You are on page 1of 12
Le grotesque DOMINIQUE TEHL Profewearéméie & TUniemité de Toulowe IL Ac. 496 BI- 19 pte gal — os = 197, jut © roses Valeri de France, 1997 {oe boul Sane Germin, 73006 Pasi INTRODUCTION Le grotesque est une notion aussi évasive que sédui- sante. Son champ sémantique est mal défini. Le gro- tesque est d’abord un repére psychologique, Pévalua- tion d’un paysage psychique souvent convulsé et contradictoire, et qui s’accompagne d’un jugement de valeur. Il est aussi un repére artistique au carrefour de tendances divergentes. On tient pour grotesque un phénoméne qui reléve a Ia fois du comique et du tra- gique, du rire et de la peur, mais qui signific plus que leur simple combinaison, Le terme est souvent accom- pagné d'une connotation négative, et traduit une forme irritation, de déception, de dérision. Mais cette nuance est tardive, et trés longtemps grotesque a &é seulement synonyme de ridicule. Dans P arts le terme s'est prété a de multiples défi srotesque est en effet situé & la frontiére de notions trés, mobiles elles-mémes. On Vassocie au tragique et a l’an- goisse et en méme temps a la farce et au rire du carna- val. Il est voisin parfois de Villusion fantastique, par- fois de la caricature et de la satire. Mais Pincontestable mobilité du grotesque n’exclut pas la permanence de certaines structures quril faut tenter de détecter sous la divergence des contenus qu'il propose. On est tenté en. effet de confondre le grotesque avec ces contents, d’as- similer grotesque et démoniaque ou grotesfe et délire social, etc., alors qu'il est d’abord un style. Mais ce style est toujours lié aux divers visages de la réalité. 11 est, plus que autres styles pout-ttre, rattaché aux Epoques de son interprétation. Structure et histoire vont ici de pair, et une analyse du grotesque doit, nous, semble-t-il, se situer a leur rencontre. Nous tenterons. de le préciser & travers quelques moments essentiels, en. confrontant les théories au témoignage des cuvres. L’ampleur du sujet nous améne & nous limiter, dans le choix des exemples, a la peinture et surtout & la litéra- ture, & travers le roman et le thédtre. L’étude du gro- tesque en poésie — en soi fort intéressante — sort du cadre que nous avons choisi, et la recherche des struc- tures grotesques en musique est une entreprise trés delicate dans sa spécificité. Il serait tentant d'esquisser une géographie du gro- tesque, qui entretient des rapports étroits avec certains domaines de culture, L’Allemagne, la Grande-Bre- tagne, Europe centrale et orientale sont, chacune a leur maniére, des terres d’élection du grotesque. Mais, Te grotesque méridional a lui aussi une vitalité remar- quable, et ailleurs le grotesque ne fleurit jamais mieux que quand deux cultures s‘allient, quand par ‘exemple le Russe Bakhtine se fait linterpréte de Rabe- lais. L’interprétation modeme du grotesque est fort tardive, avec les études de Wolfgang Kayser en 1957 et de Mikhail Bakhtine en 1965. Mais, & cette époque, une tradition grotesque s'était instaurée, depuis Rabe- et Bruegel, & travers les peintres et les écrivains. PREMIERE PARTIE MOBILITE DU GROTESQUE Chapitre 1 LES STYLES DE LA «GROTTESQUE» Les débuts, — Certains interprites du grotesque moderne se plaisent & souligner tout ce qui le sépare de ses premigres manifestations dans 'art ornemental de Vitalie du xv* siécle, Cet art pourtant nous apprend ‘beaucoup sur les structures du genre et sur son évolu- tion ultérieure. On cite souvent la phrase de Montaigne qui décrit, pour préciser son propre style dans les Essais, le travail un peintre de P’époque: ‘I chosit Ie plus bel endrot et milieu de chaque paroy, pour y loger ua tableau éaboré de toute sa sulfisance et, le vide tout ay tour ile remplit de crotesques, qui sont peinturesfantasques, Mayant grice qu'en la vanele’ et etrangete (Essas, hv. 1, chap. XXVIID. ‘Au temps des Essais en 1580, les «crotesques» étaient depuis prés d'un siécle un mode familier de Part, Le mot est lié la découverte, dans les dernigres années du XV°siécle, de fresques et de décors antiques, dans le sous-sol de la Maison Dorée de Néron, enfouie sous les thermes de Trajan. C'est a partir de ces «grote (souterrains), que l'on adopta pour les décors le terme de «grotesque» qui s’appliqua plus ‘ard au genre tout entier. Ih est difficile de définir en quelques traits le style complexe de ces compositions, qu’on a parfois ten- dance & considérer comme un caprice, une mode pas- sagére, Ces « peintures fantasques», comme dit Mon- taigne, exprimaient surtout une nouvelle forme de fantaisie créatrice, une nouvelle aventure de Vimagina- tion, Les commentateurs de T'époque envisageaient un el critique ces combinaisons audacieuses, qui pouvaient passer pour impertinentes. Giorgio Vasari, Tauteur des Vies les plus remarquables des peinires culpteurs et architectesitaliens, Ect & ce sujet “la, met eB cost dane Anis pono cure arr saved tae ne place. Les artistes y taient des difformités monstrucuses ie gee rues mee meet HS Peele eet ed ae Sh alta tera oe Sean a André Chastel, qui cite ces lignes, étudie avec acuité evolution de la « grottesque » et les perspectives qu’elle ouvre sur certains aspects décisifs de Part moderne. Le premier grotesque ~ Vasari le montre bien ~ signifiait tne rupture de art classique a intérieur méme de ’An- fiquité. Vitruve, au 1 sigcle avant Jésus-Christ, est plus sEvére encore pour les tenants de la nouvelle architec- ture, dont le «godt dépravé» est un défi ordre de fa nature, Il critique surtout la confusion entre les regnes, le mélange entre Phumain, le végétal et animal. Il voit dans cette extravagance une forme W’absurdité, tandis ‘qu’aux yeux de Vasari elle peut, bien canalisée, devenir fructueuse, Son jugement iste toute la richesse de ce premier style, qui ouvre a Pimagination un champ vaste de possibilités. Les ressources de la « grottesque» sont multiples. Son trait dominant est sans doute 'ambiva- lence, 'irrégularité, et une passion dumélange qui prend parfois une apparence diffuse mais qui se traduit aussi par une véritable dynamique combinatoire, La fantaisie peut se transformer en «monstrueux ». Evolution de la « grottesque», proliferation et dissolu- tion, — André Chastel en suit les mouvements: il y a abord le monde «excitant et trouble» des premigres grottesques, vers 1500, avec les décors du Pinturicchio, de Signoreli et d'autres, qui unissent un vertige de proliferation une traduction parfois subtile de Fape- santeur. Autour de Raphaél et de Giovanni da Udine, vers 1515-1520, Vhybride céde la place au charme léger des figures des Loges vaticanes, dont le foisonnement vivant et délicat peut satisfaire a Ia fois les amateurs @art classique et de modernité. Tout au long du XVF sidcle, en Ttalie et en France, dans les Flandres et ailleurs, on retrouve, avec des intensités diverses, ces deux mouvements qui tant6t entrainent la grotesque ‘vers des inventions voisines du songe, et tantét la raménent vers des fantaisies plus proches de la réalité «La force de la grottesque tient A sa capacité de recucilir toutes les modalités imaginatives de orne- ment» (p. 43). Chastel indique 4 cet égard un glisse- ment de la grottesque vers Vonirisme et la folie, au cours du XVI" sic, et évoque les compositions mons- trueuses, en 1556, de Comelis Floris d’Anvers, ‘«aflreux mélanges de cartilage et de muqueuses, d’or- anes et de structures molles »(p. 43), annongant cer- taines extravagances du Rococo. Cette aventure du style grotesque n'est peut-étre pas un simple accident, On voit se réaliser ici une des possibilités du grotesque, ui trogue vers 1600 - comme l'indique Kayser ~ le dynamisme de Varabesque contre un style de la liqué- faction et de la dissolution. Cela est trés net dans la 7 Knorpelgroteske (Le grotesque du cartilage), & travers Jes compositions d’un Johann Heinrich Keller ou d’un Cammermeir. Tous les contours saffaissent. Les motifs étranges ~ tétes d’homme ou d’animal — se confondent avec les lignes molles dont ils ne semblent @tre qu'un prolongement. Le mélange grotesque Sopére ici sur un mode surprenant, et Tintention de artiste semble étre non tant de multiplier les formes ‘que de les dissoudre Pune dans Pautre. Ce phénoméne éclaire la nature du grotesque et son Evolution. A partir du mélange et de ambivalence, on voit se dégager deux structures contradictoires qu’on retrouvera sans cesse dans histoire du grotesque: la prolifération et la dissolution, Mexubérauce et T'evanes- cence. A cété d'un grotesque fondé sur le jeu, Vinven- tion, la combinaison, et od le mouvement de fa vie est soutenu par les forces du rire, un_ grotesque d’aliéna- tion, de dérobade, qui rejoint les formes du songe, of le rire est Etouffé par le tragique et devient Je signe une inquiétante étrangeté. Chapitre 1 LES DEUX POLES DU GROTESQUE, L’ambiguité quiillustre Pévotution de la «grot- tesque» apparait en pleine Iumigre dans le conflit qui sépare les deux interprétes les plus marquants du gro- tesque & notre Epoque, Wolfgang Kayser et Mikhail Bakhtine. Un regard sur leurs conclusions parait dés ‘maintenant nécessaire. Us utilisent le méme mot pour écrire deux réalités qui semblent totalement étran- séres Pune a Vaute. Rabelais vu par Bakhtine. Réalisme grotesque et culture comique populaire. — L’ouvrage de Bakhtine sur Rabelais en 1965 (cf. Bibliographie) est en partie une réfutation de celui de Kayser publié huit ans plus t6t. Mais il représente dans histoire du grotesque une @tape antérieure. Les premigres versions de ouvrage remontent a la fin des années trente. Il voulait alors offrir & la Russie Vimage d'un réalisme vivant, tres dif- férent du réalisme stalinien. Il y parvient en associant le grotesque une culture vaste et ancienne, culture populaire et verbale, opposée dans sa liberté ot sa spontanéité a la culture officielle. Cette culture est celle de la tradition carnavalesque, & travers les rites et les spectacles du Moyen Age, les ceuvres comiques ver- bales oi s'ébauchent et se perfectionnent les compo- santes de ce que Bakhtine définit comme un «réalisme grotesque ». Ce «réalisme> n'exclut en aucun cas V'in- vention. En associant grotesque et carnavalesque, Bakhtine fait du grotesque une culture, et lui ouvre une voie royale. Son coup de maitre est de rattacher le grotesque & la réalité tout en T'nstallant dans le ythique. Le corps grotesque et son ambiguité. — La culture ‘grotesque selon Bakhtine est d’abord ancrée dans le ‘matériel t le corporel — Rabelais, avec son prodigicux réservoir d'images de la vie corporelle, se préte admi- rablement a cette interprétation, qui, en orientant tout vers le monde inférieur, semble correspondre a une volonté de rabaisser le spirituel. Mais les termes de ‘matériel et de spirituel doivent étre pris dans un sens ‘tres large. En ramenant au corps, Rabelais rabaisse moins qu'il ne dilate et transmue ~ car le corps gro- tesque est un principe dynamique, principe d’extension infinie et de renouveau. « Rabaisser consiste a commu- nie avec la terre, comprise comme un principe d'ab- sorption en méme temps que de naissance > (p. 30). Au corps classique encerclé et limité s'oppose le Corps gro- tesque, symbole de dilatation, d'inachévement, de ‘mutation, tout autant que de fécondité Dynamisme, métamorphose, ambivalence. — A tra- ‘vers le réle du corps, le grotesque équivaut pour Bakh- tine 4 un principe d'intensification et de dynamisation du réel, qui préte une puissance et un sens nouveaux aux formes du foisonnement et de la prolifération dis- cemées & travers les styles omementaux de la « grot- ‘esque. Ce dynamisme est la source du gigantisme de Rabelais, qui n’est pas seulement, comme chez Swift, ‘un principe humoristique et satirique 'évaluation, mais une puissance active, associant vitaité, métamor- hose et ambivalence. 10 sc Limage grotesque caractérise le phénoméneen état de chan- ‘genet, de metamorphose encore inachevée, au-dcla de la mort de Ia naissance, de Ta croissance et du devenit. Lattitude 4 Tezard du temps, du devenie. est un trait constivti (determi- nant) indispensable de Pimage grotesque (p. 33). A partir de ces notions, le grotesque devient un prin- ipe actif de subversion. Toutes les hiérarchies sont bousculées, renversées, au nom du dynamisme et de la métamorphose, Cette passion de métamorphose centraine Bakhtine vers une dimension mythique : Rabe- las et le grotesque deviennent, avec la Renaissance, le symbole d'une époque en mouvement, d’une ére nou- velle et fabuleuse dans Paventure de la vie et de art. Le carnaval et le rire grotesque. — Le retour au réel se fait & travers le rire du carnaval. Le carnaval ali mente le grotesque, qui est le mode d’expression du carnaval: mode d’abord oral, qui se traduit par une sorte de iyrisme de la place publique. C'est un lyrisme de Pénorme, de Pobsoéne et du blasphéme, qui amal- game ces composantes dans un rire qui a d’abord un pouvoir de synthése. Tres t0t le rire a ét€ associé au ‘grotesque. Le mérite de Bakhtine est d’avoir compris la qualité exceptionnelle du rire de Rabelais, qui se rue au-dela de toute forme précise de satire, de paro- die ou méme de burlesque. Ce rire omniprésent équi- vaut a une vision du monde. II n'est pas un commen- taire mais une fagon de percevoir le réel. L’univers est comique chez Rabelais comme il est tragique chez Sophocle. Ainsi compris, le rire acquiert une puissance singuliére, il est a la fois profanateur et libérateur. Il devient «le propre de "homme et il est inscrit dans les profondeurs collectives et archétypales. Cest le rite dont Charles Mauron, dans Psychocritique du genre comigue, montre la dignité et la force. A partir de Rabelais, le rie sera inséparable du grotesque et uni & Ii dans une relation étroite et complexe. Cette alliance fait Poriginalité du grotesque rabelaisien par rapport aux formes de la grottesque. Il sagt en fait d'une now- velle forme de Iudisme. Dans la grottesca, tout était sous le signe de Vinvention et de la fantaisie. Le ludisme, chez Rabelais, méle lartistique et le vital dans un amalgame de nature fort diffgrente. Ce qui, dans la sgrottesca, était un mode de combinaison deviert, chez Rabelais, un pouvoir beaucoup plus radical de trans- mutation et de mélange qui apparait aussi bien dans la dilatation «monstrucuse» de ses figures que dans le dynamisme dune invention verbale qui ne cesse de malaxer et de rectéer le langage. Finalement Baktine voit en Rabelais le représentant idéal d'une nouvelle culture, sous le signe du grotesque. Mais cette culture stelle réelle? Peut-on parler dun age du grotesque dynamique et joyeux ou faut-il seulement saiuer en Rabelais Vinventeur d’un style nouveau et prodigieux ? Tl faudra éclairer ce point, mais on peut dés mainte- nant retenir un aspect essentie! pour la comprétension du grotesque & venir. Chez Rabebais la déformation ’apparait jamais comme la destruction d'une forme, mais comme la création euphorique et dynamique @une forme nouvelle Wolfgang Kayser et le grotesque de insécurté, — W. Kayser, on 1957, semble avoir été le premier cti- tique européen 4 élaborer une théorie cohérente du grotesque. Son livre peut, malgré la date, se lire ‘comme une suite de celui de Bakitine. En effet, apres un bref regard sur la grottesca et la commedia del arte, se consaere au grotesque dans l'art & partir du ‘Xxvnr sidcle. Tl écrit une brillante histoire du grotesque moderne, du Sturm und Drang jusqu’au surréalsme, & travers la littérature et la peinture. De Ia désorientation Valiénation. — II s'agit d'un vaste panorama, d’un réservoir d’analyses souvent trés 2 remarquables et devenues classiques. Dans toutes les teuvres étudiées, Kayser retrouve une méme structure grotesque. Mais ce qu'il appelle grotesque n'a plus rien de commun avec expansion dynamique, avec la proli- {eration joyeuse de univers rabelaisien. Ce qui était dilatation et jouissance devient frustration et réduc- tion. Pour Bakhtine, le grotesque signifie une prise de possession du réel. Pour Kayser, il surgit dans le senti- Inent ellrayant que toute la réalité se dérobe et nous ddevient étrangére: ‘Lipo mie dun cure on fondest da ex Ex'sppertnce tolde, sous devent etrangar soutaly 9 Iss avabr par des puisancsinsondabls, nerd toute fore et oute ohision, pour Sabolr enfin tvec Toutes st strctues> (Dat Groteske p38. W. Kayser décrit ici un processus de destruction progressive, la prise de conscience de Pabolition de ordre, de la cohérence et du sens. Cela commence par un sentiment d’étrangeté, d’exclusion hors de univers organisé, pour S'achever dans une expérience de vide et de néant. La figure du grotesque est désormais le glis- sement, la dérobade. Les assises du réel s'effritent ou sSeffondrent. C'est ce provessus que traduit pour Kay- ser Vexpression die sich verfremdende Welt: «Un ‘monde qui nous devient étranger.» Il ne s'agit mulle- ment d'une Verfremdung au sens, devenu courant depuis Brecht, dune distanciation. W. Kayser, dans une optique fort différente, décrit un processus dali nation. L’harmonie entre la conscience et la réalité est rompue, pour faire place 4 un monde d'incohérence. Crest a peu prés le processus que décrit Freud analy- sant, & propos de L’Homme au sable de Hoffmann, la progressive invasion de I'«inquiéiante étrangeté» (Das Unheimliche). Comme le psychologue, Kayser montre le passage dun monde familier (heimdich) & un monde étranger (unheimlich), étroitement lié & Vin- 13 conscient. Nous y reviendrons. Ce monde est pour Kayser celui du démonisme (les forces irrationnelles) cou du démoniague (les forces mauvaises). En cela, son grotesque est proche du fantastique, au sens que lui prétaient les premiers interprétes frangais du genre, ‘comme Roger Caillois “«Dans le fantastgue, le surnaturel apparait comme une rup- ture dela cohtrenoe universelle. Le prodipey devent une ages. Sion nterdite, menage, qui brs fa stabi d'un monde dont ies lots étaient Jungu'lors tenes pour rigoureures et immu: bles» (preface &Fantholope di fanatic) On retrouve ici, presque mot pour mot, la définition du grotesque selon Kayser. Le grotesque aurait-l perdu tout contact avec le rire, et ne serait-il que la manifestation du fantastique noir? Il est trop t6t pour répondre & cette question, mais il convient de signaler deja la forme négative du grotesque de Kayser. Un grotesque négatif: automatisation et désagréga- tion. — Kayser écrit dans sa conclusion : «Nous avons rencontsé sans cesse de nouvelles formes de pot, es conclu. sons sont un peu hitives. On reste fnalement perplexe devant es deux analyses, qui se veulent une et Tantre historique. En SSpparence celle de Rayser, qui suit, traversdes exemples pris, ‘ne longue évolution, Fest plus que cele de Bakhtine qu, putt {vd une histor, se vefere 4 une pretistoire, assez mal pecs, Aiigrotesque, A travers la mytholope et Par archaigue en gene tal, &t PAntiguité préco-romaine (arts plasiques et comiqucs). Par ailleurs, ses references at. grotesque moderne restent fort Allsives En faites deux études sont eerites Jans le méme esprit, avec le désir de découvrir essence Ju grotesque et de lui donnet tine place de choix dans les caégories artstiques. Leurs cone 3, malré leur apparence contraditoire, permetent de d nirune ligne denqute a partr de deux aspects esentes: Ti tensite et Fambiguité grotques. Qu'lsigufie proliération ow ‘ssolution, exuberance ou reduction, le roxsque n’en appara ‘pas moins comme une forme exceptionnalie de vision, diferente ivan es temps et es ux, mais toujours soutenue par ambi {El fondamentale que ls deux etiques mettent en fumizre, Le {rotesque pour eux est avant (out un mélange, mélange de deux Perceptions contradictoires, au-eld méme dela rencontre entre FE 'ragique et le comigue. Baki souligne le dynamisme de Famblvane, en mootant comment ie lnge xt source de set de cation, Kayeer insist sur la polanité du grotesque qui fonctionne toujours sur un mode relationnel si bien quil ne a jamais seulement dire: grotesque, mais grotesque-comigue Ou rotesgue-ragique ete. Ala fin de son live sigale deus com finaisons majeures du grotesque, fe grotenguesalingue elle teague fantastigue. Il agit, incontestblement, de deux dire tions escenilles, permettant déeaier le rapport du grotesque nu ri eta ln real (esatiique tle foneionnement de Fima- sini grotesque (le fantastique), ues orags sr ert Sco I a sue vent denvsager e gotesque dane su compen, et dear pas le ‘hens ue defn nig, edu ott ers IRtepctes ont prolong ct ennck ls rehches de Bakblie ct Ge Kayser Cot notamment le point vac. de. Christian {W.Thomuen, un des melee interprets stels do grotesque Tui 1 parr ‘dune perspective Gnchronigu et synchronique ‘Eft Froteque Gomme un principe de dstoraion et de ds: tanclation comme vn je, comme Febjecvation artstque de 1s ‘composantesprychologiues(instinc, res), comme une stro- ture ambivalznie sur fe mode de Tatrance et dela repulsion, comme une forme morale et satirique exploration da rel, tpl généralement comme un mode de création qu veut ta Autre, dans de nombreux domalnes dea ve. une menace par des acters incontrolés (C. W. Thompsen, Dat Groteske im Bnei schen Roman des 18, Jerr, Darmasiat, 1974, p. 1; ste Thomsen, 1). La dafiniion est un peu diperée, mas elle a Tavantage de tenis compte de la multipieié d'une notion qu, comme dit Elisheva Rosen, ae plus grand mals tasforhet fn calégorie, Cae tudes sont fe plus souvent consacrées au lomaine anglais, ans celles de Clayboromghy de Thomsen; au . aut ‘des formes. L'extension du grotesque immense Il est ense moitit du monde et de art qui n'exstait pes vraiment avant le chnistanisme, et dont le christanisme Frargué Favenement: «le laid & oote du beau, le dfforme pres du le grotesque au revers du sublime, le mal avec le ben, ‘omibre aves la lumen, I ext aussi le moderne contre ancien, Je romantique conte le classique, la laideurvraie contre la avsse beauté. Tout Tusvers«infrieur trove sa jostifation & cox lu monde ds cimes. Linteret du grotesque, ext qu'il signi un ‘nouveau mélange, une nouvelle alianoe ene cos alts conta. Gictoires gui disormais ne vexciuent plus et possédent une ele Ba ce sens Hugo soulgne bin, comme I fea Bake, Tambivalence dynamique du grote. Cela apparait meu ‘encore forsg'l vogue les formes of le protesie eincae’ e ‘Biome. Forse comigs,ebouton, xs tener ares, les traditions populares du Moyen Age, estat de Satan, ls «onmesndizuss de Calo, lx parodies de Phun Ilé que sont les Scaramouche, les Crjins es Arisqins S32. narlleet Méphistophes. Is-g done, comme le note Elsbeva Rowe, dun groleque venglobunty gu, dans sa dsperson, eed uae fou dem alte Nate dae pur est tn Bo? {Esque du mélange et dei anise, L'opposivon a groteayuc a ublime, dela htt horaine &Tame™ ot une de snp feations grandiowes fumiitres a Hugo, mais son mec est Favor le premier dfn le grotesque comme une clare multiple postive, comme un Age nouvea de Fart e de Thigcre de Thomme, En fat ie ratache drstemont au Tee. tre gro- tesque, cet Ge’ raliste autant que romanique (es deut so ‘ejowsant pou la). Meme si on pet repreter qui nat pas bore avec pus de rigueur es strvtures du protege faut Saluer cate interpretation magitras du grotesque Tent, que tendent 2 dédaiger es détensurs moderns du grote’ de Talinaion et de Pindourte Bavdelaire verte. — Tout autre est analyse de Baudelaire dans un texte sur la caricature publié en 1855 et repris dans les Curasites esthrigues. Du temots hugolien, di ‘nous fait passer au vertige. Son souci, analogue & celui de Jean- Paul est d'approfondir [a nature du Comique et d'en extaire la quintesence. A partir d'une analyse du rire éaudie dans sa ‘ature contraditoire il envisage, atk omes du comigus, le rite Gaus pre roast dcouwe“equique chose de profond, d'zxiomatique et de primitif qui se rapproche bea Coup plas de in vie ianovente et de la Joie abwolue que le Tre feausé par le comigue de mau's» (ef: Baudelaire, op. cit, U2, . 539). Le comique est une imitation, le grotesque est une ation (p. $35) Au comique «signifcatiy qui designe les formes limites de a caricature et de la satire, if oppose le gro- feaque qui se situe au-dala d'un sons précis of qu'il apple ‘

You might also like