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RAPPORT FINAL D’ENQUÊTE DU

COMMISSAIRE AUX LANGUES OFFICIELLES

IMMIGRATION, RÉFUGIÉS ET CITOYENNETÉ CANADA

FÉVRIER 2018 N/Réf. : 2016-0437-EI (2016-0786-CAS)

1. Allégations

Selon la personne qui a déposé la plainte (le plaignant), Immigration, Réfugiés et


Citoyenneté Canada (IRCC) n’a pas tenu compte adéquatement ni en temps opportun
de ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles (la Loi). Plus précisément,
le plaignant soutient qu’IRCC n’a pas tenu compte de l’impact de la réinstallation des
réfugiés syriens sur les communautés francophones en situation minoritaire (CFSM) et
ne respecte pas ses obligations en ce qui concerne la distribution régionale des
réfugiés, la formation linguistique qui leur est offerte et l’appui aux organismes
francophones de réinstallation.

2. Question

L’enquête vise à déterminer si IRCC a respecté les obligations prévues à la partie VII de
la Loi en ce qui concerne l’initiative de réinstallation des réfugiés syriens. Plus
particulièrement, l’enquête vise à déterminer si IRCC a tenu compte des besoins des
CFSM et a pris des mesures positives pour favoriser leur vitalité et leur développement
dans le cadre des programmes ministériels qui encadrent l’accueil de réfugiés au
Canada.

3. Cadre juridique

L’enquête tient compte de la partie VII et de l’esprit de la Loi.

La partie VII de la Loi énonce l’engagement du gouvernement fédéral de favoriser


l’épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et d’appuyer
leur développement, ainsi que de promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage du
français et de l’anglais dans la société canadienne.

Le paragraphe 41(2) de la Loi prévoit que les institutions fédérales doivent prendre des
mesures positives pour mettre en œuvre cet engagement. Cette obligation exige à la fois
qu’une institution agisse de façon proactive afin d’appuyer les communautés de langue
officielle en situation minoritaire (CLOSM) et qu’elle agisse de façon à ne pas nuire au
développement et à l’épanouissement de ces communautés.
4. Méthodologie

En plus des sources publiques d’information, l’enquête a tenu compte des


renseignements fournis par les parties entre janvier et décembre 2016. En février 2016,
une rencontre a eu lieu entre les enquêteurs du Commissariat aux langues officielles
chargées de l’enquête et les représentants d’IRCC afin de clarifier le fonctionnement et
le rôle des différents secteurs du Ministère dans le cadre de l’Initiative d’accueil des
réfugiés syriens. Des entrevues individuelles ont aussi été menées entre août et
décembre 2016 auprès du directeur, Réétablissement, du directeur, Politique de
programmes sur la langue, Planification et Responsabilisation, du directeur, Évaluation,
et des deux personnes qui ont occupé le poste de directeur du Secrétariat des langues
officielles (SLO) d’IRCC entre janvier 2014 et la réception de la plainte en janvier 2016.

5. Information considérée dans le cadre de l’enquête

5.1 Mandat d’IRCC

IRCC tire son mandat de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés1 (la LIPR).
En vertu des paragraphes 3(1)b) et b.1), la LIPR a pour objet « d’enrichir et de renforcer
le tissu social et culturel du Canada dans le respect de son caractère fédéral, bilingue et
multiculturel » et de « favoriser le développement des collectivités de langues officielles
minoritaires au Canada ». De plus, les paragraphes 3(3)d) et e) de la LIPR prévoient que
son interprétation et sa mise en œuvre doivent, entre autres, avoir pour effet « d’assurer
que les décisions prises en vertu de [cette loi] sont conformes à la Charte canadienne
des droits et libertés, notamment en ce qui touche les principes […] d’égalité du français
et de l’anglais à titre de langues officielles du Canada » et « de soutenir l’engagement du
gouvernement du Canada à favoriser l’épanouissement des minorités francophones et
anglophones du Canada ».

5.2 Contexte

En janvier 2015, le gouvernement du Canada s’est engagé à accueillir 11 300 réfugiés


syriens dans le cadre d’un parrainage mixte par le gouvernement et le secteur privé
avant la fin de 20172.

Cet engagement et ceux pris par la suite par les autres partis politiques fédéraux ont fait
l’objet de nombreux débats pendant la campagne électorale fédérale qui s’est conclue
lors de l’élection fédérale générale du 19 octobre 2015.

À la suite de son assermentation, le 4 novembre 2015, le nouveau ministre de


l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada a confirmé l’intention du
gouvernement fédéral d’accueillir 25 000 réfugiés syriens au Canada au plus tard le

1
Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Version en ligne (http://laws-lois.justice.gc.ca/PDF/I-
er
2.5.pdf) consultée le 1 mars 2017.
2
Ici Radio-Canada. Le Canada promet d’accueillir 10 000 autres réfugiés syriens, 7 janvier 2015. Version
en ligne (http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/701067/canada-promet-acceuillir-refugies-syriens) consultée
er
le 1 mars 2017.

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2
31 décembre 20153. Cette décision a été approuvée par le Cabinet le
12 novembre 2015.

Le 24 novembre 2015, cet objectif a été revu : 25 000 réfugiés syriens au total seraient
accueillis avant la fin de février 2016, dont 10 000 avant le 31 décembre 2015. Des
25 000 réfugiés syriens accueillis avant la fin de février 2016, 10 000 seraient parrainés
par le secteur privé et 15 000 seraient pris en charge par le gouvernement. Enfin,
25 000 réfugiés syriens pris en charge par le gouvernement seraient accueillis avant le
31 décembre 20164.

5.3 Faits pertinents reliés à l’objet de la plainte

Les programmes d’IRCC qui encadrent l’initiative de réinstallation des réfugiés syriens
sont les mêmes qui encadraient la réinstallation de réfugiés au Canada, de manière
générale, avant cette initiative. Toutefois, en raison du nombre de réfugiés syriens
accueillis et de la période de temps relativement courte pendant laquelle la majorité
d’entre eux est arrivée au Canada, IRCC a apporté certains ajustements dans la
manière de livrer ces programmes5.

Le Programme de réinstallation des réfugiés et des personnes protégées à titre


humanitaire du Canada vise avant tout à sauver des vies et à protéger les personnes
déplacées et persécutées. Il est offert aux personnes ayant besoin de protection qui se
trouvent à l’extérieur du Canada et hors de leur pays d’origine.6 

La réinstallation des réfugiés syriens au Canada comporte cinq phases :

1. Identification des réfugiés syriens qui viendront au Canada


2. Traitement des demandes des réfugiés syriens à l’étranger
3. Transport au Canada
4. Accueil des réfugiés syriens au Canada
5. Établissement et intégration dans la communauté

Les réfugiés sont réinstallés au Canada de l’une des trois façons suivantes :

1. Réfugiés pris en charge par le gouvernement (RPG)


2. Réfugiés parrainés par le secteur privé (RPSP)
3. Réfugiés inscrits au Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau de
visas (RDBV)7

3
Radio-Canada. La promesse de recevoir 25 000 réfugiés syriens sera tenue, assure McCallum,
4 novembre 2015. Version en ligne (http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/748118/mccallum-immigration-
er
syriens-refugies-objectif-accueil) consultée le 1 mars 2017.
4
Gouvernement du Canada. #Bienvenueauxréfugiés, document d’information, 24 novembre 2015. Version
er
en ligne (http://nouvelles.gc.ca/web/article-fr.do?nid=1021909) consultée le 1 mars 2017.
5
Seuls les ajustements pertinents à cette enquête seront mentionnés dans cette section.
6
IRCC. Rapport sur les plans et priorités 2016-2017. Version en ligne
(http://www.cic.gc.ca/francais/ressources/publications/rpp/2016-2017/index.asp#a2.2.2) consultée le
er
1 mars 2017. IRCC. Réinstallation depuis l’extérieur du Canada. Version en ligne
er
(http://www.ci.gc.ca/francais/refugies/exterieur/index.asp) consultée le 1 mars 2017.
7
Ibid.

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3
Les RPSP sont recommandés aux fins de réinstallation par un répondant privé au
Canada, qui leur fournira un soutien financier et d’autres formes d’assistance pendant
un an. Les RDBV sont jumelés avec un répondant privé au Canada. Le gouvernement
fédéral offre jusqu’à six mois de soutien aux RDBV, tandis que leurs répondants privés
leur fournissent six autres mois de soutien financier et jusqu’à un an de soutien social et
affectif. Lorsqu’ils arrivent au Canada, les RPSP et les RDBV s’installent dans la
communauté de leur répondant privé8.

Les RPG sont recommandés à IRCC par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour
les réfugiés (le HCR) ou par un autre organisme de recommandation. Le gouvernement
fédéral ou celui du Québec leur fournit un soutien financier pendant un an. Les RPG ont
aussi accès aux services immédiats et essentiels du Programme d’aide à la
réinstallation (PAR) pour répondre à leurs besoins de base dès leur arrivée au Canada.

À l’extérieur du Québec, ces services sont offerts par des fournisseurs de services (FS)
financés par IRCC. Ils comprennent notamment des services d’interprétation, l’accueil à
l’aéroport, l’hébergement temporaire, l’aide pour trouver un logement permanent, l’aide
pour s’inscrire aux programmes fédéraux et provinciaux obligatoires, l’aide pour
s’orienter dans la collectivité, une orientation sur les finances personnelles, un soutien
concernant les aptitudes à la vie quotidienne pour les clients ayant d’importants besoins
et une orientation vers d’autres programmes destinés aux réfugiés, dont le Programme
d’établissement et d’adaptation des immigrants d’IRCC9. Le Québec reçoit des fonds
distincts dans le cadre de l’Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à
l’admission temporaire des aubins (l’Accord Canada-Québec)10 pour fournir des services
semblables aux réfugiés qui s’établissent dans cette province.

Le Centre de jumelage des réfugiés d’IRCC (le Centre de jumelage) détermine la


destination des RPG avant leur arrivée au Canada. Il les jumelle à l’une des villes où se
trouvent les FS du PAR ou les dirige au Québec.

Lorsque la plainte a été déposée, 28 FS assuraient la prestation du PAR dans 23


communautés situées à l’extérieur du Québec11. À la suite d’un processus de réception
continue des propositions ouvert entre le 13 janvier et le 11 mars 2016, IRCC a
approuvé la demande de huit FS additionnels pour offrir les services du PAR dans huit
autres villes à l’extérieur du Québec jusqu’au 31 mars 2017.

Par ailleurs, dans le cadre de l’initiative de réinstallation des réfugiés syriens, certains
FS du PAR, notamment en Colombie-Britannique et au Nouveau-Brunswick, ont eu
recours à la sous-traitance des FS d’établissement pour offrir les services du PAR dans
des municipalités avoisinantes et d’autres municipalités plus éloignées où des réfugiés
syriens ont été logés de manière permanente.

8
IRCC. Réinstallation depuis l’extérieur du Canada. Op. cit.
9
IRCC. Quel type d’aide les réfugiés syriens reçoivent-ils? Version en ligne
er
(http://www.cic.gc.ca/francais/centre-aide/reponse.asp?qnum=098&top=11) consultée le 1 mars 2017.
10
IRCC. Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des aubins,
5 février 1991. Version en ligne (http://www.cic.gc.ca/francais/ministere/lois-
er
politiques/ententes/quebec/quebec-acc.asp) consultée le 1 mars 2017.
11
IRCC a retenu les services d’un seul FS du PAR par ville de destination, à l’exception de Winnipeg qui en
compte deux et de Toronto et Vancouver où des FS ont été retenus précisément pour offrir des services aux
points d’entrée au Canada

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Le Centre de jumelage tient compte des facteurs suivants pour déterminer la destination
des RPG :

 l’emplacement de membres de la famille ou de connaissances au Canada;


 la disponibilité des services pour répondre aux besoins spéciaux en réinstallation
et ceux de nature médicale, comme du counseling traumatologique;
 les communautés ethniques, culturelles et religieuses dans la région, l’emploi,
l’expérience professionnelle, la configuration familiale, les langues parlées, la
connaissance des langues officielles, etc.;
 la capacité de la collectivité en fonction des ressources disponibles.

En vertu de l’Accord Canada-Québec, « le Canada détermine qui est un réfugié […],
tandis que le Québec choisit ceux qui, à son avis, sont les plus à même de s’établir au
Québec.12 » L’article 19 de l’Accord inclut un droit de veto explicite du Québec sur
l’admission des réfugiés : « [...] le Canada n’admet pas un réfugié [...] à destination du
Québec qui ne répond pas aux critères de sélection du Québec ».

Selon les procédures du Centre de jumelage en vigueur en janvier 2016, les RPG
pouvaient être dirigés vers le Québec s’ils :

 parlaient le français ou pouvaient apprendre la langue;


 souhaitaient être réinstallés au Québec;
 avaient des membres de leur parenté ou des amis proches au Québec;
 n’avaient aucun parent ou ami proche dans d’autres provinces.

Ces procédures indiquent aussi qu’aucun Certificat de sélection du Québec ne sera


délivré aux réfugiés susceptibles de déménager dans une autre province après leur
arrivée au Canada.

Selon l’information recueillie, les procédures suivies pour déterminer la destination des
réfugiés syriens ont toutefois été simplifiées. Ainsi, dans tous les cas où un RPG avait
de la famille ou des amis au Canada, le RPG et sa famille s’établissaient dans cette ville
ou dans la ville de destination la plus près. Dans tous les autres cas, la destination était
choisie en fonction des objectifs et de la capacité d’accueil des FS du PAR.

Une fois logés de manière permanente, les RPG ont accès aux services directs et aux
services de soutien offerts par les FS qui ont conclu une entente de services avec IRCC
aux termes du Programme d’établissement et d’adaptation des immigrants (PÉAI). Ce
programme « vise à aider les immigrants et les réfugiés à surmonter les obstacles qui
caractérisent l’expérience des nouveaux arrivants […]13 », afin qu’ils puissent participer à
la vie sociale, culturelle, civique et économique et s’intégrer à long terme à la société
canadienne. Les RPG ont, entre autres, accès des services d’apprentissage linguistique,
des services de liaison avec la collectivité et les employeurs, des renseignements en
matière d’établissement et des services de soutien pour faciliter l’accès aux programmes
d’aide à l’établissement.

12
Becklumb, Penny. Bibliothèque du Parlement, division du droit et du gouvernement. L’immigration :
L’Accord Canada-Québec, étude générale BP-252F, révisée en octobre 2008. Version en ligne
er
(http://www.bdp.parl.gc.ca/content/lop/researchpublications/bp252-f.htm) consultée le 1 mars 2017.
13
IRCC. Rapport sur les plans et priorités 2016-2017. Op. cit.

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5
Les réfugiés ont généralement un accès prioritaire aux services de formation linguistique
qui visent à les aider à développer des compétences linguistiques en communication
suffisantes pour fonctionner dans la société canadienne et pour contribuer à l’économie.

5.4 Position du plaignant

Le plaignant considère qu’IRCC n’a pas tenu compte adéquatement ni en temps


opportun de ses obligations en vertu de la Loi et de l’impact que la réinstallation de
25 000 réfugiés syriens au Canada aurait sur les CFSM. Plus précisément, le plaignant
soutient qu’IRCC ne respecte pas ses obligations en ce qui concerne la distribution
régionale des réfugiés, la formation linguistique qui leur est offerte et l’appui aux
organismes francophones de réinstallation.

Le plaignant a dit comprendre que la réinstallation des réfugiés syriens au Canada


devait se faire rapidement et que le nombre de réfugiés attendus était beaucoup plus
élevé qu’à l’habitude. Le plaignant est toutefois d’avis qu’IRCC aurait déjà dû avoir un
mécanisme en place lui permettant de s’assurer que ses programmes qui encadrent la
réinstallation et l’intégration des réfugiés tiennent compte adéquatement des CFSM et
des obligations prévues dans la Loi, y compris en temps de crise.

Après avoir lu le rapport préliminaire, le plaignant avait certaines préoccupations quant


aux ententes conclues avec les FS et leur rôle et à la capacité de certains FS du PAR de
fournir le service en français aux RPG en faisant appel à la sous-traitance.

5.5 Position de l’institution fédérale

En réponse à la plainte, IRCC a fourni des renseignements détaillés visant à expliquer


comment fonctionnent les programmes ministériels qui encadrent la réinstallation et
l’intégration des réfugiés, notamment des réfugiés syriens, au Canada.

Afin d’expliquer comment le Ministère a géré la réinstallation des réfugiés syriens après
l’annonce du 4 novembre 2015, l’ensemble des représentants d’IRCC rencontrés a noté
que le réseau de FS du PAR était déjà en place et que le Ministère devait donc diriger
les réfugiés syriens vers les villes où ces FS étaient présents.

Étant donné le nombre élevé de réfugiés à accueillir et la pression à laquelle le réseau


de FS du PAR a vite fait face, IRCC a décidé d’avoir recours à un processus de
réception continue des propositions pour augmenter le nombre de FS et de villes où les
services du PAR pourraient être offerts aux réfugiés syriens. Ce processus a été ouvert
entre le 13 janvier et le 11 mars 2016. Seuls les FS du PÉ qui avaient déjà une entente
avec IRCC pouvaient soumettre une demande.

Sur les 39 propositions reçues à l’hiver 2016, huit ont été soumises par des organismes
d’établissement francophones, mais aucune de celles-ci n’a été retenue. IRCC a indiqué
avoir évalué toutes les propositions selon les mêmes critères normalisés pour s’assurer
que les organismes sélectionnés aient la capacité organisationnelle et communautaire
d’accueillir et d’intégrer des réfugiés syriens immédiatement.

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6
À ce jour, un seul des 31 FS du PAR situés à l’extérieur du Québec est spécialisé dans
l’offre de services en français aux réfugiés. IRCC a toutefois indiqué que tous les FS du
PAR à l’extérieur du Québec étaient en mesure de fournir des services en français aux
RPG, soit directement ou par l’intermédiaire d’interprètes. IRCC a aussi noté que les
clauses linguistiques dans les ententes de services qu’il a conclues avec les FS du PAR
ont été établies en fonction des besoins de la communauté d’accueil. Par exemple, les
ententes peuvent inclure des clauses qui exigent de fournir des services de qualité égale
dans les deux langues officielles, d’informer les clients de la disponibilité des services
dans l’autre langue officielle auprès d’autres organisations, d’organiser des activités, des
projets et des programmes pour forger des liens entre les deux communautés de langue
officielle et de consulter annuellement les CFSM au sujet des programmes de
réinstallation et d’établissement. IRCC a également noté que son personnel surveille la
prestation des services du PAR pour s’assurer que les FS respectent les obligations
linguistiques incluses dans les ententes.

IRCC a aussi expliqué que les réfugiés sont informés au moyen de séances d’orientation
pré départ que le Canada a deux langues officielles, qu’il existe des CLOSM partout
dans le pays et qu’ils peuvent choisir de s’exprimer dans l’une ou l’autre des langues
officielles. Ces renseignements leur sont aussi fournis après leur arrivée au Canada par
les FS du PAR et du PÉ et au moyen d’une multitude de produits d’information14. IRCC a
fourni une copie de ces documents dans le cadre de l’enquête.

Étant donné le nombre de réfugiés syriens à accueillir et la période de temps limitée


pour ce faire et afin d’accélérer leur arrivée au Canada, les séances d’information ne
leur ont pas été systématiquement offertes avant leur arrivée au Canada.

En ce qui concerne la distribution des réfugiés syriens, IRCC a expliqué que les
renseignements recueillis sur les langues parlées et sur la connaissance d’une ou des
deux langues officielles du Canada étaient pris en note lors de l’entrevue précédant
l’arrivée des réfugiés au Canada et transmis au Centre de jumelage. Les représentants
d’IRCC ont noté que le Centre de jumelage tient habituellement compte de la
connaissance des langues officielles pour déterminer la destination des RPG. Ainsi, si
une personne parle ou comprend le français, le Centre de jumelage privilégiera une
destination francophone. IRCC a aussi noté qu’en plus des critères de jumelage
mentionnés précédemment, il a également considéré les expressions d’intérêt des
provinces et, dans la mesure du possible, les priorités et les objectifs en ce qui concerne
les CLOSM.

IRCC a cependant noté à plusieurs reprises que la majorité des réfugiés syriens pris en
charge par le gouvernement avait un niveau d’alphabétisation faible et
qu’approximativement 95 % d’entre eux ne parlaient ni français ni anglais à leur arrivée
au Canada. De plus, la capacité d’accueil des provinces et des FS du PAR était un
facteur très important pour déterminer la destination des réfugiés compte tenu du
nombre de réfugiés devant être accueillis sur une courte période (25 000 en trois mois).

14
Par exemple : guide prédépart à l’intention des migrants au Canada intitulé « Coups d’œil sur le
Canada », guide intitulé « Bienvenue au Canada », bulletins d’information pour les RPG, les RPSP et les
RDBV, vidéo intitulée « La formation linguistique pour le Canada », etc.

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5.6 Entrevues avec les représentants de l’institution fédérale

Lors des entrevues, les représentants d’IRCC ont fourni des renseignements en réponse
aux questions posées sur les mesures prises par le Ministère pour tenir compte des
CFSM dans le cadre de ces programmes avant et après l’annonce de l’initiative de
réinstallation des réfugiés syriens.

5.6.1 Mesures prises avant l’annonce de l’initiative de réinstallation des réfugiés


syriens

Les représentants d’IRCC ont reconnu que le Ministère n’avait pas évalué l’impact de
ses programmes qui encadrent la réinstallation des réfugiés au Canada sur les CLOSM
avant l’annonce de l’initiative de réinstallation des réfugiés syriens.

Ils ont, entre autres, confirmé que les évaluations du PAR15, du PÉ16 et des Cours de
langues pour les immigrants au Canada (CLIC)17 conclues en 2010 et en 2011 n’ont pas
examiné si des mesures positives pouvaient être prises dans le cadre de ces
programmes pour appuyer le développement et la vitalité des CLOSM. Ces évaluations
n’ont pas non plus examiné l’impact de ces programmes sur les CLOSM.

Lorsque questionnés sur les raisons pour lesquelles l’impact du PAR sur les CLOSM n’a
pas été pris en compte lors de l’évaluation du programme, les représentants d’IRCC ont
indiqué que le développement des CLOSM ne fait pas partie des objectifs visés par le
PAR. Un des représentants du Ministère a noté qu’IRCC ne tient pas compte des
réfugiés pour atteindre sa cible de 4,4 % d’immigrants francophones. D’autres ont
affirmé ne pas comprendre comment ni pour quelles raisons l’initiative de réinstallation
des réfugiés syriens ou l’accueil de réfugiés en général pourrait avoir un impact sur le
développement et la vitalité des CLOSM.

Les représentants d’IRCC ont expliqué que les questions qui concernent les CLOSM ont
été examinées séparément en 2012 lors de l’évaluation de l’Initiative de recrutement et
d’intégration d’immigrants d’expression française au sein des communautés
francophones en situation minoritaire18. Cette initiative s’inscrivait dans la Feuille de
route pour la dualité linguistique canadienne 2008-2013 : Agir pour l’avenir19. Son
« principal objectif […] [était] d’accroître le nombre d’immigrants d’expression française
dans les [CSFM] et de faciliter leur accueil et leur intégration dans ces communautés ».

15
IRCC. Évaluation du Programme des réfugiés parrainés par le gouvernement (RPG) et du Programme
d’aide au réétablissement (PAR), mars 2011. Version en ligne (http://www.cic.gc.ca/francais/pdf/pub/RPG-
er
RAP.pdf) consultée le 1 mars 2017.
16
IRCC. Évaluation du Programme d’établissement et du programme d’adaptation des immigrants (PEAI),
septembre 2011. Version en ligne (http://www.cic.gc.ca/francais/pdf/recherche-stats/evaluation-
er
peai2011.pdf) consultée le 1 mars 2017.
17
IRCC. Évaluation du Programme « Language Instruction for Newcomers to Canada » (LINC), juillet 2010.
Version en ligne (http://www.cic.gc.ca/francais/ressources/evaluation/clic/2010/linc-eval.pdf) consultée le
er
1 mars 2017.
18
IRCC. Évaluation de l’Initiative de recrutement et d’intégration d’immigrants d’expression française au sein
des communautés francophones en situation minoritaire, juillet 2012. Version en ligne
er
(http://www.cic.gc.ca/francais/ressources/evaluation/recrutement/index.asp) consultée le 1 mars 2017.
19
Gouvernement du Canada. Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne 2008-2013 : Agir pour
l’avenir. Version en ligne (http://canada.pch.gc.ca/DAMAssetPub/DAM-PCH2-Identity-
er
OfficialLanguages/STAGING/texte-text/08-13-LDL_1456933235664_fra.pdf) consultée le 1 mars 2017.

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8
Le directeur, Politique de programmes sur la langue, Planification et Responsabilisation
d’IRCC a reconnu que cette initiative concernait le recrutement et l’accueil d’immigrants
francophones plutôt que la réinstallation de réfugiés.

En outre, lorsque questionnés au sujet de l’appel de propositions national d’août 2015


pour les services directs du PAR et du PÉ, les représentants d’IRCC ont reconnu
qu’aucune mesure n’a été prise à ce moment-là ni au préalable pour appuyer les CSFM
à devenir des collectivités d’accueil capables d’offrir les services du PAR aux réfugiés.

5.6.2 Mesures prises entre l’annonce de l’initiative de réinstallation des réfugiés


syriens et le dépôt de la plainte

Les représentants d’IRCC ont confirmé qu’un mémoire au Cabinet (MC) a été présenté
au Sous-comité spécial sur les réfugiés syriens le 12 novembre 2015. Même si le guide
d’IRCC pour la présentation des documents du Cabinet fournit des directives et des
procédures à suivre pour analyser l’incidence des initiatives ou des décisions sur la
conformité à la Loi et précise qui est la personne-ressource du SLO20 qui peut être
consultée pour obtenir plus d’information pour compléter cette analyse, les
représentants d’IRCC ont admis que le MC en question ne contenait pas d’analyse de
l’impact de l’initiative de réinstallation des réfugiés syriens sur les langues officielles et
que les représentants du SLO n’ont pas été consultés lorsqu’il a été préparé.

Le 26 novembre 2015, IRCC a soumis une présentation au Conseil du Trésor (CT) afin
d’obtenir les fonds nécessaires pour mener l’initiative de réinstallation des réfugiés
syriens. L’annexe F de la présentation au CT (« Considérations relatives aux politiques
pangouvernementales ») indiquait que toutes les activités du Ministère respecteraient les
dispositions pertinentes de la Loi et des politiques du CT sur les langues officielles et
qu’après analyse, aucun impact sur les langues officielles n’était prévu. Selon IRCC, la
présentation au CT et tous les aspects de la mise en œuvre du projet étaient guidés par
le MC du 17 novembre 2015. Aucun des représentants d’IRCC interviewés n’a pu
expliquer l’analyse qui soutient l’information fournie dans la présentation au CT.

Le 9 décembre 2015, IRCC a également toutefois tenu une table ronde avec des
représentants des CFSM afin de valider l’intérêt et le niveau de préparation des CFSM
pour accueillir des réfugiés syriens. Cette table ronde a permis à IRCC de mieux
comprendre les enjeux dans les CFSM, de mobiliser les CFSM, incluant tous les
intervenants communautaires et sectoriels, et d’échanger sur de bonnes pratiques en
matière de sensibilisation de la population, d’accueil et de réinstallation des réfugiés.

Selon IRCC, les Réseaux en immigration francophone (RIF) et leurs membres sont
proactifs et plusieurs ont développé des collaborations avec leurs partenaires
anglophones. Les représentants d’IRCC ont noté que les représentants des CFSM
avaient un intérêt manifeste de contribuer aux efforts nationaux déployés envers les
réfugiés syriens et ainsi favoriser la vitalité de leur communauté par le nombre de
personnes, mais s’étaient dits préoccupés, lors de cette table ronde, de ne pas pouvoir
accueillir leur juste part de réfugiés syriens.

20
Le SLO est entre autres responsable d’assurer une approche stratégique et une coordination centralisée
des efforts déployés par IRCC relativement à la partie VII de la Loi.

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9
Il est par ailleurs indiqué dans le compte-rendu qu’« il ressort de cette [table ronde] un
besoin de poursuivre les réflexions sur l’importance de synchroniser les efforts associés
à l’arrivée des réfugiés de façon à considérer les CFSM ». IRCC a aussi reconnu qu’au
cours des dernières années, « les stratégies des partenaires communautaires et du
Ministère en matière d’immigration francophone ont […] principalement été orientées
vers l’immigration économique. Les changements de priorités soulèvent la nécessité de
développer une vision plus globale et stable de l’immigration francophone. »

IRCC a fourni une mise à jour des éléments discutés lors de la table ronde du
9 décembre 2015 aux membres du Comité IRCC-CFSM lors de la réunion du
10 décembre 2015 de ce comité.

Le 18 décembre 2015, IRCC a aussi transmis un message à tous les FS du PAR pour
les encourager à contacter les RIF lorsque les réfugiés syriens démontrent de l’intérêt à
s’établir dans une CFSM afin de les aiguiller vers les services offerts en français.

5.6.3 Mesures prises depuis le dépôt de la plainte

Les représentants d’IRCC ont confirmé que l’évaluation des programmes de


réinstallation publiée en juillet 2016 n’a pas tenu compte de l’impact de ces programmes
sur le développement et sur l’épanouissement des CLOSM.21

Ils ont toutefois souligné qu’IRCC a poursuivi les discussions amorcées en


décembre 2015 avec les représentants des CFSM, notamment au moyen d’une table
ronde qui s’est tenue le 1er mars 2016 et d’un exercice sur les leçons apprises
concernant la réinstallation des réfugiés syriens au Canada avec des partenaires
externes (dont les CFSM) en avril 2016.

Depuis mars 2016, trois téléconférences ont été tenues dans le cadre du Forum
d’échange sur le parcours d’intégration francophone (un groupe d’échange informel qui
inclut d’autres ministères fédéraux, quelques provinces et des CFSM). Ces échanges
avaient pour but de faciliter les discussions avec des intervenants francophones pour
mieux connaître leurs besoins en matière de services francophones et leurs défis reliés
à l’installation des nouveaux arrivants en milieu minoritaire. Lors de la même période,
une consultation sur les services pré arrivée a aussi eu lieu, alors qu’il a été question de
l’accueil et des services en français destinés aux réfugiés.

Le 5 octobre 2016, des consultations ont été organisées en vue du prochain plan
pluriannuel des langues officielles du gouvernement fédéral. De plus, le 26 novembre
2016, le SLO a participé à une rencontre impliquant les FS du PAR pour discuter de
bonnes pratiques pour l’arrimage des réfugiés avec les services en français.

IRCC, en collaboration avec les provinces et les territoires, a lancé l’Initiative de


développement de collectivités accueillantes pour appuyer l’élargissement du réseau
des communautés qui peuvent offrir le soutien et les services nécessaires pour
réinstaller les RPG d’origine syrienne et d’autres nouveaux arrivants à l’avenir.

21
IRCC. Évaluation des programmes de réinstallation (Programme des RPG, PPPR, Programme mixte des
RDBV et PAR), juillet 2016. Version en ligne (http://www.cic.gc.ca/francais/pdf/pub/reinstallation.pdf)
er
consultée le 1 mars 2017.

Commissariat aux langues officielles Rapport final d’enquête


10
Depuis juin 2016, le SLO a constaté des progrès quant à son implication lors de
l’élaboration de mémoires au cabinet et de présentations au Conseil du Trésor au
Ministère. Cette implication a permis d’identifier des améliorations possibles aux outils
de sensibilisation, notamment au Guide à l’intention des rédacteurs d’une présentation
au Conseil du Trésor et le Guide pour la préparation de documents au Cabinet à IRCC.
Le SLO a également amorcé une campagne de sensibilisation et de responsabilisation
au sein du Ministère sur la partie VII de la Loi pour élaborer des mémoires au Cabinet et
des présentations au Conseil du Trésor. Le SLO chercher à s’assurer d’être
systématiquement impliqué au début du processus de prises de décisions, de façon à
mieux accompagner les directions générales dans leur réflexion.

En novembre 2016, IRCC a mené une discussion sur les exigences en matière de
langues officielles et la promotion des CFSM avec les représentants du Groupe de
travail sur le PAR et les RPG. Il s’agit d’une plateforme qui offre aux FS du PAR et à
IRCC l’occasion d’échanger des renseignements et des points de vue sur les questions
liées aux programmes et aux politiques concernant le PAR et les RPG. Les
renseignements recueillis au sujet des activités sont utilisés pour appuyer un sondage
d’IRCC à l’intention de tous les FS du PAR, qui porte sur leurs pratiques en matière de
langues officielles. Ce sondage a été réalisé au cours de l’été 2017.

IRCC a lancé deux études en décembre 2016, sur les réfugiés d’expression française
vivant au Canada hors Québec : 1) Expérience d’établissement et d’intégration
d’immigrants et de réfugiés d’expression française issus de l’Afrique subsaharienne et 2)
Étude sur les réfugiés d’expression française de Winnipeg et Saint-Boniface. En mars
2018, lors que ces deux études seront terminées, IRCC mobilisera ses partenaires des
établissements, des communautés et du milieu universitaire afin de promouvoir la
diffusion des connaissances sur les réfugiés d’expression française qui vivent au
Canada à l’extérieur du Québec.

5.6.4. Précisions sur les évaluations

Au moment de commenter le rapport préliminaire de cette enquête, l’institution a précisé


que les évaluations visent à évaluer l’efficacité des activités en place; elles ne sont pas
des prévisions et ne visent pas à fournir une analyse des mesures susceptibles d’être
prises à l’avenir pour atteindre un objectif donné. Les résultats attendus en lien avec les
programmes et les initiatives sont confirmés à l’étape de planification de l’évaluation, en
collaboration avec des représentants des programmes et des initiatives.

Ainsi, l’institution précise que les évaluations de l’Initiative sur les CLOSM d’IRCC
visaient à examiner de façon plus globale les résultats concernant le développement et
l’épanouissement des CLOSM à l’intention du Ministère; elles recoupent les activités et
les résultats correspondants relatifs aux résidents permanents d’expression française de
toutes les catégories d’immigration (immigration économique, réfugiés, familles
parrainées et autres catégories) qui s’établissement dans ces communautés
francophones en situation minoritaire. À ce jour, il y a eu trois évaluations en lien avec
l’Initiative sur les CLOSM :

- l’Évaluation formative des initiatives visant à favoriser l’immigration au sein des


communautés francophones en situation minoritaire de Citoyenneté et
Immigration Canada (2006);

Commissariat aux langues officielles Rapport final d’enquête


11
- l’Évaluation de l’Initiative de recrutement et d’intégration d’immigrants
d’expression française au sein des communautés francophones en situation
minoritaire (2012);
- l’Évaluation de l’Initiative sur les communautés de langues officielles en
situation minoritaire (mai 2017).

6. Analyse et conclusions

En vertu du paragraphe 41(2) de la Loi, IRCC a l’obligation de prendre des mesures


positives de façon proactive afin d’appuyer les CLOSM et d’agir de façon à ne pas nuire
au développement et à l’épanouissement de ces communautés.

L’analyse des obligations prévues à la partie VII de la Loi concerne principalement le


processus suivi pour analyser l’impact, positif ou négatif, possible de la mise en œuvre
d’une politique, d’un programme ou d’une décision, par exemple, sur l’épanouissement
et sur le développement des CLOSM et la prise de mesures positives subséquentes.

Pour qu’une mesure soit considérée comme « positive », au sens du paragraphe 41(2)
de la Loi, l’institution doit démontrer que la mesure a été prise dans l’objectif de combler
les besoins particuliers des CLOSM en vue d’atteindre un résultat positif pour appuyer la
vitalité des minorités francophones ou anglophones du Canada, ou pour promouvoir la
dualité linguistique dans la société canadienne.

L’institution doit aussi s’assurer que la mise en œuvre de ses politiques, ses
programmes ou ses décisions est précédée d’une analyse d’impact sur le
développement et sur l’épanouissement des CLOSM et qu’elle inclut des mesures
susceptibles de pallier les répercussions négatives probables identifiées, le cas échéant,
lors de cette analyse. En effet, les CLOSM ne pourraient pas progresser vers l’égalité
réelle si les institutions fédérales étaient autorisées, par leurs actions ou leur inaction, à
nuire à leur développement et à leur vitalité.

Les mesures qui doivent être analysées afin d’évaluer si IRCC a rempli les obligations
qui lui incombent en vertu de la partie VII de la Loi sont celles qui ont été prises dans le
contexte de la situation qui fait l’objet de la plainte; ce ne sont pas l’ensemble des
mesures prises par une institution dans l’exercice de son mandat qui sont pertinentes.

La vitalité des CFSM et de leurs institutions repose de plus en plus sur l’accueil et sur
l’intégration de nouveaux arrivants, y compris des réfugiés réinstallés au Canada. Étant
donné qu’au cours des dernières années les CFSM ont peu bénéficié de l’immigration,
en comparaison aux communautés majoritaires, pour maximiser les effets positifs
potentiels de l’accueil de réfugiés au Canada, les CFSM ont besoin du soutien du
gouvernement fédéral et, plus particulièrement, de celui d’IRCC, dont le mandat stipule
explicitement que l’accueil et l’intégration d’immigrants et de réfugiés doivent être faits
de manière à « soutenir l’engagement du gouvernement du Canada à favoriser
l’épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada ».

Commissariat aux langues officielles Rapport final d’enquête


12
Par conséquent, dans le cas en l’espèce, IRCC avait l’obligation de :

1. rechercher, de façon proactive, de l’information sur les besoins des CFSM


concernant la réinstallation et l’intégration de réfugiés au Canada;
2. procéder à une analyse d’impact des programmes ministériels qui encadrent la
réinstallation et l’intégration de réfugiés au Canada sur la vitalité et le
développement des CFSM;
3. prendre des mesures positives dans le cadre des programmes qui encadrent la
réinstallation et l’intégration de réfugiés au Canada pour favoriser
l’épanouissement des CFSM et pour appuyer leur développement;
4. prendre les mesures nécessaires pour pallier les répercussions négatives, le cas
échéant, des programmes qui encadrent la réinstallation et l’intégration de
réfugiés au Canada sur les CFSM.

Bien qu’IRCC ait pris certaines mesures dans le cadre du PÉ en vue d’augmenter le
nombre d’immigrants économiques francophones qui s’établissent dans les CFSM et
d’améliorer la qualité des services en français qui leur sont offerts, les renseignements
recueillis dans le cadre de l’enquête montrent qu’IRCC n’a pas cherché à évaluer
l’impact de ses programmes ni à connaître les besoins des CFSM concernant la
réinstallation de réfugiés au Canada avant l’annonce de l’initiative de réinstallation des
réfugiés syriens. L’institution a l’obligation d’être proactive en ce sens, or cela n’a pas
été fait.

Une fois cette initiative annoncée, IRCC a discuté avec les représentants des CFSM lors
de la table ronde du 9 décembre 2015 pour tenter de connaître leur niveau de
préparation en vue de l’arrivée imminente d’un nombre important de réfugiés syriens.
Cependant, cette table ronde visait avant tout à permettre au Ministère de s’assurer que
les services en français seraient offerts aux réfugiés syriens et seraient disponibles pour
eux. Il ne s’agissait pas d’une consultation visant à recueillir des renseignements pour
répondre aux besoins des CFSM concernant la réinstallation et l’intégration de réfugiés
au Canada.

Le 18 décembre 2015, IRCC a aussi transmis un message à tous les FS du PAR pour
les encourager à contacter les Réseaux d’immigration francophone lorsque les réfugiés
syriens démontraient de l’intérêt à s’établir dans une CFSM afin de les aiguiller vers les
services offerts en français. Bien qu’il s’agisse d’une mesure positive, elle ne s’inscrit
pas dans le cadre d’une analyse sur les besoins des CFSM ni dans le cadre d’une
analyse de l’impact de ses programmes sur ces mêmes CFSM.

IRCC a fait référence, à plusieurs reprises au cours de l’enquête, au fait que la


réinstallation des 25 000 réfugiés syriens a dû se faire à l’intérieur de délais restreints
qui laissaient très peu de marge de manœuvre au Ministère. À cet égard, je tiens à
souligner que les mécanismes pour tenir compte des besoins des CFSM en ce qui
concerne l’accueil et l’intégration de réfugiés auraient déjà dû être en place au moment
où l’initiative de réinstallation des réfugiés syriens a été annoncée.

Compte tenu de ce qui précède, la plainte s’avère fondée.

Commissariat aux langues officielles Rapport final d’enquête


13
À la suite du dépôt de cette plainte, IRCC a pris des mesures et a poursuivi sa collecte
d’information auprès des représentants des CFSM afin de mieux comprendre leurs
besoins, y compris ceux concernant la réinstallation de réfugiés au Canada. IRCC a
notamment poursuivi les discussions avec les représentants des CFSM dans le cadre du
Forum d’échange sur le parcours d’intégration francophone, sur les services pré arrivée
offerts aux réfugiés, en vue du prochain plan pluriannuel des langues officielles du
gouvernement fédéral, ainsi que sur les bonnes pratiques pour l’arrimage des réfugiés
avec les services en français. IRCC a aussi lancé l’Initiative de développement des
collectivités accueillantes pour appuyer l’élargissement du réseau des communautés qui
peuvent offrir le soutien et les services pour réinstaller les RPG d’origine syrienne et
d’autres nouveaux arrivants à l’avenir. Finalement, IRCC a lancé un sondage à
l’intention de tous les FS du PAR qui porte sur les pratiques en matière de langues
officielles et deux études sur les réfugiés d’expression française vivant au Canada et au
Québec.

Ces initiatives représentent certainement un bon départ dans l’atteinte des objectifs de
la partie VII de la Loi. Cela n’est toutefois pas suffisant pour conclure que l’institution
respecte désormais ses obligations. Pour ce faire, IRCC devra analyser, au moyen de
l’information recueillie auprès des CFSM, l’impact de ses programmes ministériels qui
encadrent la réinstallation et l’intégration de réfugiés au Canada sur la vitalité et sur le
développement des CFSM, prendre des mesures positives pour ce faire et, au besoin,
prendre les mesures nécessaires pour pallier les répercussions négatives de ses
programmes sur ces communautés.

7. Recommandation

À la lumière de ce qui précède, afin qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada se


conforme à ses obligations, je recommande de :

 développer, au plus tard six mois après l’envoi du rapport final d’enquête,
un plan d’action prévoyant des échéances, des activités et des indicateurs
de rendement précis afin de respecter pleinement les obligations prévues à
la partie VII de la Loi sur les langues officielles dans le cadre de la
réinstallation et de l’intégration des réfugiés au Canada.

Un suivi sera effectué au cours de l’année 2018.

Ce rapport constitue mon rapport final d’enquête.

Raymond Théberge
Commissaire aux langues officielles

Commissariat aux langues officielles Rapport final d’enquête


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