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CE 6 novembre 2002, SOULIER

Le CE dans cet arrêt rendu le 6 novembre 2002 a statué sur la question de savoir si le retrait
d’un bénéfice accordé illégalement peut être lui-même déclaré illégal.

FAITS :

Le maire de la commune de Castries a attribué par arrêté du 25 août 1992 une bonification
indiciaire de 30 points à Mme Soulier alors que celle-ci, placée en congé de longue durée n’y
avait pas droit.
Le 7 juin 1993, le maire de la commune a alors retiré l’acte émis 10 mois auparavant.

PROCEDURE :

Mme Soulier a alors saisi le TA de Montpellier lequel a refusé d’annuler la décision de retrait
du maire dans un jugement du 19 décembre 1996.
Cette dernière a alors saisi la CAA de Marseille qui après avoir annulé le jugement rendu par
le TA de Montpellier pour vice de forme a refusé d’annuler la décision de retrait du maire
dans un arrêt du 2 mai 2000 au motif que la décision du maire pouvait être retirée à tout
moment, faute pour le maire de disposer d’un pouvoir d’appréciation pour attribuer ou refuser
cet avantage à caractère exclusivement pécuniaire.

Mme Soulier a alors décidé de former un pourvoi en cassation devant le CE contre cet arrêt
rendu par la CAA de Marseille en tant qu’elle a rejeté sa demande au fond.

PORBLEME DE DROIT :

Le retrait du bénéfice, illégalement accordé, de la nouvelle bonification tarifaire à un agent,


peut-il être lui-même déclaré illégal ?

SOLUTION :

Le CE annule la mesure de retrait au motif qu’elle a été prise au-delà du délai dont dispose
l’administration pour retirer ses décisions et en tant qu’il a un caractère rétroactif et annule les
articles 3 et 4 de l’arrêt du 2 mai 2000 de la CAA de Marseille.

Le CE rappelle que l’administration ne peut retirer une décision individuelle explicite


créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de 4 mois suivant la prise de cette
décision.

Le juge précise qu’une décision administrative accordant un avantage financier crée des droits
au profit de son bénéficiaire alors même que l’administration avait l’obligation de refuser cet
avantage alors qu’en revanche les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la
créance née d’une décision prise antérieurement n’a pas cet effet.

En l’espèce le juge considère que l’arrêté pris par le maire d’accorder la nouvelle bonification
indiciaire prévue par l’article 27-1 de la loi du 18 janvier 1991à Mme Soulier n’est pas une
simple mesure de liquidation d’une créance résultant d’une décision antérieure et constitue
une décision créatrice de droits.
En application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative le CE juge au fond et
considère que le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire ne constitue pas un avantage
statutaire et n’est lié ni au cadre d’emplois, ni au grade mais dépend seulement de l’exercice
effectif des fonctions qui y ouvrent droit et que donc le congé de longue durée n’implique
l’exercice effectif d’aucune fonction. Mme Soulier n’avait pas le droit au bénéfice de la
nouvelle bonification indiciaire mais eu égard à son caractère d’acte créateur de droits, la
décision du 25 août 1992 ne pouvait pas être légalement retirée après l’expiration du délai de
4 mois suivant son édiction.

En revanche l’administration aurait pu supprimer cet avantage pour l’avenir.


Le CE décide donc d’annuler l’arrêté du 6 juin 1993 qu’en tant qu’il a supprimé à Mme
Soulier le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire rétroactivement.

PORTEE :

D’une part le juge rappelle les conditions de mise en œuvre des procédés de suppression des
actes administratifs unilatéraux dans le délai de 4 mois énoncé dans l’arrêt du 26 octobre
2001, TERNON, et d’autre part le juge distingue entre actes créateurs de droits et actes non
créateurs de droit pour y mettre en œuvre, en fonction, les procédés de suppression.

Ainsi si l’acte est créateur de droit, l’administration ne pourra retirer une décision illégale que
dans un délai de 4 mois suivant son édiction. Ainsi l’acte disparaitra pour l’avenir mais aussi
rétroactivement pour les effets passés.
En revanche si le délai de 4 mois est dépassé mais que la décision créatrice de droit est
illégale comme en l’espèce, l’autorité compétente pourra supprimer l’acte pour l’avenir
seulement.

Pour les actes non créateurs de droit le retrait est possible à tout moment.

Il ressort de cet arrêt que les décisions pécuniaires sont des actes créateurs de droit.
Il faut distinguer entre les décisions qui ne font que liquider une créance déjà existante, la
simple liquidation d’une créance ne crée pas de droit donc le retrait est possible sans
conditions. Mais en l’espèce c’est l’octroi d’un avantage financier nouveau, c’est une décision
créatrice de droits soumise à conditions et notamment du délai de 4 mois de la jurisprudence
TERNON.

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