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Actualités pharmaceutiques • n° 489 • Octobre 2009

fiche
pharmacothérapeutique pratique 53
Série inflammation-douleur

• Anti-inflammatoires stéroïdiens
• Anti-inflammatoires non stéroïdiens
Les anti-inflammatoires • Antihistaminiques H1

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens


non stéroïdiens
Anti-inflammatoires, antalgiques et La formation des eicosanoïdes (PG, TX et leucotriènes) se
antipyrétiques, les anti-inflammatoires produit au niveau des membranes cellulaires (figure 1). Sous
l’action de divers stimuli, les phospholipides membranaires
non stéroïdiens possèdent une
sont transformés en acide arachidonique par activation de
action thérapeutique très puissante, la phospholipase A2. Puis en fonction des types cellulaires,
parfois au prix d’effets indésirables la formation d’éicosanoïdes se déroule selon deux voies
graves. Ils sont largement prescrits biochimiques : la voie de la lipo-oxygénase qui aboutit à la
formation des leucotriènes ; et la voie des Cox qui aboutit
ou conseillés. Il importe donc de bien
à la formation des PG (PGI2, PGD2, PGE2, PGF2-D) et de
connaître leurs caractéristiques, TXA2. Il existe deux iso-enzymes de Cox :
notamment leurs formes galéniques et – Cox-1, constitutive et ubiquitaire, enzyme de régulation
modalités de prescription, indications (fonctions rénales, gastriques, homéostasie vasculaire) ;
– Cox-2, inductible dans les monocytes, macrophages,
et contre-indications, interactions
polynucléaires, cellules synoviales, chondrocytes.
et associations. La Cox-2 est une enzyme d’adaptation impliquée dans
la réaction inflammatoire.
Les effets indésirables (gastrotoxicité, atteinte rénale)

L
es anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) pourraient être le fait de l’inhibition de la Cox-1 gastrique
incluent de nombreux composés de structure et rénale, alors que les propriétés thérapeutiques seraient
variable. Ils ont en commun d’inhiber les cyclo- associées à l’inhibition de la Cox-2. C’est pourquoi des
oxygénases. Sont classiquement regroupés, les AINS molécules ciblant sélectivement la Cox-2 ont été mises
proprement dits et les salicylés, car ils possèdent géné- sur le marché (coxibs).
ralement tous les mêmes effets thérapeutiques et indé- L’ensemble des effets pharmacologiques des AINS sont
sirables. Les AINS les plus récents représentés par les donc la conséquence de l’inhibition de la synthèse des
coxibs présentent un mécanisme plus ciblé, mais leur prostaglandines et vont donc à l’inverse des actions de
bénéfice semble toutefois limité. ces substances (tableau 2, page suivante).

Mode d’action et propriétés Propriétés pharmacologiques des AINS


pharmacologiques • Activité antipyrétique
Malgré leur hétérogénéité chimique (tableau 1, page Les AINS réduisent la fièvre d’origine infectieuse, inflamma-
suivante), les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) toire ou néoplasique, en inhibant la synthèse de PGE2 (induite
présentent un mode d’action commun. En inhibant les par des cytokines, notamment l’interleukine-1), dans l’aire pré-
cyclo-oxygénases (Cox), les AINS entraînent une dimi- optique de l’hypothalamus (centre de la thermorégulation).
nution de la production tissulaire des prostaglandines
(PG) en particulier vasodilatatrices, pro-inflammatoires
• Figure 1 : Métabolisme de l’acide arachidonique
et pyrogènes et de thromboxanes (TX). et mode d’action des AINS.

corticoïdes

À noter
Le mécanisme d’action des salicylés, en particulier de l’acide
acétylsalicylique, repose sur l’inhibition irréversible
des Cox impliquées dans la synthèse des prostaglandines.
L’aspirine inhibe également l’agrégation plaquettaire
en bloquant la synthèse plaquettaire du thromboxane A2.
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Tableau 1 : Principaux AINS


Classe DCI Spécialités Présentation Posologie Demi-vie
Salicylés Acide Aspégic®, Kardégic®, Aspro®, Pdre pour sol. buv. en sachet 75, 100, 160, Adulte et enfant > 15 ans : 3 g/jour en 3 à 6 prises 15 à
acétylsalicylique Aspirine du Rhône®, Aspirine 250, 300, 500 et 1 000 mg, cp 500 mg, espacées d’au moins 4 heures 20 minutes
(aspirine) Upsa®, Aspirisucre®, Aspirine cp efferves. 500 mg, cp à croquer 400 mg, Sujet âgé : 2 g/jour
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens

pH8®, Aspirine tamponnée Upsa® cp gastrorésist. 500 ou 1 000 mg Enfant > 6 kg : 60 mg/kg/jour, à répartir en 4 ou 6 prises
Aspégic® injectable, Kardégic® Pdre et solv. pour sol. inj. à 500 mg/5 mL Adulte: 3 à 6 g/jour en 3 à 4 prises espacées
injectable et 1 000 mg/5 mL d’au moins 4 heures
Sujet âgé : 2 g/jour
Dérivés Alminoprofène Minalfène® Cp pell. 300 mg Adulte et enfant > 15 ans : 600 à 900 mg/jour 3 heures
arylcarbo- Ibuprofène Advil®, Nureflex®, Cp enr. ou pell. 100, 200 ou 400 mg, Nourrisson et enfant de 3 mois à 12 ans : 2 heures
xyliques Spédifen® + G caps. molle 200 mg, cp orodisp. 200 mg, 20 à 30 mg/kg/jour en 3 prises
(propioniques) sol. buv. 20 mg/mL Adulte et enfant > 40 kg : 200 à 400 mg
une à trois fois/jour
Pédéa® Sol. inj. 5 mg/mL Nourrisson : 1re injection de 10 mg/kg,
2e et 3e injections : 5 mg/kg
Advil®, Nureflex® +G Gel 5 % À partir de 15 ans : 1 application, 3 fois/jour
Kétoprofène Toprec® Cp 25 mg, sirop 1 mg/mL Enfant > 6 mois : 0,5 mg/kg/prise, 3 à 4 fois par jour 1,5
Adulte : 25 à 75 mg/jour à 2,2 heures
Profénid®, Kétum® + G Gélules 50 mg, cp pell. 100 mg, cp LP 100 à 200 mg/jour à répartir en 1 à 3 prises
100 mg, cp séc. 150 mg, Cp enr. ou
gélules LP 200 mg, suppos. 100 mg
Sol. inj. IM 100 mg/2 mL, pdre pour sol. inj. IV Enfant > 15 ans et adulte : 100 à 300 mg/jour
100 mg
Gel 2,5 % 2 applications/jour
Naproxène Apranax®, Alève®+ G Cp pell. 220 ou 275 mg, cp pell. séc. 550 mg, Enfant > 25 kg : 10 mg/kg par jour 13 heures
cp 750 mg, granul. pour susp. buv. en sachets Adulte : 550 à 1100 mg/jour en 1 à 2 prises
250 ou 500 mg, suppos. 500 mg
Flurbiprofène Antadys, Cébutid® Pastilles 8,75 mg, cp enr. 50 mg ou 100 mg, Adulte : 100 à 300 mg/jour 3,5 à 4 heures
cp pell. 100 mg, gélules LP 200 mg
Ocufen® Collyre en unidoses 0,03 % Une goutte dans le cul-de-sac conjonctival
toutes les 4 heures
®
Acide Surgam + G Cp séc. 100 ou 200 mg Enfant > 15 kg : 10 mg/kg par jour 1,5
tiaprofénique Adulte : 300 à 600 mg/jour en 2 à 3 prises à 2,5 heures
Diclofénac Voltarène®+ G Cp gastrorésist. 25 ou 50 mg, cp enr. LP 75 Enfant : 2 à 3 mg/kg/jour, à répartir en 2 ou 3 prises 1 à 2 heures
ou 100 mg, suppos. 25 ou 100 mg Adulte : 75 à 150 mg/jour
Voltarène® Sol. inj. IM à 75 mg/3 mL Adulte : 75 mg/jour
Collyre en unidoses 0,1 % Une goutte 3 à 5 fois/jour
VoltarèneEmulgel®, Flector®+ G Gel 1 ou 3 % Adulte : 2 à 4 applications/jour
Étodolac Lodine® Cp pell. 200 ou 300 mg Enfant > 15 ans et adulte : 400 à 600 mg/jour 7 heures
en 2 à 3 prises
®
Naphtyl- Nabumétone Nabucox Cp pell. 500 mg, cp disp. 1 g Adulte : 1 à 2 g/jour en 1 à 2 prises 20 à 24 heures
alkalones
Dérivés Indométacine Indocid® Gélules 25 ou 75 mg, suppos. 50 ou 100 mg Adulte : 50 à 200 mg/jour 2,6 à
indoliques Indocollyre® Collyre 0,1 % Une goutte 4 à 6 fois/jour 11,2 heures
Sulindac Arthrocine Cp 100 mg, cp séc. 200 mg Adulte : 200 à 400 mg/jour 8 heures
Dérivés Phénylbutazone Butazolidine® Cp enr. 100 mg Enfant > 15 ans et adulte : 200 mg 50 à
pyrazolés deux à trois fois/jour 100 heures
Oxicams Piroxicam Feldène®, Bréxin® + G Gélules 10 ou 20 mg, Cp disp. sec. 20 mg, 20 mg/jour 50 heures
suppos. 20 mg, sol. inj. IM 20 mg/mL
Geldène® Gel 0,5 % 2 à 4 applications par jour
Méloxicam Mobic®+ G Cp 7,5 mg, cp séc. 15 mg, suppos. 7,5 7,5 à 15 mg/jour 20 heures
ou 15 mg, sol. inj. 15 mg/1,5 mL
Ténoxicam Tilcotil® Cp pell. séc. ou suppos. 20 mg Enfant > 15 ans et adulte : 20 mg/jour 70 heures
Nimésulide Nexen® Cp ou granul. pour sol. buv. en sach. 100 mg Adulte : 100 mg matin et soir 3,2 à 6 heures
Fénamates Acide niflumique Nifluril® Gélules 250 mg, suppos. séc. 400 mg, Enfant de 6 à 30 mois : 200 mg deux fois/jour 4 à 6 heures
suppos. 700 mg Enfant de 30 mois à 12 ans : 400 mg/10 kg/jour
Enfant > 12 ans : 500 à 750 mg/jour
Adulte : 750 à 1500 mg/jour
Niflugel® Gel 2,5 % Enfant > 15 ans et adulte : 1 application 3 fois par jour
Acide méfénamique Ponstyl® Gélules 250 mg Enfant > 12 ans et adulte : 250 à 500 mg 3 fois/jour 2 à 4 heures
Coxibs Célécoxib Célébrex® Gélules 100 ou 200 mg Adulte : 200 à 400 mg/jour en 1 à 2 prises 8 à 12 heures
Parécoxib Dynastat® Pdre pour sol. inj. 40 mg 20 à 80 mg/jour en IV 22 minutes
G : génériques

Tableau 2 : Effets des prostaglandines et de l’inhibition de leur formation


Cibles Effet des prostaglandines Effet des AINS
Inflammation Douleur, rougeur, chaleur Anti-inflammatoire
Système nerveux central Élève le seuil auquel les régulations hypothermisantes se déclenchent Antipyrétique
Douleur Favorisent la douleur Antalgique
Plaquettes (Cox-1) Via prostacycline Æ anti-agrégant, via thromboxane Æ pro-agrégant Anti-agrégant
Estomac Inhibition sécrétion acide + élévation de la sécrétion de mucus Ulcérigène
Réparation tissulaire Cicatrisation (d’un ulcère, d’une colite, entre autres) Favorise la survenue de perforations et de saignements digestifs
Rein Si déplétion hydro-électrolytique, vasodilatation préglomérulaire Augmente la créatininémie, insuffisance rénale aiguë
Bronches Bronchodilatation Bronchoconstriction
Utérus Contraction Retarde/diminue les contractions douloureuses des règles ou de l’accouchement
Canal artériel (CA) CA reste ouvert Fermeture in utero du CA
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pharmacothérapeutique pratique 55
Cl

HO O
O OH
O
O
O N N N
H
O CH3 CH3 N
S
O
O OH
O O

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens


O

• Figure 2 : • Figure 3 : • Figure 4 : • Figure 5 : • Figure 6 : • Figure 7 :


Aspirine. Ibuprofène. Indométacine. Piroxicam. Diclofénac. Célécoxib.

• Activité antalgique • Demi-vie plasmatique intermédiaire (10 à 18 heures) :


Les AINS présentent des propriétés antalgiques par leur naproxène, sulindac. Deux prises par jour sont généra-
action périphérique au niveau du site inflammatoire. Cette lement nécessaires ;
activité antalgique est importante quand les douleurs sont • Demi-vie plasmatique longue (> 24 heures) : phényl-
dues à un excès de nociception où les PG jouent un rôle butazone, oxicams. Généralement ils sont administrés en
pathogène : douleurs de l’appareil locomoteur, céphalées, une seule prise quotidienne. (Figures 2 à 7.)
douleurs postopératoires, douleurs dentaires, dysménor-
rhées, colique hépatique, colique néphrétique... La dose Indications
antalgique est plus faible que celle anti-inflammatoire. Les AINS sont indiqués dans de très nombreuses patho-
• Activité anti-inflammatoire logies, en particulier dans les spécialités suivantes :
Les AINS inhibent la composante vasculaire de la réac- • En rhumatologie, en cas de rhumatismes inflamma-
tion inflammatoire aiguë, responsable de la classique toires chroniques, d’arthroses douloureuses et invalidan-
tétrade : œdème, douleur, rougeur et chaleur. Leur action tes, d’affections abarticulaires (tendinites, lombalgies,
est rapide, mais simplement suspensive. En effet, l’action périarthrite), d’arthrites microcristallines (goutte).
anti-inflammatoire disparaît rapidement après l’arrêt de • En neurologie, contre les céphalées.
l’AINS. Il faut noter que les AINS ne modifient pas l’évo- • En ORL et stomatologie, en cas de douleurs dentaires.
lution des rhumatismes inflammatoires chroniques. • En traumatologie, pour calmer les douleurs.
• En gynécologie, en cas dysménorrhées.
À retenir • En urologie, en cas de colique néphrétique.
L’action anti-inflammatoire de l’aspirine n’apparaît • En cancérologie, contre les douleurs et les hyper-
qu’au-delà de 1 g/jour. calcémies.
• En cardiovasculaire pour prévenir les accidents isché-
• Action anti-agrégante plaquettaire miques (action antiplaquettaire).
Tous les AINS anti-Cox-1 interfèrent avec les fonc-
tions plaquettaires. Cependant, les anti-Cox-2 sélectifs Contre-indications
présenteraient moins d’interférences. L’effet anti-agré- Constituent des contre-indications absolues : une allergie
gant de l’aspirine ne nécessite que de faibles doses (75 à à la même classe chimique, une insuffisance hépatique
250 mg/jour) et persiste une semaine après l’arrêt du ou rénale sévère, un ulcère gastroduodénal évolutif, une
traitement, du fait de l’inhibition irréversible de la cyclo- maladie hémorragique.
oxygénase plaquettaire. Sont des contre-indications relatives, des antécédents
ulcéreux, un reflux gastro-œsophagien sévère ; une
Pharmacocinétique néphropathie, une insuffisance rénale ; l’âge > 70 ans
L’acide acétylsalicylique est absorbé rapidement au niveau (en traitement chronique) ; l’hépatopathie.
de l’estomac et plus lentement au niveau de l’intestin. L’as-
pirine est métabolisée en acide salicylique qui est la princi- Grossesse et allaitement
pale forme biologiquement active. Les AINS sont des acides Dans une lettre aux professionnels de santé de février
faibles lipophiles et sont bien absorbés par le tube digestif. 2009, l’Agence française de sécurité sanitaire des pro-
La liaison aux protéines plasmatiques comme l’albumine duits de santé (Afssaps) rappelle que les AINS sont
est importante. Les AINS diffusent bien dans le tissu et le contre-indiqués chez la femme enceinte à partir du
liquide synovial. Ils passent les barrières fœtoplacentaire et début du 6e mois de grossesse (c’est-à-dire à partir de
hémato-encéphalique, et dans le lait maternel. 24 semaines d’aménorrhée), y compris par voie cuta-
D’origine chimique très variable, on peut classer les AINS née. En effet, ils sont responsables d’une toxicité fœtale
en fonction de leur demi-vie plasmatique : et néonatale grave, voire fatale (mort fœtale in utero ou
• Demi-vie courte (2 à 6 heures) : la plupart des dérivés néonatale, atteintes rénales et/ou cardio-pulmonaires
propioniques (ibuprofène, kétoprofène, flurbiprofène), néonatales). De plus, la prescription d’AINS ne doit être
diclofénac, étodolac, acide niflumique, indométacine. envisagée que si nécessaire pendant les cinq premiers
Ils nécessitent en principe trois prises quotidiennes ; mois de la grossesse.
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56 pharmacothérapeutique pratique

À noter
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens

Le célécoxib est contre-indiqué au cours de la gros-


Le rofécoxib (Vioxx®) a été retiré du marché en septembre 2004
sesse et chez les femmes en âge de procréer. En cas de
pour une augmentation du risque d’accidents cardiovasculaires
découverte d’une grossesse au cours du traitement, le
chez les malades à risque prenant ce traitement.
célécoxib devra être arrêté.
L’acide acétylsalicylique et les AINS passant dans le lait
maternel, ils sont déconseillés pendant l’allaitement. Troubles hydro-électrolytiques
Rétention hydrosodée avec risque de majoration d’une
Effets indésirables HTA et/ou d’insuffisance cardiaque ; hyperkaliémie ;
Ils affecteraient 10 à 25 % des patients traités. Les plus hyponatrémies.
fréquents sont digestifs. Les complications graves sont
rares si l’on respecte les contre-indications et les moda- Réactions cutanées
lités d’administration usuelles. Parfois mortelles : syndromes de Lyell, de Stevens-John-
son, érythème polymorphe, purpura et vascularite. Le ris-
Effets digestifs que de toxidermie grave semble plus important avec la
Ils sont fréquents, généralement dose-dépendants, phénylbutazone et les oxicams.
communs à tous les AINS anti-Cox-1 et à toutes les for- Plus bénignes et régressives : des éruptions diverses plus
mes galéniques et voie d’administration (orale, rectale, ou moins prurigineuses, urticaire, rash...
parentérale). Ils sont liés à l’inhibition de la synthèse des
PG dont certaines ont un rôle protecteur sur la muqueuse Effets hématologiques
digestive (PGI2). Par un mécanisme immuno-allergique, une lignée cellulaire
Les effets digestifs mineurs comprennent épigastral- peut être atteinte (thrombopénie, leucopénie...). Une apla-
gies, nausées, douleurs abdominales, troubles du tran- sie médullaire peut survenir lors de traitement chronique.
sit (10 à 40 % des cas traités avec 5 à 10 % d’arrêts de Le risque est plus important avec les pyrazolés.
traitement).
Les ulcères et les perforations sont classiques. Helico- Troubles hépatiques
bacter pylori ne constitue pas un facteur de risque vis-à- Hépatites de tout type. Une simple élévation des transa-
vis des lésions gastriques. Les AINS peuvent également minases peut être constatée.
déclencher une rectocolite hémorragique.
Syndrome de Reye
Effets rénaux Il s’agit d’une encéphalopathie de l’enfant associée à une
Chez des patients à risque, une insuffisance rénale aiguë dégénérescence hépatique survenant lors d’infections
(Ira) fonctionnelle peut apparaître. L’Ira survient géné- virales (varicelle, grippe). L’aspirine pourrait précipiter
ralement sur un terrain prédisposé : sujets âgés, dés- voire déclencher ce syndrome, d’où la règle, certaine-
hydratés, suivant un régime sans sel, sous traitement ment excessive, de l’éviter chez l’enfant, en cas de fièvre
diurétique ou par inhibiteur de l’enzyme de conversion (préférer le paracétamol).
(IEC), présentant des lésions vasculaires rénales, cirrho-
tiques... La durée de traitement et la dose n’interviennent Syndrome de Widal
que peu dans ce cas. Il associe une rhinite avec polypose nasale, un asthme et
Survenant dans la première semaine du traitement, l’Ira une intolérance aux AINS et à l’aspirine. Il ne s’agit pas
est habituellement réversible après arrêt de l’AINS, mais d’un syndrome d’allergie, mais d’une réaction survenant
parfois de manière incomplète. sur un terrain particulier caractérisé par une perturbation
du métabolisme de l’acide arachidonique. Sa survenue
contre-indique ultérieurement tout traitement par un AINS
y compris l’aspirine.
Prévention de la gastropathie des AINS
• En l’absence d’antécédent ulcéreux, mais en présence de facteurs Effets toxiques
de risque (âge > 65 ans), la coprescription de misoprostol, analogue Troubles neurosensoriels et psychiques (céphalées, ver-
de la PGE1 (200 à 400 mg matin et soir) ou d’oméprazole (20 mg/jour), tiges, confusion) surtout avec l’indométacine ; surdité,
traite et prévient les effets gastriques des AINS ; vertiges, acouphènes, classiques chez les grands et
• En cas d’antécédent d’ulcère, les AINS ne doivent être utilisés longs consommateurs d’AINS (salicylisme) ; neuropathies
qu’avec précaution et en l’absence d’alternative thérapeutique. périphériques.
La protection gastroduodénale doit faire appel aux inhibiteurs
de la pompe à protons (oméprazole, 20 mg/jour).
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pharmacothérapeutique pratique 57

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens


Allergies tains médicaments très utilisés comme l’aspirine et les
Les manifestations allergiques aux AINS peuvent être AINS à doses antalgiques.
multiples : éruptions cutanées (vascularite), hépatite,
Tableau 4 : Interactions pharmacodynamiques
fièvre, rhinite, conjonctivite...
Médicament AINS Effet
Exceptionnellement un bronchospasme, un œdème de Bêtabloqueurs, Tous Réduction de l’effet anti-HTA,
Quincke, un choc anaphylactique, ou une pneumopathie IEC, diurétiques de la natriurèse et de la diurèse
IEC, diurétiques Tous Insuffisance rénale
immuno-allergique peuvent apparaître. La survenue
Anticoagulants Tous Risque de saignement digestif
d’une réaction allergique à un AINS contre-indique l’uti- Sulfamides Salicylés, phénylbutazone Augmentation des effets
lisation d’un AINS de la même classe chimique. hypoglycémiants hypoglycémiants
Ciclosporine Tous Potentialisation de la néphrotoxicité
Important
Les AINS peuvent diminuer l’efficacité des dispositifs de contra-
Associations
ceptions intra-utérins entraînant un risque de grossesse malgré la
L’aspirine est associée à d’autres molécules comme la
présence d’un stérilet. Il faut donc prévenir les patientes porteuses
caféine afin de traiter les douleurs d’intensité légère à
d’un DIU de ce risque.
modérée et/ou des états fébriles (tableau 5).

Tableau 5 : Associations incluant l’aspirine


Interactions médicamenteuses Spécialités Aspirine Caféine Paracétamol Codéine Métoclopramide Vitamine C
• Interactions d’ordre pharmacocinétique Métaspirine® 475 mg 25 mg
Elles sont fréquentes et souvent aux conséquences gra- Actron® 267 mg 40 mg 133 mg
ves. Les AINS étant fortement fixés aux protéines plas- Novacétol® 300 mg 250 mg 10 mg
Migpriv® 900 mg 10 mg
matiques, ils peuvent déplacer les autres médicaments Sédaspir®,
500 mg 50 mg 20 mg
fixés sur les mêmes protéines, ce qui peut augmenter Asproaccel®
leur toxicité (tableau 3). Céphyl® 300 mg 36,6 mg
Aspirine vitamine C
Les corticoïdes augmentent la clairance des salicylés. 300 mg 200 mg
Upsa®
®
Aspro vitamine C 500 mg 300 mg
Tableau 3 : Interactions pharmacocinétiques Afébryl® 300 mg 200 mg 300 mg
AINS Médicaments d’action Conséquence Antigrippine® 500 mg 9,15 mg 100 mg
modifiée
Pyrazolés Anticoagulants oraux, Inhibition du métabolisme L’ibuprofène (200 mg) est classiquement associé à la
sulphonylurées, phénytoïne, du 2e médicament
acide valproïque, warfarine pseudoéphédrine (30 mg) dans le traitement sympto-
Nombreux Digoxine, lithium, Diminution de l’excrétion rénale matique des rhumes (Rhinadvil®, Rhinureflex®).
AINS aminoglycosides, du 2e médicament (risque de toxicité)
méthotrexate
Le diclofénac (50 ou 75 mg) est associé au misoprostol
Aspirine Warfarine, acétazolamide, Potentialisation de l’anticoagulant (0,2 mg), analogue de PG dans Artotec®.
(forte acide valproïque Diminution de la sécrétion tubulaire rénale
dose) Inhibition de l’oxydation
Salicylés Phénytoïne, acide Compétition sur les sites de fixation Modalités de prescription
valproïque, acétazolamide protéique plasmatique Plusieurs voies d’administration peuvent être utilisées :
– la voie orale est la plus utilisée. L’AINS doit être admi-
À savoir nistré au cours des repas ;
Il peut être dangereux d’associer un traitement AINS par voie géné- – la voie rectale, plutôt réservée à l’administration du soir ;
rale à de l’aspirine à des doses supérieures à 500 mg/j et aux AINS – la voie intramusculaire est réservée au traitement d’at-
à doses antalgiques. taque d’une douleur aiguë et est à proscrire pour les
traitements chroniques ;
– la voie intraveineuse, en particulier pour le kétoprofène
Interactions d’ordre administré en perfusion chez des patients hospitalisés et
pharmacodynamique présentant des douleurs particulièrement intenses ;
L’interaction avec les antihypertenseurs est capitale ; elle – la voie cutanée avec des formes gel. Dans ce cas, il
s’explique par la modification de la physiologie des PG convient de faire pénétrer le gel par un massage doux
(tableau 4). et prolongé sur la région douloureuse ou inflammatoire.
La prise d’AINS chez les patients traités par antivitamine Il est indispensable de se laver soigneusement et de
K ou par héparine à dose anticoagulante est fortement façon prolongée les mains après utilisation. Il est recom-
déconseillée. Il faut mettre en garde les patients vis-à-vis mandé de protéger les zones traitées par le port d’un
des interactions potentiellement dangereuses avec cer- vêtement durant toute l’application du produit et les deux
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58 pharmacothérapeutique pratique

Retenir l’essentiel pour la pratique


À retenir
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) constituent


Chez l’adulte, la posologie anti-inflammatoire de l’aspirine se situe
un groupe chimique hétérogène avec des propriétés anti-
entre 3 et 5 g/jour, et la posologie maximale est de 6 g/jour. Elle est
inflammatoires, antalgiques, antipyrétiques, anti-agrégantes
administrée en 3 à 4 prises quotidiennes, pendant les repas.
plaquettaire.
En dépit d’un mode d’action commun, certains AINS présentent
moins d’effets indésirables (en particulier digestifs et rénaux), Lors des rémissions, l’attitude la plus rationnelle est l’ar-
que d’autres. Cela pourrait s’expliquer par des affinités rêt du traitement avec reprise en cas de rechute.
différentes pour les deux principales isoformes de cyclo- • Dans les pathologies arthrosiques, les AINS peu-
oxygénases : les Cox-1 et Cox-2. vent être prescrits en cas de poussée douloureuse aiguë,
Les AINS conventionnels ou les coxibs sont contre-indiqués : après échec des antalgiques et des autres thérapeuti-
– en cas d’ulcère évolutif ou de saignement gastro-intestinal ; ques. Il n’est pas conseillé de poursuivre un traitement
– en cas d’antécédents de saignement digestif ou par AINS au long cours dans les pathologies dégénéra-
de perforation survenu au cours d’un traitement par AINS ; tives en dehors des poussées douloureuses.
– en cas d’insuffisance cardiaque sévère ; • La meilleure prévention des complications gastro-
– dès le début du 6e mois de grossesse. duodénales sévères (ulcère gastroduodénal, hémorragie
• Interactions médicamenteuses digestive, perforation) est d’éviter l’administration chez les
L’association des AINS entre eux est contre-indiquée, car elle sujets à risque (sujets âgés de plus de 65 ans, ou avec
majore la toxicité notamment digestive. des antécédents d’ulcère gastroduodénal, ou traités
Les AINS augmentent le risque d’accident hémorragique par antiagrégant plaquettaire, anticoagulant ou encore
sous traitement anticoagulant, notamment sous AVK. corticoïde).
Ne pas associer un AINS, y compris un coxib, à • Lorsque la prescription chez un sujet à risque d’un
une corticothérapie, sauf dans certaines maladies de système AINS est nécessaire, un traitement préventif par ana-
en phase évolutive (lupus érythémateux disséminé, angéites logue de PG (misoprostol) ou inhibiteur de la pompe à
nécrosantes, certaines polyarthrites rhumatoïdes...) ; protons (oméprazole, ésoméprazole, lansoprazole ou
dans ce cas, le risque d’hémorragie et d’ulcération digestive pantoprazole) peut être utilisé. Cette prévention doit être
devra être pris en compte. arrêtée en même temps que le traitement par AINS).
Prendre en compte le risque hémorragique digestif en cas • Chez les sujets de plus de 70 ans, qui présentent
d’association avec un antiagrégant plaquettaire (y compris des risques digestifs et des risques élevés d’insuffisance
l’aspirine à dose anti-agrégante), un antidépresseur inhibiteur rénale aiguë ainsi que d’interactions médicamenteuses, il
sélectif de la recapture de la sérotonine. convient de respecter les recommandations suivantes :
• Mode d’administration – baisser les doses en fonction du poids (les deux tiers
Les AINS doivent toujours être utilisés à la dose minimale de la dose classique sont souvent suffisants) ;
efficace, pendant la durée la plus courte possible. – privilégier les molécules à demi-vie courte ;
Les formes orales sont à avaler avec un grand verre d’eau, – éviter les indoliques, qui augmentent le risque de
au cours des repas. chutes ;
– s’assurer que la clairance de la créatine est supérieure
à 30 mL/min avant de débuter le traitement ;
– associer un protecteur gastroduodénal (misoprostol,
semaines qui suivent l’arrêt du traitement afin d’éviter oméprazole, ésoméprazole, lansoprazole ou panto-
tout risque de photosensibilisation. Pendant le traitement prazole). Cependant, s’ils peuvent réduire les risques de
et les deux semaines suivant l’arrêt, l’exposition au soleil complications, les protecteurs ne mettent pas totalement
ou aux UVA est contre-indiquée. les patients à l’abri d’effets gastroduodénaux graves, et
• Dans les rhumatismes inflammatoires chroniques, la surveillance doit être maintenue ;
la posologie minimale efficace d’AINS doit être recher- – surveiller la pression artérielle si le sujet est hypertendu,
chée en fonction de l’état clinique (posologie la plus fai- ainsi que la prise de poids et la survenue d’œdèmes des
ble susceptible de contrôler la douleur et/ou la raideur). membres inférieurs. „

Important
Sébastien Faure
Les comprimés et les gélules d’AINS sont à avaler avec un grand Maître de conférences des Universités,
verre d’eau au cours des repas pour limiter les effets digestifs. Faculté de pharmacie, Angers (49)
sebastien.faure@univ-angers.fr

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