par là, le développement des ventes et
prestations de services à distance, les abus sont multiples. Or, le droit de la consommation,
essentiellement national fut adapté à un environnement où les relations contractuelles sont
nouées sous forme papier. Ainsi, ces constats conduisent à affirmer qu’une évolution apparaît
nécessaire.

534
BRUGUIERE J.-M., Le « cyber-consommateur » dans la LCEN, JCP E, 20 janvier 2005, n° 3, p. 82.
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 217

450. Un droit de la consommation virtuelle ? « Le réseau des réseaux » ayant une dimension
internationale, les initiatives se sont multipliées afin que des règles communes soient
appliquées aux contrats conclus en ligne. Comme que le soulignent les Professeurs
T. BONNEAU et F. DRUMMOND535, « l’absence d’autorité centrale propriétaire du réseau
ne signifie pas qu’il existe un vide juridique ». Conséquence logique de sa réussite, un corpus
de règles juridiques relatif à l’Internet a progressivement vu le jour, au plan international,
européen et national.

451. Au plan international. La Commission des Nations Unies pour le Commerce International a
adopté dès le 16 décembre 1996 une loi type sur le commerce électronique complétée par
celle de la Chambre de Commerce Internationale. L’Organisation de Coopération et de
Développement Economique a défini, quant à elle, « les lignes directrices pour assurer la
protection du consommateur » le 9 décembre 1999 ; celles-ci sont certes dépourvues de force
obligatoire mais soulignent la nécessité d’une coopération entre les gouvernements, les
entreprises et les consommateurs au niveau national et international.

452. Au plan européen. Les instances communautaires tiraillées entre la volonté de parfaire la
libre circulation des capitaux et la libre prestation de services, d’une part et la protection du
consommateur536 d’autre part, ont également multiplié les textes afférents au commerce en
ligne : la directive 1997/7 en date du 20 mai 1997 « relative à la protection des
consommateurs en matière de commerce à distance », la directive 1999/93 « relative à la
signature électronique », la directive 2000/31 du 8 juin 2000 « relative à certains aspects
juridiques des services de sociétés de l’information et notamment du commerce électronique
dans le marché intérieur » dite « directive commerce électronique ». Plus récemment, la
directive 2002/65 relative « au service financier à distance » en date du 23 septembre 2002,
concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs
investisseurs, modifiant diverses directives (90/619/CEE, 97/7/CE et 98/27/CE), vise à fournir
un cadre juridique harmonisé et adéquat pour les contrats à distance en matière de services
financiers, tout en établissant un niveau approprié de protection des cyber-consommateurs.
Cette dernière directive semble donc combler une lacune juridique en établissant une base

535
BONNEAU T. et DRUMMOND F., Droit des marchés financiers, Paris, Economica, 2005, p. 792, n°1053.
536
Notons à ce sujet que la proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux
contrats de crédit aux consommateurs modifiant la directive n° 93 /13/CE du Conseil [COM (2005) 483 final],
du 10 octobre 2005, contient aussi des dispositions relatives à la protection du consommateur. V. CHAILLOUX
C., Les nouveaux habits de la proposition de directive sur le crédit à la consommation, Contrats conc. consom.,
novembre 2005, p.4.
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 218

commune pour les conditions dans lesquelles les contrats à distance sont conclus en matière
de services financiers537.

453. Au plan national. Dans l’ordre interne, dès 1998 le Conseil d’Etat dans un rapport intitulé
« l’Internet et les réseaux numériques538 », affiche la protection du consommateur comme une
priorité. Le rapport constate que « le commerce électronique ne connaîtra un véritable essor
auprès des particuliers que si le cadre juridique des transactions électroniques est clarifié et
adapté afin de renforcer la confiance des consommateurs ». Bien que la Haute juridiction
confirme que l’ensemble de la réglementation existante est applicable aux services en ligne,
de nombreux textes propres à l’Internet ont vu le jour, au premier rang desquels la loi sur la
sécurité quotidienne en date du 15 novembre 2001, la loi de sécurité financière du 1er août
2003 dans son volet protection du consommateur contre le démarchage financier, la LEN
ainsi que l’ordonnance du 6 juin 2005539 qui a récemment transposé la directive sur les
services financiers à distance. De même, il convient d’opérer une distinction entre le
commerce électronique qui s’adresse aux professionnels (on parle de B to B – business to
business) et celui qui s’applique à des consommateurs (on parle de B to C – business to
consumer). Ce n’est que dans ce dernier cas qu’il est indispensable de tenir compte des
dispositions d’ordre public du droit de la consommation, codifié depuis 1993, et qui
réglemente les ventes à distance (articles L. 121-16 et suivants du Code de la consommation
et arrêté du 3 décembre 1987 relatif à l’information des consommateurs sur le prix). Aussi,
peut-il paraître opportun de préciser certaines notions clés que sont le consommateur, la
prestation de service et la vente à distance.

454. Droit de la consommation. Il est désormais classiquement enseigné que les relations entre
professionnels et consommateurs sont naturellement déséquilibrées, notamment du fait de la
compétence du professionnel et de sa dimension financière. Pour cela, les consommateurs
sont présentés à la fois comme « les rois et les esclaves de cette société de consommation »540.
Dans les années 1970, le « consumérisme » est apparu aux Etats-Unis avant d’envahir

537
Par ailleurs, elle modifie également la directive 90/619/CEE, désormais abrogée par la directive 2002/83/CE
sur l'assurance-vie, et la directive 98/27/CE relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts
des consommateurs.
538
Internet et les réseaux numériques, rapport adopté par l’Assemblée générale du Conseil d’Etat le 2 juillet
1998, p. 9.
539
Ordonnance n° 2005-648 du 6 juin 2005 relative à la commercialisation à distance de services financiers
auprès des consommateurs.
540
BOURGOIGNIE T., Elément pour une théorie du droit de la consommation : au regard du droit belge et du
droit de la Communauté Economique Européenne, Bruxelles : Bruylant et E.Story-Scientia. 1988.
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 219

l’ensemble de l’Europe occidentale. Le droit de la consommation cherche à rééquilibrer les


relations entre professionnels et consommateurs, mettant à la charge des premiers des
obligations qui sont autant de droits pour les seconds. Cette nouvelle branche du droit ne va-t-
elle pas évoluer avec le récent développement de l’Internet et les risques inhérents à ce
nouveau canal de distribution ?

455. Définitions clés. De façon tout à fait paradoxale, aucune définition des sujets du droit de la
consommation ne peut être trouvée dans les textes de loi, alors que ceux-ci y font
expressément référence. Bien que la commission de refonte du droit de la consommation ait
proposé deux définitions lors de la présentation du projet de code en 1990, aucune n’a
effectivement été retenue par le texte final. Du fait du silence de la loi, cette tâche a été
assumée par la doctrine et la jurisprudence.

456. Le professionnel. C’est la personne physique ou morale qui agit dans le cadre d’une activité
habituelle et organisée de production, de distribution ou de prestation de services. En
conséquence, le droit de la consommation a vocation à s’appliquer à toutes sortes d’activités
professionnelles et cela inclut celles des établissements bancaires et financiers qui répondent à
aux termes de la définition précitée.

457. Le consommateur. En droit comparé, le consommateur apparaît – d’après l’article 1384 du


Code civil québécois, comme « la personne physique qui contracte avec un professionnel
pour la satisfaction de besoins professionnels ou domestiques ». Les instances
communautaires ont défini, en 1993, le consommateur comme « toute personne physique qui
agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle541 ». Si le droit
français ne connaît pas de définition légale du consommateur, il est désormais unanimement
admis, tant par la doctrine que par la jurisprudence nationale, que le consommateur est une
personne physique ou morale qui conclut des contrats, pour satisfaire des besoins sans rapport
direct avec « sa sphère habituelle d'activité et sa spécialité »542, avec un professionnel de la
vente ou de la prestation de service objet du contrat. En conséquence, à la question de savoir
s’il s’agissait d’élargir la notion de consommateur, les tribunaux ont répondu par la négative

541
Directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus
avec les consommateurs, article 2, B).
542
Civ. 1ère 24 janvier 1995, Bull. Civ. 1995, I, n° 54 p. 38.
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 220

et ainsi mis fin aux divergences de la jurisprudence. En effet, alors que certaines décisions543
avaient considéré un professionnel d’une spécialité différente comme un non professionnel,
d’autres544 avaient admis que ce dernier ne pouvait être qu’une personne contractant pour des
besoins non professionnels. Deux éléments paraissent alors essentiels pour retenir la
qualification. D’une part, un rapport inégalitaire entre un professionnel et un non
professionnel doit se trouver caractérisé, d’autre part un objectif de consommation doit être
visé par le non professionnel. Dans l’hypothèse d’un usage mixte, c’est-à-dire professionnel et
non professionnel, la doctrine545 considère que la règle en vertu de laquelle l’accessoire suit le
principal doit s’appliquer. La jurisprudence de la première chambre civile de la Cour de
cassation semble avoir consacré cette thèse dans un arrêt en date du 4 mai 1999546 relatif à
l’achat d’un véhicule à usage mixte financé par un crédit.

458. Les épargnants faisant des actes de placement. Si le consommateur utilise ses économies
pour la satisfaction immédiate de ses besoins, l’épargnant, au contraire, conserve ses
disponibilités et éventuellement les place. En se sens, l’épargne est l’inverse de la
consommation. Aussi, la question mérite d’être posée, les épargnants bénéficient-ils des
dispositions consuméristes ? La réponse ne peut être que positive, étant entendu que
l’épargnant reste un profane qui contracte avec un professionnel du domaine bancaire et
financier. Il en est ainsi en matière de clause abusive (L. 132-1 et suivants du Code de la
consommation), de démarchage ou de publicité. Pourtant, il faut relever qu’une analogie
totale entre épargnants et consommateurs serait excessive, voire erronée, certaines règles étant
destinées exclusivement aux premiers et réciproquement. Reste à déterminer si ce constat est
transposable à une activité dématérialisée.

459. La prestation de services. La notion de service que le Code civil ignore recouvre, selon la
définition du Doyen G. CORNU547, « un terme générique englobant la fourniture de tout
avantage appréciable en argent, en vertu des contrats les plus divers ». S’agissant du secteur
bancaire et financier, le considérant 19 de la directive 98/48 précise que « par services, il faut
entendre, aux termes de l’article 60 du traité tel qu’interprété par la jurisprudence de la Cour
de justice, une prestation fournie normalement contre rémunération ».

543
Civ.1ère, 15 avril 1982, B. I. n° 133, p. 118, D. 1984.439, note PIZZIO.
544
Civ.1ère, 15 avril 1986, B. I n° 90. p 91 ; RTD. civ. 1978, p. 86 obs. MESTRE ; Rép. Defrénois 1986, p. 787
AUBERT.
545
CALAIS-AULOY J., STEINMETZ F., Droit de la consommation, 6ème édition, Paris : Dalloz-Sirey : 2003.
546
Civ.1er, 4 mai 1999, D 1999.IR.170.
547
CORNU G., Vocabulaire juridique, 6ème édition, Paris : PUF, 2004.
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 221

460. La vente à distance. La FEVAD définit cette notion comme548 « un mode de distribution
dans lequel un message transmis à distance constitue le vecteur principal pour offrir des
produits ou des services à une clientèle. Il s’agit d’une technique de commercialisation
permettant au consommateur de commander un produit ou de demander l’exécution d’une
prestation de service hors les lieux habituels de réception de la clientèle ». La vente à
distance constitue donc une forme particulière de distribution dans laquelle la transaction se
fait indépendamment de toute rencontre physique de l’acheteur et du client. Afin d’éviter tout
abus et ainsi assurer la protection du consommateur, le droit de la consommation consacre
trois principes directeurs : la présentation d’offres claires et pérennes, adaptées en fonction du
secteur d’activité et de la clientèle et un droit de retour (article L.121-16 du code de la
consommation, article 45 du code professionnel de la vente à distance, et introduction et
article 2 de la charte de qualité).

461. Evolution encadrée. Le « livre blanc » avait prévu en 2000 que le développement en France
des services bancaires et financiers sur l’Internet devrait « connaître une progression
importante dans les prochaines années, tant en raison de l’élargissement du nombre
d’internautes que de leur usage croissant de ces services »549. Inutile de dire que la Banque de
France a vu juste. Dès lors, les services rendus initialement limités à la consultation du solde
des comptes et au courtage en ligne s’élargissent progressivement à l’ensemble des
transactions bancaires et financières. Si ces « banques virtuelles »550 sont établies par des
établissements de crédit, désireux de pénétrer sur le marché français sans avoir à constituer un
réseau d’agences, il n’en demeure pas moins qu’elles ne peuvent s’affranchir des règles
permettant d’assurer la protection des clients. La baisse des coûts de télécommunication et le
renforcement de la sécurité des transactions, tant d’un point de vue technique que juridique,
devraient jouer un rôle essentiel dans l’évolution de ces transactions. Ainsi sont désormais
possibles des opérations en ligne, pour lesquelles le formalisme de l’écrit-papier était encore
indispensable. Face au développement de ce nouveau canal de distribution, et parallèlement
au droit de la consommation, le Livre blanc a une triple vocation551 : en premier lieu, il est un
recueil des bonnes pratiques à destination de la profession. En deuxième lieu, il formule des
propositions afin d’améliorer davantage la sécurité des opérations bancaires et financières en
ligne et de renforcer la confiance de la clientèle dans ces nouvelles technologies. En troisième

548
La fédération des entreprises de vente à distance, disponible sur : www.fevad.com .
549
Internet, quelles conséquences prudentielles, Livre Blanc de la Banque de France préc., p. 9.
550
Terminologie utilisée dans le Livre blanc, préc., p. 9.
551
Telle que énoncée dans le Livre blanc, préc, p. 10.
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 222

lieu, il s’efforce d’apporter des solutions aux problèmes prudentiels liés à la nature
transfrontalière de l’offre et s’inscrit, à ce titre, dans le cadre de la réflexion internationale
menée au sein du Comité de Bâle pour le contrôle bancaire.

462. Problématique. La question centrale est de déterminer si la protection des consommateurs


investisseurs dans le cas des transactions bancaires et financières à distance est assurée. En
effet, l’utilisation de moyens informatiques introduit des risques techniques, et l’absence de
face à face pourrait fragiliser la sécurité de la relation juridique entre les parties. Il s’agit de
concilier modernité et sécurité afin de permettre un développement exponentiel de l’activité
bancaire et financière sur l’Internet. Il est évident que, dans un contexte dématérialisé, la
protection du cyber-consommateur doit nécessairement être assurée. Loin que ces règles
consuméristes soient un frein au développement des agences en ligne, il semble que cette
protection soit un paramètre essentiel afin de leur permettre de gagner des parts de marchés.
En effet, c’est en gagnant, puis en conservant la confiance de ces cyber-clients que les
établissements dispensateurs de services bancaires et financiers pourront diversifier leur offre
et maximaliser ce nouveau canal de distribution qu’est l’Internet. Avant l’arrivée d’Internet,
les clients étaient enfermés dans une relation quasi exclusive avec leur banque. S’il était
toujours possible de faire jouer la concurrence entre les différents établissements, le secteur
bancaire traditionnel restait l’un des plus fidélisants552. Avec le développement de l’Internet,
les banques sont passées d’une organisation centrée sur les produits à une organisation basée
sur les services et la relation client. La prise en considération de ce paramètre « protection »
peut leur permettre de fidéliser les clients qui font leur « shopping bancaire » en comparant
les offres des différents sites. En conséquence, on doit atteindre le point d’équilibre afin que
les règles protectrices des consommateurs investisseurs ne deviennent pas si draconiennes
qu’elles sonnent le glas de l’activité bancaire et financière dématérialisée : le défi est
d’identifier les voies et moyens de restituer, dans un univers « dématérialisé », chacune des
garanties issues des règles de forme façonnées, pour la plupart, dans une culture du papier.

463. Plan. Cet objectif primordial d’assurer la protection du consommateur dans les transactions
bancaires et financières en ligne peut se résumer à trois propositions. En premier lieu, la
réalité de la transaction ne doit pas pouvoir être remise en cause, tant du côté de
l’établissement de crédit que de celui du consommateur-client : il s’agit de la question du

552
BATTEAU J.,Un client change de banque en moyenne tous les six ans, 13 février 2001, disponible sur :
http://www.journaldunet.com/0102/010213zebank.shtml.
2ème Partie – La prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet et la protection des consommateurs 223

formalisme et de la preuve des transactions bancaires et financières (titre 1). En deuxième


lieu, le consommateur doit effectivement retrouver le même principe de réglementation
protectrice via l’Internet ; à cette fin s’est développée, une réglementation européenne des
services bancaires et financiers à distance (titre 2). En troisième et dernier lieu, la souscription
du consommateur à tel service en ligne s’accompagne nécessairement d’une collecte de
données. Aussi le consommateur doit-il avoir l’assurance que ses données personnelles ne
seront pas utilisées à d’autres fins que celles prévues par la transaction ; le problème du
respect des données à caractère personnel est donc essentiel (titre 3). De cette manière, ces
trois éléments doivent permettre de garantir la protection du consommateur – investisseur,
c’est-à-dire, en réalité, de gagner sa confiance et de parvenir à pérenniser le fonctionnement
du marché des services financiers sur l’Internet.
TITRE 1

LE FORMALISME ET LA PREUVE DES


TRANSACTIONS BANCAIRES ET
FINANCIERES SUR L’INTERNET

464. Formalisme, consensualisme et preuve. « On appelle preuve, écrivait Domat, ce qui


persuade l’esprit d’une vérité »553. Et d’ajouter que « comme il y a des vérités de diverses
sortes, il y a aussi différentes espèces de preuves »554, l’on pourrait comprendre l’existence
d’une distinction entre les différents moyens de preuve lesquels intègrent déjà les procédés
électroniques. « Ennemie jurée de l’arbitraire, la forme est la sœur jumelle de la liberté ».
C’est ainsi que R. VON JHERING555 exprimait l’intérêt de la forme en tant que rempart
contre l’arbitraire du juge dans l’appréciation de l’existence et du contenu du contrat. Le
Professeur J. FLOUR, à propos de la forme du contrat solennel, enseignait que « le
formalisme ne signifie pas forme compliquée mais forme impérative, c’est-à-dire imposée
sans équivalent possible (…) »556. Le droit français est baigné par le consensualisme qui, s’il
n’est pas proclamé par le Code civil, se déduit a contrario de l’absence de référence à la
forme dans la formation du contrat. Ainsi, par principe, le contrat sera valablement conclu par
la rencontre des consentements des parties sur les éléments essentiels de la convention, sans
qu’aucune forme soit requise. Pourtant, ce principe reçoit une double atténuation : d’une part,
sur le terrain de la preuve, la forme est exigée ad probationem ; d’autre part, il existe, à titre
d’exception, des contrats formalistes dont la validité est subordonnée au respect d’une forme
particulière ou à l’accomplissement de formalités déterminées (ad validitatem). Les contrats
formalistes sont traditionnellement divisés en deux catégories : les contrats solennels, pour
lesquels la loi exige l’accomplissement de formalités, et les contrats réels, dont la remise de la
chose est une condition de validité557.

553
Cité dans, LAGARDE X., Finalités et principes du droit de la preuve. Ce qui change, JCP G, 27 avril 2005,
n° 17, p. 771.
554
Ibib.
555
VON JHERING R., L’Esprit du droit romain, traduit par DE MEULENAERE. O., t. III, 164.
556
FLOUR J., Quelques remarques sur l’évolution du formalisme, in Le droit privé français au milieu du XXe
siècle. Etudes offertes à RIPERT G., Paris : L.G.D.J, 1950, t. I, p. 101, n° 9.
557
L’existence de cette catégorie est contestée. V. notamment JOBARD-BACHELIER N., Existe-t-il encore des
contrats réels en droit français ?, RTD civ. 1985 p. 1.
2ème Partie : Titre 1 – Le formalisme et la preuve des transactions bancaires et financières sur l’Internet 225

465. Formalisme et protection : la problématique. Classiquement, il est enseigné que le


formalisme a pour fonction d’assurer la sécurité juridique, l’efficacité, la prévisibilité ainsi
que la protection de l’une des parties au contrat, celle dite faible. En effet, un contrat revêtu
d’une telle forme diminuerait les risques d’irréflexion inhérents au vice de séduction et
permettrait de s’engager en toute confiance. Face au développement du commerce
électronique, comment transposer ces règles, d’abord pensées, appliquées et mûries dans un
environnement papier, à celui de la transaction dématérialisée, et plus particulièrement au
domaine bancaire et financier dont les engagements sont généralement considérés comme
dangereux pour le consommateur investisseur ? Des règles de formalisme particulières à ce
nouveau contexte sont-elles indispensables ?

466. Constat et nécessité. Selon un rapport de la Commission européenne publié le 20 décembre


2003, le pourcentage des internautes européens achetant en ligne est estimé à 54 % à l’horizon
de 2006558. En France, au terme d’une étude réalisée en 2005 par l’institut de sondage Taylor
Nelson Sofres, le nombre d’acheteurs sur l’Internet a connu une croissance de 60% sur les
deux dernières années559. Pourtant, nombre d’entreprises regrettent de s’être heurtées à des
difficultés d’ordre juridique, et notamment à des problèmes relatifs à la conclusion, la validité
du contrat ainsi qu’à la signature électronique. Or, afin que le commerce électronique
continue son développement, outre les évolutions techniques, il était nécessaire que les règles
juridiques, pensées pour le support papier, évoluent vers une comptabilité avec le commerce
via le nouveau canal de distribution qu’est l’Internet.

467. Les travaux communautaires. Consciente de cette nécessité, la législation communautaire560


incite désormais les Etats membres à adapter leur législation et à supprimer les dispositions
gênant le recours à des contrats en ligne. Si le commerce électronique ne doit pas faire l’objet
de « discrimination » de la part des Etats membres, il n’est pas question pour autant de
sacrifier la sécurité des cyber-consommateurs ; une telle politique juridique entraînerait la

558
DECHAMPS F., La Commission européenne est satisfaite des effets de la directive commerce électronique,
Rev. Trim. D.-TIC, déc. 2003, p.2, disponible sur : www.droi-tic.com,.
559
Communiqué de presse de TNS-SOFRES, Qu’achètent les français sur Internet en 2005 ?, Baromètre e-
commerce 2005, 12 octobre 2005, disponible sur : http://www.tns-
sofres.com/etudes/sesame/121005_baroecmce.htm
560
Directives du 13 décembre 1999 relative à la signature électronique et du 8 juin 2000 afférente au commerce
électronique, transposée par la loi du 13 mars 2000, complétée par un arsenal de mesure d’application [Décret
2001-272 du 30 mars 2001, décret 2002-535 du 18 avril 2002, arrêté du ministre de l’économie, des finances et
de l’industrie du 31 mai 2002] et par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie
numérique, dite LEN.
2ème Partie : Titre 1 – Le formalisme et la preuve des transactions bancaires et financières sur l’Internet 226

perte du commerce virtuel. Il faut enfin ajouter à cette législation transversale, la directive
2002/65, en date du 23 septembre 2002, relative à la commercialisation à distance de services
financiers auprès des consommateurs investisseurs. Elle complète, grâce à l’ordonnance du 6
juin 2005 la transposant, le dispositif du Code de la consommation dans le domaine
particulier des secteurs bancaires et financiers.

468. Droit interne. Tout d’abord, la convention conclue en ligne entre un établissement de crédit
et un investisseur est, comme tout contrat entre absents impliquant un consommateur561
soumise au régime de la vente à distance562, elle-même réglementée par les articles L.121-16
et suivants du Code de la consommation563 564
. Ensuite, la loi du 13 mars 2000 est d’ores et
déjà applicable aux prestations bancaires et financières et peut être valablement mise à profit
par les agences virtuelles. Aujourd’hui, l’écrit électronique est donc hissé au même rang que
la preuve littérale565. Il dispose de la même force probante que l’écrit papier, et s’il existe un
conflit entre le support papier et le support immatériel, c’est au juge que revient la tâche de
déterminer le titre le plus vraisemblable, quel qu’en soit le support566.

469. Remarque. Il est à noter que la loi du 13 mars 2000 ne concerne pas les actes juridiques pour
lesquels l’écrit est requis à titre de validité. Bien que la LEN autorise une telle possibilité, il
est à déplorer que certaines exceptions soient prévues et notamment en droit des sûretés,
support du droit du crédit. Le motif essentiel est la nécessité d’éclairer le consentement des
parties sur la gravité de l’acte. Or l’acte électronique ne semble pas présenter de particularités
par rapport aux autres contrats et l’occasion était donnée au législateur de renouveler la notion
de consentement. En effet, avec Monsieur M. ZOIA567, il est permis de se demander si l’écrit
électronique ne remplit pas l’objectif de protection du consentement de manière plus efficace

561
Pour la définition de cette notion cf. supra n° 457.
562
A noter que ce n’est pas la loi du lieu du serveur qui a vocation à s’appliquer mais celle du pays où le contenu
peut être consulté. Ainsi, le fait de diffuser du contenu à partir d’un serveur étranger n’affranchit pas du respect
des dispositions de la loi française. En outre, la loi française devrait s’appliquer toutes les fois qu’un site aura été
hébergé à l’étranger dans le but de contourner les dispositions françaises.
563
Celui-ci impose notamment au professionnel une obligation d’information et de confirmation des
informations au profit du consommateur, de même qu’un droit de rétractation. Désormais, les infractions aux
dispositions relatives à l’information préalable du consommateur, à l’exigence d’une confirmation écrite pour ce
dernier ainsi que le refus du vendeur de rembourser un produit à l’acheteur dans les conditions mentionnées en
cas d’exercice du droit de rétractation sont punies d’une amende de 1 500 euros (3 000 euros en cas de récidive).
564
Décret 2003-137 du 18 février 2003, instituant des sanctions pour la violation de dispositions relatives aux
contrats conclus à distance et modifiant le code de la consommation.
565
Article 1316-1 et 1316-3 du Code civil.
566
Article 1316-2 du Code civil.
567
ZOIA M., La notion de consentement à l’épreuve de l’électronique, Gaz. Pal., juillet-août 2001, p.1129.
2ème Partie : Titre 1 – Le formalisme et la preuve des transactions bancaires et financières sur l’Internet 227

que l’écrit papier. En effet, il convient de relever avec un auteur568 « la lenteur » avec laquelle
se conclut le contrat électronique, par la nécessité de multiplier les clics pour exprimer son
consentement.

470. Plan. Si les instances communautaires incitent les Etats membres à lever les obstacles aux
contrats en ligne, il n’en demeure pas moins que le formalisme lié à la prestation de services
bancaires et financiers sur l’Internet (chapitre 1) révèle la volonté de concilier la libre
prestation de service et la protection du cyber-consommateur. La preuve des transactions et
l’identification des parties participent à la conciliation de ces deux impératifs, la signature
électronique étant la solution technique et juridique pour y parvenir. S’agissant de la
dématérialisation des transactions bancaires et financières, certaines opérations
particulièrement sensibles feront l’objet de développements spéciaux (chapitre 2).

568
GAUTIER P. Y, De l’écrit électronique et des signatures qui s’y attachent, JCP E, 2000, p. 1276, n°13.
CHAPITRE 1er

LE FORMALISME LIE A LA PRESTATION DES SERVICES


BANCAIRES ET FINANCIERS SUR L’INTERNET

471. Des objectifs contradictoires ? Selon le Professeur C. LARROUMET569, bien que le droit
français soit en principe un droit consensualiste, le droit moderne est très fortement teinté par
le formalisme, notamment afin d’assurer la protection du consentement des contractants ou, à
tous le moins, d’éclairer celui de la partie considérée comme faible au contrat. Ainsi, de
prime abord, il semble exister une incohérence entre les objectifs consuméristes poursuivis
par le droit national, notamment par la multiplication des textes protecteurs et les
interventions des juges, afin de rééquilibrer les contrats et les objectifs dictés par les instances
communautaires qui incitent notamment les Etats à supprimer tout obstacle formel au contrat
en ligne et à sa conclusion. Les deux objectifs apparemment contradictoires sont pourtant
conciliables, malgré l’existence de contraintes techniques et juridiques spécifiques aux
différents secteurs d’activité, et notamment bancaire et financier.

472. Le formalisme en droit positif. Il semble particulièrement éclairant à ce stade de nos propos,
de s’attarder sur la place qui est faite au formalisme par notre droit positif. Si en matière
civile ou d’acte mixte570, l’article 1341 du Code civil impose la preuve par écrit de l’acte
juridique portant sur une chose dont la valeur est supérieure à 1500 euros571, il n’en demeure
pas moins que l’acte demeure valable, la formalité de l’écrit n’étant exigée qu’à titre de
preuve. Si ce formalisme dit ad probationem est une atténuation au principe du
consensualisme, la législation contemporaine a développé le formalisme dit « ad
solemnitatem », dont il est impossible de relever toutes les illustrations, par lequel le
consensualisme est cette fois battu en brèche. En effet, le législateur, afin d’assurer la
protection de la partie faible au contrat – le plus souvent d’adhésion, ce qui est le cas
notamment des contrats utilisés par la pratique bancaire et financière – a opté pour
l’obligation de recourir à un écrit stipulant de façon précise les droits et obligations de

569
LARROUMET C., Droit Civil Tome III, Les obligations Le contrat, 5ème édition, Paris : ECONOMICA,
2003.
570
En matière commerciale, la preuve de l’acte est libre, article L.110-3 du Code de Commerce.
571
Montant fixé par le décret n°80-533 du 15 juillet 1980 modifié par le décret n°2004-836 du 20 août 2004.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers sur 229
l’Internet

chacun, et certaines mentions sont rendues obligatoires, sous peine de nullité du contrat.
S’agissant plus particulièrement de la stipulation d’intérêt dans le contrat de prêt, il est inutile
de rapporter la preuve d’un taux conventionnel de l’intérêt par un commencement de preuve
par écrit, ce dernier étant une condition de validité du premier572. De même, en matière de
sûretés garantissant le crédit, le formalisme conduit par exemple à imposer un acte
authentique, en pratique un acte notarié en ce qui concerne l’hypothèque, qui, rédigé par un
praticien du droit, a en outre pour vertu d’éclairer les parties sur leurs droits et engagements.

473. La controverse. Mais lorsque la loi exige sans autre indication la rédaction d’un écrit, ce
dernier conditionne-t-il la validité de l’acte, ou est-il simplement exigé à titre de preuve ?
Deux conceptions s’opposent. Selon la première, en cas de doute sur le rôle joué par l’écrit, il
convient de ne voir là qu’une règle de preuve. Cette solution est fondée sur le fait que le
formalisme contractuel est une exception au principe du consensualisme et, qu’en tant que
telle, elle doit faire l’objet d’une interprétation restrictive. Ainsi, selon cette conception, c’est
au législateur d’apporter une dérogation expresse au consensualisme. Cette conception a
trouvé un écho certain en jurisprudence573. A l’inverse, une seconde conception estime que le
doute relatif au rôle de l’écrit ne doit pas en faire une règle de preuve, au motif que l’article
1341 du Code civil est suffisamment clair à ce sujet, de telle sorte que si la loi prend le soin
d’exiger un écrit, elle le fait à titre de condition de validité de l’acte. Or, avec le Professeur
C. LARROUMET574, il nous semble qu’en réalité ces deux conceptions, loin d’être
contradictoires, sont en réalité complémentaires, la nullité de l’acte, c’est-à-dire la
reconnaissance de la règle à titre de validité, ne devant intervenir que lorsque la mention est
stipulée dans l’intérêt essentiel de l’une des parties.

474. Adaptation du droit à l’Internet. La LEN institue un nouveau chapitre VII intitulé « Des
contrats sous forme électronique » dans la partie du Code civil relative au droit commun des
contrats. Le texte modifie de nombreuses règles applicables aux acteurs de l'Internet et
introduit des dispositions réglementant l'offre de contrat électronique. Il s’agit d’une
modification importante, puisque jamais depuis la rédaction du Code Civil de 1804 ces
dispositions n'avaient connu une telle mise à jour. C’est ici le résultat de la prise en compte
par le droit du phénomène de l’Internet dans les pratiques de ventes dématérialisées. Ces

572
Civ. 1ère, 14 février 1995, D 95, 340, note PIEDELIEVRE S. ; JCP 1995. II.22402, note CHARTIER Y.
573
Civ. 1er, 21 mai 1990, D 90.IR.147.
574
LARROUMET C., op. cit., n°221, p 198.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers sur 230
l’Internet

nouveautés imposent principalement quatre obligations au professionnel qui propose la vente


de biens ou la fourniture de services sur l’Internet, à savoir : l'offre de contrat électronique
doit être matérialisée sous une forme qui lui confère une certaine « durabilité », demeure
valable dès lors qu'elle reste accessible par voie électronique, doit comporter un certain
nombre de mentions obligatoires et le contrat doit être conservé par le professionnel.

475. Plan et spécificité du secteur financier. Les prestations de services bancaires et financiers
font l’objet d’un texte spécial575 réglementant l’information du consommateur, le droit de
rétractation, etc, c’est-à-dire finalement le contenu de l’obligation du prestataire vis-à-vis du
consommateur. Pourtant, s’agissant du principe même de la dématérialisation du contrat,
l’article 9 de la directive commerce électronique doit nécessairement faire l’objet d’une étude
particulière étant entendu qu’il incite les Etats à supprimer tous les obstacles formels au
contrat en ligne (section 1). En accord avec le considérant 27 de la directive commerce
électronique, la création d’un cadre juridique pour la prestation en ligne de services financiers
ne peut se faire qu’en « liant » ces deux textes. Dès lors, la conclusion des conventions
bancaires sur l’Internet étant facilitée, on se heurte à un second problème lié à l’identification
des parties à la transaction. Impératif de sécurité juridique au sens civiliste du terme (non
remise en cause de l’engagement), le souci d’identification en droit bancaire relève d’autres
objectifs notamment de lutte contre le blanchiment d’argent ; la signature électronique
apparaît logiquement comme la technique permettant de finaliser la dématérialisation des
transactions bancaires et d’en assurer la sécurisation (section 2).

575
La directive 2002/65 relative « au service financier à distance » du 23 septembre 2002 concernant la
commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs et ordonnance du 6 juin 2005.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 231

Section 1. La fin des obstacles formels aux contrats bancaires et financiers en


ligne

476. Suppression des obstacles et résurgence du formalisme. En matière bancaire et financière,


les exigences de forme se retrouvent principalement dans le secteur du crédit, réglementé dans
le Code de la consommation576 ainsi que dans le Code monétaire et financier577. Si, d’une
manière générale, on assiste à un véritable phénomène de résurgence du formalisme578, tout
au plus, pourrions nous dire qu’on ne peut généraliser sur la question du formalisme en droit
bancaire579 car le principe du consensualisme demeure pour d’autres opérations. Il s’avère que
la plupart des formalités – exigence d’un écrit, de mentions manuscrites…– ont été pensées
dans une culture du papier. Et, en raison particulièrement du courant consumériste, le
formalisme est apparu comme le moyen le plus efficace pour protéger le consommateur580.
Or, avec l’essor des réseaux numériques et du commerce électronique, on voit se multiplier
les contrats conclus par voie électronique, dématérialisés, au sens où l’accord des volontés ne
se manifeste pas sous la forme d’un écrit papier signé « manuscritement », ni par l’expédition
ou la réception d’une correspondance, mais résulte d’un échange de données transmises sur
les réseaux.

477. Plan. La volonté de mettre fin aux obstacles formels à la conclusion des contrats en ligne,
c’est-à-dire par voie électronique, résulte de l’article 9 de la directive relative au commerce
électronique. Pour s’en convaincre, il suffit d’en rappeler la première phrase : « les Etats
veillent à ce que leur système juridique rende possible la conclusion des contrats par voie

576
Code de la consommation : art. L.331-4 réglementant la forme de la publicité sur opération de crédit
mobilier ; art. L.311-8 sur l’offre préalable de crédit mobilier, L.311-9 sur son contenu, L.311-10 sur ses
mentions obligatoires et L.311-12 sur les propositions d’assurance ; art. L.312-4 sur les mentions de la publicité
en matière de crédit immobilier et L.312-8 sur l’offre de crédit elle-même ; art. L.312-9 sur l’assurance en
matière de crédit immobilier ; art. L.313-2 sur l’obligation de stipulation du TEG ; art. L.313-7 et 8 sur la
mention manuscrite de la caution.
577
L’article L.313-4 du Code monétaire et financier se contente de reprendre l’article L.312-2 du Code de la
consommation sur l’exigence de la mention du taux d’intérêt. Le Code monétaire et financier prévoit d’autres
exigences de forme comme par exemple l’article L.313-9 qui stipule que le contrat de crédit-bail doit mentionner
les conditions dans lesquelles la résiliation peut intervenir à la demande du preneur ou bien l’article L.313-10 qui
soumet à publicité les opérations de crédit-bail.
578
LAGARDE X., Observations critiques sur la renaissance du formalisme, JCP E, 1999, I 170, pp. 1767-1775 ;
MAZEAUD H. et L. et CHABAS F., Leçons de droit civil, Les obligations, Théorie générale, 9e éd. par
CHABAS F., Paris : Montchrestien 1998, t. II, p. 72, n° 85.
579
L’article L.113-3 du Code de la consommation prévoyant que les règles relatives à l'obligation de
renseignements par les établissements de crédit sont fixées par les I et II de l'article L.312-1-1 du Code monétaire
et financier, c’est-à-dire par la convention.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 232

électronique ». A priori, ce texte vise à alléger le formalisme ad probationem dans la mesure


où les exceptions qu’il prévoit ne semblent concerner que des contrats pour lesquels un
formalisme est requis ad validitatem. Ce principe étant posé, cet article 9 §1 appelle quelques
explications, recadré dans un mouvement inexorable favorisant la dématérialisation du contrat
(§1) et dont la transposition a été opérée par la LEN du 21 juin 2004. En effet, s’agissant d’un
texte transversal, on peut légitimement s’interroger sur son utilité eu égard aux opérations de
banque et à leurs réglementations sectorielles : les contrats bancaires et financiers sont-ils par
nature formels, de telle sorte que ce texte favoriserait réellement leur conclusion en ligne ?
Cette interrogation nous amène naturellement à analyser le formalisme (ou plutôt les
formalismes) dans les opérations bancaires (§2) et l’influence que peuvent avoir ces textes.
L'examen de cette évolution doit nécessairement s’effectuer au regard de la protection des
consommateurs ; en effet, comme l’indique le considérant 11 de la directive : « [la présente
directive] est sans préjudice du niveau de protection… des intérêts des consommateurs » ;
c’est dire que la confiance de ces acteurs dans la protection que leur accorde la loi est
primordiale pour la réussite d’un marché intégré.

§ 1. Les évolutions de textes favorisant la conclusion des contrats en ligne

478. Plan. Concernant indirectement les opérations bancaires et financières, des textes
transversaux sont intervenus pour faciliter la conclusion des contrats via l’Internet. Au plan
communautaire, il s’agit de l’article 9 de la directive sur le commerce électronique (A) ; en
droit interne (B), ce texte a fait l’objet d’une transposition par la loi pour la confiance dans
l’économie numérique.

A. L’article 9 de la directive sur le commerce électronique

479. Un principe assorti d’exceptions. L’article 9 de la directive sur le commerce électronique


enjoint clairement aux Etats membres de favoriser la conclusion des contrats via l’Internet. Si
le paragraphe premier pose le principe (a), le deuxième propose, pour certains types de
contrats particulièrement sensibles et où le formalisme est traditionnellement de rigueur, une
série d’exceptions (b).

580
BRUGUIERE J-M., Commerce électronique et protection du consommateur, J.-Cl. Com., 2003, fasc. 860,
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 233

a. Le principe établi par l’article 9 §1 : supprimer les obstacles

480. Le texte et les moyens. Aux termes de l’article 9, §1er de la directive sur le commerce
électronique581, il est clair qu’il ne saurait plus y avoir de distinction entre la conclusion d’un
contrat matérialisé et celle d’un contrat dématérialisé. L’Internet ne justifie pas à lui seul un
traitement particulier ; il est de ce point de vue réellement considéré comme un mode de
communication. A cette fin, les Etats membres doivent procéder à une adaptation de leur
législation contenant des exigences, notamment de forme, susceptibles d’entraver directement
ou indirectement la conclusion de contrats par voie électronique. Le considérant n° 34 de la
directive précise d’ailleurs que cet ajustement doit être opéré par un examen systématique de
la législation relative à l’ensemble du processus contractuel. Les travaux préparatoires de la
directive sont très clairs à cet égard : les Etats membres doivent faire cet examen de manière
qualitative, ce qui veut dire qu’ils ne peuvent se contenter de modifier dans la réglementation
des mots clés (par exemple « papier »), mais doivent identifier tout ce qui, en pratique, peut
empêcher l’utilisation « effective » des contrats électroniques582. Aussi, les Etats membres
doivent-ils, notamment, supprimer les dispositions qui interdisent ou limitent manifestement
l’utilisation de la voie électronique pour contracter, et adapter les exigences de forme qui ne
peuvent être remplies par voie électronique ou qui créent une insécurité juridique, dans la
mesure où il n’est pas certain qu’elles puissent être appliquées au contrat électronique583.

481. Précision. Allant plus loin, il convient de noter que la directive sur le commerce électronique
n’oblige pas nécessairement les Etats membres à supprimer les exigences de forme pour les
contrats « usuels », mais à faire en sorte que celles-ci puissent également être satisfaites par
voie électronique. En effet, selon le considérant n°35, « la présente directive n’affecte pas la
possibilité pour les Etats membres de maintenir ou d’établir pour les contrats des exigences
juridiques générales ou spécifiques qui peuvent être satisfaites par des moyens
électroniques (…) ». Il faut donc entendre que le formalisme peut faire l’objet d’une

n°74.
581
« Les Etats membres veillent à ce que leur système juridique rende possible la conclusion de contrats par
voie électronique. Les Etats membres veillent notamment à ce que le régime juridique applicable au processus
contractuel ne fasse pas obstacle à l’utilisation des contrats électroniques ni ne conduise à priver d’effet et de
validité juridique de tels contrats pour le motif qu’ils sont passés par voie électronique ».
582
V. le commentaire article par article de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 18
novembre 1998 relative à certains aspects juridiques du commerce électronique dans le marché intérieur, COM
(1998) 586 final, p. 26.
583
V. les exemples énumérés dans le commentaire article par article de la proposition de directive, op. cit, pp.
26-27.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 234

adaptation au contexte électronique. La question de la nature du formalisme visé par cette


mesure se pose ensuite naturellement : la directive vise-t-elle le formalisme ad probationem
ou ad validitatem ? Le texte de l’article ne le précise pas. Mais, les exceptions qu’il prévoit
sont relatives à des contrats où le formalisme ad validitatem est bien présent ; a contrario, on
pourrait en déduire que la directive ne vise qu’une dématérialisation du formalisme ad
probationem. Pourtant, au regard de la généralité de ses termes, on peut penser que ce texte
revêt autant d’importance pour le formalisme ad probationem que pour le formalisme ad
validitatem ; il nous semble en conséquence que l’ensemble des obstacles nés du formalisme
ad validitatem doit également être supprimé.

482. Champ d’application. Sous réserve des exceptions prévues au paragraphe 2, cette obligation
porte sur toutes les étapes du « processus contractuel ». Cette dernière notion inconnue
comme telle dans notre droit mérite quelques explications. S’il est vrai que l’article 9 de la
directive utilise les mots « conclusion des contrats par voie électronique », il ne faut toutefois
pas se méprendre sur la portée exacte de cette disposition. Sont visées, en réalité, toutes les
étapes du processus contractuel. A cet égard, le considérant n° 34 de la directive sur le
commerce électronique précise : « il convient que l’examen des législations nécessitant cet
ajustement (…) porte sur l’ensemble des étapes et des actes nécessaires au processus
contractuel, y compris l’archivage du contrat »584. En effet, il se peut qu’une formalité,
requise en amont ou en aval de la conclusion du contrat, entrave indirectement la conclusion
de celui-ci par voie électronique. Il en est ainsi par exemple du mandat de se porter caution
qui doit comporter la mention manuscrite585. En conséquence, la notion de « processus
contractuel » comprend toutes les étapes allant de la période précontractuelle (prospectus
publicitaires, offre par écrit, autres documents de la période précontractuelle, etc.) jusqu’à
l’archivage, en passant par les modalités relatives à l’exécution du contrat (facturation,
paiement, livraison) ou à la fin de celui-ci (terme, résiliation, etc.), à sa modification, à son
enregistrement, à son dépôt éventuel, etc. Il s’agit donc de lever le moindre obstacle à

584
Cette précision se retrouve également dans le commentaire article par article de la proposition de directive,
op. cit., p. 26.
585
Dernièrement Civ. 1ère, 4 juin 2002, LPA 8 octobre 2002 n° 201, chronique de droit des sûretés, février-juillet
2002 (1ère partie), n° 1, note HOUTCIEFF D.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 235

l’automatisation complète du processus contractuel586 c’est-à-dire, finalement, de


« numériser » le principe juridique du contrat.

b. Les exceptions de l’article 9 §2

483. Des contrats « sensibles ». L’article 9, §2, dispose que « les Etats membres peuvent prévoir
que le paragraphe 1 ne s’applique pas à tous les contrats ou à certains d’entre eux qui
relèvent des catégories suivantes :
a. les contrats qui créent ou transfèrent des droits sur des biens immobiliers, à l’exception
des droits de location ;
b. les contrats pour lesquels la loi requiert l’intervention des tribunaux, des autorités
publiques ou de professions exerçant une autorité publique ;
c. les contrats de sûretés et garanties fournis par des personnes agissant à des fins qui
n’entrent pas dans le cadre de leur activité professionnelle ou commerciale ;
d. les contrats relevant du droit de la famille ou du droit des successions ».

484. Un formalisme sécuritaire. Sont notamment visés587 les contrats de gage, de caution
personnelle, les contrats conclus devant un notaire ou un officier public, etc. Il s’agit de
conventions que la loi a voulu entourer de différentes formalités et garanties. Si l’on peut
aisément comprendre le législateur européen en ce qui concerne certains contrats soumis à
une publicité particulière ou dont la validité est conditionnée par l’intervention d’un tiers, en
revanche le contrat de caution n’est quant à lui ni subordonné à la présence d’un notaire, ni
soumis à publicité. Le contrat de caution d’un prêt qui constitue un engagement relativement
grave, fait l’objet quasi systématiquement d’un simple acte sous-seing privé entre
l’emprunteur et l’établissement de crédit. L’exception ainsi prévue par le texte européen est
de ce point de vue critiquable. Cependant, il convient de remarquer que le recours aux
exceptions permis par la directive n’est qu’une simple faculté et non une obligation588 pour les
Etats. Toujours est-il qu’en matière d’actes nécessitant la forme authentique, le législateur
français fait preuve d’une adaptation considérable : l’article 1317, alinéa 2, du Code civil
prévoit que l’acte authentique peut être dressé sur support électronique. Le législateur s’est

586
DEMOULIN M. et MONTERO E., La conclusion des contrats par voie électronique, FONTAINE M. (sous la
dir. de), Le processus de formation du contrat. Contributions comparatives et interdisciplinaires à
l’harmonisation du droit européen, Bruxelles : Bruylant, Paris, LG.D.J., 2002, pp. 710-711, n°25.
587
GOURIO A., Le nouveau cadre juridique du crédit aux particuliers en Europe, RDBF, mars-avril 2003, n° 2,
p.130.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 236

toutefois accordé le temps de la réflexion en stipulant que l’établissement et la conservation


de ce support devront être fixées par décret (art. 1317, al. 2, in fine). En raison de la
complexité de la matière, ce décret est toujours en cours de rédaction589.

B. La suppression des obstacles en droit interne

485. Bases textuelles. Le législateur français a progressivement adapté sa législation pour rendre
possible la conclusion de contrats par voie électronique, et partant, la fourniture de services
financiers sur l’Internet. Une première vague d’adaptation a été faite en droit de la preuve, par
la transposition de la directive du 13 décembre 1999 sur les signatures électroniques590. Les
derniers obstacles formels ont disparu à la suite de l’adoption de la loi pour la confiance dans
l’économie numérique (LEN) (b). Dans les deux cas, c’est la désormais célèbre approche
fonctionnelle qui est à l’honneur (a).

a. L’approche fonctionnelle : une révolution dans le formalisme contractuel classique

486. Les équivalents fonctionnels. Quelques mots méritent d’être dits sur la théorie des
équivalents fonctionnels, dans la mesure où elle constitue un mode de raisonnement assez
novateur. Prônée par la CNUDCI dans sa loi-type sur le commerce électronique591, cette
approche repose sur une analyse des objectifs et des fonctions de l’exigence de forme, et vise
à déterminer comment ceux-ci peuvent être assurés par des moyens électroniques592.
L’objectif est donc d’admettre des équivalents électroniques aux formalités traditionnelles, à
condition qu’ils remplissent les mêmes fonctions que ces dernières. Soulignons que cette
théorie révolutionne véritablement la conception traditionnelle du formalisme, en ce qu’elle

588
L’article 9§2 emploie le verbe « peuvent ».
589
Différents problèmes devront ainsi être abordés, tenant principalement aux caractéristiques de l’acte
authentique : la présence de l’officier public, sa signature, la conservation et l’archivage de l’acte ainsi que les
notions de copie et d’original (sur ce point, v. l’avis n°608 présenté au nom de la Commission des lois
constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République sur le projet de loi (n°528)
pour la confiance dans l’économie numérique par TABAROT M., 11 février 2003, pp. 62-63).
590
Directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre
communautaire pour les signatures électroniques.
591
Loi type de la CNUDCI (Commission des Nations Unies pour le droit commercial international) sur le
commerce électronique et guide pour son incorporation (1996), spéc. n° 16, disponible sur : www.uncitral.org/fr-
index.htm.
592
Sur ce thème, CAPRIOLI E. et SORIEUL R., Le commerce international électronique : vers l’émergence de
règles juridiques transnationales, J.D.I., 2, 1997, pp. 380-382 ; DEMOULIN M. et MONTERO E., op. cit., pp.
716-717) ; FLOUR Y. et GHOZI A., Les conventions sur la forme, Rép. Defrénois, 2000, pp. 921-922, n°26 ; DE
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 237

remet en cause le principe selon lequel il n’existe pas d’équipollent à une forme solennelle593.
En effet, jusqu’ici, on considérait que la règle de forme, par définition, exclut le recours à des
procédés équivalents : on ne peut échapper à son application en prétendant que le résultat
attendu de la règle a été atteint par un autre moyen que la formalité prescrite”594. Ainsi, la
conception classique du formalisme contractuel est remarquablement résumée par le
Professeur J. FLOUR : « formalisme ne signifie pas forme compliquée, mais forme
impérative, c’est-à-dire imposée sans équivalent possible, pour donner valeur juridique à la
manifestation de volonté »595.

487. Position jurisprudentielle. Jusqu’ici, la jurisprudence596 considérait de manière très stricte,


par exemple, que l’exigence d’une mention écrite de la main du signataire ne pouvait être
satisfaite par des procédés de dactylographie, que la signification par exploit d’huissier ne
pouvait être remplacée par une lettre missive, qu’on ne saurait se passer de mentions
obligatoires en prouvant que la partie protégée était pleinement informée, etc. Dans les années
1950, J. Flour écrivait que la jurisprudence se montrait plus conciliante lorsqu’il s’agissait
d’apprécier la sanction applicable quand la forme requise faisait défaut. En particulier, si la loi
ne précisait pas que la formalité était requise à peine de nullité, la jurisprudence avait
tendance à considérer le texte équivoque comme une formalité ad probationem, afin d’éviter
la nullité de l’acte irrégulier597. Il s’en suivait une opposition manifeste entre, d’une part, un
législateur formaliste, soucieux de protéger les parties contre l’insécurité juridique, la
captation, la fraude, l’irréflexion, d’autre part, un juge plutôt libéral, soucieux de lutter contre
la mauvaise foi d’une partie qui entendrait se dégager de ses engagements à la faveur d’une
simple irrégularité matérielle. Il semblerait qu’aujourd’hui la situation soit différente, et les
auteurs observent désormais « l’imperméabilité de la jurisprudence au discours libéral

LAMBERTERIE I., L’écrit dans la société de l’information, Mélanges en l’honneur de D. TALLON. D’ici,
d’ailleurs : harmonisation et dynamique du droit, Paris, Société de législation comparée, 1999, p. 131 et s.
593
A ce sujet, COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du formalisme, Rép. Defrénois, 2000, p. 880 ;
FLOUR J., Quelques remarques sur l’évolution du formalisme, Le droit français au milieu du XXe siècle. Etudes
offertes à Georges RIPERT, Paris, LG.D.J., 1950, t. 1, n° 9, p. 101 ; GUERRIERO M.-A., L’acte juridique
solennel, Paris, LG.D.J., 1975, pp. 103 et s ; BRASSEUR P., Le formalisme dans la formation des contrats.
Approches de droit comparé, FONTAINE M. (sous la dir. de), Le processus de formation du contrat.
Contributions comparatives et interdisciplinaires à l’harmonisation du droit européen, Bruxelles, Bruylant, Paris,
LG.D.J., 2002, p. 627 et s., n° 23 et s.
594
COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du formalisme, op. cit., p. 886.
595
FLOUR J., Quelques remarques sur l’évolution du formalisme, op. cit., pp. 101-102, n°9.
596
Com. 21 juin 1988, Bull. civ., IV, n°212, p.146, JCP G, 1999, II, 21170, obs. DELEBECQUE P.
597
FLOUR J., Quelques remarques sur l’évolution du formalisme, op. cit., n° 12 et s., p. 104 et s.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 238

classique et son adhésion presque totale à la doctrine formaliste du législateur »598 ou, à tout
le moins, un comportement plus nuancé face au formalisme, entre souplesse et rigueur599.
Toutefois, les auteurs s’accordent à dire qu’il n’est guère aisé d’apporter la preuve
systématique et statistique de l’une ou l’autre tendance.

488. Illustration des équivalents. Le législateur a transposé la directive sur les signatures
électroniques par la loi n°2000-230 du 13 mars 2000600 et a appliqué par l’article 1316-1601 le
principe d’équivalence fonctionnelle602. L’article 1316-3 précise par ailleurs que « l’écrit sur
support électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier ». Reste donc à
déterminer si une telle formalité relève de la validité (ad validitatem) ou bien de la preuve (ad
probationem). A l’occasion de l’adoption de la loi du 13 mars 2000, il avait été proposé de
compléter le nouvel article 1316-1 du Code civil (« l’écrit électronique est admis en preuve »)
par les termes « et pour la validité de l’acte »603. Cet amendement fut rejeté au motif principal
qu’une question de cette importance et de cette complexité ne peut être résolue en une phrase
mais doit faire l’objet de réflexions approfondies604. Cet argument doit être approuvé605. Par
contre, on ne peut arguer qu’il existerait une différence fondamentale entre les règles de
preuve et de validité606. Comme l’ont souligné certains auteurs, « entre les formes probatoires
et les formes solennelles existe une affinité profonde que traduit le vieil adage Idem est non

598
LAGARDE X., Observations critiques sur la renaissance du formalisme, op. cit., n° 3, p. 1768, suivi par
COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du formalisme, op. cit., p. 895-896.
599
TERRE F., SIMLER P. et LEQUETTE Y., Droit civil Les obligations, Paris, Dalloz, 2002, 8e éd., pp. 117-
120, n° 138. (Collection Précis Droit privé).
600
Loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information
et relative à la signature électronique.
601
Qui dispose que « l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support
papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé
dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité »
602
LUCAS A., DEVEZE J. et FRAYSSINET J., Droit de l’informatique et de l’Internet, Paris : PUF, n° 889, p.
610.
603
JO, déb. Assemblée nationale, 29 février 2000, pp. 1407-1408.
604
Ibidem, p. 1407.
605
LUCAS A., DEVEZE J. et FRAYSSINET J., op. cit., pp. 631-632, n°915.
606
Selon Jacques FLOUR, « l’opposition entre la règle de forme et la règle de preuve, entre l’écrit requis ad
validitatem et ad probationem, est, dans une large mesure, artificielle. C’est relever une différence bien menue
et bien théorique que de mettre l’accent sur la possibilité, à défaut d’écrit, de faire la preuve par l’aveu et le
serment, c’est-à-dire des procédés qui mettent chacune des parties à la discrétion de l’autre et de sa loyauté »
(J. FLOUR, Quelques remarques sur l’évolution du formalisme, Le droit français au milieu du XXe siècle.
Etudes offertes à G. RIPERT, Paris : LG.D.J., 1950, t. 1, p. 98, n°6. V. aussi. GAUTIER P.-Y, Le
bouleversement du droit de la preuve : vers un mode alternatif de conclusion des conventions, LPA, 7 fév. 2000,
n°26). Ceci étant, il faut bien reconnaître que dans l’esprit de rédacteurs du Code civil, règles de preuve et règles
de validité devaient être clairement distinguées (LAGARDE X., Observations critiques sur la renaissance du
formalisme, op. cit., p. 1770.). Pour l’application de la loi de 2000 au formalisme ad validitatem, v.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 239

esse aut non probari »607. Cette incertitude se traduit aussi par de nombreuses discussions
quant aux sanctions qui peuvent frapper de telles formalités608.

b. La transposition opérée par la LEN

489. Les mentions manuscrites : le formalisme ad validitatem609. L’article 14 de la loi introduit


notamment dans le Code civil l’article 1108-1610 qui concerne les actes juridiques dont la
validité est subordonnée au respect de certaines exigences de forme – l’écrit et la mention
manuscrite – et l’article 1108-2 qui prévoit des exceptions au principe établi par l’article
1108-1. Quant à l’article 15 de la loi, il autorise le Gouvernement à adapter les dispositions
législatives qui subordonnent la validité de certains actes juridiques à des formalités non
visées au nouvel article 1108-1. Signalons aussi que, sauf exception, ces règles ont vocation à
s’appliquer aux différentes branches du droit – et donc y compris au droit bancaire et
financier –, nonobstant le fait qu’elles soient insérées dans le Code civil.

490. Analyse. Tel qu’il est rédigé, le premier alinéa montre que l’écrit papier reste le référent de
base mais qu’un acte établi ou conservé sous forme électronique ne peut être déclaré nul ni sa
validité mise en cause au seul motif qu’il est électronique611. En d’autres termes, lorsqu’un
écrit est exigé par le législateur non pas à titre probatoire, mais ad validitatem, l’article 1108-
1, alinéa 1, reconnaît l’équivalent entre l’écrit électronique et papier. Encore faut-il, bien
entendu, que les conditions prévues aux articles 1316-1, 1316-4 ou 1317, alinéa 2 du Code
civil soient respectées. Un principe similaire est prévu à l’article 1108-1, alinéa 2, pour
l’hypothèse où une mention manuscrite est exigée.

BRUGUIERE J-M., op.cit. ; TREBULLE F-G., La réforme du droit de la preuve et le formalisme, LPA, 20 avril
2000, p.10.
607
CATALA P., Le formalisme et les nouvelles technologies, Rép. Defrénois, 2000, Art. 37210, p. 898; FLOUR
J., Quelques remarques sur l’évolution du formalisme, op. cit.,n° 6, p. 98.
608
COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du formalisme, Rép. Defrénois, 2000, pp. 885-888.
609
STOFFEL-MUNCK P., La réforme des contrats du commerce électronique, JCP E, n°38, 16 septembre 2004,
n° 8, p.1430.
610
« Lorsqu'un écrit est exigé pour la validité d'un acte juridique, celui-ci peut être établi et conservé sous forme
électronique dans les conditions prévues aux articles 1316-1 et 1316-4 et, lorsqu'un acte authentique est requis,
au second alinéa de l'article 1317.
Lorsque est exigée une mention écrite de la main même de celui qui s'oblige, ce dernier peut l'apposer sous
forme électronique si les conditions de cette apposition sont de nature à garantir que la mention ne peut émaner
que de lui-même ».
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 240

491. Conséquences : apports de la LEN. S’agissant de l’écrit, toute la difficulté consiste bien
entendu à déterminer s’il est exigé ad probationem ou ad validitatem. Il y a en effet de
nombreuses hypothèses où le statut de l’écrit est assez flou : il n'est pas toujours facile de
distinguer les hypothèses où il est créateur de droits dans le chef des parties (condition de la
validité ou écrit ad solemnitatem) de celles où il constate ces droits (condition de la preuve ou
écrit ad probationem)612. Par ailleurs, il faut être attentif « à ne pas faire peser sur la notion
d’écrit des garanties qui, d’une part, ne relèvent pas de l’écrit mais du support papier,
d’autre part ne sont plus assurées dans l’environnement électronique par le support, mais par
le mécanisme de signature »613. En pratique toutefois, cette distinction ne devrait pas poser
énormément de problèmes dans la mesure où, que l’écrit soit exigé à titre probatoire ou de
validité, l’équivalence est reconnue et ce, à des conditions identiques. Quant aux trois
exceptions énoncées à l’article 1108-2614, elles ne nécessitent pas de plus amples
développements dans le cadre de notre étude. Signalons seulement que les exceptions primo
(pour les actes sous seing privé relatifs au droit de la famille et des successions) et tertio (pour
les actes sous seing privé relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou
commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession) visent
essentiellement la protection des parties615. Quant à la deuxième exception, relative aux actes
soumis à autorisation ou homologation de l’autorité judiciaire, elle obéit à deux
considérations : « d'une part, l'élément de solennité introduit par l'intervention du juge est
considéré comme incompatible avec la forme électronique ; d'autre part, beaucoup plus
pragmatiquement, les juridictions ne sont pas dotées des moyens nécessaires à cette évolution
technologique »616.

492. Adaptabilité. Enfin, l’article 15 de la LEN prévoit que : « dans les conditions prévues à
l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à procéder par ordonnance à

611
V. l’avis n°608 présenté au nom de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de
l’administration générale de la République sur le projet de loi (n°528) pour la confiance dans l’économie
numérique par TABAROT M., 11 février 2003, p. 59 (ci-après, avis n°608).
612
Avis n°608, op. cit., p. 60.
613
GOBERT D. et MONTERO E., Le traitement des obstacles formels aux contrats en ligne, Le commerce
électronique européen sur les rails ? Analyse et propositions de mise en œuvre de la directive sur le commerce
électronique, Bruxelles, Bruylant, 2001, n° 388, p. 206.
614
Cet article énonce qu’ « il est fait exception aux dispositions de l'article 1108-1 pour :
1° Les actes sous seing privé relatifs au droit de la famille et des successions;
2° Les actes soumis à autorisation ou homologation de l'autorité judiciaire;
3° Les actes sous seing privé relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf
s'ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession ».
615
Avis n°608, op. cit., p. 64.
616
Ibid.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 241

l'adaptation des dispositions législatives subordonnant la conclusion, la validité ou les effets


de certains contrats à des formalités autres que celles mentionnées à l'article 1108-1 du Code
civil, en vue de permettre l'accomplissement de celles-ci par voie électronique. L'ordonnance
prévue à l'alinéa précédent devra être prise dans l'année suivant la publication de la présente
loi. Un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans un délai de six
mois à compter de la publication de l'ordonnance ». Pour accomplir cette tâche, le législateur
devra travailler en deux étapes : identifier les différentes formalités imposées par les textes
pour ensuite rédiger une ordonnance adaptant lesdits textes. Pour cette deuxième étape, deux
approches sont envisageables et il est fort probable que le législateur les combinera617 : d’une
part, la théorie des équivalents fonctionnels, d’autre part une approche plus ponctuelle,
consistant en une adaptation de la procédure de conclusion des contrats au cas par cas.

493. Hétérogénéité. Les sanctions618 en cas de non-respect des exigences de forme sont diverses,
« parce qu’il n’y a pas de justification commune à toutes les formes, il n’y a pas non plus de
sanction qui leur soit commune »619. Ceci étant, une cohérence entre ces différentes sanctions
devrait être trouvée : les sanctions doivent être calquées sur la règle violée et plus précisément
sur sa justification620. Le Professeur G. COUTURIER suggère à cet égard de recourir au
concept de requalification. Cette notion consiste « à attribuer à un acte juridique, à titre de
sanction de la violation d’une règle, une qualification qui ne correspond pas à ses
caractéristiques intrinsèques »621.

494. Incertitudes. De nombreuses incertitudes existent également concernant le régime des


nullités. Celles-ci sanctionnent en effet fréquemment la violation des règles de forme.
S’opposent notamment les partisans de la nullité absolue ou de l’inexistence du contrat622 – à
défaut de formalité, l’acte n’existe pas – et ceux qui estiment qu’il faut s’intéresser aux
intérêts en présence – protection des parties, des tiers ou de l’intérêt général623. Ainsi, lorsque
le législateur impose la rédaction d’un écrit, essentiellement pour répondre à un objectif de

617
Avis n°608, op. cit., p. 71.
618
Celles-ci seront détaillées au cas par cas, cf. section suivante.
619
COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du formalisme, op. cit., pp. 890-891 ; GHESTIN J., Traité de
droit civil. La formation du contrat, 3e éd., Paris, LG.D.J., 1993, p. 343, n°383 ; AUBERT J.-L, Le formalisme
(rapport de synthèse), op. cit., pp. 937-938. V. aussi BRASSEUR P., Le formalisme dans la formation des
contrats. Approches de droit comparé, op. cit., p. 653 et s., n°52 et s.
620
COUTURIER G., art. préc. p. 891.
621
COUTURIER G., ibid.
622
Pour les contrats solennels, v. GUERRIERO M.A, L’acte juridique solennel, Paris : LGDJ, 1975, p. 355 et s.
623
COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du formalisme, op. cit., pp. 892-893.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 242

protection, en cas de non-respect de cette exigence – concrètement s’il n’y a pas d’acte écrit –,
il n’est pas interdit de soutenir que l’acte pourrait être annulé, au terme d’une action en nullité
relative624. Une régularisation, demandée par la partie faible, devrait néanmoins être admise.
S’agissant des mentions obligatoires, un raisonnement similaire peut être tenu. Il faut ainsi
distinguer selon que celles-ci sont rédigées au bénéfice du consommateur ou de l’entreprise.
Si elles visent à procurer un avantage au professionnel – clauses d’exclusion de nullité,
clauses attributives de juridiction, clauses exonératoires de responsabilité –, leur manque de
visibilité devra être sanctionné par la perte de l’avantage poursuivi625. Si par contre les
mentions sont plutôt requises à titre informatif, au bénéfice du consommateur, la nullité
pourrait constituer une sanction. Certains se basent en effet sur l’existence d’une sanction
pénale en cas de non-respect pour justifier, au civil, l’annulation de l’acte626. Cette solution est
néanmoins contestée627. D’autres pistes pourraient être explorées, telle la condamnation à une
peine privée, subsidiaire et plafonnée628.

§ 2. Diversité et manifestation du formalisme dans les opérations bancaires et


financières

495. Résurgence du formalisme. Dans un courant actuel visant à protéger les parties faibles, les
investisseurs, de nombreux auteurs n’ont pas manqué de constater une résurgence du
phénomène du formalisme629, spécialement en droit de la consommation. Ce dernier
n’épargne pas d’ailleurs les opérations bancaires et financières. Mais, selon le Professeur X.
LAGARDE630, le formalisme que l’on constate dans ces législations diffère de celui du Code
civil. Ce dernier est « instituant plutôt que protecteur, quelque part entre le droit des biens et
le droit des personnes » alors que les formes développées durant les cinq décennies passées
sont « parcellaires », « instrumentalisées et finalisées ». Dans certains cas, des formules bien

624
LAGARDE X., op. cit., p. 1774.
625
LAGARDE X., ibid.
626
V. par exemple Com, 19 novembre 1991, R.T.D. civ., 1991, p. 381, obs. J. MESTRE ; Com., 2 novembre
1994, D., 1995, p. 185, note BONNEAU T.
627
LAGARDE X., op. cit., p. 1775.
628
LAGARDE X., ibid.
629
Entre autres, v. FONTAINE M., La protection de la partie faible dans les rapports contractuels – Rapport de
synthèse, La protection de la partie faible dans les rapports contractuels – comparaisons franco-belges, Paris,
LG.D.J., 1996, p. 627, n°19 ; MAZEAUD H. et L, MAZEAUD J. et CHABAS F., Leçons de droit civil, t. II,
premier volume : Obligations. Théorie générale, 9e éd., par F. CHABAS, Paris, Montchrestien, 1998, p. 72,
n°85 ; LAGARDE X. Observations critiques sur la renaissance du formalisme, JCP E, 1999, I 170, p. 1767 et s. ;
DEMOULIN M. et MONTERO E., op. cit., p. 705 et s. ; COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du
formalisme, Rép. Defrénois, 2000, p. 885.
630
LAGARDE X., op. cit., p. 1773.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 243

précises sont également imposées, ce qui conduit à qualifier le formalisme actuel de


« formulaire ». Les qualificatifs ne manquent pas631. Quoi qu’il en soit, le formalisme doit sa
diversité à la pluralité des objectifs qu’il poursuit (A) et à ses manifestations (B) ; en matière
bancaire, des textes relatifs à la suppression des obstacles appellent une réflexion sur la
dématérialisation des contrats bancaires (C).

A. Diversité des formalismes dans les opérations bancaires et financières

496. Multiplicité des objectifs. Les objectifs du formalisme sont nombreux632 et les catégories
élaborées ne sont en aucun cas exclusives : les formalités exigées par le législateur
poursuivent bien souvent des objectifs multiples. Ainsi on distingue classiquement le
formalisme de validité, le formalisme probatoire, le formalisme informatif, le formalisme
fiscal et le formalisme administratif.

497. Le formalisme de validité. On parle de formalisme de validité lorsque le non-respect des


exigences de forme imposées par la loi est susceptible d’entraîner la nullité de l’acte ; dès lors,
il ne s’agit plus de contrats consensuels mais de contrats solennels633. La formalité consiste en
un écrit, une signature, l’intervention d’un officier public, l’apposition de certaines mentions,
etc. Certains n’hésitent alors plus à qualifier de contrats solennels634, le contrat de crédit à la
consommation ou le contrat de crédit hypothécaire. Par ailleurs, ces formalités joueront aussi
un rôle probatoire. Pourtant, sous l’impulsion des nouveaux textes, le législateur devra, selon

631
On parle ainsi de formalisme probatoire, de validité, souple, d’opposabilité, administratif, de protection,
d’information, etc. (AUBERT J.-L, Le formalisme (rapport de synthèse), Rép. Defrénois, 2000, p. 933).
632
A titre d’exemple, Le Guide pour l’incorporation dans le droit interne de la Loi type de la CNUDCI sur le
commerce électronique, disponible à l’adresse : www.uncitral.org/fr-index.htm énonce, sans prétendre à
l’exhaustivité, onze fonctions assignées traditionnellement à l’exigence de l’écrit papier : « 1) veiller à ce qu'il y
ait des preuves tangibles de l'existence et de la nature de l'intention manifestée par les parties de se lier entre
elles; 2) aider les parties à prendre conscience des conséquences de la conclusion du contrat; 3) fournir un
document lisible par tous; 4) fournir un document inaltérable et conserver en permanence la trace d'une
opération; 5) permettre la reproduction d'un document de manière que chaque partie ait un exemplaire du même
texte; 6) permettre l'authentification des données au moyen d'une signature; 7) assurer que le document se
présente sous une forme acceptable par les autorités publiques et les tribunaux; 8) consigner l'intention de
l'auteur de l'"écrit" et conserver la trace de cette intention; 9) permettre un archivage aisé des données sous une
forme tangible; 10) faciliter le contrôle et les vérifications ultérieures à des fins comptables, fiscales ou
réglementaires; et 11) établir l'existence de droits et obligations juridiques dans tous les cas où un écrit" était
requis aux fins de validité ».
633
V. entre autres CATALA P., Le formalisme et les nouvelles technologies, op. cit., pp. 904 et s. ; BRASSEUR
P., Le formalisme dans le formation des contrats. Approches de droit comparé, op. cit., p. 626 et s., n°21 et s.
634
VAN OMMESLAGHE P., Le consumérisme et le droit des obligations conventionnelles : révolution,
évolution ou statu quo ?, Hommage à Jacques HEENEN, Bruxelles, Bruylant, 1994, pp. 534-535.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 244

certains, « éliminer tous les obstacles aux contrats de crédit électronique »635. Cela suppose
en pratique la suppression de l’obligation d’utiliser la voie postale pour les crédits
immobiliers636.

498. Le formalisme probatoire. Parfois, les formalités ne seront requises qu’à des fins
probatoires637. Ce formalisme dit ad probationem se distingue du formalisme requis ad
validitatem d’un point de vue théorique, en ce qu’il ne conditionne pas l’existence ou la
validité de l’acte juridique. En cas de non-respect, l’acte demeure valable mais ne pourra être
prouvé s’il est contesté. A titre d’exemple, l’article 1341 du Code civil impose la rédaction
d’un écrit pour tout acte, y compris les opérations bancaires, dépassant une valeur de 1500 €.

499. Le formalisme de publicité. Le formalisme de publicité638 vise les hypothèses où, pour
permettre aux tiers intéressés de prendre connaissance d’un acte, diverses mesures sont
exigées : transcription ou inscription dans un registre, notification, etc. En général, l’absence
de la formalité entraîne l’inopposabilité de l’acte aux tiers639. En matière de publicité foncière,
le régime était essentiellement organisé autour des supports écrits640. Désormais, un document
informatique peut tenir lieu de registre641 pour autant qu’il soit identifié, numéroté et daté dès
son établissement par des moyens offrant les garanties en matière de preuve. Diverses
dispositions prévoient également l’informatisation du registre de commerce642.En matière
bancaire, le Code monétaire et financier prévoit certaines obligations de publicité notamment
à l’article L. 512-70 pour la création de certains établissements643, à l’article L. 313-10
envisageant une inopposabilité aux tiers en cas de défaut de publicité de certaine opérations
de crédit-bail ; il fait également référence aux sûretés immobilières (inscription à la
conservation des hypothèques) garantissant un prêt.

635
GOURIO A., op. cit., p130.
636
Code de la consommation, art. 312-7 et L312-10.
637
Sur ce point, v. notamment LUCAS A., DEVEZE J. et FRAYSSINET J., Droit de l’informatique et de
l’Internet, Paris, PUF, 2001, p. 587 et s., n°858 et s. ; CATALA P., Le formalisme et les nouvelles technologies,
op. cit., p. 899 et s.
638
Sur ce point, v. LUCAS A., DEVEZE J. et FRAYSSINET J., op. cit., pp. 649-651, n°931 et s.
639
Sur certaines autres sanctions, v. LUCAS A., DEVEZE J. et FRAYSSINET J., op. cit., p. 650, n°933, spéc.
note 2.
640
Art. 2196 et s. du Code civil, décrets n°55-22 du 4 janvier 1955 et n°55-1350 du 14 octobre 1955.
641
Art. 2201 et 2203-1 du Code civil et art. 9-1 du décret du 4 janvier 1955 modifiés par la loi n°98-261 du 6
avril 1998. V. aussi le décret n°2000-489 du 29 mai 2000 en vertu duquel un procédé fiable d’identification et de
datation peut remplacer une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
642
V. les art. 20 (tenue des registres) et 30 (délivrance des copies) de l’arrêté du 9 février 1998, relatif au registre
du commerce et des sociétés.
643
Crédit maritime mutuel.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 245

500. Le formalisme fiscal. En matière fiscale aussi, des formalités sont prévues644 :
l’enregistrement et le timbre en constituent les principales. Leur non-respect n’a pas
d’incidence sur la validité de l’acte mais des sanctions fiscales pourront être infligées. Des
textes introduisent néanmoins certaines procédures pour permettre de recourir à
l’informatique645. Un système intitulé « Transfert des données fiscales et comptables »,
autorisé par le décret n°91-1403 du 27 décembre 1991, permet ainsi au contribuable de
communiquer à la Direction générale des impôts, via un moyen informatique, des
renseignements comptables et fiscaux nécessaires à la détermination des résultats646.

501. Le formalisme administratif. Il faut aussi relever que les formalités administratives se
multiplient dans le cadre de la formation des contrats. Préalablement à la conclusion de la
convention, une immatriculation, un agrément, une inscription, une demande d’autorisation
ou de dérogation sera parfois exigée. La sanction pourra être d’ordre pénal, voire affecter la
validité du contrat. Le juge pourra en effet prononcer la nullité de la convention. A titre
d’exemple, le Code monétaire et financier impose, dans son article L.152-4 une attestation de
déclaration des transferts de sommes à l’étranger.

502. Le formalisme informatif. Enfin, on constate de plus en plus de dispositions législatives qui
témoignent du formalisme informatif647. Pour protéger la partie faible du contrat, le législateur
impose ainsi d’intégrer diverses mentions dans le contrat ou de fournir avant ou après la
conclusion de la convention, de nombreuses informations. Ces exigences se rencontrent
essentiellement dans les contrats conclus avec les consommateurs à l’exemple de l’offre
préalable de crédit à la consommation et de crédit immobilier. Il est parfois même précisé
dans la loi en quels caractères ces informations doivent être imprimées et l’endroit où elles
doivent figurer sur le document. Des sanctions spécifiques règlent les hypothèses de non-
respect de ces formalités. La véritable nouveauté tient au développement de ce formalisme

644
V. MAZEAUD H. et L, MAZEAUD J. et CHABAS F., Leçons de droit civil, t. II, premier volume :
Obligations. Théorie générale, 9e éd., par CHABAS F., Paris, Montchrestien, 1998, p. 67, n°73.
645
LUCAS A., DEVEZE J.et FRAYSSINET J., op. cit., pp. 653-654, n°936.
646
Ce système fut étendu à la transmission des déclarations de résultat, de leurs annexes et des documents les
accompagnant par le décret n°95-309 du 20 mars 1995.
647
VAN OMMESLAGHE P., Le consumérisme et le droit des obligations conventionnelles : révolution,
évolution ou statu quo ?, op. cit., pp. 536-537, n°17 ; COUTURIER G., Les finalités et les sanctions du
formalisme, op. cit., pp. 885-886 ; NUYTTEN B. et LESAGE L, Formation des contrats : Regards sur les
notions de consensualisme et de formalisme, Rép. Defrénois, 1998, p. 506.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 246

informatif dans la convention de compte puisque les établissements de crédit doivent


désormais assurer une véritable transparence de l’information à destination du client648.

B. Les manifestations du formalisme dans les opérations bancaires et financières

503. Fonctionnalités du formalisme et diversité des formalismes. On regroupe classiquement


les manifestations du formalisme en quatre catégories649. Le formalisme peut être relatif au
support, à la présence humaine ou à la localisation, à l’implication de tiers ou encore à la
remise d’une chose.

504. Formalisme relatif au support. Il existe en effet certains textes législatifs ou réglementaires
qui imposent de recourir à un écrit650 (authentique ou sous seing privé), parfois même sous
forme manuscrite651, ou qui exigent que figurent dans le document diverses mentions (on
parle de mentions obligatoires)652, voire suggèrent certaines clauses653, en caractères (très)
apparents. De même, il est parfois nécessaire d’utiliser des documents ou formulaires
particuliers ou d’envoyer des notifications par lettre recommandée654, le cas échéant avec
accusé de réception. Des prospectus655, factures656 ou autres notices seront aussi exigés dans
certaines circonstances. Pour ce qui est de l’écrit et des mentions manuscrites, le nouvel
article 1108-1 du Code civil admet que lorsqu’un écrit est exigé ad validitatem, celui-ci puisse
être établi par un document électronique remplissant certaines conditions.

648
PIEDELIEVRE S., Les nouvelles relations contractuelles entre les banquiers et les consommateurs, JCP E, 28
juillet 2005, n° 30, p.1267.
649
V. DEMOULIN M. et MONTERO E., op. cit., p. 706 et s., n°19 et s.
650
L’article L.313-9 du Code monétaire et financier prévoit de facto la rédaction d’un contrat ; l’article L.313-21
du même Code exige également une information écrite de la possibilité d’une garantie sur les biens
d’exploitation de l’entreprise.
651
Art. L.313-7 du Code de la consommation sur l’exigence de la mention manuscrite de la caution.
652
Par exemple l’article L.313-23 du Code monétaire et financier énumère les mentions obligatoires du
bordereau de cession de créance professionnelle ; également, son article L.131-2 précise les mentions du chèque.
653
L’article L.313-17 du Code monétaire et financier suggère une clause de participation au bénéfice net de
l’emprunteur pour majorer l’intérêt fixe.
654
L’article L.313-12 du Code monétaire et financier impose une notification écrite pour réduire ou interrompre
le crédit aux entreprises.
655
L’article L.412-1 du Code monétaire et financier impose la publication d’un document en cas d’appel public à
l'épargne, destiné à l'information du public et portant sur le contenu et les modalités de l'opération ainsi que sur
l'organisation, la situation financière et l'évolution de l'activité de l'émetteur.
656
Article 289 du Code général des impôts, fixant la liste des mentions obligatoires.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 247

505. La présence des parties. Dans le formalisme relatif à la présence humaine, sont visées les
formalités en vertu desquelles le contrat doit être conclu en présence des parties ou dans un
lieu déterminé. On trouve un exemple de ce type de formalité dans l’article 3 du décret n°91-
160 du 13 février 1991, étendue ensuite dans l’article L. 563-1 du Code monétaire et
financier657. Il est prévu la même formalité à l’article L.131-15 du même code pour toute
personne qui remet un chèque en paiement. Il pourrait être argué que ce type de formalité
constitue un obstacle préalable, d’ordre pratique, à la dématérialisation du contrat658. Or,
conformément au considérant n°37 de la directive sur le commerce électronique, les Etats ne
sont tenus de supprimer que les obstacles résultant d’exigences juridiques. Quoi qu’il en soit,
même si cette interprétation devait être écartée, la directive ne prohibe pas purement et
simplement les exigences de forme mais exige que celles-ci puissent être satisfaites par voie
électronique659. Dans l’exemple précité, le but de la formalité – l’ouverture du compte en
présence des parties – est évidemment de s’assurer de l’identité du client. Cependant, celle-ci
n’en est pas pour autant garantie malgré cette formalité compte tenu du risque, toujours
présent, de faux papiers. Or, en recourant à une signature électronique, il semble possible
d’atteindre les mêmes objectifs. Sur la base d’une application de la théorie des équivalents
fonctionnels, la plupart des problèmes devraient pouvoir être résolus.

506. L’intervention d’un tiers. Le formalisme relatif à l’implication d’un tiers – notaire, officier
public, juge, etc. – est souvent requis pour que les parties prennent conscience de l’importance
de l’acte posé ou bénéficient de l’expérience d’un professionnel, voire encore pour protéger
des intérêts publics660. Une intervention législative n’est pas exigée pour l’heure : l’article 9,
§2, b), de la directive dispensant les Etats de s’attaquer aux « contrats pour lesquels la loi
requiert l’intervention des tribunaux, des autorités publiques ou de professions exerçant une
autorité publique ». L’article 9, §3, précise néanmoins que les Etats « soumettent tous les cinq
ans à la Commission un rapport sur l’application du paragraphe 2 en expliquant les raisons
pour lesquelles ils estiment nécessaire de maintenir les catégories visées au paragraphe 2,
point b), auxquelles ils n’appliquant pas le paragraphe 1 ». Les autorités ne pourront donc

657
Qui exige qu’avant l’ouverture d’un compte, « l’organisme financier s’assure de l’identité de son
cocontractant, par la présentation, lorsqu’il s’agit d’une personne physique, d’un document officiel portant la
photographie de celle-ci »
658
Sur la dématérialisation de la convention de compte, cf. infra n°510 et s.
659
GOBERT D. et MONTERO E., Le traitement des obstacles formels aux contrats en ligne, op. cit., p. 207,
n°389.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 248

pas faire l’économie d’une réflexion en profondeur sur le sujet. Ceci étant le législateur
français prévoit expressément la possibilité de dresser un acte authentique par voie
électronique, l’essentiel étant la présence du tiers qui assure la solennité. Les opérations
bancaires ne sont concernées qu’indirectement par ce formalisme, notamment lorsque des
sûretés immobilières sont exigées, celles-ci devant être passées devant notaire.

507. La tradition. Le formalisme relatif à la remise de la chose renvoie à la catégorie des contrats
réels661. Trois d’entre eux sont spécifiquement réglés par le Code civil : le gage (art. 2071 et
s.), le prêt662 (art. 1875 pour le commodat et art. 1892 pour le prêt de consommation) et le
dépôt (art. 1915). Pour ce qui est de l’influence de l’article 9, §1er sur le contrat de prêt, des
auteurs estiment que le législateur n’est pas tenu d’abolir « cette catégorie de contrats, qui
présentent l’intérêt d’attirer l’attention sur l’importance d’un élément matériel irréductible.
En effet, rien n’empêche, par ailleurs, de conclure par voie électronique des conventions
consensuelles ayant pour objet le prêt d’une chose, une mise en gage ou un dépôt »663. Par
ailleurs, on peut considérer que dans les contrats réels, la tradition n’est pas vraiment une
condition de validité du contrat mais plutôt une condition de son existence. Si cette formalité
n’est pas respectée, on voit mal comment une action en nullité pourrait être intentée, action
par laquelle serait en outre postulée la restitution de la chose664. On peut enfin rajouter que les
contrats classiquement considérés comme réels sont, si ce n’est en voie de disparition, à tous
le moins en nette diminution, puisque comme l’observe le Professeur T. BONNEAU665, la
Cour de cassation666 a décidé que : « le prêt consenti par un professionnel du crédit n’est par
un contrat réel ». Le prêteur est, par l'effet de l’accord de volonté, obligé au paiement de la

660
GOBERT D. et MONTERO E., Le traitement des obstacles formels aux contrats en ligne, op. cit., p. 207,
n°390 ; BRASSEUR P., Le formalisme dans la formation des contrats. Approches de droit comparé, op. cit., p. 637
et s., n°34 et s.
661
V. GOBERT D. et MONTERO E., Le traitement des obstacles formels aux contrats en ligne, op. cit., p. 208 et
s., n°391 et s ; VAN OMMESLAGHE P., Le consumérisme et le droit des obligations conventionnelles :
révolution, évolution ou statu quo ?, Hommage à Jacques HEENEN, Bruxelles, Bruylant, 1994, p. 535, n°15 ;
BRASSEUR P., Le formalisme dans la formation des contrats. Approches de droit comparé, op. cit, p. 685 et s.,
n°111 et s.
662
Aux termes de l’article 1874 du Code civil, il y a deux sortes de prêt : celui des choses dont on peut user sans
les détruire et celui des choses qui se consomment par l'usage qu'on en fait. La première espèce s'appelle prêt à
usage, ou commodat. La deuxième s'appelle prêt de consommation, ou simplement prêt.
663
DEMOULIN M. et MONTERO E., op. cit, pp. 728-729, n°47.
664
LAGARDE X., Observations critiques sur la renaissance du formalisme, op. cit., p. 1771.
665
BONNEAU T., Droit Bancaire, op. cit, n°521 p 360.
666
Civ., 1ère, 28 mars 2000, Bull. civ. I, n°105, p70 ; JCP G, 2000, II, 10296, et éd. E, p 898, concl. SAINTE-
ROSE ; D. 2000, cahier droit des affaires, p.240, obs. FADDOUL et, p.482, note PIEDELIEVRE S. ; RJDA5/00,
n°583, p.460 ; RDBF, n° 3, mai/juin 2000. 161, obs. CREDOT F.-J. et GERARD Y. ; JCP E, 2000, p.1086, obs.
GAVALDA C. et STOUFFLET J. ; RTD com. 2000.991, obs. CABRILLAC M. ; Contrats conc. consom., juillet
2000, n°106, note LEVENEUR L.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 249

somme convenue ; il en est de même, en matière de prêt à la consommation667 668


: la remise
des sommes participe de l’exécution des obligations nées du contrat et non de sa formation.

C. La dématérialisation des contrats bancaires

508. Directive commerce électronique et contrats bancaires : problématique. On peut se


demander s’il existe en matière bancaire et financière, et avant l’entrée en vigueur de cette
directive, des obstacles formels à la conclusion des contrats en ligne ; plus simplement, les
contrats bancaires et financiers sont-ils naturellement formels ? La directive « commerce
électronique » avec son principe d’abolition des obstacles formels favorise-t-elle
effectivement la réalisation de ces contrats en ligne ?

509. Les opérations de banque. Pour répondre à ces questions, il convient, pratiquement,
d’analyser les différents types de contrats bancaires pour en déduire un éventuel formalisme et
la difficulté de le dématérialiser. S’agissant des services bancaires et financiers, il semble que
la notion de contrats bancaires doit être entendue lato sensu, c’est-à-dire en fonction des
opérations de banque ainsi que des opérations connexes énoncés aux articles L.311-1 et
suivant du Code monétaire et financier, comme suit :
• La réception de fonds du public ;
• Les opérations de crédit ;
• La mise à disposition ou la gestion de moyens de paiement ;
• Les opérations de change ;
• Les opérations sur or et métaux précieux ;
• Les placements, souscriptions de valeur mobilières et produits financiers ;
• Le conseil et l’assistance, la gestion de patrimoine.
En fonction des éléments fournis par le Code monétaire et financier, on peut identifier
plusieurs types de contrats bancaires. En premier lieu, la convention de compte apparaît
comme le contrat le plus courant, destiné à organiser la relation entre l’établissement de
crédits et le client consommateur ; elle comprend les opérations de réception de fonds ainsi
que, généralement, la mise à disposition de moyens de paiement. Viennent en deuxième lieu
les opérations de crédit sous leurs différentes formes. En troisième lieu, les conventions

667
BONNEAU T., Droit Bancaire, op. cit, n°703 p 493.
668
Civ. 1ère, 27 mai 1998, Bull. civ. I, n°186, p125.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 250

relatives aux services rendus (valeurs mobilières, gestion de portefeuille) puis les opérations
particulières (sur or et métaux précieux, change), en quatrième et dernier lieu, complètent la
gamme des contrats bancaires.

510. La convention de compte. Qu’il soit de dépôt ou courant669, le compte bancaire fait l’objet
d’une convention soumise au droit commun des contrats. Comme le souligne très justement le
Professeur T. BONNEAU, il s’agit d’un contrat consensuel670. Néanmoins, la question de la
remise en cause de la nature consensuelle de la convention de compte peut légitimement se
poser, compte tenu des dernières évolutions législatives (loi MURCEF671 et de sécurité
financière). En effet, dans sa rédaction issue de la loi du 1er août 2003672, l’article L.312-1-1
du Code monétaire et financier semble imposer la rédaction d’un écrit : « la gestion d'un
compte de dépôt est réglée par une convention écrite passée entre le client et son
établissement de crédit ». La question est d’autant plus délicate que l’article L.312-1-4 du
Code monétaire et financier confère à cette disposition un caractère d’ordre public. Après
avoir été suspendue673 674
, cette disposition du Code monétaire et financier fait aujourd’hui
l’objet d’un arrêté du 8 mars 2005 qui détermine le contenu minimum de la convention de
compte675. Elle a été de nouveau modifiée, preuve que la question est sensible, par la loi de
finances pour 2005676 afin de tenir compte « des résultats de la négociation menée avec les
établissements bancaires et qui avait conduit à la Charte relative aux conventions de compte
de dépôt du 9 novembre 2004 »677. Cependant, la nouvelle loi restreint le champ d’application

669
Sur la distinction, cf. BONNEAU T., Droit Bancaire, op. cit., n°333 et s p. 215.
670
BONNEAU T., Droit Bancaire, op. cit., n°355 note 99 p. 228 : « on peut penser que l’écrit n’est pas une
condition de forme et que le défaut d’écrit ne peut pas être sanctionné par la nullité ».
671
Loi du 11 décembre 2001.
672
Loi nº 2003-706 du 1 août 2003 art. 77 I 2, loi dite de sécurité financière.
673
L’article 77 de la loi dite de sécurité financière a suspendu pendant 18 mois l’application de cette disposition
à charge pour les établissements de crédit de respecter « les principes de contractualisation et de transparence
tarifaire définis par la loi ». C’est ainsi qu’à la demande du Ministre, les principaux établissements de crédit
(BNP Paribas, Fédération des Banques Populaires, Caisse Nationale des Caisses d’Epargne, Crédit Agricole,
Crédit Lyonnais, Confédération Nationale du Crédit Mutuel, Société Générale, La Poste) ont adhéré le 9 janvier
2003 à une charte relative aux conventions de compte de dépôt. Il ressort clairement de ce texte que ces
organismes s’engagent à contractualiser par écrit les conventions de compte et en fixent le contenu minimum
674
A l'issue des dix-huit mois, un bilan de cette démarche, fondée sur la confiance et sur la responsabilisation des
partenaires, devait être dressé. S'il apparaissait alors que les obligations figurant dans la charte n’étaient pas
remplies, les dispositions prévues devaient être mises en oeuvre par la voie réglementaire. BONNEAU T., Des
nouveautés bancaires et financières issues de la loi n°2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière, JCP E,
2003, 1325, spéc. n°31.
675
Arrêté du 8 mars 2005 portant application de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier précisant les
principales stipulations devant figurer dans les conventions de compte de dépôt.
676
Loi n°2004-1484 du 30 décembre 2004 de Finances pour 2005, art. 106.
677
MATHEY N., Les relations des banques avec leur clientèle : les conventions de compte, Contrats conc.
consom., mai 2005, p.7.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 251

de l’article L. 312-1-1 en limitant la nécessité d’une convention écrite aux seules relations de
la banque avec des personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels. « Sont
ainsi exclues les personnes morales (commerciales ou civiles, telles que les associations)
ainsi que les personnes physiques agissant dans le cadre de leur activité professionnelle,
commerciale ou civile (profession libérale et artisanale) »678. Par ailleurs, l’alinéa 2 de
l’article L. 312-1-1 prévoit que « l'acceptation de ce contrat est formalisée par la signature
du ou des titulaires du compte », de sorte que la loi distingue clairement la validité de l’accord
de sa formalisation.

511. Analyse. Il n’en reste pas moins que si la loi impose la rédaction d’un écrit679 ou plutôt la
remise d’un écrit car il s’agit avant tout pour le consommateur d’un contrat d’adhésion680,
l’exigence satisfait une obligation d’information précontractuelle mise à la charge de
l’établissement de crédit. La convention tacite n’en serait pas moins valable juridiquement.
Concernant la relation établissement/client, les conditions non remplies seraient inopposables
au client vu que, eu égard à la théorie générale des contrats, ces éléments ne seraient pas
rentrés dans la sphère contractuelle. On peut donc conclure que la remise de l’écrit permet
simplement à l’établissement de crédit de se ménager la preuve du respect de son obligation
légale d’information issue de l’article 7 du décret 84-708 du 24 juillet 1984681. De même, si la
conclusion de la convention reste souvent marquée matériellement par l’ouverture d’un
compte, il ne s’agit là que de l’effet de l’exécution de la convention et non d’une condition de
validité, de telle sorte que la nature consensuelle de cette dernière ne semble pas remise en
cause par le souci de protection du consommateur. Comme le souligne un auteur, il s’agit en
réalité « de formalisation et de réglementation du compte et des services attachés qui ont, de
tout temps, reposé sur l’accord des parties »682 .

678
Ibid.
679
STOUFFLET J., Nouvelles interventions législatives dans les relations entre les établissements de crédit et
leurs clients, RDBF, janvier-février 2002, n° 1, p. 37, n°4 ; CONSTANS E., Les progrès de la relation banques-
consommateurs, Banque magazine, octobre 2004, n° 662, p.33.
680
BONNEAU T., Droit Bancaire, op. cit., n°355 p 228 ; RIVES-LANGE et CONTAMINE-RAYNAUD, Droit
bancaire, 6ème éd., Paris : Dalloz, 1995, p 175.
681
« Les établissements de crédit sont tenus de porter à la connaissance de leur clientèle et du public les
conditions générales de banque qu'ils pratiquent pour les opérations qu'ils effectuent. Lorsqu'ils ouvrent un
compte, les établissements de crédit doivent informer leurs clients sur les conditions d'utilisation du compte, le
prix des différents services auxquels il donne accès et les engagements réciproques de l'établissement et du
client ».
682
BONHOMME R., Aspects bancaires de la loi MURCEF, Banque et Droit, mars-avril 2002, n° 82, p.4.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 252

512. Bilan. Pour se limiter, à ce stade de nos propos, à la convention de compte (et la mise à
disposition d’instruments de paiement l’accompagnant) qui reste l’opération de banque la plus
courante, la dématérialisation et la conclusion du contrat via l’Internet ne semblent pas poser,
a priori, de problème, compte tenu de sa nature consensuelle. Le formalisme informatif peut
être satisfait via l’envoi de courriel ou la consultation d’informations sur le site Internet de
l’établissement de crédit. L’Internet dans ses aspects de technique informatique vient ici
concourir à la légalité des opérations bancaires. On peut même affirmer que l’Internet jouera
un rôle plus protecteur que son homologue papier, justement parce que l’absence physique de
l’autre partie (professionnel) réduira les risques de pression sur le consommateur (le bonus
dolus) et que les progrès technologiques permettent d’imposer la lecture des conditions
générales a priori, avant signature. Or dans une relation physique cela ne se fait pratiquement
pas. Mieux encore, l’Internet se caractérise par une relation purement écrite (échange de
courriel, formulaire en ligne…), ce qui tendra à faciliter les preuves et limiter les
contestations. Le consommateur investisseur ne se trouve donc pas moins bien protégé en
passant via l’Internet : la quantité et la qualité des informations étant relativement aisément
vérifiables. Il n’en reste pas moins des incertitudes concernant certains contrats, et notamment
le cautionnement, puisque la loi pour l’initiative économique683 vient de réaffirmer et de fixer
les termes impératifs de la mention manuscrite ; pourtant les objectifs de cette disposition ne
seraient pas incompatibles avec la dématérialisation.

513. Formalisme électronique ou adaptation du formalisme. Peut-on affirmer, in fine, que la


volonté de clarifier la réglementation applicable à la conclusion des contrats bancaires en
ligne modernise le formalisme traditionnel ? Une réponse négative doit nécessairement
s’imposer pour deux raisons principales. En premier lieu, le formalisme électronique (que l’on
retrouve sur l’Internet) obéit aux mêmes objectifs que le formalisme classique (information,
protection…). En second lieu, le contenu du formalisme électronique n’est pas propre à
l’Internet mais résulte d’une adaptation technique du formalisme traditionnel (par exemple :
l’obligation faite au professionnel d’indiquer en ligne le processus de conclusion du contrat –
article 1369-1 du Code civil). Il n’y a pas plus d’information à apporter en raison de la
dématérialisation des relations684. Il ne nous semble donc pas possible d’annoncer
l’avènement d’un formalisme électronique autonome, même si certaines pratiques peuvent
venir jeter un doute, et plus précisément celle du « double clic » instaurée par le nouvel article

683
Loi n° 2003-721 du 1er août 2003.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 253

1369-2685 (issu de la LEN) du Code civil ainsi que celle de l’accusé de réception de la
commande dont il apparaîtrait qu’il n’aurait « qu’un rôle purement technique, dépourvu de
toute valeur contractuelle »686. Il en résulte tout de même une certaine discrimination avec les
contrats matérialisés dans la mesure où ces derniers peuvent se former par la simple rencontre
des consentements687 ; il faut par conséquent en déduire que l’Internet impose sa nature écrite
et formelle au consensualisme de principe.

514. Formalisme et développement de l’Internet : remarque terminale. L’adaptation du


formalisme traditionnel au contexte de la dématérialisation des opérations bancaires sur
l’Internet n’apparaît donc pas comme un frein à leur développement. Bien au contraire, il
participe à la sécurisation de l’outil et contribue nécessairement à créer un climat de confiance
et à rassurer les consommateurs. Pour résumer, soit le formalisme est ad probationem et le
code civil autorise la preuve électronique, soit il est ad validitatem et la LEN permet de
satisfaire ses exigences électroniquement. Les opérations bancaires et financières ont-elles
donc besoin d’autres évolutions législatives afin de parfaire juridiquement leur
dématérialisation ? La réponse est certainement positive compte tenu de la nécessité de
l’identification des parties. Sans la signature électronique la sécurité juridique des opérations
semble anéantie. En revanche, il n’est pas certain que le principe d’abolition des obstacles
posé par la directive sur le commerce électronique soit d’une grande utilité aux opérations
bancaires, étant donné que ces entraves peuvent être levés par d’autres textes. Pour terminer,
force est de constater que les obstacles à la dématérialisation des opérations bancaires ne sont
plus d’ordre juridique mais davantage d’ordre matériel ; l’adaptation complète du formalisme
à l’Internet suppose que tous les formalismes soient transposables : publicité et fiscal, ce qui
impliquerait encore la dématérialisation totale des registres et de l’enregistrement, de telle
sorte que l’ensemble d’une opération, et pas seulement sa conclusion, puisse être effectué via
l’Internet.

684
GRANIER T. et JAFFREUX C., Internet et transactions financières, op. cit., p 60, 2.1 et s.
685
« Pour que le contrat soit valablement conclu, le destinataire de l'offre doit avoir eu la possibilité de vérifier
le détail de sa commande et son prix total, et de corriger d'éventuelles erreurs, avant de confirmer celle-ci pour
exprimer son acceptation. L'auteur de l'offre doit accuser réception sans délai injustifié et par voie électronique
de la commande qui lui a été ainsi adressée. »
686
TABAROT M., Avis n°608 (2002-2003) fait au nom de la commission des lois, déposé le 11 février 2003.
687
VERBIEST T., Loi pour la confiance dans l’économie numérique : examen du nouveau régime du commerce
électronique, 30 juillet 2004, disponible sur : www.droit-technologie.org.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 254

Section 2. La signature électronique : technique d’identification et de preuve


des transactions bancaires et financières sur l’Internet

515. La problématique. Le développement de l’Internet comme support de la prestation de


services bancaires et financiers oblige les établissements offrant ces services à exercer une
vigilance sans cesse accrue en matière de sécurité688. Cette dernière concerne entre autres la
protection physique et logique du système informatique mis en place par l’établissement, en
vue notamment de lutter contre toute tentative d’accès non autorisé dans ce système. Elle a
également vocation à offrir des garanties d’authentification, d’intégrité, de confidentialité et
de preuve des données bancaires et financières transmises par le réseau. Il convient d’assurer
l’étanchéité la plus complète afin de protéger les données personnelles des clients, la
comptabilité bancaire et financière ainsi que les applications et les systèmes de traitement et
de restitution des opérations. De l’autre côté, le consommateur investisseur doit, lui aussi,
pouvoir avoir confiance dans la non falsification du consentement qu’il émet. Au delà de la
question de sécurité technique, l’enjeu est d’assurer une protection juridique ayant comme
composant des moyens fiables de preuve et d’identification.

516. Illustration. Pour reprendre l’exemple explicite de la convention de compte, le formalisme689


implique la fourniture de pièces permettant l’identification du souscripteur (photographie)690.
Si elle est érigée à titre de formalisme obligatoire – sous peine de sanction –, il s’agit en fait
d’une exigence indispensable à la conclusion de toute convention de compte. Si les textes
européens ne s’opposent pas à une identification dématérialisée, ils exigent que les parties
puissent à tout le moins s’identifier de manière claire691. Or la solution retenue encore
aujourd’hui, si l’on peut la regretter692, est celle de l’envoi d’une copie des pièces par courrier

688
D’ailleurs les derniers chiffres publiés montrent que le marché de la sécurité devrait croître d’environ 17,4%
en 2005, v. Atelier groupe BNP Paribas, Solutions de sécurité : un marché en hausse de près de 17%, 28
novembre 2005, disponible sur : www.atelier.fr.
689
Décret n°91-160 du 13 février 1991 précité.
690
Cette exigence n’est pas purement française, mais participe d’une volonté de lutte contre le blanchiment
d’argent. Comp. article 4 de la loi belge du 11 janvier 1993 relative à la prévention de l’utilisation du système
financier aux fins de blanchiment de capitaux, modifiée par la loi du 10 août 1998.
691
ROLLIN JACQUEMYNS L., VERBIEST T., L’offre de services et produits financiers sur Internet,
RDAI/IBLJ, n°1, 2000, p.3-41.
692
Selon ROLLIN JACQUEMYNS L. : « Il serait bénéfique pour la libre circulation des capitaux que cette
formalité puisse être remplie à distance. Et il semblerait que la technologie puisse apporter une solution à ce
problème », Cahiers du CRID, n°16 p. 112.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 255

postal693. Sans se satisfaire d’une telle situation, pourrait-on alors se suffire d’une
numérisation des pièces et de l’envoi conséquent par courrier électronique ? Les exigences
d’identification seraient-elles alors remplies ? Et, quant à la preuve de l’identité, celle-ci
serait-elle assurée ?

517. Définition et différentes formes de signature électronique. Les spécialistes s'accordent


généralement pour considérer que le terme de « signature électronique » désigne une notion
générique englobant divers mécanismes techniques méritant d'être tenus pour des signatures
dans la mesure où ils permettent, à eux seuls ou en combinaison, de réaliser certaines
fonctions essentielles à cette institution juridique : identification de l'auteur de l'acte,
manifestation du consentement au contenu de l'acte, maintien de l’intégrité du contenu du
document, etc. Sans vouloir exclure de nouvelles techniques de signature et sans prétendre
être exhaustif, on peut regrouper ces mécanismes en quatre catégories: la signature manuscrite
numérisée, le code secret associé à l'utilisation d'une carte, la signature biométrique et la
signature digitale (ou numérique).

518. La signature manuscrite numérisée. Le mécanisme de signature électronique le plus


sommaire est sans nul doute celui qui consiste à numériser une signature manuscrite. Il saute
aux yeux que la force du procédé, soit la simplicité, est aussi sa faiblesse: en effet, quiconque
dispose d'un spécimen (papier) de signature ou d'un accès au système ou support magnétique
sur lequel celle-ci est stockée peut, lui aussi, la reproduire avec le même succès. C'est dire si
le procédé, à lui seul, présente un degré de sécurité technique et, par conséquent juridique,
pour le moins aléatoire. Pour ces raisons, il est clair qu’il ne peut satisfaire aux exigences de
preuve et d’authentification des opérations bancaires en ligne, à moins d'être combiné à
l'usage de la cryptographie.

519. L’utilisation combinée d’une carte et d’un code secret. « Le système des cartes bancaires
français utilise bien une forme de signature électronique», précise Monsieur J.-P. BUTHION,
chargé de mission au GIE Carte bancaire694. Il rend possible des transferts de fonds et des
paiements. Le code confidentiel695 joue alors le rôle de signature électronique696. A vrai dire,

693
Article 321-54 et s. du RG AMF relatifs aux prescriptions et recommandations pour les prestataires de
services d’investissements offrant un service de réception/transmission ou d’exécution d’ordres via l’Internet
694
LATRIVE F, Le paraphe à la main perd son monopole d'ultime preuve, Libération, 25 février 2000.
695
Généralement désigné par le sigle P.I.N., i.e. Personal Identification Number.
696
BONNEAU T, Droit bancaire, op. cit,. p 310 n°441.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 256

l'utilisation combinée d'une carte et d'un code ne peut être tenue pour une signature
électronique au sens strict de la notion. En effet, ces éléments associés constituent « bien plus
un mécanisme d'autorisation d'accès à un système informatique propriétaire qu'un
mécanisme de signature susceptible de permettre non seulement la réalisation des mêmes
fonctions de la signature classique, mais également de réaliser ces fonctions dans la quasi-
totalité des situations où se manifeste la signature classique, et ce, tant dans le cadre de
réseaux ouverts que fermés »697. Force est de reconnaître que les fonctions essentielles de la
signature ne sont pas idéalement remplies698. Plus fondamentalement, l'intérêt de la notion de
signature électronique est de pouvoir considérer un document comme un acte sous seing
privé, de sorte qu'il puisse bénéficier de la force probante attachée à ce type d'acte. A cet effet,
il est impérieux qu'à défaut de figurer physiquement sur le document, la signature lui soit au
moins liée logiquement. Or ce n'est pas le cas, la bande journal produite par le système pour
attester l'opération ne contenant aucune trace du code secret699. Pour cette raison, la carte et le
code ne peuvent, en eux-mêmes, être assimilés à une signature. Dans le secteur bancaire, cet
inconvénient est surmonté grâce aux conventions700 conclues entre organismes financiers
ainsi qu'entre ceux-ci et leurs clients701.

520. Les signatures biométriques. La science biométrique s'intéresse aux caractéristiques


physiques uniques des personnes, susceptibles de les identifier dans leur individualité702 703
.
En particulier, leur utilisation courante à des fins de signature se heurte à divers obstacles

697
PARISIEN S. et TRUDEL P., L'identification et la certification dans le commerce électronique, Québec : Ed.
Yvon Blais Inc., 1996, p. 99.
698
AMORY B. et POULLET Y., Le droit de la preuve face à l'informatique et à la télématique : approche de
droit comparé, DIT, 1985, pp. 11 et s.;. THUNIS X et SCHAUSS M., Aspects juridiques du paiement par carte,
Cahiers du C.R.I.D., n° 1, E. Story-Scientia, 1988, n° 33 et s.; BUYLE J.-P., La carte de banque à piste
magnétique, RDC, 1984, p. 663 et s.
699
BUYLE J.-P., La carte de paiement électronique, in La banque dans la vie quotidienne, Bruxelles, Ed. du
Jeune Barreau, 1986, p. 471.
700
Dans le cas des Carte bleue en France aujourd'hui, c'est le GIE Carte bancaire qui sert de caution aux
transactions. Commerçants et clients ont confiance, car la sécurité du système est garantie par un organisme
identifié, habilité à distribuer les lecteurs.
701
Pour des exemples, THUNIS X. et SCHAUSS M., op. cit., pp. 46-47, n° 74 et 75 et les annexes.
702
Parmi d'autres procédés, on peut citer l'examen des empreintes digitales (dactyloscopie) ou des vaisseaux
sanguins de la rétine de l'œil (rétinoscopie), la reconnaissance vocale ou encore la reconnaissance dynamique de
la signature (analyse non du graphisme comme tel, mais de la manière dont il est tracé: vitesse, mouvements,
pression sur la plume…). Pour autant que la particularité biométrique soit liée à un individu et que le lien établi
soit sécurisé, ces méthodes peuvent remplir une fonction d'identification, pour des applications diverses (accès à
des salles protégées, à des coffres, enquête criminelle, etc.), et notamment, à des fins de signature. Sauf
exceptions (on songe bien sûr à l'analyse des empreintes digitales, mais aussi aux progrès notables de la
reconnaissance vocale), la plupart de ces techniques en sont encore à un stade expérimental.
703
A ce sujet, SYX D., Vers de nouvelles formes de signature ? Le problème de la signature dans les rapports
juridiques électroniques, DIT, 1986/3, pp. 143-144, n° 79 à 82.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 257

pratiques : lourdeur et coût élevé de leur mise en œuvre qui nécessite un lecteur ad hoc
permettant la numérisation du paramètre physique concerné. Entre autres inconvénients, on
mentionne également le fait que certains caractères physiques peuvent être sujets à des
variations (la voix, l'influence du stress pour l'analyse de la dynamique de la signature…) et la
réticence du public à l'usage de certains procédés. Ces divers facteurs expliquent que les
procédés de signature biométrique soient actuellement très peu utilisés dans les transactions
sur les réseaux, même dans le secteur bancaire et financier. Au demeurant, si les procédés
biométriques permettent d'identifier l'auteur de la signature, on estime en général qu'ils ne
garantissent pas nécessairement l'expression correcte de son consentement. La certitude de
l'animus signandi dépendra largement de la fiabilité du système technique et de la procédure
d'ensemble dans laquelle s'intègre l'application.

521. La signature numérique ou digitale. La signature dite numérique ou digitale repose sur les
procédés de cryptographie704. Pour éviter toute confusion, il convient de noter que ceux-ci
peuvent servir non seulement à des fins de signature, mais aussi dans le but de garantir la
confidentialité des échanges. Cette dernière fonction, appelée chiffrement705, est généralement
réalisée à l'aide de produits qui sont notamment fondés sur le Data Encryption Standard
(DES)706. Un tel procédé est surtout efficace dans les réseaux fermés; la nécessité de faire
connaître la clé à son destinataire, avec les inévitables risques d'interception et de répudiation
du message, entraîne qu'il est en revanche, à lui seul inadapté aux réseaux ouverts ou pour une
utilisation à des fins de signature. Le problème du partage des clés a été résolu par le
développement de la cryptographie asymétrique, dite aussi « à clé publique ». Celle-ci permet
non seulement d'expédier des messages confidentiels dans de meilleures conditions de
sécurité, mais aussi de réaliser des signatures numériques. Une application répandue de
cryptographie à clé publique est le R.S.A707.

522. Précisions. Il apparaît important de fournir une explication708 du fonctionnement de la


signature numérique709, fondé sur la cryptographie asymétrique, pour pouvoir comprendre les

704
Pour une explication détaillée, v. PARISIEN S. et TRUDEL P., op. cit., pp. 93 à 113; HUBIN J., La sécurité
informatique, entre technique et droit, Cahiers du C.R.I.D., n° 14, E. Story-Scientia, 1998, spéc. pp. 68-112.
705
Lequel consiste en la transformation d'un message dit "en clair" en une chaîne de caractères alphanumériques
qui ne sont compréhensibles que pour la personne autorisée.
706
Il s'agit d'un système cryptographique à clé unique (ou à clé secrète) utilisant un algorithme qui, comme le
suggère son nom, chiffre et déchiffre un message à l'aide d'une seule clé.
707
V. supra n° 168.
708
Pour plus de détails, v. PARISIEN S. et TRUDEL P., op. cit., pp. 93 à 113.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 258

concepts et les enjeux de la directive européenne ainsi que des législations nationales qui
transposent cette directive. Dans un système à clé publique, la réalisation de la fonction
d’identification suppose qu’une personne dispose de deux clés mathématiques
complémentaires : une clé privée, dont le caractère secret doit effectivement être préservé, et
une clé publique, qui peut être librement distribuée710. Ces deux clés sont générées sur base
d’une fonction mathématique telle qu’il est impossible dans un laps de temps raisonnable de
déduire de la clé publique la clé privée correspondante. La clé publique doit dès lors
représenter une fonction irréversible de la clé privée qui permet de « signer » le message.
L’opération de décodage s’effectue, quant à elle, selon le principe de la complémentarité des
clés : un message encodé avec une clé privée ne peut être décodé qu’avec sa clé publique
complémentaire. L’identité du signataire est confirmée par un certificat, émis par un PSC, qui
atteste de l’identité du signataire et que la clé publique en question lui appartient
effectivement711 712
. Reste à préciser que l'utilisation de la cryptographie à clé publique
suppose l'organisation de la publicité des clés publiques et l'instauration d'un mécanisme de
contrôle visant à s'assurer en permanence que celles-ci correspondent bien aux personnes qui
s'en prétendent titulaires. Cette double mission de publicité et de certification est actuellement
assumée par un tiers certificateur (appelé « prestataire de service de certification » ou encore
« autorité de certification »).

523. Plan. Ces précisions étant faites, la signature électronique apparaît théoriquement comme
l’élément fondamental, la clé, permettant la conclusion des conventions bancaires en ligne,
assurant l’identification et l’authenticité du consentement, c’est-à-dire finalement la preuve
des transactions bancaires et financières sur l’Internet. La mise en place d’un système
financier dématérialisé et sécurisé tant pour les établissements de crédits que pour les

709
V. aussi le processus de création d’une signature digitale dans CAPRIOLI E. A, Sécurité et confiance dans le
commerce électronique : Signature numérique et autorité de certification, JCP G., avril 1998, n°14, p.588, n°27.
710
Pour assurer la confidentialité d'un échange, l'expéditeur chiffrera le message à l'aide de la clé publique du
destinataire, qui pourra uniquement le déchiffrer au moyen de sa propre clé secrète. Ainsi sera-t-il le seul à
pouvoir prendre connaissance du message. Il va de soi que les deux fonctions peuvent être combinées pour
l'envoi d'un message à la fois confidentiel et signé, ce qui sera généralement le cas pour les transactions
financières.
711
Notons que, même si la probabilité est extrêmement faible, il est possible que deux messages différents
aboutissent à une même empreinte.
712
Sur la fonction de hachage, remarquons que la réalisation d’un condensé du message à l’aide de la fonction de
hachage irréversible n’est pas indispensable. En effet l’émetteur du message pourrait directement encoder le
message avec sa clé privée sans nécessairement passer par la production du condensé. Néanmoins la fonction de
hachage irréversible sera souvent utilisée pour des raisons informatiques dans un souci de gagner du temps :
encoder avec la clé privée un condensé (fichier de petite taille) est plus rapide que l’encodage du message en
clair (fichier de plus grosse taille).
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 259

investisseurs passe par la reconnaissance juridique de la signature électronique. Aussi, les


règles de droit en vigueur qui font obstacle à la recevabilité comme preuve des documents
signés électroniquement (§1) peuvent-elles être surmontées, tant au niveau européen qu’au
niveau national. Au plan communautaire, la directive sur les signatures électroniques713
permet la reconnaissance légale du procédé (§2). Au niveau national (§3), la transposition
assure notamment l’équivalence juridique entre la preuve littérale électronique et
traditionnelle.

§1. Les obstacles historiques à l’admissibilité de la preuve électronique

524. Suprématie de l’écrit. Le principal obstacle venait de la conception qui nous avait été donnée
des notions d’écrit et de signature. En effet, le droit français de la preuve est fondé sur le
principe de la prééminence de l’écrit. Le Professeur Y. POULLET explique cette faveur
reconnue à l’écrit « par la haute valeur sécuritaire de l’écrit, caractérisé par sa permanence,
par une signature dans laquelle l’auteur se reconnaît et parce qu’il apparaît comme un
support efficace à l’information des parties »714. Le fondement juridique du droit de la preuve
en matière de droit des obligations se trouve dans l’article 1341 du Code civil, qui consacre le
principe de la prééminence de l’écrit : la preuve absolue est la preuve écrite. Il précise qu’ « il
doit être passé acte devant notaire ou sous signature privée, de toutes choses excédant une
somme ou valeur de [1500 euros] ». En d’autres mots, la partie qui veut faire la preuve d’un
acte juridique en matière civile715, dont la somme dépasse 1500 euros, doit apporter la preuve
par un écrit signé716. Les opérations bancaires n’échappent pas à cette règle.

525. Problématique. Une question fondamentale réside dans celle de savoir ce qu’on entend par
« écrit signé ». Ce concept peut-il s'étendre au document signé électroniquement, par exemple
un e-mail signé digitalement ? Le Code civil ne donnait pas, jusqu’il y a peu, de définition ni
de la notion d’écrit ni du concept de signature et, selon le Professeur E. CAPRIOLI, « n’est-il

713
Directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre
communautaire pour les signatures électroniques, JOCE, loi 13 au 19 janvier 2000, pp. 12 à 20.
714
POULLET Y., Les transactions commerciales et industrielles par voie électronique. De quelques réflexions
autour du droit de la preuve, in Le droit des affaires en évolutions, Le juriste face à l’invasion informatique,
Colloque ABJE, 24 oct. 1996, Bruxelles, Bruylant, Anvers, Kluwer, 1996, p. 48.
715
En matière commerciale, la preuve est libre.
716
Ce qui exclut la preuve par témoignages et présomptions, sauf si la partie peut se prévaloir des exceptions à
l’article 1341, soit l’article 1347 (commencement de preuve par écrit) ou l’article 1348 (impossibilité de se
procurer un écrit).
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 260

pas également bon de rappeler que le papier était en situation de monopole de fait ? »717. La
position selon laquelle la loi n’excluait pas la signature électronique était donc défendable718,
a fortiori dans le secteur bancaire et financier, qui a toujours su accueillir favorablement les
évolutions techniques.

526. Controverses. Toutefois, s’est très vite imposée une conception formaliste des notions ayant
tendance à envisager l’écrit comme un écrit sur support papier et à définir la signature comme
devant être un signe, accompagné d’un certain graphisme, qui est apposé de manière
manuscrite. Certains auteurs préconisaient déjà une définition plus souple de la signature719
comme étant « tout signe intimement lié à un acte permettant d’identifier et d’authentifier
l’auteur de cet acte et traduisant une volonté non équivoque de consentir à cet acte », cette
dernière remplissant alors ses deux fonction principales : l’identification de l’auteur et la
manifestation de sa volonté. Aussi la jurisprudence française paraît-t-elle avoir légèrement
assoupli sa position ces dernières années. En effet un arrêt important de la chambre
commerciale de la Cour de cassation du 2 décembre 1997 720 semble avoir créé une ouverture
en faveur d’une interprétation fonctionnelle de la notion d’écrit (au sens d’un acte sous seing
privé) :qui « peut être établi et conservé sur tout support, y compris par télécopie, dès lors
que son intégrité et l’imputabilité de son contenu à l’auteur désign, ont été vérifiées ou ne
sont pas contestées ».

527. Portée. Ce qui compte, en définitive, ce n’est ni le formalisme, ni le support physique, ni le


mode de communication des volontés, mais la certitude que l’écrit émane bien de celui auquel
il pourrait être opposé, en d’autres termes, que ni son origine, ni son contenu n’ont été
falsifiés (la Cour parle d’imputabilité et d’intégrité). Deux enseignements peuvent être tirés de
cet arrêt. Premièrement, la Cour se libère des exigences formelles et règle ainsi le problème de
la recevabilité des documents non signés manuscritement (et a fortiori des documents
électroniques). Elle affirme qu’un document écrit ne doit plus être déclaré irrecevable par le

717
CAPRIOLI E., Le juge et la preuve électronique, 10 janvier 2000, disponible sur : www.juriscom.net .
718
Les premières études doctrinales viennent du droit maritime et du droit bancaire : VASSEUR M.,
L’informatique et quelques-unes de ses applications en matière bancaires, Rev. Franç. De comptabilité, 1979,
p.613 ; POULLET Y. et AMORY B., Le droit de la preuve face à l'informatique et à la télématique, RIDC, 1985,
2, p.331 s. ; C.R.I.D. (AMORY B. éd.), Electronic banking, Bruxelles, Story scientia, 1989.
719
DEVYS C, Du sceau numérique à la signature électronique, sous la direction de DHENIN C., Vers une
administration sans papier, Paris, La documentation Française, 1996, p.96.
720
Com. 2 déc. 1997, Bull civ. IV n°315 ; Dalloz, 1998, p. 192, note MARTIN D.R.; JCP 1998, II, 10097, note
GRYNBAUM L. ; JCP E 1998, n°5 p.178; note BONNEAU T.; LECLERCQ P., D.I.T., 1998/1, pp. 56-60; RTD
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 261

seul fait qu’il ne s’agit pas d’un écrit papier signé manuscritement, et cela même si l’acte
juridique dépasse le montant fixé par la loi. De plus, elle déclare que la télécopie ne doit pas
être traitée comme une copie fidèle et durable ou un commencement de preuve par écrit, mais
tout simplement comme un écrit721. Deuxièmement, si la Cour se prononce en faveur de la
recevabilité d’autres écrits que l’écrit traditionnel, elle est plus réservée quant à leur valeur
probante. En effet, elle ne semble pas accorder d’office à cet écrit (la télécopie) la force
probante qui est attribuée à l’acte sous seing privé. Elle ne le sera que si les fonctions
(imputabilité et intégrité) ont été vérifiées ou ne sont pas contestées. Si l’acte n’est pas
contesté (ce qui est le cas en l’espèce), il est aisé d’affirmer que les fonctions sont satisfaites.
Par contre, si l’acte est contesté, le juge ne lui accordera la force probante d’un acte sous seing
privé que si l’intégrité et l’imputabilité de celui-ci ont été vérifiées. Toutefois, comme le
problème ne se posait pas, la Cour ne souffle mot du contenu concret de ces vérifications et de
la manière dont elles doivent s’opérer. Elle se borne à considérer qu’il revient au juge du fond
d’analyser les circonstances dans lesquelles a été émis l’écrit pour établir s'il peut être retenu
comme établissant la preuve d’un acte. On ne se trouve guère dans une position plus enviable
que celle que l’on a connue jusqu’à présent, puisqu’une nouvelle fois les parties devront tenter
de convaincre le juge que l’imputabilité et l’intégrité de l’acte sont garanties avec une certaine
fiabilité, en rencontrant les mêmes difficultés que celles rencontrées lorsqu’elles devaient
persuader le juge que les conditions pour pouvoir bénéficier des exceptions à l’exigence d’un
écrit étaient remplies. Ainsi, « ces écrits seront nécessairement toujours imparfaits, parce que
soumis à une appréciation souveraine du juge, cas par cas, de leur fiabilité et imputabilité, à
la différence de ce qu’il en est pour les écrits parfaits du Code civil, même sous seings privés,
qui s’imposent aux juges (sauf le cas de la dénégation de signature) »722. On ne fait donc que
déplacer le problème, du moins en ce qui concerne la force probante attachée à ce type d’écrit.

528. Généralisation ? Enfin, signalons que cet arrêt est contesté en ce qu’il se situe sur le terrain
de la preuve commerciale, caractérisé par sa souplesse, et traite de la cession de créance,
matière régie par le Code monétaire et financier723 et non par le Code civil724. Ceci étant, bien
que ne concernant pas à proprement parler la signature, cet arrêt montre que l’identification de

com. 1998 p.187, obs : CABRILLAC M. ; cf. l’Audace technologique de la Cour de Cassation, vers la libération
de la preuve contractuelle, CATTALA P. et GAUTIER P.Y., JCP 1998, n°21-22, Actualité.
721
Cela permet d’éviter de devoir exploiter le régime des exceptions (copie fidèle et durable, commencement de
preuve par écrit), dont l’application à des documents électroniques est incertaine.
722
LECLERCQ P., note sous Com, 2 déc. 1997, D.I.T., 1998/1, pp. 56-60.
723
Code monétaire et financier, articles L313-23 à L313-29-1.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 262

la personne ou bien l’imputabilité d’un acte (ce qui est bien l’objet de la signature) peut être
établie par un procédé dématérialisé. Néanmoins, il semble hasardeux de généraliser
l’interprétation défendue par cet arrêt. Le conseiller à la Cour de cassation P. LECLERQ en
conclut que, malgré celui-ci, « là où la loi (c’est usuel en droit de la consommation) impose,
pour des raisons de protection ou de fond, et pas seulement de preuve, que les engagements
soient sous seings privés, les actes ne pourront être dématérialisés et les signatures devront
avant longtemps encore être classiques »725. On comprend alors que les établissements de
crédit, utilisateurs de nouvelles technologies, étaient réticents à supprimer complètement la
« voie papier » (envoi par courrier des pièces justificatives) lorsqu’ils doivent se ménager des
moyens de preuve.

529. La nécessité d’une évolution législative. Le caractère fermé des réseaux a généralement
permis aux parties de combler par voie conventionnelle les vides de la loi. De fait, les
intéressés n’ont pas manqué de faire usage de cette faculté d’aménager les règles supplétives
de la preuve, notamment en conférant une valeur juridique à certains mécanismes de signature
électronique. Par exemple, les conventions de preuve signées avec les établissements
bancaires stipulent que l'usage d'une carte magnétique et la composition concomitante d'un
code confidentiel valent ordre de paiement. Le développement relativement récent de
l’Internet a changé la donne et la viabilité d’un système entier est en cause. S’il est aisé
d’affirmer qu’on ne peut plus se satisfaire uniquement du concept de signature manuscrite, il
est par contre plus difficile de déterminer les évolutions qui devraient être prônées afin de
pouvoir faire preuve au moyen d’un document signé électroniquement. Le secteur bancaire
semble être un terrain propice à l’utilisation d’une signature électronique ; à l’origine des
évolutions doctrinales726, il a montré l’exemple par l’utilisation des cartes bancaires et le
faible formalisme de ses opérations. De même, à titre d’exemple, l’article L.131-19 du Code
monétaire et financier précise que l'endossement qui doit être inscrit sur le chèque ou sur une
feuille qui y est attachée, dite allonge, doit être signé par l'endosseur, la signature de celui-ci
étant apposée, soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit. Il en est de même pour
l’article L.313-25 indiquant que le bordereau (de cession de créance) est signé par le cédant
soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit. Toutefois, l’idée d’adopter une approche

724
BONNEAU T., note sous Com, 2 déc. 1997, JCP E, 1998, n°5, pp. 178-181.
725
LECLERCQ P., note précitée.
726
VASSEUR M., L’informatique et quelques-unes de ses applications en matière bancaires, Rev. Franç. De
comptabilité, 1979, p.613.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 263

fonctionnelle du concept de signature a trouvé un certain écho à la fois en doctrine727 et dans


divers textes législatifs nationaux et internationaux728.

530. L’approche fonctionnelle. En consacrant une définition fonctionnelle de la signature, on


considère que constituent une signature, et bénéficie dès lors des effets juridiques liés à celle-
ci, non seulement la signature manuscrite, mais également tout mécanisme qui permet de
remplir avec une fiabilité raisonnable les fonctions traditionnelles de la signature. Pour autant,
l’adoption d’une approche fonctionnelle est d’un côté, nécessaire car elle permet d’étendre les
concepts d’écrit et de signature et ainsi d’assurer leur recevabilité à titre de preuve, même
lorsque la loi exige un écrit au-delà d’un certain montant. D’un autre côté, elle est insuffisante
car, ce faisant, le législateur ne se prononce pas sur la force probante des écrits dont la
signature n’est pas manuscrite. Il se limite à préciser qu’il leur sera reconnu une force
probante comparable à l’acte sous seing privé à la condition que les fonctions de la signature
soient satisfaites avec une certitude raisonnable et donc que le document signé se situe dans
un contexte dont la fiabilité est prouvée.

531. Conclusion. On sait qu’une telle preuve est difficile et de toute façon soumise à l’appréciation
souveraine du juge qui tranchera en fonction du cas d’espèce, mais aussi de l’appréhension
qu’il a ou non vis-à-vis des nouvelles technologies. Partant, il apparaît souhaitable qu'outre
l’adoption d’une définition fonctionnelle, le législateur tant européen que national mette en
place un régime de présomption réfutable. Aussi, considérerait-il que, pour certains
mécanismes de signature électronique, les fonctions de la signature sont présumées être
remplies de manière fiable. Un écrit signé dans ces conditions par un établissement de crédit
et un consommateur s’imposerait au juge de la même manière qu’un écrit traditionnel. Pour le
reste, le consommateur resterait libre de contester sa signature (comme il peut le faire pour la
signature manuscrite) puisque la présomption est réfragable. Indépendamment de ce qui est
souhaitable et de ce qui l’est moins, la directive européenne sur un cadre commun pour les

727
V. notamment SYX D., Vers de nouvelles formes de signature? op. cit., pp. 133-147; LARRIEU J., Les
nouveaux moyens de preuve: pour ou contre l’identification des documents informatiques à des écrits sous seing
privé, Cahiers Lamy Droit de l’informatique, 1988, H, pp. 8-19 et I, pp. 26-34 ; GOBERT D. et MONTERO E.,
La signature dans les contrats et les paiements électroniques : l'approche fonctionnelle, DAOR, 2000, n° 53, pp.
17-39 ; PRÜM A., L’acte sous seing privé électronique : réflexions sur une démarche de reconnaissance, in
Mélanges Michel CABRILLAC, Paris, Litec, 1999, pp. 267 et s.
728
Loi type de la CNUDCI sur le commerce électronique et Guide pour son incorporation, 1996, Nations Unies,
New York, 1997, et loi type de la CNUDCI sur les signatures électroniques (2001), disponibles sur :
http://www.un.or.at/uncitral/fr-index.htm ; Directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13
décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 264

signatures électroniques nous donne les lignes directrices à suivre afin d’assurer la
reconnaissance légale des signatures électroniques.

§2. La reconnaissance légale de la signature électronique : l’article 5 de la


directive européenne sur les signatures électroniques

532. Naissance et justification.729 730. Après divers amendements, le texte définitif a été adopté le
13 décembre 1999731. Cette directive résulte du constat que des initiatives législatives se
multiplient dans plusieurs Etats membres et qu’il devient dès lors urgent de disposer d’un
cadre juridique harmonisé au niveau européen. Ce dernier est justifié pour d’une part,
encourager l’utilisation des signatures électroniques et d’autre part, pour renforcer la
confiance dans les nouvelles technologies et favoriser ainsi leur acceptation générale. A ces
fins, la directive poursuit essentiellement deux objectifs majeurs. Le premier est la
reconnaissance juridique des signatures électroniques « la plaçant du même coup sur un pied
d’égalité avec la signature manuscrite »732. Le second est la création d’un cadre légal pour
l’activité des prestataires de service de certification (ci-après PSC)733. Afin d’atteindre
l’objectif de reconnaissance juridique de la signature électronique, la directive entend tout
d’abord définir la signature électronique (A) pour ensuite réglementer ses effets juridiques
(B).

729
La Commission européenne a présenté le 16 juin 1998 une proposition de directive sur un cadre commun
pour les signatures électroniques Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur un cadre
commun pour les signatures électroniques, COM (98)297 final, 13 juin 1998. Pour un commentaire approfondi
de la première version de cette proposition de directive, v. JULIA-BARCELO R. et VINJE T.C., Electronic
signatures - another step towards a European framework for electronic signatures: the Commission's Directive
proposal, Computer Law & Security Report, octobre 1998, n° 14/5, pp. 303-313.
730
Suite aux quelques discussions animées, une nouvelle version a été présentée au Conseil des ministres
européen du 22 avril 1999 et a fait l’objet d’une position commune, disponible sur :
http://europa.eu.int/comm/internal_market/fr/media/sign/index.htm.
731
Directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre
communautaire pour les signatures électroniques. Pour un commentaire, v. ANTOINE M. et GOBERT D., La
directive européenne sur la signature électronique : vers la sécurisation des transactions sur l’Internet ?, JTDE,
avril 2000, n°68, pp.73-78.
732
GANEV I., Du document et de la signature électronique, RLDI, juillet-août 2005, n° 7, p. 65.
733
Dans cette partie, nous nous limiterons à commenter l’article 5 de la directive qui traite des effets juridiques
de la signature électronique.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 265

A. La double définition du concept de signature électronique

533. La dualité. La directive donne une double définition de la signature électronique734. D’une
part, elle définit de manière très générale le terme signature électronique comme « une
donnée sous forme électronique jointe ou liée logiquement à d’autres données électroniques
et servant de méthode d’authentification » (article 2, 1.). D’autre part, elle propose une
définition d’une catégorie particulière de signature électronique qu’elle qualifie de signature
électronique avancée (article 2, 2.). Tout comme il est d'usage pour les modes de paiement
(carte bancaire, chéquier), il faut faire en sorte que ces moyens de signature ne puissent être
détournés par un tiers.

534. Une neutralité technologique. L’objet de cette distinction n’est pas clair. Elle a
manifestement été inspirée par les travaux de la CNUDCI735. La directive a probablement
voulu attirer l’attention sur le fait qu’il existe une multitude de techniques baptisées
« signature électronique », dès lors qu'elles permettent, à elles seules ou en combinaison, de
réaliser les fonctions dévolues à la signature. Cependant, toutes ne présentent pas
nécessairement un niveau de sécurité acceptable sur le plan juridique. Le point 1) des
définitions vise certainement à englober ces différents mécanismes, sans toutefois leur
reconnaître une valeur juridique comparable à celle de l’écrit papier signé manuscritement.
On suppose que c’est à dessein que la définition parle de « donnée servant de méthode
d’authentification », l’authentification pouvant porter tant sur l’origine des données que sur
leur intégrité, voire sur d’autres éléments. Par cette définition, la directive a voulu affirmer sa
neutralité technologique en ne privilégiant aucun mécanisme particulier de signature
électronique736.

535. Modération. Cette neutralité technologique est toutefois tempérée par le point 2) des
définitions, dans lequel on considère que certaines signatures électroniques peuvent être
avancées, et donc sécurisées, pour autant qu’elles satisfassent aux conditions de cet article.
Ces exigences, présentées de manière technique, consacrent en réalité les fonctions

734
Les autres définitions proposées par l’article 2 de la directive seront commentées dans la partie relative au
régime juridique des prestataires de service de certification.
735
V., par exemple, Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International, Rapport du groupe
de travail sur le commerce électronique sur les travaux de sa trente-troisième session (New York, 29 juin-10
juillet 1998), A/CN.9/454, 21août 1998. V. aussi : http://www.un.or.at/uncitral/fr-index.htm.
736
ANTOINE M. et GOBERT D.,JTDE, op.cit., p. 74.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 266

d’identification (point b737) et d’intégrité (point d). La neutralité technologique de cette


définition n’est qu’apparente dans la mesure où il ne fait pas de doute qu'actuellement, seule
la technique de la signature digitale738, fondée sur la cryptographie asymétrique, répond à la
définition de la signature électronique avancée. Le contenu des annexes ne laisse planer
aucune incertitude à ce sujet. Partant, au-delà de la sécurité technique, seul ce type de
signature paraît à même d’assurer la sécurité juridique des transactions bancaires en ligne.

B. Les effets juridiques : les clauses de non discrimination et d’assimilation

536. La clause d’assimilation. La clause d’assimilation (article 5.1.) consiste à assimiler la


signature électronique à la signature manuscrite lorsque certaines conditions sont
cumulativement remplies739, c’est-à-dire à considérer que la signature électronique doit être
recevable comme preuve en justice et qu’elle doit bénéficier de la force probante740 accordée
à la signature manuscrite741. Notons que cette clause d’assimilation ne profite pas à
l’ensemble des mécanismes de signature électronique, mais uniquement aux signatures
électroniques avancées (pour autant que les conditions de l’article 2.2. soient remplies). Il est,
par ailleurs, étonnant que l’article 5.1. commence par traiter de la force probante (point a) des
signatures électroniques avancées pour ensuite envisager leur recevabilité (point b), puisque
celle-ci est un préalable et une condition indispensable de leur reconnaissance juridique.

537. La clause de non discrimination. La clause de non discrimination (article 5.2.) s’applique
lorsque les conditions auxquelles est subordonnée l’application de la clause d’assimilation ne
sont pas remplies. Dans ce cas, les Etats membres doivent veiller à ce que l’efficacité

737
Les points a) et c) ne font que stipuler les conditions préalables à l’exigence d’identification du signataire : en
effet, une donnée ne permettrait pas d’identifier le signataire, et d’éviter les risques de répudiation, si cette même
donnée était liée à plusieurs signataires ou si elle était créée et gérée par plusieurs personnes.
738
Pour une explication détaillée de cette technique, appelée aussi signature numérique, v. PARISIEN S. et
TRUDEL P., L'identification et la certification dans le commerce électronique, Québec, Ed. Yvon Blais Inc.,
1996, pp. 93 à 113; HUBIN J., La sécurité informatique, entre technique et droit, Cahiers du C.R.I.D., n° 14, E.
Story-Scientia, 1998, spéc. pp. 68-112.
739
La signature électronique doit être avancée au sens de l’article 2, 2, elle doit reposer sur un certificat qualifié
tel que défini à l’article 2, 5, et enfin elle doit être créée par un dispositif sécurisé de création de signature tel que
décrit à l’annexe 3 de la directive.
740
Par force probante, on entend « l’intensité quant à la preuve que la loi lui reconnaît et qui s’impose au juge ».
DUMON F., De la motivation des jugements et arrêts et de la foi due aux actes, J.T., 1978, p. 486.
741
Parler de la force probante de la signature manuscrite est un raccourci de langage. Pour être plus exact, nous
devrions parler de la force probante de l’écrit signé (soit l’acte sous seing privé) car la signature envisagée
indépendamment de l’écrit a peu d’intérêt.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 267

juridique742 et la recevabilité comme preuve en justice d’une signature électronique ne soient


pas refusées pour le seul motif que la signature se présente sous forme électronique, ou
qu’elle ne repose pas sur un certificat qualifié, ou encore qu’elle ne repose pas sur un
certificat délivré par un PSC accrédité au sens de la directive. Le principe énoncé dans cet
article doit être entendu comme celui de la recevabilité743 des signatures électroniques lato
sensu, ce qui constitue en soi un énorme progrès par rapport aux règles traditionnelles du droit
de la preuve. Toutefois, à défaut de répondre aux spécifications de l’article 5.1., il appartient à
celui qui s’en prévaut de convaincre le juge de sa valeur probante744. En d’autres termes, la
conclusion des opérations bancaires en ligne n’est pas subordonnée à l’emploi d’un seul type
de signature électronique ; gageons tout de même que la signature électronique avancée sera
imposée en pratique par les établissements de crédit pour éviter toute opposition. Il en va
également de l’intérêt du consommateur pour que son engagement ne puisse être contesté par
l’établissement, du moins sur le terrain de la preuve.

538. Ordre du texte. Puisque l’article 5.1. traite de la force probante des signatures électroniques
avancées, il n’était pas nécessaire de traiter dans un second temps de leur recevabilité étant
donné que celle-ci est une condition sine qua non de leur reconnaissance juridique. Il eût donc
été plus clair de poser, dans un premier temps, le principe de la recevabilité de toute signature
électronique et de traiter, dans un second temps, de la force probante des signatures
électroniques avancées. De plus, cela aurait évité de devoir étudier du problème de la
recevabilité dans la clause d’assimilation (art. 5, 1, b).

539. Nécessité d’une accréditation. On peut observer qu’en pratique, l’article 5.1. de la directive
ne présente un intérêt que si les Etats membres, tout en respectant le principe de la liberté
d’exercice de l’activité de certification, mettent sur pied un régime d’accréditation des PSC745.
En dehors de toute initiative nationale en vue de l’accréditation de ceux-ci, l’établissement de
crédit ou bien le consommateur qui se prévaudrait d’un document signé électroniquement

742
On peut s’interroger sur la signification concrète de ce concept « d’efficacité juridique » !
743
Rappelons que la recevabilité est la « prise en considération, par le juge, d’éléments probatoires déclarés
admissibles par la loi eu égard à l’objet du litige ». Cela ne signifie donc pas que l’élément dit recevable aura
forcément une influence sur la décision du juge ; celui-ci peut parfaitement considérer que ledit élément ne
prouve rien. Il n’a qu’une seule obligation : étudier l’élément en question.
744
Sur les conséquences de la distinction recevabilité/valeur probante, GOBERT D. et MONTERO E., op.cit., p.
27.
745
L’octroi d’une accréditation est nécessairement subordonné au respect des conditions prévues à l’annexe II,
ce qui suppose la mise en place d’une procédure de délivrance de l’accréditation et un contrôle préalable (sous la
forme d’un audit) du respect de ces conditions.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 268

serait tenu d’apporter la preuve que les conditions fixées par les trois annexes de la directive
ont effectivement été remplies afin de bénéficier de la clause d’assimilation. Cette situation
est difficilement acceptable, surtout si la charge de la preuve incombe au consommateur, étant
donné la difficulté d’apporter une telle preuve746. Or elle semble envisageable en pratique. On
peut dès lors craindre que l’objectif visé par la directive, à savoir renforcer la sécurité
juridique, soit manqué puisque, quand bien même le texte résoudrait-il la question de la
recevabilité des documents signés électroniquement, le pouvoir discrétionnaire du juge quant
à l’appréciation de leur valeur probante serait de nature à rendre l’issue du litige incertaine.
En poussant le raisonnement plus loin, on constate que la combinaison des effets de la clause
d’assimilation en droit français et de la notion de certificat qualifié peut avoir des
conséquences désastreuses. En effet, pour rappel l’article 5.1. précise que si certaines
conditions sont remplies, la signature électronique avancée doit bénéficier des mêmes effets
juridiques que ceux qui sont reconnus à la signature manuscrite. En droit français, cet effet
n’est autre que la force probante. Cela signifie qu’un écrit signé manuscritement s’impose au
juge (on parle de preuve parfaite)747. Or, l’une des conditions implique que la signature
électronique soit basée sur un certificat qualifié lequel est définie dans l’article 2 comme
satisfaisant « aux exigences visées à l’annexe I et qui est fourni par un prestataire de service
de certification satisfaisant aux exigences visées à l’annexe II ». Cette définition ne semble
pas exiger qu’un prestataire s’engage dans une procédure d’accréditation pour que les
certificats qu’il délivre soient réputés « qualifiés ». Le prestataire pourrait donc se limiter à
prétendre qu’il satisfait aux conditions d’accréditation748 sans toutefois demander cette
dernière et sans que le respect effectif de ces conditions ne fasse l’objet d’aucun contrôle.

540. Incertitudes. Il est logique qu’on reconnaisse force probante aux signatures électroniques
avancées liées à un certificat émis par un PSC accrédité car ce dernier est soumis au contrôle
permanent d’un tiers indépendant. Aussi considère-t-on qu’il opère dans des conditions de
fiabilité et de sécurité optimales. Par contre, il paraît plus douteux de reconnaître cette même

746
Cette critique doit néanmoins être tempérée par le point a) de l’annexe II qui dispose que « Le prestataire de
service de certification qui délivre des certificats qualifiés doit faire la preuve qu’il est suffisamment fiable pour
fournir des services de certification ». Dans ce cadre, on peut imaginer que la personne qui se prévaut de la
signature mette le prestataire en cause afin qu’il collabore pour apporter, voire qu’il apporte lui-même, cette
preuve difficile.
747
En d’autres mots, lorsqu’un écrit signé manuscritement est présenté au juge, cet élément de preuve doit non
seulement être déclaré recevable par le juge, mais en plus il doit être considéré comme représentant une
manifestation fiable de la réalité, sans qu’il ne dispose du pouvoir d’apprécier sa valeur.
748
Voir à ce propos l’annexe II de la directive.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 269

force probante en l’absence d’accréditation749. En effet, il en résulte que la prétention selon


laquelle le PSC répond aux exigences de l’annexe II ne fait l’objet d’un contrôle, ni a priori
dans le cadre d’une accréditation, ni a posteriori par le juge dans le cadre d’un litige750. Quid
alors de l’intérêt pour un prestataire de s’engager dans une procédure d’accréditation ? On
peut une nouvelle fois craindre que l’objectif de renforcer la sécurité juridique, poursuivi par
la directive, soit mis en péril. Pourtant, en raison du type de transactions réalisées dans le
domaine bancaire et financier, il nous semble primordial de tendre vers le niveau le plus élevé
de sécurité juridique, au risque dans le cas contraire d’ébranler la confiance placée dans le
secteur, tant par les établissements de crédits que par les consommateurs investisseurs.

541. La signature des personnes morales. La directive définit dans son article 2, 3. le
« signataire » comme toute personne qui détient un dispositif de création de signature et qui
agit soit pour son propre compte, soit pour celui d’une entité ou d’une personne physique ou
morale qu’elle représente. Cette définition peut être interprétée très largement. En effet, on
parle de « toute personne » sans aucune distinction, ce qui laisse supposer que cela vise tant
les personnes physiques que morales. Cette vision du concept de signataire était déjà
préconisée par la Commission européenne qui, dans sa communication du 8 octobre 1997751,
indiquait dans le point 2.3., (i) que « les clés (et par suite les certificats) peuvent être allouées
à des personnes privées ou juridiques (par exemple une société à responsabilité limitée)… ».
La directive ne semble donc pas exclure la signature des personnes morales et donc des
établissements de crédits. La position adoptée par l’Union européenne se situe dans la lignée
de mouvements amorcés dans certains Etats membres, comme la Belgique752 et la France753,
allant dans le sens d’une « responsabilisation plus poussée des personnes morales », en
reconnaissant la responsabilité pénale des personnes morales. De plus, la Belgique dispose

749
Pourtant, cela découle de la combinaison des articles 2, 10) et 5.1.
750
Sauf pour une partie à contester la signature et donc éventuellement le respect des exigences de l’annexe II,
preuve diabolique…
751
COM (97)503 : Vers un cadre européen pour les signatures numériques et le chiffrement : assurer la sécurité
et la confiance dans la communication électronique, Communication de la Commission au Parlement européen,
au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des Régions, 8 octobre 1997.
752
Loi du 4 mai 1999 instaurant la responsabilité pénale des personnes morales, Moniteur belge, 22 juin 1999.
753
BOULOC B., Le domaine de la responsabilité pénale des personnes morales, Rev. Soc., 1993, pp. 291-297 ;
PRADEL J., Le nouveau Code pénal français. Aperçu sur sa partie générale, RDPC, 1993, pp. 923-942.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 270

d’une loi reconnaissant expressément la signature des personnes morales754. La France de son
côté, ne s’est pas engagée dans cette voie.

§3. L’adaptation du droit français de la preuve aux technologies de


l’information

542. Transposition. Suite à l’adoption de la directive européenne sur les signatures électroniques,
la France s’est vite dotée d’une législation sur la preuve électronique, par l’adoption de la loi
n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de
l’information et relative à la signature électronique. Cette loi est censée, dans une certaine
mesure, assurer la transposition de la directive européenne du 13 décembre 1999755. Le texte
adopté se limite à modifier les règles du Code civil relatives à la preuve. Partant, la preuve
dans le secteur bancaire s’en trouve également modifiée. Pour ce qui est de la fixation du
régime juridique des prestataires de service de certification et des questions plus techniques, il
renvoie à l’adoption d’un décret en Conseil d’Etat. Les grandes orientations de la loi française
peuvent se résumer au nombre de quatre : définition de la preuve littérale indépendamment du
support (A), équivalence juridique entre la preuve littérale électronique et la preuve
traditionnelle (sur support papier) (B), consécration légale du caractère supplétif des règles de
preuve et pouvoir du juge de trancher les conflits de preuve (C), et enfin, définition
fonctionnelle de la signature en général et de la signature électronique en particulier ; pourtant
la pratique bancaire semble s’éloigner des principes de base (D).

754
Article 4, § 4, de la loi belge du 9 juillet 2001 fixant certaines règles relatives au cadre juridique pour les
signatures électroniques et les services de certification, Moniteur Belge, 29 septembre 2001. Pour un
commentaire de cette disposition et de la question de la signature des personnes morales, v. VANBRABANT B.,
La signature électronique des personnes morales, in La Preuve, Formation permanente CUP, Liège, Volume 54,
mars 2002, pp. 173-228.
755
Pour une étude sur le lien entre la loi française et la directive européenne, v. CAPRIOLI E. A, La loi française
sur la preuve et la signature électronique dans la perspective européenne, JCP, n° 18, 3 mai 2000, pp. 787-795.
Pour un commentaire de la loi, v. SÉDALLIAN V., Preuve et signature électronique, disponible sur :
http://www.juriscom.net/chronique/2/fr0509.htm; GAUTIER et LINANT DE BELLEFONDS, JCP 2000. I.
236 ; MERCOLI, JCP N, 2001, 44 ; MORENO, LPA, 27 septembre 2000 ; NATAF et LIGHTBURN, JCP E,
2000.836 ; RAYNOUARD, Rép. Défrenois 2000 ; 593 ; ROCHFELD, chron. leg. RTD civ. 2000. 423 ; RUET,
Bull. Joly Bourse, mai-juin 2000 ; SCHWERER, Contrats conc. consom., 2000, Chron.16 ; TREBULLE, LPA,
20 avril 2000 ; Projet de loi sur la preuve électronique : CATALA, JCP 1999.I.182 ; DEVEZE, Mélanges
CABRILLAC, p.449 ; GAUTIER, LPA, 7 février 2000 ;
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 271

A. Définition de la preuve littérale indépendamment du support

543. Raisonnement. Afin de faire entrer la preuve électronique dans le Code civil, le législateur
français a procédé en deux étapes. La première consiste à définir la preuve littérale, ou preuve
par écrit, de manière large afin d’y inclure l’écrit électronique (article 1316). La seconde vise
à préciser la valeur juridique attribuée à la preuve littérale sous forme électronique, en
privilégiant une logique d’assimilation (articles 1316-1 et 3).

544. Emancipation par rapport au papier. L’article 1316 nouveau du Code civil donne une
définition large de la preuve littérale afin de la rendre indépendante de son support : « la
preuve littérale, ou preuve par écrit, résulte d’une suite de lettres, de caractères, de chiffres
ou de tous autres signes ou symboles dotés d’une signification intelligible, quels que soient
leur support et leurs modalités de transmission ». Ainsi, la preuve littérale ne s’identifie plus
au papier. Elle ne dépend plus non plus des modes de transmission : l’écrit reste comme tel
même s’il est stocké ou transféré sous forme électronique, à condition toutefois qu’il puisse
être à nouveau intelligible756. Un écrit peut désormais être fixé ou transmis sur tout support,
matériel ou immatériel : papier manuscrit ou imprimé, CD-Rom, disquette, disque dur, fibre
optique, ondes hertziennes… On peut donc dire que la définition est technologiquement
neutre et qu’elle devrait largement conforter les établissements de crédit qui effectuent de
nombreux échanges électroniques entre eux ou avec leurs clients. De même, ces dispositions
sont de nature à favoriser la dématérialisation des opérations bancaires dans la mesure où
l’envoi de courriel pourra prouver la satisfaction par l’établissement de crédit de certaines de
ces obligations ; on pense par exemple à l’article L.312-1-1 du Code monétaire et financier
qui impose (sauf si la convention de compte en dispose autrement) que toutes les opérations
en crédit et en débit d'un compte de dépôt soient portées à la connaissance du client à
intervalle régulier n'excédant pas un mois. Mais, allant plus loin, admettre que les documents
électroniques puissent être apportés comme preuve, c’est aussi reconnaître que l’établissement
de crédit peut remplir toutes ses obligations de type informatif par voie électronique (tout en
réduisant ses coûts).

GRYNBAUM, Comm. com. électr. 1999 chron. 2 ; HASSLER, LPA, 21 septembre 1999 ; J. HUET, D 2000,
chron. 95 ; PENNARUN, LPA, 27 janvier 2000.
756
L’écrit doit donc pouvoir être lisible et compréhensible par l’homme.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 272

545. Remarques. Précisons que, avec cette définition, il convient aussi de distinguer l’écrit
d’autres notions, telles que l’acte sous seing privé, l’acte authentique, l’original, la copie, etc.
L’exigence d’un écrit doit donc être considérée comme une exigence minimale, à laquelle on
peut ajouter celle d’une signature, de l’intervention d’un notaire, etc. Notons, enfin, que cette
définition vaut tant pour les actes authentiques que pour les actes sous seing privé, puisqu’elle
est consacrée par un paragraphe intitulé « Dispositions générales » qui précède les
paragraphes relatifs à ces deux types d’actes.

B. Equivalence juridique entre preuve littérale électronique et preuve traditionnelle

546. Principe. Les points 1 et 3 de l’article 1316 semblent traiter respectivement de la recevabilité
(admissibilité) de la preuve littérale électronique et de la force probante de celle-ci, et
prévoient un principe d’équivalence avec la preuve littérale sur support papier si certaines
conditions sont remplies. En effet, selon l’article 1316-1 « L’écrit sous forme électronique est
admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être
dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions
de nature à en garantir l’intégrité ».

547. Conditions. Cet article reconnaît donc expressément l’admissibilité de l’écrit électronique
comme mode de preuve, à la double condition que puisse être identifié celui dont il émane et
que les conditions dans lesquelles il est établi et conservé en garantissent l’intégrité. On peut
toutefois se demander si l’exigence de respect de ces conditions n’est pas prématurée. Les
fonctions d’identification et de maintien de l’intégrité doivent-elles réellement être vérifiées
pour permettre au juge de déclarer un écrit électronique recevable ? La définition étendue de
l’article 1316 ne suffit-elle pas à permettre au juge de considérer comme recevable tout écrit,
même électronique ? Le respect de ces fonctions d’identité et d’intégrité ne conditionneraient-
elles pas plutôt, après avoir déclaré recevable un mode de preuve, l’appréciation qui serait
faite par le juge de sa valeur probante (c’est-à-dire de la force probante reconnue par la loi aux
différents niveaux de la preuve littérale : commencement de preuve par écrit ou acte sous
seing privé) ? Enfin, on peut se demander s’il n’est pas redondant, sans compter la confusion
qui en découle, d’indiquer les fonctions d’identité et d’intégrité dans un article qui traite de
l’écrit électronique alors qu’elles semblent constituer, selon l’article 1316-4, les fonctions de
la signature.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 273

548. Assimilation. L’écrit électronique étant désormais recevable, reste à déterminer la nature ou
le degré de la force probante attachée à ce mode de preuve. Le législateur français n’a pas
voulu instituer de hiérarchie entre le support électronique et le support papier, comme le
précise l’article 1316-3 : « L’écrit sur support électronique a la même force probante que
l’écrit sur support papier ». Ainsi, lorsque le document électronique décrivant l’opération
bancaire n’est pas signé, il a la force probante très limitée accordée aux écrits sur papier non
signés, qui sont de simples indices laissés à l’appréciation du juge, et peuvent le cas échéant
être considérés comme un commencement de preuve par écrit. Par contre, lorsqu’il est signé,
l’acte sous forme électronique a exactement la même force probante que l’acte sous seing
privé, c’est-à-dire qu’il ne peut être contesté que par un autre acte, authentique ou sous seing
privé757. Encore faut-il, bien entendu, que l’on puisse considérer que l’écrit électronique est
signé, ce qui suppose l’usage d’un procédé fiable répondant aux fonctions de la signature
telles que décrites à l’article 1316-4.

C. Pouvoir du juge de trancher les conflits de preuve et consécration légale du


caractère supplétif des règles de preuve

549. Latitude laissée. Etant donné l’absence de hiérarchie entre les preuves littérales électronique
et traditionnelle, il était nécessaire de déterminer la manière de régler les éventuels conflits
entre une preuve littérale sous forme électronique et une preuve littérale sur support papier.
L’article 1316-2 confie au juge le soin de trancher ces conflits éventuels au cas par cas :
« lorsque la loi n’a pas fixé d’autres principes, et à défaut de convention valable entre les
parties, le juge règle les conflits de preuve littérale en déterminant par tous moyens le titre le
plus vraisemblable, quel qu’en soit le support ».

550. Le caractère supplétif. De plus, on constate que cet article consacre légalement un principe
unanimement reconnu par les jurisprudences française et belge758, qui est celui du caractère
supplétif des règles de preuve du Code civil, sans préjudice toutefois des dispositions

757
Rapport de JOLIBOIS C., au nom de la commission des lois, n° 203 (1999-2000), disponible sur :
http://www.legifrance.gouv.fr/.
758
La Cour de cassation belge a décidé que les dispositions légales relatives à la preuve n’étaient ni d’ordre
public (Cass., 30 janv. 1947, Pas., 1947, I, p.29 ; Cass., 30 sept. 1948, Pas., 1948, I, p.520 ; Cass., 20 juin 1957,
Pas., 1957, I, p.1256) ni impératives (Cass., 16 oct. 1962, Pas., 1963, I, p.229 ; Cass., 22 mars 1973, Pas., 1973,
I, p.695 ; Cass., 24 juin 1994, Pas., 1994, I, p.651). Pour la France, v. SÉDALLIAN V., op.cit., et les notes.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 274

particulières relatives notamment à la protection du consommateur759. Il en résulte que les


établissements de crédit ne devront donc plus nécessairement conclure avec leurs partenaires
et clients une convention préalable déterminant le régime probatoire des actes passés par voie
électronique.

D. Signature électronique et pratique bancaire

551. Perfection de l’acte et manifestation du consentement. Ayant pris conscience de ce que la


signature constitue une condition d’existence de l’acte, le législateur français a également
reconnu un équivalent électronique à la signature manuscrite. Pour ce faire, l’article 1316-4
donne une définition fonctionnelle de la signature en général, pour ensuite envisager le cas
particulier de la signature électronique. Aussi, le premier alinéa de l’article 1316-4 prévoit-il,
sans distinction entre la signature manuscrite et la signature électronique, que « la signature
nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie celui qui l’appose. Elle manifeste le
consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte ». Cet alinéa établit ainsi
clairement la double fonction assignée unanimement par la doctrine à la signature :
l’identification de l’auteur de l’acte et la manifestation de son consentement.

552. Conditions. Le deuxième alinéa, plus intéressant, traite de la signature électronique en


particulier. Il précise, en des termes très généraux et donc technologiquement neutres, les
conditions que celle-ci doit remplir pour se voir reconnaître une valeur juridique comparable à
celle réservée à la signature manuscrite. Ce deuxième alinéa dispose que : « lorsqu’elle est
électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son
lien avec l’acte auquel elle s’attache ». La fiabilité du procédé utilisé devra en principe être
prouvée, ce qui ne sera pas chose aisée. Pour éviter cette difficulté et étant donné la fiabilité
reconnue de certains procédés, il est prévu une présomption en faveur des signatures
électroniques répondant à des exigences fixées par décret : « la fiabilité de ce procédé est
présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité
du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en
Conseil d’Etat »760. A cette exigence de fiabilité, s’ajoute celle d’un lien indissociable entre la

759
On pense particulièrement aux clauses abusives.
760
Ce décret met en oeuvre les dispositions de la directive relative à la signature électronique et aux prestataires
de service de certification : Décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l'application de l'article 1316-4 du
code civil et relatif à la signature électronique, JO 77 du 31 mars 2001, p. 5070.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 275

signature et l’acte auquel elle s’attache. En effet, il n’est pas possible d’accorder une valeur
juridique à une signature électronique si elle n’est pas indissolublement liée au contenu sur
lequel l’auteur marque son consentement761. Dès lors, il suffit à un établissement de crédit de
mettre en œuvre un procédé de signature électronique répondant à l’ensemble de ces
conditions pour pouvoir bénéficier de la présomption, réfragable certes, de fiabilité, lui
permettant ainsi d’être assimilée à une signature manuscrite et de se voir reconnaître les
mêmes effets juridiques.

553. Pratique bancaire actuelle. Deux constats s’imposent, in fine. Primo, les évolutions
législatives fournissent un cadre juridique fourni pour la mise en œuvre de la signature
électronique. Secondo, le secteur bancaire et financier a besoin de ces évolutions pour
sécuriser ses transactions. Pourtant, force est de constater que la pratique tend à trouver un
fonctionnement plus simple. Actuellement, les banques ont recours à un système comparable
à celui de la carte de crédit traditionnelle en fournissant à leur client un accès à une zone
sécurisée sur leur propre site par l’intermédiaire d’un login et d’un mot de passe762. Cela ne
semble pas poser de problème particulier s’agissant de la simple consultation de compte.
Cependant, il est possible, à partir de cette zone, de réaliser des virements (mais également
des ordres de bourse). Autant dire que la validité de l’ordre de virement et l’identification du
donneur d’ordre reposent sur les codes entrés en amont. Ce n’est pas la forme électronique763
de l’ordre qui y ici en cause, mais la signature de l’ordre dont on peut douter qu’elle réponde
aux exigences de 1316-4 du Code civil (même si les codes sont censés rester secrets). Il peut
effectivement exister un lien entre la « signature » et l’acte (ordre) ; en revanche, il convient
d’être plus prudent concernant l’identité du signataire. Techniquement, la solution a le mérite
de la simplicité mais juridiquement, même si l’identité du donneur d’ordre potentiel a été
vérifiée lors de l’envoi des identifiants764, il n’est pas certain que le juge accorde la même
force à ce procédé ni la même la présomption de fiabilité.

554. Les ambiguïtés de la pratique. Pourtant, ce procédé paraît en totale adéquation avec les
obligations de double clic instaurées par la LEN (pour que le contrat soit valablement conclu,
le destinataire de l'offre doit avoir eu la possibilité de vérifier le détail de sa commande et son

761
Rapport de JOLIBOIS C préc. ; v. aussi GOBERT D. et MONTERO E., op.cit., p. 37.
762
Pour d’autres modalités d’accès : GARCIA A., Des claviers virtuels pour défendre la banque sur Internet, in
01 net, 4 avril 2005.
763
« La forme [de l’ordre de virement] importe peu », BONNEAU T. op. cit., n°437, p308.
764
Généralement, cet envoi se fait par courrier séparé.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 276

prix total, et de corriger d'éventuelles erreurs, avant de confirmer celle-ci pour exprimer son
acceptation, article 1369-2 du Code civil). A cette possibilité, si l’on rajoute celle de la
conclusion des contrats conclus par échange de courriers électroniques (1369-3 du Code
civil), on ne peut que constater qu’on est vraiment loin des prestataires de services de
certification électronique garantissant la fiabilité de la signature ! En réalité, dans le cadre
d’un achat en ligne, la véritable vérification d’identité (et finalement preuve de la transaction)
se fait par l’instrument de paiement, et notamment la communication d’un numéro765
personnel dont on est sûr (jusqu’à preuve du contraire) qu’il n’est connu que de son titulaire
(donc que la transaction ne peut être imputable qu’à cette personne). Par conséquent, dans un
contrat consensuel, soit l’on admet que le deuxième clic « signe » le contrat766 et (sauf
exercice d’un droit de rétractation et sous réserve de la fourniture du bien ou du service) le
consommateur pourra se voir imposer le paiement ; soit l’on estime que ce deuxième clic ne
parfait pas le contrat, mais il faudra reconnaître que c’est le paiement qui opère la formation
du contrat, en d’autres termes qu’on se trouvera en présence d’un contrat réel. L’article 1369-
2 semble clairement pencher pour la première interprétation, l’acceptation étant manifestée
par la confirmation (deuxième clic). Si cette technique de conclusion du contrat satisfait
indéniablement l’article 9 de la directive commerce électronique, le salut de l’internaute
novice ne réside que dans le droit de rétractation.

555. Utilité de la signature électronique. On peut ainsi légitimement s’interroger sur l’utilité
pratique de la signature électronique « avancée » dans les transactions bancaires en ligne. On
peut penser qu’elle retrouvera un certain intérêt pour les actes les plus graves que
l’établissement de crédit voudra entourer de précautions particulières. Mais là encore, l’article
1108-2 du Code civil, dont la rédaction est issue de la LEN, semble ruiner quelque peu cet
intérêt dans la mesure où il prévoit de facto une exception à la possibilité de signer
électroniquement (la mention manuscrite ne pouvant pas être apposée électroniquement) les
actes sous-seing privé relatifs à des sûretés personnelles et réelles où une mention manuscrite
est exigée (pratiquement : cautionnement garantissant une opération de crédit).

765
Numéro de la carte de crédit ou autre numéro ; voir par exemple la solution ID Tronic proposée par la Caisse
d’épargne « Il vous suffit de remplir un formulaire en ligne sur le site de la banque avec vos coordonnées
bancaires et vous recevez ensuite un numéro ID-TRONIC. Quand vous faites un achat, c'est ce numéro que vous
devez utiliser… », 27octobre 2004, disponible sur : http://www.journaldunet.com/encyclopedie/definition/686/44
/21/id-tronic.shtml.
766
On se rapproche de la solution américaine : une décision d’une Cour d’appel du 2 juillet 1999, Steven J.
Caspi, et al. v. The Microsoft Network, L.L.C., et al., confirme que le clic de la souris lie le co-contractant dont le
clic émane.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 277

556. Intégrité, imputabilité. Il faut donc reconnaître que l’on est légalement en présence de deux
niveaux de signature : l’une simple (clic gratuit) et l’autre sécurisée (mais payante). Il n’est
pas sûr ( !) que pour profiter rapidement des opportunités de l’Internet, les établissements de
crédit demandent systématiquement à leur client de s’équiper en véritable signature
électronique. C’est pourquoi la problématique de sécurité des transactions est déplacée vers
celle de la sécurité du site de l’établissement en question. Simplement, le risque juridique de
voir remettre en cause les transactions est important, dans l’attente d’une prise de position par
le juge.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 278

CONCLUSION

557. Hypothèse de départ et moyens. Un marché dématérialisé des services bancaires financiers
passe tout naturellement par la possibilité de conclure en ligne des conventions, qu’elles
soient d’ouverture de compte ou d’autre nature. La réussite de ce marché, quant à elle,
suppose la confiance de ses acteurs, tant établissements de crédit que consommateurs. Partant,
le législateur communautaire, par l’intermédiaire de la directive sur le commerce électronique,
a amorcé une évolution importante vers une suppression des obstacles. Le législateur national
lui a emboîté le pas. Aussi, grâce aux équivalents trouvés, n’existe-t-il plus (ou presque)
d’impossibilité de dématérialiser les opérations bancaires.

558. Protection du consommateur et formalisme dématérialisé. Un formalisme important,


entourant les conventions bancaires conclues avec des consommateurs, a été développé pour
assurer la protection de cette partie que l’on qualifie de faible. L’analyse montre qu’il n’existe
juridiquement aucun obstacle à l’adaptation du formalisme traditionnel à l’outil Internet. Mais
de deux choses l’une : soit le contrat est formel (ad validitatem ou ad probationem) par
dispositions législatives et l’Internet apporte une solution appréciable de par sa nature écrite,
soit le contrat est consensuel et l’Internet rajoute un élément sécuritaire. Dans ce cas,
l’Internet impose un formalisme et donc une lourdeur qui n’existe pas traditionnellement. La
question du formalisme ad probationem n’a plus, par conséquent, lieu de se poser avec
l’Internet puisque la forme y est essentielle. Poussant l’analyse jusqu’au bout, on pourrait
ainsi annoncer la fin du formalisme ad probationem ; c’est dans ce sens que nous rejoignons
certains auteurs qui ont pu voir dans l’article 9 de la directive une « déclaration de guerre
lancée(…) contre le formalisme767 », mais à la différence que nous ne pensons pas qu’il porte
atteinte à la protection de certains contractants. En effet, reste le formalisme ad validitatem
qui seul garderait son utilité eu égard au contenu de la forme imposée ou à l’intervention d’un
tiers. Via l’Internet, il est le seul qui puisse jouer le rôle de protection du consommateur.

559. Conditions de validité. Le contrat pourrait-il juridiquement se conclure en ligne grâce à un


processus contractuel dématérialisé, qu’il faudrait néanmoins s’assurer de l’identité du

767
GRYNBAUM L., La directive « commerce électronique » ou l’inquiétant retour de l’individualisme
juridique, JCP G. 2000, I, 307, spéc. n°7 ; Continuité ou nouveauté juridique ?, Comm. com. électr., 2001, chron.
N°28, p. 10 ; LUTZ. P., Les suites de la directive sur le commerce électronique : la nécessaire refonte du droit
français du crédit au consommateur, RDBF, 2002, p.87.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 1 – Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers 279

souscripteur et de la validité de son consentement ; la signature électronique permet d’en


prouver la réalité et de parfaire la convention en ligne. Cependant, la pratique, plus encore que
les textes, fait apparaître deux niveaux de signature : la non sécurisée semble prévaloir à
l’heure actuelle faisant, courir un risque juridique important.

560. Une analyse plus précise. Pour autant, on ne peut limiter l’étude du formalisme des
opérations bancaires et financières à celle de la convention de compte. Sur la base de cette
convention, « cadre vide qui sera ultérieurement alimenté [par lesdites opérations] »768,
d’autres transactions bancaires viennent se greffer, comme par exemple les contrats de crédits.
Certaines d’entre elles, enfin, se sont particulièrement appropriées les spécificités de
l’Internet : les opérations de bourse. Là encore, l’investisseur trouve l’avantage de la
désintermédiation et de la mise en concurrence des différents acteurs ; néanmoins, leur
sécurité peut être menacée par les voies de désinformations (forums).

768
BONNEAU T. Droit bancaire, op. cit., n°355, p.228.
CHAPITRE 2
DE QUELQUES EXEMPLES DE CONTRAINTES SPECIFIQUES

561. Le monde bancaire. L’Internet a profondément modifié le monde financier comme


quasiment tous les autres secteurs économiques. Cependant, qui dit monde financier, ne dit
pas uniquement établissements de crédit. En effet, s’ils apparaissent naturellement comme les
premiers bénéficiaires de l’utilisation des nouvelles technologies et du renouveau du rapport
bancaire avec la clientèle, les autres acteurs du secteur bancaire et financier en profitent
également : ils sont classiquement regroupés sous le terme de métiers de l’intermédiation769
bancaire (courtiers…). Il s’agit, selon l’article L. 519-1 du Code monétaire et financier, de
toute personne qui, à titre de profession habituelle, met en rapport les parties intéressées à la
conclusion d'une opération de banque, sans se porter ducroire ; en d’autres termes, comme le
souligne le Professeur T. BONNEAU, « ils [les intermédiaires en opérations de banque]
n’accomplissent pas eux-mêmes des opérations de banque, mais rapprochent les personnes
intéressées par de telles opérations »770. Pratiquement, la définition du Code monétaire et
financier intègre la réception de fonds du public, les moyens de paiement ou les opérations de
crédit771.

562. La modernisation de l’intermédiation. Les métiers de l’intermédiation sont encore plus


exposés à la révolution de l’Internet. En effet, on peut noter d’emblée que si la loi met à la
charge des intermédiaires certaines obligations772, l’exercice de leur activité est facilité parce
qu’ils ne sont pas soumis à un quelconque agrément, contrairement aux établissements de
crédit ; de plus, là où les établissements de crédit disposent d’un certain temps d’adaptation,
les évolutions sont traditionnellement plus rapides dans les métiers de l’intermédiation. Ainsi,
l’usage de ces nouvelles technologies a permis l’apparition de nouvelles applications
intermédiées. Par exemple, les MTF773 substituent des négociations multilatérales réalisées

769
Sur la distinction entre désintermédiation bancaire et intermédiation financière, cf. BONNEAU T., op. cit.,
n° 21, p19.
770
BONNEAU T., op. cit, n°302, p194.
771
BONNEAU T., ibid.
772
Quatre obligations sont imposées : honorabilité, garantie financière ainsi qu’un mandat provenant d’un
établissement de crédit et enfin le respect des règles concernant le démarchage financier.
773
Un MTF est défini par le point 15 de l'article 4 de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du
Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers comme : « Un système multilatéral,
exploité par une entreprise d'investissement ou un opérateur de marché, qui assure la rencontre -- en son sein
même et selon des règles non discrétionnaires - de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 281

sur des plateformes électroniques aux relations bilatérales des traders avec leurs clients774.
Aussi, parle-t-on également de désintermédiation, notamment en matière boursière, en ce
qu’elle permettrait aux investisseurs d’intervenir directement sur les marchés.

563. Dématérialisation des produits. La plupart des produits et services proposés à la clientèle est
également adaptée à l’Internet. Techniquement possible, leur dématérialisation est
juridiquement acquise. Par exemple, les articles L.228-1 du Code de commerce et L.211-4 du
Code monétaire et financier précisent que les valeurs mobilières (actions, obligations) sont
inscrites en compte au nom de leur propriétaire ; il en est de même pour les portefeuilles de
valeurs mobilières (OPCVM -SICAV, FCP). Comptes rémunérés et assurance-vie sont
également concernés à partir du moment où il est question de jeux d’écritures. Il en est enfin
pareillement des produits touchant à l’information elle-même, comme par exemple le
conseil775 et l’assistance, voire la fourniture de renseignements commerciaux.

564. Dématérialisation des contrats. Ainsi que le constatent certains auteurs776 : « aujourd’hui,
un marché boursier se caractérise par la rencontre d’intermédiaires, autrefois en un lieu,
aujourd’hui autour d’un système électronique ». La question de l’adaptation doit alors à
nouveau être posée. Par nature, les opérations qui nécessitent une certaine rapidité
s’accommodent parfaitement de l’Internet : c’est le cas des opérations intermédiées. En
revanche, d’autres opérations particulières du secteur bancaire et financier présentent un
conflit d’intérêt entre d’une part le secteur bancaire, qui voudrait les accélérer – les
« internétiser » – et d’autre part les pouvoirs publics dont le souci principal est d’assurer la
protection des consommateurs investisseurs.

565. Plan. Le principe de dématérialisation du processus de conclusion du contrat ne pose guère de


problèmes et un formalisme identique, voire équivalent, peut trouver à s’appliquer sur
l’Internet au même titre que dans une relation physique. Pourtant, s’agissant particulièrement

tiers pour des instruments financiers, d'une manière qui aboutisse à la conclusion de contrats conformément aux
dispositions du titre II ». Par ailleurs ces systèmes multilatéraux de négociation font l’objet d’un large
réglementation par l’AMF (articles 521-1 et s. du RG AMF).
774
Sur la pratique des ATS (Alternative Trading Systems) : LE PETIT J-F. , préface - Internet et transaction
financière, GRANIER T., JAFFREUX C., Paris : Economica 2002.
775
LEGEAIS D., L’obligation de conseil de l’établissement de crédit à l’égard de l’emprunteur et de sa caution,
Droit Bancaire et Financier, Mélanges AEDBF-France II, MALTOUT J.-P., De VAUPLANE H. (sous la
direction de), Paris, Ed. Banque, 1999,p.257.
776
CHAMPARNAUD F., DEMARIGNY F., L’intermédiation, Table ronde n°4, Bull. Cob, n°239, novembre
1998, p. 125.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 282

de formalisme dans le secteur bancaire et financier, plusieurs points appellent des remarques
spécifiques, en raison notamment de la nature des contrats : le crédit (section 1), le courtage
en ligne (section 2) ainsi que l’émission d’action en ligne (section 3). Enfin, seront évoqués
les autres opérations relevant du conseil et de l’information (section 4).

Section 1. Le secteur du crédit

566. La convention de crédit. Si le Code civil définit les conditions essentielles du prêt, les
conditions du crédit font par ailleurs l'objet de conventions de plus en plus complexes
précisant les engagements positifs ou négatifs de l'emprunteur, la rémunération du prêteur et
ses droits. Formé traditionnellement par la remise de la chose, le contrat de prêt se trouve
transcendé par la notion économique de crédit, à tel point que l’on peut se demander si ce
dernier est un contrat consensuel, solennel ou bien réel (§1). Partant, ce contrat fait l’objet
d’un formalisme particulier (§2). On ne peut pas affirmer qu’il existe un régime unique du
crédit même s’il existe des règles communes à toutes les opérations de crédit. Qu’il soit à
court terme (avance, découvert, escompte, crédit à la consommation) ou à moyen et long
terme (équipement des entreprises, prêt participatif, financement de l’immobilier), la question
du crédit et de sa possible dématérialisation amène également celle des sûretés le garantissant.

§1. La nature de l’opération de crédit

567. Définition des opérations de crédit. Aux termes de l’article L.313-1 du Code monétaire et
financier, « constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à
titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne ou
prend, dans l'intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu'un aval, un
cautionnement, ou une garantie. Sont assimilés à des opérations de crédit le crédit-bail, et, de
manière générale, toute opération de location assortie d'une option d'achat ». Remarquons, à
titre liminaire, que seules les opérations à titre onéreux rentrent dans le champ du droit
bancaire. En réalité, la notion de crédit777 apparaît comme « une notion générique »778

777
Sur la difficulté et les définitions du concept : cf. BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit. p42, n°49 et s. ;
VASSEUR, Institutions bancaires, fasc. I-A, 4ème éd, 1985-1986, p.74 ; Sur l’avance de fonds : cf. GAVALDA
C., note sous CE 13 mars 1970, JCP G, 1970, II, 16417 ; SOUSI-ROUBI, Lexique de banque et de bourse, 4ème
éd , Paris : Dalloz, 1997 ; la notion de crédit intègre le éléments de temps, de confiance et de risque :
DEKEUWER-DEFOSSEZ, mémento Dalloz droit bancaire 1986 ; RIVES-LANGE et CONTAMINE-
RAYNAUD, Droit bancaire, 6ème éd, Paris : Dalloz, 1995, pp. 387-388.
778
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit. p45, n°54.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 283

englobant un certain nombre de contrats ; aussi la définition de l’opération de crédit peut-elle


se synthétiser en une « mise à disposition de fonds rémunérée »779. C’est en fait la nature de
cet acte de mise à disposition de fonds qui va déterminer son degré de dématérialisation
possible et les obstacles éventuels.

568. Un caractère solennel ? Les conventions de crédit présentent en principe un caractère


consensuel : sauf exception, aucune formalité ne conditionne la validité du contrat780.
Certaines lois particulières, adoptées ces dernières années ont néanmoins réintroduit un
certain formalisme : « pour des raisons d’intérêt public (contrôle fiscal, réglementation des
relations financières avec l’étranger…), ou en vue de la protection du client et de son
information, certaines formes ou formalités sont imposées, assorties de sanctions
diverses »781. Les conventions de crédit, lorsqu’elles sont spécialement conclues avec des
consommateurs, possèdent certaines caractéristiques des contrats solennels782. On ne saurait
toutefois les assimiler purement et simplement à de tels contrats. Dans ces derniers en effet, la
violation de la règle de forme anéantit le contrat. Or, dans l’opération de crédit, on peut douter
de l’application de cette règle. Au contraire, comme nous le verrons, « la violation des règles
de forme n’affecte l’acte, dans son existence ou son régime, que par un retour aux règles de
fond »783.

569. Une nature réelle ? On pourrait considérer que l’opération de crédit, en se formant par la
remise de la chose, constitue un contrat réel784. De manière générale, dans une opération de
crédit, une institution financière avance des fonds au profit d’un tiers et prend à cet égard un
risque. Or, cette opération est fort proche du prêt, réglé aux articles 1892 et suivants du Code
civil, aux termes desquels, « le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des
parties livre à l'autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à la
charge par cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité ». Mais force est
de constater que confrontée à la pratique, une telle analyse se révèle inadaptée. La

779
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit. p45-46, n°55.
780
AYNES L, Formalisme et prévention, FADLALLAH I. (sous la dir. de), Le droit du crédit au consommateur,
Paris, Litec, 1982, p. 72.
781
GAVALDA C. et STOUFFLET J., Droit bancaire, 5e éd., 2002, Litec, pp. 247-248, n°364 et p. 250, n°368-1.
782
« Le formalisme protecteur, en assurant au consentement du consommateur sa puissance créatrice, rejoint
l’une des finalités essentielles du formalisme traditionnel ; aux formes solennelles, il emprunte l’identification
certaine de la volonté de s’obliger ; comme les formes habitantes, il confère à la volonté son aptitude à obliger »
(AYNES L, Formalisme et prévention, op. cit., p. 77 et s., n°24 et s.). En ce sens également, VAN
OMMESLAGHE P., Le consumérisme et le droit des obligations conventionnelles : révolution, évolution ou
statu quo ? , Hommage à Jacques HEENEN, Bruxelles, Bruylant, 1994, pp. 534-535.
783
AYNES L, Prévention et formalisme, op. cit., p. 83 et s.
784
Sur ce point, v. GAVALDA C. et STOUFFLET J., op. cit., pp. 250-251, n°368-2.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 284

jurisprudence a d’ailleurs progressivement abandonné la qualification de contrat réel pour


consacrer le caractère consensuel de tous les prêts bancaires785. En ce sens, la Cour de
cassation a rappelé que le prêt consenti par un professionnel se formait par le simple échange
des consentements786. Une telle qualification présente des intérêts au niveau de la sanction en
cas d’inexécution : dans le régime du contrat réel, le prêteur, qui ne respecte pas sa promesse
et ne délivre pas les fonds, est redevable de dommages et intérêts787. Par contre, si le contrat
est consensuel, il pourra être condamné à mettre les fonds à disposition de l’emprunteur788.

570. Bilan. Simplement, les opérations de crédit, en tant que mise à disposition de fonds,
apparaissent donc comme des contrats consensuels. Dès lors, aucun obstacle juridique ne
s’opposera au principe de leur conclusion via l’Internet. Néanmoins, s’agissant des opérations
bancaires conclues avec des consommateurs investisseurs, certaines formes viennent s’y
greffer et entourer la rencontre des consentements. Celles-ci peuvent-elles s’adapter au
contexte dématérialisé sans perdre leur finalité de protection ?

§2. Exigences formelles dans les opérations de crédit

571. Le taux. Il ne saurait être question de dresser un inventaire de tous les types de crédit, ni
d’effectuer un relevé exhaustif des exigences de formes auxquelles ils sont soumis. Nous nous
bornerons simplement à mentionner quelques exemples de ce phénomène, tirés des
dispositions législatives. Avant de distinguer selon que l’offre de crédit s’adresse aux
particuliers ou aux entrepreneurs, mentionnons une formalité importante, que le crédit soit
consenti aux uns ou aux autres789 : l’indication par écrit du taux d’intérêt790. Cette exigence,
qui résulte de l’article 1907 du Code civil et des articles L. 313-1 et suivants du Code de la

785
Ce fut admis pour les prêts de consommation, régis par les articles L. 311-1 et s. du Code de la consommation
et pour les crédits immobiliers visés aux articles L. 312-1 et s. du même Code (sur ces derniers, v. Cass. civ. 27
mai 1998, D., 1999, jur., p. 194 et Civ., 11 mai 1999, JCP, 1999, IV, p. 2228).
786
Civ., 28 mars 2000, Bull civ. 2000, I, n°105 ; D. 2000, jur. P.482, note PIEDELIEVRE S., JCP G 2000, II,
10296, concl. SAINTE-ROSE, Contrats conc. consom. 2000, comm. 106, obs. LEVENEUR L., RTD com, 2000,
p. 991, note CABRILLAC M.; Civ. 27 novembre 2001, JCP, 2002, IV, p. 1047.
787
La promesse de prêt n’est en effet pas susceptible d’exécution forcée (Civ., 20 juillet 1981, Bull. civ., I,
n°267).
788
En ce sens, v. GAVALDA C. et STOUFFLET J., op. cit., pp. 250-251, n°368-2.
789
Civ., 22 janvier 2002, R.D.B.F., 2002, p. 65, obs. CREDOT J.-F. et GERARD Y. ; Rennes, 25 octobre 1998,
R.D.B.F., 1998, p. 223, obs. CREDOT J.-F. et GERARD Y..
790
« La seule véritable exigence est celle d’un écrit permettant d’y inclure la stipulation d’intérêts et le taux
appliqué », De LAENDER M-H., La conclusion du contrat de crédit en ligne, RDBF, n°4 juillet-août 2004,
p.288, note 1. ; Cass. Civ. 1ère, 24 juin 1981, Bull. civ. I, n°233, D.1982, jur. P. 397, note BOIZARD, JCP G
1982, II, 713, note VASSEUR.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 285

consommation, est prescrite ad validitatem791. En cas de non-respect, la fixation du taux est


nulle792 (nullité relative de la reconnaissance de l’obligation de payer des intérêts
conventionnels) mais l’opération de crédit reste valable – rappelons qu’il s’agit d’un contrat
consensuel. La disposition fixant le taux demeure également, la jurisprudence appliquant à cet
égard un taux de substitution, le taux légal793 794
. L’intérêt de cette disposition d’ordre public
est d’obliger les établissements de crédits à informer le consommateur sur le coût du crédit ;
de ce point de vue, elle n’est absolument pas contraire au principe d’une dématérialisation de
l’opération de crédit. A l’inverse, la nature écrite de l’Internet semble s’adapter parfaitement à
l’exigence de cette mention écrite, « indispensable en vue d’assurer la transparence de la
relation existant entre les établissements de crédit et leur clientèle »795.

572. Pour le consommateur. En matière de crédit à la consommation, diverses informations


doivent être fournies aux clients, notamment dans les publicités portant sur l’une ou l’autre
des opérations de crédit visées par le texte (articles L.311-4 à L.311-6 du Code de la
consommation). Cette publicité peut être transmise via un site Internet796. L’article L.311-4
précise par ailleurs que les mentions doivent figurer dans la publicité « quel que soit son
support ». Il est aussi stipulé que le client doit recevoir en double exemplaire une offre
préalable (art. L.311-8 du Code de la consommation) au contenu réglementé (art. L 311-10 et
L.311-11 du même Code). Si cette « offre préalable est assortie d’une proposition
d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur » (art. L.311-12 du Code de la
consommation). Pour permettre à l’emprunteur de mettre en œuvre son droit de rétractation,
un formulaire détachable doit aussi être joint à l’offre préalable (art. L.311-15 du Code de la
consommation). En cas de non-respect de ces formalités, des amendes peuvent être infligées.
Le tribunal peut aussi ordonner au contrevenant de faire publier à ses frais le jugement et/ou
de rectifier la publicité (art. L.311-34 du Code de la consommation). De son côté, l’article

791
GAVALDA C. et STOUFFLET J., op. cit., pp. 260-261, n°373-1.
792
Il s’agit d’une nullité relative qui doit être invoquée par l’emprunteur (MAZEAUD H. et L, MAZEAUD J. et
CHABAS F., Leçons de droit civil, t. II, premier volume : Obligations. Théorie générale, 9e éd., par CHABAS
F., Paris, Montchrestien, 1998, p. 63).
793
Civ., 26 mai 1982, Bull. civ., I, n°197 ; Civ., 22 juillet 1986, Bull. civ., I, n°219. Annuler purement et
simplement la clause aurait conduit à conférer au contrat un caractère gratuit, alors que le client avait accepté de
payer un intérêt (Com., 15 octobre 1996, JCP E, 1996, II, p. 921, note POLLAUD-DULIAN).
794
V. toutefois en matière de stipulation d’intérêts débiteurs, à propos d’un compte de dépôt, la Cour de
cassation s’est prononcée en faveur de l’absence de tout intérêt et non de la substitution du taux légal (Com. 4
décembre 1990, Banque, n°514 mars 1991, 325, obs RIVES-LANGE. Sur ce point, v. BONNEAU T., Droit
bancaire, op. cit., p. 251, n°379.
795
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., p. 256, n°380.
796
Rennes, 31 mars 2000, RDBF, 2000, p. 164, note CAPRIOLI E. ; D. 2000, n° 31, p. 358 MANARA C. ;
Comm. com. électr., juin 2000, n°66, note GALLOUX ; Legipresse, n°172, juin 2000.97, note HAZAN.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 286

L.311-33 du Code de la consommation prévoit que « le prêteur qui accorde un crédit sans
saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles
L.311-8 à L.311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul
remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des
intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement,
seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû ». Sur ce point, les
établissements de crédit ont argumenté sur la régularité formelle des offres de crédits. Ils ont
également mis en évidence l’absence de grief de telles irrégularités dans le chef des
emprunteurs, ces dénonciations trouvant bien souvent leur origine dans un contexte de crise
personnelle (chômage, divorce, etc.)797. Quoi qu’il en soit, l’Internet ne remet pas en cause ces
exigences informatives ; elles trouvent naturellement à s’appliquer en cas d’offre de crédit
réalisée via l’Internet.

573. Pour le professionnel. Les entrepreneurs particuliers disposent de certaines garanties,


soumises à des règles de formes déterminées. L’article L.313-21 du Code monétaire et
financier précise en effet qu’ « à l'occasion de tout concours financier qu'il envisage de
consentir à un entrepreneur individuel pour les besoins de son activité professionnelle,
l'établissement de crédit qui a l'intention de demander une sûreté réelle sur un bien non
nécessaire à l'exploitation ou une sûreté personnelle consentie par une personne physique
doit informer par écrit l'entrepreneur de la possibilité qui lui est offerte de proposer une
garantie sur les biens nécessaires à l'exploitation de l'entreprise et indique, compte tenu du
montant du concours financier sollicité, le montant de la garantie qu'il souhaite obtenir ». En
cas de non-respect de ces formalités – et notamment de l’exigence de l’écrit – les garanties
restent valables mais l’établissement de crédit ne peut s’en prévaloir dans ses relations avec
l’entrepreneur individuel798. Là encore, l’exigence de l’écrit n’est pas remise en cause par
l’Internet.

797
LAGARDE X., Observations critiques sur la renaissance du formalisme, op. cit., pp. 1768-1769. L’auteur
nous donne l’exemple suivant : « A un établissement de crédit qui prétendait qu’un échéancier des
amortissement , joint à l’offre préalable comme l’exige l’article L 312-8 du Code de la consommation, indiquant
par année la part des remboursements affectée à l’amortissement du capital et celle affectée au paiement des
intérêts suffisait à l’information de l’emprunteur, il a été répondu que la ventilation des remboursements devait
être faite pour chaque échéance, en sorte qu’à défaut d’une telle précision, l’établissement prêteur s’exposait à
être déchu du droit aux intérêts, qu’elle qu’ait été l’influence réelle de son offre jugée déficiente sur le
consentement de l’emprunteur et ses déconvenues ultérieure (Civ., 18 mars 1997, Bull. civ., I, n°97) ». Sur
l’article L 312-10 du Code de la consommation, v. Civ., 30 mars 1994, Bull. civ., I, n°130 et Civ., 9 décembre
1997, Bull. civ., I, n°368.
798
V. l’art. L 313-21, alinéa 3 du Code monétaire et financier.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 287

574. Durée du concours. D’autres exigences de formes peuvent également être recensées,
applicables cette fois aux entreprises sous forme individuelle ou sociale. L’alinéa 1er de
l’article L 313-12 du Code monétaire et financier799 dispose ainsi que « tout concours à durée
indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit consent à une entreprise, ne
peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de
préavis fixé lors de l'octroi du concours ». La jurisprudence a d’ailleurs estimé à cet égard que
la notification verbale était irrégulière800. Des échanges de lettres de mise en garde ne
permettraient pas non plus d’établir que la notification a eu lieu en des termes non
équivoques801. Lorsque le concours a été accordé à une entreprise moyennant le
cautionnement d’une personne physique ou morale, diverses informations doivent être
communiquées à cette dernière, au plus tard avant le 31 mars de chaque année (art. L.313-22
du Code monétaire et financier)802. Le mode de communication de cette information est libre
mais en cas de défaut, il y aura « déchéance des intérêts échus depuis la précédente
information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information » (art. L.313-22,
alinéa 2 du Code monétaire et financier). Le banquier aura donc tout intérêt à se ménager une
preuve du respect de la formalité précitée803. L’Internet, s’il permettrait facilement de
satisfaire la formalité informative de l’article L.313-22 du Code monétaire et financier, par
l’envoi de courriels, pourrait se heurter à l’obstacle de la notification par lettre recommandée.
Il semble toutefois que l’Internet puisse encore une fois s’adapter à ces exigences formalistes
au moyen du recommandé électronique. En effet, une ordonnance du 16 juin 2005804, prise en
application de la LEN, est intervenue pour affirmer la force probatoire d’un courrier
électronique recommandé. Le nouvel article 1369-8 du Code civil pose néanmoins quatre
conditions : il faut que le courrier soit acheminé par un tiers selon un procédé permettant
d'identifier le tiers, de désigner l'expéditeur, de garantir l'identité du destinataire et d'établir si
la lettre a été remise ou non au destinataire.

799
Cette disposition s’applique dès lors aux concours présentant un caractère permanent et qui ont été autorisés,
tels une ouverture de crédit, un découvert ou encore un crédit résultant d’une cession Dailly (BONNEAU T.,
Droit bancaire, op. cit., p. 483, n°690).
800
Com, 10 juillet 1997, JCP E, 1998, p. 322, n°11, obs. GAVALDA C. , STOUFFLET J.
801
Com., 18 mai 1993, Banque, 1993, p. 100, obs. GUILLOT.
802
Sur cet article, v. BONNEAU T., op. cit., p. 487 et s., n°696 et s.
803
S’agissant d’un fait, la preuve peut être rapportée par toute voie de droit. Un écrit sera néanmoins préférable
(BONNEAU T., op. cit., p. 490, n°700 et les réf. citées). Et si une lettre simple suffit en principe (Com., 17 juin
1997, RTD civ., 1998, p. 157, note CROCQ), il n’est peut-être pas superflu de recourir à la lettre recommandée.
Rien ne devrait en principe s’opposer à ce que ces informations soient transmises par voie électronique.
804
Ordonnance n°2005-674 du 16 juin 2005, relative à l’accomplissement de certaines formalités contractuelles
par voie électronique ; V. SEDAILLAN V., Nouvelles dispositions relatives aux contrats électroniques, 29 juin
2005, disponible sur : www.juriscom.net; Actualités du droit du commerce électronique, RLDI, septembre 2005,
n° 8, p. 33.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 288

575. Le prêt immobilier. L’article L.312-2 du Code de la consommation concerne expressément


les prêts consentis pour financer les acquisitions, constructions, réparations… d’immeubles à
usage d’habitation. Le code prévoit un certain nombre d’obligations informatives dont
l’objectif est naturellement de protéger le consommateur. S’agissant des contrats visant des
immeubles, le formalisme est traditionnellement plus lourd qu’en matière mobilière. En outre,
un délai de réflexion805 est imposé et la durée de l’offre du prêteur est limitée806. Ceci étant,
les conditions imposées par le Code de la consommation pourraient être satisfaites via
l’Internet en dépit, par exemple, de l’article L.312-7 du Code de la consommation qui impose
au prêteur de formuler une offre par écrit et adressée par voie postale. Au stade de sa
conclusion le contrat de prêt et le contrat de vente de l’immeuble sont interdépendants807 ; en
revanche, au stade de leur exécution, ils retrouvent leur autonomie juridique808. En outre,
l’ordonnance du 6 juin 2005 apporte dans les articles L. 121-20-9 et suivants du Code de la
consommation une protection, par l’information précontractuelle809, en matière de contrats à
distance portant sur des services financiers, spécialement adaptée à l’Internet.

576. Formalisme informatif. Dans la mesure où nous intéresse la dématérialisation des opérations
bancaires et financières, un mot doit être dit d’opérations connexes et plus particulièrement de
l’assurance. En effet, l’objectif reste la réussite d’une dématérialisation globale des opérations
de crédit, celle-ci pouvant être imposée par l’établissement de crédit. Dès avant la conclusion
du contrat, le preneur d’assurance doit recevoir un certain nombre d’informations810. Celles-ci
sont détaillées dans l’article L.112-2 du Code des assurances. Il s’agit d’une fiche
d’informations sur le prix et les garanties et d’un exemplaire du contrat et de ses pièces
annexes ou d’une notice d’information sur le contrat qui décrit précisément les garanties
assorties des exclusions ainsi que les obligations de l’assuré811. Le Code ne précise pas les

805
Délai d’ordre public de 10 jours : article L312-10 al. 2 du Code de la consommation, dont la violation est
sanctionnée par la nullité de l’engagement : Civ. 1ère 9 décembre 1997, Bull civ. I, n°368 p 249 ; Contrats conc.
consom., mars 1998, n°53, note RAYMOND G. ; JCP G, 1998, II, 10148, et éd. E, p. 1731, note
PIEDELIEVRE S.
806
30 jours, article L.312-10 du Code de la consommation.
807
Par le jeu des conditions résolutoires et suspensives ; cf. BONNEAU T, Droit bancaire, éd. préc., p. 507
n°713 et s.; article L.312-12 du Code de la consommation pour la condition résolutoire de non-conclusion du
contrat principal ; articles L.312-15, L.312-17 du Code de la consommation pour la condition suspensive
d’obtention du prêt.
808
Ainsi, pour garantir la bonne exécution du remboursement, l’établissement peut-il offrir, voire imposer la
souscription à un contrat d’assurance.
809
Article L. 121-20-10 du Code de la consommation.
810
Sur ce point, GUELDRE R. et NAFTALSKI F., E-Commerce et assurance, Lamy Assurances (sous la dir. de
KULLMANN J.), 2005, p. 1944 et s., n°4031 et s. (ci-après Lamy Assurances).
811
Des informations complémentaires sont également nécessaires en matière d’assurance-vie v. l’article L 132 -
5 -1.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 289

modalités de remise de ces documents. Rien n’empêche donc de recourir aux moyens
électroniques (courrier électronique, site Internet, etc.). Il précise toutefois, concernant le
projet de contrat et ses annexes ou la notice, que la remise de ces documents doit être
constatée par une mention signée et datée par le souscripteur, apposée au bas de la notice
(article R.112-3). Cette stipulation relève assurément du formalisme probatoire mais elle
devra être respectée et la preuve de cet élément devra être apportée. Dans la mesure où l’écrit
électronique est admis en preuve, on voit mal comment cette exigence ne pourrait être
respectée via l’Internet.

577. Durabilité du support. D’autres obligations d’information sont également prévues au titre de
directives européennes adoptées récemment et en cours de transposition812. Celles-ci exigent
par ailleurs que les informations soient communiquées sur un support durable, entendu
comme « tout instrument permettant au consommateur de stocker des informations qui lui
sont adressées personnellement d’une manière permettant de s’y reporter aisément à l’avenir
pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées et qui
permet la reproduction à l’identique des informations stockées »813.

578. Mentions obligatoires. Certaines mentions doivent aussi figurer obligatoirement dans le
contrat814. Elles sont édictées aux articles L.112-4815 et R.112-1816 du Code des assurances.

812
Il s’agit principalement de la directive sur la commercialisation à distance des services financiers auprès des
consommateurs. Par ailleurs, une proposition de directive « intermédiation en assurance » énonce les données
que l’intermédiaire en assurance doit communiquer au consommateur sur un support durable avant tout premier
contact. Proposition de directive du Conseil « intermédiation en assurance » adoptée le 21 septembre 2000 par la
Commission européenne.
813
V. l’art. 2, f, de la directive concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des
consommateurs. Le considérant n° 20 de la directive précise à cet égard que « Les supports durables incluent
notamment les disquettes informatiques, les CD-ROM, les DVD et le disque dur de l’ordinateur du
consommateur sur lequel le courrier électronique est stocké, mais ils ne comprennent pas les sites Internet, sauf
ceux qui satisfont aux critères spécifiés dans la définition des supports durables ».
814
Lamy Assurances, 2005, p. 244, n°428.
815
Les contrats d’assurance doivent indiquer « les noms et domiciles des parties contractantes ; la chose ou la
personne assurée ; la nature des risques garantis ; le moment à partir duquel le risque est garanti et la durée de
cette garantie ; le montant de cette garantie ; la prime ou la cotisation de l'assurance. La police indique en
outre : la loi applicable au contrat lorsque ce n'est pas la loi française ; l'adresse du siège social de l'assureur
et, le cas échéant, de la succursale qui accorde la couverture ; le nom et l'adresse des autorités chargées du
contrôle de l'entreprise d'assurance qui accorde la couverture ».
816
En vertu de cet article, « les polices d'assurance des entreprises mentionnées au 5º de l'article L.310-1
doivent indiquer : la durée des engagements réciproques des parties ; les conditions de la tacite reconduction, si
elle est stipulée ; les cas et conditions de prorogation ou de résiliation du contrat ou de cessation de ses effets ;
les obligations de l'assuré, à la souscription du contrat et éventuellement en cours de contrat, en ce qui concerne
la déclaration du risque et la déclaration des autres assurances couvrant les mêmes risques ; les conditions et
modalités de la déclaration à faire en cas de sinistre ; le délai dans lequel les indemnités sont payées ; pour les
assurances autres que les assurances contre les risques de responsabilité, la procédure et les principes relatifs à
l'estimation des dommages en vue de la détermination du montant de l'indemnité. Elles doivent rappeler les
dispositions des titres Ier et II du livre Ier de la partie législative du présent code concernant la règle
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 290

Dans les contrats d’assurances-vie également, d’autres clauses doivent figurer, de manière
impérative (art. L.132-3 et R.132-4). L’article L.112-3 du Code des assurances dispose que
« le contrat d’assurance et les informations transmises par l’assureur au souscripteur […]
sont rédigées par écrit […], en caractères apparents ». Précisons que cet article s’applique
aux informations précontractuelles énoncées précédemment. Deux types de formalités
peuvent être soulignés : l’écrit et les caractères apparents. Tout le contrat doit donc être rédigé
en caractères apparents – pour éviter le recours aux caractères très petits compliquant la
lecture – et certaines clauses en caractères très apparents817. Concrètement, il s’agit des
clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions (art. L.112-5,
dernier alinéa du Code des assurances) ainsi que celle précisant la durée du contrat (art. L.
113-15 du Code des assurances). Le recours à un traitement de texte ordinaire permet de
respecter cette formalité (couleurs différentes, caractères gras, soulignés, de taille différente,
etc.). Dans le contexte de l’Internet, cette exigence sera d’autant mieux satisfaite : les
ressources sont encore plus nombreuses pour mettre en évidence les clauses précitées. Dans la
pratique, des contentieux furent néanmoins portés devant les tribunaux, ce qui a permis de
préciser la notion. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, il doit exister une différence
matérielle entre les clauses rédigées en caractères très apparents et les autres stipulations818.
Le texte ne précise pas la sanction applicable en cas de non-respect de cette obligation,
toutefois le contrat reste valable et la clause est réputée non écrite819. Quant à l’exigence de
l’écrit, elle participe au formalisme probatoire et devrait être rencontrée par le biais de
l’Internet ou d’un courrier électronique. L’article 1316 du Code civil définit en effet la preuve
par écrit comme résultant « d’une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres
signes ou symboles dotés d’une signification intelligible, quels que soient leur support et
modalités de transmission »820. Le contrat d’assurance a donc un caractère consensuel : il est
parfait dès l’échange des consentements821. Les formalités énoncées sont donc exigées ad

proportionnelle, lorsque celle-ci n'est pas inapplicable de plein droit ou écartée par une stipulation expresse, et
la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance. Les polices des sociétés d'assurance mutuelles
doivent constater la remise à l'adhérent du texte entier des statuts de la société. Les polices d'assurance contre
les accidents du travail doivent rappeler les dispositions légales relatives aux déclarations d'accidents et aux
pénalités pouvant être encourues à ce sujet par les employeurs ».
817
Lamy Assurances, 2005, p. 270 et s., n°490 et s.
818
V. par ex. Cass. civ., 1er décembre 1998, RGDA, 1999, p. 99, note MAYAUX L. ; Cass. civ., 11 décembre
1990, RGAT., 1991, p. 327, note KULLMAN J. ; Cass. civ., 20 mars 1989, Bull. civ., I, n°121.
819
V. Lamy Assurances, 2005, p. 272, n°493 et Civ., 31 octobre 1989, R.G.A.T., 1990, p. 67, note MARGEAT
et LANDEL J.. Dans certains arrêts, la Cour de cassation a toutefois estimé que la clause de durée était
inopposable (v. par ex. Civ., 11 juillet 1963, RGAT, 1964, p. 335, note BESSON).
820
V. aussi l’art. 1316-1 du Code civil qui précise que « l’écrit sur support électronique a la même force
probante que l’écrit sur support papier ».
821
Civ., 9 mars 1999, RGDA, 1999, p. 567, note KULLMANN J.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 291

probationem et non pas ad validitatem. La nécessité d’un formalisme rigoureux, de mentions


obligatoires et d’apparence de certains caractères, pourra largement être respectée sur un site
Internet, voire dans les documents à télécharger avant souscription. Le contrat d’assurance
pourra donc être facilement dématérialisé et, les exigences de la directive sur le commerce
électronique satisfaites. Il semble qu’il ne ressorte aucune pénalisation pour le consommateur
dont la protection est au moins autant « assurée ».

579. Bilan sur la dématérialisation du contrat du crédit. La violation des obligations formelles
entourant la conclusion des opérations de crédits n’est pas de nature à remettre en cause la
validité de l’engagement, ce qui souligne leur nature consensuelle. Ces obligations –
informatives essentiellement pour le consommateur – peuvent être remplies via l’Internet par
le biais d’informations présentes sur le site lui-même. Certes le crédit en ligne n’est pas
encore très développé mais, en réalité, il convient pratiquement de distinguer entre le crédit
mobilier et le crédit immobilier au consommateur. Dans le premier cas, des solutions
techniques existent pour adapter le formalisme traditionnel (impression de l’offre de crédit
transmise en double exemplaire) puisque, in fine, la seule exigence est celle de l’écrit,
impératif que satisfait largement l’Internet (pour la mention du taux d’intérêt, de même que
pour l’acceptation du consommateur822 point de départ du délai de rétractation). Nous
pouvons donc conclure aux termes de l’analyse, en accord avec un auteur823, qu’il n’existe,
pour ce type d’opération, aucun obstacle juridique à la conclusion du contrat de crédit
mobilier en ligne824. Dans le second cas, pour le crédit immobilier, restent deux obstacles qui
ne permettent pas aujourd’hui la conclusion de tels contrats en ligne : la remise de l’offre et
son acceptation doivent nécessairement se faire par voie postale825. En ce qui concerne l’offre,
la jurisprudence estime en effet qu’il s’agit d’une condition substantielle de sa validité826 ; il
en est de même pour l’acceptation du consommateur827. Il n’en reste pas moins que ces
obstacles pourraient facilement être levés, comme le souligne Madame M.-H. LAENDER

822
C. cons, art. L311-16 et L312-10.
823
LAENDER M.-H., art. préc., p. 290, n°9.
824
Pour la question du formulaire détachable, la jurisprudence ne semble pas très attachée au formalisme même
du bordereau de rétractation puisqu’elle considère qu’il n’est pas nécessaire que les mentions prévues à l’article
R311-7 du Code de la consommation y figurent : Cass. 1ère civ. 13 nov. 2003, Contrats conc. consom. 2003,
comm. 49 ; Juris-Data n° 2003-016295. ; Cass. 1ère civ., 17 juillet 2001: Bull. civ. 2001, I, n°233, D.2001, jur.
p.2676, obs. RONDEY C., D.2002, jur., p.71, note MAZEAU D.
825
Code de la consommation article L.312-7.
826
Cass.1ère civ. 10 déc. 2002, Contrats conc. consom., 2003, comm. 96, obs RAYMOND G.
827
Cass.1ère civ., 29 oct. 2002, JCP G. 2003, II, 10056, PIEDELIEVRE S., D.2002, jur., p.3076, note RONDY
C., RDBF, 2002, p.316, obs. CREDOT F. et GERARD Y., Contrats conc. cosom., 2003, comm. n°14, obs.
RAYMOND G.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 292

grâce à la lettre recommandée avec avis de réception électronique828. Par ailleurs, note-t-elle,
la Cour de cassation829 a admis que « l’acte authentique puisse valoir acceptation de l’offre
indépendamment du strict respect de l’exigence formelle de l’envoi postal »830. Il serait donc
possible d’y voir une amorce d’évolution sur cette question. Quoi qu’il en soit, la technique
devrait venir ici au secours du droit.

580. Les contrats connexes. De plus, les opérations de crédits dématérialisées pourront
s’accompagner d’autres contrats de type assurance tels qu’ils le sont traditionnellement. Par
exemple, sous réserve de la seule identification des parties, une demande d’ouverture de
compte d’épargne logement (CEL) peut être effectuée directement en ligne au moyen d’un
formulaire et, les versements sur le compte seront opérés par virement via l’interface Internet
de gestion du compte principal. Il est à noter cependant que cette possibilité sera plus
facilement mise en œuvre dans le cas de consommateur déjà client ; le cas échéant
l’établissement de crédit préfèrera rencontrer préalablement le candidat au CEL. L’obtention
du prêt, dix huit mois après, pourrait, elle-même, juridiquement, se faire directement en ligne
ou par échange de courriel. L’ouverture d’un PEL (plan d’épargne logement), quant à elle,
prévue par l’article R.315-25 du Code de l’habitation et de la construction, doit faire l'objet
d'un contrat constaté par un acte écrit. Or, on l’a vu la notion d’écrit n’est pas limitée au
papier et cet écrit peut être dématérialisé.

Section 2. Le courtage en ligne

581. Définition. Divers services financiers peuvent être proposés par l’Internet et la notion de
courtage en ligne n’est peut-être pas la plus appropriée pour appréhender toute la complexité
et la diversité du phénomène831. Au sens financier, vu l’arrêté du 30 septembre 1991 relatif à
la terminologie économique et financière832, le courtier est un intermédiaire qui intervient
pour le compte de tiers en transmettant leurs ordres sur les marchés de capitaux et des

828
LEANDER M-H., art. préc., p.291 ,n°14.
829
Cass.1ère civ. 18 janv. 2000, RDBF 2000, p.76, obs. CREDOT F. et GERARD Y., Contrats conc. consom.,
2000, comm. 117, obs RAYMOND G.
830
LEANDER M-H., art. préc., p.291 ,n°14.
831
Association française des entreprises d’investissement (ci-après AFEI), La fourniture de services et produits
financiers à l’épreuve d’Internet. Quel environnement juridique pour les prestataires de services
d’investissement ?, 2000, disponible sur : http://www.afei.com/fr/fr-docs/rapport_internet.pdf, p. 102 ;
FRONTEZAK S., les courtiers en lignes, Bull. COB n°348, juillet-août 2000, pp. 13-46. V. aussi. CAPIAU-
HUART M.-C et FRANÇOIS-HEUDE A., La bourse en ligne, Revue de la Banque, 2000, pp. 240-244 ; DE
VAUPLANE H. et BORNET J.-P., Droit des marchés financiers, 3e éd., Paris, Litec, 2001, pp. 94-95, n°92-1.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 293

marchandises ; il se rémunère par le courtage perçu sur ces opérations. Plus simplement
encore, l’article 312-2 du Règlement général de l’AMF définit le courtier comme un
prestataire habilité à exercer une activité d’exécution d’ordres pour compte de tiers. Le
courtage inclut « les diverses techniques par lesquelles une opération est « intermédiée » par
un professionnel pour le compte d’un client »833. Mais la notion traditionnelle de courtier
évolue alors au bénéfice de celle de « brokers on line » ou « e-brokers », qui présentent la
particularité d’offrir aux investisseurs l’accès aux marchés financiers via l’Internet834. Or,
lorsque l’on parle de courtage en ligne on vise l’activité des intermédiaires financiers,
membres directs835 ou non d’un marché financier et qui accomplissent des services variés
(services d’investissements836 et services assimilés837). Ainsi certaines obligations formelles
s’attachent aux opérations menées par les courtiers en ligne ; les règles relatives à la
conclusion des contrats (§1) doivent être distinguées de celles en matière d’information du
client (§2).

582. Précisions liminaires. En réalité, l’activité de « broker » peut aller bien plus loin que la
simple exécution d’ordre pour compte de tiers, sous réserve de l’obtention de l’agrément des
entreprises d’investissement (article L.532-1 du Code monétaire et financier) : réception et
transmission d’ordres pour le compte de tiers, le placement, la tenue de compte… Etant donné
la diversité des services proposés, le Règlement général de l’AMF838 précise les informations
préalables que ces prestataires doivent fournir aux investisseurs sur l’Internet. La formalité
« concerne leur statut et les services qu’ils sont habilités à offrir à la clientèle »839. Il s’agit là
d’une réglementation propre à l’Internet et non d’une adaptation ; néanmoins, on peut
s’interroger sur l’intérêt d’une telle formalité, et peut-être doit-on y voir plus une
manifestation des appréhensions des institutions financières que l’émergence d’un formalisme
électronique.

832
Arrêté du 30 septembre 1991.
833
AFEI, La fourniture de services et produits financiers à l’épreuve d’Internet. Quel environnement juridique
pour les prestataires de services d’investissement ?, op. cit., p. 102.
834
GRANIER T., JAFFREUX C, Internet et transaction financières, Paris : Economica, 2002, p. 18, 2.2.
835
Dans ce cadre, il faut savoir que pour les cessions et négociations d’instruments financiers admis aux
négociations sur un marché réglementé, l’article L. 421-6 du Code monétaire et financier institue une obligation
d’intermédiation.
836
Art. 4 de la loi de modernisation des activités financière, aujourd’hui article 321-1 du Code monétaire et
financier.
837
RG AMF, art. 2-1-1, 2°.
838
Articles 321-54 et s. RG AMF relatifs aux prescriptions et recommandations pour les intermédiaires offrant
un service de réception/transmission ou d’exécution d’ordres via Internet.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 294

§1. La conclusion du contrat

583. L’évolution. Concernant la distinction entre opérations de bourses effectuées à titre


occasionnel et habituel, et plus particulièrement sur le régime de taxation des plus-values, une
question parlementaire fut posée au Ministère de l’Economie et des Finances840. Si le sort des
plus-values n’est pas propre au droit bancaire, l’auteur souligne que « [depuis 18 mois,] le
nombre de courtiers en ligne n'a cessé de s'accroître en France pour atteindre aujourd'hui
près de quarante opérateurs, soit quatre fois plus que les autres pays européens » et qu’une
nouvelle réglementation semble nécessaire face au développement de l’Internet. La réponse
apportée apparaît pourtant nier cette réalité « le développement du réseau Internet et de
courtage en ligne, qui est de nature à faciliter les transactions boursières, ne devrait pas
entraîner une augmentation du nombre des opérateurs habituels ». Sans s’appesantir sur ce
débat, nul ne conteste que l’outil Internet s’accommode parfaitement des opérations
boursières étant donné leur dénominateur commun : la rapidité. Ainsi, deux formalités
paraissent-elles essentielles s’agissant du courtage en ligne841 : l’obligation de conclure une
convention écrite (A) et la nécessité d’identifier le client (B).

A. La nécessité d’une convention

584. L’obligation. En principe, l’intermédiaire financier est tenu de conclure une convention écrite
avec ses clients842. La loi financière l’impose pour la gestion de portefeuille pour le compte de
tiers (article L.533-10 du Code monétaire et financier par renvoi à l’article L.321-1, 4) et le
Règlement général AMF pour la réception et la transmission d’ordres pour le compte de tiers,
l’exécution d’ordres pour le compte de tiers843, la compensation, la tenue de compte et la
tenue de compte conservation (art. 2-4-12, 2-4-13 et 6-3-1). De même, l’AMF insiste sur le
fait que « toute gestion individuelle de portefeuille doit donner lieu à l’établissement

839
GRANIER T., JAFFREUX C, Internet et transaction financières, op. cit., p. 19, 2.2.
840
Question n°47394 de Monsieur Guy LENGAGNE, Assemblée Nationale, publiée au JO du 12.06.2000, p.
3500. Réponse du Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie publiée au JO du 29.01.2001, p. 6101.
841
Sur celles-ci, v. AFEI, La fourniture de services et produits financiers à l’épreuve d’Internet. Quel
environnement juridique pour les prestataires de services d’investissement ?, op. cit., p. 104 et s.
842
En effet, « la transmission d’ordres par Internet présente deux temps : un premier que l’on pourrait baptiser
de connaissance où les se présentent et qui implique en l’état actuel de la réglementation des échanges écrits et
un deuxième temps, celui de l’exécution de la prestation, où l’écrit s’efface au profit des moyens de transmission
électronique » (DE VAUPLANE H. et BORNET J.-P, op. cit., p. 94, n°92-1).
843
A cet égard, le RG AMF pose néanmoins que si les activités sont exercées « pour le compte d’établissements
de crédit, d’entreprises d’investissement, d’institutions visées à l’article 25 de la loi n°96-597 du 2 juillet 1996,
ou d’établissements non résidents ayant un statut comparable », l’écrit n’est pas obligatoire (art 321-68).
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 295

préalable d’une convention écrite » (art. 322-67, RG AMF) et que « la gestion sous mandat
donne lieu à l’établissement préalable d’une convention écrite, dont le contenu minimal est
défini par les lois et règlements. Cette convention écrite est signée par les deux parties ».

585. Protection du consommateur. Ceci étant, encore faut-il déterminer si cette exigence est
requise ad validitatem ou ad probationem. Dans le même temps, il sera nécessaire de voir si
la condition d’écrit pourra être satisfaite dans le cadre de conventions nouées à travers les
réseaux. En modifiant le Code civil (et spécialement l’article 1316-1), la loi n° 2000-230 du
13 mars 2000 a reconnu l’équivalence entre l’écrit sous forme électronique et l’écrit papier.
« Il résulte nettement des travaux préparatoires que ni le Gouvernement, ni le Parlement
n’ont entendu, par la réforme, mettre fin à une subtile distinction du droit français des
obligations, entre l’écrit requis à titre simplement probatoire (ad probationem), aux fins de
préconstitution, et l’écrit exigé à titre de solennité (ad validitatem ou ad solemnitatem), parce
qu’il s’agit de protéger le consentement d’une partie. Dans le dernier cas, en l’absence
d’écrit, le contrat est nul »844. Cette position fait toutefois l’objet de controverses845 qui
devraient cependant cesser avec l’adoption de l’article 1108-1 du Code civil.

586. Analyse. Il n’est cependant pas inutile de comparer les prescriptions de la loi du 13 mars 2000
modifiant les articles 1316 et suivants du Code civil, ne valant que pour les écrits ad
probationem, avec les formalités requises par les diverses législations financières ressortissant
du formalisme de validité ou du formalisme probatoire. Rappelons qu’en l’occurrence, les
objectifs de cette formalité visent essentiellement la partie faible, pour lui faire prendre
conscience de l’importance de l’acte qu’elle s’apprête à poser et des conséquences financières
qui pourraient en résulter. Pour répondre à la question, il semble intéressant d’analyser d’une
part, le mandat de gestion dont la formalité est exigée sous peine de nullité : « l’obligation
édictée ne se limite pas à l’établissement d’un acte écrit : doivent être insérées dans l’acte

844
GAUTIER P.-Y. et LINANT DE BELLEFONDS X., De l’écrit électronique et des signatures qui s’y attachent,
JCP, E, 2000, p. 1273 et s. ; AFEI, La fourniture de services et produits financiers à l’épreuve d’Internet. Quel
environnement juridique pour les prestataires de services d’investissement ?, op. cit., p. 41, n°45.
845
« Il peut en effet être relevé que limiter la portée de la loi du 13 mars 2000 aux règles de preuves apparaît
artificiel dans la mesure où l’exigence d’une règle de forme n’a de sens que parce qu’il s’agit, de façon
cumulative ou non, d’assurer que le consentement de la ou les parties sur l’acte en cause est bien présent ou que
cet acte contient a minima un certain nombre de mentions. Or, n’est-ce pas là justement le domaine de la
preuve ? En outre, l’inégalité de traitement qui est ainsi créée entre l’écrit papier et l’écrit électronique lorsque
l’écrit est exigé à titre de forme, apparaît d’autant plus paradoxale que la loi a parallèlement reconnu la
possibilité d’établir des actes authentiques sous la forme électronique » (AFEI, La fourniture de services et
produits financiers à l’épreuve d’Internet. Quel environnement juridique pour les prestataires de services
d’investissement ?, op. cit., p. 42, n°45).
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 296

diverses mentions destinées à attirer l’attention du client sur l’importance des engagements
pris et à assurer une protection supplémentaire du consentement donné. Le dispositif ainsi
institué consistant en une formalité protectrice du client, partie faible dans ce contrat, doit
être sanctionné par la nullité relative, mise en œuvre par la partie protégée, qui a la
possibilité de renoncer à cette action par une confirmation de l’acte nul »846. Quant aux
conventions de service et de compte d’autre part, le Règlement général AMF exige qu’elles
soient conclues sur support écrit847 et même si le modèle de convention est consultable à
l’écran, le client doit en recevoir un exemplaire écrit. Il semble toutefois que les sanctions qui
s’attachent au non-respect de la formalité soient assez limitées. Cela conduirait donc à penser
que la condition est exigée à titre probatoire848. Si les dispositions de l’article 1316-1 du Code
civil sont respectées, l’écrit sous forme électronique ne devrait pas poser de problème.

B. L’identification du client

587. L’alternative. Un autre problème résidait dans la nécessité d’identifier le client849. Le


Règlement général AMF prévoit en effet que « préalablement à la réalisation d’une opération
sur instrument financier avec un nouveau client, le prestataire habilité vérifie l’identité du
client et s’assure le cas échéant, de la personne pour le compte de laquelle il agit. Le
prestataire habilité s’assure que le client a la capacité et la qualité requises pour effectuer
cette opération »850. On peut difficilement parler de formalisme de validité dans la mesure où
le prestataire qui ne respecterait pas cette formalité encourrait principalement des sanctions
disciplinaires. Dans les rapports financiers noués à travers l’Internet, les parties ne se
rencontrent pas physiquement et l’intermédiaire n’a dès lors pas la possibilité de vérifier ces
éléments. La signature électronique permettra vraisemblablement de remplacer le face-à-face.
En attendant, pour ne pas pénaliser le développement du courtage en ligne, l’AMF décrit la

846
STORCK M., Société de gestion de portefeuille, Banque et Crédit, Fasc. 2210, n°57 ; AFEI, La fourniture de
services et produits financiers à l’épreuve d’Internet. Quel environnement juridique pour les prestataires de
services d’investissement ?, op. cit., p. 105, n°154 ; RUET L., La réglementation de l’utilisation d’Internet dans
la passation des ordres de bourse, Comm. com. électr., mars 2000, p. 12, n°17.
847
RG AMF art. 321-68 et 321-71 en prévoyant le contenu.
848
La solution est néanmoins entourée d’incertitudes (AFEI, La fourniture de services et produits financiers à
l’épreuve d’Internet. Quel environnement juridique pour les prestataires de services d’investissement ?, op. cit.,
p. 106, n°154).
849
AFEI, La fourniture de services et produits financiers à l’épreuve d’Internet. Quel environnement juridique
pour les prestataires de services d’investissement ?, op. cit., p. 102 et s. ; SWEERTS F., Internet – Les sites
bancaires veulent s’ouvrir au consommateur européen, Revue de la Banque, pp. 265-266.
850
RG AMF, art. 332-3.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 297

procédure à suivre851. Le règlement prévoit qu’ « aux fins de remplir l’obligation de


vérification de l’identité et de la capacité du client à laquelle il est tenu[…], le prestataire
habilité qui souhaite établir une relation d’affaires exclusivement au travers d’Internet avec
un client nouveau doit préalablement recevoir : une photocopie d’une pièce d’identité en
cours de validité (passeport, carte d’identité, permis de conduire), un relevé d’identité
bancaire ou un chèque annulé, un justificatif de domicile » (art. 321-56 du RG AMF). Cette
disposition, même si elle entérine une pratique antérieure, peut faire l’objet de critiques, dans
la mesure où les fraudes ne sont pas à exclure852. L’AMF fait preuve de ce point de vue d’une
grande frilosité en comparaison avec les objectifs de la directive commerce électronique
(suppression des obstacles à la conclusion des conventions) et des avancées législatives sur la
preuve électronique. Gageons que cette procédure sera amenée à évoluer.

588. Blanchiment d’argent853. Cette obligation doit être lue avec la réglementation sur le
blanchiment854 qui impose aux organismes financiers de s’assurer de l’identité des clients855.
L’article L.563-1 du Code monétaire et financier prévoit en effet que « les organismes
financiers doivent, avant d’ouvrir un compte, s’assurer de l’identité de leur cocontractant par
la présentation de tout document écrit probant. Ils s’assurent dans les mêmes conditions de
l’identité de leur client occasionnel qui leur demande de faire des opérations dont la nature et
le montant sont fixés par [décret]. Ils se renseignent sur l’identité véritable des personnes au
bénéfice desquelles un compte est ouvert ou une opération réalisée lorsqu’il leur apparaît que
les personnes qui demandent l’ouverture du compte ou la réalisation de l’opération
pourraient ne pas agir pour leur propre compte ». Par ailleurs, le décret n° 91-160 du 13
février 1991, pris en application de la loi précitée, exige qu’avant l’ouverture d’un compte,

851
RG AMF art. 321-54 et s ; CACHARD O., La régulation internationale du marché électronique, Paris,
LG.D.J., 2002, p. 282, n°453.
852
CACHARD O., op. cit., p. 282, n°453.
853
GUITTON G., Clarté, responsabilité, sécurité : les enjeux de la lutte contre le blanchiment pour les banques
françaises, Banque et Droit, n°88, mars-avril 2003, p. 6 ; MOLFESSIS N., Les banques et la lutte contre le
blanchiment des capitaux, Banque et Droit, n°88, mars-avril 2003, p. 3.
854
DIEUX X. et WILLERMAIN D., Questions de droit financier en relation avec l’offre de produits et de
services financiers sur le réseau internet, BYTTEBIER K., FELTKAMP R. et JANSSENS E. (sous la dir. de),
Internet et le droit, Anvers, Maklu, 2001, p. 583 et s., n°29 et s. ; DE VAUPLANE H. et BORNET J.-P., Droit
des marchés financiers, 3e éd., Paris, Litec, 2001, p. 995 et s., spéc. pp. 999-1000, n°1109 ; DE BROUWER F. et
MARTY C., La communication de la Commission européenne en matière de commerce électronique et de
services financiers. Vers un véritable marché intérieur des services financiers ?, Banque et Droit, 2001, p. 17 ;
LECLAIR G., La problématique de la lutte contre le blanchiment d’argent, La riposte européenne, Banque et
Droit, n°88, mars-avril 2003, p.21.
855
BOULOC B., La prévention du blanchiment d’argent, Rev. Droit Bancaire et Financier, n°6 novembre-
décembre 2002., p.360. ; DECSHANEL J-P., GAILLARDOT D., Où en est-on du blanchiment des capitaux, de
sa prévention et de sa répression, Droit bancaire et financier, Mélanges AEDBF France II, Banque Editeur,
P.180, n°45 ; JEREZ O., Le blanchiment de l’argent, Banque Editeur, 1998, P.305.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 298

« l’organisme financier s’assure de l’identité de son cocontractant, par la présentation,


lorsqu’il s’agit d’une personne physique, d’un document officiel portant la photographie de
celle-ci » (article 3 du décret). Le non-respect de cette obligation est passible de sanctions
disciplinaires856 de la part de l’autorité ayant pouvoir disciplinaire (aux termes de l’article
L.563-6 du Code monétaire et financier). Par conséquent, si le compte a permis ou facilité les
agissements dommageables de son titulaire857, la responsabilité de l’établissement est alors
engagée858. Cette formalité ne semble pas pouvoir être accomplie via les réseaux. La
généralisation de la signature électronique devrait toutefois permettre de remplir l’exigence
d’identification et les prestataires de certification pourraient jouer un rôle crucial dans ce
cadre, en vérifiant l’identité et la capacité des postulants859. En matière de chèque et de lutte
contre le blanchiment d’argent, le Règlement du 18 avril 2002860 impose une certaine
vigilance aux établissements de crédit, faisant référence, d’une part, à des règles de contrôle
interne (contrôle lors de la présentation des chèques) « dont l’établissement a dû se doter en
vertu du Règlement n°91-07 du 15 février 1991861 » et, d’autre part à un programme annuel de
contrôle des chèques (dont le résultat doit être transmis à Tracfin). Enfin, s’agissant la
transmission des chèques sous forme dématérialisée, type règlement interbancaire, les
établissements de crédit ne sont pas dispensés d’un examen des chèques révélant un
fonctionnement inhabituel du compte, preuve que « la dématérialisation des échanges n’est
pas un obstacle aux contrôles que les établissements de crédit doivent assumer862 ».

856
REBUT D., Manquement du banquier à ses obligations professionnelles et commission du délit de
blanchiment, Banque et Droit, n°88, mars-avril 2003, p. 11.
857
BONNEAU T., op. cit., p. 235, n°365 ; CACHARD O., op. cit., p. 283, n°453.
858
FRANCHI F., Le blanchiment, un délit mal vu par les banquiers, Banque et Droit, n° 88, mars-avril 2003,
p.18 ; BONNEAU T., La responsabilité du banquier encourue pour non respect de la législation relative au
blanchiment de capitaux : panorama de jurisprudence récente, RDBF, janvier-février 2005, p. 41.
859
« Pour accomplir ces vérifications, l’organisme de certification devrait satisfaire l’exigence de proximité afin
d’être en mesure de recevoir les personnes physiques. La rencontre interpersonnelle serait donc réintroduite
dans le commerce à distance, à condition que l’organisme de certification dispose d’un véritable réseau réparti
sur le territoire » (CACHARD O., op. cit., p. 283, n°454 ; v. aussi ROLIN JACQUEMYNS L. et VERBIEST T.,
L’offre de services et produits financiers sur internet, RDAI, 2000, p. 14 et s.). V. aussi le rapport de l’OICV,
Securities Activity on the Internet, 1998, pp. 19 et 33.
860
Règlement CRBF n°2002-01 du 18avril 2002 relatif aux obligations de vigilance en matière de chèques aux
fins de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Cf. BONNEAU T., Instrument
de paiement et lutte contre le blanchiment des capitaux, Banque et Droit, n°88, mars-avril 2003, p.26.
861
BONNEAU T., Instrument de paiement et lutte contre le blanchiment des capitaux, art. préc. p.26.
862
BONNEAU T, art. préc. p. 28, citant pour les chèques : Com. 9 juillet 2002 : Banque et Droit, novembre-
décembre 2002, p. 51, obs. BONNEAU T. ; et pour les virements : Com. 29 janvier 2002 : Bull. civ. IV, n°20, p.
20 ; Banque et Droit, n°89, mai-juin 2002. 49, obs. BONNEAU T ; D. 2002. 717, obs. LIENHARD A ; JCP G
2002, pan. 428, note BOUTEILLER P. ; RDBF, n°2, mars-avril 2002. 66, obs. CREDOT F.-J. et GERARD Y. ;
D. 2002. J. 1336, note TCHOTOURIAN ; RJDA 6/02, n°678, p.572 ; RTD com, 2002, 354, obs.
CABRILLAC M.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 299

589. La signature. Une dernière formalité mérite d’être mentionnée : la signature. A titre
d’exemple, il est ainsi prévu que la convention de preuve propre à l’utilisation d’Internet doit
être dûment signée par le client863. Dans la mesure où cette signature est uniquement requise
ad probationem, elle pourra facilement être remplacée par la signature électronique864. Cette
analyse semble certaine depuis la loi du 13 mars 2000 et les modifications législatives
subséquentes.

§2. L’information du client

590. Contenu des formalités. Les intermédiaires financiers sont débiteurs d’une obligation
d’information vis-à-vis du client, imposée par le législateur ou les autorités de régulation du
marché. Cette obligation a essentiellement pour objectif de protéger l’épargnant et lui
permettre ainsi d’investir en connaissance de cause. Les articles 321-70 et suivants du RG
AMF énoncent ainsi les mentions qui doivent obligatoirement figurer dans la convention de
service et d’ouverture de compte entre le prestataire et son client865. Ces formalités doivent
être remplies dans toute opération. Si les ordres sont donnés via l’Internet, l’AMF impose des
obligations supplémentaires, qui tiennent compte des spécificités des contrats à distance. La
convention doit ainsi préciser « que le prestataire assume la responsabilité de la bonne
exécution de l’ordre, après que la confirmation de prise en compte de l’ordre a été adressée
au client et dès l’instant où ce dernier a confirmé son accord »866. De même, il doit être décrit
dans la convention « les équipements alternatifs mis à disposition du client en cas
d’interruption prolongée du service »867. En outre, les modes de preuve propres à la réception
d’ordres via l’Internet doivent aussi être expressément mentionnés868.

591. Contenu de l’obligation. Cette obligation d’information prend aussi la forme de conseils et
de renseignements que les intermédiaires doivent fournir. L’article 321-46 du RG AMF
dispose ainsi que « le prestataire évalue la compétence professionnelle du client s’agissant de
la maîtrise des opérations envisagées et des risques que cette opération peut comporter. Cette
évaluation tient compte de la situation financière du client, de son expérience en matière

863
Art. 321-58 RG AMF.
864
Sur ce point, v. HUET L., op. cit., p. 13, n°20.
865
V. aussi les articles 322-1 et s. du RG AMF sur les prestataires de service d’investissement effectuant une
activité de gestion de portefeuille pour le compte de tiers.
866
Art. 321-64 RG AMF.
867
Art. 321-65 RG AMF.
868
Art. 321-57 RG AMF.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 300

d’investissement et de ses objectifs en ce qui concerne les services demandés. Le prestataire


habilité informe le client des caractéristiques des instruments financiers dont la négociation
est envisagée, des opérations susceptibles d’être traitées et des risques particuliers qu’elles
peuvent comporter ». Adaptant cette exigence à l’Internet, l’AMF précise que cette
information doit être fournie au client sous une forme consultable à l’écran ou par
téléchargement869.

592. Spécificité. L’article 321-59 du RG AMF prévoit, en son alinéa 3, que « le délai de sept jours
[…], séparant la remise aux clients de la documentation concernant les marchés réglementés
d’instruments financiers à terme de la réception de leurs premiers ordres relatifs à ces
instruments, court à partir de la date où lesdits clients ont consulté à l’écran ou téléchargé
les notices. Cette date de consultation est enregistrée par le prestataire habilité ». Au plan
probatoire donc, la signature manuscrite n’est pas nécessaire et l’article du RG AMF
reconnaît au document électronique, même non signé, la même valeur que l’écrit papier870.
L’intermédiaire doit connaître son client et certains estiment que si le niveau de connaissance
est réduit, le service proposé doit être modalisé, voire refusé871. D’autres au contraire
considèrent que les outils informatiques permettent d’aider les investisseurs dans leur
démarche et que le conseil personnalisé traditionnel n’est plus requis dans ce cadre872. En
outre, l’article 321-48 du RG AMF prévoit également que « lorsqu’un client envisage
d’effectuer une opération sur instruments financiers qui ne s’inscrit pas par sa nature, par les
instruments concernés ou par les montants en cause dans le cadre des opérations que le client
traite habituellement, le prestataire habilité s’enquiert des objectifs de l’opération en
cause »873.

869
Art. 321-59, RG AMF.
870
RUET L., La réglementation de l’utilisation d’Internet dans la passation des ordres de bourse,
Communication – Commerce électronique, Mars 2000, p. 12, n°17. Concernant l’engagement du souscripteur ou
du mandant, v. la Recommandation de la COB n°99-02 et spéc. la rec. n°10 selon laquelle « la consultation sur
le site de l’intégralité des documents obligatoires ne saurait se substituer à leur envoi par courrier que si la
société a mis en place les moyens techniques adéquats pour obtenir l’accord explicite du souscripteur et l’a
effectivement recueilli ».
871
BIERNAUX J.-F. et DOMONT-NAERT F., La banque par Internet: pour une meilleure protection des
consommateurs, Revue Banque, 2000, p. 255.
872
V. ROLIN JACQUEMYNS L et VERBIEST T., op. cit., p. 31. Ils estiment en effet que « la technique vient à
la rescousse des consommateurs en leur offrant, selon les cas, des pages pédagogiques sur les termes financiers
utilisés (explication de concepts de sensibilité, d’exposition aux risques ou de volatilité), des rapports détaillés
sur les titres, des logiciels d’analyse et de gestion de portefeuille, des logiciels d’évaluation des titres, parfois
très sophistiqués (analyse technique, optimisation, dynamique chaotique, …), ainsi que des mécanismes
simplifiés d’aide à la décision à travers un questionnaire permettant de définir le profil risque de l’investisseur
internaute ».
873
V. aussi l’art. 321-61 du RG AMF.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 301

593. L’obligation de couverture des ordres de bourse. Certains titres bénéficient du service dit
de règlement différé qui permet d'acheter ou de vendre des titres en différant la livraison et le
paiement des titres contre paiement d'un intérêt. Comme le règlement différé entraîne des
risques (achat à découvert) et afin de prévenir l’insolvabilité de l’investisseur, il a été mis à la
charge du donneur d’ordre une obligation de couverture, lui imposant de mettre à disposition
du prestataire des espèces, titres ou valeurs aux fins de garantir l’exécution finale de l’ordre.
La fourniture d’une couverture est conçue comme un mécanisme de garantie destiné à
protéger le marché et les prestataires d’investissement. Sa finalité est double : limiter la
spéculation et protéger certains clients de la tentation de spéculer. Cette exigence de
couverture implique que le client puisse la reconstituer à tout moment dès qu’il en a été
informé par le prestataire, lui permettant ainsi de respecter les seuils réglementaires requis874..
Faute pour le donneur d’ordre, mis en demeure, d’avoir reconstitué sa couverture dans un
délai d’un jour de bourse, le prestataire pourra procéder à la liquidation de ses positions.
L’Internet n’augmente les risques pour le donneur d’ordre que dans la mesure où il permet un
accès facilité à la passation des ordres via un site sécurisé. En revanche, ce denier ne pourrait
se prévaloir de l’inobservation par l’établissement de crédit d’une information sur cette
obligation875, même si certains auteurs876 ont pu faire remarquer que le défaut d'exigence de la
couverture est, en jurisprudence877, puni au même titre que l'obligation d'information.
Cependant, les prestataires habilités seraient sanctionnables par l’AMF878 pour manquement à
leurs obligations professionnelles en cas d’inertie de leur part879.

874
Articles 517-4 et s. du RG AMF relatifs à la couverture des ordres avec service de règlement et de livraison
différés.
875
Cass., com., 8 juillet 2003, Bull. n°118. D’autres arrêts antérieurs répondaient que l'obligation de couverture
vise à assurer la protection de l'intermédiaire et la sécurité des marchés, et non la protection du donneur d'ordre
qui ne peut en conséquence se plaindre de son inobservation (Com., 2 décembre 1997, Bull. n° 314 ; 24 mars
1998, 15 juin 1999 ; 16 novembre 1999 ; 9 mai 2001 ; 17 décembre 2002).
876
V. NAJJAR I., La couverture du marché à terme, D. 1993, chr. p. 45 et s. ; STORCK M., La responsabilité
encourue pour le défaut d'exigence de couverture sur le marché à terme, D. 1992, chr. p. 71 et s. et RTD com.
2001, p. 175 ; DE VAUPLANE H., La couverture des opérations en bourse : une sûreté hybride, Rev. dr.
bancaire 1998, p. 197.
877
Com., 23 oct. 1990, Bull. n° 243 ; Cf. Com., 9 avril 1996 ; 22 mai 2001. Et confirmation dans un arrêt
approuvant la décision qui avait retenu que l'intermédiaire avait « manqué à son devoir d'information et commis
une faute engageant sa responsabilité en n'exigeant pas la constitution de cette couverture préalablement à
l'ouverture du compte de titre » (Com., 14 janv. 2003, n° 00-12.331 et 99-20.872).
878
Récemment, le Conseil d’Etat a statué pour la première fois sur une sanction prononcée par l’AMF, (CE, 4
février 2005), LPA, 26 avril 2005, n° 82, p. 5 et s.
879
AMF, Comm. Des sanctions, 1ère sect., 22 avril 2004 : GOYET C., RONTCHEVSKY N., STORCK M., Droit
des marchés financiers, RTD com, octobre/décembre 2004, p.786 ; Rev. AMF, juin 2004, p. 85 ; Dr. Sociétés
2004, n°177, note BONNEAU T. ; AMF, Comm. des sanctions, 1ère sect., 6 mai 2004 : Rev. AMF, juillet-août
2004, p. 55 ; Banque et Droit, juillet-août 2004, p. 39, obs. DE VAUPLANE H. et DAIGRE J. J.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 302

594. Le blocage des ordres de bourse. Autre spécificité de l’Internet prévue par le Règlement
général de l’AMF, un blocage de l’ordre de bourse passé par le client doit être opéré par le
prestataire dans deux hypothèses. Ainsi, l’article 321-62 du Règlement précise que lorsque le
prestataire tient lui-même le compte d'espèces et d'instruments financiers de son client, il doit
disposer d'un système automatisé de vérification du compte. En cas d'insuffisance des
provisions et des couvertures, le système doit assurer le blocage de l'entrée de l'ordre. De
même, l’article 321-63 recommande au prestataire de mettre au point un système de
vérification automatique de la cohérence de l'ordre passé avec les conditions du marché,
notamment de la limite de prix dont il est assorti, de telle sorte qu’un mécanisme de blocage
automatique d'entrée des ordres soit mis en œuvre lorsque le système constate une
incohérence. Dans les deux cas le client est avisé, à la lecture de l'écran, des raisons du
blocage et il est appelé à régulariser sa situation. La nouveauté réside donc dans l’apparition
d’un système automatisé entre le prestataire et son client. Alors que l’obligation de couverture
est plutôt conçue pour assurer la sécurité du marché, le blocage des ordres apparaît clairement
comme une mesure de protection de l’investisseur ; de ce point de vue, l’Internet offre un
garde-fou supplémentaire.

595. Bilan. Ces différentes formalités relatives à l’information du client, qui relèvent du
formalisme d’information, devraient pouvoir être remplies, voire sont imposées, par le biais
des réseaux. Dans ce cadre, les autorités de marché ont d’ailleurs prévu des procédures
adaptées aux nouvelles technologies et à l’Internet, par exemple la procédure à suivre pour
vérifier l’identité du client. En tant que moyen de communication, l’Internet ne supprime pas
les obligations d’information et de conseil ; aussi le consommateur investisseur n’en est-il pas
moins bien protégé, s’agissant d’opérations financières en ligne.

Section 3. L’émission des actions en ligne

596. Principe. En tant que valeur mobilière880, les actions sont des titres qui « représentent des
droits de créance collectifs à long terme et qui, émis par une personne morale pour le
financement de son activité, sont négociables et susceptibles d’être cotés en bourse »881 882
.

880
BONNEAU T., La diversification des valeurs mobilières : ses implications en droit des sociétés, RTD com
1988.535.
881
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., p 535 n°748.
882
Aux termes de l’article L.211-2 du Code monétaire et financier, constituent des valeurs mobilières, les titres
émis par des personnes morales, publiques ou privées, transmissibles par inscription en compte ou tradition, qui
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 303

L’émission d’actions en ligne aurait difficilement été envisageable sans la dématérialisation


des valeurs mobilières. Ce principe fut posé par la loi de finances du 30 décembre 1981 (art.
94, II) et mis en œuvre par le décret n°83-359 du 23 mai 1983883. Depuis, les valeurs ne sont
plus représentées que par des inscriptions en compte et leur représentation par des formules
imprimées n’est plus possible884. Concernant la forme, nonobstant cette dématérialisation des
valeurs mobilières, la distinction de l’article L 228-1 du Code de commerce entre titres
nominatifs et titres au porteur demeure. En pratique néanmoins, cette différence n’a que peu
de portée dans la mesure où chaque fois, la négociation aboutit à un virement885 (informatisé)
de compte à compte886.

597. Rôle des autorités. Pour le reste, l’offre au public de valeurs mobilières est régie par les
articles 214-1 et s. du RG AMF. Ces dispositions sont applicables aux opérations qui utilisent
le réseau Internet. L’AMF considère en effet que les sociétés qui lèvent des capitaux dans ce
cadre entrent dans le champ d’application de l’appel public à l’épargne887. L’article L.411-1
du Code monétaire et financier prévoit que l’appel public à l’épargne est constitué par
l’admission d’un instrument financier mentionné à l’article L.211-1 du code précité aux
négociations sur le marché réglementé ou par l’émission ou la cession d’instrument financier
dans le public en ayant recours soit à la publicité, soit au démarchage, soit à des
établissements de crédit ou à des prestataires de services d’investissement. Cette définition est
similaire à celle énoncée par « la directive prospectus »888 transposée en droit interne
consécutivement par la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 et la modification du règlement

confèrent des droits identiques par catégorie et donnent accès, directement ou indirectement, à une quotité du
capital de la personne morale émettrice ou à un droit de créance général sur son patrimoine. Sont également des
valeurs mobilières les parts de fonds communs de placement et de fonds communs de créance.
883
Sur cet aspect, v. notamment GUYON, La dématérialisation des valeurs mobilières, Rev. sociétés, 1984, p.
451 et s.
884
LUCAS A., DEVEZE J. et FRAYSSINET J., op. cit., pp. 640-641, n°924.
885
Concernant le virement, il faut préciser qu’il n’est soumis à aucune condition de forme : il peut ainsi être
réalisé par écrit, par téléphone, par minitel ou via internet (Civ., 1er juin 1997, Bull. civ., I, n°218 ; Com., 26
janvier 1999, RDBF, 1999, p. 97 ; Versailles, 16 décembre 1994, RJDA, 1995/4, n°458 ; Paris, 6 mars 1998,
Banque et droit, 1998, p. 46).
886
Ibid.
887
DOUMAYROU B., Quelle régulation pour quels marchés ?, Quelle place pour les nouveaux espaces
financiers ? : entretiens de la COB, 1996, 4e table ronde ; DE VAUPLANE H. et BORNET J.-P., op. cit., p. 149,
n°131.
888
La directive 2003/71/CE du 4 novembre 2003 concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de
valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation, définit à l’article 2, §1d
l’appel public à l’épargne comme : une communication adressée sous quelque forme et par quelque moyen que
ce soit à des personnes et présentant une information suffisante sur les conditions de l'offre et sur les titres à
offrir, de manière à mettre un investisseur en mesure de décider d'acheter ou de souscrire ces valeurs mobilières:
cette définition s'applique également au placement de valeurs mobilières par des intermédiaires financiers;
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 304

général de l’AMF889. Que l’on ait recours à la publicité ou au démarchage à travers un site
Internet890, les règles et les formalités existantes doivent être respectées891. Par ailleurs, en cas
d’offre au public d’instruments financiers, un prospectus simplifié doit être établi et soumis au
visa préalable de l’AMF892. Ce prospectus pourrait être mis à la disposition du public à travers
le site Internet de l’émetteur893. Les informations disponibles sur le site doivent évidemment
être identiques à celles présentées sur support papier. En conséquence, l’utilisation de
l’Internet ne diminue pas les obligations. Notons encore que ce formalisme n’est pas
systématique, notamment lorsque l’offre est destinée à des personnes dans le cadre de leurs
activités professionnelles, que le montant global de l’offre est inférieur à 40 000 euros, que
l’offre porte sur des titres de capital qui sont attribués gratuitement lors du paiement d’un
dividende ou à l’occasion d’une incorporation de réserves, que les instruments financiers
offerts proviennent de l’exercice d’un droit issu d’instruments financiers dont l’émission a
donné lieu à l’établissement d’un prospectus894.

598. Langue utilisée dans le prospectus : problématique et implications. La problématique de la


langue utilisée dans les prospectus est issue d’un arrêt du Conseil d’Etat en date du 20
décembre 2000 qui s’est prononcé en faveur de l’application de la loi Toubon895 aux
prospectus896 relatifs à l’offre au public ou à l’admission sur un marché réglementé français
d’instruments financiers897. En effet, le Conseil d’Etat au visa de l’article 2 de la loi, a déduit

889
Arrêté du ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie du 1er septembre 2005, publié au JO du 8
septembre 2005.
890
DE VAUPLANE H. et BORNET J.-P., op. cit., p. 384, n°379. Il a ainsi été considéré que le fait de proposer
au public l’acquisition d’actions au moyen d’un site Internet est caractéristique d’une émission ayant recours à la
publicité (Bull. CNCC, n°115, sept. 1999, p. 511).
891
V. AFEI, La fourniture de services et produits financiers à l’épreuve d’Internet. Quel environnement juridique
pour les prestataires de services d’investissement ?, op. cit., p. 85 et s.
892
V. l’art. L.412-1 du Code monétaire et financier.
893
En ce sens, DIEUX X. et WILLERMAIN D., Questions de droit financier en relation avec l’offre de produits
et de services financiers sur le réseau internet, BYTTEBIER K., FELTKAMP R. et JANSSENS E. (sous la dir.
de), Internet et le droit, Anvers, Maklu, 2001, pp. 576-577, n°22.
894
Article 214-4 du RG AMF.
895
Loi n°94-665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française, dite « loi Toubon ». Le Sénat dans sa
séance du 10 novembre 2005 (session ordinaire 2005-2006) a adopté une proposition de loi complétant le texte
précité et ce pour l’adapter au contexte numérique. Pour plus de détails nous renvoyons sur :
http://www.senat.fr/dossierleg/ppl04-059.html
896
« Considérant, en revanche, qu'aucune disposition de droit communautaire ne permet d'écarter l'application
de la loi du 4 août 1994 à l'égard des autres articles contestés des règlements homologués par l'arrêté attaqué ;
que les articles 19, 25, 26, 36 et 37 du règlement n° 98-01 et l'article 5 du règlement n° 98-08, en tant qu'ils
offrent aux émetteurs la possibilité de présenter un prospectus dans une langue usuelle en matière financière
accompagné d'un simple résumé en français, sont contraires aux articles 2 et 4 de la loi du 4 août 1994 ».
897
DU VIGNAUX H., DUHAMEL A., SEBIRE M.E., L’application de la loi Toubon aux prospectus visés par
la COB : les conséquences pratiques, Banque et droit, janvier-février 2001 n°75, p.22 ; DU VIGNAUX H. et
SEBIRE M.-E., Cotation des titres de créance : le grand retour de l’anglais à Paris, Banque et Droit, juillet-août
2002, p.21.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 305

que ces prospectus constituent une offre et une présentation de produits. En conséquence, ils
doivent être rédigés en français ; à tout le moins, si le document est écrit en langue étrangère,
une traduction « aussi lisible, audible ou intelligible » en français doit l’accompagner ;
néanmoins, en tout état de cause, la version française ne saurait être moins complète que la
version étrangère, ce qui invalide la pratique du simple résumé en français898. L’AMF
n’apposera son visa sur des prospectus provenant d’émetteurs tant étrangers que français que
dans la mesure où ceux-ci sont intégralement rédigés en français899. On ne peut qu’approuver
cette décision eu égard à la protection des investisseurs français, dans la mesure où seule la
version française fera foi au yeux des institutions françaises. Cependant, à la limite du
protectionnisme, elle remet en cause les usages traditionnels de la langue usuelle en matière
financière (l’anglais dans les émissions internationales d’obligations, de warrants et de
certificats cotés à Paris900) et instaure une certaine insécurité juridique liée à l’établissement,
probablement systématique, de deux versions du même prospectus (l’une en langue française,
l’autre en langue étrangère). Avec l’Internet, les mêmes obligations nationales s’imposent. Ce
problème se trouvera même compliqué du fait que l’investisseur, par le biais du Web, pourra
quand même avoir accès à un prospectus non visé par l’AMF (non rédigé en français),
puisque les institutions françaises ne maîtrisent pas le réseau de diffusion de l’information sur
l’Internet.

599. L’évolution. Cette position a changé suite à l’adoption de la « directive prospectus901 » qui
prévoit à l’article 5 la rédaction d’un résumé dans la langue initiale du prospectus et qui
insiste au considérant 35 sur le fait que les Etats membres ne devraient plus pouvoir imposer
la présentation du résumé dans sa langue officielle (d’origine) pour autant que le prospectus
ait été rédigé dans une langue « usuelle » dans la « sphère financière internationale » : ce sera
systématiquement le cas si le prospectus est rédigé initialement en anglais. Aussi la directive
met en place « un mécanisme de passeport européen pour le prospectus qui une fois
approuvée par l’Etat membre d’origine permet de procéder à une offre au public ou une
admission à la négociation dans un ou plusieurs autres Etats membres d’accueil, sur simple

898
L'arrêté du 22 janvier 1999 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est annulé en tant qu'il a
homologué le règlement autorisant que le prospectus qu'il prévoit puisse ne faire l'objet que d'un « résumé » en
français.
899
Communiqué de presse de la COB du 26 décembre 2000.
900
DU VIGNAUX H., DUHAMEL A., SEBIRE M.E., L’application de la loi Toubon aux prospectus visés par
la COB : les conséquences pratiques, ibid.
901
Directive 2003/71/CE du Parlement et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant les prospectus à publier en
cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation, et
modifiant la directive 2001/34/CE.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 306

demande et sans qu’une approbation complémentaire soit nécessaire. La seule formalité


consiste en la notification à l’Etat membre d’accueil d’un certificat d’approbation délivré par
l’autorité compétente de l’Etat membre d’origine, accompagné du prospectus, le cas échéant,
d’un résumé dans la langue du pays d’accueil. Ce nouveau mécanisme de passeport européen
très simple a été transposé en l’état dans le règlement général de l’AMF et substitué au
mécanisme de reconnaissance mutuelle902 ».

600. La spécificité de l’appel public à l’épargne. La loi MURCEF903 dans un premier temps, puis
la loi du 26 juillet 2005 sur la confiance et la modernisation de l’économie904 sont venues
apporter un tempérament à la solution dégagée par le Conseil d’Etat. En effet le nouvel article
L. 412-1 I du Code monétaire et financier précise désormais que si les personnes qui
procèdent à une opération par appel public à l'épargne doivent, au préalable, publier et tenir à
la disposition de toute personne intéressée un document destiné à l'information du public, ce
document est rédigé en français ou, dans les cas définis par le Règlement AMF, dans une
autre langue usuelle en matière financière. Par ailleurs, le document doit comprendre un
résumé et doit être accompagné, le cas échéant, d'une traduction du résumé en français. Ainsi
le résumé n’est donc plus nécessairement rédigé en français. En matière d’appel public à
l’épargne, il semble donc que l’on revienne à la solution antérieure, ce qui est
particulièrement souhaitable dans le cadre d’émissions d’actions en ligne. Le Conseil
Constitutionnel a toutefois émis une certaine réserve sur le contenu du résumé auquel le Code
monétaire et financier fait référence : lorsque le document d'information visé par l’AMF n'est
pas rédigé en français, le résumé en français qui l'accompagne doit comporter les données
essentielles relatives à l'opération et à la société concernées905. Par ailleurs, l’article L. 412-1 I
alinéa 2 ajoute qu’aucune action en responsabilité civile ne peut être intentée sur le fondement
du seul résumé ou de sa traduction, sauf si le contenu du résumé ou de sa traduction est
trompeur, inexact ou contradictoire par rapport aux informations contenues dans les autres
parties du document906.

902
SEBIRE M.-E., DU VIGNAUX H., et SEBASTIEN J., Transposition de la directive Prospectus en droit
français, Banque et Droit, septembre-octobre 2005, n° 103, p. 29.
903
Loi nº 2001-1168 du 11 décembre 2001 art. 27 I 2.
904
Loi n°2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie, art. 26.
905
Décision n° 2001-452 DC - 6 décembre 2001 - Communiqué de presse - Loi portant mesures urgentes de
réformes à caractère économique et financier, JO 12 décembre 2001, p. 19712.
906
Sur cette limitation, voire exclusion de responsabilité, v. BONNEAU T., Appel public à l’épargne. Champ
d’application et prospectus, Droit des sociétés, août -septembre 2005, p. 27.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 307

601. Procédure de dépôt du prospectus. Le projet de prospectus907 doit être déposé quinze jours
de bourse au moins avant la date envisagée pour l’obtention du visa. Ce dépôt doit être
accompagné de la remise à l’AMF d’une documentation ; il s’en suit diverses notifications
d’avis. L’initiateur de l’offre doit également préciser, lors du dépôt du projet de prospectus
simplifié, si les titres donnant ou pouvant donner accès, directement ou indirectement, au
capital sont admis aux négociations sur un marché réglementé dont le siège est fixé dans un
État membre de la Communauté européenne, ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace
économique européen, ou à la cote officielle de bourses étrangères, et si une demande
d’admission ou si une émission est en cours, ou projetée, sur d’autres places. Cette procédure
peut facilement être dématérialisée par une procédure de dépôt électronique du projet de
prospectus.

602. Le contenu du prospectus. En outre, le prospectus simplifié comporte l’indication du nom et


de la fonction de la ou des personnes qui l’ont établi et des attestations sur l’honneur de non
omission. De plus, il mentionne la signature des contrôleurs légaux précédée d’une attestation
précisant que les vérifications ont été effectuées en application des normes professionnelles
de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes. Et, d’une manière plus générale, le
prospectus contient les renseignements nécessaires aux investisseurs pour fonder leur
jugement sur le patrimoine, la situation financière, les résultats et les perspectives de
l’émetteur des instruments financiers908. Il est à noter que l’AMF prévoit une forme
d’équivalent des informations (auquel cas le contenu même du prospectus peut être adapté)
« lorsque certaines rubriques se révèlent inadaptées à l’activité ou à la forme juridique de
l’émetteur des instruments financiers, objet de l’offre ». On le voit, toutes les informations
nécessaires peuvent être fournies dans un prospectus dématérialisé.

603. Publicité. Le prospectus doit être publié dans au moins un quotidien d'informations
économiques et financières, de diffusion nationale. Il doit être aussi mis à disposition
gratuitement au siège de l'émetteur et auprès des organismes chargés d'assurer le service
financier de ses titres. De plus, dans tous les cas, une copie du prospectus simplifié complet
doit être adressée sans frais à chaque intéressé et la version électronique du prospectus
simplifié doit être envoyée à l’AMF aux fins de mise en ligne sur son site Internet. Par
ailleurs, « la directive prospectus » entend favoriser l’usage d’Internet comme moyen de

907
Rédigé en français.
908
Article 212-7 du RG AMF
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 308

diffusion des divers documents composant le prospectus. Le considérant 31 est très clair à ce
sujet et suggère que la fourniture du prospectus soit systématiquement à titre gratuit pour les
investisseurs qui en font la demande. Plus de difficultés intervenaient ici sur cette obligation
de publicité, dans la mesure où elle fait appel à des tiers. Si le règlement prévoit la mise en
ligne sur le site de l’AMF, il n’était pas évident que la diffusion du prospectus uniquement sur
le site Internet d’un journal d’information économique puisse satisfaire l’exigence légale.
L’essentiel étant que chacun puisse se procurer le journal en question, l’on se heurtait alors à
un problème d’accès à l’Internet. Ainsi « la directive prospectus » est intervenue pour réputer
la publication faite à partir du moment où il est publié sur le site Web de l’émetteur ou du
marché financier, ou encore celui de l’AMF (pour la France)909. C’est là une adaptation
remarquable du droit financier aux nouvelles technologies, preuve encore une fois de la
réactivité du secteur.

604. Autres formalités. Diverses dispositions du Code de commerce énoncent encore des règles
de publicité impératives qui visent à garantir la qualité du consentement des souscripteurs. En
cas d’émission d’obligations avec appel public à l’épargne, l’article L.228-43 du Code de
commerce prévoit qu’une notice doit être publiée au BALO910. En cas de non-respect, aucune
souscription n’est admise. Ces formalités sont manifestement requises ad validitatem. Ainsi la
dématérialisation totale est subordonnée à la dématérialisation des bulletins d’annonces
légales.

Section 4. Le conseil et l’information bancaire

605. Autres services. L’établissement de crédit peut également fournir d’autres services à ses
clients. Ces derniers concerneront les conseils, l’assistance et la fourniture de renseignements
commerciaux911. A propos des divers conseils (gestion de trésorerie, ingénierie financière), on
voit mal comment ils ne pourraient pas être fournis via l’Internet dans la mesure où les
systèmes, d’analyse financière par exemple, sont largement informatisés. Donc, sous la
réserve traditionnelle de l’identification – encore qu’un tel conseil ne s’adresse qu’à des

909
Article 14 2 c) d) e) de la directive.
910
Bulletin des Annonces Légales et Obligatoires. Il assure la publication des avis à caractère obligatoire des
sociétés faisant publiquement appel à l'épargne, mais également les annonces liées à des opérations financières,
les publications périodiques de documents comptables les convocations aux assemblées et des avis divers. (Trois
à six parutions par semaine). V. aussi les art. L. 225-2 (constitution de société) et L. 225-142 (augmentation de
capital) du Code de commerce.
911
BONNEAU T., op. cit., n°776 et s, 559 et s.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 309

clients existants –, la dématérialisation du service ne pose pas de problème particulier et n’est


pas entourée d’un formalisme spécial.

606. La fourniture d’informations financières. L’Internet est par nature un formidable véhicule
de l’information. La matière bancaire et financière n’échappe pas à ce constat ; les
établissements de crédit peuvent profiter pleinement de leurs sites pour fournir un ensemble
d’informations et de transactions à destination de leurs clients912. Le consommateur
investisseur trouve également son compte dans la multiplicité et la diversité des offres
présentes913. Ceci étant, l’information revêt une importance particulière dans le secteur
financier parce qu’elle conditionne les investissements et les placements, voire la santé d’un
marché. Les risques de désinformation et de mauvaise information sont alors bien présents914.
La dématérialisation du contrat de fourniture de renseignements commerciaux (non couverts
par le secret professionnel)915 ne semble pas non plus opposer de résistance. En revanche,
s’agissant d’un acte susceptible d’engager sa responsabilité quant à l’exactitude de
l’information, il est probable que l’établissement de crédit exigera une signature électronique
sécurisée afin d’assurer l’efficacité de sa clause d’exonération de responsabilité.

607. Déprofessionnalisation de l’information financière : les forums de discussion. Cours de


bourse, rapports d’analystes, tableaux comparatifs de SICAV ou d’autres instruments
d’investissement, l’information qui était réservée au professionnel trouve aujourd’hui son
accès ouvert au plus grand nombre916. Plus particulièrement, c’est par le biais des forums de
discussion que l’information financière circule917. Vecteur d’information, ils tendent à devenir
source de désinformation pouvant déstabiliser des sociétés cotées ; de même, le risque de
délits boursiers, notamment de diffusion d’information privilégiées, est bien présent918. Pour
autant, cette information ne fait pas l’objet d’un formalisme particulier, ni même d’une
réglementation très originale919 ; celle-ci, on s’en doute, doit tout de même être « exacte,

912
Le célèbre site d’informations boursières Boursorama a récemment annoncé le lancement de Boursarama
Banque en mettant à disposition de ses clients un compte courant et des cartes de paiement, MAZIER H.,
Boursorama s’ouvre à la banque en ligne, 6 décembre 2005, disponible sur : www.latribune.fr .
913
Pour ces avantages, v. BONNEAU T. et DRUMMOND F., op. cit., p. 791 n°1051.
914
BONNEAU T. et DRUMMOND F., op. cit., p. 791 n°1052.
915
BONNEAU T., op., cit, n°787, p 567.
916
ROLIN-JACQUEMYNS L., Les relations financières à distance, art. préc. p. 111.
917
LE PAS DE SECHEVAL, l’utilisation des forums financiers sur Internet, Revue de droit bancaire et
financier, novembre/décembre 2000, n°6, p. 389.
918
LE PAS DE SECHEVAL, l’utilisation des forums financiers sur Internet, ibid.
919
BONNEAU T. et DRUMMOND F., Droit des marchés financiers, op. cit., p. 803 n°1076.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 310

précise et sincère »920. En tout état de cause, elle reste soumise aux règles traditionnelles
concernant la diffusion de l’information (fausse information, information privilégiée, injure,
diffamation). Les délits peuvent être constitués sur l’Internet de la même manière que sur un
support audiovisuel921. Une recommandation922 relative à la diffusion d’informations
financières sur les forums de discussion et les sites dédiés à l’information ou au conseil
financier a aussi été émise par l’autorité du marché. Tout en affirmant que l'activité de conseil
en matière financière et boursière est libre, elle rappelle que toute personne exerçant cette
tâche au moyen d'un site Internet est tenue de respecter la réglementation relative à la
diffusion des informations financières, notamment celle portant sur l'exactitude de
l'information, la diffusion ou l'utilisation d'informations privilégiées, et celle relative au
démarchage de produits financiers. En outre, la diffusion d'informations susceptibles d'avoir
une influence significative sur un cours de bourse doit être exhaustive, intégrale et donner lieu
à une diffusion simultanée sur les supports classiques de communication (obligation générale
d'information du public et risque d'atteinte à l'égalité de traitement des investisseurs).

608. Bilan. « L’internétisation » de l’information financière se fait naturellement dans le cadre de


sites d’établissements de crédits ou institutionnels ; par contre, elle prend un aspect plus
préoccupant dans le cas de forums, et l’Internet risque de fausser les règles en créant un
déséquilibre par rapport aux autres supports de l’information financières. La profusion de
cette information met en cause la sécurité du consommateur investisseur profane.

920
Article 222-1 et s. du RG AMF relatifs à l’obligation d’information du public.
921
LE PAS DE SECHEVAL, l’utilisation des forums financiers sur Internet, ibid.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 311

CONCLUSION

609. Le formalisme dans les opérations bancaires et financières. A l’analyse, hormis le secteur
du crédit (mais le crédit mobilier au consommateur peut être totalement dématérialisé), on
doit nécessairement conclure au faible degré de formalisme des contrats bancaires. Si le
secteur bancaire et financier se trouve à la frontière de différents formalismes – ad validitatem
(taux pour le crédit) ou ad probationem – et si ce formalisme obéit généralement à plusieurs
objectifs d’information (convention de compte) et de protection du cocontractant (qui bien
souvent est une partie faible comparativement à l’établissement de crédit), il ne faut pas
confondre nature du contrat – consensuel – et exigences formalistes, l’une d’elles pouvant se
greffer sur le contrat sans remettre en cause sa nature. De même, si dans l’esprit des
rédacteurs du Code civil, un contrat écrit était nécessairement papier (ou, à tous le moins sur
un support tangible), la notion d’écrit s’est progressivement émancipée de son support, de
telle sorte que l’écrit peut tout à fait « s’inscrire » sur un support dématérialisé.

610. Les services annexes. Mis à part le crédit immobilier (nous l’avons vu) et la location de
coffre-fort qui implique une présence physique, la fourniture de renseignements
commerciaux923, voire le conseil et l’assistance, peuvent également trouver une application
sur l’Internet. Plus encore, la rapidité qu’il permet est un gage de réactivité pour le client. In
fine, c’est l’ensemble des opérations bancaires – entendues lato sensu – qui est susceptible
d’être dématérialisé sans pour autant que, globalement, le régime de protection des
consommateurs mis en place par le Code de la consommation soit remis en cause, loin de là.
Par exemple, les mêmes obligations concernant le devoir de conseil de l’établissement de
crédit se retrouveront pour les opérations de crédit dématérialisées (renseignement et refus)924.

611. Les craintes. Développement du commerce bancaire et financier sur l’Internet et protection
corrélative des consommateurs investisseurs sont deux objectifs primordiaux ; pourtant le
formalisme, qui sert traditionnellement de frein au consensualisme dans un but protecteur,
s’est ancré dans une culture papier, voire manuscrite. Aussi, des craintes apparaissent-elles
quant à l’adaptabilité de ces règles pour garantir un niveau de protection équivalent ; encore
une fois c’est la nouveauté de l’outil Internet et le relatif anonymat qui sont en cause ; pour

922
Recommandation 2000-02 de la COB relative à la diffusion d'informations financières sur les forums de
discussion et les sites Internet dédiés à l'information ou au conseil financier toujours en vigueur.
923
Sur ce point cf. BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit. p. 567 n°787 et s.
924
LEGEAIS D., art. préc., pp.261-264.
2ème Partie : Titre 1 : Chapitre 2 – De quelques exemples de contraintes spécifiques 312

autant, rapidité des transactions (indispensable à la bourse par exemple) ne veut pas dire
rapidité ou précipitation dans la conclusion du contrat.

612. Conciliation possible. Les récentes évolutions législatives apportent des solutions efficaces
en terme d’équivalents et les dernières réticences ne peuvent que tomber. Principalement, le
formalisme de protection (informatif) trouve facilement à s’appliquer en ce qui concerne les
mentions obligatoires, voire manuscrites. Il n’en reste pas moins que la signature électronique
devrait jouer un rôle considérable dans l’identification – primordiale – des parties et parfaire
une complète dématérialisation des relations contractuelles ; en effet, certaines banques en
ligne, par exemple, exigent à l’heure actuelle l’envoi de photocopies des documents
obligatoires (pièce d’identité) par voie postale. La signature électronique avancée devra
probablement son salut au développement de contrats suffisamment importants pour justifier
son coût.

613. Un niveau de protection élevé. Le dispositif mis en place vise ici à adapter la législation
traditionnelle à la réalité de l’Internet, tout en garantissant la sécurité des cocontractants dans
la conclusion de la convention bancaire ou financière. Ceci étant, le souci communautaire
d’une harmonisation de la protection du consommateur dans le secteur bancaire et financier a
conduit à l’adoption d’une législation particulière qui précise un contenu minimum des droits
des consommateurs. C’est principalement l’objet de la directive 2002/65/CE du 23 septembre
2002 concernant la commercialisation à distance des services financiers auprès des
consommateurs. En effet, comme le souligne le troisième considérant : « un niveau de
protection élevé des consommateurs est nécessaire pour accroître leur confiance dans la
vente à distance »… des services financiers.
TITRE 2

LA REGLEMENTATION DES SERVICES


BANCAIRES ET FINANCIERS A
DISTANCE

614. Un canal de vente. Oserait-on encore en douter ? L’Internet est avant tout un canal de
communication comme les autres ; par définition, il permet la formation de contrats entre non
présents soit directement en ligne, sur le site d’un professionnel, soit par échange de courriels.
Plus généralement, il contribue avec le téléphone, le minitel ou bien le fax à étoffer l’arsenal
des techniques de vente à distance qui avait débuté par le simple envoi par courrier d’un bon
de commande.

615. Une réglementation générale. Dans le cadre d’une relation commerciale de professionnel à
consommateur925 réalisée via l’Internet, la protection du consommateur est-elle assurée par
des dispositions législatives particulières ? La réponse négative est évidente. D’une part,
l’obligation générale d’information précontractuelle prévue par le Code de la consommation
est rédigée de manière suffisamment englobante pour prendre en compte toute vente de biens
ou de services quel que soit son mode opératoire926. D’autre part, la législation spéciale
relative à la vente à distance927, elle-même, ne distingue pas l’Internet des autres techniques.
En effet, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 23 août 2001928, l’article L.121-16 du
Code de la consommation étend son champ d’application à « toute vente d'un bien ou toute
fourniture d'une prestation de service conclue, sans la présence physique simultanée des
parties, entre un consommateur et un professionnel qui, pour la conclusion de ce contrat,
utilisent exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance ». Certes, la
prise en compte de la réalité de l’Internet n’est pas absente de ce texte, loin de là, dans la

925
B2C (business to consumer).
926
Article L.111-1 du Code de la consommation. Tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services
doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques
essentielles du bien ou du service.
927
Articles L.121-16 et suivant du Code de la consommation.
928
Ordonnance nº 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires et adaptation au
droit communautaire en matière de droit de la consommation.
2ème Partie : Titre 2 – La réglementation des services bancaires et financiers à distance 314

mesure où l’ordonnance de 2001 réalise, entre autres, la transposition de la directive relative à


la protection des consommateurs en matière de contrat à distance929. Cette dernière, elle-
même, fait directement référence à l’usage des nouvelles technologies et de l’ordinateur,
c’est-à-dire – en filigrane – l’Internet, et à la nécessité de prendre en considération ces
facteurs930. Notons, pour finir, que le Rapport au Président de la République relatif à
l'ordonnance de 2001 vise également ces nouvelles technologies931. Ceci étant, il ne s’agit
nullement d’une législation propre à l’Internet. Force est de constater que de telles
dispositions spéciales n’ont pas été jugées nécessaires.

616. Une évolution nécessaire ? Est-ce à dire que la législation française avait besoin d’une telle
prise de conscience, au-delà du souci d’harmonisation européenne ? En effet plusieurs
arguments peuvent jeter un doute sur son utilité. En premier lieu, la définition du
consommateur, du fournisseur et de l'opérateur de technique de communication n'est pas
reprise, ces concepts étant intégrés dans le droit positif. En deuxième lieu, l'article L. 121-18
ne reprend pas les obligations générales d'information déjà prévues, par ailleurs, par le Code
de la consommation932. En troisième lieu, un délai de retour de sept jours francs pour les
produits existait déjà dans notre droit933. En quatrième et dernier lieu, la fourniture de biens ou
de services à un consommateur sans commande préalable, prohibée par la directive, était aussi
déjà sanctionnée en droit français934. N’aurait-il pas suffi d’affirmer que l’Internet était un
canal de vente à distance ? Le domaine d'application du droit de rétractation est, certes, plus
large, puisqu'il vise non seulement les biens mais aussi les services ; l’article L.121-18 détaille
davantage le contenu de l’offre faite au consommateur935, cependant aucune mention

929
Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des
consommateurs en matière de contrats à distance.
930
A titre d’exemple, nous pouvons relever le considérant 4 de la directive : « considérant que l'introduction de
nouvelles technologies entraîne une multiplication des moyens mis à la disposition des consommateurs pour
connaître les offres faites partout dans la Communauté et pour passer leurs commandes ». Les « technologies
électroniques » sont également directement citées dans le considérant 13. Mieux encore, l’article 2-4 de la
directive, définissant les techniques de communication à distance, renvoie à une liste indicative (annexe I) qui
vise expressément le courrier électronique ; l’ordinateur est également listé.
931
« Le cadre juridique issu du droit harmonisé renforce la protection des consommateurs qui effectuent des
achats de biens ou services à distance, notamment en utilisant les nouvelles technologies de la communication »,
« une transaction sur Internet relève du régime de la vente à distance » JO n° 196 du 25 août 2001, p. 13642,
chapitre II.
932
Par exemple, l'information sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service et l'information sur le
prix, qui s'appliquent à la vente à distance comme à toute vente.
933
Article 1 de la loi du 6 janvier 1988 devenu l’article L121-16 du Code de la consommation.
934
Le Code de la consommation comporte, dans ses articles L. 122-2 à L. 122-5, des dispositions interdisant la
pratique de la vente sans commande préalable et l'article L. 122-2 reproduit les dispositions de l'article R. 635-2
du code pénal, qui sanctionne cette pratique de l'amende prévue pour les contraventions de 5ème classe.
935
Frais de livraison, modalités de paiement, durée de validité de l’offre, coût de l’utilisation de la technique.
2ème Partie : Titre 2 – La réglementation des services bancaires et financiers à distance 315

n’apparaît propre à l’Internet. Quant à la vente forcée ou à l’obligation d’information, elles ne


révèlent aucune allusion particulière au réseau, si ce n’est l’obligation de fournir ces
informations sur un support « durable » (article L.122-19 alinéa 1 du Code de la
consommation) ce qui implique encore que l’on puisse se situer dans un univers
dématérialisé. On ne peut donc pas affirmer qu’existait, avant l’adoption de la directive, un
vide juridique concernant le commerce électronique à destination des consommateurs.

617. Les services financiers à distance. En revanche, l’ordonnance de 2001 reprend fidèlement
les exemptions prévues par l’article 3 de la directive 97/7 CE. Ainsi, l’article L.121-17 1° du
Code de la consommation précise que les contrats portant sur les services financiers ne sont
pas soumis aux dispositions de la section relative à la vente à distance. En effet, en raison de
leur nature particulière et des enjeux qu’ils impliquent, les services financiers ont toujours fait
l’objet de législations spéciales et innovantes ; par exemple, le droit de rétractation a été
introduit par la loi du 3 janvier 1972 sur le démarchage financier936. Cette technique a ensuite
reçu de nombreuses applications937.

618. Un texte spécifique. Au terme d’une longue négociation, la directive 2002/65/CE du 23


septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des
consommateurs fut adoptée938. Dès la présentation de son plan d’action939, la Commission a
affirmé la nécessité d’un nouveau cadre pour les services financiers, vu les divergences entre
les réglementations nationales et les risques conséquents de fragmentation du marché. La
protection du consommateur investisseur est, à ce stade, une priorité pour le législateur
européen, celle-ci devant soutenir la confiance dans le commerce électronique. Aujourd’hui,
ce texte a été transposé en droit interne par l’ordonnance n° 2005 - 648 du 6 juin 2005940.
Comme le soulignent très justement les Professeurs L. GRYNBAUM et F. LEPLAT l’on
pourrait dire à cette occasion que les modifications apportées au Code de la consommation le
rendent « un code pilote pour les contrats à distance conclus par les consommateurs ; le Code

936
L’article 21 de la loi 72/6 du 3/01/1972 prévoyait un délai de rétractation de 15 jours dans ses dispositions
relatives aux plans d’épargne et aux OPCVM.
937
TERRE F., SIMLER P. et LEQUETTE Y., Droit civil Les obligations, Paris, Dalloz, 2002, 8ème éd., p. 213, n°
255.
938
PRUM A., La future directive sur les services financiers à distance, Revue de Droit Bancaire et Financier, n°3
mai/juin 2002, p.111.
939
COM (1999) 232 du 11/05/1999.
940
Par insertion directe dans le Code de la consommation aux articles L. 121-20-9 et suivants.
2ème Partie : Titre 2 – La réglementation des services bancaires et financiers à distance 316

des assurances et le Code monétaire et financier, notamment, sont institués codes suiveurs
pour la matière des services financiers »941.

619. La cohérence du corpus législatif : problématique. Si l’on s’en tient à la communication


relative au commerce électronique et services financiers de 2001942, les différentes
législations, tant horizontales que verticales, forment un ensemble interagissant. La directive
sur le commerce électronique en « jette les fondations », s’appliquant à tous les services
fournis à distance par des moyens électroniques. La directive concernant la commercialisation
à distance de services financiers auprès des consommateurs intervient, quant à elle, « pour
assurer cette cohérence ». Il en résulte qu’il ne faut pas considérer ces textes comme
concurrents mais comme simplement complémentaires, la directive sur le commerce
électronique venant s’ajouter à la législation sectorielle. Par conséquent, les obligations
contenues dans chaque réglementation s’additionnent. On risque donc, s’agissant d’un
problème juridique donné relatif à un même produit ou service financier, de multiplier les
règles applicables et d’en complexifier la résolution, ce qui parait clairement contraire à la
volonté tant nationale que communautaire de faciliter et simplifier la compréhension des
réglementations applicables aux services financiers proposés en ligne. De même, si plusieurs
textes sont applicables en cas de relation dématérialisée, un risque d’inégalité de traitement
apparaît alors entre les différents utilisateurs du service (investisseur ou simple
consommateur) ; réciproquement, en admettant l’application supplémentaire d’un texte aux
transactions bancaires et financières en ligne, l’harmonisation d’un droit de la vente à distance
des produits et services financiers s’en trouve compliquée.

620. Plan. De ce point de vue, la question de l’articulation de la directive sur les services
financiers à distance avec la directive sur le commerce électronique paraît cruciale dans la
mesure où cette dernière est également susceptible de s’appliquer (chapitre 2). Mais, plus
concrètement, le contenu même de ces réglementations destinées à harmoniser la protection
du consommateur investisseur retiendra d’abord notre attention (chapitre 1).

941
GRYNBAUM L. et LEPLAT F., Ordonnance « services financiers à distance ». De la relativité du Code de la
consommation comme code…pilote, JCP G, 14 décembre 2005, n°50, p. 2299.
942
Communication de la Commission au Conseil et au Parlement relative au commerce électronique et services
financiers de la Commission au Conseil et au Parlement du 7 février 2001.
CHAPITRE 1er

LA PROTECTION DU CONSOMMATEUR CONFRONTE A L’OFFRE


DES SERVICES BANCAIRES ET FINANCIERS EN LIGNE

621. Objectifs. La directive sur les services financiers à distance vise à assurer aux consommateurs
un niveau élevé de protection, afin d’accroître leur confiance dans la vente à distance des
services financiers. En effet, « des dispositions divergentes ou différentes de protection des
consommateurs prises par les États membres en matière de commercialisation à distance des
services financiers auprès des consommateurs pourraient avoir une incidence négative sur le
fonctionnement du marché intérieur et sur la concurrence entre les entreprises dans celui-ci.
Il est, par conséquent, nécessaire d'introduire des règles communes au niveau communautaire
dans ce domaine sans porter atteinte à la protection générale des consommateurs dans les
États membres »943.

622. Une protection classique. Les techniques de protection du consommateur - investisseur


mises en avant par les directives de 2000 et 2002 ne sont pas inconnues, loin de là, ni du droit
communautaire944 ni du droit français945. Tant l’obligation d’information que le droit de
rétractation font partie de l’arsenal classique946 de protection du consommateur. Ceci étant,
l’information précontractuelle du consommateur diffère de l’obligation générale
d’information947 consacrée par notre droit. En effet, comme le relèvent certains auteurs, « un
esprit de loyauté et même de coopération devait présider à la conclusion du
contrat…indépendamment de tout courant législatif et réglementaire favorable à

943
Considérant n° 12 de la directive 2002/65/CE
944
Article 6-1 de la directive 97/7/CE, pour le droit de rétractation.
945
« Le droit de la consommation est issu du développement du mouvement consumériste pour la protection des
consommateurs dans leurs relations avec les entreprises. Né aux Etats Unis et symbolisé par l'action de Ralph
Nader en particulier contre les constructeurs automobiles, le mouvement consumériste a conduit le législateur à
développer des règles protégeant le consentement et la sécurité des consommateurs. En France le droit de la
consommation a d'abord pris la forme de la loi de 1978 qui a été ensuite codifiée dans le code de la
consommation. Il déroge à la philosophie fondamentale qui avait présidé à la rédaction des codes dont l'objectif
était l'identité des règles applicables à tous les contractants dans la même situation », disponible sur :
http://lexinter.net/JF/dtconsofr.htm.
946
DEFOSSEZ M., Droit communautaire, protection du consommateur de crédit et promotion du commerce
électronique, RDBF, juillet/août 2004, n° 4, p.283.
947
De JUGLART, l’obligation de renseignement dans les contrats, RTD civ. 1945.1 et s. ; BOYER Y.
l’obligation de renseignement dans la formation du contrat, thèse Aix, 1977.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 318
et financiers en ligne

l’information et à la protection des consommateur948 ». Ainsi la jurisprudence a développé


l’importance de l’obligation de renseignement et d’information dans la phase de conclusion
du contrat949. La transposition, en droit interne, de la directive de 2002 par l’ordonnance du 6
juin 2005 a donc bénéficié d’un terrain propice.

623. Un domaine de prédilection : le couple professionnel-consommateur. L’adage emptor


debet esse curiosus trouve une application particulière dans le cadre des relations entre
professionnels et consommateurs parce qu’en raison de l’intention contractuelle, le
consommateur pénètre dans la sphère de compétence du professionnel, pour laquelle il
dispose d’un savoir spécial. Pourtant cette obligation à la charge du professionnel n’est pas
absolue ; certaines décisions jurisprudentielles ont décidé que le profane, lui-même, était
responsable du défaut d’information envers un professionnel950 ou que ce dernier n’était pas
tenu d’une telle obligation d’information envers le consommateur951. En tout état de cause,
cette obligation n’existera au profit du consommateur – investisseur que s’il a réellement
ignoré les informations litigieuses et que cette ignorance est légitime952. Ainsi, le domaine
bancaire et financier, principalement le secteur boursier, est fréquemment le théâtre
d’interventions d’acteurs qui ne sont pas des professionnels mais qui sont davantage
« avertis » que les simples consommateurs. Il devra donc exister un degré dans la délivrance
de l’information.

624. Le secteur bancaire et financier. Très tôt, le droit bancaire et financier a pris conscience de
l’importance de protéger le consentement du consommateur ; il fut le premier à adopter des
mesures spécifiques, entre autres le délai de réflexion et le droit de repentir. Pour illustration,
en matière de crédit immobilier, l’article L. 312-10 du Code de la consommation953 impose un
délai de réflexion de 10 jours pendant lequel le destinataire de l’offre se voit interdire de
l’accepter. De même, le Code monétaire et financier prévoit un droit de repentir954 au profit de
la personne démarchée, et l’article L. 311-15 du Code de la consommation accorde un délai

948
TERRE F., SIMLER P. et LEQUETTE Y., Droit civil Les obligations, op. cit., p. 443, n° 544 et s.
949
Pour quelques exemples : Civ. 3ème, 3 février 1981 : D. 1984.457, note GHESTIN ; Civ. 1ère, 12 novembre
1987 : Bull. civ. I, n°293 ; RTD civ. 1988. 339, obs. MESTRE ; Paris, 13 novembre 1962 : JCP 1963. II. 13154.
950
Cas. 1ère civ., 24 novembre 1976, Bull. civ. I, n°370, p 291 : « celui qui traite avec un professionnel n’est pas
dispensé de lui fournir les renseignements qui sont en sa possession et dont l’absence altère le consentement de
son cocontractant ».
951
Cas. 1ère civ., 19 mars 1985, Bull. civ. I, n°98, p 90, RTD civ.1986.339 obs. J. MESTRE.
952
FABRE-MAGNAN M., de l’obligation d’information dans les contrats, n°253 et s., p.197.
953
Issu de la loi du Scrivener du 13 juillet 1979.
954
Inauguré par la loi du 3 janvier 1972 sur le démarchage financier.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 319
et financiers en ligne

de rétractation955 concernant le crédit à la consommation. Le droit bancaire est donc


naturellement enclin à accorder ce type de protection.

625. Problématique de l’Internet. Simplement, du fait de la nature mondialisée de l’Internet, le


consommateur se retrouve, en un lieu, potentiellement devant autant d’offres que
d’établissements de crédits eux-mêmes domiciliés dans autant d’Etats. Sous certaines
réserves956, la loi applicable aux relations contractuelles est donc, elle-même, potentiellement
celle de chaque Etat. La directive de 2002 permet alors d’harmoniser ces dispositions afin que
le consommateur trouve une protection sensiblement identique quelle que soit la nationalité
du fournisseur qu’il choisit. La question reste de savoir si la protection du consommateur est
effectivement assurée lorsqu’il se retrouve confronté à l’offre de services financiers en ligne.

626. Plan. Le niveau élevé de protection souhaité par le législateur européen est principalement
atteint par une harmonisation des informations préalables à fournir et par l’octroi d’un droit de
rétractation au consommateur : ce sont les protections de base (section 1). Outre ces
dispositions spécifiques aux services financiers, il convient de faire état des protections
assurées par la directive sur le commerce électronique, à titre complémentaire (section 2).

Section 1. Les protections de base

627. Une double protection. Les protections de base instituées par la directive de 2002 concernent
exclusivement la phase précontractuelle, celle théoriquement consacrée à la négociation des
conditions du futur contrat ; s’agissant des services financiers conclus en ligne avec des
établissements de crédits, la négociation apparaît raisonnablement comme utopique, compte
tenu de l’absence physique des parties ; c’est la concurrence entre les différents
établissements qui jouera au préalable ce rôle. Toujours est-il que l’établissement de crédit
doit fournir au consommateur tous les éléments destinés à éclairer son consentement, à travers
son obligation d’information (§1) ; la protection du consommateur, par cette obligation
d’information à la charge de l’établissement de crédit, est doublée par une faculté de
rétractation qui lui est accordée (§2).

955
Article 7 de la loi du 10 janvier 1978.
956
Cf. supra n° 362 et s.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 320
et financiers en ligne

§ 1er. L’information du consommateur

628. Plan. Le point central de la directive sur les services financiers est sans conteste l’obligation
d’information du consommateur que le texte institue dans ses articles 3 à 5 (A). L’élaboration
des dispositions concernées a donné lieu à de longues discussions, vu les divergences des
réglementations nationales à ce sujet957. De son côté, la directive sur le commerce
électronique fait également la part belle à l’information du consommateur (B), spécifiquement
dans le contexte des réseaux numériques (art. 5, 10 et 11).

A. L’information préalable du consommateur : le pilier de la directive sur les services


financiers à distance

629. Diversité. Les informations devant être fournies en vertu de la directive sur les services
financiers ont trait à la technique de commercialisation particulière qu’est la vente à distance.
Ces informations à caractère général et leurs modalités de délivrance (b) concernent tous les
types de services financiers (a). Les autres exigences en matière d'information concernant un
service financier donné, telles que la couverture d'une police d'assurance, ne sont même pas
précisées. Ce type d'information devrait être communiqué, selon la directive, conformément,
le cas échéant, à la législation communautaire ou à la législation nationale pertinente adoptée
conformément au droit communautaire (c)958.

a. Les informations préalables à fournir

630. Contenu. L’article 3, § 1er, de la directive énonce quatre catégories d’informations à fournir, à
savoir celles relatives :
• au fournisseur (identité, adresse, numéro de registre de commerce…) ;
• au service financier (description, prix total dû par le consommateur, risques particuliers,
existence d’autres taxes, modes de paiement et d’exécution…) ;

957
Pour un rappel historique des négociations de la directive, cf. VAN HUFFEL M., Commercialisation à
distance des services financiers : derniers développements d’une – déjà – longe histoire, REDC, 2001, pp. 295
et s.
958
Considérant n° 22.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 321
et financiers en ligne

• au contrat à distance (existence ou absence d’un droit de rétractation, durée du délai de


rétractation, modalités et instructions pratiques pour son exercice, durée minimale du
contrat, clauses concernant la législation applicable et/ou la juridiction compétente…) ;
• aux recours (existence ou absence de procédures extrajudiciaires de réclamation et de
recours, existence de fonds de garantie).

631. Une information conforme. Le nouvel article L. 121-20-10 du Code de la consommation


reprend très fidèlement les exigences posées par la directive. Le prix, les conditions de
l’offre959, le droit de rétractation960, les coordonnées du fournisseur961… doivent
impérativement être communiqués au consommateur avant toute conclusion du contrat962. Le
fournisseur doit, en outre, founir au consommateur les clauses contractuelles963. A cet égard,
si l’information préalable porte sur un élément du contrat à conclure (les droits et les
obligations des parties), elle doit être conforme au droit qui sera applicable lorsque le contrat
sera réalisé. En effet, l’article 3, § 4-4., précise que « les informations portant sur des
obligations contractuelles, à communiquer au consommateur en phase précontractuelle,
doivent être conformes aux obligations contractuelles qui résulteraient du droit présumé
applicable au contrat à distance en cas de conclusion de celui-ci ». Par exemple, il serait
trompeur (voire mensonger) que le fournisseur indique dans son offre un taux déterminé en
vertu de sa loi nationale, alors que c’est une autre loi qui s’appliquera au contrat pour
déterminer ce taux. Cette exigence parait délicate à mettre en œuvre, a priori, puisqu’elle
suppose la parfaite connaissance par l’établissement de crédit des règles de détermination de
la loi applicable, mais surtout une sécurité juridique absolue pour qu’il puisse présumer une
telle loi comme applicable… il paraît dès lors crucial qu’une clause de détermination de la loi
applicable aux relations contractuelles soit prévue pour éviter tout litige. C’est d’ailleurs dans
ce sens que l’article L. 121-20-10 5° oblige le professionnel à préciser la loi applicable aux
relations précontractuelles ainsi qu'au contrat, et l'existence de toute clause concernant le
choix d'une juridiction.

959
Article L. 121-20-10 3° du Code de la consommation.
960
Article L. 121-20-10 4° du Code de la consommation.
961
Article L. 121-20-10 1° du Code de la consommation.
962
Article L. 121-20-10 al. 1. du Code de la consommation.
963
Article L. 121-20-11 du Code de la consommation.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 322
et financiers en ligne

b. Les modalités et le moment de communication des informations

632. Une information sincère. Toutes ces informations doivent être fournies :
• De manière claire et compréhensible ;
• Par tout moyen adapté à la technique de communication à distance utilisée ;
• En indiquant sans équivoque leur but commercial ;
• En tenant compte, notamment, des principes de la bonne foi et de la protection des
mineurs (art. 3, § 2).
Là encore, l’ordonnance de 2005 transpose fidèlement964 l’esprit de bonne foi que le
législateur européen a souhaité réaffirmer. L’objectif de ces dispositions est finalement
d’imposer à l’établissement de crédit de donner au consommateur une information la plus
sincère possible. On sait qu’en droit interne965, le principe de bonne foi, à l’origine établi pour
l’exécution du contrat, a progressivement trouvé sa place dans la phase précontractuelle de
sorte que le juge, en absence de base légale, dispose toujours d’un principe pouvant justifier
une condamnation (du professionnel…), notamment concernant la rupture des pourparlers966.
Ce principe trouve enfin dans l’article L. 121-20-10 alinéa 3 une base légale. La notion de
sincérité doit également être mise en relation avec les obligations imposées par le Code
monétaire et financier à propos des services d'analyse financière et des agences de notation967
et surtout l’article 222-2 du Règlement de l’AMF relatif à l’obligation d’information du
public968. Ainsi, aux termes de l’article L.544-2 du Code monétaire et financier : « les
dirigeants d'une entreprise doivent s'abstenir de toute initiative auprès des analystes
financiers dont ils rémunèrent les services qui aurait pour objet ou pour effet de privilégier
leurs intérêts propres, ou ceux de leurs actionnaires, au détriment d'une information
sincère ». Le règlement de l’AMF prévoit, quant à lui, dans son article 222-2, que
« l’information donnée au public par l’émetteur doit être exacte, précise et sincère ». Alors
que le Code vise la situation particulière des analystes financiers, l’AMF réglemente une
obligation d’information permanente à la charge de toute entité ou de toute personne morale

964
Article L. 121-20-10 al. 3 du Code de la consommation.
965
V. aussi en droit belge. GOBERT D., Le principe de bonne foi dans la formation du contrat, in Droit de
l’informatique et des Télécoms, 96/4, pp. 41 à 48, note sous Cour d’appel de Liège, 7ème ch., 19 novembre 1996.
966
Cass. com., 12 février 2002, Contrats conc. consom., n° 6, 1 juin 2002, pp. 18-19 LEVENEUR L. ; Paris, 10
mars 2000, JCP E, n°10, 8 mars 2001, pp. 422-426, VIOLET F. ; Cass. com., 7 avril 1999, Dalloz ,n°36,
14/10/1999, pp. 514-516, CHAUVEL P. ; Cass. com., 7 janvier 1997, Dalloz, n°4/5, 29/01/1998, pp. 45-50,
CHAUVEL P.
967
Article L.544-2 du Code monétaire et financier inséré par la loi nº 2003-706 du 1 août 2003.
968
Livre II titre II chap. 2 du Règlement AMF homologué par arrêté du 12 novembre 2004, JO du 24 novembre
2004.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 323
et financiers en ligne

ayant le statut d’émetteur faisant appel public à l’épargne (ou dont les instruments financiers
sont supports d’un contrat à terme ou d’un instrument financier admis aux négociations sur un
marché réglementé), à destination du public (information qui se doit d’être exacte, précise et
sincère), et s’appliquant à l’ensemble des instruments financiers mentionnés à l’article L. 211-
1 du code monétaire et financier (actions, titres de créances, parts ou actions d’OPC,
instruments financiers à terme). Le Règlement précise lui-même, dans son article 222-10, que
si l’émetteur dispose d’un site Internet (hypothèse de base dans le cadre de notre étude), il doit
faire figurer sur ce site, pendant une période appropriée, toute information privilégiée qu’il est
tenu de rendre publique. Notons pour finir que l’information sincère que vise l’AMF est
nécessairement non commerciale ou publicitaire (article 222-5) pour éviter d’induire en erreur
le public. Il parait clair, désormais, que suite à la transposition de la directive de 2002, les
informations « légales » d’un côté, et commerciales, de l’autre, devraient clairement être
distinguées et différenciées, voire simplement séparées.

633. Le support de l’information. En outre, ces informations, ainsi que les conditions
contractuelles, doivent être fournies sur un support papier ou sur un autre support durable, mis
à la disposition du consommateur et auquel celui-ci a accès (art. 5, § 1er de la directive et L.
121-20-11 alinéa 1 du Code de la consommation). Sur les réseaux, ces informations
pourraient par exemple être fournies par l’envoi d’un courrier électronique au consommateur.
Par contre, l’affichage de ces informations sur une simple page Web ne suffirait pas à remplir
l’exigence d’un support durable, tel qu’il est défini par la directive969. Ainsi, pour répondre à
cette obligation, pourrait-on envisager la possibilité de télécharger en ligne les conditions
contractuelles (dans un format de type PDF) ; l’exigence serait remplie puisque l’article 5 de
la directive précise que le fournisseur doit mettre ce support « à disposition du
consommateur » ; pourtant, le texte français est plus exigeant puisqu’il indique que le
« consommateur doit recevoir » les informations, ce qui implique fatalement une démarche
active d’envoi de la part du professionnel et, vu les enjeux du texte, il serait préférable de
conseiller aux établissements de crédit d’envoyer systématiquement un courriel
supplémentaire d’information pour se ménager une preuve de la bonne information du
consommateur : le cas échéant, nul doute que le juge se montrerait conciliant avec le
consommateur !

969
Un support durable est « tout instrument permettant au consommateur de stocker des informations qui lui
sont adressées personnellement d'une manière permettant de s'y reporter aisément à l'avenir pendant un laps de
temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées et qui permet la reproduction à l'identique des
informations stockées » (art. 2, f).
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 324
et financiers en ligne

634. Le moment de l’information. Ces informations doivent être communiquées « en temps utile
avant que le consommateur ne soit lié par un contrat à distance ou par une offre ». Si la
technique de communication à distance utilisée à la demande du consommateur ne permet pas
de remplir cette obligation avant la conclusion du contrat, le fournisseur doit fournir les
informations requises immédiatement après la conclusion du contrat, sur un support durable
(art. 5, § 2, L. 121-20-11 alinéa 2). On songe, par exemple, aux contrats qui seraient conclus
par téléphone ou par WAP970. En tout état de cause, l’Internet ne semble pas concerné par
cette exception et l’information précontractuelle y sera exigée systématiquement. Par ailleurs,
à tout moment au cours de la relation contractuelle, le consommateur a le droit, s'il en fait la
demande, de recevoir les conditions contractuelles sur un support papier. En outre, il peut
décider de changer les techniques de communication à distance utilisées, à moins que cela ne
soit incompatible avec le contrat à distance conclu ou avec la nature du service financier
fourni (art. 5, § 3, L. 121-20-11 alinéa 3). Ce droit pourrait s’avérer utile, par exemple,
lorsque le consommateur ne dispose plus d’un ordinateur ou d’une adresse de courrier
électronique.

c. Articulation avec les exigences supplémentaires en matière d’information

635. Les exigences supplémentaires. Les informations exigées par la directive sont à caractère
général, mais d’autres informations sont imposées par le droit communautaire ou le droit
national des Etats membres en matière de services financiers. La directive précise donc
comment ses dispositions s’articulent avec celles en matière d’information. Si une législation
communautaire régissant les services financiers comporte des dispositions en matière
d’information préalable qui s’ajoutent à celles de la directive, ces exigences continuent à
s’appliquer (art. 4, § 1er). Le texte français en fait de même, prévoyant son applicabilité « sans
préjudice de l'application des obligations législatives et réglementaires spécifiques à chaque
produit, instrument financier ou service proposé971 ».

636. Les dispositions plus strictes. Dans l'attente d'une plus grande harmonisation, les États
membres peuvent maintenir ou adopter des dispositions plus strictes concernant les exigences

970
V. à ce sujet, VERBIEST T., Les aspects juridiques du WAP et commerce électronique mobile, 12 janvier
2001, disponible sur : www.droit-technologie.org .
971
Article L. 121-20-10 al. 4 du Code de la consommation.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 325
et financiers en ligne

en matière d'information préalable dès lors que ces dispositions sont conformes au droit
communautaire (art. 4, § 2). En outre, les obligations d’information prévues dans la directive
sur le commerce électronique viennent s’ajouter à celles qui sont requises par la directive sur
les services financiers à distance.

637. Bilan. La fourniture de ces informations ne devrait pas poser de problèmes particuliers ni
quant à leur qualité, ni quant à leur quantité. On imagine mal l’établissement de crédit fournir
volontairement des informations inexactes sur un support fiable, c’est-à-dire pouvant servir de
preuve au consommateur. Toujours est-il que toutes ces informations faciliteront les
comparaisons entre les différents établissements de crédit. En France, l’arrêté du 8 mars 2005
fixe le contenu des conventions de compte de dépôt. Indéniablement, les informations qu’elles
contiennent participent plus globalement de l’information précontractuelle au sens de la
directive de 2002 et de l’ordonnance de juin 2005, en matière de services financiers. Ainsi,
des points de recoupement existent entre les deux textes : la durée (de la convention/ du
contrat), les caractéristiques (les produits et services dont le client bénéficie), le prix
(commissions, tarifs ou principes d’indexation/prix total dû par le consommateur)…972. La
protection du consommateur investisseur en ressort globalement renforcée ; il risque en
revanche, s’agissant d’un service financier en ligne, de se retrouver noyé sous une masse
d’informations qu’il devra assimiler (l’en croît-on encore capable ?).

B. Les informations à fournir dans le cadre de la réglementation sur le « commerce


électronique »

638. Des informations cumulatives. S’agissant de contrats conclus en ligne, la directive sur le
commerce électronique impose également la fourniture d’un certain nombre d’information
relative au prestataire de service (a), avant (b) et après (c) la passation de commande.
Cependant, l’obligation imposée par cette directive se distingue de celle exigée par la
directive sur les services financiers et l’ordonnance de 2005, qui touchent aux services fournis
ainsi qu’aux conditions du contrat. Dans la directive sur le commerce électronique, le contenu

972
« D'autres règles du droit français contribuent néanmoins à l'encadrement de la fourniture de services
financiers, en particulier des services d'investissement, mais protègent les investisseurs et non les
consommateurs, et sont en grande partie édictées par les autorités de régulation des activités financières. Elles
pourraient donc venir s'ajouter, dans le cadre de la fourniture de prestations à distance, aux dispositions
correspondant à la transposition de l'article 3 de la directive » Avis n° 202 (2003-2004) de M. Denis BADRÉ,
fait au nom de la commission des finances, déposé le 5 février 2004 (modifications législatives envisagées suite
à la directive de 2002).
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 326
et financiers en ligne

des informations à fournir s’attache à la spécificité des contrats conclus électroniquement. La


LEN a largement repris ces exigences en droit interne.

a. Les informations relatives au prestataire de service

639. L’identité. En premier lieu, le consommateur doit savoir avec qui il envisage de rentrer en
affaires. C’est pourquoi le prestataire de services de la société de l’information doit lui fournir
un certain nombre d’informations973 précises relatives à son identité et à son activité
professionnelle (art. 5, § 1er) : son nom, son adresse géographique, ses coordonnées (y
compris son adresse de courrier électronique), ainsi que, le cas échéant, son numéro de
registre du commerce, son numéro de TVA, l’autorité de surveillance à laquelle il est soumis,
l’ordre professionnel auprès duquel il est inscrit, son titre professionnel et l’Etat membre dans
lequel il a été octroyé, et une référence aux règles professionnelles qui lui sont applicables et
au moyen d’y accéder. L’article 19 de la LEN a scrupuleusement transposé ces obligations
pour les prestataires en l’adaptant aux spécificités françaises : « sans préjudice des autres
obligations d'information prévues par les textes législatifs et réglementaires en vigueur, toute
personne qui exerce l'activité définie à l'article 14 est tenue d'assurer à ceux à qui est destinée
la fourniture de biens ou la prestation de services un accès facile, direct et permanent
utilisant un standard ouvert aux informations suivantes [nom et prénoms ou sa raison sociale,
adresse, adresse de courrier électronique, son numéro de téléphone, n° RCS ou répertoire des
métiers, n° TVA intracommunautaire…, nom et adresse de l’autorité délivrant l’autorisation
si l’activité y est soumise, la référence aux règles professionnelles le cas échéant] ». Cette
obligation d’information ne semble pas poser de problèmes dans la mesure où les
professionnels ont déjà l’habitude de donner ce type d’information, imposées principalement
par le Code de commerce.

640. En dehors de tout contrat. Ces informations doivent être fournies par tout prestataire d’un
service de la société de l’information, et pas uniquement ceux qui pratiquent le commerce
électronique. Elles doivent être accessibles facilement, directement et en permanence. Cette
exigence de l’article 5-1 de la directive de 2000 a également été reprise dans les mêmes
termes par l’article 19 de la LEN qui impose, elle aussi, « un accès facile, direct et

973
Il s’agit là d’un minimum d’informations exigées par la directive. Lors de la transposition de la directive, les
Etats membres peuvent imposer au prestataire la fourniture d’informations supplémentaires. De même, le
prestataire peut spontanément fournir d’autres informations s’il le souhaite.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 327
et financiers en ligne

permanent » aux informations. Par exemple, on peut envisager de satisfaire cette obligation au
moyen d’un hyperlien placé en bas de chaque page du site974 ou de la page d’accueil ; mais le
même lien placé sur une autre page n’en serait pas moins d’accès facile, nous semble-t-il. A
l’heure actuelle, on peut dire que les établissements de crédit ont tous intégré cette démarche
d’information générale dans leur site Internet.

641. Le prix. Toujours dans un souci de transparence, l’article 5, § 2 de la directive et l’article 19


in fine de la LEN, déterminent de quelle manière les prix doivent être indiqués975. Lorsque le
prix d’un service de la société de l’information est mentionné, il doit l’être de manière claire
et non ambiguë, précisant si les taxes et les frais de livraison sont inclus. Cette obligation de
transparence dans l’indication des prix s’ajoute à celles existant déjà au niveau européen976.

b. Informations à fournir avant la passation de la commande

642. La perspective contractuelle. En vertu de l’article 10 de la directive sur le commerce


électronique, d’autres d’informations doivent aussi être fournies au consommateur de manière
claire, compréhensible et non équivoque, avant qu’il ne commande en ligne977 :
• Les différentes étapes techniques à suivre pour conclure le contrat ;
• Si le contrat une fois conclu est archivé ou non par le prestataire et s’il est accessible ou
non ;
• Les moyens techniques pour identifier et corriger les erreurs commises dans la saisie des
données avant la passation de la commande ;
• Les langues proposées pour la conclusion du contrat.
Afin de transposer ces obligations supplémentaires, la LEN a crée un nouvel article 1369-1
dans le Code civil. Désormais, l'offre doit énoncer : « les différentes étapes à suivre pour
conclure le contrat par voie électronique, les moyens techniques permettant à l'utilisateur,
avant la conclusion du contrat, d'identifier les erreurs commises dans la saisie des données et
de les corriger, les langues proposées pour la conclusion du contrat et, en cas d'archivage du

974
On note que cette exigence sera sans doute difficile à remplir dans le cadre du e-commerce.
975
Il ne s’agit pas ici d’imposer l’indication des prix. Cette obligation de mentionner les prix existe déjà dans les
relations B2C. Par contre, dans les relations B2B, les professionnels demeurent libres de négocier leurs prix et
tarifs et ne sont pas obligés de les indiquer sur leur site.
976
Par exemple, concernant l’indication des prix en euros, ou l’obligation d’indiquer les prix dans les relations
avec un consommateur.
977
Notons d’emblée qu’en ce qui concerne les relations B2B, les professionnels peuvent déroger entre eux à
cette obligation d’information.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 328
et financiers en ligne

contrat, les modalités de cet archivage par l'auteur de l'offre et les conditions d'accès au
contrat archivé ». L’essentiel des ces dispositions relève donc, de la technique informatique.
Néanmoins, ce texte consacre la technique du double clic dont on sait qu’elle n’offre pas les
garanties de la signature électronique.

643. Les codes de conduite. Par ailleurs, le prestataire doit indiquer les codes de conduite
auxquels il est soumis et la façon d’y accéder par voie électronique (art. 10, § 2). La LEN,
quant à elle, se limite aux règles professionnelles et commerciales auxquelles l'auteur de
l'offre entend, le cas échéant, se soumettre. De ce point de vue, la loi française paraît plus
prudente que la directive car la validité des règles professionnelles (à tout le moins pour les
professions réglementées) notamment en matière bancaire et financière n’est à pas remettre en
question, parce qu’elles sont homologuées par arrêté ou plus généralement issues de la loi.

644. Les CGV. En ce qui concerne les conditions générales, la directive se contente de préciser
que lorsqu’elles sont communiquées, elles doivent l’être d’une manière qui permette de les
conserver et de les reproduire. Cependant, on a vu que la directive sur les services financiers à
distance est beaucoup plus précise, en exigeant que les conditions générales soient fournies
sur un support papier ou sur un autre support durable, mis à la disposition du consommateur et
auquel celui-ci a accès, voire envoyées au consommateur dans les termes du Code de la
consommation. D’ailleurs, la LEN dans l’article 1369-1 du Code civil, impose aujourd’hui au
cybermarchand de mettre ses conditions contractuelles à disposition du consommateur, de
manière à ce qu’il puisse les conserver et les reproduire. Ces mesures sont bien en adéquation
avec la directive de 2002. La distinction qui existe entre « la mise à disposition » de la LEN et
« l’envoi » de l’ordonnance de 2005 tient logiquement dans l’intention de contracter ; en effet,
un degré dans le processus d’achat du consommateur est franchi dans l’esprit de l’ordonnance
de 2005 ; par conséquent, « l’envoi » et non plus « la [simple] mise à disposition » est
nécessaire.

c. Informations postérieures à la commande

645. L’accusé de réception. A la différence de la directive sur les services financiers, la directive
« commerce électronique » prévoit la fourniture d’une information postérieurement à la
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 329
et financiers en ligne

passation de la commande978. En effet, le prestataire doit accuser réception de la commande


du destinataire sans délai injustifié et par voie électronique979. Cependant, cette obligation
n’est pas applicable dans le cadre des contrats conclus entre professionnels, ni pour les
contrats conclus par échange de courriers électroniques.

646. Reconduction tacite. Le texte de la directive pourra également s’articuler avec d’autres
exigences nationales favorisant la protection des consommateurs telles que celles contenues
dans la loi du 28 janvier 2005980 dans ses dispositions tendant à faciliter la résiliation des
contrats tacitement reconductibles981. Les prestations de services bancaires et financières sont
concernées par loi qui vise généralement toutes prestations de services982 et aussi les contrats
d’assurance983. S’agissant des contrats tacitement reconductibles autres que les contrats
d’assurance, notons que la loi impose simplement une information par écrit, de sorte qu’il
serait envisageable d’utiliser des moyens électroniques.

647. Autres informations postérieures. Dans le même ordre d’idées, si la loi du 28 janvier 2005
supprime l’article L.311-5984 du Code de la consommation et libéralise, par-là, le crédit
gratuit985 dans le but de stimuler la consommation, elle encadre également le crédit
renouvelable en imposant une offre préalable pour toute augmentation du crédit consenti. Se
conformant à la jurisprudence986, elle renforce donc l’information du consommateur. Il en est

978
Soulignons que c’est volontairement que la directive sur le commerce électronique évite de se référer à la
« conclusion du contrat », préférant recourir au terme « commande », plus neutre, afin de ne pas interférer dans
le moment de conclusion du contrat, différent d’un Etat membre à l’autre.
979
La directive précise d’ailleurs que la commande et l’accusé de réception sont considérés comme étant reçus
lorsque les parties auxquelles ils sont adressés peuvent y avoir accès.
980
Loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur, dite
« Loi Chatel ». Il est également à noter que la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales
déloyales a été signée par le Parlement européen et le Conseil le 11 mai 2005 et sera applicable aux services
bancaires et financiers.
981
AVENA-ROBARDET V., Adoption définitive de la proposition de loi sur la protection du consommateur,
Recueil Dalloz, 2005, n°4, Actualité législative, p.274.
982
Ainsi le nouvel article L. 136-1 du Code de la consommation prévoit que le professionnel prestataire de
services doit informer le consommateur par écrit, au plus tôt 3 mois et au plus tard 1 mois avant le terme de la
période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec
une clause de reconduction tacite.
983
Selon le nouvel article L. 113-15-1 du Code des assurances, pour les contrats à tacite reconduction couvrant
les personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles (c’est-à-dire les consommateurs), la date
limite d'exercice par l'assuré du droit à dénonciation du contrat doit être rappelée avec chaque avis d'échéance
annuelle de prime ou de cotisation.
984
Interdiction de la publicité en faveur du crédit gratuit hors des lieux de vente.
985
La publicité doit comporter le nom de la personne qui supporte in fine le coût de l’opération.
986
Cass. 1ère civ., 3 juill. 1996, D.1996, IR, p.191 ; Cass. 1ère civ. 18 janv 2000, D. 2000, AJ, p.134 obs.
RONDEY ; CA Versailles, 12 juin 1998, BICC 1999, n°77 ; D. Affaires 1998, p.1309, obs. AVENA-
ROBARDET V.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 330
et financiers en ligne

également des exigences de l’article L.311-4987 du Code de la consommation, relatives à la


publicité du crédit à la consommation988, qui se retrouveront sur l’Internet.

§ 2. Le droit de rétractation

648. Plan. La directive sur les services financiers à distance donne au consommateur un droit de
rétractation, c’est-à-dire le droit de renoncer au contrat postérieurement à sa conclusion,
dérogeant par là au « principe qui veut que les parties soient liées irrévocablement dès la
rencontre des volontés989 ». Ainsi, les consommateurs investisseurs bénéficient d’un délai
pendant lequel ils peuvent remettre en cause leur contrat (A) ; ce droit n’est cependant pas
absolu (B).

A. Délai de rétractation

649. Modalités. La directive ainsi que l’article L. 121-20-12 I du Code de la consommation


accordent au consommateur un délai de rétractation de 14 jours calendrier, sans pénalités ni
indications de motifs990. En principe, ce délai commence à courir à partir du jour de la
conclusion du contrat. Cependant, si le consommateur reçoit les informations exigées et les
conditions contractuelles après la conclusion du contrat, le délai ne commence à courir qu’à
partir de la réception de ces informations (art. 6, § 2, 2e tiret, art. L. 121-20-12 II 2°).

650. Services financiers ou Internet. On peut noter que l’harmonisation des délais en cas de
conclusion de contrat en ligne s’effectue logiquement par secteur (financier ou non) et non en
raison de l’Internet lui-même. Les contrats portant sur des services non financiers conclus via
l’Internet restent soumis à un délai classique de rétractation de 7 jours, tandis que les mêmes
contrats relatifs à des services financiers pourront être remis en cause pendant 14 jours. Par
ailleurs, les autres délais propres à tel service leur restent applicables, comme par exemple le
délai en matière de crédit immobilier991. Cet argument milite en faveur de la non existence
d’un droit propre à l’Internet, qui n’est qu’une technique commerciale. Il est donc normal

987
Issu de la loi n°2003-706 du 1er août 2003.
988
BOUTEILLER P., La publicité du crédit à la consommation, JCP E., n°5, 29 janvier 2004, p.163.
989
TERRE F., SIMLER P. et LEQUETTE Y., op. cit., p. 212 et s., n° 255.
990
Pour les contrats d’assurance sur la vie et les « opérations portant sur des retraites individuelles », ce délai
est porté à 30 jours (art. 6, § 1er) ; il commence à courir « au moment où le consommateur est informé que le
contrat à distance a été conclu » (art. 6, § 2, 1er tiret).
991
Article L. 121-20-12 II 3° du Code de la consommation.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 331
et financiers en ligne

qu’existe une inégalité de traitement (délais différents) entre les cyber-consommateurs sur
l’Internet, justifiée non par la technique utilisée mais par la « dangerosité » du contrat.

651. Modalités de rétractation. Pour rappel, le fournisseur a l’obligation de fournir au


consommateur des informations relatives aux modalités d’exercice du droit de rétractation.
(art. 3, § 1er, point 3, a et d ; L. 121-20-10 4°). Afin d’exercer son recours, le consommateur
doit donc le notifier au fournisseur avant l’expiration du délai, en suivant les instructions
fournies. Il doit veiller à conserver une preuve de cette notification, pour éviter toute
contestation ultérieure. A cet égard, la directive précise que la notification doit être faite sur
un support papier (par exemple une lettre recommandée à la poste) ou sur un autre support
durable (par exemple un recommandé électronique signé numériquement). Le délai est
présumé respecté si la notification a été envoyée avant l’expiration du délai et ce, même si elle
parvient au fournisseur après la fin du délai. La loi française ne reprend pas ces exigences en
matière de notification ; il semble que cela soit opportun compte tenu des avancées
législatives en matière de preuve électronique. A cet effet, l’ordonnance du 16 juin 2005992 est
venue préciser la force probatoire d’un courrier recommandé électronique ; le nouvel article
1369-8 du Code civil affirme désormais, sans réserve qu’une lettre recommandée relative à la
conclusion ou à l'exécution d'un contrat peut être envoyée par courrier électronique993.

652. Remboursement. Les dispositions de la directive de 2002 et de l’ordonnance de 2005 sont


identiques sur ce point. Le fournisseur doit rembourser au consommateur, dans les meilleurs
délais et au plus tard dans les trente jours calendrier, toutes les sommes qu'il a perçues de
celui-ci conformément au contrat à distance, à l'exception du montant visé ci-dessus. Ce délai
commence à courir le jour où le fournisseur reçoit la notification de la rétractation (art. 6, § 4 ;
L. 121-20-13 II). De son côté, le consommateur doit restituer au fournisseur, dans les
meilleurs délais et au plus tard dans les trente jours calendrier, toute somme et/ou tout bien
qu'il a reçus de ce dernier. Ce délai commence à courir à compter du jour ou le consommateur
envoie la notification de rétractation (art. 6, § 5 ; L. 121-20-13 dernier alinéa).

992
Ordonnance nº 2005-674 du 16 juin 2005 relative à l’accomplissement de certaines formalités contractuelles
par voie électronique
993
A condition que ce courrier soit acheminé par un tiers selon un procédé permettant d'identifier le tiers, de
désigner l'expéditeur, de garantir l'identité du destinataire et d'établir si la lettre a été remise ou non au
destinataire.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 332
et financiers en ligne

653. Contrats de crédit accessoires. Selon la directive 97/7/CE, lorsque le consommateur renonce
à un contrat d’achat d’un produit ou d’un service à distance, cette rétractation vaut également
pour le contrat de prêt servant à financer cet achat. La directive sur les services financiers à
distance précise que ce régime continue à s’appliquer. Il en va de même pour les contrats de
prêt qui financent un contrat de time-sharing994. Un mécanisme analogue est prévu pour les
opérations de crédit à distance, qui financent un contrat portant sur des services financiers.
Plus précisément, lorsque le consommateur renonce au contrat à distance portant sur un
service financier, cette rétractation vaut également pour le contrat de prêt qui le finance (art.
6, § 7).

654. Droit de rétractation et démarchage. Selon l’article L.341-1 du Code monétaire et


financier, constitue un acte de démarchage bancaire ou financier toute prise de contact non
sollicitée, par quelque moyen que ce soit, avec une personne physique ou une personne
morale déterminée, en vue notamment d'obtenir de sa part, un accord sur la réalisation d'une
opération sur un instrument financier, la fourniture d'un service d'investissement ou la
fourniture d'une prestation de conseil en investissement. L’article L.341-16 du même code
consent à la personne démarchée un délai de rétractation de 14 jours, c’est-à-dire de la même
durée que celle prévue par la directive de 2002 et le Code de la consommation. Il est donc
particulièrement tentant d’assimiler l’Internet à un pur outil de démarchage ; néanmoins pour
autant qu’en fût facilitée la transposition, la directive de 2002 va plus loin en accordant cette
faculté en dehors de tout démarchage, dans le cas où, par exemple, le consommateur se serait
connecté de lui-même au site d’un établissement de crédit. On peut donc noter un
rapprochement des notions de consommateur (énoncé par la directive) et d’investisseur
(énoncé par le Code monétaire et financier). En revanche, l’ordonnance de transposition ne
reprend pas les exigences liées à la présence d’un formulaire de rétractation comme en
matière de démarchage bancaire (L.341-16 du Code monétaire et financier) ou de crédit à la

994
L'immobilier en temps partagé a fait l'objet d'une directive européenne 94/47/CE, adoptée le 26 octobre 1994,
aujourd’hui transposée en droit français par la loi n°98-566 du 8 juillet 1998, elle-même intégrée dans le code de
la consommation aux articles L.121-60 à L.121-76. Cette réglementation vise les contrats conclus pour une durée
d'au moins trois ans et portant sur des périodes d'occupation d'au moins une semaine. Le texte oblige à délivrer
au consommateur une information sur les éléments constitutifs du contrat : objet de la vente, situation et services
liés au bien, prix, charges, conditions particulières…, précise les modalités de cette information (rédaction du
contrat dans la langue maternelle du consommateur) et fixe les procédures et modalités de résiliation et de
rétractation. En particulier, il institue un délai de rétractation qui ne peut être inférieur à 10 jours à compter de la
signature du contrat.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 333
et financiers en ligne

consommation (L.311-15 du Code de la consommation) dont on connaît les difficultés


d’application995.

B. Exceptions au droit de rétractation

655. Absence de rétractation. La directive prévoit un certain nombre de cas où le consommateur


ne dispose pas d’un droit de rétractation (art. 6, § 2°) :
• Pour les services financiers dont le prix dépend de fluctuations du marché susceptibles
de se produire pendant le délai, et sur lesquelles le fournisseur n’a aucune influence
(opérations de change, titres négociables…) ;
• Pour les assurances de voyage ou de bagages d’une durée inférieure à un mois ;
• Pour les contrats exécutés intégralement par les deux parties à la demande expresse du
consommateur avant que ce dernier n’exerce son droit de rétractation.
Par ailleurs, la directive laisse la possibilité aux Etats membres de prévoir d’autres exceptions.
C’est précisément ce que l’ordonnance de 2005 prévoit dans l’article L. 121-20-12 II du Code
de la consommation, par exemple en matière du crédit immobilier qui dispose déjà d’un délai
particulier.

656. Paiement du service fourni avant la rétractation. Lorsqu’il renonce au contrat, le


consommateur est néanmoins tenu au paiement des services qui lui ont été effectivement
fournis avant l’exercice de son droit de rétractation (art. 7, § 1er). Néanmoins, ce principe est
assorti de certaines conditions :
• Le montant dû par le consommateur ne peut être disproportionné par rapport à
l’importance du service déjà fourni ;
• Ce montant ne peut en aucun cas être interprété comme une pénalité, étant donné que le
droit de rétractation doit toujours pouvoir s’exercer sans pénalité ni indication de motifs
(art. 6, § 1er) ;
• Le consommateur doit avoir été informé, avant la conclusion du contrat, de son
obligation de s’acquitter du paiement des services effectivement fournis avant la
rétractation ;

995
Civ, 1ère, 8 juillet 1997, D, Aff, 1997, p928 : la 1ère Chambre civile estime que le bordereau doit
obligatoirement comporter au verso le nom et l'adresse du prêteur et qu'à défaut, celui-ci est déchu du droit aux
intérêts en application de l'article L.311-33 du Code de la consommation ; Civ. 1ère, 17 juillet 2001, Bull., 2001,
I, n° 233, p. 146, JCP E, n°2, 10 janvier 2002, Juris., pp. 80-83, note LUTUN O., D., Cahier droit des affaires, 3
janvier 2002, n° 1, Jurisp., p. 71-74, note MAZEAUD D.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 334
et financiers en ligne

• Le consommateur doit avoir demandé préalablement que le contrat soit exécuté


partiellement avant l’expiration du délai de rétractation (art. 6, § 3).
Le Code de la consommation reprend ces dispositions dans son article L. 121-20-13 en
rappelant notamment que le consommateur ne peut être tenu qu'au paiement proportionnel du
service financier effectivement fourni, à l'exclusion de toute pénalité. De même, l’exigence
d’information est imposée.

Section 2. Les protections complémentaires

657. Un système de protection complet. La directive sur les services financiers à distance accorde
d’autres protections au consommateur, à titre complémentaire, en matière de paiement par
carte (A), de vente forcée (B) ou de communications commerciales non sollicitées (C). En
outre, un certain nombre de voies de recours doivent être assurées au consommateur en cas de
conflit (D) ; d’autres mesures également envisagées par la directive concourent à la protection
du consommateur (E).

A. Les mesures réparatrices en cas d’utilisation frauduleuse de la carte bancaire du


consommateur

658. L’imprécision de la directive. La directive oblige les Etats membres à prendre des mesures
en cas d’utilisation frauduleuse d’une carte de paiement996 dans le cadre des contrats à
distance. Dans ce cas, le consommateur victime d’une telle utilisation frauduleuse doit
pouvoir demander l’annulation du paiement et être recrédité des sommes versées (art. 8). Le
législateur européen n’en dit pas plus, étant donné que la question des paiements a déjà fait
l’objet d’une recommandation de la Commission997.

659. Le Code monétaire. Le droit français est d’ores et déjà en adéquation avec la directive de
2002. En cas d’utilisation frauduleuse de sa carte, les articles L. 132-1 à L. 132-6 du Code

996
Pour le problème des « yes-cards », cf. enquête sur la recette de fausses cartes bancaire diffusée sur Internet,
Yahoo actualités multimédia, 18 novembre 2004, « le GIE carte bancaire estime que l’utilisation de ces yes-
cards cause un préjudice de 15 millions d’euros aux banques en 2003 ».
997
Recommandation 97/489/CE de la Commission du 30 juillet 1997 concernant les opérations effectuées au
moyen d'instruments de paiement électronique, en particulier la relation entre émetteur et titulaire.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 335
et financiers en ligne

monétaire et financier998 prévoient en particulier que le consommateur peut bénéficier d'une


« re-créditation » de son compte dès la première demande. En effet, l’article L. 132-4 indique
que « la responsabilité du titulaire d'une carte mentionnée à l'article L. 132-1 n'est pas
engagée si le paiement contesté a été effectué frauduleusement, à distance, sans utilisation
physique de sa carte ». Cet article paraît suffisamment large pour inclure les paiements
réalisés via l’Internet. En revanche, un arrêt récent de la Cour d’appel de Paris999 semble
remettre en cause cette protection dans la mesure où il impose au demandeur (le
consommateur en l’espèce) de prouver qu’il était resté en possession de sa carte lors de
l’utilisation frauduleuse. Pratiquement, cette solution risque d’inciter les établissements de
crédit à refuser systématiquement le remboursement des sommes frauduleusement utilisées,
vu que la preuve sera difficilement apportée par le consommateur de bonne foi, et accentuant
par-là le déséquilibre que la loi veut restreindre.

660. Responsabilité du cybermarchand. Les dispositions de la directive de 2002 doivent aussi


être mises en relation avec celles de l’article 15 de la LEN du 21 juin 2004. En effet, cette
dernière introduit une « responsabilité de plein droit » du cybermarchand ; en d’autres termes,
le fournisseur de services financiers en ligne est responsable envers l’acheteur de la bonne
exécution des obligations résultant du contrat. Il pourra toutefois s’exonérer en prouvant que
l’inexécution est imputable à l’acheteur, du fait de sa mauvaise foi ou d’une mauvaise
utilisation du service. Ainsi, la protection du consommateur se trouve « renforcée par la
nécessité de respecter un certain nombre d’obligations accrues par rapport à une activité de
commerce traditionnelle1000 ». Cependant, compte tenu des possibilités d’exonération qui
réajustent in fine les tâches de chaque cocontractant, l’obligation qui pèse sur le fournisseur
revient, semble-t-il, à garantir simplement la fiabilité de son procédé dématérialisé de
paiement ou de fourniture de la prestation commandée (exécution de l’obligation), à défaut
d’instituer une véritable responsabilité de plein droit (dont le prestataire ne pourrait s’exonérer
qu’en prouvant un cas de force majeure) ; il est parfaitement normal que l’établissement de
crédit qui propose la souscription, sur son site Internet, à un service financier, soit responsable
de son fonctionnement. A notre sens, il ne s’agit que d’une adaptation de l’obligation générale
de délivrance mise à la charge du vendeur.

998
Introduits par la loi n 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne.
999
CA Paris, 9 décembre 2004, JCP E, 9 juin 2005, p. 858, note BOUTEILLER P.
1000
BROUSSE F., L’impact de la LEN sur la relation client, 4 septembre 2004, disponible sur : www.droit-
ntic.com.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 336
et financiers en ligne

B. L’interdiction de la vente forcée

661. Demande préalable. La directive oblige également les Etats membres à prendre les mesures
nécessaires pour interdire les ventes forcées telle que la fourniture de services financiers à un
consommateur sans demande préalable de celui-ci et lorsqu’elle s’accompagne d’une
demande de paiement immédiat ou différé. En outre, en cas de fourniture non demandée, le
consommateur doit être dispensé de toute obligation, et l’absence de réponse de sa part ne
vaut pas consentement. Néanmoins, cela ne signifie pas qu’un contrat ne peut pas être
tacitement reconduit, lorsque le droit national le prévoit. La directive précise en effet que cette
interdiction est « sans préjudice des dispositions des États membres relatives à la
reconduction tacite de contrats à distance lorsque celles-ci permettent une telle reconduction
tacite » (art. 9). Par exemple, en matière de contrats d’assurance, lorsque la loi prévoit la
reconduction tacite du contrat en l’absence de notification contraire d’une des parties, il ne
s’agit pas d’une vente forcée. Notons à ce propos que la loi du 28 janvier 20051001 tendant à
conforter la confiance et la protection du consommateur vient réglementer la pratique de la
reconduction tacite entre professionnels et consommateurs1002. Pour tous les contrats de
prestation de service, elle crée un nouvel article L. 136-1 du Code de la consommation
prévoyant que le professionnel doit informer le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois
et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la
possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec une clause de reconduction
tacite. A défaut de respecter cette obligation d’information, le consommateur pourra mettre
gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la date de reconduction. De
même, la loi de 2005 complète le Code des assurances d’un nouvel article L. 113-15-1 pour
les contrats d’assurance couvrant les personnes physiques en dehors de leurs activités
professionnelles : la date limite d'exercice par l'assuré du droit à dénonciation du contrat doit
être rappelée avec chaque avis d'échéance annuelle de prime ou de cotisation1003. Dès lors et
« puisque l’immense majorité de ces contrats sont conclus à distance, la faculté de

1001
Loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 dite loi CHATEL.
1002
LEVENEUR L., Une nouvelle loi de « protection » des consommateurs, Contrats – Concurrence –
Consommation, mars 2005, p.3 ; CLARET H., La loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 tendant à conforter la
confiance et la protection du consommateur, JCP G, 1er juin 2005, n° 22, p. 1001.
1003
Si l’assureur adresse l’avis au consommateur moins de 15 jours avant la date limite ou s’il avait la bonne
idée de le lui envoyer postérieurement à cette date, l'assuré devra être informé avec cet avis qu'il dispose d'un
délai de 20 jours suivant la date d'envoi de cet avis pour dénoncer la reconduction du contrat. Si l’assureur omet
purement et simplement d’informer le consommateur (assuré) conformément au nouvel article du Code des
assurances, celui-ci pourra mettre un terme au contrat, sans pénalités, à tout moment à compter de la date de
reconduction en envoyant une lettre recommandée à l'assureur.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 337
et financiers en ligne

rétractation que prévoit le code en la matière semble pouvoir être utilisée en suite de la
reconduction »1004. Cela démontre « que le droit des contrats de consommation conclus à
distance converge avec le dispositif général prévu par la loi Chatel pour éviter que le
consommateur demeure prisonnier d’une relation contractuelle dont il ne souhaitait pas le
renouvellement »1005.

662. En droit interne. Ce principe d’interdiction de vente forcée est déjà établi par le droit
français. L’article L122-3 du Code de la consommation1006 précise que « la fourniture de
biens ou de services sans commande préalable du consommateur est interdite lorsqu'elle fait
l'objet d'une demande de paiement ». Il est, pour ainsi dire, déjà transposé en droit français.
La jurisprudence également admet depuis un certain temps qu’en matière de consommateur,
le silence ne vaut pas acceptation1007. Dans le domaine particulier des services bancaires et
financiers et à la lumière du droit de la concurrence, le Professeur T. BONNEAU relève que
les dispositions du Code de commerce relatives aux concentrations bancaires sont applicables
a priori aux établissements de crédit. En revanche, il n’en va pas de même pour les autres
règles du droit de la concurrence (vente avec prime, refus de vente) vu que l’article L.511-4
du Code monétaire et financier ne mentionne que les opérations de banque ; ces autres
dispositions ne sont donc pas applicables aux établissements de crédit en ce qui concerne les
opérations de banque et les opérations connexes1008. C’est en réalité, note l’auteur, le Code
monétaire et financier, lui-même, qui, dans son article L.312-1-2 (alinéas 1 et 2), interdit en
principe les ventes groupées et la vente avec prime1009 faisant échos aux articles L.121-35 et
L.122-1 du Code de la consommation ; la notion de client diffère simplement de celle de
consommateur.

1004
STOFFEL-MUNCK P., L’encadrement de la tacite reconduction dans les contrats de consommation depuis
la loi Chatel, L. n° 2005-67, 28 janv. 2005, JCP G, 6 avril 2005, n°14, p. 669.
1005
Ibid.
1006
Issu de l’ordonnance nº 2001-741 du 23 août 2001 transposant la directive 97/7/CE.
1007
Depuis Cass. civ., 25 mai 1870, DP 70.1.257, S, 70.1.341, Grands arrêts, n°84.
1008
BONNEAU T., op. cit., n°221, pp. 140-141.
1009
BONNEAU T., Des nouveautés bancaires et financières issues de la loi n°2001-1168 du 11 décembre 2001
portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, JCP E, 2002, 120, spéc. n°7 ; SAINT-
ALARY B., Le nouveau dispositif sur les ventes groupées et les ventes à prime doit-il inquiéter les banques ?,
Banque et droit, n°82, mars-avril 2002, 12.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 338
et financiers en ligne

C. Le régime des communications commerciales non sollicitées1010

663. Directive de 2002. Comme la directive sur les contrats à distance, la directive sur les services
financiers à distance prévoit une disposition visant à réglementer l’envoi de communications
commerciales non sollicitées, en faisant une distinction selon les techniques utilisées (art. 10).
Il est à cet effet interdit d’envoyer des communications commerciales non sollicitées au
consommateur par fax ou par un système automatisé d’appel téléphonique sans intervention
humaine. Dans ce cas, le consentement préalable du consommateur (opt-in) est indispensable.
Pour les autres techniques de communication à distance, la directive laisse aux Etats membres
le choix entre l’interdiction des communications commerciales non sollicitées sans
consentement préalable (opt-in) ou l’autorisation de telles communications sauf opposition
manifeste du consommateur (opt-out). L’ordonnance de 2005, quant à elle, unifie
opportunément le régime sur les communications non sollicitées en soumettant les services
financiers1011 à l'article L. 34-5 du Code des postes et communications électroniques.

664. Directive de 2000. De son côté, la directive sur le commerce électronique laissait également
le choix aux Etats membres entre l’opt-in ou l’opt-out pour l’envoi de communications
commerciales non sollicitées par courrier électronique, en exigeant seulement que ces
dernières puissent être identifiées de manière claire et non équivoque dès leur réception par le
destinataire (art. 7, § 1er). En outre, pour les pays qui auraient choisi l’opt-out, la directive sur
le commerce électronique demande qu’ils prennent des mesures pour garantir que les
prestataires envoyant de tels messages respectent la volonté des personnes physiques ne
souhaitant pas recevoir ce type de communication et consultent régulièrement les registres
opt-out constitués à cet effet (art. 7, § 2).

665. Directive vie privée et LEN. Entre temps, l’envoi de communications commerciales non
sollicitées par courrier électronique a été explicitement interdit par la directive vie privée et
communications électroniques1012, mettant fin au libre choix laissé aux Etats membres en ce
qui concerne cette technique de communication particulière. Par ailleurs, la loi pour la

1010
DENOEUD A., les communications commerciales électroniques non sollicitées, mémoire DESS Droit du
Numérique et des nouvelles Techniques, septembre 2004.
1011
Article L121-20-14 al. 1 du Code de la consommation.
1012
Directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement des
données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques
(directive vie privée et communications électroniques).
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 339
et financiers en ligne

confiance dans l’économie numérique1013 a clairement pris le parti de l’opt in, c’est-à-dire
avec le consentement du destinataire. Elle entend donc lutter contre le « spamming1014 » et la
publicité sauvage de sorte qu’il n’est plus possible en France, sous réserve du délai de
transition accordé par la loi, d’envoyer une publicité non sollicitée à un consommateur1015,
fût-elle relative à un service financier.

666. Le rôle ambigu de la CNIL. Il est à noter que la CNIL semble revenir, dans une séance du
17 février 2005, sur la position qu’elle avait adoptée concernant l’envoi de courriel non
sollicité vers une adresse nominative professionnelle. Cédant aux professionnels de l’e-
mailing1016, elle fait une interprétation particulièrement audacieuse de l’article L. 34-5 du
Code des postes et télécommunications1017 : si le courriel est adressé à la personne en raison
de sa fonction (et pour un produit ou service qui la concerne), le régime de l’opt-in est
écarté1018. Ainsi, la CNIL ne va pas dans le sens souhaité par le groupe de travail sur la
protection des données1019

D. Les voies de recours

667. Moyens adaptés. Les Etats membres doivent veiller à ce qu’il existe des moyens adéquats et
efficaces pour assurer le respect de la directive dans l’intérêt du consommateur, notamment
sous forme de recours judiciaires ou administratifs (art. 13, § 1er). Dans cette optique, ils
doivent notamment permettre de saisir les tribunaux (art. 13, § 2) à des organismes publics, à
des organisations de consommateurs ou à des organisations professionnelles ayant un intérêt
légitime à agir.

1013
PATIN J.-C., LCEN et CNIL : quelle comptabilité ?, 14 mars 2005, disponible sur : www.legalbiznext.com
1014
Equipe de Recherche Créations immatérielles et Droit (ERCIM), VIVANT M. (sous la responsabilité de),
Droit de l’Internet, JCP E, n°4, 22 janvier 2004, chron, p.123.
1015
OMARJEE S., l’évolution du droit de l’Internet, 9 septembre 2004, disponible sur : http://www.clic-
droit.com/web/editorial/article.php?art_id=294°; VIOSSAT S., démêler les fils de la LEN, 6 octobre 2004,
disponible sur : http://www.01net.com/article/252278.html.
1016
GARLIN-FERRARD O., Interprétation réaliste par la CNIL de la LCEN dans le cadre du B to B, 24 mars
2005, disponible sur : www.clic-droit.com/web/editorial/imprimer.php?art_id=325.
1017
VERBIEST T., Pas d’opt-in pour les courriels envoyés vers une adresse nominative professionnelle, 24 mars
2005, disponible sur : www.journaldunet.com/juridique/juridique050324.shtml.
1018
Quid alors des gérants qui cumulent généralement toutes les fonctions dans l’entreprise ?
1019
Groupe de travail sur la protection des personnes à l’égard du traitement des données à caractère personnel
établi par la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995, Avis 5/2004 portant sur les communications de prospection
directe non sollicitées selon l’article 13 de la Directive 2002/58/CE, 27 février 2004, p.9.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 340
et financiers en ligne

668. Autorité de contrôle. De plus, les Etats membres doivent prendre « les mesures nécessaires
pour que, lorsqu'ils sont en mesure de le faire, les opérateurs et fournisseurs de techniques de
communication à distance mettent fin aux pratiques déclarées non conformes à la directive
sur la base d'une décision de justice, d'une décision administrative ou d'une décision rendue
par une autorité de contrôle qui leur est notifiée » (art. 13, § 3). Dans le cadre des réseaux
numériques, une telle disposition concerne les prestataires intermédiaires (fournisseurs
d’accès ou hébergeurs), qui pourraient ainsi être requis de bloquer l’accès à un site Web
portant atteinte à la directive, sur injonction d’un juge, d’un organe administratif ou d’une
autorité de contrôle.

669. Modes alternatifs de résolution. Les Etats membres doivent également encourager
l’instauration ou le développement de procédures extrajudiciaires de résolution des litiges de
consommation concernant la fourniture de services financiers à distance. Ils doivent
notamment inciter les organes chargés du règlement extrajudiciaire de tels litiges à coopérer
pour résoudre les litiges transfrontières (art. 14). Il s’agit clairement d’une promotion du
réseau FIN-NET1020. Ce principe trouve également un écho en droit bancaire dans les
dispositions de la loi MURCEF1021, les établissements de crédit devant désigner un médiateur
« impartial » chargé de recommander des solutions aux litiges. A ce titre, on peut se
demander si ces mesures ne sont pas en train d’être détournées par les établissements de
crédit. En effet, leur objectif premier est de permettre et de favoriser l’accès à un règlement
extrajudiciaire des litiges ; or la plupart des établissements ont institué une charte dans
laquelle ils précisent les conditions d’accès à ce médiateur. Dans la totalité des cas, le litige
doit d’abord être porté devant le responsable du service (d’où le litige est né) puis devant le
directeur d’agence ; ensuite, il convient de saisir le service contentieux (régional ou national)
avant de pouvoir enfin faire appel au médiateur. Il semble que la procédure soit fort longue
pour accéder à une personne impartiale…

E. Autres mesures

670. Les sanctions à l’égard du fournisseur. En cas de non-respect par le fournisseur des règles
nationales adoptées en application de la directive, les Etats membres doivent prévoir des

1020
Pour mémoire, ce réseau vise notamment à faciliter la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation
dans le cas où le prestataire de services est établi dans un autre État membre que celui où réside le
consommateur. Il a été lancé par la Commission européenne le 1er février 2001.
1021
Loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 341
et financiers en ligne

sanctions appropriées, effectives, proportionnées et dissuasives (art. 11). À cet effet, ils
peuvent notamment prévoir que le consommateur peut résilier le contrat à tout moment, sans
frais et sans pénalité.

671. Le caractère impératif des dispositions de la directive. L’article 12 prévoit que le


consommateur ne peut renoncer aux droits qui lui sont conférés en vertu de la directive. En
d’autres termes, même si les parties choisissent la loi d’un Etat tiers pour régir le contrat, les
Etats membres doivent faire en sorte que le consommateur ne puisse être privé de la
protection accordée par la directive, si le contrat présente un lien étroit avec le territoire d’un
ou plusieurs Etats membres.

672. La charge de la preuve. Les Etats membres peuvent prévoir que la charge de la preuve pèse
sur le fournisseur, pour établir le respect de ses obligations d’information du consommateur,
ainsi que l’existence du consentement du consommateur à la conclusion du contrat et à son
exécution (art. 15, § 1er). La directive considère enfin comme abusive « toute clause
contractuelle prévoyant que la charge de la preuve du respect par le fournisseur de tout ou
partie des obligations que lui impose la présente directive incombe au consommateur » (art.
15, § 2). C’est sans doute sur ce point que l’Internet et les moyens techniques dont il dispose
peuvent venir au secours des établissements de crédit, mais plus généralement au service des
opérations bancaires et financières en facilitant la mise en œuvre des exigences légales.

673. L’archivage des contrats : La LEN impose au professionnel dans le cadre de sa relation avec
un consommateur, l’archivage électronique de certains contrats noués en ligne. Cette
obligation est énoncée à l’article 134-2 du Code de la consommation (art. 27 de la LEN)
disposant que « lorsque le contrat est conclu par voie électronique et qu’il porte sur une
somme égale ou supérieure à un montant fixé par décret, le contractant professionnel assure
la conservation de l’écrit qui le constate pendant un délai déterminé par ce même décret et en
garantit à tout moment l’accès à son cocontractant si celui-ci en fait le demande ». La mise
en place de cette disposition fut concrétisée par le décret du 16 février 20051022 qui a instauré
le régime juridique de l’archivage. En vertu de ce texte d’application immédiate, tout contrat
d’un montant dépassant le seuil de 120 € doit être conservé sur support électronique, pour une
durée de dix ans à compter de sa conclusion s’il est d’exécution immédiate. « Ce délai

1022
Décret n° 2005-137 du 16 février 2005 pris pour l'application de l'article L. 134-2 du code de la
consommation.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 342
et financiers en ligne

correspond, ni plus ni moins, au délai de droit commun de l’article L.110-4 du Code de


commerce relatif à la prescription des obligations nées entre commerçants et non-
commerçants »1023. Dans le cas contraire, le délai court à compter de la conclusion du contrat
jusqu'à la date de livraison du bien ou de l'exécution de la prestation et pendant une durée de
dix ans à compter de celle-ci.

1023
BELLOIR P., Promulgation du décret du 16/10/2005 sur l’archivage des contrats conclus par voie
électronique, 23 février 2005, disponible sur : www.juriscom.net .
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 1 – La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires 343
et financiers en ligne

CONCLUSION

674. Le cadre juridique. L’ensemble des textes applicables, et en premier lieu la directive de
2002, établissent et délimitent un cadre juridique cohérent des services financiers fournis en
ligne. L’articulation entre les différentes directives ne présente pas de difficultés particulières
et le contour des droits et obligations, tant du consommateur que du fournisseur de services
financiers, est relativement bien déterminé en droit interne par l’ordonnance du 6 juin 2005
comme par la LEN.

675. Langue française. Ce régime de protection du consommateur est complété par d’autres
mesures nationales. Quelle plus grande sécurité pour le consommateur que de lui garantir la
compréhension des offres étrangères ? Aujourd’hui, l’obstacle de la langue est bien présent
sur l’Internet ; les sollicitations d’établissements de crédit étrangers peuvent effectivement
être plus avantageuses que celles proposées en France, mais si le consommateur ne peut les
comprendre, tous les efforts accomplis resteront lettre morte. La loi Toubon1024 et surtout ses
modifications envisagées1025, oeuvrent à la protection du consommateur français et au
développement du commerce électronique transfrontalier en France.

676. Harmonisation européenne et sécurité du consommateur français. La crainte principale,


quand on évoque la question de l’harmonisation européenne par rapport à la législation
française, est l’harmonisation à la baisse. Or dans le cadre des dispositions législatives
européennes relatives aux services financiers en ligne, force est de constater que
l’harmonisation se fait plutôt par le haut (quantité et qualité de l’information
précontractuelle), suivant les standards français (délai de rétractation de 14 jours déjà présent
dans notre droit1026…). De ce point de vue, le consommateur investisseur français ne peut que
s’en trouver rassuré. La directive de 2002 et sa transposition dans le Code de la
consommation remplissent donc bien leur rôle et, assurent suffisamment la protection du
consommateur.

1024
Loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française.
1025
Le Forum des droits sur l’Internet, Langue française – Le sénat s’interroge sur l’usage de la langue française
sur Internet, actualités du 31 octobre 2005, disponible sur : www.foruminternet.org
1026
En cas de démarchage.
CHAPITRE 2

L’ARTICULATION DES DIRECTIVES « COMMERCE


ELECTRONIQUE » ET « SERVICES FINANCIERS A DISTANCE »

677. Hypothèse de départ. La réussite d’un marché intégré des services financiers passe par la
confiance de ses acteurs. Si, d’un côté, il parait souhaitable qu’un établissement de crédit
puisse proposer ses produits et services financiers dans tous les Etats membres,
réciproquement, le consommateur d’un Etat membre doit, lui aussi, logiquement, pouvoir
« accéder sans discrimination à l’éventail le plus large possible de services financiers
disponibles »1027. Il en résultera conséquemment une concurrence exacerbée entre les
différents prestataires, ce qui ne peut qu’engendrer une situation favorable pour l’investisseur
consommateur.

678. Une question d’objectif. En réalité, de ces deux propositions émanent deux textes. A
l’analyse, la directive sur le commerce électronique apparaît plus favorable au prestataire –
établissement de crédit – en ce qu’elle lui permet de proposer ses produits et services
financiers sur la base de la réglementation de son pays d’origine. La directive sur les services
financiers à distance, postérieure, vient au contraire renforcer et harmoniser a maxima1028 la
protection des consommateurs investisseurs, exclus jusque là, d’une manière générale, de la
protection accordée au consommateur cocontractant d’un contrat à distance1029. En résumé, à
chaque objectif communautaire correspond son texte. La réalité est pourtant plus complexe
car nous pouvons déjà relever que la loi applicable aux opérations financières à distance sera
principalement celle du fournisseur et l’impossibilité pour un Etat, concernant certaines
mesures, de prendre des dispositions plus contraignantes risque d’être défavorable au
consommateur.

679. Autres législations spéciales. Si l’on s’en réfère au considérant 14 de la directive de 2002,
celle-ci couvre tous les services qui peuvent être fournis à distance. Néanmoins, s’agissant de

1027
Considérant 3 de la directive 2002/65/CE.
1028
Le considérant 13 précise en effet que les Etats ne devraient pas pouvoir prévoir d’autres dispositions sauf
clause expresse de la directive, ce qui est le cas pour l’article 4 concernant les exigences supplémentaires en
matière d’information.
1029
Directive 97/7/CE concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 345
financiers à distance »

prestation de services financiers sur l’Internet, compte tenu du champ d’application de la


directive de 2002, d’autres textes ont vocation à contribuer au cadre juridique des services
financiers en ligne.

680. Articulation : problématique. Partant du principe que la directive « commerce


électronique » est applicable aux services financiers, la question de l’articulation1030 entre les
différents textes appelle naturellement celle de la protection de l’investisseur face à l’offre de
l’établissement de crédit1031. A notre stade, la question essentielle est celle de la cohérence du
système juridique mis en place devant la diversité des normes européennes et, par suite, celle
de leur transposition. En premier lieu, la directive de 2002 complète le cadre juridique des
services financiers en ligne issu de la directive de 2000 : il en résulte une première articulation
des deux directives, entre elles (section 1) ; en second lieu, ce bloc de directives recoupe les
champs d’application respectifs d’autres bases textuelles : une seconde articulation doit être
opérée, celle des deux directives avec ces autres textes (section 2).

Section 1. L’articulation des deux directives entre elles

681. Plan. La directive de 2002 complète incontestablement le cadre initié par la directive sur le
commerce électronique, dans la mesure où, s’agissant de services financiers en ligne, ces deux
textes seront susceptibles de s’appliquer, parce que l’Internet est par nature un mode de
communication à distance. L’essentiel est alors de savoir s’il existe un conflit entre ces deux
directives : dans le cadre des services financiers sur l’Internet, la sécurité juridique est-elle
assurée ? ces deux textes sont-ils compatibles ou pas ? Pour cela, l’analyse du champ
d’application de la directive de 2002 paraît, primordiale (§1) ; elle précédera l’examen
proprement dit des recoupements entre ces deux directives (§2).

§ 1. Champ d’application de la directive de 2002

682. Un champ d’application propre. Les services financiers étaient, jusque là, les grands
absents de la réglementation européenne des opérations à distance ; la directive du 23
septembre 2002 dote enfin, ces prestations d’une réglementation spéciale, dont le champ

1030
GOURIO A., art. préc., p. 136.
1031
Cf. Chap. 1, supra n° 621 et s.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 346
financiers à distance »

d’application leur serait propre. Les champs d’application ratione materiae (A) et ratione
personae (B) doivent être regardés à travers la directive 97/7/CE, compte tenu des bases
communes qu’elle présente avec celle de 2002, c’est-à-dire les consommateurs et les contrats
à distance.

A. Champ d’application ratione materiae

683. Les similitudes. La directive de 2002 reprend assez fidèlement dans son article 2 les
définitions que la directive de 1997 avait elle-même consacrées dans le même article : les
notions de contrat à distance, de consommateur, de fournisseur, de technique de
communication à distance et d’opérateur se retrouvent dans la directive de 2002, assorties de
quelques modifications. En revanche, deux nouvelles définitions apparaissent : celle de
service financier et celle de support durable. Plus particulièrement, concernant son champ
d’application, quelques remarques doivent être faites quant aux notions de services financiers
(a) et de contrats à distance (b).

a. Les services financiers

684. Définition. Comme le relève le Professeur O. CACHARD, « la directive est consacrée à une
catégorie juridique jusqu’alors inconnue, les services financiers1032 ». Au sens de l’article 2,
b de la directive 2002/65/CE, un service financier est « tout service ayant trait à la banque, au
crédit, à l'assurance, aux retraites individuelles, aux investissements et aux paiements ». On
peut dès à présent noter que cette définition adopte une conception particulièrement large des
services financiers ; en effet, elle paraît englober non seulement celle donnée par l’article
L.311-1 du Code monétaire et financier (opérations de banque1033), mais aussi une partie des
opérations connexes mentionnées à l’article L.311-2 du même code1034. En revanche, à la
différence de la directive, le Code monétaire et financier n’inclut pas dans ses définitions
l’assurance ni les retraites individuelles qui par ailleurs relèvent d’autres codes. Selon le
même auteur, « cette généralisation est possible en raison de l’objet finalement assez étroit
de la directive : il s’agit simplement de réglementer « la commercialisation à distance » et

1032
CACHARD O., La directive « services financiers » et l’harmonisation du droit des contrats à distance, 30
octobre 2002, article sur le site du CEJEM, disponible sur : http://www.cejem.com.
1033
« Les opérations de banque comprennent la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que
la mise à la disposition de la clientèle ou la gestion de moyens de paiement ».
1034
La directive vise les « investissements » tandis que le Code monétaire et financier envisage « le placement, la
souscription, l'achat, la gestion, la garde et la vente de valeurs mobilières et de tout produit financier ».
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 347
financiers à distance »

non de réglementer la substance des différents éléments de la catégorie des « services


financiers »1035 ». Ainsi, l’ordonnance du 6 juin 2005 transposant la directive de 2002 n’a pas
bouleversé les conceptions nationales et a opéré certaines modifications dans les codes
monétaire et financier, des assurances, de la mutualité et de la sécurité sociale.

685. Quels services financiers ? La directive de 2002 couvre tous les services financiers. Certains
sont cependant régis par des dispositions spécifiques de la législation communautaire,
lesquelles continuent à s’appliquer. Par conséquent, ces services seront soumis à la fois aux
législations sectorielles, régissant ce type d’opération, et à la directive régissant la
commercialisation à distance des services financiers1036 ; on pense par exemple au crédit à la
consommation réglementé par la directive de 19871037 (notamment dans ses dispositions
relatives au TAEG) ou bien au crédit immobilier.

686. Les prestations successives. L’article 1er, § 2 de la directive de 2002, apporte une précision
quant aux contrats à prestations successives. En effet, un même contrat comportant des
prestations successives échelonnées dans le temps peut recevoir des qualifications juridiques
différentes d’un Etat membre à l’autre. Ainsi, certaines prestations peuvent être considérées
par le droit d’un Etat membre comme un simple acte d’exécution du contrat, alors que dans
d’autres Etats membres il s’agirait de contrats à part entière. Malgré ces différences de
régime, il importe que la directive soit appliquée de la même manière dans tous les Etats
membres. A cette fin, l’article 1er, § 2, précise que « pour les contrats comportant une
première convention de service suivie d'opérations successives, les dispositions de la directive
ne s’appliquent qu’à la première convention ». L’exemple fourni par le considérant 17 de la
directive de 2002 est assez explicite : « on considère qu'une première convention de service
peut être constituée, par exemple, par l'ouverture d'un compte bancaire, l'acquisition d'une
carte de crédit ou la conclusion d'un contrat de gestion de portefeuille et que les opérations
peuvent être constituées, par exemple, par le dépôt ou le retrait de fonds sur ou à partir du

1035
CACHARD O., art. préc.
1036
Cf. considérant 14 de la directive.
1037
La directive 87/102/CEE du Conseil du 22 décembre 1986 relative au rapprochement des dispositions
législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation, déjà
modifiée en 1990 et 1998 devrait prochainement être abrogée et remplacée par une nouvelle directive dont la
dernière proposition modifiée date du 28/10/2004. Il s'agit notamment de restreindre le champ d'application,
d'introduire des régimes allégés pour certains types de contrats de crédit et de supprimer certaines dispositions
déjà couvertes par le droit communautaire ou traitées de façon satisfaisante au niveau national. La proposition
devrait introduire la notion de “crédit lié”, ainsi qu'une version revue de la méthode de calcul du TAEG, et porter
sur les exigences en matière d'information précontractuelle et contractuelle.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 348
financiers à distance »

compte, le paiement au moyen d'une carte de crédit ou les opérations effectuées dans le cadre
d'un contrat de gestion de portefeuille. Le fait d'ajouter de nouveaux éléments à une première
convention, comme, par exemple, la possibilité d'utiliser un instrument de paiement
électronique en liaison avec son compte bancaire, ne constitue pas une opération, mais une
convention complémentaire à laquelle s'applique la présente directive. La souscription de
nouvelles parts du même organisme de placement collectif est considérée comme étant une
opération parmi des opérations successives de même nature ». L’opportunité de ce choix
n’est pas à remettre en cause et semble en adéquation avec notre droit, notamment vu la
convention de compte. C’est d’ailleurs en ces mêmes termes que l’article L. 121-20-9 du
Code de la consommation réglemente l’information précontractuelle en cas d’opérations
successives. Néanmoins, la directive fait clairement de la convention une subdivision du
contrat, alors que notre droit enseigne le contraire1038 ; la convention de compte, convention
cadre de services bancaires1039, sert de base à la relation entre l’établissement de crédit et son
client. La transposition devait donc inverser l'ordre de ces notions pour tenir compte de la
nomenclature du droit civil français. Pourtant, elle fait preuve d’ambiguïté en employant la
formule « pour les contrats portant sur des services financiers comportant une première
convention de service suivie d'opérations successives ou d'une série d'opérations distinctes »,
ce qui sous-entendrait que le « contrat » est le contenant… Il n’en reste pas moins qu’il ne
doit pas être fait d’amalgame entre les opérations directement issues de la convention de
compte et d’autres opérations autonomes comme le crédit. En effet, une information globale
(voire exhaustive) donnée a priori à l’investisseur sur l’ensemble des « services financiers »
au sens de la directive de 2002 ne serait pas conforme aux objectifs d’information et de
protection du consommateur en droit interne.

b. Les contrats à distance

687. Une définition unifiée des contrats à distance. Aux termes de l’article 2, a de la directive de
2002, un contrat à distance est celui qui est conclu « dans le cadre d’un système de vente ou
de prestations de service à distance organisé par le fournisseur, qui, pour ce contrat, utilise
exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à, et y
compris, la conclusion du contrat ». On retrouve ici, quasiment mot pour mot, la définition

1038
Selon l’article 1101 du Code civil, le contrat est une convention. Il en résulte que « toute convention … n’est
pas un contrat », TERRE F., SIMLER P. et LEQUETTE Y., op. cit., p. 40, n° 45 et s.
1039
BONNEAU, Droit bancaire, op. cit., p. 211, n°327.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 349
financiers à distance »

donnée par la directive 97/7/CE1040, ce qui est souhaitable pour assurer la cohérence des
différents régimes juridiques. Cette notion de contrat à distance ne posera, semble-t-il, pas de
problème particulier dans la mesure où l’ordonnance du 23 août 20011041 a déjà intégré cette
même définition dans l’article L.121-16 du Code de la consommation.

688. Une opération entièrement à distance. Pour que la directive de 2002 s’applique, il faut
encore que toute la relation entre l’établissement de crédit et l’investisseur - consommateur se
déroule à distance, jusqu’à la conclusion du contrat elle-même. En revanche, si par exemple,
l’offre est envoyée par courrier électronique, mais que le contrat est conclu « face à face », la
directive ne trouverait pas à s’appliquer. En outre, la conclusion du contrat doit s’opérer dans
le cadre d’un « système organisé » de vente à distance. Cela suppose que le fournisseur ait
mis en place tout un processus permettant la négociation et la conclusion de ces contrats de
manière organisée et habituelle. Sont donc logiquement exclues « les prestations de services
effectuées sur une base strictement occasionnelle et en dehors d'une structure commerciale
dont le but est de conclure des contrats à distance »1042 .

689. Un champ d’application dépassant l’Internet. Enfin, signalons que la directive ne


s’applique pas uniquement aux contrats conclus par le biais des réseaux numériques (sur le
Web ou par échange de courriers électroniques) mais à tous les contrats conclus à distance,
c’est-à-dire sans que les parties soient en présence l’une de l’autre. Rappelons qu’une
technique de communication à distance est, d’après l’article 2, e, « tout moyen qui, sans qu'il
y ait présence physique et simultanée du fournisseur et du consommateur, peut être utilisé
pour la commercialisation à distance d'un service entre ces parties ». Sont ainsi visées toutes
les techniques de communication à distance, quelles qu’elles soient : téléphone, fax, courrier
postal, SMS, WAP, e-mail, Internet… En outre, peu importe que la technique utilisée soit la
même tout au long du processus de conclusion du contrat. Ainsi on peut envisager que la
publicité soit envoyée par fax, que le consommateur intéressé visite le site Web d’un
établissement de crédit, puis que le contrat lui soit adressé par la poste pour qu’il le signe ; cet
envoi n’oeuvrerait pas pour la rapidité des transactions financières mais aurait certainement
l’avantage de rassurer le consommateur.

1040
Art. 2, 1 de la directive sur les contrats à distance.
1041
Ordonnance 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires et adaptation au
droit communautaire en matière de droit de la consommation.
1042
Considérant n° 18 de la directive.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 350
financiers à distance »

B. Le champ d’application ratione personae

690. La nécessité d’un consommateur. La directive de 2002 ne concerne que les relations entre
un fournisseur et un consommateur. Ces règles ne s’appliquent dès lors pas aux rapports entre
professionnels. L’article 2, c de la directive définit le fournisseur comme « toute personne
physique ou morale, publique ou privée, qui, dans le cadre de ses activités commerciales ou
professionnelles, est le fournisseur contractuel des services faisant l'objet de contrats à
distance ». Cette définition diffère quelque peu de celle que donne la directive 97/7/CE,
principalement en ce qu’elle ne distingue pas les personnes publiques ou privées. Toujours
est-il que la directive et les dispositions du Code de la consommation devraient également
s'appliquer lorsque l’une des étapes de la commercialisation se déroule avec la participation
d'un intermédiaire (agent, courtier…)1043 de sorte qu’il ne serait possible, par un schéma de
distribution alambiqué, de contourner les dispositions impératives de la directive.

691. Complexité de la notion de consommateur. Un consommateur est, selon l’article 2, d,


« toute personne physique qui, dans les contrats à distance, agit à des fins qui n'entrent pas
dans le cadre de son activité commerciale ou professionnelle ». Là encore, la directive de
2002 reprend la définition retenue par la directive 97/7/CE. Pourtant, il pourra en résulter
quelques problèmes classiques d’interprétation. En effet, la jurisprudence et les textes français
paraissent, en la matière, moins exigeants que leurs homologues européens. Si la loi de 1978
avait assimilé au consommateur le non professionnel, la notion de consommateur en droit
français a fait l'objet d'hésitations doctrinales1044 et jurisprudentielles1045 1046 1047
. La Cour de

1043
Comme le précise le considérant 19 : « eu égard à la nature et au degré de cette participation, les
dispositions pertinentes de la directive devraient s'appliquer à cet intermédiaire, indépendamment de son statut
juridique ».
1044
CORNU G., Rapport sur la protection du consommateur et l’exécution du contrat en droit français, Trav.
Assoc. CAPITANT H., t.24 1973, D. 1975, p. 31 et s. ; MALINVAUD Ph., La protection des consommateurs ;
D. 1981, chron. p. 49 ; PLAISANT G., Essai sur la notion de consommateur, JCP 1993, I, 3655 ; BERLIOZ G.,
Droit de la consommation et droit des contrats, JCP 1979, I, 2954, ; PIZZIO J.P., L’introduction de la notion de
consommateur en droit français, D. 1982, chron. p 91.
1045
Pour la conception stricte selon laquelle le consommateur est un particulier : Cass. 1ère civ., 15 avril 1986,
Bull. civ. I, n°90, p. 91, Rép. Defrénois 1986, p. 787, obs. AUBERT J.-L., RTD civ. 1987, p. 86, obs.
MESTRE J.
1046
La Cour a ensuite adopté une conception plus large : Cass. 1ère civ. 28 avril 1987, Cass. 1ère civ. 3 mai 1988,
Bull. civ. I, n°125, p. 87, D. 1990, p. 61 note KARILA DE VAU, D. 1988, SC p. 407, obs. AUBERT J.-L., Cass.
1ère civ. 25 mai 1995, Bull. civ. I, n°162, p. 111, D. 1993, p.97 note NICOLEAU G., JCP 1993, I. 3655, annexe,
Cass. 1ère civ. 6 janvier 1993, Contrats conc., consom., 1993, n°62.
1047
La Cour a semblé revenir à sa première conception ; le fait qu’un contrat ait été signé entre deux
professionnels suffit à exclure le demandeur du bénéfice de la protection des consommateurs : Cass. 1ère civ. 24
novembre 1993, JCP 1993, II, 22334, note LEVENEUR L., Rép. Defrénois 1994, art. 35891, obs. MAZEAUD
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 351
financiers à distance »

cassation avait estimé que le professionnel ne peut bénéficier de la protection accordée au


consommateur, dès lors que les contrats qu’il signe ont un « rapport direct » avec son
activité1048. Plus récemment la Cour suprême a jugé que le domaine d’application de l’article
L. 312-1 du Code de la consommation relatif aux clauses abusives, n’est pas fondé sur la
distinction entre personne physique et personne morale mais plutôt sur la notion d’activité
professionnelle1049. Pour sa part, la CJCE a décidé que « la notion de consommateur telle que
définie à l'art. 2, sous b) de la directive n° 93/13/CEE du Conseil , du 5 avril 1993,
concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être
interprétée en ce sens qu'elle vise exclusivement des personnes physiques1050 ». Dans le cas
d’un acte mixte où une personne conclut un contrat à la fois pour ses besoins professionnels et
personnels, la Cour européenne applique aussi le droit de la consommation, à la condition
toutefois que la part d’activité professionnelle soit insignifiante, par rapport aux besoins
personnels satisfaits dans le contrat1051. L’on pourrait espérer avec le Professeur
G. RAYMOND « qu’il y ait une harmonisation communautaire sur une définition du champ
d’application du droit de la consommation par le moyen d’une directive générale… Peut-être
la notion de finalité de l’opération, référence de plus en plus fréquente en droit français
(cause du contrat), pourrait-elle être utilisée1052 ».

692. Consommateur et habitude. Le texte de 2002, à la différence de celui de 1997, rajoute une
distinction entre l’activité commerciale et professionnelle. Concernant la notion de
consommateur, un second écart semble donc se former entre le droit communautaire et le
droit français du fait de la nouvelle distinction introduite par la directive : en droit interne, si
une activité professionnelle n’est pas nécessairement commerciale1053, une activité
commerciale pourrait-elle ne pas être professionnelle ? On peut sérieusement en douter, une

D., Cass. 2ème civ. 2 février 1994, D. 1994, som., com., p. 236, obs. PAISANT G., Cass. com. 10 mai 1994,
contrats, concurrence, consommation, 1994, n°155, obs. LEVENEUR L., Rép. Defrénois 1995, p.347, obs.
MAZEAUD D., Cass. 1ère civ. 21 février 1995, JCP 1995, II, 22502, note PAISANT G. décidant que le contrat
signé par un commerçant pour le besoins de son commerce ne donne pas lieu à la protection accordée aux
consommateurs.
1048
Cass. 1ère civ. 24 janvier 1995, D. 1995.327, note PAISANT G., contrats, concurrence, consommation 1995,
n°84, obs. LEVENEUR L. ; 3 et 30 janvier 1996, D. 1996.228, note PAISANT G., JCP 1996, II, 22654, note
LEVENEUR L., 1996, I, 3929, n°1, obs. LABARTHE F., Rép. Defrénois 1996.766, obs. MAZEAUD D.
1049
Cass. 1ère civ., 15 mars 2005, Contrats conc. consom., mai 2005, p. 31, note RAYMOND G.
1050
CJCE, 22 nov. 2001.
1051
CJCE, 20 janvier 2005, Contrats conc. consom., mai 2005, p. 31, note RAYMOND G.
1052
RAYMOND G., note précitée.
1053
L’activité peut être artisanale, voire libérale.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 352
financiers à distance »

« activité » étant par définition habituelle donc professionnelle1054. Le critère de l’habitude


est, ainsi, déterminant de la qualité de professionnel (et de son immatriculation en tant que
tel) ; par exemple, l’article L.519-1 du Code monétaire et financier indique qu’est
« intermédiaire en opérations de banque toute personne qui, à titre de profession habituelle,
met en rapport les parties intéressées à la conclusion d'une opération de banque, sans se
porter ducroire ». Plus encore, l’alinéa 1 de l’article L.515-5 du Code monétaire et financier,
instituant le monopole bancaire1055, interdit « à toute personne autre qu’un établissement de
crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel ». A reprendre les exigences
jurisprudentielles françaises (le rapport direct avec l’activité) au regard du critère de
l’habitude1056 en droit bancaire1057, le consommateur devient, par syllogisme, la personne qui
n’effectue pas des opérations de banque (réception des fonds, opérations de crédit, moyens de
paiement) à titre habituel. Serait-ce à dire qu’une personne exerçant en ligne de telles
opérations, à titre occasionnel, ne tomberait pas sous l’interdiction de l’article L. 515-5 ?
Comme le souligne le Professeur T. BONNEAU « toute opération occasionnelle n’est pas
possible […] l’alinéa 2 de l’article L515-5 renforce le monopole quant aux dépôts à vue ou à
moins de deux ans de terme »1058. Cette disposition se cantonne néanmoins à l’interdire pour
toute entreprise et non toute personne (comme le vise l’article L. 515 al. 1). Reprenant le
raisonnement de l’auteur, « on doit donc en déduire que les personnes physiques qui
n’agissent pas dans le cadre d’une entreprise individuelle peuvent recevoir
occasionnellement des fonds à vue ou à moins de deux ans de terme1059 ». Néanmoins, avec
l’Internet, on voit mal ce type de situation se produire, vu qu’un système organisé (donc
habituel) de « vente » est nécessaire pour l’application de la directive de 2002.

693. L’investisseur est-il un consommateur ? Au sens de la directive de 2002, cela ne fait aucun
doute, son objectif étant d’assurer la protection des consommateurs de produits et services

1054
Comp. art. L.121-1 du Code de commerce : « Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et
en font leur profession habituelle ».
1055
BONNEAU T., Monopole bancaire et monopole des prestataires d’investissement, Droit bancaire et
financier, Mélanges AEDBF-France, 1997, Banque Ed., p.37 ; L’HOMME J. et CAFFARD C., Considérations
sur le monopole bancaire, Banque magazine, n° 662 octobre 2004, p.37.
1056
POLLAUD-DULIAN, l’habitude en droit des affaires, Mélanges Sayag, Litec 1997, p. 349 ; BLAISE J.-B.,
Droit des affaires, 2ème éd. 2000, LGDJ, n°176, p. 88.
1057
Cass. com. 3 décembre 2002, Bull. civ. IV, n°182, p.209 ; Banque et droit n°89, mai-juin 2003. 55, obs.
BONNEAU T. ; D. 2003, Act. Jurisp. 202 ; RJDA 5/03 n°532, p.469 ; RDBF, n°2 mars/avril 2003. 91, obs.
CREDOT J.-F. et GERARD Y. ; JCP E, 2003, 853, note DONDERO; RTD com. 2003. 344, obs. LEGEAIS :
neuf prêts successifs contenant la mise de fonds à titre onéreux à la disposition d'un même client ne suffisent pas
à caractériser le caractère habituel des opérations de banques.
1058
BONNEAU T., op. cit., n°206 p. 131.
1059
Ibid.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 353
financiers à distance »

financiers (c’est-à-dire, notamment, liés aux investissements, article 2, b). Pourtant,


l’amalgame n’était pas si évident, l’expression n’étant pas familière en droit bancaire,
d’autant plus que terminologiquement, l’épargnant épargne et le consommateur consomme :
leur comportement économique est donc radicalement opposé. Le Professeur O. CACHARD
relève que « précisément, ce renouvellement du vocabulaire n’est pas fortuit […], le droit de
la consommation ne constitue qu’un élément parmi d’autres, concourant à la protection de
l’épargnant1060 ». De même, comme le précise le Professeur T. BONNEAU, à propos des
opérations de banque, « le droit de la consommation ne donne qu’une vue très partielle du
cadre des opérations de clientèle1061 ». Certains avaient pu également en douter au motif que
la loi du 3 janvier 1972 sur le démarchage financier ne fut pas intégrée dans le Code de la
consommation et que l’épargne sous-tendait une intention de placement, voire de
spéculation1062. Il n’est cependant pas contestable que le cyber investisseur (s’il n’est pas
averti) qui confie son argent à un professionnel mérite tout autant de protection que le
consommateur traditionnel. Le législateur a, semble-t-il, réconcilié les auteurs en transposant
les dispositions de la directive de 2002 dans le Code de la consommation, d'une part, par ce
que le consommateur constitue le seul dénominateur commun de la directive (et non pas les
services financiers, hétérogènes), et, d'autre part, dans un objectif de cohérence par rapport à
la directive 97/7/CE sur la vente à distance qui a elle-même été transposée dans le code de la
consommation.

§ 2. Les recoupements entre la directive de 2002 et celle de 2000

694. Plan. Les deux textes sont fondés par des logiques différentes. La directive sur le commerce
électronique s’articule autour d’une notion centrale, celle de service de la société de
l’information. De cette notion découlent celles de prestataire et de destinataire du service, qui
en sont, avec le consommateur, les acteurs principaux. A son instar, la directive de 2002,
partant de la notion de services financiers, développe les notions de consommateur et de
fournisseur. Les deux directives présentent donc des points de contact (A) ; cependant, malgré
les distinctions apparentes, l’analyse révèle davantage les complémentarités (B).

1060
CACHARD O., art. préc.
1061
BONNEAU T., op. cit., n°403 p. 278.
1062
RAYMOND G., Les contrats de consommation, in Après le Code de la consommation grands problèmes
choisis, 1995, p.46.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 354
financiers à distance »

A. Points de contact

695. Les services financiers sur l’Internet. Les deux directives ont pour point commun d’être
applicables aux services financiers sur l’Internet. Celle de 2000 est propre au commerce
électronique, donc à l’Internet, mais englobe les services financiers tandis que celle de 2002,
propre à ces derniers, réglemente tout mode de conclusion du contrat à distance et, par
conséquent, via l’Internet. Il en est de même pour leurs mesures respectives de transposition
(LEN et ordonnance de 2005). En premier lieu, le champ d’application de la directive sur le
commerce électronique est plus étendu que celui de la directive sur les services financiers à
distance. En effet, cette dernière ne s’applique qu’aux services financiers, et dans la mesure
où se noue un contrat. En revanche, la directive sur le commerce électronique s’applique,
quant à elle, notamment aux opérations financiéres1063, mais plus largement à la fourniture
d’un service de la société de l’information, indépendamment de l’existence d’un contrat,
c’est-à-dire de tout service réalisé normalement contre rémunération, à distance par voie
électronique et à la demande individuelle du destinataire1064. Cette définition complexe entend
viser, grosso modo, toutes les activités à caractère économique qui se déroulent en ligne1065.
En second lieu, sont seuls concernés par la directive sur le commerce électronique les services
fournis par voie électronique1066. De son côté, la directive sur les contrats à distance s’étend,
plus largement, à tous les contrats conclus via « une ou plusieurs technique de communication
à distance »1067, c’est-à-dire aux ventes par correspondance, par téléphone, radio, télécopieur,
télévision, minitel, courrier électronique et, bien sûr, l’Internet.

696. Le coût du service. Peu importe que ces services soient payants ou gratuits pour le
destinataire. En effet, dans la directive de 2000, le service doit être proposé « normalement »
contre rémunération, ce qui n’exclut pas qu’il puisse être gratuit pour l’utilisateur et financé

1063
Considérant n° 27.
1064
Article 2, a, de la directive sur le commerce électronique, qui renvoie à la définition de services donnée par
la directive 98/48/CE du 20 juillet 1998.
1065
Pour de plus amples développements sur cette définition, M. ANTOINE, Objet et domaine de la directive, in
E. MONTERO (sous la dir. de), Le commerce électronique européen sur les rails. Analyse et propositions de
mise en œuvre de la directive sur le commerce électronique, Cahiers du CRID, n° 19, Bruxelles, Bruylant, 2001,
pp. 1 et s., no 2 et s.
1066
Un service fourni par voie électronique est « un service envoyé à l'origine et reçu à destination au moyen
d'équipements électroniques de traitement (y compris la compression numérique) et de stockage de données, et
qui est entièrement transmis, acheminé et reçu par fils, par radio, par moyens optiques ou par d'autres moyens
électromagnétiques » (art. 1er, § 2, 2e tiret, de la directive 98/48). Cette définition est technologiquement neutre
et ne vise pas exclusivement les services fournis sur le net ou par courrier électronique. Le m-commerce, par
exemple, pourrait également être considéré comme un service de la société de l’information.
1067
Art. 2, a, de la directive sur les services financiers.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 355
financiers à distance »

par la publicité ou le sponsoring. Il suffit que l’activité ait un caractère économique ou qu’elle
bénéficie d’une contrepartie économique1068. La directive de 2002 se rapproche de cette
conception dans la mesure où ne sont visés que les contrats dans le cadre de l’activité
commerciale ou professionnelle du fournisseur ; la gratuité n’étant pas de mise dans les
affaires bancaires et financières, celle-ci sera nécessairement rémunérée.

697. Le spectre du consommateur. Si la directive sur les services financiers à distance traite
expressément les relations entre professionnels et consommateurs, la directive sur le
commerce électronique organise plus subtilement sa protection puisque son exposé des motifs
insistait à de nombreuses reprises sur la nécessité d’assurer un haut niveau de protection au
consommateur1069 souvent confronté sur le réseau à des situations commerciales nouvelles.
Ceci étant, il est clair que le champ d’application de la directive a vocation à s’étendre
beaucoup plus largement, puisqu’elle concerne les rapports entre un prestataire de services de
la société de l’information et un destinataire du service, peu importe que ce dernier l’utilise à
des fins professionnelles ou non. Ainsi la directive entend régir tant les rapports de
professionnel à consommateur que les rapports entre professionnels, avec parfois certaines
nuances. En revanche, comme la directive sur les services financiers, elle ne concerne pas les
relations qui peuvent se nouer individuellement entre consommateurs. Cette exclusion ressort
clairement du considérant 18, qui précise que « l’utilisation du courrier électronique ou
d’autres moyens de communication individuels équivalents par des personnes physiques
agissant à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de leurs activités commerciales ou
professionnelles, y compris leur utilisation pour la conclusion de contrats entre ces
personnes, n’est pas un service de la société de l’information ».

B. Complémentarités

698. Un cadre juridique homogène. L’article 1, § 3, de la directive sur le commerce électronique


dispose clairement que la directive est « sans préjudice du niveau de protection existant

1068
Par contre, les activités de l’Etat dans le cadre de sa mission de service public ne peuvent pas être
considérées comme des services de la société de l’information. Par exemple, si une commune permet la
délivrance en ligne d’un certificat de naissance moyennant le paiement d’une somme d’argent, il ne s’agit pas
d’une rémunération ni d’une contrepartie économique.
1069
Cf. l’exposé des motifs de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à certains
aspects juridiques du commerce électronique dans le marché intérieur présenté par la Commission le 18
novembre 1998, COM (1998) 586 final, p. 18. Il y est précisé qu’un haut niveau de protection du consommateur
doit être atteint, notamment par l’imposition d’obligations d’information et de transparence, et l’établissement de
nouvelles garanties dans les relations contractuelles.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 356
financiers à distance »

notamment en matière de protection de la santé publique et des intérêts des consommateurs,


établi par les instruments communautaires ». Par ailleurs, le considérant n°11 énumère, de
manière non exhaustive, une série de directives déclarées applicables « dans leur intégralité »
aux services de la société de l’information. En toute logique, la directive sur les services
financiers à distance ne figure pas dans cette énumération, étant donné que la directive sur le
commerce électronique lui est antérieure. On peut cependant, sans hésitation, l’ajouter au
nombre des directives, aux côtés, notamment, de la directive 97/7/CE sur les contrats à
distance. Pour preuve, le considérant n° 27 précise que « la présente directive, en liaison avec
la future directive du Parlement européen et du Conseil concernant la vente à distance de
services financiers aux consommateurs, contribue à la création d’un cadre juridique pour la
prestation en ligne de services financiers ». Réciproquement, la directive sur les services
financiers à distance précise que « la présente directive devrait être appliquée en conformité
avec le Traité et le droit dérivé, y compris la directive 2000/31/CE sur le commerce
électronique, cette dernière n'étant applicable qu'aux transactions qu'elle couvre »1070.
Terminologiquement, aucun doute n’est donc permis quant au caractère complémentaire des
deux directives.

699. Professionnel et fournisseur. La directive sur les services financiers à distance n’entend pas
régler tous les rapports de professionnel à consommateur, mais uniquement les relations entre
un fournisseur et un consommateur. Celui-là est alors entendu comme un professionnel
fournisseur de services financiers faisant l’objet de contrats à distance. La directive sur le
commerce électronique, quant à elle, régit les rapports entre un prestataire d’un service de la
société de l’information et un destinataire de ce service. On le voit, la notion de prestataire est
différente de celle de fournisseur. En effet, celui-ci peut exercer ses activités aussi bien en
ligne line que hors ligne, tandis que le prestataire d’un service de la société de l’information
n’agit, par définition, que sur les réseaux numériques. En outre, l’activité d’un prestataire peut
notamment consister en la fourniture de services financiers en ligne, mais également en une
multitude d’autres, comme l’hébergement de site, la fourniture d’accès à l’Internet, la
fourniture d’informations ou de communications commerciales, ou la fourniture d’outils
permettant la recherche, l’accès et la récupération de données1071. Il ne s’agit pas uniquement
des vendeurs de services électroniques, mais de toute personne exerçant en ligne une activité à
caractère économique, que ce soit un commerce ou une profession libérale : les fournisseurs

1070
Considérant n°6.
1071
Cf. le considérant n° 18 qui fournit quelques exemples de services de la société de l’information.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 357
financiers à distance »

d’accès à internet, les hébergeurs de sites, les fournisseurs de messagerie, les prestataires de
services de certification, etc. De même, les fournisseurs de services financiers en ligne, au
sens de la directive de 2002, sont des prestataires de services de la société de l’information.
Toutefois, s’agissant des opérations de banque prévues par l’article L.311-1 du Code
monétaire et financier, notons que sous l’empire de l’ordonnance de 2005, ces fournisseurs
seront nécessairement des établissements de crédit en vertu du monopole bancaire institué par
l’article L.515-5 du même Code.

700. L’information précontractuelle. Il n’en reste pas moins que de manière assez manichéenne,
là où la directive de 2002 ainsi que les articles L. 121-20-9 et suivants du Code de la
consommation auront vocation à régir un processus contractuel en matière de services
financiers, c’est-à-dire de l’information précontractuelle à la conclusion du contrat à distance,
la directive de 2000 et les dispositions de la LEN se limiteront à la phase extracontractuelle en
dehors de toute intention de contracter. Ceci étant, les deux séries de textes sont cumulatives
pour les établissements de crédit qui sont à la fois fournisseurs potentiels et prestataires de
services de la société de l’information. Tant que l’établissement de crédit ne propose pas une
souscription en ligne (hypothèse d’école vu les opportunités de l’Internet ?), il peut se
satisfaire des informations imposées par la LEN ; dès lors qu’il propose cette souscription et
que le consommateur peut accepter l’offre, le Code de la consommation commandera d’autres
informations. Il est à noter que le consommateur ne pourrait invoquer la violation de cette
obligation d’information qu’a posteriori, une fois le contrat définitivement conclu à distance.
Concrètement, pour la mise en œuvre de l’articulation des directives, les établissements de
crédit devront rédiger sur leur site une page de « mentions légales » générales satisfaisant les
obligations de la directive de 2000 puis, pour chaque service proposé, des conditions
particulières dans le respect de celle de 2002.

701. Processus de conclusion du contrat. Là encore, les deux directives sont parfaitement
complémentaires. En effet, la directive de 2002 et l’ordonnance de 2005 ne concernent que le
contenu (le fond) des règles relatives aux contrats à distance (information préalable, droit de
rétractation) ; en revanche, elle ne précise pas le mode opératoire de conclusion du contrat. Il
convient donc de revenir à la directive de 20001072 et aux législations la transposant pour
déterminer si le fournisseur a correctement rempli ses obligations à l’égard du consommateur.

1072
Article 9, 10, 11 de la directive sur le commerce électronique.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 358
financiers à distance »

702. Le problème des services financiers mixtes. Prenons l’exemple d’un l’établissement de
crédit qui mettrait sur son site un formulaire à remplir par le consommateur, permettant de
prédéfinir les conditions d’un prêt, signé in fine en agence. A priori, la directive de 2002 a
vocation à s’appliquer. Pourtant, la conclusion du contrat s’effectuant en agence, il ne s’agit
pas d’un « contrat à distance » au sens de la directive. La partie en ligne du service de la
société de l’information restera, quant à elle, soumise à la directive sur le commerce
électronique. Ainsi, on peut se demander si, en cas de litige, un consommateur pourra
invoquer une mauvaise information relative au service financier donnée sur le site comme
étant à l’origine de sa signature en agence. La directive de 2002 ne prévoyant qu’une
information préalable à la conclusion du contrat à distance, une réponse négative s’impose. Il
en résulte que les établissements de crédit auront tout intérêt à dématérialiser complètement
leur processus contractuel sous peine de ne pouvoir invoquer le respect de leur obligation
d’information relative au service financier.

Section 2. L’articulation des directives avec les autres textes

703. Plan. La question de « l’internetisation » totale des services financiers renvoie aux
législations particulières en la matière. En effet, la directive de 2002 ne peut utilement définir
les obligations qu’elle impose que parce qu’il existe antérieurement un terrain propice,
préparé par la directive sur le commerce électronique : la légalité de tels services est déjà
assurée par la clause de marché intérieur. Si leur soumission à la directive de 2002 n’est pas
en cause, en ce qu’elle concerne tous les services financiers susceptibles d’être fournis à
distance, la cohérence du système juridique mis en place peut, quant à elle, être remise en
question dans la mesure où la directive sur le commerce électronique prévoit un certain
nombre de dérogations1073 à cette clause. En outre, elle prévoit la possibilité de mesures
spécifiques concernant les services financiers non harmonisés (§2) ; néanmoins, s’agissant de
la question de l’adaptation à l’Internet des autres législations sectorielles se pose au
préalable (§1).

1073
Dérogation générales : annexe I de la directive et particulières : art. 3, §§ 4 à 6.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 359
financiers à distance »

§1. L’adaptation des autres législations sectorielles à l’Internet

704. Les dérogations. La directive de 2000 prévoit, elle-même, dans son annexe les dérogations à
la clause de marché intérieur. Il s’agit principalement de la réglementation relative aux
obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs (A).
D’autres problèmes spécifiques seront ensuite évoqués (B).

A. Les obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les


consommateurs

705. La dérogation générale. Une dérogation générale au principe de la loi du pays d’origine est
prévue notamment pour les obligations contractuelles dans les contrats conclus par les
consommateurs. Cette dernière n’étant pas censée établir de règles additionnelles de droit
international privé, il convient d’appliquer les dispositions de la Convention de Rome de 1980
sur la loi applicable aux obligations contractuelles et de déterminer la loi de la banque.

706. Problème lié à la portée de la dérogation. Mais la portée de cette dérogation n'est pas claire.
En effet, le considérant 56 énonce que, « en ce qui concerne la dérogation prévue par la
présente directive pour les obligations contractuelles dans les contrats conclus par les
consommateurs, celles-ci doivent être interprétées comme comprenant les informations sur
les éléments essentiels du contenu du contrat, y compris les droits du consommateur, ayant
une influence déterminante sur la décision de contracter ». Faut-il en déduire que la
dérogation couvre non seulement le contrat en lui-même mais également les aspects
précontractuels ?

707. Position doctrinale. Comme le révèle Monsieur E. CRABIT, le choix des termes
« obligations contractuelles » par le législateur est délibéré et entend clairement exclure les
obligations précontractuelles. En effet, au cours de l’élaboration de ce texte, certains Etats
membres avaient proposé d’étendre la dérogation au domaine contractuel. Ces propositions
ont finalement été rejetées, afin de ne pas élargir la dérogation et risquer ainsi de diminuer
l’impact de la clause de marché intérieur, sachant que les Etats membres disposaient de toute
façon d’une possibilité de dérogation au cas par cas en vertu de l’article 3, § 41074. Par ailleurs,

1074
CRABIT E., La directive sur le commerce électronique. Le projet Méditerranée, RDUE, 4/2000, pp. 797-
798.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 360
financiers à distance »

d’autres divergences fondamentales demeurent, notamment en droit des contrats. Pour cela,
l'absence d'harmonisation de la notion d'offre pourrait poser problème dans le contexte de
l'application de la clause de marché intérieur. Cet argument plaiderait en faveur d’une
interprétation large de la dérogation, incluant la phase précontractuelle. Néanmoins, de
nombreux arguments nous conduisent à une interprétation restrictive. S'agissant de
dérogations au principe du pays d'origine, certains auteurs soutiennent que les dispositions de
l'annexe sont de stricte interprétation, ce qui irait à l'encontre d'une inclusion du domaine
précontractuel dans le champ de l'exception relative aux contrats de consommation1075.

708. La cohérence du système. En outre, l'article 3, § 4 permet aux États membres d'adopter des
mesures spécifiques restrictives de la libre circulation des services de la société de
l'information notamment lorsque les objectifs de protection du consommateur sont menacés.
Si la dérogation de l'annexe relative aux contrats conclus par les consommateurs couvrait
également les aspects précontractuels, la possibilité de dérogations spécifiques, offerte aux
États membres par l'article 3, § 4, n'aurait aucune raison d'être, compte tenu de la portée
générale des dérogations de l'annexe. Une interprétation restrictive de la dérogation générale
concernant les contrats conclus par les consommateurs permettrait donc de respecter la
cohérence interne du dispositif de la directive.

709. Apports de la directive de 2002. Le cas échéant, on peut se demander si l’harmonisation des
règles régissant la phase précontractuelle (obligations d'information en particulier) est
suffisante pour pouvoir s'en remettre au principe du contrôle par le pays d'origine dans une
matière sensible comme celle des contrats de consommation. Sans tomber dans un optimisme
excessif, on peut remarquer que la directive sur les services financiers entend précisément
rapprocher les législations des Etats membres à cet égard et qu’elle prévoit une harmonisation
maximale1076 puisque, sauf exception, les Etats membres ne devraient pas envisager d’autres
dispositions que celles établies par la directive [pour les domaines qu’elle harmonise1077]. Il
en est ainsi notamment de l’information précontractuelle. En témoigne la transposition fidèle
opérée par le législateur français avec l’ordonnance du 6 juin 2005.

1075
En ce sens, PILETTE A., La directive commerce électronique : un bref commentaire, A.et M., 2001/1, p. 37.
1076
Sur l’efficacité des techniques d’harmonisation, Comment traiter le cloisonnement juridique des marchés,
GOURIO A., RDBF, mars-avril 2003, n° 2, p.144.
1077
HUPPE S., La directive du 23 septembre 2002 relative à la commercialisation à distance des services
financiers auprès des consommateurs : apports et limites, mémoire DESS Banque et Finances 2002/2003, p.56.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 361
financiers à distance »

710. Problème lié à la loi applicable. La détermination de la loi applicable au contrat, en


l’absence de clause la déterminant, n’est pas, quoi qu’on en dise, chose aisée. Le principal
reproche, fait à cette situation au-delà de l’insécurité juridique de principe, est que les règles
de détermination de la convention de Rome pouvaient aboutir à désigner une loi moins
favorable au consommateur que celle de son pays de résidence. « En effet, à défaut de règles
communes imposées par la directive, il existe un risque de glissement des standards législatifs
vers ceux les plus favorables aux prestataires de services »1078. La directive de 2002 vient
quelque peu vider ce problème de sa substance en organisant une telle harmonisation (même
s’il reste le problème de la détermination elle-même).

B. Autres réglementations

711. La monnaie électronique. Un certain nombre de dérogations générales énoncées dans


l’annexe I de la directive de 2000 renvoie à certaines dispositions communautaires relatives
aux services financiers. En premier lieu, l’article 3 ne s’applique pas en matière d’émission de
monnaie électronique par des établissements ne bénéficiant pas du passeport européen1079.
Cette dérogation est logique, dans la mesure où la directive sur la monnaie électronique
permet l’exemption d’établissements de monnaie électronique de tout ou partie des ses
dispositions ainsi que des obligations découlant de la directive sur les établissements de
crédit1080. Ce dernier instrument prévoit précisément une clause de marché intérieur en vertu
de laquelle les activités d’un établissement de crédit agréé et contrôlé par un État membre
(État membre d’origine) peuvent être librement exercées dans les autres États membres tant
par voie d’établissement de succursales (liberté d’établissement) que par voie de prestation de
services (libre circulation des services)1081. Mais l’article 8, § 2, de la directive monnaie
électronique précise que, en cas d’exemption accordée conformément à l’article 8, § 1er, il
sera dérogé au régime de reconnaissance mutuelle instauré par la directive sur les
établissements de crédit. Dans la mesure où ces instruments prévoient un régime de

1078
CRUQUENAIRE A. (avec la collaboration de C. LAZARO), La clause de marché intérieur : clef de voûte de
la directive sur le commerce électronique, in Le commerce électronique européen sur les rails ? Analyse et
propositions de mise en œuvre de la directive sur le commerce électronique, Cahiers du CRID, n° 19, Bruxelles,
Bruylant, 2001, p. 69.
1079
C’est-à-dire des institutions pour lesquelles les Etats membres ont appliqué une des dérogations prévues à
l’article 8, § 1er, de la directive 2000/46/CE relative à la monnaie électronique.
1080
Directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mars 2000 concernant l'accès à l'activité
des établissements de crédit et son exercice.
1081
Article 18 de la directive 2000/12/CE, précitée. Cf. également les articles 22, 26 et 27 concernant les
pouvoirs respectifs des pays d’origine et d’accueil.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 362
financiers à distance »

reconnaissance mutuelle assorti d’une faculté de dérogation, il était logique qu’un instrument
général tel que la directive sur le commerce électronique respecte ce régime spécifique.

712. La publicité des OPCVM. L’annexe I prévoit également une dérogation relative à la
publicité des OPCVM. En effet, la directive 85/611/CEE1082 coordonnant les dispositions
applicables en la matière comporte également une clause de marché intérieur dont les effets
sont limités aux aspects harmonisés par la directive. L’article 44, § 2, de cette directive
précise ainsi que tout OPCVM peut faire de la publicité dans l'État membre de
commercialisation. Il doit cependant respecter les dispositions régissant la publicité dans cet
État1083. Le législateur européen a veillé à ne pas porter atteinte à la cohérence de ce régime
spécifique dans le cadre du régime plus transversal de la directive sur le commerce
électronique. La clause de marché intérieur est donc écartée ici également. On peut
simplement regretter que la directive de 2002 ne soit pas allée plus loin dans ses dispositions
sur les communications non sollicitées en instaurant le même type de règles visant le respect
de la législation du pays de destination en cas de démarchage, distinguant clairement de ce
fait, la légalité du site ayant un rôle passif du rôle actif de la publicité.

713. Les assurances. En matière d’assurances également, le législateur communautaire a réalisé


une harmonisation minimale, « nécessaire et suffisante pour parvenir à une reconnaissance
mutuelle des agréments et des systèmes de contrôle prudentiel, qui permet l’octroi d’un
agrément unique valable dans toute la Communauté et l’application du principe du contrôle
par l’État membre d’origine »1084. Ainsi l’article 5 de la directive 92/49/CE prévoit-il que
l’agrément obtenu dans l’État membre d’origine est valable pour l’ensemble de la
Communauté et permet à l’entreprise titulaire d’y exercer ses activités, que ce soit en régime
de libre établissement ou de libre prestation de services. Des mesures spécifiques (de
notification notamment) sont néanmoins prévues afin d’encadrer ce système de

1082
Directive 85/611/CEE du Conseil du 20 décembre 1985 portant coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières.
1083
Cf. également le considérant n° 5, qui précise que l’application des règles communes minimales établies par
la directive « constitue une garantie suffisante pour permettre (…) aux organismes de placement collectif situés
dans un État membre de commercialiser leurs parts dans les autres États membres sans que ces derniers puissent
soumettre ces organismes ou leurs parts à quelque disposition que ce soit, sauf celles qui, dans ces États, ne
relèvent pas des domaines régis par la présente directive (…) ».
1084
Directive 92/49/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les
directives 73/239/CEE et 88/357/CEE (troisième directive « assurance non vie »), considérant n° 5.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 363
financiers à distance »

reconnaissance mutuelle, compte tenu des particularités de l’activité concernée1085. Par


ailleurs, les directives 88/357/CEE (art. 7 et 8)1086 et 90/619/CEE (art. 4)1087 contiennent des
dispositions spécifiques de conflit de lois. Ici encore, la directive sur le commerce
électronique ne porte pas préjudice aux régimes spécifiques instaurés dans le cadre de la
réglementation d’activités particulières. En revanche la directive de 2002 sera pleinement
applicable, vu qu’elle intègre l’assurance dans la définition qu’elle donne des services
financiers et complètera le régime instauré en cette matière.

714. Les services d’investissement. Dans le cadre de la nouvelle directive sur les services
d’investissement1088, chaque État membre doit exiger que la fourniture ou l'exercice d'activités
d'investissement fasse l'objet d'un agrément préalable accordé par l'autorité compétente de
l'État membre d'origine. La version antérieure de la directive prévoyait l’application des
exigences du pays d’accueil aux services fournis sur son territoire. Il s’agit donc d’une
transition vers le principe du pays d’origine sur la base duquel, les services d’investissements
pourront valablement être proposés via l’Internet. Il n’en reste pas moins que la directive de
2002 trouvera à s’appliquer.

§2. La possibilité pour les Etats membres de prendre des mesures


spécifiques à l’égard d’un service particulier : les services financiers non
harmonisés

715. La possibilité. Des dérogations spécifiques à la clause de marché intérieur posées par l’article
3 sont également autorisées, au cas par cas, afin de préserver, notamment, des objectifs liés à
la protection des consommateurs, y compris des investisseurs (art. 3, § 4). Cette faculté
permet aux Etats membres de prendre des mesures spécifiques (telles que des sanctions ou des

1085
Des dispositions similaires sont édictées dans le titre IV de la directive 92/96/CEE du Conseil du 10
novembre 1992, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant
l'assurance directe sur la vie et modifiant les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE.
1086
Deuxième directive 88/357/CEE du Conseil du 22 juin 1988 portant coordination des dispositions
législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie,
fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la
directive 73/239/CEE.
1087
Deuxième directive 90/619/CEE du Conseil du 8 novembre 1990, portant coordination des dispositions
législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, fixant les dispositions
destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 79/267/CEE.
1088
Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés
d'instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE
du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 364
financiers à distance »

injonctions) restreignant la libre circulation d’un service donné provenant d’un autre Etat
membre. La façon dont ces dérogations particulières peuvent être appliquées aux services
financiers en ligne est précisée dans une communication de la Commission1089.

716. Un service financier non harmonisé. L’article 3, § 4, précise que les mesures envisagées ne
peuvent être prises qu’à l’encontre d’un service donné de la société de l’information, tels les
fonds communs d’investissement ou organismes de placement non harmonisés. Par exemple,
il pourrait s’agir d’une mesure, comme un avertissement ou une astreinte, prise par un pays de
destination à l’égard d’un établissement de crédit proposant, à partir de son site situé dans un
autre pays de l’Union européenne, des services d’investissement non harmonisés aux
résidents du pays en question. Ces mesures pourraient être prises, par exemple, au motif que
la banque ne respecte pas certaines règles de conduite destinées, dans le pays de destination, à
protéger le consommateur. Par contre, un Etat membre ne saurait, sur la base de l’article 3,
§ 4, décider que toute sa législation portant, par exemple, sur les fonds d’investissement non-
harmonisés, est applicable de façon générale et horizontale à tout service pouvant être
accessible par ses résidents1090.

717. Conditions. Au surplus, ces mesures doivent répondre à un certain nombre de conditions,
énoncées à l’article 3, § 4. Ainsi, les mesures doivent être nécessaires pour l’ordre public, la
protection de la santé publique, la sécurité publique, y compris la protection de la sécurité et
de la défense nationale, et enfin la protection des consommateurs-investisseurs. Dans le
domaine des services financiers, seule cette dernière raison est susceptible d’être invoquée par
un Etat membre pour justifier la prise de mesures particulières restreignant la libre circulation
d’un service financier donné. En particulier, la Cour de justice a considéré que le secteur des
assurances1091 et le secteur bancaire1092 constituaient des domaines particulièrement sensibles
du point de vue de la protection des consommateurs. Ces mesures doivent être prises à
l’encontre d’un service de la société de l’information qui porte atteinte aux objectifs précités
« ou qui constitue un risque sérieux et grave d’atteinte à ces objectifs ». Cela signifie que
l’Etat de destination peut non seulement prendre des mesures répressives, mais également des

1089
Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et à la Banque Centrale européenne
concernant l’application aux services financiers des articles 3 §4 à 3§6 de la directive sur le commerce
électronique, COM (2003) 259 final, 14 mai 2003.
1090
Communication préc, p. 5.
1091
CJCE, 4 décembre 1986, Commission contre Allemagne (205/84), Rec.1986 I, p. 3755.
1092
CJCE, 9 juillet 1997, Parodi (C-222/95), Rec. 1997 I, p. 3899.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 365
financiers à distance »

mesures préventives, en cas de risque sérieux et grave d’atteinte à ces objectifs. Enfin ces
mesures doivent être proportionnelles aux objectifs mentionnés. Cela signifie que même si
elles sont nécessaires et indispensables, elles ne sont pas tolérées si elles provoquent des
désagréments disproportionnés par rapport à l’objectif visé.

718. Procédure. Par ailleurs, l’article 3, § 4, prévoit une procédure de notification, préalable à
toute mesure. Cette condition a pour objectif de permettre à l’Etat membre d’établissement du
prestataire d’être informé et de prendre lui-même des mesures. En outre, le premier Etat
membre doit avoir notifié à la Commission et à l’Etat membre d’établissement du prestataire
son intention. Cette notification devrait permettre à la Commission conformément à l’article
3, § 6, d’exercer un certain contrôle a posteriori afin de vérifier la compatibilité des mesures
notifiées avec le droit communautaire. Notons que cet examen n’est pas suspensif, dans la
mesure où il est « sans préjudice de la faculté pour l’Etat membre de prendre et d’appliquer
les mesures en question » (art. 3, § 6). Afin d’effectuer cet examen de conformité, la
Commission se basera sur les conditions établies au paragraphe 4 et sur la jurisprudence de la
Cour de justice1093.

1093
En effet, de jurisprudence constante, la Cour a jugé que « les mesures nationales susceptibles de gêner ou de
rendre moins attrayantes l’exercice des libertés fondamentales garanties par le traité doivent remplir quatre
conditions : qu’elles s’appliquent de manière non discriminatoire, qu’elles se justifient par des raisons
impérieuses d’intérêt général, qu’elles soient propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’elles poursuivent
et qu’elles n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre » (CJCE, 30 novembre 1995, Gebhard
(C-55/94), Rec. 1995 I, p. 4165).
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 366
financiers à distance »

CONCLUSION

719. Un cadre juridique complet. La directive du 23 septembre 2002, concernant la


commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, complète le
cadre juridique européen existant en matière de contrat à distance. Parce qu’elle vise tous les
modes de commercialisation à distance, la directive de 2002 englobe la fourniture de services
financiers via l’Internet. De ce point de vue, elle contribue à renforcer et à étoffer le cadre de
base posé par la directive sur le commerce électronique.

720. Un cadre juridique homogène. L’application des deux directives et de leurs textes de
transpositions pose peu de problèmes, bien que les obligations qu’elles imposent soient
cumulatives ; la directive sur le commerce électronique et la LEN prévoient des informations
générales en dehors de toute intention contractuelle, tandis que la directive de 2002 et
l’ordonnance de 2005 réglementent le contenu d’un processus contractuel. Mieux encore, ces
derniers textes apportent en matière de services financiers, des simplifications aux problèmes
que la directive de 2000 avait laissés avant son adoption.

721. Les législations sectorielles. Par rapport à la directive de 2000, celle de 2002 apparaît comme
sectorielle. En effet, elle a vocation à couvrir tous les services financiers en ligne (fournis à
distance). La directive de 2002 vient également compléter d’autres dispositions particulières
concernant les services d’investissements ou les assurances. L’articulation de ces textes ne
pose pas de difficulté dans la mesure où ces règles spécifiques, dérogatoires à la directive sur
le commerce électronique, assurent elles-mêmes les conditions de leur libre prestation et,
partant, la cohérence du régime des services financiers en ligne.

722. Domaines non harmonisés. A notre connaissance, le législateur n’envisage pas d’initiative
dans ces domaines non harmonisés, plus particulièrement sur les questions de prestations de
services destinés aux professionnels (par exemple : fourniture de données analytiques en vue
d’investissement). De même, les fonds non harmonisés et principalement les services de
conseils financiers, de gestion financière, du courtage sur produit de base et des activités de
courtiers et teneurs de marché sur les marchés de contrat à terme et d’options peuvent poser
problème. La Commission devrait proposer des initiatives concernant ces activités.
2ème Partie : Titre 2 : Chapitre 2 – L’articulation des directives « commerce électronique » et « services 367
financiers à distance »

723. Une protection assurée. De ces législations et de leur cohérence générale, le consommateur
investisseur sort sécurisé. Entre autres, la directive de 2002 transposée dans le Code de la
consommation, en réglementant directement les obligations à la charge du fournisseur, impose
un contenu identique à chacune des législations des Etats membres. Ce contenu assure une
protection très satisfaisante du consommateur confronté à l’offre de services financiers en
ligne.

724. Données nominatives. Une fois affirmée la fiabilité du lien contractuel entre le
consommateur de services financiers et l’établissement de crédit fournisseur, ainsi que le haut
degré de sécurité dont il dispose en matière de transactions en ligne, le consommateur doit
encore avoir l’assurance que les données personnelles le concernant, collectées lors de ces
transactions, ne soient pas utilisées à d’autres fins que celles prévues par la transaction ; il
s’agit donc d’aborder le problème du respect des données à caractère personnel.
TITRE 3

LA PROTECTION DES DONNEES


PERSONNELLES DANS LE CADRE DES
OPERATIONS BANCAIRES ET
FINANCIERES SUR L’INTERNET

725. Panorama législatif. Il reste un dernier élément à examiner s’agissant de la protection du


consommateur investisseur dans les prestations bancaires et financières en ligne. En effet,
l’Internet est marqué par la traçabilité des transactions, « la navigation de l’internaute sur le
Web laisse des traces1094 », et n’est pas aussi anonyme qu’il y paraît de prime abord : de la
simple consultation des pages du site d’un établissement de crédit à la réalisation d’une
opération bancaire en ligne, comme par exemple un virement, des données relatives à
l’utilisateur sont collectées. La protection de ces données nominatives est assurée en droit
interne1095 par la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 19781096, modifiée par la loi du 6
août 20041097, l’ordonnance du 6 juin 20051098, le décret du 20 octobre 20051099 et par d’autres
textes plus généraux comme l’article 9 du Code civil concernant de respect de la vie privée.

1094
MALLET-POUJOL N., Commerce électronique et protection des données personnelles, J.-Cl. com., 2003,
fasc. 865, p.1.
1095
Pour une étude en droit comparé, V. KAUDER S., Les lois « Informatique et liberté » en France, en Europe
et dans le monde, disponible sur : www.legalbiznext.com, 16 novembre 2005.
1096
Loi n°78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés modifiée par la loi
n°2004-801 du 6 août 2004. Pour une critique de cette loi, v. FRAYSSINET J., La loi relative à l’informatique,
aux fichiers et aux libertés, modifiée par la loi du 6 août 2004 : continuité et/ou rupture ?, RLDI, octobre 2005,
n° 9, p. 50.
1097
Loi n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de
données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux
fichiers et aux libertés ; V. CAHEN M.-I., La loi informatique et libertés, 20 septembre 2004, disponible sur :
www.droit-ntic.com ; CARON L., La loi Nouvelle loi Informatique et Libertés : quelle stratégie pour les
entreprises ?, 14 septembre 2004, disponible sur : www.journaldunet.com ; DEBUCK S., Réforme de la loi du 6
janvier 1978 : quelle protection des données personnelles dans l’entreprise ?, 29 novembre 2004, disponible sur :
www.droit-technologie.org .
1098
Ordonnance 2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la
réutilisation des informations publiques.
1099
Décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 portant sur l’application de la loi informatique et libertés.
2ème Partie : Titre 3 – La protection des données personnelles confrontée à la prestation des services369
bancaires et financiers sur l’Internet

Cette protection a fait également l’objet d’une directive communautaire1100 en date du 24


octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des
données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données. Dans le domaine
bancaire et financier, notons une recommandation du Conseil de l’Europe relative à la
protection des données à caractère personnel à des fins de paiement1101 ; néanmoins il n’existe
pas à notre connaissance de réglementation générale concernant les données nominatives à
caractère financier. Ce sont donc les réglementations horizontales qui trouveront à
s’appliquer1102. De même, « il n’existe pas en matière de protection des données personnelles
un droit spécifique à l’Internet, à qui s’appliquent les règles de droit commun1103 ».

726. Illustration. Prenons l’exemple d’un établissement de crédit qui propose sur son site Internet
de renseigner l’utilisateur sur la possibilité d’obtenir un prêt immobilier ou d’accéder à un
service en ligne d’informations financières1104. Cela suppose la connaissance par les
automates de calcul d’un certain nombre d’informations comme le montant des revenus du
ménage, la profession, le taux d’endettement… L’utilisateur qui souhaite bénéficier de ce
service doit ainsi compléter les champs d’un formulaire afin que l’automate ou bien,
ultérieurement, un conseiller de l’établissement de crédit en question puisse analyser la
situation de l’utilisateur du service et lui faire une proposition.

727. Type de collecte. Dans notre exemple la collecte est dite loyale car volontaire de la part du
client qui renseigne lui-même les champs nécessaires. Par opposition, d’autres modes sont
dits illicites1105 comme le « phishing1106 » qui touche presque exclusivement les

1100
Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des
personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces
données.
1101
Recommandation n° R (90) 19 du Conseil de l’Europe relative à la protection des données à caractère
personnel à des fins de paiement et autres opérations connexes.
1102
MOLE A., Protection des personnes sur Internet : conditions posées par la Cnil, Legicom, n°10, 1995, p. 62.
1103
FRAYSSINET J., l’Internet et la protection des données personnelles – Rapport général, 2000, Colloque
international Internet et le droit.
1104
Lors de sa séance du 22 septembre 2005, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a
autorisé la société Bloomberg à mettre en œuvre un dispositif biométrique permettant l’accès en temps réel à
toutes sortes de données financières. Bien entendu la CNIL a veillé à la conformité de ce dispositif à la loi
« informatique et libertés ». V. CNIL, Un service au bout des doigts, 28 septembre 2005, disponible sur :
www.cnil.fr
1105
Et donc interdit selon l’article 6 de la loi de 1978 qui prévoit que « les données sont collectées et traitées de
manière loyale et licite ».
1106
« Cette pratique consiste à récupérer certaines informations personnelles (données bancaires) des
internautes via l’envoi de courriels usurpés et de faux sites Web qui sont la réplique quasi-exacte de vrais
sites », MENAGER O., Les entreprises ne peuvent ignorer le phishing, in 01 Réseaux, n°144, novembre 2004.
2ème Partie : Titre 3 – La protection des données personnelles confrontée à la prestation des services370
bancaires et financiers sur l’Internet

établissements bancaires et financiers1107. Face à la recrudescence de cette pratique, une


proposition de loi a été déposée afin de sanctionner l’usurpation d’identité d’autrui sur
Internet dont la forme la plus connue étant le « phishing »1108. A cet effet, il a été proposé
d’insérer dans le code pénal une nouvelle infraction « l’usurpation d’identité numérique »
pour laquelle l’auteur serait condamné à un an d’emprisonnement et de 15000 euros
d’amende1109. Un autre exemple de la collecte serait « les cookies1110 ». Il s’agit simplement,
d’un fichier texte enregistré sur le disque dur de l’ordinateur, généralement à l’insu de
l’utilisateur, qui permet à son émetteur de reconnaître un internaute en recueillant un certain
nombre d'éléments d'identification : l'adresse IP1111, le système d'exploitation, le navigateur
utilisé et des informations statistiques telles que les pages consultées ou le nombre de visites
effectuées. Si l’on doit leur reconnaître l’avantage de simplifier la navigation sur certains sites
en conservant les préférences déjà saisies sur l’ordinateur, en revanche les cookies peuvent
aussi servir à informer le responsable d'un site des habitudes de navigation de l’utilisateur.
Ces éléments facilitent la mesure de la fréquentation du site, mais permettent aussi de
personnaliser l'affichage de certaines pages et publicités.

728. Position des problèmes. Il en résulte une collecte de données ; s’agissant de notre exemple,
cette dernière est réellement conforme à la raison même du service proposé car sans ces
informations, aucune réponse n’est possible. En revanche, plusieurs problèmes particuliers
peuvent naître de cette situation du fait de la conservation et de l’utilisation ultérieure des
données collectées.
• En premier lieu, l’établissement de crédit peut être tenté d’utiliser ces données à des
fins de prospection sur d’autres produits bancaires ou financiers, c’est-à-dire pour un
autre but que celui qui a présidé à la collecte ;

1107
LAURENT A., Les banques face au défi de leur sécurité : comment prévenir plutôt que guérir ?, 29
novembre 2005, disponible sur : www.atelier.fr . L’auteur révèle aussi que le terme « phishing » parfois francisé
en « hameçonage » est issu de la contraction entre « fishing » (pêche) et « phreaking » (piratage téléphonique).
1108
DUMOUT E., Une proposition de loi pour pénaliser l’usurpation d’identité sur Internet, 5 juillet 2005,
disponible sur : www.zdnet.fr .
1109
V. Proposition de loi tendant à la pénalisation de l’usurpation d’identité sur les réseaux informatiques,
présentée par le Sénateur DREYFUS-SCMIDT M., deuxième lecture, 25 et 26 octobre 2005, disponible sur :
http://homepage.mac.com/tristanmf/MDS/page4/page4.html
1110
« Elément de donné stocké sur le poste de travail par un serveur Web et contenant l’identification du
serveur, de la page ainsi que tout autre donnée utile au concepteur du site ou de l’application », Banque de
France, Livre Blanc, annexe 3.
1111
LALANDE S., Internet Protocol, L’adresse IP de votre ordinateur : une donnée personnelle relevant du
régime de protection communautaire, décembre 2003, document disponible sur : http://www.droit-
ntic.com/news/afficher.php?id=191.
2ème Partie : Titre 3 – La protection des données personnelles confrontée à la prestation des services371
bancaires et financiers sur l’Internet

• En second lieu, l’automate de calcul peut être le seul intermédiaire pour l’utilisateur
qui veut savoir s’il peut bénéficier du prêt ; autrement dit, l’intervention humaine peut
ne pas être nécessaire, mais la « vision » que pourra avoir l’automate de la situation
financière du candidat à l’emprunt sera nécessairement incomplète, même si le
formulaire peut paraître suffisant ;
• En troisième lieu, en cas de refus d’accorder le prêt, l’établissement de crédit peut
conserver ces données et s’en servir pour une demande future, cette demande se
soldant par un nouveau refus ;
• En quatrième lieu, l’établissement de crédit peut envisager de céder ces données à un
partenaire pour qu’il les exploite commercialement, dans l’Union Européenne ou en
dehors d’elle.

729. Plan. En ce qui concerne le droit interne, la loi de 1978 modifiée par celle de 2004 ne se
contente pas d’accorder des droits au consommateur, personne concernée par les données à
caractère personnel, mais encadre la collecte et le traitement de formalités et conditionne
largement leur légalité. Il en ressort une double protection pour le consommateur : l’une,
positive, par les droits que la loi lui reconnaît (chapitre 1), l’autre, négative, par les obligations
imposées au professionnel (chapitre 2).
CHAPITRE 1er

LA PROTECTION PAR LES DROITS ACCORDÉS

730. Une protection ancienne. Les droits accordés à la personne concernée par les données à
caractère personnel ne sont pas une nouveauté issue de la loi de 2004. Déjà, la loi
informatique et libertés, dans sa rédaction de 1978, lui consentait un droit d’accès et de
rectification à travers son article 34. L’objectif affirmé de ce texte est de protéger la personne
fichée, le législateur ayant considéré que les collectes de telles données ainsi que leur
traitement constituaient des atteintes aux libertés et à la vie privée.

731. Internet et monde bancaire. Si certains ont pu la qualifier de « réussite législative assez
exceptionnelle »1112, la montée en puissance de l’Internet et des moyens informatiques,
permettant une mondialisation et une automatisation des collectes et des traitements, soumet
la loi de 1978 à un nouveau défi. Pourtant, à sa lecture, force est de constater qu’elle n’est pas
particulièrement propre à l’Internet. L’article 23 envisage toutefois la possibilité d’effectuer la
déclaration du traitement électroniquement et l’article 32 vise expressément les utilisateurs
des réseaux de communication électroniques. Certes, l’Internet n’est qu’un canal de
communication mais le texte apparaît pauvre en références électroniques. La question de
l’adaptation des droits du consommateur au contexte dématérialisé est donc importante,
d’autant plus que les établissements de crédit semblent concernés au premier plan par le
traitement des données à caractère personnel. En effet, non seulement les opérations bancaires
mentionnées à l’article L.311-1 du Code monétaire et financier, comme par exemple les
opérations de crédit, nécessitent un tel traitement, mais encore la pratique bancaire a
développé des outils basés sur ces données afin d’évaluer les capacités financières de leurs
clients et les risques encourus par ceux-ci. Dans l’ensemble, les consommateurs sont habitués
à fournir des informations générales dans le cadre du commerce électronique, ils sont en
revanche plus réticents lorsqu’il s’agit de données personnelles financières. « Dès lors, les
banques proposant des services en ligne se doivent d’assurer la confidentialité des données

1112
FRAYSSINET J., art. préc., in fine.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 373

qu’elles possèdent et ont tout intérêt à démontrer leur volonté de protéger et satisfaire leurs
clients par des signes tels que : labels, signatures, chartes de respect de la vie privée »1113.

732. Processus. Il est évident que le fonctionnement des opérations en ligne suppose au préalable
un échange d’informations entre le client et sa banque. Les données à caractère personnel
collectées en ligne à l’aide de formulaires remplis volontairement par le consommateur,
proviennent majoritairement des sites bancaires1114. L’ensemble de ces données collectées,
compilé dans un fichier1115, fait ensuite l’objet d’un traitement en agence ou par un automate.
Ainsi, les notions clés de données à caractère personnel et de traitement doivent être
précisées, définissant, entre autres, le champ d’application de la protection (section 1) avant
d’analyser le contenu même des droits reconnus au consommateur (section 2).

Section 1. Le champ d’application de la protection

733. Plan. On peut noter une forte convergence entre la loi de 1978 et la directive de 1995, une
ressemblance qui se manifeste par de grandes similitudes textuelles. Très simplement, nous
pouvons délimiter un champ d’application de la protection accordée ratione materiae (§1) et
ratione personae (§2).

§ 1er. Ratione materiae

734. Activités personnelles. Concrètement, aux termes de son article 2, la loi de 1978 modifiée
concerne tant les traitements automatisés de données à caractère personnel que les traitements
non automatisés de telles données contenues ou appelées à figurer dans des fichiers, à
l'exception des traitements mis en oeuvre pour l'exercice d'activités exclusivement
personnelles. S’agissant d’opérations bancaires et financières en ligne, ce sont
systématiquement des traitements automatisés qui seront employés en raison de la quantité
d’informations collectées et des délais de traitement. Les établissements de crédit, par suite,
seront automatiquement englobés dans le champ d’application de la loi, ces derniers

1113
GAUZENTE C., DUVAL A.-C., PIHAN B. et HUYNH H., Respect des informations personnelles des
clients : les pratiques des sites français, Banque magazine, avril 2004, n° 657, p. 48.
1114
Ibid.
1115
L’article 2 alinéa 4 de la loi de 1978 indique que constitue un fichier de données à caractère personnel tout
ensemble structuré et stable de données à caractère personnel accessibles selon des critères déterminés.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 374

n’agissant jamais dans le cadre d’activités personnelles ; par là, le législateur en effet, n’a
voulu viser globalement que les carnets personnels d’adresses. Au-delà de ces activités, les
notions de données à caractère personnel et de traitement appellent un examen particulier.

735. Données à caractère personnel : définition. On considère comme une donnée à caractère
personnel1116 toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être
identifiée, directement ou indirectement, par référence à un numéro d'identification ou à un ou
plusieurs éléments qui lui sont propres1117. Le texte de la loi est ici assez large. Il peut s’agir
du nom1118, prénom, date de naissance, adresse postale, adresse IP d’un ordinateur, numéro de
téléphone, plaque d’immatriculation d’un véhicule, empreinte digitale ou génétique, photo1119,
numéro de sécurité sociale… De même, le numéro de carte de paiement doit recevoir la
qualification de donnée à caractère personnel parce qu’il permet d’identifier son titulaire.

736. Comparaison. Le législateur de 2004 a été amené, en transposant la directive de 1995 à


préciser la définition qu’il avait donnée de la notion de données à caractère personnel sans
toutefois se calquer complètement sur celle de la directive. En effet, il n’a pas souhaité
reprendre la liste des éléments spécifiques propres à la personne concernée, telle qu’elle était
suggérée par la directive (identité physique, physiologique, psychique, économique, culturelle
ou sociale). D’autres définitions des données à caractère personnel existent, notamment celle
énoncée par la Convention du conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard
du traitement automatisé des données à caractère personnel1120, ou bien celle du Comité des
ministres du conseil de l’Europe issue d’une recommandation sur la protection des données à
caractère personnel utilisées à des fins de recherche scientifique et de statistique1121. Quelles
que soient les distinctions textuelles, l’essentiel, le point commun reste l’information qui
concerne une personne physique identifiée ou identifiable.

1116
Dans sa rédaction antérieure, la loi de 1978 parle de données nominatives ; les deux notions sont, semble-t-il
synonymes, le législateur de 2004 se mettant simplement en conformité avec le vocabulaire de la directive de
1995.
1117
Article 2 al. 2 de la loi de 1978 modifiée.
1118
Pour la diffusion d’un annuaire professionnel en ligne, cf. délibération de la CNIL du 7 novembre 1995,
Droit de l’informatique et des télécoms, 1996, n°2, p65, note MOLE A.
1119
Tribunal correctionnel de Privas, 3 septembre 1997, disponible sur : http://www.cyberlex.org/haas/coquine.ht
m, note HAAS G. et TISSOT O.
1120
« Toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable ».
1121
Recommandation n°R (83), 1983 : « Toute information concernant une personne physique identifiée ou
identifiable. Une personne physique n’est pas considérée comme identifiable si cette identification nécessite des
délais, des coûts ou des activités déraisonnables ».
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 375

737. La question de l’adresse électronique, le courriel1122. Il est d’usage que le site d’un
établissement de crédit collecte une adresse email afin de permettre à son titulaire de recevoir
des offres commerciales1123 ou bien une lettre d’information. La question de savoir si cette
adresse fait partie des données à caractère personnel ne semble pas aujourd’hui poser de
problème. Dans une délibération en date du 24 octobre 20021124, la CNIL a rappelé le
caractère nominatif de cette données : « sont réputées nominatives au sens de la présente
loi1125 les informations qui permettent, sous quelque forme que ce soit, directement ou
indirectement, l’identification des personnes physiques auxquelles elles s’appliquent, que le
traitement soit effectué par une personne physique ou par une personne morale ». Ainsi, une
adresse électronique est directement nominative lorsque le nom de l’internaute figure dans le
libellé de l’adresse et, lorsque tel n’est pas le cas, elle est considérée indirectement nominative
dans la mesure où toute adresse électronique peut être associée à un nom. La protection
instaurée par la loi de 1978 modifiée trouvera donc à s’appliquer.

738. Notion de traitement des données. Selon l’alinéa 3 de l’article 2 de la loi de 1978, constitue
un traitement de données à caractère personnel « toute opération ou tout ensemble
d'opérations portant sur de telles données, quel que soit le procédé utilisé, et notamment la
collecte, l'enregistrement, l'organisation, la conservation, l'adaptation ou la modification,
l'extraction, la consultation, l'utilisation, la communication par transmission, diffusion ou
toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l'interconnexion, ainsi que le
verrouillage, l'effacement ou la destruction ». Bien que cette liste ne soit pas exhaustive,
l’énumération peut paraître impressionnante. Quoi qu’il en soit, le traitement par l’automate
d’un site Internet rentre évidemment dans cet inventaire1126.

1122
BISIAUX P. et MONEGER F., Le commerce électronique sur Internet et la protection des données
personnelles, mémoire DEA Informatique et Droit, 1997-1998.
1123
« L’Union française du marketing direct a conçu, avec l’appui de la Cnil, un code de déontologie détaillant
les conditions d’utilisations de l’e-mail marketing », DEVILLARD A., L’e-mail commercial donne des gages de
bonne conduite, 8 avril 2005, disponible sur www.01net.com . Dans le même sens, la CNIL par les délibérations
du 22 et 30 mars 2005 « a reconnu conformes à la loi du 6 janvier 1978 deux projets de codes de déontologie
des professionnels du marketing direct relatifs à l’e-mailing », 11 avril 2005, disponible sur : www.cnil.fr .
1124
Délibération n° 02- 075 du 24 octobre 2002 portant dénonciation au parquet d’infractions a la loi du 6 janvier
1978.
1125
Article 4 de la loi du 6 janvier 1978.
1126
Office de Coordination Bancaire et Financier, Bulletin d’information n°663, décembre 2004, p.2
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 376

§ 2. Ratione personae

739. Le consommateur. Le consommateur est au centre du dispositif de protection des données


personnelles dans la mesure où la loi ne vise que les données relatives à des personnes
physiques1127. Par conséquent, toutes les données collectées par l’établissement de crédit sur
ce type de clients que ce soit à l’occasion de l’ouverture d’un compte, de l’octroi d’un crédit
ou de la souscription à un service de bourse en ligne, seront concernées par la protection
légale. Pourtant, d’autres protagonistes influent sur le champ d’application de la loi, qui ne
sera pas nécessairement applicable à tout consommateur de services financiers français.

740. Le responsable du traitement. En effet, l’applicabilité de la protection légale est encore


conditionnée par l’existence de traitements de données à caractère personnel dont le
responsable est établi sur le territoire français ou qui, sans être établi sur le territoire français
ou sur celui d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, recourt à des moyens de
traitement situés sur le territoire français. Avec l’Internet, il n’est jamais heureux de définir un
champ d’application au moyen du critère du territoire. Ceci étant, la loi de 1978 trouvera à
s’appliquer dès lors que le site d’un établissement, quel que soit son Etat d’origine, est
hébergé en France. Dans le cas contraire, la loi pourrait ne pas s’appliquer si l’établissement
de crédit ne désigne pas un responsable du traitement parmi son personnel en France, s’il en
dispose. C’est, par ce biais, une sorte de principe de la loi du pays d’origine qui se trouve mise
en avant, de facto ; simplement la loi de 1978 va un peu plus loin en soumettant tous
« moyens de traitement » situés en France à la loi informatique et liberté.

Section 2. Les droits du consommateur

741. Plan. L’alinéa 5 de l’article 2 de la loi de 1978 ne définit pas clairement, c’est le moins que
l’on puisse dire, la notion de personne protégée. C’est en réalité la référence à d’autres articles
de la loi qui permettent de la situer comme une personne physique. L’alinéa 5 de l’article 2 se
contente d’affirmer que « la personne concernée par un traitement de données à caractère
personnel [donc susceptible d’être protégée] est celle à laquelle se rapportent les données qui

1127
Pour l’application aux données dans l’entreprise, cf. SEDALLIAN V., L'utilisation d'Internet dans
l'entreprise, Lettre de l'Internet juridique, 28 janvier 1998, disponible sur : http://www.argia.fr/lij/ ; Lamy droit
de l'Informatique et des réseaux, n°448, 2003, p280 ; MATHIAS G., l’impact de la directive européenne relative
à la protection des données à caractère personnel sur les entreprises européennes et extra-européennes, 10 janvier
2000, disponible sur: . http://www.juriscom.net/pro/2/priv20000110.htm.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 377

font l'objet du traitement ». Le contraire eût été en effet étonnant ; par contre, on peut déduire
de cette formulation que l’exercice des droits sera attaché à la personne concernée par les
données. La loi consacre à son profit deux types de droits : le droit d’opposition (§1) et le
droit d’accès (§2) que l’on peut lui-même subdiviser en droit de communication ainsi qu’en
droit de modification et de suppression.

§ 1. Droit d’opposition

742. Contrôle du secteur bancaire. Le contenu et les limites du droit d’opposition font l’objet
d’une illustration particulière dans le secteur bancaire et financier en raison des pratiques
commerciales des établissements de crédit. Etant donnée la surveillance accrue de la CNIL la
protection du consommateur sera nécessairement plus forte dans les domaines précités.

743. Principe : contenu et limites. Le droit d’opposition accordé au consommateur1128 résulte de


l’article 38 de la loi informatique et liberté modifiée. Ainsi, toute personne physique a-t-elle le
droit de s'opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel
fassent l'objet d'un traitement. Le client d’un établissement de crédit a donc le droit de refuser
à ce que les données le concernant soient utilisées à des fins de prospection, notamment
commerciale, suite à la souscription d’un service financier en ligne. En revanche, ce droit
d’opposition disparaît lorsque le traitement répond à une obligation légale ou lorsque
l'application de ces dispositions a été écartée par une stipulation expresse de l'acte autorisant
le traitement. En d’autres termes, le client de l’établissement de crédit ne pourra pas faire
jouer son droit d’opposition s’il a contractuellement donné son accord, fût-ce dans un acte
concernant un autre objet que la prospection commerciale ou bien dans le cas où la loi impose
un tel traitement. Dans le secteur bancaire et financier, on pense particulièrement au FICP
dont l’existence est légalement prévue par les articles L. 333-4 et 333-5 du Code de la
consommation.

744. Illustration : obligation de transparence et réticence des établissements de crédit. Nous


l’avons vu, afin de renforcer les droits du consommateur investisseur, suite à l’adoption de la
loi MURCEF, les principaux établissements de crédit se sont engagés, dans une charte signée
le 9 janvier 2003, à proposer à leurs clients une convention de compte précisant le

1128
MALLET-POUJOL N., Appropriation de l'information : l'éternelle chimère, Dalloz 1997, 38ème cahier,
Chron. p. 330.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 378

fonctionnement de leur compte de dépôt. Aujourd’hui, plus précisément, c’est l’arrêté du 8


mars 20051129 qui précise les principales stipulations devant figurer dans les conventions de
compte de dépôt. Tant la charte signée que le nouvel arrêté, dans son article 2 2°, imposent
aux établissements de crédit d’informer leurs clients sur « les finalités des traitements mis en
oeuvre par l'établissement de crédit, les destinataires des informations, le droit de s'opposer à
un traitement des données à des fins de prospection commerciale ainsi que les modalités
d'exercice du droit d'accès aux informations concernant le client, conformément aux lois en
vigueur ». La mesure ne choque pas ; en effet, via l’Internet, il ne s’agit que d’une application
simple de la loi de 1978. Pourtant, elle se heurte pratiquement à la réticence des
établissements de crédit, principalement dans la disposition concernant l’information et
l’opposition à l’utilisation des données à des fins de prospection commerciale. En effet, quoi
de plus facile pour ces organismes, profitant d’un fichier de prospection loyalement constitué,
que de reprendre les données fournies à l’occasion d’une ouverture de compte pour ensuite
prospecter le consommateur sur un autre produit ou service bancaire ? La tentation est
grande1130 ! Aussi, une analyse de la CNIL1131 a-t-elle récemment révélé la carence de la
majorité des établissements de crédits sur l’information des consommateurs à propos de la
finalité du traitement (commercial en l’espèce), alors que les moyens permettant au
consommateur de s’opposer à une telle prospection sont techniquement très simples à mettre
en œuvre (case à cocher sur le formulaire en ligne). La mauvaise foi des établissements de
crédit est donc claire, ces derniers attendant une intervention de la CNIL pour légaliser leurs
pratiques. Par conséquent, ces établissements doivent prendre conscience qu’ils ont un rôle
très important à jouer dans la protection du consommateur et que leur politique commerciale
peut directement influer sur la confiance1132 de ce dernier. L’Internet est un outil qui peut,
outre leur permettre de remplir leurs obligations légales, renforcer encore cette confiance.

745. Droit d’opposition et opt in. Le droit d’opposition prévu par la loi de 1978 se rapproche dans
sa finalité du régime d’opt in consacré par la LEN ; en effet, rappelons qu’en vertu de ce
dernier, les communications électroniques à caractère commercial ne peuvent être adressées à

1129
Arrêté du 8 mars 2005 portant application de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier précisant les
principales stipulations devant figurer dans les conventions de compte de dépôt.
1130
Comp. TGI Nanterre 2 juin 2004, invalidant 36 clauses du contrat d’accès à Internet d’AOL dont celle
relative à la transmission des donnés à de tiers sans accord des personnes concernées, BEKY A., Net : L’UFC-
Que Choisir est satisfaite de la condamnation d’AOL, disponible sur :http://www.neteco.com/article_200406211
53555_.html.
1131
Séance du 18 juin 2004.
1132
GAUZENTE C., DUVAL A-C., PIHAN HOANG HUYNH B., Respect des informations personnelles des
clients : les pratiques des sites français, Banque magazine, n°657, avril 2004, p.48.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 379

leur destinataire (consommateur) qu’avec leur consentement préalable. La question de


l’articulation entre les deux mesures peut donc se poser. En réalité, il semble qu’il faille
appréhender ces deux dispositions sous un angle chronologique. Ainsi, la LEN s’applique-t-
elle pour toute prospection, a priori, en dehors de toute relation contractuelle ou souscription
à un service financier en ligne. Ensuite, le droit d’opposition prend le relais, le consommateur
pouvant s’opposer à ce que l’établissement de crédit se serve des données personnelles à
d’autres fins que celles justifiant la collecte.

§ 2. Droit d’accès

746. Plan. Protection majeure, le droit d’accès comprend un droit de communication et un droit de
modification (A) et de suppression (B). Là encore, les principes généraux posés par la loi
trouvent une application particulière en droit bancaire du fait de l’existence de fichiers
d’origine légale.

A. Droit de communication

747. Contenu général. Aux termes de l’article 39 de la loi de 1978, toute personne physique
justifiant de son identité a le droit d'interroger le responsable d'un traitement de données à
caractère personnel en vue d'obtenir :
• La confirmation que des données à caractère personnel la concernant font ou ne font
pas l'objet de ce traitement ;
• Des informations relatives aux finalités du traitement, aux catégories de données à
caractère personnel traitées et aux destinataires ou aux catégories de destinataires
auxquels les données sont communiquées ;
• Le cas échéant, des informations relatives aux transferts de données à caractère
personnel envisagés à destination d'un Etat non membre de la Communauté
européenne ;
• La communication, sous une forme accessible, des données à caractère personnel qui
la concernent ainsi que de toute information disponible quant à l'origine de celles-ci ;
• Les informations permettant de connaître et de contester la logique qui sous-tend le
traitement automatisé en cas de décision prise sur le fondement de celui-ci et
produisant des effets juridiques à l'égard de l'intéressé.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 380

748. FICP1133. Prévu par les articles L.333-41134 et L.333-5 du Code de la consommation,
dernièrement modifiés par la loi du 18 janvier 20051135, ce fichier recense les incidents de
paiement relatifs aux crédits1136. Les informations qu’il contient sont par nature des données à
caractère personnel, car l’alinéa 1 de l’article L.334-4 indique clairement qu’il est soumis à la
loi informatique et liberté de 1978, ce qui constitue indéniablement une protection pour le
consommateur dans la mesure où il bénéficiera a priori des droits d’accès et de rectification.
De même, d’autres textes envisagent une information du consommateur préalable à
l’inscription au FICP. En effet, l’article 4 du Règlement n° 2004-01 du 15 janvier 20041137
impose à l’établissement de crédit, dès qu’un incident est constaté, d’informer le débiteur
défaillant que le problème sera déclaré à la Banque de France à l’issue d’un délai d’un
mois1138. Pourtant, le dernier alinéa de l’article L. 333-4 interdit la remise à quiconque d’une
copie, sous quelque forme que ce soit, des informations qu’il contient, y compris au
consommateur qui exercerait ses prérogatives en vertu de la loi de 1978. Il en résulte que le
droit d’accès consacré par cette loi s’efface devant l’ordre public économique et que,
finalement, le consommateur ne pourra obtenir de la Banque de France que l’existence ou non
de son inscription, voire demander sa main levée via l’établissement de crédit qui a fait
procéder à l’inscription. Mais il faut noter que cette mesure ne porte pas nécessairement
atteinte aux droits du consommateur, mais le protège davantage contre des demandes d’accès
extérieures aux informations le concernant, y compris sollicitées via l’Internet.

749. Refus de crédit et droit d’accès et de communication. Dans l’hypothèse où le


consommateur se voit refuser l’octroi d’un crédit, la loi de 1978 modifiée lui reconnaît, en
vertu de son article 39-4°, un droit à se voir communiquer, sous une forme accessible, les
renseignements qui la concernent. Plus encore, l’article 39-5° impose également dans ce cas
la communication des informations « permettant de connaître et de contester la logique qui
sous-tend le traitement automatisé en cas de décision prise sur le fondement de celui-ci et
produisant des effets juridiques ». Dès lors, en cas de refus de crédit, le consommateur pourra

1133
Fichier national des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers, créé par la loi du 31 décembre
1989 relative à la prévention et au règlement des difficultés liées au surendettement des particuliers et des
familles.
1134
Article relevant de l’ordre public de protection sociale par avis de la Cour de cassation n°09420028P du 16
décembre 1994.
1135
Loi n°2005-32 du 18 janvier 2005.
1136
Découvert bancaire, carte de paiement différé ou crédit remboursable par échéances.
1137
Règlement du Comité de la Réglementation bancaire modifiant le Règlement 90-05 du 11 avril 1990.
1138
La demande de délais de paiement formulée auprès du juge n’empêche pas l’inscription au FICP. V. à ce
sujet Cass. 1er civ., 23 nov. 2004, Contrats conc. consom., février 2005, p.23, note RAYMOND G.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 381

légalement demander la communication du score et de la raison de ce résultat négatif. En


conséquence, si en droit français, l’établissement de crédit n’est théoriquement pas tenu de
motiver son refus d’octroi de crédit, la loi de 1978 introduit de facto cette hypothèse.

B. Droit de modification et de suppression

750. Une protection complémentaire. L’article 40 de la loi précise encore que cette personne
peut exiger du responsable d'un traitement que soient, selon les cas, rectifiées, complétées,
mises à jour, verrouillées ou effacées les données à caractère personnel la concernant, qui sont
inexactes, incomplètes, équivoques, périmées, ou dont la collecte, l'utilisation, la
communication ou la conservation est interdite. De cette manière, un consommateur ayant
obtenu la mainlevée d’un fichage au FICP pourra naturellement faire rectifier ses données
auprès de son établissement de crédit, de manière à récupérer sa capacité d’emprunt. Mais la
protection du consommateur va ici plus loin, dans la mesure où la loi impose au responsable
du traitement de justifier qu'il a procédé aux opérations de rectification et instaure un véritable
renversement de la charge de la preuve en cas de contestation1139. De même, il appartient au
responsable du traitement d’accomplir toutes les diligences utiles en cas de communication
des données à des tiers. Le consommateur en ressort donc largement protégé.

1139
Sauf lorsqu'il est établi que les données contestées ont été communiquées par l'intéressé ou avec son accord
(article 40 alinéa 3).
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 1 – La protection par les droits accordés 382

CONCLUSION

751. Un champ d’application large. Pratiquement, la loi couvre toutes les informations
concernant un consommateur client d’un établissement de crédit qui se servirait d’Internet
pour l’accomplissement d’opérations de banque.

752. Des droits complets. On peut conclure que les droits accordés à la personne concernée par les
données à caractère personnel sont importants. Et il revient à cette dernière d’en contrôler
l’usage. Soit d’abord, a priori, en s’opposant à tout traitement, soit ensuite, en interrogeant
l’établissement de crédit pour savoir si des données la concernant font l’objet d’un traitement
soit, enfin, en demandant la rectification de ces données voire leur suppression. L’ensemble
de la chaîne du traitement est couvert et le consommateur sera susceptible d’intervenir quel
qu’en soit le stade.

753. Une protection accrue. Particulièrement, dans le secteur bancaire et financier, s’il présente
certaines spécificités (FICP) pouvant restreindre l’exercice de ses droits par le consommateur,
de manière plus générale on peut remarquer que la protection qui lui est accordée sera plus
grande que dans d’autres secteurs du commerce. C’est en effet grâce au contrôle de la CNIL
que les établissements de crédit seront plus enclins à respecter les droits des
consommateurs1140.

754. Une protection « négative ». Il n’en reste pas moins que la protection du consommateur, au-
delà des droits qui lui sont reconnus, pourrait se voir limiter par d’autres aspects liés à
l’utilisation de ces données à caractère personnel. La loi impose donc à la charge du
responsable du traitement, et par lui, à la charge de l’établissement de crédit, un certain
nombre d’obligations lourdement sanctionnées.

1140
En 2003, la CNIL a délivré quatre avertissements à des établissements financiers qui n’avaient pas respecté
la réglementation relative au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, 24ème
rapport d’activité 2003 de la CNIL du 22 juin 2004, in JCP E, n°27, 1er juillet 2004, p.1077. D’autres organes
auront sûrement un rôle à jouer comme par exemple le groupe de travail « article 29 » sur la protection des
données, établi par la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995. Cf.
recommandation concernant certaines exigences minimales pour la collecte en ligne de données à caractère
personnel dans l’Union européenne adoptée par ce groupe le 17 mai 2001 ; également pour une initiative
d’autorégulation : la Liberty Alliance, cf. HOGGE B., la Liberty Alliance sensibilise sur la protection des
données au sein de l’UE, 15 avril 2005, disponible sur : www.zdnet.fr .
CHAPITRE 2

LA PROTECTION PAR LES OBLIGATIONS IMPOSÉES

755. Un ensemble protecteur. Le législateur français, sous impulsion communautaire, crée


véritablement un cadre sécuritaire pour le consommateur dans le cadre de l’utilisation des
données à caractère personnel le concernant ; en plus d’une série de droits qu’il lui accorde, il
impose au responsable du traitement, le professionnel dans notre cas, de respecter de
nombreuses obligations. Celles-ci, au-delà de leur « sanctionnablilité », n’ont pour autre
objectif que de moraliser les pratiques de collecte et de traitement. En effet, avec l’Internet,
qui organise par définition un transfert (émission, réception) d’informations depuis
l’ordinateur de l’utilisateur, un flot considérable de données se retrouve accessible en ligne.

756. Un ensemble cohérent. Les obligations du responsable du traitement, corollaires des droits
du consommateur, ont également pour vocation d’intervenir à tous les stades du traitement au
sens large. Avant même la réalisation effective de la collecte de données, le consommateur
devra en connaître la finalité : la collecte doit être loyale et la durée de conservation des
données devra respecter la finalité prévue.

757. Plan. Aussi, diverses obligations à la charge du responsable sont-elles identifiées par la loi de
1978. Certaines concernent la légalité du traitement (section 1), d’autres sa mise en œuvre
(section 2).

Section 1. Les conditions de la légalité du traitement

758. Distinction. La légalité du traitement stricto sensu suppose simplement que ce traitement ait
reçu le consentement de la personne concernée par les données (§2) ; pourtant d’autres
conditions relatives à la collecte et à la conservation de données (§1) doivent être remplies.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 384

§ 1. Conditions relatives aux données

759. Licéité de la collecte. Pour qu’elles fassent l’objet d’un traitement, les données à caractère
personnel doivent encore avoir été loyalement collectées1141. Par exemple, des adresses mail
recueillies sur Internet au moyen de logiciels dits « aspirateurs »1142 ne respecteraient pas les
conditions de la loi, pas plus que les données collectées au moyen de cookies installés sur
l’ordinateur du client à son insu. Ces données sont théoriquement et juridiquement
« intraitables ». Outre l’achat en ligne de fichiers (eux-mêmes régulièrement constitués), le
principal mode de collecte loyale est donc pour l’établissement de crédit la présence d’un
formulaire que le consommateur remplit volontairement ; il faut encore que la collecte
réponde à une finalité certaine (A). Enfin, ces données, une fois traitées seront généralement
conservées ; la question de la durée de conservation se pose alors (B).

A. Finalité de la collecte

760. La nécessité d’une finalité explicite. D’une part, il ne peut exister de collecte sans finalité de
traitement déterminée, explicite et légitime1143 et le respect de celle-ci. Il s’agit probablement
d’un des points les plus importants de la loi de 1978 qui conditionne, outre la proportionnalité
des données et leur durée de conservation, la bonne information des consommateurs. Ce n’est,
en effet, que si les finalités de traitement effectivement annoncées par l’établissement de
crédit sont respectées que la confiance du consommateur pourra se voir renforcée. En d’autres
termes, une adresse mail collectée sur le site d’un établissement de crédit suite à une demande
de crédit ne doit pas servir à prospecter ultérieurement le candidat à l’emprunt sur d’autres
produits bancaires. La loi précise à cet effet que ces données ne doivent pas être traitées
ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités1144.

761. Fichiers négatifs / fichiers positifs. Le FICP constitue assurément un fichier dit « négatif »
dans la mesure où sa finalité est de prévenir les incidents répétés de remboursement et
d’endettement excessif. On constate à l’heure actuelle un double mouvement. En premier lieu,
les établissements de crédit tentent de consulter les fichiers existants pour se prémunir des
risques représentés par les clients insolvables, réalisant par-là un véritable détournement des

1141
Article 6 1° de la loi de 1978.
1142
V. à ce sujet, CAHEN M.-I., L’aspiration d’un site web, 29 mai 2002, disponible sur : www.droit-ntic.com .
1143
Article 6 2° de la loi de 1978.
1144
Les traitements à des fins statistiques restent en tout état de cause compatibles avec les finalités initiales.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 385

finalités, notamment du FICP1145. En second lieu, comme l’indique un membre de la CNIL,


« un nouvel échelon risque d’être franchi par la mise en œuvre de fichiers positifs »1146
lesquels permettraient de connaître les capacités d’emprunt des consommateurs.

762. Proportionnalité à la finalité. Outre leur caractère exact et complet1147, les données doivent
être adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités du traitement et de la
collecte1148. D’une part, cela signifie que sont interdites1149 les collectes de données qui font
apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions
politiques, philosophiques ou religieuses ou l'appartenance syndicale des personnes, ou qui
sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci, c’est-à-dire qui pourraient générer
une discrimination. D’autre part, ne peuvent être collectées pour un traitement mis en oeuvre
que les données qui lui sont strictement nécessaires. S’agissant de prestations bancaires et
financières en ligne, toutes les données relatives à l’état civil, aux revenus, à la situation
patrimoniale et à la situation professionnelle pourront paraître pertinentes ; l’appréciation se
fera donc nécessairement au cas par cas, en fonction de la teneur du produit ou du service
bancaire et surtout du risque financier encouru par l’établissement de crédit lors de
l’opération.

763. Objectivisation de la demande. Il apparaît de ce point de vue que l’Internet peut davantage
protéger le consommateur en supprimant ces risques de discrimination fondés justement sur
les origines ethniques, la religion ou la nationalité dans la mesure où le formulaire de collecte
ne demandera que des informations objectives liées aux revenus ou à la situation patrimoniale
du demandeur, la profession, l’âge, voire les incompatibilités d’humeur, inhérents à tout
contact physique. Là encore, il est accordé des garanties au consommateur vis-à-vis des
données sensibles comme la nationalité car le traitement de cette donnée doit s’effectuer dans
le respect des principes de finalité et de pertinence des données traitées établis par la loi
« Informatique et Libertés ».

1145
« La CNIL a délivré en mars et juin [2004] cinq nouveaux avertissements à des banques ou établissement de
crédit. Les banques utilisent parfois le FICP comme un fichier commun de clients indésirables », JCP E, n°27,
1er juillet 2004, p.1077.
1146
NOGRIX P., risques bancaires, tribune de la CNIL, 18 juin 2004, disponible sur : www.cnil.fr .
1147
Article 6 4° de la loi de 1978.
1148
Article 6 3° de la loi de 1978.
1149
Article 6 4° de la loi de 1978.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 386

764. Nationalité : fin de l’ambiguïté. La CNIL, dans une délibération du 22 décembre 1998, a
précisé « que la nationalité des demandeurs d'un crédit ne saurait être prise en compte pour
apprécier la capacité de remboursement des intéressés ». Pratiquement, cela impliquerait
qu’elle ne peut pas entrer dans le calcul du score attribué au consommateur ; pourtant les
établissements de crédit justifient de l’emploi d’un critère lié à la nationalité pour prendre en
compte les difficultés de recouvrement dans l'hypothèse où le débiteur regagnerait son pays
d'origine. De son côté, la CNIL admet que « la durée de validité du titre de séjour des
ressortissants étrangers vivant en France constitue une variable pertinente en tout cas pour
les crédits comportant un long échelonnement d'amortissement dans la mesure où elle permet
de déterminer la stabilité de l'emprunteur ». Ainsi, le traitement de cette donnée n’est pas
parfaitement clair pour la CNIL car comme elle le souligne elle-même, « admettre que
l'information relative à la nationalité soit pondérée différemment selon la nationalité serait
considérer que celle-ci constituerait un critère pouvant déterminer de manière significative
un comportement, indifféremment des conditions sociales, financières ou matérielles
caractérisant la situation de l'intéressé », ce qui pourrait constituer une pratique
discriminatoire pour le consommateur. Devant cette difficulté, le Conseil d’Etat s’est
prononcé dans une décision du 30 octobre 20011150, indiquant que le critère de la nationalité
n’est pas une discrimination et constitue une donnée pertinente d’évaluation. La pratique de la
prise en compte par les établissements de crédit de la nationalité de leurs clients est donc
« légalisée ». Il n’en reste pas moins que la collecte de cette donnée doit suivre la finalité du
traitement.

B. La durée de conservation des données

765. Durée nécessaire. La loi n’indique pas de durée maximale de conservation des données mais
calque celle-ci sur la finalité pour lesquelles elles sont collectées1151, ce qui est d’autant plus
souhaitable. En effet, certaines données ne seront conservées que pour une durée très courte,
comme par exemple le temps d’obtenir un renseignement de la part d’un établissement de
crédit concurrent ou bien, au contraire, pour toute la durée des relations contractuelles entre
l’établissement et son client dans le cadre d’une convention de compte (plusieurs années). Il

1150
CE, 30 octobre 2001, Les Petites Affiches, n°218, 1er novembre 2001. 3 ; Communication-Commerce
électronique mai 2002, n°79, note LEPAGE ; D. 2002. J. 1869, note AUDIT ; JCP G, 2002, II, 10140, note
SOMBETZKI-LENGAGNE.
1151
Article 6-5° de la loi de 1978.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 387

est à noter que pour certains types de données, le législateur s’est prononcé pour une durée
maximale1152. Consciente de l’enjeu entourant la conservation des informations collectées, la
CNIL dans sa délibération n° 2005-213 du 11 octobre 2005 a adopté une recommandation
concernant les modalités d’archivage électronique, dans le secteur privé, de données à
caractère personnel1153. Désormais, il convient d’entendre par archivage électronique « les
pratiques de conservation des données visées à l’article 2 de la loi du 6 janvier 1978
modifiée, que celles-ci soient collectées, reçues, établies ou transformées sous forme
électronique, par toute personne, service ou organisme privé dans l’exercice de son
activité »1154. En outre, c’est au responsable du traitement qu’il revient de mettre en place de
procédures d’archivage nécessaires pour s’adapter aux catégories de données identifiées par
CNIL1155.

766. Conservation des numéros de cartes bancaires1156. Dans la mesure où le numéro de carte
bancaire permet l’identification de son titulaire, il constitue une donnée nominative au sens de
l’article 2 de la loi de 1978. En outre, nous l’avons vu, la principale réticence du
consommateur au paiement en ligne réside dans la communication au site marchand de son
numéro de carte bancaire et, par suite, la crainte d’une réutilisation ultérieure à son insu, voire
une interception. Par conséquent, la problématique du stockage de ce numéro suite à une
opération en ligne (et plus largement dans la cadre d’une vente à distance) est primordiale : la
CNIL considère que « la question de l’utilisation des moyens de paiement … reste
certainement l’un des éléments -clés du développement futur du commerce électronique »1157.

767. Le cadre légal. Il n’y a pas, à notre connaissance, d’obligations légales limitant a priori la
durée de conservation du numéro de carte bancaire ; ce n’est qu’a posteriori, lors de la
déclaration faite à la CNIL de l’utilisation par un site Internet d’un système de traitement des

1152
1 an pour la conservation des données de connexion par les fournisseurs d’accès à Internet. Pour une
application, cf. Vanves, ordonnance de référé du 25 juin 2002.
1153
Délibération n° 2005-213 du 11 octobre 2005 portant adoption d'une recommandation concernant les
modalités d’archivage électronique, dans le secteur privé, de données à caractère personnel, disponible sur :
http://www.cnil.fr/index.php?id=1887
1154
Ibid.
1155
A savoir : données d’utilisation courantes, données intermédiaires, données définitives. V. délibération
précitée, DOMNESQUE V., Recommandation de la CNIL sur l’archivage électronique de données personnelles
dans les entreprises du secteur privé, 5 décembre 2005, disponible sur : www.droit-ntic.com
1156
Numéro et date de validité figurant sur le recto des cartes de paiement « CB » émises par les établissements
de crédit utilisables chez les commerçants et prestataires de services affiliés au réseau « CB ».
1157
Recommandation de la CNIL sur l'utilisation du numéro de carte bancaire dans le secteur de la vente à
distance, disponible sur : http://www.cnil.fr/index.php?id=1005
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 388

données nominatives1158 qu’une durée de conservation, commune à l’ensemble de ces


données, doit être déclarée, en vertu de l’article 30 5° de la loi de 1978. Il y a, de ce point de
vue, peut- être une distinction à opérer entre les différentes données nominatives, certaines
paraissant, eu égard au double objectif de sécurisation des consommateurs et de
développement du commerce électronique, plus importantes que d’autres. Le numéro de carte
bancaire fait assurément partie de ces données sensibles. Par ailleurs, l’article 24 I 5° de la loi
de 1798, accorde à la CNIL un véritable pouvoir normatif lui permettant de déterminer la
durée de conservation de telle ou telle donnée. Notons également que la convention n°108 du
Conseil de l'Europe1159, dans son article 5, impose que la collecte et la conservation du
numéro de carte bancaire dans un traitement automatisé d'informations nominatives doivent
s'effectuer dans le respect de finalités déterminées et légitimes, ce qui supposerait que le
numéro communiqué par le consommateur lors d’un achat en ligne, ne soit conservé que pour
la durée strictement nécessaire à son traitement1160. Cela ne semble pas poser de problème
particulier, par exemple dans la réalisation d’une transaction financière ponctuelle ; en
revanche, dans le cadre de conventions à exécution successive, la durée de conservation serait
probablement calquée sur celle de la convention elle-même. Quoi qu’il en soit, lorsque les
données nominatives ne sont plus nécessaires à l'accomplissement des fins prévues, elles
devraient être supprimées. Déjà, une recommandation du Conseil de l’Europe en date du 13
septembre 19901161 préconisait cette solution dans son article 11.1. Enfin un autre problème
apparaît du fait de l’utilisation de cette donnée non plus uniquement à des fins de paiement
mais comme identifiant, permettant l’accès à un service en ligne. On pense particulièrement
aux portefeuilles électroniques : le consommateur installe un portefeuille virtuel sur son
ordinateur et lie une ou plusieurs cartes de crédit à ce dernier. Les numéros des cartes sont
entrés de manière sécurisée une seule fois et les transactions suivantes ne nécessitent alors
plus la saisie de ces numéros.

1158
Selon l’article 16 de la loi de 1978.
1159
Convention n°108 du Conseil de l'Europe du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du
traitement automatisé des données à caractère personnel.
1160
Le fait de conserver cette information au delà de la durée prévue dans la déclaration est constitutif d’une
infraction pénale (article 226-20 du Code pénal).
1161
Recommandation n° R (90) 19 du Conseil de l’Europe du 13 septembre 1990 relative à la protection des
données à caractère personnel à des fins de paiement et autres opérations connexes.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 389

768. Position de la CNIL. Elle résulte essentiellement d’une délibération du 19 juin 20031162 et à
pour objectif de fixer des garanties minimales. Selon la commission, l'utilisation du numéro
de carte bancaire à des fins d’identification commerciale doit être subordonnée, lorsque ce
numéro est conservé au-delà du temps nécessaire à la réalisation de la transaction, au recueil
du consentement de la personne concernée, rappelant « qu’aux termes de la directive 95/46 du
24 octobre 19951163, le consentement est toute manifestation de volonté, libre, spécifique et
informée par laquelle la personne concernée accepte que les données la concernant fassent
l’objet d’un traitement ». Par ailleurs, s’agissant du problème de la conservation du numéro
de carte bancaire, la CNIL considère que le professionnel de la vente à distance ne pourrait
légitimement conserver ce numéro que dans le cadre d’un fichier « ayant pour finalité de
lutter contre la fraude au paiement en conservant la trace d’agissements lui ayant porté
préjudice … et que cette utilisation du numéro de carte bancaire soit subordonnée à une
information claire des personnes fichées ainsi qu’à la possibilité pour ces personnes de
s’opposer, pour des motifs légitimes, à un tel traitement ». La recommandation de la CNIL
paraît mesurée et soucieuse de la protection de l’économie générale du marché et ne peut être
qu’approuvée. Ceci étant, remarquons que cette possibilité n’est ouverte qu’en cas de fraude
et non pas, semble-t-il, à tout incident de paiement, même s’il en résulte nécessairement un
préjudice pour le professionnel. En conséquent, ce dernier ne pourrait s’en servir pour justifier
une discrimination ou un refus de vente, même s’il pourrait légitimement refuser ce mode de
paiement.

769. Conséquences. Sous réserve que ce fichier « fraude » soit lui-même régulièrement déclaré, il
en résulte que les personnes fichées, en application de l’article 10 de la directive de 1995,
doivent également être informées de la finalité et de l'identité du responsable du traitement.
Conformément à l’article 26 de la loi du 6 janvier 1978, ces personnes (physiques) auront le
droit de s'opposer, pour des raisons légitimes, à ce que des informations nominatives les
concernant fassent l'objet de ce traitement. On constate donc une opposition entre la légitimité
du traitement pour le professionnel, d’un côté, et le droit d’opposition du particulier, de

1162
Délibération n° 03-034 du 19 juin 2003 portant adoption d'une recommandation relative au stockage et à
l’utilisation du numéro de carte bancaire dans le secteur de la vente à distance, disponible sur :
http://www.cnil.fr/index.php?id=1357.
1163
Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des
personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces
données.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 390

l’autre, réduisant à néant le premier. Reste que l’appréciation de la « légitimité » de


l’opposition pourrait venir au secours du professionnel.

770. Bilan : protection par l’information. In fine, l’essentiel est que s’agissant d’utilisation des
numéros de cartes bancaires collectés loyalement1164, sa condition soit clairement exposée au
consommateur, notamment sa finalité et que soit prévue une faculté pour lui de s’y opposer.
En pratique, sur l’Internet, le droit d'opposition peut facilement s'exercer, par exemple, au
moyen d’une case à cocher dans un formulaire. De même, en cas de mémorisation de ce
numéro sur ordinateur1165, le consommateur doit être informé des risques liés à tel dispositif,
et doit disposer de la possibilité de s’y opposer1166 (c’est-à-dire de les désactiver ou de les
supprimer). Théoriquement, les protections existent au profit du consommateur ; il reste donc
à espérer une généralisation de leur mise en œuvre. Néanmoins, malgré ces précautions et au-
delà de la protection des données nominatives, la Commission appelle de ses vœux
l’utilisation de moyens de paiement électronique sécurisés alternatifs garantissant l’anonymat
des paiements réalisés par leurs clients1167. En effet, la quantité d’informations véhiculée par
le recours à ces modes peut engendrer des risques d’atteinte à la vie privée.

§ 2. Conditions relatives aux traitements

771. Principe du consentement de la personne concernée. En tout état de cause, le traitement de


données à caractère personnel doit avoir reçu le consentement de la personne concernée1168. Il
s’agit là d’une protection générale complétant l’idée de collecte loyale ; néanmoins, on peut
espérer que cette disposition serve de base à la lutte contre les cookies et autre fichier traçant
le comportement du consommateur, dans la mesure où ces fichiers sont quasi
systématiquement mis en œuvre à l’insu de l’utilisateur. Simplement, ce principe souffre
exception. Il en est ainsi naturellement si une obligation légale incombe au responsable du
traitement ou dans le cadre de l'exécution, soit d'un contrat auquel la personne concernée est
partie, soit de mesures précontractuelles prises à la demande de celle-ci. Cette exception est

1164
L'article 25 de la loi du 6 janvier 1978 dispose que la collecte de données opérée par tout moyen frauduleux,
déloyal ou illicite est interdite.
1165
Notamment par l’utilisation de cookies.
1166
Directive du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la
vie privée dans le secteur des communications électroniques.
1167
Délibération de 19 juin 2003, précitée.
1168
Article 7 alinéa 1 de la loi de 1978.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 391

compréhensible car le traitement des données peut être considéré comme l’accessoire du
contrat auquel la personne a consenti.

772. Remise en cause du principe ? En revanche, le 5° de l’article 7 de la loi de 1978 prévoit une
dernière exception délicate à interpréter. En effet, le consentement du consommateur ne serait
pas nécessaire dans le cadre de la « réalisation de l'intérêt légitime poursuivi par le
responsable du traitement ou par le destinataire, sous réserve de ne pas méconnaître l'intérêt
ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée ». Certes, la loi de 2004
modifiant celle de 1978 reprend les termes du f) de l’article 7 de la directive de 1995.
Cependant certains s’interrogent sur la portée particulièrement générale de cette dernière
exception qui « fragilise substantiellement la portée du principe du consentement de la
personne1169 ». Il est vrai que les exemples fournis par le considérant 30 de la directive1170 ne
sont pas limitatifs et que cette exception pourrait rapidement couvrir l’ensemble des
traitements : gestion courante des entreprises, communication à des tiers de données à
caractère personnel à des fins de prospection commerciale. Dès la conception du projet de loi,
le Professeur J. FRAYSSINET s’était inquiété de la reprise, par le droit interne, de ce point,
jugeant que « prise au pied de la lettre, cette rédaction ruine en grande partie le principe du
consentement et amène à peser au trébuchet1171 ». En effet, une fin commerciale est toujours
légitime pour l’entreprise. Pour ces raisons, nous pensons avec certains auteurs que cette
disposition ne doit pas « être considérée comme constituant la règle en matière de traitement
des données »1172. Certes, la loi de 1978 rajoute une spécificité textuelle française puisqu’elle
semble tempérer cette exception en insérant la formule « sous réserve de ne pas méconnaître

1169
TABAKA B., TESAR Y., Loi informatique et libertés, un nouveau cadre juridique pour le traitement des
données à caractère personnel, dossier in le forum des droits sur l’Internet, octobre 2004, disponible sur :
http://www.foruminternet.org/telechargement/documents/doss-loi78-20041018.pdf, p.34.
1170
« Considérant que, pour être licite, un traitement de données à caractère personnel doit en outre être fondé
sur le consentement de la personne concernée ou être nécessaire à la conclusion ou à l'exécution d'un contrat
liant la personne concernée, ou au respect d'une obligation légale, ou à l'exécution d'une mission d'intérêt public
ou relevant de l'exercice de l'autorité publique, ou encore à la réalisation d'un intérêt légitime d'une personne à
condition que ne prévalent pas l'intérêt ou les droits et libertés de la personne concernée; que, en particulier, en
vue d'assurer l'équilibre des intérêts en cause, tout en garantissant une concurrence effective, les Etats membres
peuvent préciser les conditions dans lesquelles des données à caractère personnel peuvent être utilisées et
communiquées à des tiers dans le cadre d'activités légitimes de gestion courante des entreprises et autres
organismes; que, de même, ils peuvent préciser les conditions dans lesquelles la communication à des tiers de
données à caractère personnel peut être effectuée à des fins de prospection commerciale, ou de prospection faite
par une association à but caritatif ou par d'autres associations ou fondations, par exemple à caractère politique,
dans le respect de dispositions visant à permettre aux personnes concernées de s'opposer sans devoir indiquer
leurs motifs et sans frais au traitement des données les concernant ».
1171
FRAYSSINET J., Le projet de loi relatif à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de
données à caractère personnel : constante et nouveauté, Chroniques, Ed. J.-Cl., janvier 2002, p. 12.
1172
TABAKA B., TESAR Y., ibid.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 392

l'intérêt ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée » qui comme le


relève l’auteur, « utilisé par la CNIL ou le juge, peut se révéler moins laxiste et ambiguë que
le texte1173 », mais il conclut justement que ce peut également être l’inverse. L’exception
prévue reste donc pour le moins douteuse.

Section 2. La mise en œuvre du traitement

773. Pluralité d’obligations. La légalité du traitement du point de vue de sa mise en œuvre


suppose que soient réalisées un certain nombre de formalités préalables (§1). Les obligations
du responsable du traitement ne se limitent cependant pas à ces formalités et pèsent sur lui les
traditionnelles obligations du professionnel (§2)

§1. Obligations préalables à la mise en œuvre du traitement

774. Plan. Selon la nature du traitement, il devra être soit déclaré auprès de la CNIL, soit soumis à
autorisation préalable. Le contenu de ces formalités (A) laisse apparaître un problème propre
au secteur bancaire et financier, celui de la notation de la clientèle bancaire (B).

A. Contenu des obligations préalables

775. Déclaration du site. Selon l’article 22 de la loi de 1978 modifiée, les traitements automatisés
de données à caractère personnel doivent faire l'objet d'une déclaration auprès de la CNIL.
Afin de faciliter cette démarche, la CNIL a adopté le 7 juin 2005 une nouvelle norme destinée
à alléger les procédures relatives à la gestion des fichiers clients1174. Ainsi, les sites Internet
des établissements de crédit qui mettent en œuvre une collecte de données personnelles
doivent être déclarés préalablement à leur mise en ligne. Il s’agit incontestablement d’une
protection pour le consommateur puisqu’à la vue de cette déclaration, la CNIL pourra
effectivement contrôler le bon respect de la légalité et de la finalité du traitement.

1173
FRAYSSINET J., ibid.
1174
CNIL, Une nouvelle norme simplifiée pour la déclaration des fichiers de clients et de prospects, 22 juin
2005, disponible sur : www.cnil.fr ; PUEL H., Les fichiers clients des sites Web sous surveillance de la Cnil, 23
juin 2005, disponible sur : www.01net.fr ; DUMOUT E., Les e-commerçants bénéficient de la déclaration
simplifiée de leurs fichiers clients, 27 juin 2005, disponible sur : www.zdnet.fr ; LE CLAINCHE J., Le
consentement est mort, vive la prospection, 27 juin 2005, disponible sur : www.droit-ntic.com .
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 393

776. Traitement soumis à autorisation. En revanche, pour des traitements que l’on peut qualifier
de sensibles qu’elle liste dans son article 25, la loi impose une autorisation préalable de la
CNIL. Comme le souligne un auteur, « on peut se réjouir du renforcement du pouvoir de
contrôle a priori de la CNIL résultant de l’autorisation qui correspond à des aspects
importants de la protection, à des sujets sensibles dont certains ont donné lieu à polémique.
Mais le risque est de voir dans la réalité des catégories de traitements dangereux nouvelles
apparaître alors qu’elle ne sont pas prévues1175 ». Particulièrement, dans le secteur bancaire
et financier, l’article 25 I 4° de la loi de 1978 soumet les traitements automatisés susceptibles,
du fait de leur nature, de leur portée ou de leurs finalités, d'exclure des personnes du bénéfice
d'un droit, d'une prestation ou d'un contrat en l'absence de toute disposition législative ou
réglementaire. Ce principe trouve un large écho en droit bancaire en raison des pratiques de
scoring1176 et doit être regardé avec celui posé par l’article 10 alinéa 2 selon lequel aucune
décision produisant des effets juridiques à l'égard d'une personne ne peut être prise sur le seul
fondement d'un traitement automatisé de données destiné à définir le profil de l'intéressé ou à
évaluer certains aspects de sa personnalité.

777. Le correspondant à la protection des données1177. L’article 22 III de la loi prévoit enfin que
les traitements pour lesquels le responsable a désigné un correspondant à la protection des
données à caractère personnel1178 1179
chargé d’assurer, d’une manière indépendante, le
respect des obligations prévues par la loi sont dispensés des formalités de déclaration, sauf
lorsqu’un transfert de données à caractère personnel à destination d’un État non membre de la
Communauté européenne est envisagé. En tout état de cause, cette désignation ne permettrait
pas à l’établissement de crédit d’éluder purement et simplement les obligations de la loi ; en
effet, cette nomination du correspondant doit être notifiée à la CNIL et portée à la
connaissance des instances représentatives du personnel, de sorte que le contrôle soit toujours

1175
FRAYSSINET J., art. préc., p. 14.
1176
Méthode statistique permettant d'analyser une situation, sur la base d'un ensemble de critères pertinents
pondérés selon leur degré d'importance.
1177
Le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 portant sur l’application de la loi informatique et libertés, est
venu déterminer le rôle exact de la fonction du correspondant pour la protection des données personnelles.
1178
Ou selon la terminologie employée par la CNIL, correspondant informatique et libertés (CIL).
1179
V. à ce sujet, PERRAY R., Protection des données personnelles : un correspondant pour quoi faire ?,
disponible sur : www.droit-technologie.org, 15 décembre 2005 ; FENOLL-TROUSSEAU M.-P., Le
correspondant informatique et libertés (CIL), JCP E, n° 49, 8 décembre 2005, p. 2084. Toutefois cette nouvelle
fonction suscite de nombreuses interrogations quant au statut, la qualité et le régime de responsabilité applicable
au correspondant, v. CREPIN C., Correspondant « Informatique et Libertés » : un encadrement juridique
incomplet ?, disponible sur : http://www.droit-ntic.com/news/afficher.php?id=333, 29 novembre 2005 ;
VERCKEN G. , VAN OSSEL G. et SERPAGLI C., Le « correspondant à la protection des données » : une
création inachevée ?, RLDI, octobre 2005, n°9, p. 58.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 394

possible. De même, une liste des traitements effectués doit être tenue et mise à disposition de
toute personne en faisant la demande. En réalité, la loi crée un nouveau salarié protégé
puisque ce correspondant ne peut faire l’objet d’aucune sanction de la part de son employeur
du fait de l’accomplissement de ses missions ; l’allègement des procédures de déclaration des
traitements a donc son « revers de médaille », d’autant plus que le correspondant peut saisir la
CNIL des difficultés qu’il rencontre dans l’exercice de ses missions. Le risque d’ingérence de
la CNIL pèserait donc sur l’établissement de crédit comme une véritable épée de Damoclès.

B. La notation de la clientèle bancaire

778. La question du scoring1180. Pratique validée par le Conseil d’Etat à l’encontre d’une
délibération de la CNIL1181, les établissements de crédit utilisent souvent des systèmes de
notation de leurs clients (scoring) afin d’apprécier le risque lié aux opérations engagées
(ouverture de compte, crédit). Précisons que cette technique constitue le domaine exclusif
d’établissements spécialisés dénommés « agences de notation »1182 dont les règles ont été
édictées par la loi de sécurité financière1183. Plus particulièrement, la CNIL s’est prononcée
récemment1184 sur les nouveaux systèmes mis en œuvre dans le cadre du ratio de
solvabilité1185 «Mac Donough»1186 et à leur conformité à la loi de 1978. L’utilité d’un tel
système n’est pas à remettre en cause tant il est indispensable que les établissements de crédit
disposent d'un niveau de fonds propres suffisant pour combler leurs pertes éventuelles, afin
d’assurer la stabilité du système financier et de prévenir les faillites bancaires. En bref, ce
nouveau ratio vise à mesurer l'ensemble des risques auxquels l’établissement de crédit est

1180
BONNEAU T., Droit bancaire, op. cit., n°493, p.345.
1181
Sur la décision du Conseil d’Etat du 30 octobre 2001, cf. supra n° 764.
1182
V. à ce sujet, Le rapport 2004 de l’AMF sur les agences de notation du 26 janvier 2005, disponible à sur :
http://www.amf-france.org/documents/general/5845_1.pdf ; DONDERO B., Le rapport de l’AMF sur les
agences de notation, RDBF, mai-juin 2005, p.65.
1183
Loi n° 2003-706 du 1er août 2003 formulant deux règles à propos des agences de notation telles que énoncées
respectivement aux articles L. 544-3 et L.544-4 du Code monétaire et financier.
1184
Note d'information du 3 mars 2005 sur les conséquences au regard de la loi « Informatique et Libertés »
modifiée de la notation de la clientèle bancaire (ratio prudentiel « Mac Donough » - Bâle II), disponible sur :
http://www.cnil.fr/fileadmin/documents/approfondir/dossier/Mac_Donough_info.pdf.
1185
Méthode statistique ayant pour objectif de calculer, pour l’ensemble des engagements financiers d’une
banque, et au regard des « probabilités de défaut » de clients ou classes de clients, le niveau de fonds propres
dont elle doit disposer
1186
Nouvel Accord sur le ratio international de solvabilité (Bâle II) le 26 juin 2004 remplaçant le ratio de Coke
(Bâle I) mis en place en 1988.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 395

exposé (risque de crédit, risques opérationnels, etc.) au moyen de systèmes informatiques de


surveillance et de notation de la clientèle1187.

779. Problématique liée aux données nominatives1188. Cette réforme a pour conséquence directe
le développement de systèmes informatiques analysant l'ensemble des informations
disponibles sur les consommateurs. Par suite, il est déterminé un niveau de risque applicable à
chaque client de l’établissement de crédit à partir de toutes les informations dont il dispose
(situation financière, professionnelle, familiale, etc.). On le voit aisément, le risque pour le
consommateur investisseur est de se voir « catégorisé » en fonction de la note que
l’établissement crédit lui aura attribuée. Cette évaluation, naturellement accessible au réseau
commercial de l’établissement, y compris via un site Internet, servira de base pour apprécier
l’opportunité d’octroi d'un produit ou d’un service financier ainsi que le risque corrélatif.

780. La protection accordée par le droit interne. Ces traitements entrent implacablement dans le
champ de l’article 25 I 4° de la loi de 1978 dont le but est justement de soumettre à
autorisation préalable de la CNIL « les traitements automatisés susceptibles, du fait de leur
nature, de leur portée ou de leurs finalités, d'exclure des personnes du bénéfice d'un droit,
d'une prestation ou d'un contrat en l'absence de toute disposition législative ou
réglementaire ». En outre, les variables utilisées dans le calcul d'un score sont également
susceptibles d'être vérifiées par la CNIL. Celle-ci a d’ailleurs recommandé dans une séance du
3 mars 2005 que « des procédures devraient être définies concernant l'utilisation du score
accessible par le réseau commercial d'un établissement ; la transmission d’informations au
sein d’un groupe, dans la perspective de calculer une note, devrait faire l’objet de procédures
spécifiques ; la notation d'un client ne devrait pas être accessible en permanence sur la fiche
informatique de ce client ». En pratique, on comprend facilement la troisième
recommandation de la CNIL concernant la présence « en permanence » du score sur la fiche
du client car il est certain que toutes les opérations bancaires ne présentent pas le même
risque, de même que toutes ne nécessitent pas une analyse de situation ; a fortiori, on se

1187
Il s'appuie sur trois piliers : une exigence minimale en fonds propres (un ratio fonds propres / risques de
crédit + risque opérationnel + risques de marché, égal ou supérieur à 8%.), une surveillance individuelle par le
régulateur national, et des règles en matière d'information publiée.
1188
CARON L., « informatique et liberté et le crédit scoring », Banque et droit n°83, mai-juin 2002. 19 ;
BARRET-BARNAY M.-C., les différents systèmes d’enregistrement des crédits dans les Etats membres de
l’Union européenne, D. 2003, doct. 1082.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 396

heurterait alors au véritable droit au compte1189 consacré par l’article L312-1 du Code
monétaire et financier. Cependant, s’agissant des « procédures » qui devraient être instituées,
la commission reste plutôt vague ; il semble donc que l’essentiel est la traçabilité de cette
information afin que sa communication, à défaut d’être limitée, soit contrôlée.
781. Refus de crédit1190. A partir du moment où le consommateur effectuera une demande de
crédit via un formulaire du site Internet d’un établissement de crédit, une vérification auprès
du FICP sera réalisée par l’établissement. L’article L. 333-4 du Code de la consommation
s’appliquant, on peut s’interroger sur la possibilité de configurer automatiquement l’automate
pour qu’il interroge lui-même, et sans une intervention humaine, le fichier. Il est possible de
considérer que c’est en réalité l’établissement de crédit qui procède à l’interrogation auprès de
la Banque de France à travers l’automate présent sur son site. Cependant un risque évident
pour le consommateur naît du fait que l’intervention humaine n’est alors plus requise, la
configuration de l’automate aboutissant à un refus systématique de crédit dès lors qu’il reçoit
une réponse positive du FICP. Néanmoins, une nouvelle protection est accordée au
consommateur car ce procédé se heurterait certainement à l’article 10 alinéa 2 de la loi de
1978 selon lequel « aucune autre décision produisant des effets juridiques à l'égard d'une
personne ne peut être prise sur le seul fondement d'un traitement automatisé de données
destiné à définir le profil de l'intéressé ou à évaluer certains aspects de sa personnalité1191 ».
En conséquence, même via l’Internet, l’intervention humaine sera nécessaire dans l’octroi ou
le refus du crédit. De ce point de vue, on peut donc affirmer que la protection du
consommateur n’est pas moins bien assurée via l’Internet.

§ 2. Obligations du responsable du traitement

782. Des obligations classiques1192. On peut y voir l’adaptation du droit commun des obligations à
la question particulière des données à caractère personnel. Aussi, comme tout professionnel,
le responsable du traitement doit-il respecter une obligation de sécurité (A) concernant les

1189
Le Conseil de la concurrence, dans un avis n°05-A-08 du 31 mars 2005, s’est prononcé sur ce service
bancaire de base. Il estime que la non rémunération des services pourrait inciter les établissements de crédit à
agir pour éviter que les consommateurs y aient accès, principalement les consommateurs défaillants titulaires de
comptes à qui ils facturent déjà ces services.
1190
Cf. BONNEAU T., Du droit au crédit, RDBF, janvier/février 2002, n° 1, p.3.
1191
Pour des dispositions similaire en droit belge, la loi du 8 juin 1992 sur la protection de la vie privée modifiée
par la loi du 11 décembre 1998 interdit qu’une telle décision de refus ou d’acceptation soit prise en vertu d’un
processus entièrement automatisé sans la moindre intervention humaine.
1192
MALLET-POUJOL N., op. cit., n° 26 et s. p.6 et s.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 397

données et une obligation d’information (B) à l’égard de la personne concernée. D’autres


obligations, enfin, lui incombent en cas de communication de ces données (C).

A. L’obligation de sécurité.

783. Une obligation de moyens ? L'article 17 de la directive du 24 octobre 1995 et l’article 34


alinéa 1 de la loi de 1978 imposent au responsable du traitement de prendre toutes précautions
utiles pour préserver la sécurité des données et, notamment, empêcher qu'elles soient
déformées, endommagées, ou que des tiers non autorisés y aient accès. Cela comprend
certainement la destruction accidentelle ou illicite, la perte accidentelle, l'altération, la
diffusion ou l'accès non autorisé à ces données. Il semble pourtant qu’on ne puisse y déceler
qu’une obligation de moyens à la charge du responsable du traitement. En effet, la CNIL
rappelle que « ces mesures doivent assurer, compte tenu de l'état de l'art et des coûts liés à
leur mise en oeuvre, un niveau de sécurité approprié au regard des risques présentés par le
traitement et de la nature des données à protéger »1193. A ce titre, on peut considérer que les
données nominatives à caractère financier, et particulièrement le numéro de carte bancaire,
sont d’une nature justifiant une protection particulière. En d’autres termes, l’obligation que
pourra avoir le responsable du traitement d’un établissement de crédit ou d’un professionnel
mettant en œuvre un paiement en ligne1194 ne sera probablement pas de la même teneur que
celle d’autres professionnels se contentant d’un formulaire de prise de contact. De plus, en cas
de sous-traitance du traitement, l’établissement de crédit ne pourrait faire supporter
contractuellement la charge de sa responsabilité à son co-contractant, étant donné que le
contrat qui les lie doit impérativement prévoir que le sous-traitant n'agit que sur la seule
instruction du responsable du traitement, même si l’obligation de sécurité lui est également
applicable.

784. Recommandations prudentielles. La CNIL recommande1195 principalement aux


responsables de traitement de prendre des mesures organisationnelles telles « qu’une politique
de gestion stricte des habilitations de leur personnel, ne donnant accès au numéro de carte
bancaire des clients que lorsque cela est rigoureusement nécessaire et aux seules personnes

1193
Délibération n° 03-034 préc.
1194
Pratiquement, il s’agira du responsable de l’établissement de crédit dans la mesure où le paiement s’effectue
souvent sur son propre site.
1195
Délibération n° 03-034 préc.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 398

exerçant des fonctions liées à la finalité déclarée ». De même, des mesures de base peuvent
consister en des numéros tronqués (seuls les 5 derniers chiffres restent apparents) ou bien le
recours à des procédé de cryptage du numéro dès la réalisation de la transaction1196.

B. Obligation d’information.

785. Contenu. Aux termes de l’article 32 de la loi de 1978 modifiée, la personne auprès de
laquelle sont recueillies des données à caractère privé, c’est-à-dire – pour ce qui nous
concerne – le consommateur, doit être informée :
• De l'identité du responsable du traitement et, le cas échéant, de celle de son
représentant ;
• De la finalité poursuivie par le traitement auquel les données sont destinées ;
• Du caractère obligatoire ou facultatif des réponses ;
• Des conséquences éventuelles, à son égard, d'un défaut de réponse ;
• Des destinataires ou catégories de destinataires des données ;
• Des droits qu'elle tient des dispositions de la loi (droit d’accès…) ;
• Le cas échéant, des transferts de données à caractère personnel envisagés à destination
d'un Etat non membre de la Communauté européenne.

786. Internet et « formalisme ». S’agissant d’une obligation d’information à respecter dans le


cadre d’Internet, les renseignements devront nécessairement être « formalisées » dans une
page prévue à cet effet. Néanmoins, la protection instaurée par la loi est bien plus subtile car
l’établissement de crédit ne pourrait, aux fins de respecter ses obligations, se contenter d’une
page de mentions générales regroupant toutes les informations prévues par la loi
(généralement illisible en raison du caractère de la police volontairement employée). A cet
effet, lorsque la collecte sera opérée – c’est dans la grande majorité le cas – via un formulaire,
celui-ci devra porter mention des prescriptions relatives à l’identité du responsable, de la
finalité du traitement, du caractère obligatoire des réponses, des droits d’accès et de
modification de sorte que le consentement du consommateur soit le plus éclairé possible. De
même, en cas d’utilisation de cookies par le site de l’établissement de crédit, le consommateur

1196
En 2003, la CNIL a délivré deux avertissements en 2004 à des banques pour défaut de sécurité et de
confidentialité des informations concernant leurs clients, JCP E, n°27, 1er juillet 2004, p.1077.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 399

devra être informé1197 de manière claire et complète de leur finalité et des moyens dont il
dispose pour s'y opposer. Pratiquement, les établissements de crédit devront décrire
simplement la procédure informatique à suivre pour supprimer ces fichiers.

C. Communication des données à des partenaires commerciaux1198.

787. Plan. Plusieurs remarques générales seront faites (a) avant d’envisager le flux transfrontières
de données à caractère personnel (b).

a. Remarques générales

788. Communication et spam. A la suite d’une collecte loyale de données nominative en ligne, au
moyen de la souscription à un service bancaire ou financier, il peut arriver que le
consommateur reçoive d’autres propositions émanant d’organismes qu’il n’a pas directement
sollicités. La qualification juridique de ces messages électroniques commerciaux pourrait
tomber dans la catégorie des messages non sollicités (spam) pour lesquels la LEN impose de
requérir le consentement préalable (opt in) du consommateur. La question relève alors de
l’information sur la finalité comme précédemment. Dans le cas d’une collecte déloyale,
l’auteur de cette pratique est susceptible d’être sanctionné pénalement au sens de l’article 226-
18 du Code pénal. En ce sens, l’arrêt du 18 mai 2005 de la Cour d’appel de Paris qui a
condamné une société pour avoir collecté des adresses électroniques sans le consentement de
leurs détenteurs1199. Bien entendu, le même sort pourrait être réservé à une banque agissant
d’une manière illégale.

789. Communication et secret bancaire. En revanche, plus délicate est celle la communication de
données financières, autres que le courriel, eu égard au secret bancaire prévu par l’article
L.511-33 du Code monétaire et financier « qui a consacré, dans le prolongement de l’article

1197
Sauf s’ils ont pour finalité exclusive de permettre ou faciliter la communication par voie électronique ou s’ils
sont strictement nécessaires à la fourniture d'un service de communication en ligne à la demande expresse de
l'utilisateur.
1198
« Dis-moi ce que tu consommes et je saurai qui tu es pour le faire savoir aux autres » ; FRAYSSINET J.,
Bases de données comportementales sur les consommateurs et Cnil, commentaire de l’arrêt du Conseil d’Etat du
30 juillet 1997, Expertises des systèmes d’information, janvier 1998, p.431.
1199
DUMOUT E., La société ABS condamnée à 3000 euros d’amende pour collecte illégale d’e-mails, 30 mai
2005, disponible sur : www.zdnet.fr ; CNIL, La Cour d’appel de Paris condamne un expéditeur de courriers
électroniques non sollicités dont la CNIL avait dénoncé les agissements et qui avait été relaxé en première
instance, 30 mai 2005, disponible sur : www.cnil.fr .
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 400

378 du Code pénal, le secret professionnel du banquier, en tant que principe de portée
générale »1200. L’établissement de crédit peut, en effet, être tenté de céder, par exemple des
informations relatives au revenu des clients… En réalité, comme le relève le Professeur
T. BONNEAU, le secret bancaire1201 couvre « uniquement les informations confidentielles
[c’est-à-dire] des informations précises comme par exemple les informations chiffrées »1202.
Concrètement, le secret bancaire vise les soldes de compte, le montant d’un crédit accordé1203,
l’existence et le montant d’un découvert ou encore le verso d’un chèque, qui porte les
coordonnées bancaires du bénéficiaire1204. En revanche ne tombent pas dans le champ du
secret bancaire les informations générales : comme le souligne justement l’auteur, « la
fourniture de renseignement est d’ailleurs un service bancaire »1205 1206
. En outre, certains
estiment que le secret ne s’étend pas aux éléments purement factuels relatifs à la demande de
prêt1207. Toutefois, il n’est pas contestable que les données collectées aient un caractère de
renseignement d’ordre privé. Pour cela, afin d’éviter une éventuelle sanction, on peut
envisager que l’établissement de crédit, dans ces conditions générales d’utilisation de son site
Internet, insère une clause particulière dite de « levée du secret bancaire »1208. Se pose alors la
question de la validité de l’opération, c’est-à-dire de la communication des données à des
partenaires à des fins de prospection suite à l’insertion d’une telle stipulation. On peut
légitimement s’interroger sur la disproportion, au détriment du consommateur, induite par une

1200
LEGRAND G., Le secret bancaire ou la théorie de la relativité. Etat des lieux à l’usage des banques et de
leurs clients, JCP E, 30 juin 2005, n° 26, p. 1105.
1201
GAVALDA C., le secret bancaire français, Dr. Prat. Com. Int. 1990. 57, spéc. n°5.
1202
BONNEAU T., op. cit., n°413, p. 283.
1203
Rennes, 13 janvier 1992, JCP E, 1993, II, 432, note GAVALDA C. ; RDBF n°46, novembre-décembre 1994.
258, obs. CREDOT F-.J. et GERARD Y. ; Versailles, 23 mars 1994, D. 1994. som. com. 328, obs. VASSEUR
M. ; Banque, n°556, février 1995. 89, obs. GUILLOT J.L. ; RDBF n°46, novembre-décembre 1994. 259, obs.
CREDOT F.J. et GERARD Y. ; Paris, 24 septembre 1996, RDBF n°58, novembre/décembre 1996. 235, obs.
CREDOT F.J. et GERARD Y.
1204
Cass. Com., 13 juin 1995, n° 93-16.317: Bull. civ. 1995, IV, n° 172, p. 159; RTD com. 1995, p.818, n°4,
obs. CABRILLAC; Banque 1995, n° 563, p.93, obs. Guillot; RDBF 1995, p.145, obs. CREDOT F. et GERARD
Y. – Cass. Com., 8 juill. 2003, n° 00-11.993, Sté Générale c/ Mme Montaurier : D. 2003, p. 2170, obs. AVENA-
ROBARDET ; JCP G 2004, II, 10068, note GIBIRILA D. ; JCP E 2004, 1020 ; Banque et droit 2004, n° 93, p.
54, obs. BONNEAu T. ; RDBF 2004, comm. 5 ; RTD com. 2003, p. 783, obs. CABRILLAC. – Cass. Com., 18
févr. 2004 n° 353 : RJDA 2004, n° 878. – Cass. Com. 9 juin 2004 n° 918 F-D, BNP Paribas c/ Delannoy : RJDA
2004, n° 1363, p. 1212.Références citées dans LEGRAND G., art. précité.
1205
BONNEAU T., op. cit., n°413, p. 284 note 422.
1206
CREDOT F.J., Le secret bancaire, son étendue et ses limites, la fourniture de renseignements commerciaux
par les banques, LPA, n°21, 17 février 1993. 8.
1207
BERTREL J.P., Obligation au secret professionnel du banquier, BRDA n°14, 31 juillet1991, p.3.
1208
« Parce que le secret bancaire est de simple protection du client, celui-ci peut y renoncer », BONNEAU, op.
cit., note 425, p 284 ; Com., 11 avril 1995, Bull. civ. IV, n°121, p. 197 ; RDBF n°50, juillet/août 1995. 145, obs.
CREDOT F. et GERARD Y. ; RTD com. 1995. 635, obs. CABRILLAC ; Quotidien juridique n°51, 27 juin
1995. 4 ; JCP 1996, ed. E., I, 525, n°6, obs. GAVALDA et STOUFFLET; D. 1996. J. 573, note,
MATSOPOULOU ; BONNEAU T., communication de pièces et secret bancaire, RDBF n°49, mai/juin 1995.94 ;
Com. 23 octobre 2001, Dr. soc., février 2002, n°22 , note BONNEAU T.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 401

telle mention dans le cadre d’une convention qui est, quasi systématiquement, un contrat
d’adhésion. Il semble que pour cette raison, l’insertion de la clause de levée du secret bancaire
ne suffirait pas à justifier de l’accord du consommateur concernant la finalité de la collecte.
Par ailleurs, la CNIL a recommandé1209, dans ce cas, de recueillir expressément le
consentement du consommateur au sens de la directive de 1995. Bien entendu, cet accord ne
pourrait donc se déduire d’une non objection de sa part.

b. Les flux transfrontières de données personnelles

790. Principe. Comme le rappelle l’article 68 de la loi de 1978 modifiée, « le responsable d'un
traitement ne peut transférer des données à caractère personnel vers un Etat n'appartenant
pas à la Communauté européenne que si cet Etat assure un niveau de protection suffisant de
la vie privée et des libertés et droits fondamentaux des personnes à l'égard du traitement dont
ces données font l'objet ou peuvent faire l'objet ». Par conséquent, là où le texte énonce une
interdiction de principe au transfert des données hors Union Européenne (sauf protection
suffisante), aucune limitation n'est donc autorisée quant au transfert de données entre Etats
membres, en raison du principe de libre circulation des données que la directive de 1995 a
posé1210 1211. Par ailleurs, la Convention 108 du Conseil de l'Europe1212 précise également que
les flux transfrontières entre les parties ne peuvent être interdits ni soumis à autorisation. Ceci
étant, s’il s’agit de communiquer les données à un partenaire européen, le principe de libre
circulation ne dispense pas de l’obtention du consentement du consommateur au traitement.
De même, cette autorisation demeure nécessaire pour le transfert des données personnelles,
hors Union Européenne, à destination d’Etats ne présentant pas un niveau de protection
suffisant1213. A défaut d’obtenir l’accord de la personne concernée, le TGI de Nanterre a ainsi
jugé que le transfert constitue un « spamming commercial » et la clause le prévoyant doit être
déclarée abusive au regard du Code de la consommation.1214

1209
Communication présentée en séance plénière le 3 juin 2004.
1210
Article 1 de la directive de 1995.
1211
V. BRAIBANT G. (rapport du groupe présidé par), Données personnelles et société de l’information,
Rapport au Premier Ministre sur la transposition en droit français de la directive n°95/46/CE, mars 1998.
1212
Convention 108 du 28 janvier 1981 du Conseil de l`Europe sur la protection des personnes à l`égard du
traitement automatisé des données à caractère personnel
1213
La Commission européenne a adopté le 27 décembre 2004 un nouvel ensemble de clauses contractuelles
types destinées à encadrer les transferts de données vers des responsables de traitement établis hors de l’Union
Européenne.
1214
BENSOUSSAN A., Le transfert de données personnelles est un spamming commercial, 8 octobre 2004,
disponible sur : www.01net.com .
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 402

791. Contrôle du niveau de protection. Le caractère suffisant du niveau de protection doit


s'apprécier en fonction notamment des dispositions en vigueur dans cet Etat, des mesures de
sécurité qui y sont appliquées, des caractéristiques propres du traitement, telles que ses fins et
sa durée, ainsi que de la nature, de l'origine et de la destination des données traitées. Le rôle
de contrôle incombera dès lors à la Commission Européenne1215 et les autorités nationales
comme la CNIL devront s’y conformer. Ce n’est qu’en l’absence de telles décisions de la
Commission que la CNIL devrait retrouver son pouvoir d’appréciation en fonction des
critères définis par la directive de 1995 introduits dans la loi de 1978.

792. Mise en ligne et transfert des données. A partir du moment où des informations sont mises
en ligne sur Internet, la CNIL considère qu'il y a transmission d'informations entre le territoire
français et l'étranger. « Ceci est inhérent au moyen de communication utilisé1216 ». La CJCE,
quant à elle, dans un arrêt du 6 novembre 20031217, tout en rappelant que « l’opération
consistant à faire figurer, sur une page Internet, des données à caractère personnel est à
considérer comme un [tel] traitement », s’est prononcée sur la question de savoir si la mise en
ligne de données personnelles constituait un transfert vers un Etat tiers. En effet, via
l’Internet, l’ensemble de ces informations est accessible à tous les Etats y compris ceux dont
le niveau de protection n’est pas en adéquation avec la directive de 1995. Le raisonnement de
la Cour, pour admettre qu’il n’y avait pas dans ce cas de transfert de données vers un pays
tiers, se fonde sur l’absence de « mécanisme technique » permettant l’envoi automatique des
informations ainsi que sur l’absence de transfert direct entre le responsable du traitement et un
internaute situé dans un pays tiers, en conséquence de quoi admettre l’existence d’un
« transfert vers un pays tiers de données chaque fois que les données à caractère personnel
sont chargées sur une page Internet, reviendrait à ériger le régime spécial de l’article 25 [de
la directive de 1995] en un régime de droit commun pour toutes les opérations liées à
Internet ». La solution posée par la cour semble basée sur des considérations pratiques mais
n’est pas exempte de toute critique. Comment soutenir qu’il n’y a pas de transfert de données
à partir du moment où de telles informations sont chargées sur une page Web ? En réalité, les

1215
Par exemple, la Commission a déjà reconnu l’adéquation des systèmes de protection de Guernesey (Décision
2003/821/CE de la Commission du 21 novembre 2003), de l’Argentine (Décision 2003/490/CE de la
Commission du 30 juin 2003), du de la Suisse (Décision 2000/518/CE de la Commission du 26 juillet 2000) et
de la Hongrie (Décision 2000/519/CE de la Commission du 26 juillet 2000).
1216
SEDALLIAN V., L'utilisation d'Internet dans l'entreprise, art. préc.
1217
CJCE, 6 novembre 2003, LINDQVIST (C-101/01), sur question préjudicielle de la juridiction suédoise.
MUNOZ R., Communication Commerce Electronique, Commentaire de l’arrêt Lindqvist et la protection des
données personnelles, avril 2004, p.67-71.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 403

données sont potentiellement transmises à tous les internautes indépendamment de l’envoi


effectif. On pourrait sentir, dans le raisonnement de la Cour, le spectre de la loi du pays
d’origine ; en effet, la mise en ligne de données ne peut pratiquement pas faire l’objet d’une
vérification des niveaux de protection de tous les pays du monde. En revanche, sans ériger,
comme l’affirme la Cour, l’article 25 au stade de principe, une possibilité restait offerte : celle
du consentement de la personne concernée par le données selon l’article 26 1 a), qu’il soit
tacite ou formalisé. En l’espèce, il nous semble que la Cour aurait dû adopter la solution
inverse sur cette question, le consentement de la personne étant le seul moyen de protection
efficace.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 404

CONCLUSION

793. Bilan. Il ressort clairement de l’analyse que le consommateur se voit doter d’une protection
particulièrement forte en ce qui concerne la protection de ses données personnelles. Tant les
droits qui lui sont accordés, d’une part, que les obligations que la loi met à la charge du
professionnel, d’autre part, lui permettent de disposer de suffisamment d’outils juridiques
pour affronter le monde virtuel de l’Internet. « La France, l’Europe communautaire,
disposent aujourd’hui, par-delà les insuffisances et critiques, d’un système juridique de
protection des données personnelles utiles offrant en l’état beaucoup de ressources1218 ». La
confiance, si chère aux institutions européennes et nationales, ne peut que théoriquement en
sortir renforcée1219.

794. Les particularités du secteur bancaire. Le milieu bancaire et financier est naturellement
friand de données personnelles dans la mesure où il doit souvent apprécier un risque financier
(opération de crédit et scoring) ou bien fournir un certain nombre d’informations (prestation
de renseignements). La loi de 1978 vient donc utilement réglementer un terrain propice aux
atteintes à la sécurité des données personnelles du consommateur.

795. Problème de connaissance de l’outil. Ceci étant, pour que le consommateur puisse faire
valoir ses droits, encore faut-il qu’il les connaisse, mais il ne s’agit pas d’un problème propre
à l’Internet. Sur le problème de la protection des données personnelles, un auteur remarque
que « ce droit tourne trop à vide parce qu’il n’est pas connu et exercé individuellement et
collectivement par les personnes qu’il est sensé protéger…[il] souffre d’une grave déficience
de la conscience et de l’action démocratique »1220. De plus, il est pratiquement impossible
pour le consommateur de connaître avec précision tous les modes de collecte des données
personnelles le concernant et les traitements qui sont mis en œuvre à sa demande ou non. En
conséquence, la réussite et le développement du commerce électronique passent
nécessairement par la moralisation de l’outil Internet du point de vue des professionnels et par
un contrôle accru de la CNIL, seule institution à même de vérifier les bonnes pratiques de
collecte.

1218
FRAYSSINET J., art. préc., p. 15, in fine.
1219
La Commission, dans son rapport du 15 mai 2003 sur la mise en oeuvre de la directive relative à la
protection des données, estime elle-même que l’objectif de haut degré de protection a été atteint.
1220
FRAYSSINET J., ibid.
2ème Partie : Titre 3 : Chapitre 2 – La protection par les obligations imposées 405

796. Les avantages du secteur bancaire. Une fois de plus, le droit bancaire vient apporter sa
spécificité dans la résolution des problèmes liés à l’usage d’Internet. Face au risque principal
de la collecte et du traitement sauvage de données personnelles, qui est potentiellement
considérable, le secteur bancaire se voit imposer le respect strict de la loi, du fait de sa nature
réglementée et de l’importance qu’il joue dans l’économie nationale. Plus simplement, le
secteur bancaire et financier est très contrôlé1221 dans le cadre des ses activités
« matérialisées » ; l’Internet ne change pas la donne dans le contexte de ces prestations
dématérialisées. Sans doute, le risque d’atteinte pour le consommateur est véritablement
réduit grâce à l’intervention et à la surveillance de la CNIL des pratiques en ligne. Aussi peut-
on noter que les établissements de crédit sont les premiers exposés aux lourdes sanctions
pénales instituées par la loi1222. Le Professeur J. FREYSSINET n’hésite pas alors, à qualifier
la CNIL, de « second pilier de la protection des données personnelles », même si elle est
souvent présentée comme un « empêcheur de tourner en rond »1223.

1221
BORNET J-P, La vigilance des autorités de contrôle, RDBF, novembre-décembre 2002, n°6, p. 371 ;
PARLEANI G., Le risque de vigilance excessive des autorités de contrôle, RDBF, novembre-décembre 2002, n°
6, p. 373.
1222
Jusqu’à 300 000 € d’amende (article 47 de la loi de 1978), également article 226- 19 et 21 du Code pénal.
1223
FRAYSSINET J., art. préc, p. 12.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

797. Protection du consommateur. La réalité d’une protection efficace du consommateur face à


l’offre de services bancaires et financiers en ligne repose finalement sur l’existence, de
manière cumulative, de trois éléments : la certitude de la transaction, la reconnaissance de
droits à son profit et corrélativement d’obligations pour l’établissement de crédit ainsi que la
protection de ses données personnelles.

798. Certitude de la transaction bancaire et financière en ligne. Peut-on conclure à une


dématérialisation achevée de la prestation bancaire et financière ? dans l’affirmative, cette
opération peut-elle être considérée comme contractuellement fiable et intangible ? Il est
possible que l’on manque de recul, à ce jour, par rapport aux dernières évolutions législatives
en la matière pour répondre de manière catégorique à ces interrogations. Toutefois, l’objectif
de suppression des obstacles juridiques à la dématérialisation de ces transactions est
globalement atteint. La distinction des notions d’écrit et de papier en a été le point de départ.
En effet, la reconnaissance d’une valeur juridique à l’écrit numérique ainsi que de la nature ad
probationem du formalisme entourant, dans la majeure partie des cas, la transaction bancaire
et financière, autorise une utilisation large de l’outil Internet tant par l’établissement de crédit
que par le consommateur. La dématérialisation des ces opérations n’est cependant pas
totalement achevée dans la mesure où elle est tributaire d’autres évolutions ; par exemple,
l’existence d’une carte d’identité numérique permettrait d’éviter la présentation physique de
documents officiels pour l’ouverture de compte en ligne. En ce qui concerne, ensuite,
l’intangibilité de la transaction, l’article 1369-21224 du Code civil valide une technique du
« double clic » permettant de s’assurer que le cocontractant s’engage en connaissance de
cause de telle sorte qu’il ne pourrait remettre doute le contenu de la transaction. Par ailleurs,
la pratique bancaire et financière a recours à un système d’identification sécurisée, basée sur
la fourniture de codes confidentiels (accès au services en ligne sur le site de l’établissement de
crédit), système qui permet une relative certitude dans l’identité du consommateur. Dès lors,
le lien contractuel apparaît comme fiable.

1224
Article 1369-2 du Code civil : « Pour que le contrat soit valablement conclu, le destinataire de l'offre doit
avoir eu la possibilité de vérifier le détail de sa commande et son prix total, et de corriger d'éventuelles erreurs,
avant de confirmer celle-ci pour exprimer son acceptation ».
Conclusion de la deuxième partie 407

799. Contenu de la protection. Le consommateur dispose-t-il de droits efficients lors de la


réalisation d’une transaction bancaire ou financière en ligne ? A l’analyse, on ne peut que
répondre par l’affirmative à cette question. En matière précontractuelle, il bénéficie d’une
information importante et pertinente lui permettant de connaître son cocontractant ainsi que
les conditions de son engagement. En matière contractuelle, principalement, l’article L.121-
20-12 du Code de la consommation lui accorde un droit de rétractation de quatorze jours,
admettant la remise en cause de la transaction sans avoir à justifier de motif. En outre, l’article
15 de la LEN institue un régime, restant à préciser, de responsabilité de plein droit pesant sur
l’établissement de crédit quant à la bonne exécution des obligations issues de la transaction.
L’ensemble des droits et obligations combinés montre donc une réelle protection du
consommateur.

800. Question des données personnelles. Là encore, les droits accordés au consommateur
(utilisateur) de même que les obligations imposées à l’établissement de crédit sont
conséquents. Il incombe sur ce dernier, de recueillir le consentement pour la collecte des
données mais surtout de déclarer et de respecter la finalité du traitement tandis que
l’utilisateur, tout en étant au préalable informé sur les intentions de cet établissement, dispose
de la faculté de s’opposer et de rectifier les données qui le concerne. Le consommateur
bénéficie également de la garantie du respect de telles obligations grâce à l’action des
autorités de contrôle. En d’autres termes, la protection des données personnelles du
consommateur dans le cadre de transactions bancaires et financières en ligne semble assurée.

801. Bilan. En conséquence, les trois éléments qui, cumulés, doivent manifester d’une protection
efficace du consommateur, semblent se trouver réunis grâce au rôle des législateurs (européen
et national). On peut alors affirmer que les outils législatifs développés dans l’optique de
gagner la confiance des consommateurs remplissent parfaitement leurs fonctions. L’Internet
n’est pas un lieu où l’utilisateur de services bancaires et financiers est livré en pâture aux
établissements de crédit, loin de là !
CONCLUSION GENERALE

802. Le rôle du législateur. L’influence du législateur, tant européen que national, sur le bon
fonctionnement du marché des services bancaires et financiers sur l’Internet est certaine. Elle
s’est traduite par une double évolution, prenant en compte d’une part la nécessité d’encadrer
le commerce électronique et d’autre part la volonté de garder une spécificité dans la
réglementation des services bancaires et financiers.

803. Législations et confiance. L’actualité juridique de ces dernières années a été le témoin d’un
véritable foisonnement législatif en la matière. L’objectif clairement affiché d’une partie de
ces textes est de renforcer la confiance du consommateur, dans la mesure où cette dernière est
indispensable au bon fonctionnement du marché. Mais il est possible de se demander si
d’autres facteurs n’interviennent pas dans le processus de confiance : le législateur ne joue-t-il
pas un rôle déterminant dans le comportement du consommateur (confiant ou méfiant) ? S’il
n’est certainement pas à négliger, ce serait, semble-t-il, accorder trop de considération à ce
corpus juridique particulièrement touffu que la grande majorité des consommateurs ignore et,
quoi qu’on en dise, continuera à ignorer. Aussi le phénomène de familiarisation avec l’outil
Internet explique-t-il en grande partie l’augmentation du nombre de transactions en ligne.
Dans un premier temps, l’apparition d’un nouveau canal de communication, dématérialisé, a
simplement catalysé et amplifié les craintes traditionnelles. Aujourd’hui, il faut donc en
déduire, que chez ses premiers utilisateurs, l’Internet n’en est plus au stade de la nouveauté et,
plus encore, que les opportunités commerciales transcendent les peurs juridiques. Un auteur
relève d’ailleurs, à propos de la LEN « qu’on est encore loin d’une application optimale du
texte permettant de garantir cette fameuse confiance dans l’économie numérique »1225. En
effet, si certaines mesures sont intervenues (archivage des contrats1226, ordonnance de juin
2005), des interrogations demeurent notamment sur le régime de responsabilité de plein droit.

804. La nécessité d’une réglementation particulière ? Nous ne pensons pas qu’une législation
autonome et propre à l’Internet soit réellement souhaitable dans la mesure où elle risque

1225
TABAKA B., la LCEN en n+1, 21 juin 2005, disponible sur : http://tabaka.blogspot.com/2005/06/la-lcen-en-
n1.html.
1226
Décret n°2005-137 du 16 février 2005, pris pour l'application de l'article L. 134-2 du code de la
consommation. Il fixe le délai de conservation des contrats conclus par voie électronique.
Conclusion générale 409

d’aboutir à des traitements discriminatoires par rapport aux autres types de vente à distance.
L’Internet est sûrement plus qu’un simple support de communication et de transactions
commerciales, dans la mesure où il intègre une vocation culturelle et une multitude
d’échanges non commerciaux. Néanmoins, dans l’optique d’une seule utilisation
commerciale, il ne justifie pas de traitement particulier, sous réserve de quelques spécificités
que le droit existant doit prendre en compte. C’est justement ce qu’il tente de faire. Le Code
civil a logiquement su évoluer pour envisager la dématérialisation des transactions ; de la
même manière, d’autres dispositions (LEN et ordonnance de juin 2005) sont venues apporter
certaines précisions quant à l’usage de l’Internet (notamment l’obligation d’information plus
complète, car elle fait intervenir d’autres prestataires – par exemple l’hébergeur). Ceci étant,
l’ensemble des réglementations du Code monétaire et financier et du Code de la
consommation restent applicables (dispositions sur les pratiques commerciales) aux
transactions bancaires et financières en ligne.

805. Les problématiques du secteur bancaire et financier et l’Internet. Il n’est cependant pas
possible d’occulter que l’Internet soit à l’origine de problèmes spécifiques touchant le secteur
bancaire ; par exemple, la pratique du « phishing » ne concerne, pratiquement, que l’Internet.
Par ailleurs, à l’origine cantonné aux sites bancaires américains, ce phénomène commence à
atteindre les établissements de crédit français (Société Générale, BNP Paribas, CIC, CCF)1227.
En revanche, la grande majorité des autres problématiques, telles que le blanchiment de
capitaux ou bien l’utilisation frauduleuse de carte bancaire ne lui est pas propre. Là encore, le
chant commercial des sirènes de l’Internet semble difficilement résistible ; aussi, tous les
établissements de crédit se sont-ils engagés dans cette odyssée en adoptant des stratégies multi
canal, incluant particulièrement l’Internet.

806. La contribution de l’Internet au secteur bancaire et financier. Juridiquement, il est


possible d’affirmer que l’Internet se met au service des opérations bancaires et financières
dans la mesure où il impose des obligations d’information à la charge des établissements de
crédit. De plus, il substitue au traditionnel « papier » une notion d’écrit numérique, à travers
laquelle la dématérialisation du formalisme bancaire peut s’opérer et le consensualisme de

1227
Rédaction Znet France, Alerte d’escroquerie par « phishing » contre des clients de banques françaises, 27
mai 2005, disponible sur : www.rss.znet.fr/actualites/internet/0,39020774,39227210,00.htm; CROUZILLACQ
P., La Cnil met en garde les internautes contre le phishing, 29 avril 2005, disponible sur : www.01net.com;
BRAFMAN N. et MAMOU Y., L’usurpation d’identité, une fraude qui se répand sur l’Internet, Le Monde, 1er
juin 2005, disponible sur : www.lemonde.fr .
Conclusion générale 410

principe librement s’exercer. Tout en demeurant une véritable opportunité, il s’agit par
ailleurs d’une des craintes principales quand on aborde la protection du consommateur, et ceci
à double titre. D’une part, le consentement du consommateur, si facilement exprimable via
l’Internet (théoriquement un clic suffit pour le manifester), se retrouve plus encadré
(réitération du clic) que dans les cas de vente à distance classique créant, par là, un nouveau
concept juridique difficilement classifiable. D’autre part, l’ensemble des informations
légalement pertinentes au regard des dispositions bancaires et financières risque de se
retrouver littéralement noyé dans une masse de données à vocation commerciale, voire
simplement informative. Appartiendra-t-il au consommateur de faire lui-même le tri ?

807. Le secteur bancaire et financier au service de l’Internet. Là où l’Internet, véritable iceberg


de données, laisse subsister certaines zones d’ombre, non pas par l’absence de législation mais
surtout par sa délicate mise en œuvre1228 et spécialement là où, traditionnellement, la lumière
protectrice d’une autorité de contrôle ne pénètre pas la partie immergée, le secteur bancaire et
financier apporte une appréciable lueur. L’établissement de crédit fait figure « d’épouvantail »
en raison de la puissance économique qu’il dégage et du déséquilibre conséquent qu’il
imprime à toute transaction avec des consommateurs. Aussi, la présence de l’AMF et d’autres
organismes comme la CNIL est-elle la réelle garantie d’une protection efficace que ne
connaissent pas nécessairement d’autres secteurs non réglementés.

808. Bilan. Lors de sa communication du 7 février 20011229, la Commission proposait une double
démarche afin de réaliser un marché européen des services financiers pleinement intégré1230 :
imposer la logique du marché intérieur par la mise en œuvre du principe de la reconnaissance
mutuelle de la législation du pays d’origine d’un part et d’autre part instituer un niveau élevé
de protection harmonisée des consommateurs1231. Concernant les outils législatifs, force est de
constater que tant la directive « commerce électronique » de 2000 que celle relative aux
services financiers à distance de 2002 sont venues remplir cet objectif, en instaurant
notamment un terrain propice à l’amélioration de cette fameuse confiance. En premier lieu,
une prestation bancaire ou financière régulièrement fournie dans le pays d’origine peut

1228
D’un point de vue quantitatif.
1229
Communication « commerce électronique et services financiers » préc.
1230
DE BROUWER F et MARTY C. La communication de la Commission européenne en matière de commerce
électronique et de services financiers vers un véritable marché intérieur des services financiers ?, Banque et
Droit, mars-avril 2001, n°76, p. 9.
1231
LUTZ P., Les suites de la directive sur le commerce électronique : la nécessaire refonte du droit français du
crédit aux consommateur, RDBF, mars-avril 2002, n° 2, p.87.
Conclusion générale 411

désormais être librement admise dans les autres Etats membres ; enfin, en second lieu, la
protection des consommateurs se voit nivelée selon des standards que connaît déjà le droit
français.

809. Cohérence du système. En conséquent, l’harmonisation générale des informations


précontractuelles voire des droits accordés au consommateur (rétractation) dans la conclusion
en ligne de transactions bancaires et financières ne soulève pas de difficultés particulières. Ce
n’est qu’à l’analyse au cas par cas des législations, des types d’opérations bancaires, que des
obstacles peuvent apparaître. Maître P. LUTZ conteste à cet effet les modèles types imposés
par le Code de la consommation dans son article R. 311-6, énonçant que le secteur du crédit
au consommateur doit être refondu et que les exigences françaises ne sont plus justifiées :
« plutôt que de mener un combat défensif pour le maintien d’un droit de la consommation
hexagonal, présenté comme insurpassable, mieux vaudrait aider à la transformation de ce
droit pour permettre au consommateur de bénéficier d’un marché plus concurrentiel et d’un
éventail de produits plus large »1232. Il est vrai que, replacé dans un contexte international, le
droit français peut apparaître comme trop protectionniste pour son consommateur. On doit
néanmoins reconnaître que, dans l’attente d’une harmonisation plus poussée en la matière,
pour autant qu’elle soit souhaitable, la législation française ne semble pas contrevenir de ce
point de vue aux dispositions communautaires. D’ailleurs ces modèles n’empêchent jamais la
dématérialisation des contrats. Reste qu’il ne faut pas confondre, à notre avis, la légalité de
l’offre (assurée par le principe de la loi du pays d’origine) et le respect des législations
nationales impératives (à partir du moment où le consommateur français est pris pour cible).
Là réside l’équilibre permettant la réelle compréhension du système établi.

810. La directive « Marchés d’instruments financiers ». D’autres dispositions devraient


prochainement compléter le dispositif national. Il en est ainsi de la transposition de la
directive « Marché d’instruments financiers1233 » qui doit permettre aux entreprises
d'investissement, sur la base d’un agrément délivré par l’Etat d’origine, d'offrir leurs services
sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne1234. En outre, elle tend également à
renforcer la protection des investisseurs en fixant des normes minimales concernant le mandat

1232
LUTZ P., art. préc., p. 91.
1233
Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 avril 2004, concernant les marchés
d'instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE
du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil.
1234
Toutefois certaines questions restent en suspens, v. GARDELLA G., Le marché financier après la directive
MIF : les questions qui restent posées, Banque et droit, juillet-août, n°102, p.3.
Conclusion générale 412

et les pouvoirs dont doivent disposer les autorités nationales compétentes. Pour le Professeur
J.-J. DAIGRE, le leitmotiv de cette directive est « de renforcer la concurrence entre les
différents systèmes de négociation, quels qu’ils soient, tant à l’échelle de l’Europe qu’à celle
de chaque pays. Il y a, derrière cela, un objectif : la création d’un marché financier
unique »1235. Il est à noter que la loi du 20 juillet 20051236, en même temps qu’elle met en
place un système de déclarations d’opérations suspectes1237 aux articles L. 621-17-2 et
suivants du Code monétaire et financier, autorise le gouvernement à transposer la directive
« Marchés d’instruments financiers » par voie d’ordonnance1238 dans un délai de dix-huit
mois. Ce double objectif de libre prestation et de protection de l’investisseur est désormais
classique. En revanche, la directive introduit certaines innovations1239 dont l’Internet ne
manquera pas de servir de support.

811. Les innovations envisagées. Pour le droit français, l'innovation de la directive de 2004 repose
sur la création d'un troisième mode d'exécution des ordres1240. En effet, celui-ci serait assuré
directement par une entreprise d'investissement qui réaliserait la transaction. Il s'agit donc
d'un système bilatéral puisque l'entreprise ne recourt pas à un intermédiaire pour les
transactions. Ces dispositions sont assorties de garanties importantes permettant d'assurer la
meilleure exécution possible des ordres et la transparence des négociations. L’entreprise
d’investissement joue alors le rôle d'un internalisateur systématique, au sens de l’article 4 7)
de la directive1241, qui se place en contrepartie des offres de ses clients. Dans ce schéma,
« l’internalisation [se fait] par des acteurs de marché, c'est-à-dire [par] la confrontation en

1235
DAIGRE J.-J., De la directive de 1993 à celle de 2004 : d’un modèle de marché à un autre, Banque et droit,
juillet-août 2005, n° 102, p. 10.
1236
Loi n°2005-811 du 20 juillet 2005 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le
domaine des marchés financiers.
1237
C’est-à-dire l’obligation de déclarer à l’AMF toute opération pour laquelle des raisons de suspecter qu’elle
pourrait constituer une opération d’initié ou une manipulation de cours au sens des dispositions du règlement
général de l’Autorité des marchés financiers existent.
1238
Article 5 II de la loi du 20 juillet 2005 : « le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans les
conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, les mesures nécessaires pour transposer la directive
2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 avril 2004, concernant les marchés financiers, et
notamment celles tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de
l’intégrité des marchés financiers. Dans ce cadre, il veille plus particulièrement à définir les principes et
modalités garantissant la meilleure exécution possible des ordres et la fluidité de leur circulation entre les
infrastructures de marché, la prévention des conflits d’intérêt au sein des prestataires de services
d’investissement, et une définition équitable des dérogations accordées à la transparence des négociations ».
1239
V. à ce sujet : KORL J., Présentation générale de la directive MIF et de sa mise en œuvre, Banque et droit,
juillet-août 2005, n° 102, p. 5.
1240
Trois modes d'exécution des ordres sont déterminés par la directive : l’exécution sur un marché réglementé,
sur un système multilatéral de négociation et directement par un prestataire de services d'investissement (système
bilatéral).
1241
C’est-à-dire une entreprise d'investissement qui, de façon organisée, fréquente et systématique, négocie pour
compte propre en exécutant les ordres des clients en dehors d'un marché réglementé ou d'un mtf.
Conclusion générale 413

leur sein - et non plus sur les marchés réglementés - d'ordres dont ils peuvent se porter
contrepartie, selon la logique anglo-saxonne des teneurs de marché (« market makers »1242)».
Ces derniers, étant intervenants de marchés dotés d’un accès direct à la négociation des ordres
traitant pour leur compte propre, doivent proposer en permanence des prix d’achat et de vente
sur les titres pour lesquels ils se sont déclarés market makers. Ainsi, les valeurs disposant d’un
market maker pourront être négociées en continu. Par ailleurs, il peut être sollicité par un
intermédiaire pour la négociation d’ordres de ses clients.

812. Les enjeux. L'objectif poursuivi par la directive est de permettre aux investisseurs de voir
leurs ordres exécutés dans les meilleures conditions et à meilleur coût. Il n’en reste pas moins
des risques que l’Internet pourrait encore une fois accentuer en raison de la rapidité des
transactions. En effet, les titres pourront être échangés sur plusieurs lieux en même temps et
non plus uniquement sur un marché réglementé. « Il importe donc que le prix d'échange soit
le plus proche de ce qu'il serait si toute l'offre venait rencontrer toute la demande. Les
prestataires de services d'investissement doivent donc s'assurer que le volume des offres de
vente et d'achat de leurs clients est suffisamment élevé pour permettre les échanges à un juste
prix. Plus techniquement, il faut s'assurer que la « profondeur » du marché est
suffisante1243 ». Enfin la présence de nouveaux acteurs, ayant la faculté d'exécuter des ordres
sur titres, impose de s'assurer que leurs intérêts propres n'entrent pas en conflit avec ceux de
leurs clients.

813. Les futures initiatives bancaires. « Pour les banquiers français, l'harmonisation n'est pas
une fin en soi, mais le moyen d'avancer dans la construction de l'Europe bancaire et
financière, c'est-à-dire dans la réalisation d'un marché où chacun pourrait trouver, selon ses
besoins, une offre de produits et de services facile d'accès, large et variée, de qualité, sûre et
compétitive 1244 ». Dans ce contexte pieusement affiché, les établissements de crédit français

1242
Rapport général de MARINI P. fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation sur le projet de loi de finances pour 2005, adopté par l'assemblée nationale,
commentaire de l’article 21 portant sur la modernisation de différentes dispositions relatives au financement
d'investissements à risques ou de proximité, 25 novembre 2004, document disponible sur :
http://www.senat.fr/rap/l04-074-21-1/l04-074-21-133.html.
1243
Rapport n°2351 de MALLIÉ R. fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du
plan sur le projet de loi, adopté par le Sénat, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire
dans le domaine des marchés financiers, Assemblée nationale, 1er juin 2005, disponible sur :
http://www.assemblee-nationale.fr/12/rapports/r2351.asp#P206_21630.
1244
Communiqué de la Fédération bancaire française, Europe bancaire et financière 2005-2010 : les banquiers
français proposent une harmonisation différenciée, 17 mars 2004, disponible à l’adresse :
Conclusion générale 414

ont défini un programme de travail 2005-20101245 et établi certaines propositions


opérationnelles. Principalement, trois principes ont été posés :

1) S’adapter aux besoins du marché. Du marché le plus local (la plus grande partie de
la banque de détail) au plus intégré (les marchés financiers), « s’interroger sur les raisons de
cet état de fait, se demander ce qui est utile et agir en conséquence- et non chercher à
imposer un modèle prédéterminé »1246;

2) Etre efficace. « L’action législative ou réglementaire peut être un levier puissant


d’intégration. Elle doit cependant être efficace : c’est-à-dire se fixer des objectifs
raisonnables, obtenir de bons résultats avec des moyens en proportion, mis en oeuvre selon
un ordre clair de priorités. Aussi toute nouvelle mesure réglementaire devrait-elle être testée
au regard de ce principe : son utilité, son coût (qui sera, au final, répercuté sur le client), sa
simplicité (ou lisibilité). L’harmonisation ne doit pas conduire à empiler des règles, mais à
définir ce qui est vraiment important pour la mise en regard d’offres diverses »1247 ;

3) Favoriser une saine concurrence. « Une saine concurrence est la meilleure


garantie de développement de l’industrie et de respect des intérêts du consommateur. Elle
doit s’exercer dans un cadre transparent, où sont prises en compte les règles qui s’appliquent
effectivement (et notamment du système juridique et de la fiscalité) »1248.

814. Le rôle futur de l’Internet. Peut-être, peut-on voir dans ce texte une critique du secteur
bancaire français vis-à-vis de l’action prolifique du législateur de ces dernières années. Quoi
qu’il en soit, on peut s’interroger, in fine, sur le rôle que l’Internet jouera dans ce véritable
plan d’action : permettra-il de favoriser ces trois principes ?

ƒ En premier lieu, les établissements de crédit envisagent de « s’adapter aux besoins


du marché ». On peut penser que l’Internet jouera un rôle certain dans la satisfaction de cet
objectif dans la mesure où il permet une analyse rapide des évolutions des besoins et surtout

http://www.fbf.fr/Web/internet/content_presse.nsf/8b37c7256af34f6ac1256d4e0050f263/4205b8276a4a5be1c12
56e5a0030fac4?OpenDocument.
1245
FBF, Europe bancaire et financière 2005-2010 Principes, disponible à l’adresse :
http://www.fbf.fr/Web/internet/content_presse.nsf/PictureList/PASF+2005-2010/$file/fbf_pasf_17mars2004.pdf.
1246
Ibid.
1247
Ibid.
1248
Ibid.
Conclusion générale 415

une réactivité accrue des établissements de crédit par rapport à ces évolutions. De la même
manière, si ces dernières années ont montré l’échec relatif des banques « 100% Internet », il
n’en demeure pas moins que les services bancaires en ligne (consultation de solde, virement,
paiement) recueillent de plus en plus d’adeptes et que, faute de réels obstacles juridiques, ils
sont appelés à se multiplier.

ƒ En second lieu, il s’agit, précise le texte, d’être efficace. En tout état de cause, cet
objectif dépend largement du législateur. Mais déjà, les autorités françaises se sont engagées
dans une démarche de transparence normative à laquelle l’Internet participe grandement. On
peut d’ailleurs affirmer qu’aujourd’hui l’Internet constitue le meilleur vecteur de transmission
de l’information juridique. Certes, la compréhension de la règle reste un problème, mais
l’Internet offre une accessibilité sans précédent. Par exemple, l’ensemble de la réglementation
bancaire et financière peut être consulté via le site de l’AMF (www.amf-France.org). De
même, tout autre texte français, ainsi qu’une jurisprudence abondante, se retrouvent sur le
site Légifrance (www.legifrance.gouv.fr). Par ailleurs, le site de l’Union européenne
(www.europa.eu.int) offre, lui aussi, une importante base de données juridiques et ainsi que
des dossiers thématiques sur le secteur bancaire et financier. Nul doute que le rôle de
l’Internet apparaîtra donc comme primordial dans la diffusion de l’information bancaire et
financière à destination tant des professionnels établissements de crédit que des
consommateurs. Ainsi, la prise en compte de ces facteurs par le droit bancaire a déjà conduit
l’AMF, dans de nombreux articles de son Règlement général, à rendre obligatoires certaines
publications sur son propre site (article 123-1 du RG AMF sur la publication du rescrit) et sur
le site des émetteurs (article 222-10 sur l’information permanente, à partir du moment où
l’émetteur dispose d’un tel site, article 411-56-2 sur la mise en ligne de la version
électronique du prospectus) ; sans revenir, de surcroît, sur les dispositions particulières portant
sur la réception-transmission ou exécution des ordres de bourse via l’Internet (articles 321-54
et suivants du RG), le règlement utilise pleinement cet outil au point de prévoir une faculté de
substitution à la lettre recommandée et au simple courrier (article 251-3 et 320-60 du RG). Vu
l’évolution entreprise, l’Internet deviendra un outil incontournable, s’il ne l’est déjà, des
acteurs du secteur bancaire et financier.

ƒ En troisième et dernier lieu, une saine concurrence doit s’opérer entre les différents
établissements de crédit nationaux et internationaux. C’est, sans doute, là le point le plus
flagrant de l’apport de l’Internet au secteur bancaire. Il est à l’origine de cette réflexion, tant il
Conclusion générale 416

permet aujourd’hui la comparaison des offres ; il servira, naturellement, cet objectif demain
avec la même ardeur au profit du consommateur. Dans une optique de dématérialisation totale
de la relation établissement de crédit/consommateur, on peut imaginer que de la même
manière qu’un compte est « ouvrable » en ligne, il restera possible de le clôturer, et la
suppression des frais qui en résultent facilitera très certainement la mobilité des clients. Se
pose alors la question de savoir si l’établissement de crédit, en fin de compte, en sortira
vainqueur.
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- « Le protocole SSL a été cassé par des chercheurs suisses », disponible sur :
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sur : www.fr.news.yahoo.com, 13 mai 2004.
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signature », Université de Montréal, mémoire, maîtrise en droit, disponible sur :
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caractère personnel : vers une nouvelle approche juridique », mémoire, maîtrise en
droit, Université de Montréal, disponible sur : www.lex-electronica.org , 2003.
INDEX
Les numéros renvoient aux paragraphes

-A- - Définition : 50
Accréditation : 539 - Dérogations générales : 74 et s.
- Dérogations particulières : 86 et s.
Actions : - Harmonisation : 60 et s.
- Emission en ligne : 596 - Procédure de notification : 126 et
- Rôle des autorités : 597 s., 718
- Prospectus : 589 - Reconnaissance mutuelle : 114
- Procédure : 601
- Contenu : 602 Clause :
- Assimilation : 536
Agrément : 112 - Compromissoire : 400
- Condition : 113 - Non discrimination : 537

Arbitrage : 386, 397 Code secret : 519

Autonomie de volonté : 366 Code de conduite : 643

-B- « Co-médiation » : 388

Banque « en ligne » : 120, 122 Commission européenne : 129, 229

Banque de France : 123, 132 Communications commerciales : 81

Blanchiment : 270 et s., 588 Compétence :


- Clause attributive : 344, 352
-C- - Critère général : 326
- Critère spécial : 328
Carte à puce : 252 - Législative : 358 et s.
- Judiciaire : 319 et s.
Carte de crédit :
- Avantages : 238 « Conseiller neutre » : 391
- Conservation du numéro : 766
- Définition : 237 Consensualisme : 464
- Utilisation sur Internet : 239
Consommateur : 83, 448, 449, 457, 572,
Chèque : 690 et s., 697
- Applications : 245 - Droits d’opposition : 741 et s.
- Procédé : 244 - Droits d’accès : 746 et s.
- Electronique : 246 - Protections complémentaires : 657
et s.
Clause « marché intérieur » : - protections de base : 627 et s.
- Analyse : 89
- Agréments : 112 et s. Contrats à distance : 687 et s.
- Applicabilité au service bancaire et
financier : 53 Convention de compte : 510 et s.
- Conséquences : 61 et s.
- Compétence judiciaire : 58 et s. Courriel : 737
Index 472

Courtage en ligne :
- Conclusion du contrat : 583 et s. Empilement : 283
- Identification du client : 587 -F-
- Information du client : 597 et s.
Facture électronique :
Cryptologie : - Définition : 211
- Définition : 163 - Rôle : 218
- Distinction : 164 - Transmission : 213
- Régime : 182
- Sanctions : 203 et s.
Formalisme :
Cyberconsommation : 449, 462 - Administratif : 501
- Ad probationem : 477, 487
Cyber monnaie : 231 - Ad validtatem : 481, 489
- Contractuel : 486
-D- - De publicité : 499
- De validité : 497
Démarchage : 323 - Electronique : 513
- Distinction : 139 - Fiscal : 500
- Interdit : 144 - Informatif : 502, 576
- Nouveau : 140 - Probatoire : 498
- Relatif au support : 504
Dépeçage : 365 - Sécuritaire : 484

Directive : -G-
- « commerce électronique » : 25 et
s., 107, 127, 698 G-10 : 279
- « facturation TVA » : 207 et s.
- « monnaie électronique » : 288 et s. GAFI : 275
- « services financiers » : 618, 682 et
s., 719 Garantie de solvabilité : 294
- « signature électronique » : 532 et
s.
- « protection des données -I-
personnelles » : 725
Information :
Domaine coordonné : - Conforme : 631
- exigences : 44 - Moment : 634
- champ d’application : 54 et s. - Préalable : 630
- Sincère : 632
Données personnelles : - Support : 633
- Protection : 730 et s.
- Traitement : 771 et s.
Intermédiation : 562
Droit :
- d’accès : 746 et s. Intégration : 285
- d’opposition : 742 et s.
- de rétractation : 648 et s. Internet : 1, 2

-E- Intérêt général : 97


Index 473

-L- - Obligation de résultats : 445 et s.

« Last offer mediation »: 389 Monnaie :


- Fiduciaire : 263
Lex specialis : 108 - Scripturale : 269

Lex posterior : 108 Monnaie électronique :


- Blanchiment : 270 et s.
Libre prestation de services : - Cadre européen : 288 et s., 711
- exercice : 29 et s.. - Définition : 258
- applicabilité à l’Internet : 50 et s. - Diversité : 251
- restrictions : 95 et s. - Qualification : 260

Lien : Monopole bancaire : 259


- Hypertexte : 123
- « Etroit » : 368 Mouvements de capitaux : 39 et s.

Lieu : -N-
- d’exercice : 43
- du dommage : 328 Notification : 127 et s.

Litiges internationaux : Voir compétence -O-

Loi : Obligation d’information : 590 et s., 605


- « Informatique et libertés » : 725 et s.
- « Pour la confiance dans
l’économie numérique » : 190 et OPCVM : 79, 110, 712
s ., 489 et s., 554 et s.
- De police : 374 Opération de crédit :
- dématérialisation : 579
-M- - exigences de forme : 571 et s.
- nature : 567 et s.
Marché communautaire : 14, 152, 229,
318, 333 Ordre de bourse :
- Blocage : 594
« Med-arb » : 390 - Obligation de couverture : 593

Médiation : 401 -P-

Mentions manuscrites : 489 et s. Paiement:


- Electronique : 234 et s.
« Mini-trial » : 392 - Par intermédiaire : 250

Modes alternatifs de résolution des Pays tiers : 123


différends :
- Définition : 380 Phishing : 727
- Diversité : 385
- Obligation de moyens : 413 et s. Placement : 262
Index 474

Porte-monnaie virtuel : 254 - à distance : 617


- mixte : 702
Prestataire établi : 42 - non harmonisé : 715

Prestation : Signature :
- Caractéristique : 369 - biométrique : 520
- De service : 459 - électronique : 517
- numérique : 521
Preuve électronique : 515 et s., 524 et s. - reconnaissance légale : 528 et s.
Signature des personnes morales : 541
Principe :
- Contradictoire : 421 Site :
- Efficacité : 429 - dirigé : 124
- Indépendance : 423 - d’information : 123
- Liberté : 433
- Légalité : 435 Société de l’information :
- Représentation : 437 - libre circulation : 50
- Transparence : 417 - service : 39

Professionnel : 456, 573, 623 Sollicitation : 139

Protocole : Spam : 663


- SSL : 240
- SET : 241 Succursales : 109

Publicité : 139 et s., 321, 603 Systèmes ORD : 395

-R- -T-

Ratione materiae : 734 et s. « Tierce décision obligatoire » : 393

Ratione personae : 739 et s. Tiers certificateur : 170

Reconnaissance mutuelle : 46, 112 et s. Titre de créance : 264

Remboursabilité : 292, 303 Traçabilité : 304

-S- Tradition : 507

Sécurité : -V-
- données : 156
- informatique : 157 Vente :
- A distance : 460
- Forcée : 661 et s.
Service financier : 684
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION.............................................................................................................................. 1
PREMIERE PARTIE – LA PRESENTATION DE SERVICES BANCAIRES ET
FINANCIERS SUR L’INTERNET ET LE BON
FONCTIONNEMENT DU MARCHE........................................... 8
Observations préliminaires ............................................................................................................ 9
Titre I – La clause de marché intérieur comme fondement de la libre prestation de services
bancaires et financiers sur l’Internet ............................................................................. 14

CHAPITRE 1 : Portée de la clause de marché intérieur.............................................................. 19


Section 1 : Le contenu de la clause de marché intérieur .......................................................... 26
§.1 : La libre prestation de services bancaires et financiers sur l’Internet ...................... 26
A. Le principe ............................................................................................................. 26
B. Champ d’application.............................................................................................. 28
§.2 : Conséquences et incertitudes induites par la clause de marché intérieur ............... 30
A. Une concurrence réglementaire à la baisse............................................................ 31
B. La question de l’harmonisation ............................................................................. 31
C. Une responsabilité pesant sur le destinataire ......................................................... 33
D. La question de la compétence de juridiction ......................................................... 35
Section 2 : Les dérogations à la clause de marché intérieur..................................................... 38
§.1 : Dérogations générales visées à l’annexe................................................................. 39
A. L’émission de monnaie électronique ..................................................................... 41
B. La publicité afférente à la commercialisation des OPCVM .................................. 42
C. Le secteur des assurances ...................................................................................... 42
D. L’envoi des communications non sollicitées......................................................... 43
E. Le droit applicable aux contrats............................................................................. 44
F. Les obligations contractuelles dans les contrats conclus avec le consommateur .. 44
§.2 : Les dérogations du fait de l’Etat destinataire et les objectifs communautaires ...... 46
A. Analyse de l’article 3§4......................................................................................... 48
B. Procédure de l’article 3§4...................................................................................... 50
C. Analyse de la jurisprudence de la CJCE................................................................ 51
a. Des mesures non discriminatoires................................................................... 51
b. Des mesures poursuivants un but d’intérêt général ........................................ 52
c. Des mesures respectant le droit communautaire dérivé.................................. 52
d. Des mesures nécessaires et adéquates............................................................. 53
CONCLUSION du chapitre 1 .................................................................................................. 57

CHAPITRE 2 : L’impact de la clause de marché intérieur......................................................... 58


Section 1 : Les agréments et le principe de reconnaissance mutuelle confrontés à la clause de
marché intérieur........................................................................................................................ 61
§.1 : Solution posée par les directives............................................................................. 63
§.2 : L’Internet comme mode d’expression de la libre prestation de services bancaires 64
Section 2 : La clause de marché intérieur et la procédure de notification de libre prestation de
service....................................................................................................................................... 68
§.1 : L’opposition existante............................................................................................. 69
§.2 : L’intention du prestataire ........................................................................................ 69
§.3 : Implications pratiques ............................................................................................. 71
Section 3 : Les règles relatives à la publicité et au démarchage au regard de la clause de
marché intérieur........................................................................................................................ 73
CONCLUSION du chapitre 2 .................................................................................................. 77
Table des Matières 476
Titre II – La sécurité technique et juridique des transactions bancaires et financières sur
l’Internet ........................................................................................................................ 79

CHAPITRE 1 : Cryptologie et facturation par voie électronique comme réponses aux attentes
sécuritaires ........................................................................................................... 81
Section 1 : La cryptologie, outil de libéralisation des opérations bancaires et financières ...... 83
§.1 : La nécessaire utilisation de la cryptologie dans le secteur bancaire et financier.... 83
A. Précisions relatives à la cryptologie ...................................................................... 83
a. Cryptographie symétrique............................................................................... 84
b. Cryptographie asymétrique ............................................................................. 85
B. La sécurité en tant que motif déterminant du recours à la cryptologie.................. 88
§.2 : Le régime juridique français de la cryptologie et ses conséquences pour le secteur
bancaire et financier ........................................................................................................ 89
A. Régime issu de la loi de 1990 ................................................................................ 90
a. Le régime de la cryptologie « libre » .............................................................. 90
b. Le régime des tiers agréés............................................................................... 92
c. Le régime de la cryptologie « soumise à formalité préalable » ...................... 93
B. Les apports de la loi pour la confiance dans l’économie numérique..................... 96
Section 2 : La transmission par voie électronique des factures relatives à des opérations
bancaires et financières........................................................................................................... 102
§.1 : La notion de facture indépendante de son support................................................ 103
§.2 : La transmission de la facture électronique............................................................ 104
§.3 : Le rôle probatoire de la facture ............................................................................. 107
CONCLUSION du chapitre 1 ................................................................................................ 110

CHAPITRE 2 : Moyens de paiement en ligne comme nouvelles opportunités pour les


établissements bancaires et financiers.......................................................... 112
Section 1 : Typologie des moyens de paiement sur l’Internet................................................ 115
§.1 : Les moyens de paiements usuels .......................................................................... 116
A. La carte de crédit ................................................................................................. 116
B. Le chèque............................................................................................................. 122
§.2 : Les nouveaux moyens de paiement ...................................................................... 125
A. Le paiement par intermédiaire virtuel ................................................................. 126
B. La monnaie électronique ..................................................................................... 126
a. Les cartes à puce ou cartes prépayées........................................................... 127
b. Les porte-monnaie virtuels............................................................................ 128
Section 2 : Le régime juridique de la monnaie électronique .................................................. 130
§.1 : Définition .............................................................................................................. 130
§.2 : Qualification ......................................................................................................... 132
A. Une unité de compte ............................................................................................ 132
B. Un nouveau moyen de paiement ......................................................................... 132
C. Un nouvel instrument monétaire ......................................................................... 133
§.3 : Le risque de blanchiment de la monnaie électronique.......................................... 136
A. Définitions du blanchiment d’argent ................................................................... 137
B. Les techniques de blanchiment de la monnaie électronique................................ 140
a. Le placement ................................................................................................. 142
b. L’empilement ................................................................................................ 142
c. L’intégration.................................................................................................. 143
Section 3 : Analyse du cadre instauré par la directive 2000/28/CE du Parlement européen . 144
§.1 : Principes directeurs ............................................................................................... 144
A. Limitation des activités des établissements de monnaie électronique................. 144
B. Remboursabilité................................................................................................... 145
Table des Matières 477
C. Garantie de solvabilité ......................................................................................... 146
a. Exigences en matière de capital et de fonds propres permanents ................. 147
b. Limitation des placements ............................................................................ 147
D. Contrôle prudentiel .............................................................................................. 147
E. Libre prestation de services ................................................................................. 148
F. Exemptions .......................................................................................................... 148
§.2 : Transposition de la directive ................................................................................. 148
CONCLUSION du chapitre 2 ................................................................................................ 152

Titre III - La résolution des litiges internationaux relatifs aux opérations bancaires et
financières sur l’Internet ............................................................................................. 154

CHAPITRE 1 : Juge compétent et loi applicable en matière d’opérations bancaires et


financières sur l’Internet ................................................................................... 156
Section 1 : La juridiction compétente pour trancher les conflits relatifs aux opérations
bancaires et financières sur l’Internet..................................................................................... 157
§.1 : En matière délictuelle ........................................................................................... 157
A. La réponse apportée par les textes européens...................................................... 159
a. Critère général de compétence...................................................................... 160
b. Critère spécial de compétence....................................................................... 161
B. La réponse apportée par le législateur français ................................................... 163
§.2 : En matière contractuelle ....................................................................................... 167
A. En l’absence d’une clause attributive de compétence ......................................... 168
B. En présence d’une clause attributive de compétence .......................................... 171
Section 2 : La loi applicable aux conflits relatifs aux opérations bancaires et financières sur
l’Internet ................................................................................................................................. 174
§.1 : En matière délictuelle ........................................................................................... 175
§.2 : En matière contractuelle ....................................................................................... 176
CONCLUSION du chapitre 1 ................................................................................................ 186

CHAPITRE 2 : Les modes de règlement extrajudiciaire des litiges ......................................... 188


Section 1 : Aperçu sur les modes alternatifs de règlement des litiges.................................... 189
§.1 : La diversité des modes alternatifs de règlement des litiges .................................. 191
A. La « co- médiation » ............................................................................................ 192
B. La « last-offer mediation » ................................................................................. 192
C. La « med-arb »..................................................................................................... 192
D. Le « conseiller neutre » et le « Dispute review board » ...................................... 193
E. Le « mini-trial » ................................................................................................... 193
F. La « tierce décision obligatoire » ........................................................................ 194
G. Les systèmes d’ORD ........................................................................................... 194
§.2 : L’utilisation des modes alternatifs de règlement des litiges dans le secteur bancaire
et financier..................................................................................................................... 195
Section 2 : Le développement des modes alternatifs de règlement des litiges encouragé par le
législateur européen................................................................................................................ 198
§.1 : Utilisation des modes alternatifs de règlement des litiges en ligne : obligation de
résultat de mettre fin aux obstacles juridiques .............................................................. 200
§.2 : Conservation des garanties procédurales dans le mécanisme alternatifs de
règlement des litiges : obligation de moyen.................................................................. 202
A. Principe de transparence ...................................................................................... 203
B. Principe de contradictoire .................................................................................... 205
C. Principe d’indépendance...................................................................................... 205
D. Principe de l’efficacité......................................................................................... 207
Table des Matières 478
E. Principe de liberté ................................................................................................ 208
F. Principe de légalité .............................................................................................. 209
G. Principe de représentation ................................................................................... 210
CONCLUSION du chapitre 2 ................................................................................................ 211
CONCLUSION de la première partie.......................................................................................... 212

DEUXIEME PARTIE – LA PRESTATION DE SERVICES BANCAIRES ET FINANCIERS


SUR L’INTERNET ET LA PROTECTION DES
CONSOMMATEURS.......................................................................... 215
Observations préliminaires ........................................................................................................ 216
Titre I – Le formalisme et la preuve des transactions bancaires et financières sur
l’Internet ......................................................................................................................... 224

CHAPITRE 1 : Le formalisme lié à la prestation de services bancaires et financiers sur


l’Internet ............................................................................................................. 228
Section 1 : La fin des obstacles formels aux contrats bancaires et financiers en ligne .......... 231
§.1 : Les évolutions de textes favorisant la conclusion des contrats en ligne ............... 232
A. L’article 9 de la directive sur le commerce électronique..................................... 232
a. Le principe établi par l’article 9§1 : supprimer les obstacles ....................... 233
b. Les exceptions de l’article 9§2...................................................................... 235
B. La suppression des obstacles en droit interne...................................................... 236
a. L’approche fonctionnelle : une révolution dans le formalisme contractuel
classique ........................................................................................................ 236
b. La transposition opérée par la LEN .............................................................. 239
§.2 : Diversité et manifestation du formalisme dans les opérations bancaires et
financières ..................................................................................................................... 242
A. Diversité des formalismes dans les opérations bancaires et financières.............. 243
B. Les manifestations du formalisme dans les opérations bancaires et financières . 246
C. La dématérialisation des contrats bancaires ........................................................ 249
Section 2 : La signature électronique : technique d’identification et de preuve des transactions
bancaires et financières sur l’Internet..................................................................................... 254
§.1 : Les obstacles historiques à l’admissibilité de la preuve électronique................... 259
§.2 : La reconnaissance légale de la signature électronique : l’article 5 de la directive
européenne sur les signatures électroniques ................................................................. 264
A. La double définition du concept de signature électronique ................................. 265
B. Les effets juridiques : les clauses de non discrimination et d’assimilation ......... 266
§.3 : L’adaptation du droit français de la preuve aux technologies de l’information ... 270
A. Définition de la preuve littérale indépendamment du support............................. 271
B. Equivalence juridique entre la preuve littérale électronique et traditionnelle ..... 272
C. Pouvoir du juge de trancher les conflits de preuve et consécration légale du
caractère supplétif des règles de preuve .............................................................. 273
D. Signature électronique et pratique bancaire......................................................... 274
CONCLUSION du chapitre 1 ................................................................................................ 278

CHAPITRE 2 : De quelques exemples de contraintes spécifiques ............................................ 280


Section 1 : Le secteur du crédit .............................................................................................. 282
§.1 : La nature de l’opération de crédit ......................................................................... 282
§.2 : Exigences formelles dans les opérations de crédit................................................ 284
Section 2 : Le courtage en ligne ............................................................................................. 292
§.1 : La conclusion du contrat ....................................................................................... 294
A. La nécessité d’une convention............................................................................. 294
B. L’identification du client ..................................................................................... 296
Table des Matières 479
§.2 : L’information du client ......................................................................................... 299
Section 3 : L’émission des actions en ligne............................................................................ 302
Section 4 : Le conseil et l’information bancaire..................................................................... 308
CONCLUSION du chapitre 2 ................................................................................................ 311

Titre II – La réglementation des services bancaires et financiers à distance ........................... 313

CHAPITRE 1 : La protection du consommateur confronté à l’offre de services bancaires et


financiers en ligne............................................................................................... 317
Section 1 : Les protections de base......................................................................................... 319
§.1 : L’information du consommateur .......................................................................... 320
A. L’information préalable du consommateur : le pilier de la directive sur les services
financiers à distance............................................................................................. 320
a. Les informations préalables à fournir ........................................................... 320
b. Les modalités et le moment de communication des informations ................ 322
c. Articulation avec les exigences supplémentaires en matière d’information. 324
B. Les informations à fournir dans le cadre de la réglementation « commerce
électronique » ...................................................................................................... 325
a. Les informations relatives au prestataire de service ..................................... 326
b. Informations à fournir avant la passation de la commande .......................... 327
c. Informations postérieures à la commande .................................................... 328
§.2 : Le droit de rétractation.......................................................................................... 330
A. Délai de rétractation............................................................................................. 331
B. Exceptions au droit de rétractation ...................................................................... 333
Section 2 : Les protections complémentaires ......................................................................... 334
A. Les mesures réparatrices en cas d’utilisation frauduleuse de la carte bancaire du
consommateur...................................................................................................... 334
B. L’interdiction de la vente forcée.......................................................................... 336
C. Le régime des communications commerciales non sollicitées ............................ 338
D. Les voies de recours ............................................................................................ 339
E. Autres mesures .................................................................................................... 340
CONCLUSION du chapitre 1 ................................................................................................ 343

CHAPITRE 2 : L’articulation des directives « commerce électronique » et « services


financiers à distance »........................................................................................ 344
Section 1 : L’articulation des deux directives entre elles ....................................................... 345
§.1 : Champ d’application de la directive de 2002........................................................ 345
A. Champ d’application rationae materiae.............................................................. 346
a. Les services financiers .................................................................................. 346
b. Les contrats à distance .................................................................................. 348
B. Le champ d’application rationae personae ......................................................... 350
§.2 : Les recoupements entre la directive de 2002 et celle de 2000.............................. 353
A. Points de contact.................................................................................................. 354
B. Complémentarités................................................................................................ 355
Section 2 : L’articulation des directives avec les autres textes............................................... 358
§.1 : L’adaptation des autres législations sectorielles à l’Internet ................................ 359
A. Les obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les
consommateurs .................................................................................................... 359
B. Autres réglementations ........................................................................................ 361
§.2 : La possibilité pour les Etats membres de prendre des mesures spécifiques à l’égard
d’un service particulier : les services financiers non harmonisés ................................. 363
CONCLUSION du chapitre 2 ................................................................................................ 366
Table des Matières 480
Titre III – La protection des données personnelles dans le cadre des opérations bancaires et
financières sur l’Internet ............................................................................................ 368

CHAPITRE 1 : La protection par les droits accordés................................................................ 372


Section 1 : Le champ d’application de la protection .............................................................. 373
§.1 : Rationae materiae................................................................................................. 373
§.2 : Rationae personae ................................................................................................ 376
Section 2 : Les droits du consommateur................................................................................. 376
§.1 : Droit d’opposition ................................................................................................. 377
§.2 : Droit d’accès ......................................................................................................... 379
A. Droit de communication ...................................................................................... 379
B. Droit de modification et de suppression .............................................................. 381
CONCLUSION du chapitre 1 ................................................................................................ 382

CHAPITRE 2 : La protection par les obligations imposées ...................................................... 383


Section 1 : Les conditions de la légalité du traitement ........................................................... 383
§.1 : Conditions relatives aux données.......................................................................... 384
A. Finalité de la collecte ........................................................................................... 384
B. La durée de conservation des données ................................................................ 386
§.2 : Conditions relatives aux traitements ..................................................................... 390
Section 2 : La mise en œuvre du traitement ........................................................................... 392
§.1 : Obligations préalables à la mise en œuvre du traitement...................................... 392
A. Contenu des obligations préalables ..................................................................... 392
B. La notation de la clientèle bancaire ..................................................................... 394
§.2 : Obligations du responsable du traitement............................................................. 396
A. L’obligation de sécurité ....................................................................................... 397
B. Obligation d’information ..................................................................................... 398
C. Communication des données à des partenaires commerciaux............................. 399
a. Remarques générales..................................................................................... 399
b. Les flux transfrontières de données personnelles ......................................... 401
CONCLUSION du chapitre 2 ................................................................................................ 404

CONCLUSION de la deuxième partie ......................................................................................... 406

CONCLUSION GENERALE ....................................................................................................... 408

Bibliographie.................................................................................................................................... 417
I- Ouvrages généraux et spéciaux...................................................................................... 417
II- Articles, chroniques ....................................................................................................... 421
III- Etudes, rapports, colloques ............................................................................................ 468

INDEX ............................................................................................................................................. 471

TABLE DES MATIERES ............................................................................................................... 475

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