You are on page 1of 16

Séance 1 – Présentation du Droit administratif

La dualité de juridiction :

Cass 1ère civ. 23 janvier 1987, CONSEIL DE LA


CONCURRENCE :
 La séparation des ordres prévue par la loi des 16 et 24 août n’est
pas un PFRLR et donc n’a pas de valeur constitutionnelle. En revanche
la réserve de compétence au profit du JA s’agissant des REP et des
RPC est un PFRLR.

« Relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction


administrative l’annulation ou la modification des décisions prises par
les autorités administratives » (autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs
agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics
placés sous leur autorité ou leur contrôle).
Le CE est compétent pour connaître des actes qui sont imputables aux
personnes morales de droit public français.

Normalement les actes des agents publics sont de la compétence des juges
administratifs. Mais lorsque la faute est privée, le juge judiciaire devient
compétent. Egalement le juge administratif est compétent pour connaître des
actes adoptés par des personnes privées. Le juge administratif est compétent
pour juger des affaires qui concernent une fonction administrative ; tout ce qui
est fonction législative, parlementaire ou gouvernementale échappe à sa
compétence. Les actes de gouvernement lui échappent également.

La formation du droit administratif :

TC 8 février 1873, BLANCO :


Une enfant avait été blessée par un wagonnet d’une manufacture de
tabacs exploitée par l’Etat ; les parents ont donc saisi les tribunaux judiciaires
d’une action en dommages et intérêts contre l’Etat comme civilement
responsable. A l’époque, pour déterminer la compétence du juge administratif
et du juge judiciaire, on se basait sur le critère d’acte d’administration. On
distinguait ainsi deux types d’actes : les actes d’autorités = ce que prenait
l’Etat en vertu de ses prérogatives de puissance publique c-a-d ceux qui
mettent en œuvre des pouvoirs que n’a pas un simple particulier (ex :
l’expropriation). Ces actes relevaient de la compétence du juge administratif.
Au contraire, les actes de gestion, c-a-d ce qu’un simple particulier pouvait
produire, relevaient de la compétence du juge judiciaire. De ce fait, beaucoup
d’actes échappaient à la juridiction administrative.
Question de l’arrêt : de quel juge relève la réparation d’un préjudice né
du fonctionnement d’un service public ?
L’arrêt BLANCO considère que c’est un régime de responsabilité qui
ne relève pas du code civil. Ainsi, la responsabilité de l’Etat doit être
régit par un droit spécial. Ce droit sera le droit administratif. De cet arrêt
est donc né le droit administratif.
Cet arrêt va également faire du service public la « pierre angulaire » du
DA. C’est un arrêt très fondateur car il engage pour la première fois la
responsabilité de l’Etat.

CE 13 décembre 1889, CADOT :


 Porte le coup de grâce à la théorie du ministre-juge et en faisant du
CE le juge de droit commun du contentieux administratif.

La ville de Marseille ayant supprimé l’emploi d’ingénieur à M. CADOT, celui-ci


demande réparation en dommages et intérêts. La municipalité ayant refusé de
faire droit à cette réclamation, il en saisit les tribunaux judiciaires qui se
déclarent incompétents. M. CADOT se tourna alors vers le ministre de
l’intérieur qui se déclare incompétent lui aussi (à l’époque il existait la théorie
du ministre-juge : l’administration était compétente pour juger des litiges donc
elle était juge et partie en même temps !). C’est ce refus que le sieur CADOT
déféra au CE.
Le CE décida que le ministre avait eu raison de s’abstenir de statuer sur des
questions « qui n’étaient pas de sa compétence », et qu’il appartenait au CE de
connaître du litige né entre la ville de Marseille et le sieur CADOT.
Cet arrêt a marqué en réalité une étape capitale dans l’évolution du
contentieux administratif, en portant le coup de grâce à la théorie du
ministre-juge et en faisant du CE le juge de droit commun du
contentieux administratif.
Les lois des 16 et 24 août 1790 et 16 fructidor an III avaient eu pour but
d’interdire aux juges de se mêler des affaires de l’Etat. Mais peu à peu s’était
développée une véritable juridiction administrative. Doté seulement, au début,
d’un pouvoir consultatif, le CE n’avait pas tardé à devenir un organe
juridictionnel. Pendant longtemps, il ne possédait que des pouvoirs de justice
« retenue » et la décision appartenait encore en principe au chef de l’Etat ; ce
dernier ayant pris l’habitude de suivre les avis du CE, celui-ci reçut le pouvoir
de justice « déléguée » lui permettant de prendre des décisions en son propre
nom.

Aujourd’hui c’est une séparation qui a été consacrée par le Conseil


Constitutionnel dans une décision du 22 juillet 1980 qui porte validation d’actes
administratifs. Cette décision rappelle l’indépendance de l’autorité judiciaire.
Cette indépendance est citée dans l’art 64 de la Constitution. Elle rappelle
l’indépendance de la juridiction administrative et cette indépendance est
assise sur un principe fondamental reconnu par les lois de la République (loi du
24 mars 1872) (lois de la République = principes cités par le Conseil
Constitutionnel qui rentrent dans le bloc de constitutionnalité).

La répartition des compétences entre le juge judiciaire et le


juge administratif :

TC 16 juin 1923, SEPTFONDS :


 Le juge judiciaire est compétent pour interpréter les actes
règlementaires mais pas les actes individuels.

Un acte administratif règlementaire pose une règle générale.


Un acte administratif individuel modifie la situation juridique d'une ou de
plusieurs personnes nommément désignées.

TC, 8 avril 1935, ACTION FRANCAISE :

 Le JJ est seul compétent pour juger les voies de fait.

Le préfet de police avait fait saisir le journal L’Action française chez tous
les dépositaires de ce périodique à Paris et dans le département de la Seine. La
société du journal ayant engagé une instance devant les tribunaux judiciaires
contre le préfet de police, le conflit avait été élevé. Le Tribunal des conflits
considéra que la mesure incriminée constituait une voie de fait et que les
tribunaux judiciaires étaient donc seuls compétents pour statuer sur cette
affaire. Une voie de fait correspond à une mesure ou une action
gravement illégale de l'administration, qui porte atteinte à une liberté
individuelle ou au droit de propriété et qui de ce fait perd son
caractère administrastif.

TC 27 mars 1952, Préfet de la Guyane :


 Le TC décida que les actes relatifs à l’organisation du service public
de la justice c'est-à-dire le fonctionnement d’un tribunal, relevaient de
la compétence de la juridiction administrative.

Certaines juridictions de la Guyane ne purent fonctionner pendant un certain


temps parce que les magistrats nécessaires à leur constitution n’avaient pas
été nommés en temps utile. Lésés par cette situation, les officiers ministériels
de Cayenne intentèrent une action en indemnité contre l’Etat devant les
juridictions civiles. Le préfet éleva le conflit.

Séance 2 – Les personnes morales de droit public

La notion de personne publique :


TC, 9 décembre 1899, ASSOCIATION SYNDICALE DU
CANAL DE GIGNAC :
 La notion de puissance publique est un élément essentiel à
l’identification d’un EP.

Des difficultés s’étant élevées entre un créancier et l’association requérante,


se posait la question de la détermination de la juridiction compétente pour
connaître de ce litige, ce qui revenait à s’interroger sur la nature juridique de
cette « association syndicale ». Le TC y a vu un établissement public en raison
de la réunion de plusieurs prérogatives de puissance publique, à l’encontre
duquel ne peut être exercées les voies d’exécution du droit commun. L’intérêt
de cette décision provient surtout de ce qu’elle fait des prérogatives de
puissance publique un élément essentiel de l’identification de l’établissement
public.

Cette conception d’origine a évolué et connaît aujourd’hui une grande


confusion. Un EP est une personne morale indépendante (autonomie financière
et personnalité morale). Il a des organes, des biens, un budget propre. Il est
placé sous la tutelle d’une collectivité de rattachement qui peut être soit l’Etat,
soit une collectivité. Sa compétence est limitée à un objet précis (principe de
spécialité). Eclatement de la notion d’EP car grande diversification des EP, des
domaines dans lesquels ils interviennent, des catégories, car la jurisprudence a
admis que pouvait être qualifié d’EP un organisme privé.

CE, 31 juillet 1942, MONPEURT :

 Les comités d’organisations exercent une mission de service public


mais ne sont pas des EP. Ils sont des SP dotés d’une personnalité
morale de droit privé. Ils prennent des actes administratifs.
La notion de SP devient matérielle et non plus organique.

Le gouvernement de Vichy avait créé des comités d’organisations,


chargés d’organiser diverses branches d’activité dans un cadre corporatif et
d’économie dirigée. Un contentieux s’étant élevé entre le sieur Monpeurt et le
comité d’organisation des industries de verre à propos d’une décision prise par
ce dernier, il fallait déterminer la nature de ce comité d’organisation et
le régime de ses actes. Le CE jugea que « les comités d’organisation, bien
que le législateur n’en ait pas fait des établissements publics, sont chargés de
participer à l’exécution d’un service public ; les décisions qu’ils sont
amenés à prendre dans la sphère de ces attributions, soit par voie de
règlements, soit par des dispositions d’ordre individuel, constituent des actes
administratifs ». L’ambiguïté de cette rédaction a autorisé une longue
controverse sur la nature des comités d’organisation ; en revanche, leur régime
est mieux précisé.
Le recours pour excès de pouvoir n’était traditionnellement ouvert que
contre les actes administratifs, c'est-à-dire les actes pris par une personne
morale de droit public. Désormais, un tel recours peut être ouvert contre
des actes unilatéraux de certaines personnes privées. Le comité
d’organisation est un service public doté d’une personnalité morale de
droit privé alors que, jusque-là, on ne connaissait qu’une forme de service
public doté de la personnalité juridique : l’établissement public. Le critère
organique, critère traditionnel du droit français, s’estompe considérablement :
la notion de service public, comme celle d’acte administratif, dans la
lignée de l’arrêt Caisse primaire « Aide et Protection », semble alors
devenue exclusivement matérielle ou fonctionnelle et plus du tout
organique.

CE, 2 avril 1943, BOUGUEN :


L’arrêt Bouguen, rendu à propos des ordres professionnels, réitère la
solution de l’arrêt Monpeurt, et a soulevé les mêmes difficultés. Les ordres
professionnels, bien que n’étant pas des établissements publics, concourent
au fonctionnement d’un service public. Le CE a reconnu que les ordres
professionnels, tout comme les comités d’organisations, étaient chargés d’une
mission de service public par le législateur. A ce titre, ils connaissaient un
régime juridique et contentieux hybride, qu’il s’agisse de leurs actes ou de leur
responsabilité.
Les ordres professionnels (médecins, sages-femmes, pharmaciens, véto,
architectes…) exercent deux types d’activités : les unes sont placées sous
l’empire du droit privé (gestion du patrimoine), les autres sont soumises au
droit public (organisation de la profession). Dans ce dernier cadre, leurs actes
sont des actes administratifs. Ce peut être des décisions à caractère
règlementaire, des actes individuels.
Comme celle des services publics administratifs, la responsabilité
extracontractuelle des ordres connaît des règles spéciales. Si, en raison de son
illégalité, une décision d’inscription cause un préjudice, c’est au JA que revient
la compétence pour apprécier la responsabilité de l’ordre.

TC, 14 février 2000, GIP Habitat et intervention


sociales c/ Mme Verdier :
Le TC indique que les GIP sont des personnes publiques soumises
à un régime spécifique et que les juridictions administratives sont
compétentes pour connaître leur litige.

Faute pour le législateur d’avoir prévu un statut d’ensemble des


Groupements d’intérêt public, des incertitudes quant à leur nature juridique ont
subsisté. Ces incertitudes étaient à l’origine de la question de compétence que
la Cour de cassation a soumise au TC et qui a donné lieu à cet arrêt.

Les collectivités territoriales et la notion de


décentralisation :
CE, 25 janvier 1991, BRASSEUR :
 Le refus opposé par le préfet à une demande de déféré n'est pas
susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

Une personne lésée par un acte des collectivités locales soumis au contrôle de
légalité peut demander au préfet de déférer le dit acte au tribunal
administratif.
Cependant dans cette décision, le CE nous indique que le refus opposé par le
préfet à une demande de déféré n'est pas susceptible de faire l'objet d'un
recours pour excès de pouvoir.

CE, 4 novembre 1994, Département de la Sarthe :


 Le recours contre toutes les décisions des collectivités territoriales,
ici c’est un déféré préfectoral, a été admis par le CE à l’exception des
actes du maire exerçant en tant qu’agent de l’Etat et sous réserve que les
actes soient administratifs.

CE, 6 octobre 2000, Ministre de l’intérieur c/


Commune de Saint-Florent :
 Le CE a considéré que le préfet qui s’abstenait de déférer des actes
dont “ l’illégalité ressortait avec évidence des pièces qui lui étaient
transmises ” avait commis une faute lourde de nature à faire engager
la responsabilité de l’État.

Séance 3 – Les sources internes du Droit administratif

Le Préambule et les Principes Fondamentaux Reconnus par


les Lois de la République :

CE 12 février 1960, Société EKY :


 Le CE a reconnu la valeur constitutionnelle de la DDHC.

CE 29 novembre 1968, TALLAGRAND :


Le CE a donner à une disposition du préambule de 1946 le pouvoir de
servir de fondement à une action indemnitaire car la disposition de 1946 est
jugée trop général pour que l’on lui reconnaisse une portée juridique.

CC, 16 juillet 1971, LIBERTE D’ASSOCIATION :

 Le contrôle de constitutionnalité de la loi ne s'effectue plus


seulement par rapport à la Constitution stricto sensu, mais aussi par
rapport à son préambule. Valeur constitutionnelle du préambule de la
Constitution.

Le Parlement adopte un projet de loi modifiant la loi du 1er juillet 1901


relative au contrat d’association ; il instituait un contrôle judiciaire préalable à
l’égard de certaines associations. Ce texte fut annulé par la décision
commentée, qui eut un grand retentissement et dans laquelle on voit
généralement le point de départ de l’ascension du CC dans nos institutions
publiques. Cette décision est essentielle pour la détermination de la valeur
juridique du préambule de la Constitution et pour la notion de
« principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ».

CE, 19 juin 2006, Association eau et rivière de


Bretagne :
 Le CE a estimé que seul l’article 5 de la Charte constitutionnelle qui
porte sur le principe de précaution était réellement d’application
immédiate car dans les autres articles, il est prévu une intervention
obligatoire du législateur.

Cette position a été remise en question par l’arrêt Commune d’Annecy.

CE 3 octobre 2008, Commune d’Annecy :

 Le CE consacre la valeur constitutionnelle à l’ensemble des droits et


devoirs définis dans la Charte de l’environnement.

Cet arrêt, qui annule un décret relatif aux lacs de montagne, a été
l’occasion pour le CE de faire application de la loi constitutionnelle du 1er mars
2005 relative à l’ajout de la Charte de l’environnement de 2004 dans le
préambule de la Constitution et de préciser sa jurisprudence sur la portée du
préambule de la Constitution.
La commune a soutenu que le ce décret méconnaissait le principe de
participation énoncé par la Charte dans son article 7 (« Toute personne a le
droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux
informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques
et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur
l'environnement »). Elle fait valoir également que le gouvernement avait
empiété sur la compétence réservée au législateur tant par l’article 34 de la
Constitution que par l’article 7 de la Charte. Le CE a fait droit au moyen tiré de
l’incompétence du pouvoir réglementaire.
La décision affirme que les dispositions de l’article 7, comme l’ensemble des
droits et devoirs définis dans la Charte et à l’instar de toutes celles qui
procèdent du Préambule de la Constitution, ont valeur constitutionnelle et
s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs
domaines de compétence respectives.
La possibilité reconnue à la commune d’Annecy de se prévaloir de l’article 7
devait normalement conduire le juge administratif à vérifier si le principe de
participation du public avait été méconnu par le décret. MAIS ce n’est pas sur
ce terrain que le Conseil d’Etat s’est placé. Il a annulé le décret pour violation
des règles de répartition des compétences entre la loi et le règlement posées
par l’article 7.

Egalement, le CE a estimé que les dispositions de l’article 7 ont réservé au


législateur le soin de préciser « les conditions et les limites » dans lesquelles
doit s’exercer le droit de toute personne à accéder aux informations relatives à
l’environnement détenues par les autorités publiques et à participer à
l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement.
Il s’ensuit que, depuis l’entrée en vigueur de l’article 7, ne relèvent du pouvoir
règlementaire « que les mesures d’application des conditions et limites fixées
par le législateur ».
Dès lors que le décret attaqué ne se bornait pas à fixer les mesures
d’application de dispositions législatives intervenues dans le champ
d’application de l’article 7, il empiétait illégalement sur la compétence dévolue
au législateur. Il a pour ce motif été annulé.

L’arrêt Commune d’Annecy conduit à une valorisation de la Constitution devant


et par le juge administratif.

L’écran législatif :

CE 17 mai 1991, QUINTIN :


 Notion d’écran transparent. La théorie de l’écran législatif ne joue
pas quand la loi, qui s’interpose entre l’acte règlementaire et la
Constitution, est une loi d’habilitation générale. Le JA va donc
accepter de vérifier directement si des règlements sont contraires à
La Constitution, s’ils le sont, il peut les annuler

En effet dans cette hypothèse la loi ne contient aucune règle de fond de nature
à s’interposer entre le règlement et la Constitution.

La loi comme source interne du DA :

CC, 30 juillet 1982, Blocage des prix et des revenus :


 Une loi contenant des dispositions réglementaires issues de l’art 37
n'est pas frappée d'inconstitutionnalité.

Les principes généraux du droit comme source interne du


DA :
CE 26 juin 1959, SYNDICAT GENERAL DES
INGENIEURS – CONSEILS :
 Le Conseil d’État a jugé que le pouvoir réglementaire autonome est
soumis au respect des principes généraux du droit.

Quelques PGD : le principe d’égalité, le principe de non-rétroactivité des actes


administratifs (voir Société du journal "L’Aurore"), le principe de continuité des
services publics (voir Dehaene), le principe des droits de la défense (voir Dame
Veuve Trompier-Gravier), la possibilité de former un recours contentieux contre
les actes de l’administration, l’intangibilité des droits acquis (voir Dame
Cachet).

Les mesures prises dans le cadre de l’article 16 de la


Constitution :

CE 2 mars 1962, RUBIN DE SERVENS :


 Lorsqu’une autorité administrative prend un acte de gouvernement,
il bénéficie d’une immunité juridictionnelle c'est-à-dire qu’on refusera
de juger sa légalité.

Recours contre un décret du PDLR instaurant l’article 16 de Constitution


(pouvoirs exceptionnels). En 1961, de Gaulle décide de recourir à cet article 16
par un décret donc il était possible de faire un recours par le Conseil d’Etat. Ici
le Conseil d’Etat a jugé que la décision du PDLR d’instaurer l’article 16 était un
acte de gouvernement. La conséquence est que lorsqu’une autorité
administrative nationale prend ce type d’acte, il bénéficie d’une immunité
juridictionnelle c'est-à-dire qu’on refusera de juger la légalité de la décision
administrative.
La jurisprudence du Conseil d'État du 2 mars 1962, Rubin de Servens, précise
que la décision de mettre en œuvre les pouvoirs exceptionnels est «
un acte de gouvernement dont il n'appartient pas au Conseil d'État
d'apprécier la légalité ni de contrôler la durée d'application ». Il en est
de même d'une décision portant sur une matière législative et prise par le
Président de la République sous ce régime.

Les ordonnances prises dans le cadre de la loi de 1962 :

CE, 19 octobre 1962, CANAL, ROBIN et GODOT :

 Les ordonnances prises par le PDLR en vertu de la loi référendaire


du 13 avril 1962 conservent leur caractère administratif et peuvent
donc être attaquées devant le JA.

Par l’arrêt Canal , le Conseil d’État a annulé une ordonnance prise par
le Président de la République sur le fondement d’une loi référendaire qui
instituait une cour militaire de justice au motif que la procédure prévue devant
cette cour et l’absence de tout recours contre ses décisions portaient atteinte
aux principes généraux du droit pénal. Cette décision fut la cause d’une très
vive tension entre le général de Gaulle et le Conseil d’État, qui sembla un
instant menacé, si ce n’est dans son existence même, du moins dans son rôle
et dans ses attributions.
Par le référendum du 8 avril 1962, le peuple souverain approuva massivement
les accords d’Evian qui mettaient fin à la guerre d’Algérie. La loi soumise à
référendum autorisait également le Président de la République à prendre par
ordonnance ou par décret en conseil des ministres "toutes mesures législatives
ou réglementaires relatives à l’application" de ces accords. Sur le fondement
de cette habilitation, le général de Gaulle avait institué, par une ordonnance du
1er juin 1962 une juridiction spéciale, la Cour militaire de justice, chargée de
juger, suivant une procédure spéciale et sans recours possible, les auteurs et
complices de certaines infractions en relation avec les événements algériens.
Condamnés à mort par cette cour, M. Canal, Robin et Godot saisirent le Conseil
d’État d’un recours en annulation dirigé contre l’ordonnance l’ayant instituée.
Le Conseil d’État leur donna raison et prononça l’annulation de
l’ordonnance en considérant que "eu égard à l’importance et à la
gravité des atteintes que l’ordonnance attaquée apporte aux
principes généraux du droit pénal, en ce qui concerne, notamment, la
procédure qui y est prévue et l’exclusion de toute voie de recours", la
création d’une telle juridiction d’exception ne pouvait pas être
décidée sur le fondement de l’habilitation donnée au Président de la
République pour la mise en application des accords d’Evian par la loi
référendaire.
Pour parvenir à cette solution, qui suscita une vive réaction du général de
Gaulle, le Conseil d’État avait dû franchir un premier obstacle, qui tenait à la
recevabilité d’un recours dirigé contre une ordonnance prise sur le fondement
d’une habilitation accordée directement par le peuple souverain, et qui
présentait une valeur législative. Un tel acte pouvait-il être déféré pour
excès de pouvoir devant le juge administratif ? Le Conseil d’État
répondit de façon positive en jugeant que la loi référendaire "a eu
pour objet, non d’habiliter le Président de la République à exercer le
pouvoir législatif lui-même, mais seulement de l’autoriser à user
exceptionnellement, dans le cadre et dans les limites qui y sont
précisées, de son pouvoir réglementaire, pour prendre, par
ordonnance, des mesures qui normalement relèvent de la loi". Le
Conseil d’État a donc considéré que l’habilitation n’était pas une
attribution d’une portion du pouvoir législatif mais une simple
autorisation accordée au pouvoir réglementaire d’intervenir, dans les
strictes limites de l’habilitation, dans le domaine de la loi. Bien que
pouvant modifier des textes législatifs, l’ordonnance conservait donc
la nature réglementaire que lui confère son auteur.

De la même manière, le Conseil d’État s’était reconnu compétent pour se


prononcer sur un recours dirigé contre une ordonnance prise par le
Gouvernement sur habilitation du Parlement, en vertu de l’article 38 de la
Constitution (Ass., 24 novembre 1961, Fédération nationale des syndicats de
police, p. 658). Outre les actes de gouvernement (voir Prince Napoléon), seules
les décisions prises, dans le domaine de la loi, par le PDLR en vertu de l’article
16 de la Constitution échappent au contrôle du Conseil d’État (Ass. 2 mars
1962, Rubin de Servens, p. 143 : en revanche le juge est compétent pour
connaître de ces mêmes décisions lorsqu’elles ne relèvent pas du domaine de
la loi).

Séance 4 – Les sources externes du Droit administratif

La place du droit internationale dans la hiérarchie des


normes :

CE, 30 mai 1952, DAME KIRKWOOD :


 Un acte administratif doit être conforme à un traité s’il n’y pas de
loi écran. Pour la première fois, le juge contrôle l'application par
l'administration du droit international.

CC, 15 janvier 1975, IVG :


Le Conseil constitutionnel refuse de contrôler la conformité d’une loi
par rapport à un traité ; renvoyant ainsi ce contrôle de conventionalité
à la compétence des juridictions ordinaires.

Cass, 24 mai 1975, Société des cafés Jacques Vabre :


Prévalence des traités sur les lois nationales, même postérieure. La
Cour de cassation admet la possibilité d'effectuer un contrôle de
conventionalité.

La Cass revient sur la décision du CE, 1968, Syndicat général des fabricants de
Semoule, qui faisait prévaloir un traité sur une loi postérieure.

CE, 20 octobre 1989, NICOLO :


 Le CE admet de contrôler la conformité d’une loi à un traité
internationale même antérieur à cette loi, appliquant ainsi pleinement
l’article 55 de la Constitution.
L’art. 55 disposant que le traité est supérieur à la loi, la loi contraire à un traité
fait-elle écran ou non entre le traité et l’acte administratif d’exécution et, par
voie de conséquence, l’acte administratif doit-il être conforme à la loi elle-
même contraire à un traité ?  Lorsque la loi était antérieure au traité, le
traité primait la loi et les actes administratifs devaient se conformer
au traité et non à la loi. Lorsque la loi était postérieur au traité, longtemps
les diverses juridictions ont estimé que la loi devait l’emporter sur le traité
même si elle lui était contraire, car elles considéraient que l’appréciation de la
conformité de la loi au traité relevait de la compétence du CC. Cependant celui-
ci décida qu’il n’avait pas la compétence sur ce point. La Cour de cassation
modifia alors sa jurisprudence (Cass, 24 mai 1975, Administration des
douanes c/ Cafés Jacques Vabre). Le CE, quant à lui, maintint, dans un
premier temps, sa jurisprudence puis, sous la pression du CC, finit par s’incliner
dans l’arrêt NICOLO. Désormais le JA vérifie si la loi dont le règlement
administratif fait application est conforme au traité. A défaut, il écarte
la loi et déclarera le règlement illégal, sauf si se pose en réalité une
question de constitutionnalité de la loi. Toutefois, l’invocabilité ne vaut
que pour les traités qui sont exécutoires et qui concernent des droits
individuels et non les relations d’Etat à Etat. Cela ne vaut pas pour les règles
coutumières (6 juin 2000, AQUARONE) et pour les principes non écrits du droit
international, sauf pour les principes généraux tirés du droit communautaire.
Enfin, pour nombre de traités, la supériorité sur la loi suppose respectée la
condition de réciprocité.

CE, 3 juillet 1996, KONE :


 Composante prétorienne de la Constitution : le CE a dégagé un
PFRLR qui interdit l’extradition d’une personne pour des motifs
politiques.

CE, 6 juin 1997, AQUARONE :


 Les règles coutumières du droit international public sont
applicables en droit interne mais ne prévalent pas sur la loi en cas de
conflit entre ces deux normes.

CE, 30 octobre 1998, SARRAN, LEVACHER ET


AUTRES :

 Primauté de la Constitution sur les normes internationales.


Les lois référendaires sont soumises à la conformité des traités internationaux
et pas à celle de la Constitution.
En vue de l’évolution de la Nouvelle-Calédonie vers l’indépendance, a été
conclu l’accord de Nouméa (mai 1998) devant être soumis à référendum.
Cependant, l’article 76 de la Constitution a prévu que seuls pourraient
participer à ce référendum les électeurs ayant domicile en Nouvelle-Calédonie
depuis le 6 novembre 1988 : tous les autres individus étaient exclus, ce qui
abolissait partiellement la règle du suffrage universel. Des électeurs ont
contesté le décret du 20 août 1998 organisant en conséquence les opérations
de référendum. Leurs recours sera rejeté au terme d’un raisonnement qui fait
toute l’importance de cette décision de principe tant pour les rapports entre
l’ordre interne et l’ordre internationale que pour le statut du référendum et des
lois référendaires.
Les requérants soutenaient que le décret attaqué était contraire à divers
traités internationaux. Cependant, comme ce décret ne faisait, sur ce point,
que reprendre les termes mêmes de l’article 76 de la Constitution, leur critique
revenait à demander au juge de dire que les traités sont supérieurs à la
Constitution. Réponse du CE : « La suprématie ainsi conféré (par l’art 55
Constit.) aux engagements internationaux ne s’applique pas, dans l’ordre
interne, aux dispositions de nature constitutionnelle… ». En effet la
Constitution ne peut instituer elle-même un pouvoir qui serait supérieur et
donc conférer aux traités une autorité supra-constitutionnelle. Etrange car
lorsqu’une disposition constitutionnelle est contraire à un traité international
non encore ratifié, il faut modifier cette disposition afin de le ratifier.
Le CE juge que sont seuls des référendums, au sens de l’art. 60 de la
Constitution, ceux organisés au titre de l’art. 11 ou de l’art. 89. Mais surtout
s’agissant des lois référendaires, il décide que celles-ci ne peuvent porter
que sur des matières législatives, ordinaires ou organiques, non sur des
matières constitutionnelles et que ces lois, comme toutes les autres lois, sont
soumises au respect des traités internationaux. Ainsi les lois
référendaires qui, parce qu’elles émanent directement du peuple
souverain, ne sont pas soumises au contrôle de constitutionnalité,
n’échappent pas pour autant au contrôle de conventionalité.

CE, 18 décembre 1998, SARL du Parc d’activités de


BLOTZHEIM :
 Le juge administratif contrôle la régularité de la procédure de
ratification, il veille au respect de la compétence du parlement (art 53).

CE, 9 avril 1999, Chevrol-Benkeddach :


 La supériorité des conventions et des traités internationaux au droit
nationale ne vaut toutefois que sous réserve de réciprocité c'est-à-
dire que l’autorité du traité est subordonnée à son application par
l’autre partie). Le JA interroge le ministre des Affaires étrangères pour
déterminer si cette condition est remplie.
CEDH, 2003, Chevrol-Benkeddach c. France :
Pour la CEDH c’est une atteinte à la plénitude de la juridiction. Le JA est
donc compétent pour apprécier la condition de réciprocité.

La place du droit communautaire :

CJCE 15 juillet 1964, Costa c/ ENEL :


 Principe de la primauté du droit communautaire sur les législations
nationales.

CJCE, 9 mars 1978, SIMMENTHAL :


La primauté du droit communautaire s'exerce même vis-à-vis d'une
loi nationale postérieure.

CE, 22 décembre 1978, Ministre de l’Intérieur c/


COHN-BENDIT :
 Impossibilité d’invoquer directement une directive communautaire
à l’encontre d’un acte administratif individuel.

L’arrêt Dame P est venu remettre en cause cette jurisprudence. La


jurisprudence considérait jusqu’à présent qu’une personne ne pouvait, à
l’appui d’un recours contre une décision administrative individuelle, invoquer
directement une disposition d’une directive, même si l’Etat avait été défaillant
dans son obligation de transposition. La directive était en effet considérée
comme n’ayant pas d’effet direct sur la situation d’une personne individuelle,
puisqu’elle posait des obligations s’appliquant aux seuls Etats.

CE, 3 février 1989, Compagnie ALITALIA :


 Les juridictions nationales ne peuvent ni laisser subsister des
dispositions réglementaires qui ne seraient plus compatibles avec les
objectifs définis par les directives, ni édicter des dispositions
réglementaires qui seraient contraires à ces objectifs.

CE, 28 février 1992, SA Rothmans Internaitonal


France :
 Supériorité pleine et entière du droit dérivé communautaire sur la
loi nationale.
CC, 10 juin 2004, Loi pour la confiance dans
l’économie numérique :
La décision complète une abondante jurisprudence (jusque là
judiciaire et administrative) mettant en œuvre les principes
d'applicabilité des règles communautaires dans les Etats membres et
de primauté du droit communautaire sur les normes juridiques
nationales. Avec cependant une réserve qui relativise la portée du
principe de primauté du droit communautaire : dans le cas où une
disposition expresse de la Constitution s'opposerait clairement à la
transposition d'un texte communautaire, le Conseil Constitutionnel
retrouverait sa compétence et pourrait censurer la loi de transposition
pour non conformité à la Constitution.

CE, 8 février 2007, Société Arcelor :


 Première fois que le CE effectue un contrôle de conventionalité
d’une directive.

Dans le cas où une directive inconditionnelle et précise est transposée


par un acte réglementaire, le CE s’il est saisi de ce décret de transposition pour
contrôler sa constitutionnalité va regarder, s’il existe en droit communautaire
un principe équivalent au principe constitutionnel que le requérant invoque, le
JA doit vérifier si la directive est bien conforme à la règle communautaire (et
saisir éventuellement la CJCE par voie préjudicielle si il y a une difficulté
sérieuse). Si ce n’est pas le cas le JA va contrôler la constitutionnalité des
dispositions règlementaires contestées.

CE, 30 octobre 2009, Mme P :


 Possibilité pour tout justiciable de se prévaloir, à l’appui d’un
recours dirigé contre un acte administratif même non réglementaire,
d’une directive lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis, les
mesures de transposition nécessaires.

Les actes administratifs règlementaires et individuels sont soumis au même


régime que la directive soit transposée ou non.
Cette décision revient ainsi sur la jurisprudence retenu dans la décision
Ministère de l’Intérieur c/ Cohn-Bendit.

CE, 6 décembre 1907, COMPAGNIE DES CHEMINS DE


FER DE L’EST :
Rendu à propos d’un litige concernant la modification de règlements
d’exploitation des chemins de fer, l’arrêt est d’une importance essentiel à deux
égards : la notion d’acte administratif unilatéral et le statut du pouvoir
règlementaire.
Pour s’opposer à l’action des compagnies requérantes, le ministre des Travaux
publics invoquait le fait qu’il s’agissait de décisions prises à l’invitation
expresse de la loi. En quelque sorte, ces règlements participaient plus de la loi
que de l’acte administratif et échappaient, par la même, au contrôle du juge.
Le CE n’en a pas jugé ainsi en adoptant un critère organique : la nature
d’un acte juridique est déterminée exclusivement par la qualité de l’auteur.
Ici, l’auteur appartient au pouvoir exécutif, l’acte est donc
administratif.
Cette solution a eu d’importants effets. Elle a permis de soumettre au
contrôle entier du JA les actes pris en vertu de la législation déléguée
sous les républiques successives : décrets-lois, lois-cadres, ordonnances.
Toutefois, la belle simplicité du critère organique est tenue en échec dans le
cas des actes administratifs pris par des personnes privées gérant un service
public (TC, 15 janvier 1968, Compagnie Air France c/ Barbier). Les actes
législatifs et judiciaires échappent logiquement au contrôle du JA.

TC, 22 janvier 1921, BAC D’ELOKA :


Le TC a reconnu pour la première fois l’existence de service public en
matière économique mais en soumettant ces services publics aux règles de
droit privé, notamment le droit commercial. Ces SPIC sont essentiellement
soumis au droit privé, même s’il s’agit d’activité de service public et à ce titre
ils sont aussi soumis au DA pour ce qui concerne l’organisation (ex : en matière
du personnel).

You might also like