You are on page 1of 9

Roissy Hall

Terminal de Roissy: des responsabilités en cascade

Aéroport de Paris, l'architecte, l'entreprise qui a procédé à la construction... • Personne ne serait épargné dans
le rapport de la commission d'enquête administrative sur l'effondrement qui a provoqué la mort de 4 personnes
en mai dernier •

Par Ludovic Blecher

lundi 07 février 2005 (Liberation.fr - 17:12)

uit jours avant la présentation de l'enquête administrative commandée par le ministère de Transports après
l'effondrement du terminal 2E de l'aéroport parisien Roissy-Charles-de-Gaulle, qui a fait quatre morts et trois blessés le
23 mai 2004, les mis en cause présumés fourbissent leurs armes. C'est un article publié lundi matin par «Le Parisien»
qui a mis le feu aux poudres: selon le quotidien le rapport d'expertise est accablant aussi bien pour les architectes que
pour Aéroports de Paris. Et les entreprises ne seraient pas épargnées. Après neuf mois de travail, la commission pointe
«plusieurs erreurs graves de conception»: un béton pas suffisamment armé pour supporter la pression de la structure de
verre et d'acier, «de mauvais calculs de forces et de résistances, des ouvertures pratiquées sur les flancs de la voûte qui
fragilisent la solidité de l'ouvrage...».

Concernant l'effondrement lui même, le rapport confirmerait que la voûte en béton du terminal aurait cédé après avoir été
«perforée par les butons», sorte d'étais métalliques rivetés à la structure en métal censée assurer sa tenue à l'ouvrage.
Une constatation qui figurait déjà dans un prérapport présenté en juillet dernier. Reste à savoir si le rapport définitif
répond à cette question essentielle pour déterminer les responsabilités: est-ce la conception du bâtiment qui est à l'origine
de son effondrement ou bien la structure en béton qui n'était pas adaptée. D'après «Le Parisien» c'est le béton ou plutôt
son armature qui est en cause. En clair: la structure métallique destinée à «armer» le béton n'aurait pas été suffisamment
solide pour maintenir l'ensemble de l'ouvrage.

Si cette version se confirme, GTM, une filiale de Vinci chargée de livrer la coque en béton et donc responsable du
ferraillage se trouverait en première ligne. L'architecte Paul Andreu, concepteur de l'ouvrage, ne s'est d'ailleurs pas privé,
lundi, de charger l'entreprise: selon lui l'accident «a pour cause une insuffisance de l'armature en acier du béton (qui)
constitue une tâche d'exécution à la charge des entreprises de BTP». Et d'ajouter: «Depuis le premier jour, les
observations visuelles ont montré que le sinistre a pour cause une insuffisance de l'armature en acier du béton».

Face à ces accusations, GTM a choisi de garder le silence. «Vinci n'a pas le rapport Berthier et refuse de réagir à des
rumeurs», déclare un proche de l'entreprise. Mais ce silence n'est peut-être pas coupable car l'entreprise n'était, lors de la
construction qu'une exécutante des instructions des bureaux d'études chargé d'effectuer les calculs pour assurer la solidité
du terminal. Or contrairement aux règles généralement en vigueur, l'architecte Paul Andreu était à la fois le concepteur du
bâtiment et le directeur de l'architecture et de l'ingénierie d'Aéroports de Paris (ADP). C'est donc sous sa houlette que les
ingénieurs d'ADP auraient effectué les calculs fournis aux entreprises.

«En général les entreprises n'inventent rien, c'est la dernière roue du carrosse, affirme François Buyle-Bodin , spécialiste
des structures et professeur à l'université de Lille. A moins d'une erreur grossière, elles répondent aux exigences du
bureau d'études. L'ambiguïté de cette affaire, c'est qu'il n'y avait pas d'indépendance entre le concepteur et le bureau
d'études. C'est la même personne qui avait toutes les ficelles en main. Le bureaux de contrôle deviennent alors l'unique
filet de sécurité». L'organisme de contrôle, Veritas, n'a pas souhaité faire de commentaires et ADP, qui se serait
gravement mis en cause, n'est pas plus bavard.

Confronté à ces fuites, le ministère des Transports a affirmé, lundi matin, que «la mission (d'enquête) et le rapport ne sont
pas achevés». Il faudra donc se contenter de réactions officieuses comme cette source proche d'ADP qui a indiqué à l'AFP
que «le rapport Berthier met en cause un peu tout le monde, en premier Vinci, puis Veritas chargé de la vérification, puis
ADP comme maître d'œuvre et d'ouvrage». Reste que contrairement à une rumeur qui a circulé, il n'y aura, pour l'heure,
pas de mises en examen. Il appartient, en effet au juge du tribunal de Bobigny Roger Le Loire qui a diligenté l'expertise
judiciaire menée en parallèle de la commission d'enquête de les prononcer. Contacté par l'AFP, il a déclaré: «L'expertise
judiciaire n'étant pas terminée. Il nous reste à reconstituer le “puzzle“ du 2E sur le tarmac de Roissy». Une tâche qui
devrait prendre encore plusieurs mois.
L'enquête administrative sur l'effondrement de la voûte de l'aérogare touche à sa fin.

Roissy: architecte ou bâtisseur ? les experts hésitent encore


Par Ludovic BLECHER et Tonino SERAFINI
mardi 08 février 2005 (Liberation - 06:00)

gitation tous azimuts à quelques jours de la publication d'un rapport de la commission d'enquête administrative
chargée de faire la lumière sur les causes de l'effondrement partiel du terminal 2E de l'aéroport de Roissy.

L'écroulement d'une partie de la voûte de cet ouvrage inauguré moins d'un an plus tôt avait fait quatre morts et trois
blessés, le 23 mai 2004 au petit matin. C'est un article publié hier par le Parisien qui a mis le feu aux poudres. Selon le
quotidien, le rapport dont les conclusions doivent être rendues publiques le 15 février «est accablant pour les
architectes et Aéroports de Paris». Le document «pointe du doigt plusieurs erreurs graves de conception de l'ouvrage»,
qui porte la signature de l'architecte Paul Andreu. Réplique immédiate de l'intéressé, hier, par le biais d'un communiqué
: pour lui, l'effondrement du terminal «a pour cause une insuffisance de l'armature en acier du béton». Ce qui consiste
à renvoyer le ballon dans le camp de GTM, la société de bâtiment et de travaux publics filiale du groupe Vinci, qui a
réalisé la voûte. L'armature est «une tâche d'exécution à la charge des entreprises de BTP», affirme l'architecte.

Conception. Deux thèses s'affrontent : l'une met en cause la conception de l'ouvrage, l'autre sa réalisation. Les causes
et les responsabilités relatives à cet effondrement semblent si entremêlées que la commission d'enquête
administrative, constituée à l'initiative du ministre de l'Equipement et des Transports Gilles de Robien, tarde à rendre
ses travaux. «A ce jour, le rapport définitif n'a toujours pas été remis au ministre. Les membres de la commission
divergent sur leurs conclusions», soulignait hier un responsable du ministère. «Les propos que certains pourraient
prêter [à ce rapport] sont totalement prématurés», indiquait plus officiellement un communiqué diffusé par les services
de Gilles de Robien. La commission d'enquête administrative présidée par Jean Berthier, personnalité très reconnue
dans le monde de l'ingénierie française, devrait achever sa mission d'ici à la fin de la semaine et transmettre dans la
foulée le rapport au ministre.

A ce jour, les seules certitudes concernent le scénario de l'effondrement de l'ouvrage lui-même. Il tient à une sorte de
mésalliance entre acier et béton, mise en exergue dans un prérapport rendu en juillet par la commission Berthier. La
voûte du terminal 2E est constituée d'une coque en béton partiellement ajourée et recouverte d'une enveloppe vitrée
qui repose sur une armature métallique. Cette enveloppe est reliée à la voûte en béton par des «butons», sortes d'étais
métalliques qui assurent à l'ensemble béton-métal-verre, sa tenue. Or un dysfonctionnement s'est produit puisque les
butons ont fini par perforer la coque en béton et provoquer son effondrement. L'expertise a pour objet de déterminer si
cette perforation est due à une erreur dans la fabrication de la voûte ou bien à la conception même de l'ouvrage, décrit
comme «audacieux». De plus, l'effondrement s'est produit dans une zone particulière du terminal 2E, un endroit où
l'ouvrage est transpercé par trois passerelles piétonnes destinées au transit des voyageurs. A ce niveau précis, les arcs
de la voûte comportent de grandes ouvertures qui auraient pu la fragiliser. Là encore, il s'agit de savoir si c'est la
conception ou la réalisation qui a été défaillante. «Il n'y a sûrement pas d'explication unique» a commenté hier François
Goulard, secrétaire d'Etat aux Transports. L'enjeu financier est énorme, puisque la construction du terminal 2E a coûté
la bagatelle de 750 millions d'euros à Aéroports de Paris.

Démenti. En parallèle à cette enquête administrative, qui consiste pour l'essentiel à renseigner le ministre sur le
devenir de cet ouvrage (est-ce qu'il faudra raser toute la voûte ou simplement reconstruire la partie effondrée ?),
l'affaire de Roissy se double d'un volet judiciaire. L'instruction est menée par le juge du tribunal de Bobigny, Roger Le
Loire. Hier, des informations faisaient état de «mises en examen imminentes» de responsables d'Aéroport de Paris,
dont son président Pierre Graff, et de l'architecte Paul Andreu. Mais une source judiciaire a démenti catégoriquement
ces rumeurs : «L'expertise judiciaire est en cours. Il y en a encore pour trois ou quatre mois.» Quel que soit l'épilogue
du rapport d'enquête administratif, aucune mise en examen ne semble envisagée avant que les experts judiciaires
n'aient déposé leurs conclusions sur le bureau du juge.

You might also like