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Vous que j'ai rencontré...: Bergerac de 1947 à 2017
Vous que j'ai rencontré...: Bergerac de 1947 à 2017
Vous que j'ai rencontré...: Bergerac de 1947 à 2017
Ebook533 pages6 hours

Vous que j'ai rencontré...: Bergerac de 1947 à 2017

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About this ebook

Ce livre est le témoignage d'une ville et de son coeur, Bergerac. L'auteur essaye de franchir le fleuve de l'oubli, car les personnes qu'il évoque ont leur place dans le patrimoine bergeracois, ouvriers, employés, patrons, ils ont bâti en leur temps la réputation rayonnante de Bergerac, l'ont embellie par leur force de travail et leur fidélité.

La nostalgie, cette conscience de la permanence du passé ne doit pas être pétrie d'un sentimentalisme trop aigu qui empêche d'affronter le présent.

Dans cet ouvrage de 234 pages couleur et noir et blanc, Jacky Belvès évoque les rencontres et remercie tous les noms qui ont éclairé les rues de la Résistance, de Sainte-Catherine et le centre ville de Bergerac, dans lequel il a vécu pendant 70 ans.
LanguageFrançais
Release dateMay 24, 2019
ISBN9782322130528
Vous que j'ai rencontré...: Bergerac de 1947 à 2017
Author

Jacky Belvès

Jacky Belvès a 72 ans. Ancien restaurateur au centre-ville de Bergerac. Plume, à ses heures, dans les multiples associations dont il est membre. Il est issu d'une famille très active dans la vie économique de Bergerac dont il connaît tous les aspects de son patrimoine culturels, économiques et sportifs.

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    Vous que j'ai rencontré... - Jacky Belvès

    À mon épouse Josette Belvès

    27/10/1950 – 04/11/2018

    Je ne sais plus rien te dire

    Je reste là à te sourire

    Merci pour toi et pour moi

    Merci et chapeau bas

    (Barbara)

    J’y suis né, j’y ai travaillé,

    J’y ai trouvé l’amour et partagé tant d’amitiés

    J’y ai souffert, j’y mourrai sans nul doute

    Sommaire

    Une vie au cœur de Bergerac

    Ma deuxième famille

    Un éloge de mon métier

    L’imagination et l’improvisation dans la rigueur au service d’une cuisine qui émoustille l’homme

    La cuisine est comme la musique, un mot de partage

    Les brèves de chasse

    Les Brèves du Rotary Club Bergerac Cyrano

    Le procès

    Les soirées Rotariennes

    Les coulisses de la Rue de la Résistance 1947-2007

    1947-1973 les décors de la Pâtisserie Bar Américain Salon de thé du 21 rue de la Résistance

    L’envers du décor, de 1947 à 1974

    Et vint le Royal Périgord 19 et 21 rue de la Résistance

    Le travail du bureau

    Les coulisses du spectacle

    Reste l’endroit le plus ingrat de la cuisine : la plonge !

    Le retour aux sources

    L’oxygène de l’entreprise : les clients

    Mes premiers pas de traiteur

    Les repas et les lunchs du 1er étage

    Les travaux

    Les fournisseurs.

    Restait la carte des vins.

    Les collègues restaurateurs, hôteliers

    Les brèves politiques et du golf

    L’année 2015 (extraits)

    Une vie au cœur de Bergerac

    Ma naissance à la vie je la dois à un père et une mère qui m’ont accompagné jusqu’à leur dernier souffle et le Cupidon de la vie m’a fait croiser Josette, ne plus la quitter pour, ensemble, donner la vie à notre fils Christophe, créer un petit être n’est-ce pas un don de « la vie » Comme pour tous les humains, elle ne m’a pas fait toujours des cadeaux, la vie, à tort ou à raison… il est vrai qu’elle n’est qu’un passage dans ce monde de spectacle. Sentant que l’érosion naturelle me mine qu’il faut commencer à ranger mes affaires, je vais rajouter ces souvenirs consacrés à ma famille par alliance, à ce métier qui m’a dicté sa loi, à cette rue de la Résistance de Bergerac où j’ai habité et travaillé durant 60 ans et surtout à tous ces vivants qui ont croisés « Ma vie ».

    « J’ai besoin d’être porté par le passé derrière moi, comme le surfeur poussé par sa vague. La mémoire est une force qui empêche le temps de couler. Pourquoi devrions-nous préférer le présent au passé ? Déjà qu’on doit y vivre… Mieux vaux glisser sur ses souvenirs ! »Frédéric Beigbeder

    Ma deuxième famille

    Les lumières et les ombres du Paillet

    A La Cavaille

    Dans mon premier petit livre « Le passé simple de l’imparfait » j’ai évoqué les origines de ma

    famille, je ne peux oublier de citer celle de mon épouse qui m’a accueilli, une famille de gens

    simples et travailleurs.

    A 14 ans, Josette se rendait en solex sur son lieu d’apprentissage chez Luminex un magasin des Arts de la Table rue de la Résistance à Bergerac, des allers-retours dans la journée, qu’il pleuve, qu’il gèle le régime était le même… trajet sur cette grande ligne droite de la route de Bordeaux qui menait à Bergerac. Les marguerites dans les près où broutaient les vaches servaient de bordures fleuries à cette nationale et l’emplacement du Leclerc actuel abritait une immense carrière presque à l’abandon.

    En revenant, dans le premier grand tournant, elle virait à gauche à l’ancienne tuilerie (Drive Leclerc) puis allait aussitôt vers la droite toujours en pleine nature.

    La grande allée du Paillet était bordée de pâturages, de vignes et de cerisiers ; au printemps les monticules où poussaient les asperges relevaient le relief.

    Une terre sablonneuse et riche, où tout pouvait pousser, parsemée de nombreux puits pour arroser les cultures. Un grand hangar en bois jouxtait la petite maison bien simple qui abritait aussi l’étable avec 2 vaches comme locataires. Il y aura toujours de nombreux chiens de toutes races pour la garde ou la chasse, attachés ou libres. En faisant le tour, on trouvait la soue avec les cochons, la volière et ses poulets, pintades et canards. En prévision des fêtes de fin d’année, oies et dindons se rajoutaient à ce tableau campagnard, sans oublier la cave remplie de conserves et des barriques de la récolte maison.

    René et Gilberte Vigier avaient délaissés le centre- ville pour acquérir en septembre 1961 cette petite propriété avec leurs 3 enfants, Gérard né en 1948, Josette en 1950 et Jean-Pierre en 1952, la quatrième Jocelyne viendra plus tard en 1965. René travaillait à la Coopérative laitière de Bergerac vers Gala, entretenait sa propriété et préparait l’examen pour intégrer les PTT. Reçu, il montera en formation à Paris, ( Yves Guéna était alors ministre des PTT, député maire de Périgueux et René m’expliquera que les sélectionnés originaires de la Dordogne étaient pistonnés pour devenir rapidement titulaire et obtenir les mutations « au pays » ; Guéna sera le principal acteur de la venue de l’usine du Timbre, une époque où les élus locaux étaient efficaces !) aussi Gilberte devra pendant 2 ans, assurer le quotidien, les 3 enfants, biner, planter, semer, gérer les animaux. La famille vivait en autarcie avec les légumes frais et les conserves, on élevait les gorets destinés aux pâtés, jambons, enchauds, grillades, mais aussi pour la vente à des amis. Les jours où l’on tuait le cochon, Josette quittait la ferme ne pouvant supporter les cris des bêtes égorgés, une tâche ingrate mais le repas des cochonnailles en soirée effaçait toute fatigue. Les quelques vignes produisaient un vin de table de consommation personnelle ou pour quelques amis des PTT qui aidaient aux deux jours de vendanges, dont le résultat final au gré des années bonnes ou mauvaises vous décapait souvent le gosier. René avait une passion pour les arbres, surtout les cerisiers qui formeront avec le temps une haie naturelle clôturant la propriété. Si à cette époque, Gérard Lenorman invitait musicalement les français à planter des arbres, à la Cavaille rien à voir avec la Ballade des Gens Heureux… ni malheureux d’ailleurs !! Dehors, tous les abris, les clôtures, la balançoire étaient des mécanos à base de poteaux téléphoniques et de matériels obsolètes récupérés au PTT avant destruction, avec l’avantage que les bois étaient traités donc imputrescibles!!

    Gérard et Jean-Pierre seront mis en apprentissage de boucherie dès leurs 14 ans, pour Josette ce sera vendeuse. Curieusement Gérard commencera Au Foyer (petit superette avec épicerie, boucherie, charcuterie etc) dans la rue de la Résistance, à 20 mètres de ma pâtisserie familiale… Josette sera embauchée un peu plus loin de l’autre côté, à 100 mètres. René avait vu le jour à Vergt en 1928, dans le Périgord profond, à son mariage en 1950, à la rubrique profession on pouvait lire « domestique de ferme », tout à fait en bas de l’échelle sociale ou presque. Seuls souvenirs de son service militaire effectué à Madagascar, un casque colonial et une photo de lui au volant d’une jeep. A ces dures contraintes se greffait la rudesse des hommes dans ces familles rurales, où l’alibi des travaux éreintants de la ferme du lever du jour au coucher au soleil semblait excuser parfois un alcoolisme chronique.

    Les enfants, élevés à la dure, surtout les 3 premiers, supporteront ce système, où l’on ne restait pas au lit le week-end ou pendant les vacances ; la mise en apprentissage leur amènera une bouffée d’oxygène, la découverte d’un autre monde qui aiguisera un appétit de liberté, pour se couper du joug paternel. Christophe le petit fils, en sera aussi un peu témoin avec le vime pour faire avancer l’éducation. Gilberte l’épouse, subira en silence, cachant la clé de la cave, puis sur le tard sonnera la révolte s’occupant enfin de sa personne et prenant le dessus sur son époux !!

    Toute sa famille était d’origine italienne venue chercher du travail en France au début du XXème siècle. Elle était née à St Sauveur en 1927, une enfance consacrée au travail avec des parents métayers et de maigres subsistances mais toujours dans la dignité. Le Paillet, un petit coin de campagne bucolique, où l’on entendait le vent qui couchait les récoltes, où l’on sentait le parfum des foins coupés, toute une vision d’une nature lumineuse palette de couleurs réunies loin du chaos urbain. René n’a connu que le travail, il n’avait pas mauvais fond, il reproduisait inconsciemment sur les autres les conditions de vie que lui avaient imposé ses géniteurs dans sa jeunesse où les effusions n’étaient pas de mise et les coups pleuvaient ! Doté d’une volonté farouche pour s’élever dans l’ascenseur social, ses théories de base semblaient le plus souvent simplistes et son bon sens paysan pas toujours efficace mais ce titulaire d’un simple Certificat d’Études (à son époque c’était déjà une référence) possédait une bonne culture générale et l’oreille musicale d’un mélomane professionnel. Josette était autorisée à sortir le samedi soir, mais au début de notre relation, je restais prudent devant la réputation de ce père moustachu qui menait sa maisonnée à l’ancienne, en déposant mon petit trésor en bout d’allée, elle finissait à pied avec souvent un de ses frères qui montait la garde!

    Voilà le monde où j’arriverai en foulant pour la première fois le chemin de terre qui menait au Paillet à la Cavaille… pour me présenter. Je ne pouvais l’imaginer encore, pour partager une longue route avec Mlle Josette Bernadette Vigier. L’avenir me le démontrera, tomber amoureux est un miracle, chaque génération réinventant l’amour avec la même innocence et le même enthousiasme !

    Après notre mariage et la naissance de notre fils, nous habitions 10 avenue Pasteur et le repas dominical se voulait être souvent au Paillet, ma mère s’occupant de la pâtisserie l’après-midi.

    Oubliant que sa fille était mère de famille et travaillait beaucoup avec moi, René s’ingéniait à nous inviter à l’aider dans des travaux sur la propriété, surtout le lundi qui était notre jour de repos. En parfait gendre ou presque, je me prêtais volontiers à la chose, surtout devant la charge de travail pour ma belle-mère (les deux garçons étaient partis et Jocelyne la dernière n’avait que 3 ans). Avec le temps, l’addition de mes nuits et journées passées à la boutique pesaient, un besoin de respirer un peu et l’envie d’être avec ma petite famille se faisait jour

    Au bout d’un an, un clash sur ce repas du dimanche s’est produit ayant décidé avec Josette de boycotter purement et simplement ce rendez-vous à quelques exceptions près !!! J’étais malheureux pour Gilberte de cette situation, mais elle nous comprenait.

    Avec le temps, les choses rentreront dans l’ordre, et notre petit Christophe grandissait. Arrivé à l’âge de 3 ans, Gilberte lui servait de nounou, surtout en plein été quand notre fourchette horaires de travail nous amenait à ne pas finir avant 20 heures. Jocelyne sa tante avait 7 ans et petit à petit ils sont devenus frère et sœur. Ma belle-mère continuait ses travaux dans les champs et faisait suivre Christophe dans la poussette au milieu des rangs d’asperges. Ils allaient chercher le lait chez les voisins les Tabanou en coupant à travers champs, Line s’y baladait d’ailleurs pieds nus. Aussi, récupérer notre fils le soir était un poème car il se plaisait beaucoup chez la Mamy et avait une compagne de jeux. On le retrouvait couleur de la terre, parfumé de l’odeur des chiens dont il adorait partager la niche !! Vite dans la baignoire en arrivant !!

    Une anecdote me revient au sujet de la ville de Bergerac dans ces années 70. Il n’y avait que le seul « vieux pont » pour traverser la Dordogne, aussi pendant les mois de Juillet et Août, en particulier les jours de grands départs, ce n’était qu’une file de voitures de la route de Périgueux, en descendant par la rue Neuve (alors en double sens) jusqu’après le faubourg. Même en temps normal, les bouchons sur cet axe étaient nombreux pour les bergeracois !! Du coup, en cette période estivale, même à 20 heures se rendre à La Cavaille, prendre Christophe et revenir à la maison avenue Pasteur était une épopée, il m’est arrivé de jouer du pare choc en coupant la route à des parisiens sur la file descendante qui refusaient de s’arrêter pour me laisser me garer devant chez nous !

    Au décès du grand-père maternel de Josette, la famille recueillera Elvira, la grand-mère, italienne pure souche qui ne partageait jamais nos repas dans la salle à manger, restant dans la cuisine, tradition machiste de son pays d’origine.

    Pour preuve désirant retrouver sa famille à Musile, à côté de Venise, c’est Josette et moi qui l’y avons conduit, moi tout fier au volant de ma 204 toute neuve, qui malheureusement après l’aller-retour sur les autoroutes, rendra l’âme avec une culasse H.S. Reçu comme des princes dans ces modestes familles, l’oncle, employé sur les vaporettos, prendra sans préavis envers son patron une semaine pour nous guider. On a bouffé de l’église à devenir francs-maçons en découvrant les ors de cette Sainte Mère, comme ils disent.

    Roberto, le cousin nous amènera dans les restos non touristiques et à la remise de l’addition que le propriétaire réservait aux pigeons de passages de la Place San Marco, partait négocier avec succès un nouveau tarif plus adapté aux autochtones !!Pour nous balader en soirée, il n’oubliait pas de fermer à clé son appartement avec sa femme à l’intérieur… jaloux les italiens ???

    Dans la famille, Gérard Vigier se mariera à Bernadette Bellanger et engendreront deux enfants Sandra et Lionel. Il s’installera boucher derrière l’église de Bergerac, puis après des moments difficiles, divorcera de Bernadette en 1997 pour devenir gérant de Supérette à Montauban, avec celle qui deviendra en 2003 sa deuxième épouse Lucie Liabaste. Les parents de Bernadette avaient une propriété à Thénac, un petit hameau sur les coteaux. Le père, premier magistrat de son village pendant des années, un immense colosse que les travaux de la terre avaient buriné possédait un regard qui ne reflétait que gentillesse et empathie.

    Chaque fois qu’il descendait à Bergerac il ne manquait pas de rendre visite « à Jacky et Josette », je ne sais pas pourquoi mais j’éprouvais envers lui, non pas de l’admiration mais un profond respect. Jean-Pierre Vigier partira de Bergerac pour épouser, le 27 avril 1974, Dominique Millet à Roquefort et auront trois filles, Emmanuelle, Marie et Laura, il deviendra brocanteur antiquaire suivant les traces de ses beaux- parents. Je précise la date exacte de leur union car la cérémonie s’est déroulée 3 jours après l’ouverture officielle du Royal Périgord et, malheureusement, nous ne pourrons pas y participer avec Josette. Victime d’un cancer foudroyant, Jean-Pierre nous quittera en Août 2012. Quant à la retardataire, Jocelyne, elle épousera Thierry Pilipenko en 1987, s’ensuivra 3 enfants, Mélanie, Céline et Williams.

    Dans la famille de Gilberte (Rubin) je ne connaitrais vraiment que Tony son frère et Flore son épouse qui habitait à St Germain et Mons, »métayers » du château de la famille Walter, hollandais d’origine, pas des inconnus pour moi, étant des piliers inconditionnels du salon de thé Le Belvès depuis sa création.

    L’un des fils Nicolas deviendra toubib du coin et bridgeur impénitent. Une anecdote me revient en mémoire, venant au salon de thé du temps de ses études, au moment de payer il demanda à ma mère « si elle faisait un prix pour les étudiants en médecine ? » Montée au filet de tante Yvonne » Non uniquement pour les apprentis mécaniciens ! ».

    Tony et Flore avaient quatre enfants : Titou, Serge, Bernard et Pascal. Serge, un très brave garçon était mécanicien au garage Peyrichou place des Deux Conils en centre-ville… le malheur pour lui, garçon très introverti et totalement transparent sera dans sa première expérience amoureuse de tomber sur une jeune femme connue pour ses mœurs légères et qui le fera tourner en bourrique, mais il était amoureux ! Bernard, dyslexique, s’en sortira bien en faisant carrière à La Poste comme facteur et en 2017 vit encore avec sa mère. Pour Titou, l’histoire est remplie de haut et de bas, le bas sera surtout pour sa fin. Mécanicien comme son frère, mon père recherchait pour son dépôt de Glaces et surgelés un homme pour l’entretien des nombreux véhicules de l’entreprise. Je pousserais un peu mon géniteur à l’embaucher, ce qui arriva. La plupart des camions étaient frigorifiques aussi la société L. Belvès, son employeur lui fera suivre une formation de frigoriste et il obtiendra brillamment son diplôme. Il occupera un long temps son emploi, puis se laissera aller, la bouteille faisant parti de ses démons… mon frère Jean-Pierre devenu PDG de la boîte s’en séparera… Il disparaîtra assez jeune !

    D’un autre frère de Gilberte il y a Josiane la cousine de Josette, assez complices, elles ont partagées les moments bons et mauvais dans leur enfance. Mariée à Pierrot Garrigue un ancien de la SNPE, elle officie encore chez Loryc, le chausseur de la rue de La Poste, et ce, depuis plus de 40 ans ! Il y avait un cousin Rubin qui malheureusement n’avait pas pris un bon chemin, lui aussi, mais ne manquait pas de venir me saluer.

    Dans la famille à René Vigier, je ne connaitrais qu’une personne, son frère Léo, aussi bourru et renfrogné que René. Il était métayer dans une grande ferme route d’Eymet et son épouse, celle que l’on appelait La Madelon, vendait les légumes tous les mercredis et les samedis au marché. Il était fâché avec son fils unique.

    Pendant ces années 1969 à 1976, les fêtes étaient nombreuses à La Cavaille, bien arrosées. L’été, pour que Christophe et Line puissent se baigner j’avais installé une petite piscine démontable. Une année je décidais donc d’organiser un méchoui avec ball-trap, invitant mes deux frangins, leurs épouses et les enfants, les Simounet qui m’avaient si bien logé à Lyon pendant mes stages chez Armand le premier pâtissier de Lyon et au Sofitel au restaurant panoramique des trois Dômes, quelques copains, et toute la fratrie Vigier. Cette journée du mois de Juillet fut très joyeuse et placée sous le signe d’une chaleur caniculaire. Les agapes durèrent tard dans la soirée, le rosé était très frais et les jeux d’eau commençaient à dériver. Attrapant le papi Vigier par les jambes et les bras, nous avons balancé le poids lourd dans l’onde rafraîchissante… mais surpris par la masse, ayant mal calculé l’élan,le papi a accroché le bord en tôle en la déformant… des dommages matériels donc, en principe rien de grave, mais la victime se plaignait une peu. Bilan le lendemain, côtes fêlées, et arrêt de travail !!

    Pendant des années, les repas de Noël et de Pâques étaient d’anthologies et gargantuesques. Bernadette, l’épouse de Gérard Vigier travaillait de nuit à la Fondation John Bost à La Force. Un dimanche soir d’hiver, vers 22 heures, nous l’avons raccompagné à son boulot, Gérard, Jean-Pierre et moi. Pénétrant dans l’enceinte du lieu, nous avisâmes 3 vélos qui trainaient… champions dans l’âme nous avons enfourché les fiers destriers pour une course dans les allées… Jean-Pierre prendra une sacrée gamelle en s’étalant de tout son long dans la boue… en costume et cravate. Dans les années 80, en été, même cérémonial du soir, nous avons conduit Bernadette au boulot, dans la magnifique Peugeot 505 de mon père… .Après Lamonzie St Martin, dans la grande ligne droite, deux phares arrivant dans l’autre sens se dirigeaient droit sur nous… le choc a été de face, la 2ch rebondissant sur mon véhicule et atterrissant dans le fossé en contre bas ! N’ayant pas bougé sur l’impact, nous sortons, un peu inquiet malgré tout, je saute dans le fossé profond ou gisait notre tamponneur… j’étais en short et… au milieu des orties !! J’ouvre la portière, je sors le conducteur qui n’avait pas l’air blessé et ses premières paroles seront « Oh putain et toi tu m’avais rien fait !! » J’ai relâché le corps bien imbibé dans les piquants et remonté le talus. Les gendarmes en poste un peu plus loin pour des contrôles, prévenus par des passants, sont arrivés et fait le constat d’usage… il me semble que le gars était à presque deux grammes et finira au poste pour la nuit… à moi, ils ne m’ont rien demandé..heureusement. La Peugeot de papa Belvès n’avait pas bronché mais elle ne pouvait plus bouger, il fallut donc la faire remorquer par un garage tout proche. Le fin mot de l’histoire se déroulera le mardi, j’ai reçu un coup de fil au Royal de Mr Conti le maréchal ferrant de Lamonzie St Martin, pilier redouté des terrains de rugby qui avait écumé les stades sous l’ère du Président de l’USB des années 50… Lucien Belvès, me contant l’histoire de ce jeune qui sortait d’un après match de foot arrosé et dont la vie familiale n’est pas une sinécure. Il me demandait de ne pas porter plainte… Mon père absent, je lui proposais de venir nous voir le lendemain pour en discuter, mais tout le dossier était dressé par les gendarmes et je n’y pouvais pas grand- chose. Le mercredi, Conti est arrivé accompagné du garçon : après discussion où il a été plus question de souvenirs rugbystiques que d’autres choses nous ne pouvions rien pour arrêter le cours de la justice. Avant de partir mon père leur a proposé de prendre un verre… le jeune homme a commandé sans sourciller à 11 heures du matin… un Ricard !! Indécrottable le mec ! Les cousins italiens de Venise, sont venus rendre visite à la famille… notre plus grand plaisir était bien évidemment de les pousser à la consommation avec pour digestion une partie de pétanque ou un match de foot dans le pré, où Roberto ne distinguait plus le ballon. De retour d’une journée de chasse où j’avais invité René, un petit repas s’en suivit et mon esprit espiègle avisant un chapelet d’andouilles dans le frigo, me poussa à l’installer dans le lit du couple. Gilberte avait bien vu la manœuvre mais ne pipa mot, laissant la surprise à son époux qui fit un bond de deux mètres au coucher, pensant à un animal rampant qui avait pénétré sa couche. Une autre année, la journée de chasse à Bannes s’était prolongée par un dîner au Royal Périgord, fermé le dimanche soir, en compagnie de René, d’amis chasseurs et de leurs épouses. Décidant de ne pas se quitter ainsi, l’un de nous proposa de finir la soirée au Windsor, la boîte de nuit de la route de Bordeaux. On a dansé, on a bu et stupéfaction, René a disparu… sans doute fatigué, avait-il rejoint sa propriété voisine de cet empire de la nuit. Donc très peu d’inquiétude quant à son sort. Le lendemain, Gilberte m’a appelée pour me narrer la fin de l’histoire. Son mari en sortant de la boîte s’était garé juste en face devant la maison d’un propriétaire voisin avec qui il avait des relations houleuses concernant l’achat d’un terrain jouxtant les deux propriétés… et fait parler toute la puissance de son klaxon à plusieurs reprises et quand les lumières de l’habitation se sont allumées, il a pris la poudre d’escampette !! Vite démasqué, c’est la belle-mère qui est allé s’excuser le lendemain suite à un coup de fil furibard de la victime !! Pour sa défense, René argumentera avec conviction qu’il avait été victime de décibels trop puissants et de spots lumineux qui lui avaient tourné la tête !

    Après le mariage de Jocelyne, les parents de Thierry, se joignaient parfois à ces Noëls remplis de plaisir partagé. Mr Pilipenko était responsable de la piscine Municipale de Bergerac, fermée en ce jour de fête, et, pour une fois, cette année-là, tous les frères et sœurs Vigier participaient aux agapes la tribu était au complet. Pendant le repas, l’eau n’ayant pas mouillée la nappe ni troublée nos verres de vin, un besoin de purification me vint, lançant une idée géniale pourquoi ne pas aller se tremper à la piscine ! Dire que le maître-nageur fut enchanté de ma proposition il y a plus que la largeur d’une margelle, mais après plusieurs questionnements introspectifs papa Pilipenko jeta aux orties, un peu forcé quand même, ses convictions quant à sa qualité de gardien des ondes bergeracoises !!! Nous voilà donc envahissant une piscine monumentale, les gosses grimpaient sur les plongeoirs, les papas déliraient et dans son coin, le MNS, ne savait plus où se mettre… une belle journée de Noël !

    Gilberte s’occupait de toute la basse-cour, une année, son troupeau de pintades était inapprochable. Elle fit donc appel aux deux tartarins qu’elle avait sous la main, deux nemrods reconnus pour leur sérieux, Jean-Pierre son fils et moi-même… des spécialistes de la gâchette en un mot ! Massacre il y eut ! Les volatiles une fois plumées, vidées, etc..furent mises en bière, non en congélateur, pour nos futurs repas !! La première que nous avons goutée, l’odeur de faisandé était tellement forte, que je ne mangerais plus jamais de pintade !! Peut-être le fait de les avoir tuées au fusil… je ne sais pas, mais quand j’arrivais devant la porte de la cuisine rien qu’au fumet je comprenais que l’une de mes victimes était dans le four !! Mais ma gentille belle-mère préparait toujours un petit quelque chose pour son gendre préféré ! Certains dimanches, il nous est arrivé pour changer un peu d’air après ces repas pantagruéliques, de « monter » vers 17 heures au Moulin de Malfourat, où se tenait le bal à papa. Jean-Pierre , Gérard, René et moi nous nous installions simplement au comptoir et nous faisions voyeurs. Après leur danse, ces couples aux cheveux blancs ou gris, rejoignaient leur table, et voir la dame s’installer sur les genoux de son cavalier n’avait rien de puéril, il suffisait de regarder les mains du Mr qui procédaient à une introspection tactile et même gynécologique entre les froufrous de la gente dame !! et une multitude de comportements dépassant les limites de la bienséance, qui, commis par des jeunes auraient soulevés des réactions outrées et des cris effarouchés de ces mêmes aïeuls !

    Christophe adolescent, passait souvent ses samedis et dimanches à la Cavaille, et la disparition de ses boutons d’acné le poussait à quelques visites nocturnes pour la découverte du corps féminin dans l’antre du Windsor. Le déplacement pour s’y rendre, en compagnie de son cousin Lionel, se faisait à travers champ, n’ayant juste que la route nationale à traverser. Le tout avec la bénédiction de la grand-mère qui leur préparait à leur retour le petit déjeuner complet !! Il valait mieux à pied, car l’âge venu, possesseur du permis, il m’a fallu payer la réinstallation de la clôture d’un voisin qu’ils avaient complètement défoncée avec la bagnole!! Pour que les étés ne leurs soient pas trop longs, Josette et moi travaillions tous les jours, j’avais installé une nouvelle grande piscine démontable qui fera le bonheur des petits et des grands.

    L’adresse au Paillet avait ses aficionados, deux de nos amis, Jean-Pierre et Robert faisaient partie de la Police Nationale, aussi pour les rondes en soirée, ils prenaient leur boulot à cœur pour surveiller étroitement la sérénité du coin, le tout se terminant par un casse- croûte arrosé. La présence ensuite de la boîte le Windsor leur donnera un alibi en bêton pour leurs déplacements ! Entre parenthèses, au commissariat, Robert avait un poste stratégique, il collationnait les P.V avant les envois d’amendes !! Il me sera d’une aide précieuse quand je récupérerai dans un carton les contraventions que Christophe étudiant à Bordeaux, ne payait pas, la note fut quand même douloureuse pour moi !!

    Papy Vigier assumait son travail d’employé des télécom, il effectuait toute la journée des interventions chez les particuliers ou entreprises, jumelé à l’entretien de la ferme en rentrant. Pendant des années, il viendra à 6 heures 30 du matin au Royal chercher les poubelles remplies de déchets alimentaires du restaurant, retour des assiettes des clients ainsi que les huiles de friture pour nourrir les cochons. Ce qui me permettait de récupérer les couverts en argent que, dans le feu de l’action des services, les plongeuses laissaient tomber malencontreusement. Les vignes seront arrachées, le bétail vendu car Gilberte ne pouvait pas tout faire non plus. Les relations avec son fils Jean-Pierre seront houleuses et l’incompréhension sera durable. Jocelyne la petite dernière (13 ans d’écart) ne connaîtra pas le sort d’une jeunesse à la dure comme ses frères et sa sœur, souvent l’apanage d’un retardataire. Dans son métier, il était exemplaire, tous les clients chez qui il se déplaçait pour des dépannages ne tarissaient pas d’éloges à son encontre, lui offrant un petit billet ou une bouteille de vin… une autre époque ! Vis-à-vis de ses collègues, il n’hésitait pas à les remplacer dans les astreintes de week-end, restant à la maison, n’intervenant que pour des urgences. Ce qui lui permettait d’être payé double mais aussi de récupérer des jours… pour travailler ses terres. Pourtant, à deux ans de la retraite il va subir un affront professionnel qui le laissera pantois. Les PTT étaient devenues Pet T, puis en fin de carrière France Télécom. Le matin, au dépôt, une fois récupéré son planning il effectuait sa tâche avec le zèle et la célérité du bon fonctionnaire fier de son état, il ne traînait pas, rentrait au dépôt, garnissait ses comptes rendus de journée et filait à La Cavaille pour enfourcher le tracteur entamant sa deuxième journée. Il fut convoqué par le responsable de Bergerac qui, après lui avoir passé la pommade dans le bon sens de la moustache, lui fit comprendre que son zèle et la qualité de ses interventions étaient louables mais soulevaient des jalousies et des interrogations parmi ses collègues !! Ce Mr n’a pas fait sienne de « Ne méprisez pas la sensibilité d’une personne, la sensibilité de chacun, c’est son génie ». Il ne s’en remettra pas, la claque fut monumentale ! Tous ses anciens compagnons de travail étaient partis ou allaient partir, il se trouvait confronté à une nouvelle génération où le mot amour du métier et efficacité semblaient rayés du vocabulaire ! Son plus grand plaisir dans l’exercice de son boulot était de se sentir utile aux autres… un sacerdoce ! Tout s’écroulait autour de lui, homme honnête et simple, qui avait édifié patiemment une nouvelle vie sur les ruines de son passé douloureux de « domestique de ferme ». Il mit donc la pédale douce jusqu’à la retraite devenant la caricature que l’opinion aime se faire des fonctionnaires… sans regrets !

    Il a donc fait le grand saut dans l’inconnu de la vie de retraité, sans se préparer, directement, sans avoir anticipé le grand vide qui allait le couper définitivement du monde actif. Pourtant, il devenait maître de son temps, ayant stoppé son état de salarié mais pas de travailleur, puisqu’il lui restait toutes ses activités sur la propriété. Il aurait fallu qu’il s’implique, s’initie dans des projets, qu’il apprécie les gens et s’intéresse aux autres ! Au contraire, il a commencé à se plaindre de toutes les grandes choses et les petites aussi, il s’isolait, bougonnait, cherchait des responsables à son ennui, le gouvernement, le mauvais temps, le beau temps, ses enfants parfois… . Debout au lever du jour, couché à 19 heures le plus souvent, seule la partie de chasse le dimanche à St Laurent des Bâtons aurait pu lui amener un semblant de vie sociale. Il n’en était rien, il chassait le gros gibier, installé à son poste de guet au lever du jour, il y restait parfois jusqu’à 15heures, sans voir personne. Un rassemblement pour le partage et retour à la case départ. Gilberte supportera en silence, mais ne se laissait plus faire, elle filait en ville, faire les boutiques, elle essayait de s’éloigner de celui qui était devenu muet, de ce mari arc-bouté sur ses silences. Gilberte paiera au prix fort cet accompagnement qui l’isolait elle aussi. Les problèmes de santé attraperont René rapidement et le balloteront d’hôpital en hôpital, il était aussi atteint d’une maladie de la peau qui le rongeait, victime sans doute de ces produits qu’il passait dans les vignes ou les cultures sans aucune protection. Cette dernière affection lui faisait courir les charlatans, guérisseurs et compagnie qui lui ponctionnaient le compte en banque en lui prescrivant des poudres de perlimpinpin au prix du caviar… et en liquide ! Une amie, Fabienne Lehérissier, épouse de Arnault Lehérissier cardiologue à Bergerac, responsable d’un secteur à l’hôpital de St Foy la Grande, nous facilitera son admission et lors d’une de mes visites durant laquelle Josette s’était absentée un instant, il me demandera, d’aider Gilberte dans son futur accompagnement de la vie de tous les jours. J’avais peur que cela n’entraîne quelques tiraillements par rapport à ses enfants surtout la gestion comptable, cela c’est à peu près bien passé, à part avec Jean-Pierre, paix à son âme, qui lors de la succession chez le notaire, accusera Josette de tous les maux, elle me reviendra complètement effondrée. Je pense que je me suis bien acquitté de la tâche demandée par mon beau-père, en fournissant tous les ans aux enfants un bilan annuel complet et en gérant tous les problèmes d’intendance de la propriété. Ramené au Paillet pour une issue fatale à court terme, c’est

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