Professional Documents
Culture Documents
bbf : 2008 61
Paris, t. 53, no 5
dans notre pays, on lui a traditionnel- Il existe, par conséquent, différen- Dans le cas du deuxième modèle,
lement conféré le rôle d’une bibliothè- tes structures d’organisation selon les le budget est partagé entre les deux
que scolaire. États et les systèmes fédéraux de pri- institutions (State Library Agency et
D’autres bibliothèques
62 bbf : 2008
Paris, t. 53, no 5
Modèles et normes pour les bibliothèques de prison :
Celle-ci doit faire partie de l’Education La County Library coordonne en la bibliothèque se charge en général
Department et, même si elle est consi- général l’ensemble du service et four- de surveiller, de représenter les inté-
dérée comme indépendante de l’école nit à la bibliothèque un service de rêts du centre et d’assurer la tranquil-
de la prison, elle constitue un solide référence pour les détenus ainsi que lité du bibliothécaire dans l’exercice de
appui pour les enseignants du centre. l’accès au catalogue de la bibliothèque son travail, les détenus de leur côté se
Le document Develop- chargeant des travaux de routine, de la
ments in Prison Service communication entre les bibliothécai-
Education and Training, res et les prisonniers, des opérations
publié en 1990, précise techniques et quotidiennes comme le
que la bibliothèque doit prêt ou le rangement des ouvrages.
contribuer à la forma-
tion et à l’éducation des “Le modèle espagnol En 1994 a eu lieu une restructu-
ration importante dans l’organisation
détenus en collaboration
étroite avec l’école. est semblable à des services pénitentiaires britanni-
ques (Angleterre et Pays de Galles)
Un autre ensem- avec, pour finalité, d’améliorer la coor-
ble de règles apparaît
comme la conséquence
celui des autres pays dination entre les autorités responsa-
bles de l’éducation en prison, même
de ce qui précède : celui,
élaboré en 1981 par la Li-
méditerranéens si c’est un membre du groupe des
services éducatifs qui continue à avoir
brary Association, Prison
Libraries : Guidelines for tels que la France la responsabilité des bibliothèques de
prison.
Library Provision in Pri-
son Department Etablish- et l’Italie, où les
ments, établit la collabora- Modèle espagnol
tion des deux institutions
pour l’organisation des
bibliothèques de Le modèle espagnol est semblable
services et leur adapta-
tion aux conditions spé-
prison dépendent à celui des autres pays méditerranéens
tels que la France et l’Italie, où les bi-
cifiques de la prison.
En conséquence, la des institutions bliothèques de prison dépendent, en
ce qui concerne la gestion et le fonc-
pénitentiaires”
bibliothèque publique lo- tionnement, des institutions péniten-
cale est celle qui est char- tiaires et où des accords de coopéra-
gée d’organiser le service tion de caractère général sont établis
bibliothécaire du centre avec des institutions et des organismes
pénitentiaire le plus pro- publics et privés.
che, sur la base de rela- La collaboration avec la bibliothè-
tions adaptées entre le Home Office publique, le prêt de ses collections, que publique la plus proche du centre
Prison Service et le County Library le catalogage des dons, la possibilité pénitentiaire n’est pas une règle géné-
Service. d’accès à tous les services de la biblio- rale et ne se réalise que dans certains
Le Home Office Prison Service ac- thèque publique, la participation à des cas, par volonté des personnels de
corde un budget prévisionnel annuel activités de diffusion et de formation direction de ces bibliothèques ou du
à la bibliothèque publique sur la base des personnes responsables de la bi- centre pénitentiaire lui-même.
d’une formule créée pour calculer le bliothèque. L’accord de coopération concernant
coût de fonctionnement du service Le personnel de la bibliothèque les bibliothèques, signé en décembre
(document, maintenance, traitement publique établit la politique de service 1983 entre les ministères de la Justice
des documents, services au public, de la bibliothèque, assume la respon- et de la Culture, implique un accrois-
formation). Ce budget augmente an- sabilité des opérations d’investisse- sement de la dotation des bibliothè-
nuellement en proportion du nombre ment et de coordination du service, ques de tous les centres pénitentiaires
de détenus du centre pénitentiaire. De s’occupe de la sélection et des acqui- espagnols ainsi qu’un engagement de
la même manière, il fournit le salaire sitions, de la formation des détenus et coopération en ce qui concerne la ges-
d’un bibliothécaire à temps partiel (de du développement et de la promotion tion de la part des bibliothèques qui
8 à 12 heures par semaine). Celui-ci des services. À l’intérieur de la pri- constituent le réseau de bibliothèques
doit être un bibliothécaire titulaire son, d’un point de vue organique, ce de l’État.
soumis aux conditions de service de personnel dépend de l’Education Of- En vertu de cet accord, il est établi
la bibliothèque publique mais dépen- ficer. De fait, le salaire du personnel que le ministère de la Culture devra
dant, à l’intérieur du centre pénitenti- provient du budget de l’éducation et collaborer avec les centres pénitentiai-
aire, du fonctionnaire de l’éducation, est comptabilisé en heures d’enseigne- res en s’engageant à remplir une mis-
selon le règlement établi par la direc- ment. Le personnel du centre péniten- sion de conseil auprès des personnels
tion du centre. tiaire impliqué dans l’organisation de en charge des bibliothèques, à recevoir
bbf : 2008 63
Paris, t. 53, no 5
des statistiques trimestrielles, et éga- bibliothèque la possibilité de se déta- vernement autonome et de chaque
lement à accroître périodiquement les cher organiquement de l’unité pédago- centre pénitentiaire.
fonds documentaires. Pour sa part, le gique et de dépendre directement de
D’autres bibliothèques
64 bbf : 2008
Paris, t. 53, no 5
Modèles et normes pour les bibliothèques de prison :
bbf : 2008 65
Paris, t. 53, no 5
Les collections tionnent la nécessité de se rapprocher Les services
des usagers afin qu’ils connaissent et
Ces trois ensembles de normes utilisent la bibliothèque. Pour cela, Les normes proposent toutes d’of-
D’autres bibliothèques
abordent trois questions fondamenta- on doit créer une série d’outils tels frir des services destinés à être des
les concernant les collections : critères que des bibliographies, des coupures supports aux activités réalisées dans
de sélection, types de documents et vo- de presse, des listes d’acquisition, des les centres pénitentiaires. Elles insis-
lume du fonds. En ce qui concerne les dépliants, ou de l’information dans tent fortement sur l’existence d’un
critères de sélection, toutes les normes d’autres langues. On organisera égale- service d’information et de référence,
considèrent comme nécessaire que la ment des activités telles que des confé- de services spéciaux pour minorités
sélection des fonds soit faite en accord rences, des expositions, des réunions, ethniques, culturelles et victimes de
avec le profil de la population détenue des ateliers ou des séminaires. ségrégation, ainsi que sur l’établisse-
(des nécessités spécifiques liées au ment de réseaux de coo-
monde extérieur, demandes et consul- pération.
tations), la politique d’action du cen- Elles précisent éga-
tre pénitentiaire et les activités qui s’y lement que l’on doit étu-
organisent. Toutes les normes parlent dier de manière régulière
du thème de la censure, celle-ci étant
appliquée seulement pour des raisons “Les normes les besoins des usagers
et établir un programme
de sécurité, selon la LA et l’Ifla, et en
fonction d’un usage excessif de la bi- insistent fortement d’évaluation afin de
connaître l’efficacité et
bliothèque, d’après l’ALA.
En ce qui concerne les documents, sur l’existence d’un l’efficience des services.
Les normes ALA accor-
toutes les règles sont d’accord pour in- dent une plus grande
tégrer tous les types quel que soit leur service d’information importance à cette ques-
support. L’Ifla identifie 22 types de do- tion, spécifiant que l’éva-
cuments distincts qui doivent se trou-
ver dans une bibliothèque de prison (y
et de référence, de luation sera annuelle et
que les résultats devront
compris les documents multimédias
et les logiciels).
services spéciaux être présentés devant la
direction du centre. Elles
En ce qui concerne le volume du
fonds, toutes les normes établissent un
pour minorités mentionnent la nécessité
de réaliser des études de
minimum en général et selon chaque
type de document. Les normes de l’Ifla ethniques, culturelles publics pour déterminer
la politique du service en
sont celles qui envisagent le plus grand
volume de fonds. Les préconisations et victimes de fonction de leurs intérêts.
Un autre aspect fon-
de la LA sont beaucoup plus précises damental à analyser, à
sur ce sujet, puisqu’elles spécifient des
pourcentages pour le renouvellement
ségrégation, ainsi que cause des difficultés qu’il
présente dans les centres
du fonds (15 % du fonds annuel et,
dans des petits centres, 25 % annuel-
sur l’établissement pénitentiaires, concerne
l’accès à la bibliothè-
lement) et un accroissement annuel
du fonds (25 % dans le cas où il s’agit
de réseaux de que et aux collections,
question qui préoccupe
d’une bibliothèque modulaire) ; elles
considèrent les donations et le prêt coopération” particulièrement la LA.
Ces normes établissent
interbibliothèque comme un complé- un nombre de jours et
ment de la collection. d’heures d’ouverture par
Pour l’accès au fonds, on recom- semaine pour que les dé-
mande l’emploi des catalogues et des tenus puissent accéder à
systèmes automatisés. Les normes de Les normes ALA partagent cette la bibliothèque, en fonction de certains
la LA considèrent comme minimum position en insistant sur l’importance critères : population, superficie de la
nécessaire une liste avec une informa- qui doit être accordée à la communi- bibliothèque, durée du séjour au cours
tion bibliographique suffisante et di- cation. Pour la LA, l’une des questions de chaque visite (20 minutes), nombre
verses entrées (auteur, titre, matière). les plus importantes, par rapport à la de visites permises par semaine, em-
Toutes les règles s’accordent pour que promotion, est liée à la signalisation : ploi de la salle d’études et de lecture de
soient offertes d’autres possibilités dimensions, style, couleur des pan- presse, heures de présence du biblio-
d’accès à la collection, par exemple les neaux, contenu des messages. Les thécaire professionnel.
chariots, la distribution de listes de détenus doivent obligatoirement dis- Enfin, l’Ifla introduit un nouvel ar-
documents ou la création de bibliothè- poser d’un guide proposant de l’infor- ticle consacré à la technologie comme
ques modulaires. Les règles Ifla men- mation générale sur la bibliothèque. mode d’accès à l’information, à la ges-
66 bbf : 2008
Paris, t. 53, no 5
Modèles et normes pour les bibliothèques de prison :
tion des services, à la réalisation d’acti- bliothèque publique la plus proche du remettre périodiquement des statisti-
vités de type culturel, éducatif et de loi- centre de détention. ques à cette dernière.
sir, dans les conditions décidées par le Prenons le cas de la communauté De leur côté, les centres péniten-
centre pour des raisons de sécurité, et autonome d’Estrémadure. La loi tiaires apporteraient le personnel,
avec la supervision des professionnels 6/1997 considère comme comprises l’infrastructure, une participation
lors de leur utilisation par les détenus. dans le champ d’application de la loi budgétaire et l’organisation du service
« les bibliothèques publiques, qui sont en accord avec des directives propres
créées et maintenues par des organismes aux bibliothèques de prison. Le décret
Vers un nouveau et des entités publics, avec pour finalité de spécifie de plus que ces bibliothèques
modèle d’organisation fournir un service public sans préjuger des intégrées dans les anciens centres
normes propres qui affectent les bibliothè- coordinateurs de bibliothèques s’in-
des bibliothèques ques conservant un statut étatique, même corporent d’emblée formellement au
de prison lorsque leur gestion a été prise en charge système actuel.
par la communauté autonome 9 ». La question est déjà d’actualité
L’analyse de la situation des servi- Cette loi envisage également, pour dans une bibliothèque de prison de la
ces de bibliothèques de prison en Es- des populations de lecteurs inférieures communauté autonome, et les autres
pagne 8 nous permet d’affirmer que le à 1 000 habitants, des services de base bibliothèques de prison de la région
modèle actuel d’organisation ne fonc- favorisant l’emprunt et la lecture. Le devraient tirer bénéfice de l’applica-
tionne pas correctement : personnel décret 134/1998, par lequel est établi tion de ce nouveau modèle d’organisa-
non spécialisé en charge de ces biblio-
thèques, absence de budget propre, do-
le processus d’intégration des centres
et services dans le système documen-
tion.•
tation irrégulière de fonds, formation taire d’Estrémadure, afin de garantir Juillet 2008
également intermittente, organisation la culture pour tous, établit, pour toute
des services en fonction du personnel bibliothèque de la région, les procédu-
non spécialisé qui se trouve en charge res à suivre et les conditions nécessai-
du service, absence de normes techni- res pour l’intégration au réseau à par-
ques effectives, collaboration au bon tir de la signature d’accords entre la
gré de la bibliothèque la plus proche Consejeria de cultura et l’institution qui
du centre pénitentiaire. en ferait la demande 10.
Les relations avec les institutions De cette façon, une fois formalisé
qui constituent le réseau de lecture l’accord entre les institutions péni-
publique devraient se concrétiser en tentiaires, les bibliothèques de prison
un engagement plus ferme de collabo- existant dans cette communauté auto-
ration. Cet engagement pourrait être nome deviendraient partie intégrante
effectif à travers l’application des dis- du réseau de lecture publique de la
positifs déjà en place dans les biblio- communauté et obtiendraient l’accès
thèques des différentes communautés à des services et des aides de la part
autonomes et à travers l’établissement de la Consejeria de Cultura. Selon le
d’accords entre institutions. Selon ces décret 134/1998, les institutions péni-
accords, les institutions pénitentiaires tentiaires devraient mettre en route la
s’engageraient à prendre en charge demande d’intégration selon la mar-
un responsable pour la bibliothèque, che indiquée, satisfaire aux exigences
la dotation d’infrastructures et de minimales de collections et de services
budgets, ainsi que l’organisation d’un avalisés par une certification technique
service de bibliothèque dans chaque de la bibliothèque ; elles devraient en
centre pénitentiaire. De son côté, la outre s’engager à élaborer des règles
communauté autonome, à travers de fonctionnement interne adaptées à
les organismes compétents, offrirait celles de la communauté, approuvées
conseil et formation du personnel, par la Consejeria de Cultura, en harmo-
actualisation des collections, partici- nie avec les directives spécifiques et
pation à des réseaux de bibliothèques
ainsi que la collaboration avec la bi-
bbf : 2008 67
Paris, t. 53, no 5