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Je pense qu’il y a plusieurs « pensées » dominantes dans les albums. L’une, ultra
majoritaire, vise plus ou moins explicitement (et plus ou moins inconsciemment) à la
simple reconduction de l’ordre des choses. La marchandise prime sur l’œuvre. Tant
formellement qu’en ce qui concerne les contenus manifestes, de tels albums sont
souvent vains, interchangeables et conservateurs quand ils ne sont pas tout
simplement réactionnaires. Ce qui ne veut pas dire qu’ils manquent tous de
séduction, d’humour et d’une certaine modernité : le marché sait feindre. Y compris
la résistance.
Une seconde catégorie me semble regrouper les albums injonctifs. Ils détiennent
une vérité et leur projet paraît uniquement d’en infuser la morale. La fiction est alors
un simple biais, un prétexte. Elle est faite pour servir et le pacte de lecture sollicité
relève de l’adhésion pleine et entière.
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Les interviews de Pratiques Sociales – Avril 2011 – Christian Burel
Les albums qui me semblent compter sont ceux qui troublent. Car comme l’écrit
Bernard Noël : « Le trouble est la condition du sens ».
Et parce le lectorat attendu est jeune, voire débutant, je voudrais aussi souligner
l’importance de la médiation. D’avoir eu, enfant, la chance de rencontrer des adultes
qui m’ont dit non pas que tel livre était mauvais mais pourquoi, eux, n’en
partageaient ni l’horizon, ni les moyens… d’avoir pu toucher du doigt très tôt qu’il y
avait dans ce champ des enjeux et du jeu au sens mécanique du terme, m’a donné
une liberté que je souhaite à tous, petits et grands.
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