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Vers la lumière
Vers la lumière
Vers la lumière
Ebook497 pages6 hours

Vers la lumière

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About this ebook

Marie Jenner n’a jamais vraiment été chanceuse. Son emploi est nul. Son appartement – celui dont le bail ne peut pas être rompu – est hanté. Pire encore, sa mère ne cesse de lui rebattre les oreilles pour la convaincre de joindre « l’entreprise familiale ». Puisqu’il s’agit de faire passer les esprits des morts au prochain plan d’existence, un boulot qui, en passant, ne paie pas, Marine n’est particulièrement intéressée. Non, elle veut un emploi normal, une vie normale. Est-ce vraiment trop demander?

Apparemment, oui. Même lorsqu’elle postule l’emploi de ses rêves, Marie ne reçoit pas ce qu’elle souhaitait. Enfin, pas entièrement... Elle décroche le poste, mais elle récolte en même temps un fantôme. Farley Hewitt, le concierge récemment décédé du bâtiment, veut qu’elle prouve qu’il n’est pas mort par accident et Marie est à peu près certaine qu’il va la harceler jusqu’à ce qu’elle y parvienne.

Tout ce que Marie désire, c’est une vie normale. Toutefois, les astres ne s’alignent pas en sa faveur.

LanguageFrançais
Release dateJan 11, 2016
ISBN9781928025429
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    Vers la lumière - E.C. Bell

    Vers la lumière

    Publié par Tyche Books Ltd.

    www.TycheBooks.com

    Droit d’auteur © 2014 Eileen Bell

    Première édition par Tyche Books Ltd 2014

    Smashwords edition 2015

    ISBN : 978-1-928025-41-2

    ISBN livre électronique : 978-1-928025-42-9

    Illustration de la page couverture : Guillem Mari

    Montage de la couverture : Lucia Starkey

    Mise en page : Ryah Deines

    Édition : M. L. D. Curelas

    Traduction : Catherine Dussault

    Photographie de l’auteure : Shelby Deep Photography

    Tous droits réservés. Il est interdit de reproduire ou de transmettre le texte en entier ou en partie sous quelque forme que ce soit et par quelque moyen électronique ou mécanique que ce soit, notamment par photocopie, par enregistrement ou par tout autre système de stockage et de consultation d’information, sans obtenir l’autorisation préalable du titulaire des droits d’auteur, à l’exception de brèves citations dans le cadre d’une critique.

    L’éditeur n’a aucun contrôle sur le contenu de tout site Web tenu par l’auteur ou par des tiers; il n’assume aucune responsabilité à cet égard.

    Les histoires présentées sont fictives. Les personnages, organisations et événements décrits dans cette histoire ont été créés par l’auteur ou sont utilisés dans le cadre d’une fiction.

    Toute ressemblance avec une personne existante ou ayant existé est purement fortuite.

    Ce livre a été financé en partie par une subvention du Fonds des médias de l'Alberta .

    Dédicace

    Ce livre est dédié à mon mari Harold, qui a toujours cru en moi même quand moi, j’avais mes doutes.

    Table of Contents

    Title Page

    Farley : ma mort et ce qui s’ensuivit

    Première phase : comprendre pourquoi

    Marie : l’entrevue

    Marie : et maintenant, quoi?

    Farley : la mort, c’est bien lorsqu’on a quelqu’un à qui parler

    Marie : mon premier jour de travail dépasse mes attentes. Enfin, presque

    Farley : Marie apprend quelque chose

    Marie : recherches sur la mort de Farley

    Marie : pourquoi un fantôme serait-il malade?

    Farley : ce à quoi ressemblent les cauchemars lorsqu’on est mort

    Marie : la déprime post-fantôme et ce qui suit

    Marie : sauver James

    Marie : l’héroïne, de retour au boulot

    Farley : retour en enfer, encore

    Marie : encore une disparition

    Farley : le cauchemar continue

    Marie : James et son oncle

    Farley : le cauchemar ne s’arrêtera donc jamais?

    Marie : aider James

    Marie : Farley est allé en enfer et en est revenu. Encore une fois

    Farley : et si on évitait d’aller en enfer, cette fois?

    Marie : un dîner et des margaritas

    Deuxième phase : Prendre conscience

    Farley : que la disparition commence

    Marie : et un point pour les gentils!

    Farley : mon plan

    Marie : le plan de Farley

    Farley : mon rendez-vous avec Marie

    Marie : mon rendez-vous avec Farley

    Farley : retour en enfer, variations sur un même thème

    Marie : préparatifs pour le rendez-vous, sans galanterie

    Marie : le rendez-vous pas si galant

    Farley : Las Vegas du Nord

    Marie : camper au boulot

    Marie : au boulot

    Farley : de retour avec les vivants

    Marie : Farley est revenu

    Farley : mourir pour une mauvaise cause

    Marie : en délibéré

    Farley : pris dans une explosion lorsque vous êtes mort

    Marie : presque prise dans une explosion lorsque vous êtes vivante

    Marie : les après-coups de l’explosion

    Farley : Marie-la-chanceuse rencontre le Rat

    Marie : ma rencontre avec le Rat

    Marie : le retour de la policière et je suis coincée dans mes histoires d’amour

    Farley : ainsi, Marie a un ex. Qui l’aurait cru?

    Marie : casa del James

    Marie : il est temps de partir

    Marie : une mise au point avec James — en quelque sorte

    Marie : bon et méchant, deux en un

    Farley : le trajet jusqu’au bureau

    Marie : le trajet jusqu’au bureau

    Marie : le trajet jusqu’au bureau, partie 2

    Farley : une visite à la charmante sergente

    Marie : on dirait que les affaires vont bien

    Farley : indésirable et délaissé

    Marie : les choses vont de passables à — surprise! — encore pire

    Marie : suivre l’argent

    Farley : à la poursuite de la montagne

    Marie : déjeuner et événements qui s’ensuivirent

    Marie : regarder la mort en face

    Farley : rencontre avec un des miens

    Marie : de retour de l’hôpital, encore une fois

    Troisième phase : ce qu’il doit voir

    Farley : ce n’était pas comme ça, avant

    Marie : l’appel

    Farley : rêver de grand-papa Harry

    Marie : la confession de Farley

    Marie : la vie après Farley

    Remerciements

    Biographie

    Traducteur

    Farley : ma mort et ce qui s’ensuivit

    Cette histoire de « marcher vers la lumière », c’est de la merde. La seule lumière que j’ai vue, c’est l’arc électrique autour de moi alors que mon corps frémissait sur le sol comme si j’imitais une tranche de lard dans une poêle.

    Puis, tout est devenu noir.

    Pas de lumière. Noir.

    Je me suis réveillé, pensant que je m’en étais tiré, jusqu’à ce que j’aperçoive mon corps près du panneau électrique, continuant sa danse macabre alors que les derniers éclairs le traversaient.

    Des volutes de fumée s’élevaient de mes cheveux; c’est là que j’ai perdu les pédales. Pleurant, essayant de réintégrer mon corps, j’ai fait tout ce que je pouvais alors que je regardais mon corps, déconnecté, suintant sur le plancher comme un poulet à demi cuit. Un poulet mal cuit imitant le lard dans la poêle.

    Je suis tordant.

    Lorsque j’ai repris le contrôle de mes émotions, je me suis approché pour essayer de comprendre ce qui s’était passé. Ma main libre était dans ma poche, toutefois, alors ce n’est pas par là que l’électricité m’avait frappé. Pendant un instant, je n’ai rien remarqué d’anormal. Outre le fait que j’étais mort, bien sûr, mais je pensais vraiment que je n’avais pas fait d’erreur. Puis, j’ai aperçu ma chaussette.

    Bon, je dois en théorie porter des bottes de travail, mais, durant l’été, il fait aussi chaud que dans l’antichambre de l’enfer dans ce sous-sol, alors je portais des sandales et des chaussettes. Et il y avait de l’eau. Pourquoi je n’avais pas remarqué l’eau? On aurait dit que j’avais les deux pieds dans une rivière, bordel.

    Ma chaussette avait tiré l’eau jusqu’à mon pied. De toute évidence, lorsque j’ai touché le fil chargé, l’électricité a cherché le chemin le plus court vers le sol. Ça a traversé mon corps et la sortie était mes pieds mouillés. Le résultat était des feux d’artifice et moi éjecté de mon corps, comme un sac de pommes de terre tombant d’un camion.

    Fils de pute. Si j’en avais été capable, j’aurais déplacé mon cadavre, afin que personne ne puisse remarquer l’erreur que j’avais commise. Impossible. Tout ce que je pouvais faire, c’était me tenir là, à regarder l’eau imbiber mes vêtements et éteindre mes cheveux, provoquant un sifflement et un doux soupir. Ou peut-être que c’était moi qui ai poussé un soupir. Qui sait.

    Les policiers sont venus, je me suis débattu pour attirer leur attention, mais entre-temps, j’avais commencé à saisir la situation. Je ne pouvais pas retourner dans ce vieux sac de peau. Sous cette mascarade de pleurs, de gémissements et de grincements de dents, j’étais soulagé. Cette vie était finalement terminée, je pouvais me tourner vers la suite.

    Voilà le problème, toutefois. Lorsque les ambulanciers sont partis avec mon cadavre, j’ai été incapable de les suivre. J’ai percuté la porte ouverte comme si c’était un épais mur de verre et rebondi à environ 30 centimètres de la porte. Tout ce que je pouvais faire, c’était regarder alors qu’ils chargeaient mon corps dans l’ambulance et s’en allaient.

    Pas de sirènes. Ils ne font pas hurler les sirènes pour les morts.

    Première phase : comprendre pourquoi

    Marie : l’entrevue

    Voilà comment ça devait se passer. Je devais revêtir ma deuxième meilleure robe, ma seule paire de bas-culottes qui n’étaient pas percés, me rendre à l’édifice du Palais, un vestige des années 20 — cinq étages de briques rouges dissimulés sur une rue transversale au centre-ville d’Edmonton — pour une entrevue d’emploi. Je devais ébahir mon nouveau patron potentiel, monsieur Don Latterson, et décrocher ce poste de secrétaire-réceptionniste. Alors, ma vie se serait améliorée. Enfin, en théorie.

    Ça ne s’est pas déroulé comme ça. Bien sûr que non.

    Il n’y avait qu’une autre candidate attendant son entretien dans la salle de réception de l’entreprise d’import-export de Don Latterson appelée, sans grande créativité, Latterson Import-Export.

    — Souhaite-moi bonne chance, dit-elle lorsque monsieur Latterson lui fit signe du doigt, lui demandant de le joindre dans son bureau.

    — Bonne chance, lui lançai-je.

    Je n’étais pas sincère. Je voulais ce poste, après tout.

    Lorsqu’elle sortit en trombes en sanglotant, trois minutes après le début de son entrevue, je me sentis coupable, comme si je lui avais d’une façon ou d’une autre jeté un mauvais sort. Je me sentais également soulagée. Peut-être est-ce que j’avais vraiment une chance d’obtenir cet emploi?

    Rien de moins sûr, bien entendu, car ma propension à trop parler me met parfois dans l’eau chaude, mais les astres semblaient s’aligner.

    Don Latterson sortit de son bureau. Il était dans la quarantaine et commençait à souffrir d’embonpoint. Ses cheveux, ou plutôt ce qui en restait si on omettait l’affreuse mèche rabattue sur son crâne chauve, étaient bruns striés de gris, ses yeux bleus étaient vitreux, comme s’il avait bu son repas plutôt que de le manger.

    — Marie Jenner? demanda-t-il.

    J’acquiesçai.

    D’un doigt, il me fit signe de le suivre et je lui emboîtai le pas jusque dans son bureau, fermant la porte derrière moi. Puis, j’attendis qu’il m’invite à m’asseoir pour commencer l’entrevue.

    Il n’en fit rien. Il s’affala et me dévisagea jusqu’à ce que je me sente franchement mal à l’aise, puis pointa une machine à écrire électrique posée sur une petite table, près de son bureau.

    — Tu sais ce que c’est? s’enquit-il.

    Je me demandais si c’était une question piège.

    — Une machine à écrire électrique? suggérai-je après un moment.

    — Ce n’est pas qu’une machine à écrire électrique, réfuta-t-il en caressant le couvercle de plastique avec affection. C’est une Selectric II, le meilleur modèle jamais fait. Tu sais comment l’utiliser?

    J’étais certaine d’avoir vu un ordinateur sur le bureau de la réception. S’attendait-il vraiment à ce que j’écrive sur ce machin?

    Peu importe. Il était peut-être mon futur patron.

    — Oui, je sais comment l’utiliser, répondis-je. Bien sûr.

    C’est alors que je sentis une brise froide m’envelopper. Je me retournai, pensant avoir mal fermé la porte. C’est là que j’ai vu le fantôme.

    Il se tenait une moitié à l’intérieur et l’autre moitié à l’extérieur de la porte fermée, son regard rivé sur moi. Idiote que je suis, je le dévisageai également.

    Pourtant, je savais bien qu’il valait mieux éviter de croiser son regard. Mort, c’est mort et il vaut mieux les laisser tranquilles, mais il m’avait déstabilisée.

    — Tu peux me voir? s’étonna le fantôme, apparemment aussi surpris que moi.

    — Oh non, murmurai-je.

    Il n’était pas seulement mort. Il savait qu’il était mort. Bon sang, pourquoi l’avais-je regardé?

    — Oh merde, tu peux me voir! s’écria le fantôme.

    Je secouai la tête, un geste bien futile, parce que cela prouvait sans l’ombre d’un doute que je pouvais, effectivement, le voir. C’est alors que monsieur Latterson reprit la parole. Il ne semblait pas content.

    — Qu’as-tu dit? aboya-t-il. Tourne-toi et réponds-moi immédiatement.

    Oh, Bon Dieu. Je devais me ressaisir et je ne pouvais pas le faire devant mon patron potentiel.

    — Pouvez-vous m’excuser juste une minute? demandai-je.

    Sans attendre sa réponse, je quittai son bureau, fermant la porte devant son visage fort surpris.

    J’avais entendu le fantôme me suivre et, dans la salle de réception, il se mit à danser. Je fermai les yeux une seconde, tentant vainement de me calmer. Il n’aurait pas pu choisir un pire moment pour faire son apparition et il était juste là, dansant comme un idiot. Je devais reprendre les rênes de la situation et j’avais à peu près deux secondes pour le faire.

    — Vous devez partir, lançai-je.

    Il me dévisagea, interrompu en pleine cabriole.

    — Quoi?

    — Vous devez partir! criai-je.

    Je me tournai vers la porte fermée de monsieur Latterson, me demandant s’il m’avait entendue. Probablement. Il devait déjà s’affairer à déchirer mon CV.

    Ma gorge se serra alors que les larmes montaient rapidement. Ça aurait été un bon emploi. Un très bon emploi.

    — Tu n’obtiendras pas le poste si tu pleures, fit remarquer le fantôme.

    — Comme si je le voulais, maintenant, grommelai-je.

    Je me dirigeai vers la porte menant vers le couloir, avec l’intention de partir, lorsque je pensai à mon emploi merdique au sein de la compagnie de taxi Yellowhead. Il fallait que je sorte des griffes de Gérald le Tyran et des paies qui ne couvraient jamais vraiment toutes les factures. Enfin, pas toutes durant le même mois.

    Je pensai à ma mère. Elle était souffrante et elle comptait sur moi.

    J’avais besoin de cet emploi. Même avec un fantôme.

    — Combien de temps? demandai-je.

    Le mort semblait confus.

    — Qu’est-ce que tu veux dire?

    — Depuis combien de temps êtes-vous mort?

    S’il n’était mort que depuis quelques jours, il y avait encore de bonnes chances qu’il tourne la page par lui-même. Je n’aurais rien à faire.

    — Oh.

    Il prit une profonde inspiration, même si c’était futile, maintenant, et je constatai qu’il s’était efforcé de rentrer son ventre. J’essayai de ne pas rouler des yeux. Les hommes.

    — Six... Non, sept jours. Je crois.

    Mon cœur s’emballa. Sept jours. C’était déjà presque trop long. Il était peut-être coincé ici.

    — Comment se fait-il que tu puisses me voir? demanda-t-il. Personne d’autre n’en est capable.

    — Depuis que je suis petite, je peux voir les gens comme vous, expliquai-je.

    Je secouai la tête. Pas de temps à perdre en bavardage inutile.

    — Écoutez...

    — Farley, répondit-il en me souriant, l’air presque piteusement heureux. Mon nom est Farley Hewitt. Et toi?

    — Marie, dis-je rapidement, sachant que ça aussi, c’était aussi une erreur.

    J’avais l’impression d’être dans une voiture sur le point de faire un accident et j’étais incapable d’empêcher la collision.

    — Farley, je ne peux pas terminer cette entrevue si vous êtes dans la pièce. Vous me distrayez, vous comprenez?

    Il acquiesça vigoureusement. C’était de plus en plus pitoyable. Presque aussi lamentable que moi prétendant que j’avais encore une chance de décrocher ce poste.

    — Partez. Je vous en prie. Si j’ai l’emploi, je reviendrai demain.

    Je n’allais pas obtenir l’emploi. Je le savais déjà et je sentais le soupir de soulagement monter du fond de mon âme.

    — Nous pourrons parler à ce moment-là.

    — Parfait. Bon plan. Génial.

    Alors qu’il se dirigeait vers la porte menant au couloir, je me rendis compte que je n’avais aucune idée de ce que j’allais raconter à l’homme, vivant celui-là, de l’autre côté de la porte. J’ai dû faire un bruit, probablement un sanglot, j’étais vraiment désespérée, et le fantôme se retourna vers moi.

    — Qu’est-ce qui ne va pas?

    — Je ne peux pas penser à une seule chose à dire à monsieur Latterson qui expliquerait pourquoi je suis sortie en trombe de son bureau au beau milieu de mon entrevue.

    Ma gorge se serra à nouveau, dangereusement.

    — Je ne réussirai jamais à obtenir cet emploi.

    Farley pointa le bureau derrière nous.

    — Dis-lui que tu crois avoir entendu le téléphone sonner ici. Il vient tout juste d’acheter ce système, il a tenté de l’installer lui-même. Ça ne sonne pas dans son bureau. Il a raté son coup.

    Je reconnus le système téléphonique trônant sur le bureau. C’était le petit frère du système que j’utilisais à compagnie de taxi Yellowhead, l’emploi que je désespérais de quitter. Je savais où monsieur Latterson s’était trompé : tout le monde faisait la même erreur lorsqu’ils essayaient d’installer ces systèmes eux-mêmes. J’appuyai sur quelques boutons et mon cœur cessa de battre à tout rompre. Ça pourrait marcher.

    Je hochai la tête en direction du fantôme, le remerciant de son aide. Puis, je redressai les épaules, me forçai à sourire et ouvris la porte du bureau de monsieur Latterson.

    Arranger le système téléphonique sauva mon entrevue. Monsieur Latterson était si impressionné que j’aie réussi à faire sonner le téléphone dans son bureau qu’il m’embaucha sur le champ.

    — Bienvenue à bord, me félicita-t-il. Tu commences demain matin. Huit heures, pile.

    Puis il pointa la porte et dit « Dehors. »

    Je quittai le bureau.

    J’avais l’emploi de mes rêves. J’avais aussi un fantôme. Et c’était ce fantôme qui m’avait obtenu l’emploi. Qu’est-ce que j’allais bien pouvoir faire?

    Je ne voulais pas d’un autre fantôme dans ma vie. Ils apportent toujours des problèmes. Vous n’avez qu’à demander à ma mère.

    Elle voit les fantômes aussi. En fait, elle fait bien plus que les voir. Elle les aide à franchir les trois phases d’acceptation afin qu’ils puissent passer au prochain état d’existence. Elle semble croire que je pourrais faire la même chose, si j’essayais.

    Je n’ai aucune envie de faire ça. Je sais ce que cela a fait à ma mère. J’ai été témoin de ce que cela a fait à sa vie, et à la mienne. Je ne voulais pas avoir une vie comme la sienne.

    Je voulais être normale.

    Je restai debout, à l’extérieur du bureau de Latterson Import-Export, essayant de décider si je devais ou non retourner dans ce bureau et refuser l’emploi, lorsque Farley coula à travers la porte, souriant comme le chat du Cheshire.

    — Tu l’as eu? demanda-t-il.

    — Vous m’espionniez, n’est-ce pas?

    — Hé bien, oui, confirma-t-il, gêné. Je voulais juste être à portée de main, pour être sûr que tu n’avais pas besoin de mon aide. Le truc du téléphone... Ça a fonctionné, non?

    — Oui, soupirai-je. Ça a fonctionné.

    — Alors, tu m’en dois une, maintenant, se réjouit-il. Aide-moi à sortir d’ici pour que je puisse prouver que ma mort n’était pas un accident, poursuivit-il. Je veux prouver que ces idiots de policiers avaient tort.

    Il me fallut une grande maîtrise de moi pour ne pas me sauver en courant et en hurlant hors de l’édifice. La mort de Farley était un accident. Un accident!

    Même maman détestait travailler avec les morts qui étaient décédés accidentellement. Ils semblent s’accrocher à cet état plus fort que tous les autres esprits. Ils ne veulent pas croire qu’ils ont pu faire quelque chose de si stupide et avoir causé leur propre mort.

    — Alors? me demanda Farley. Tu vas m’aider, ou pas?

    Je restai là à le dévisager, la bouche grande ouverte, alors que j’essayais de penser à quelque chose, n’importe quoi, pour me sortir de cette situation. Je ne pouvais pas aider un fantôme mort par accident. Merde, je ne pouvais pas aider de fantômes du tout! Ma mère le pouvait. Pas moi.

    Pars, criait une petite voix dans ma tête. Pars avant d’être engluée dans ce désastre. Sors d’ici et ne reviens jamais.

    Je pris une grande inspiration, m’apprêtant à expliquer à Farley que je ne pouvais pas l’aider, lorsque l’homme le plus séduisant que j’aie vu de ma vie marcha directement à travers Farley et s’avança vers moi.

    Farley hurla en explosant en une buée de matière visqueuse ectoplasmique. J’étais déjà à bout de nerfs après cette entrevue, je ne pus retenir un cri.

    — Tout va bien? s’enquit-il, son beau visage soudain inquiet. J’ai cru que vous m’aviez aperçu...

    — Fils de pute! s’égosilla Farley. Il se rematérialisa et balança plusieurs coups de poing largement inutiles à la tête de mon charmant interlocuteur.

    — Comment oses-tu marcher à travers moi comme si je n’étais même pas là!

    — Je vais bien, répondis-je, essayant désespérément d’ignorer Farley, lequel semblait prêt à exploser. Vous m’avez surprise, c’est tout.

    — Alors, que faites-vous ici? me demanda-t-il.

    Il sourit, mais ses yeux ne reflétèrent pas tout à fait son sourire.

    Il était charmant, du genre grand, mystérieux et séduisant que j’avais toujours trouvé si attirant. Il mesurait deux mètres, au moins, ses cheveux n’étaient pas seulement brun foncé, ils étaient pratiquement noirs. Même chose pour ses cils, des cils incroyablement longs et épais. Et ses yeux... Si bleus, je ne pouvais pas m’en détourner.

    Vous voyez? Grand, mystérieux et séduisant.

    J’essayai de sourire nonchalamment, souhaitant que Farley se taise un instant pour que je puisse réfléchir.

    — Je suis venue pour une entrevue. Monsieur Latterson m’a embauchée. Je dois commencer demain matin.

    Son sourire s’effaça.

    — Don Latterson? s’enquit-il. Que ferez-vous pour lui?

    — Qui êtes-vous, un policier? répondis-je d’un ton cassant.

    Il a beau être séduisant, je n’ai pas besoin qu’on me parle au troisième degré.

    — Non, répondit-il. Il eut même la décence d’avoir l’air embarrassé. Désolé.

    — Ça va, répliquai-je, gênée de ma réaction exagérée. Je suis la nouvelle réceptionniste de monsieur Latterson. Je lui tendis la main. Marie Jenner.

    Il sourit.

    — Je m’appelle James, répondit-il en me serrant la main. James Lavall.

    — James Lavall?

    Une poignée de main devrait toujours être quelque peu détachée. Trois secousses, pas plus. La nôtre se prolongea bien au-delà de cette norme. Et je me perdis à nouveau dans ses yeux bleus. Ils étaient simplement hypnotiques.

    Farley choisit cet instant pour se mettre à sangloter, les mains sur son visage.

    — Je ne suis pas ici, hoqueta-t-il. Quelqu’un m’a tué, je ne suis plus ici et ce salaud a volé mon emploi.

    Il me regarda, la douleur semblait gravée sur son visage.

    — Aide-moi à le prouver. Je t’en prie. Tu es mon seul espoir.

    Je retirai ma main de celle de James à regret.

    — Je dois partir, lui expliquai-je. Des trucs à faire, et tout ça...

    Je me retournai à demi pour être face à Farley.

    — Je vous verrai demain, dis-je.

    Il hocha la tête, toujours en sanglotant, et je fis un grand pas de côté de façon à ne pas marcher à travers lui. Bien sûr, cela me rapprocha beaucoup de James. Bien sûr, James sentait aussi bon qu’il était beau.

    Une fois que je fus éloignée d’eux, je courus jusqu’à la cage d’escalier. Alors que la porte de sortie se refermait derrière moi, je les entendis dire, tous les deux : « Je serai là. »

    Bon sang.

    Marie : et maintenant, quoi?

    Je dus me dépêcher pour arriver à temps pour mon boulot à la compagnie de taxi Yellowhead. J’arrivai avec deux minutes d’avance. Je m’installai au bureau que je partageais avec Jasmine, la répartitrice de jour et aussi une de mes meilleures amies.

    — Tu as eu l’emploi? murmura-t-elle, jetant un coup d’œil par-dessus son épaule pour éviter d’être surprise par notre patron, Gérald le tyran.

    — Oui, soupirai-je, plaçant le casque d’écoute sur ma tête.

    — Excellent, se réjouit-elle avec un sourire. Alors, tu démissionnes ce soir? Je devrais peut-être rester, juste pour voir...

    — Non, je ne démissionne pas.

    Je poussai encore une fois un soupir et me laissai tomber sur la chaise.

    — Et pourquoi pas?

    Même si ses trois enfants étaient déjà dans l’autobus en direction vers la maison, elle posa son sac à main sur le bureau et me dévisagea.

    — Qu’est-ce qui ne va pas?

    — Je ne sais pas si je peux faire le boulot, répondis-je. Je crois que je devrais garder celui-ci jusqu’à ce que je sois certaine...

    Rien à voir avec le boulot en fait. C’était plutôt lié à Farley, le fantôme. Toutefois, Jasmine ne savait rien de mon problème avec les fantômes. Elle était au courant d’Arnie Stillwell, mon imbécile d’ex-copain voyeur, et elle savait que ma mère était malade. Mais les histoires de fantômes? Non.

    Elle fronça les sourcils et je devinai que ma pitoyable excuse ne l’avait pas convaincue. Ça ne m’aurait pas convaincue non plus.

    — C’est dommage, lâcha-t-elle finalement.

    Ce qui voulait dire « Explique-moi exactement ce que tu veux dire par là. »

    Pendant une seconde, j’aurais voulu pouvoir le faire, mais je n’ouvris pas la bouche. Voir des fantômes me rendait trop bizarre et je n’avais pas tant d’amis que je pouvais me permettre d’effrayer ceux que j’aimais bien en leur disant la vérité.

    — Tu vas être en retard, dis-je finalement. Dis bonjour aux enfants pour moi.

    Elle jeta un coup d’œil à sa montre et poussa un cri de surprise. Elle ramassa son sac.

    — Nous en parlerons bientôt, lança-t-elle. Je veux des détails.

    Puis elle disparut.

    Je soupirai à nouveau, sachant bien que je dramatisais et pourtant, je n’avais pas la force de m’en empêcher. Je me calai dans ma chaise, et enfonçai le premier bouton allumé du téléphone.

    — Taxis Yellowhead, chantonnai-je les mots de cette voix doucereuse qu’adoptent tous les répartiteurs de la planète. Comment puis-je vous aider?

    La fille qui devait prendre ma relève était en retard, comme toujours, aussi je n’arrivai chez moi qu’un peu avant 4 h. Je m’assurai d’ouvrir la porte de mon appartement aussi doucement que possible. Parfois, la différence de pression de l’air suffisait à rendre Sally, la toxicomane qui était décédée dans l’appartement avant que je ne le loue et que je n’avais PAS aperçue lorsque j’avais visité l’endroit et signé ce stupide bail, complètement hystérique. Je n’avais aucune envie de participer à ses envolées. Tout ce que je voulais, c’était dormir.

    Je tirai mon téléphone de ma poche pour le recharger. Je devais le brancher tous les soirs, car il était sur le point de rendre l’âme. Je savais que je devais m’en trouver un nouveau... Mais je ne pouvais pas me le permettre. Encore un autre truc que je ne pouvais simplement pas me permettre.

    La lumière rouge se mit à clignoter lorsque je le branchai. Un message sur ma boîte vocale. Immédiatement, mon estomac se serra. Ça ne pouvait pas être Arnie. Il n’avait pas mon numéro de téléphone — enfin, j’étais presque sûre qu’il ne l’avait pas. Je priais régulièrement pour qu’il ne le trouve pas. Ça ne pouvait pas être lui.

    Peut-être une offre d’emploi? Je croisai les doigts. Peut-être que je pourrais juste laisser tomber le boulot de réceptionniste... et Farley du même coup. Lorsque je vérifiai le numéro, je compris que c’était un message de ma mère.

    — Oh, maman. Qu’est-ce que tu me veux?

    J’appuyai sur le bouton et j’entendis sa voix : « Marie? Tu es là, fille ? », suivie de cette toux sèche et cassante qui semblait si horrible, si finale, que j’écartai le combiné de mon oreille.

    Je ne voulais plus écouter. Non, vraiment, tout ce que je voulais, c’était interrompre le message. Je savais que je ne voulais pas entendre ce qu’elle avait à me dire.

    La toux se poursuivit pendant ce qui me semblait une éternité jusqu’à ce que, finalement, maman soit capable de parler. J’avais raison. Je ne voulais pas écouter son message.

    Elle avait besoin d’argent. Elle ne voulait pas le dire et elle savait que je ne voulais pas l’entendre, mais c’était l’essentiel de son message. Apparemment, Ramona, ma sœur aînée, ne pouvait pas l’aider autant qu’elle l’avait promis et si je pouvais donner un coup de pouce, juste un petit coup de pouce, ma mère serait éternellement reconnaissante.

    Le message se termina enfin et je pensai aux treize dollars dans mon compte de banque. Dans deux jours, je recevrais ma paie de la compagnie de taxi, mais il fallait que je paie le loyer et quelques-unes des autres factures. Si je voulais aider ma mère, il fallait que je garde ce nouvel emploi, au moins pendant un certain temps.

    Après ça, le sommeil fut impossible à trouver.

    Ce n’était pas les problèmes d’argent de ma mère qui me tenaient éveillée, toutefois. C’était l’entrevue. L’entrevue et ma rencontre avec Farley. Ses réactions. La façon dont il était passé de ces cabrioles incontrôlables aux pleurs d’un bébé, me suppliant de l’aider.

    Après une heure à tourner d’un côté et de l’autre, je me résolus à sortir du lit et allai fouiller dans la garde-robe de l’entrée. J’en tirai une énorme pile de journaux, les laissai tomber sur le lit, me préparant à les éplucher un à un. Habituellement, je cherchais des offres d’emplois, parcourais les rubriques nécrologiques et lisais les bandes dessinées. Cette fois, j’étais à la recherche d’un article traitant de la mort de Farley.

    Il avait dit qu’il était mort six ou sept jours plus tôt, alors je saisis les éditions de la semaine précédente, les feuilletant aussi rapidement et aussi attentivement que possible.

    — Il affirme qu’il a été assassiné, ce doit bien être quelque part là-dedans, ronchonnai-je, tirant un autre journal de la pile et tournant vivement les pages. Il doit bien y avoir quelque chose.

    Rien à son sujet sur la première page ou même sur la première page de la section sur les actualités dans la région. Je trouvai finalement un article, trois petits paragraphes, deux pages avant la fin du journal, bien en dessous du pli, intitulé « Un homme de la région s’électrocute par accident ». Une petite photo de Farley, du genre photo de passeport, illustrait l’article.

    — Oh merde, murmurai-je, déchirant l’article et le poussant dans mon sac à main.

    Pourquoi est-ce que je n’avais pas lu cet article avant d’aller à l’entrevue? Si je l’avais lu, je n’y serais pas allée. Jamais dans cent ans.

    Alors que je me réinstallais au lit, Sally s’aventura par le mur de la garde-robe et s’assit sur le sol du salon, pointant une télécommande invisible vers un téléviseur tout aussi immatériel. Je l’ignorai : de toute façon, elle n’était pas consciente de ma présence ici. Elle revivait les dernières heures de sa vie, comme tous les matins. J’avais deux heures avant qu’elle ne se mette à hurler.

    Les morts sont partout, me dis-je en tirant les couvertures jusque sous mon menton, et fermai les yeux. Parfois, j’ai l’impression que c’est impossible de me débarrasser d’eux. Impossible.

    Sally, assise près de l’endroit où elle était décédée, gémit doucement, comme le vent qui soufflerait dans les branches dénudées, une comptine pour m’endormir.

    Farley : la mort, c’est bien lorsqu’on a quelqu’un à qui parler

    Mais quel soulagement, bordel! La jolie petite Marie Jenner m’a vu, elle m’a parlé. Je ne suis plus seul, maintenant.

    Elle semble plutôt brillante. Elle a compris comment utiliser le système téléphonique pour décrocher le poste, au moins. Je parie qu’elle va pouvoir m’aider à comprendre la merde qui m’est arrivée. Parce que, bordel, je ne me rappelle pas comment je suis mort.

    Il faut que je me souvienne. En fait, c’est absolument vital que je m’en souvienne...

    Enfin, même si je suis content d’avoir quelqu’un à qui parler, j’ai vraiment besoin de son aide pour comprendre comment je suis mort. Pour autant que ce n’était pas un accident.

    Non, pas question.

    Et si elle n’y parvient pas, j’espère qu’elle puisse au moins m’aider à sortir de l’édifice. Je veux dire, je l’aime bien, la vieille dame, mais même un fantôme a besoin d’une journée loin du boulot.

    Non?

    Marie : mon premier jour de travail dépasse mes attentes. Enfin, presque

    J’appelai maman dès que je pus, le lendemain matin, et je réussis à me disputer avec elle au sujet de Ramona et de ses problèmes d’argent. Charmant, non? Non, pas vraiment. Pire encore, me quereller avec elle au sujet de l’argent signifiait qu’il était hors de question que je lui parle du fantôme en plus du reste, et mieux encore, je faillis rater le dernier bus pour me rendre au boulot.

    J’espérais que cela n’était pas un signe de ce que me réservait le reste de la journée, mais lorsque j’arrivai au Palais, Farley ne m’attendait pas à l’entrée principale. J’étais à la fois surprise et heureuse. J’aurais été prête à parier une fortune qu’il serait là.

    Il doit m’attendre dans le bureau de monsieur Latterson, pensai-je en m’élançant dans l’escalier. Et pourtant, non.

    Dès lors, ma journée sembla considérablement plus belle. Peut-être avait-il réussi à passer vers l’autre état durant la nuit?

    Je rangeai mon sac sous mon nouveau bureau, accrochai ma veste sur le dossier de ma chaise. Ils n’étaient pas seulement nouveaux pour moi, ces meubles semblaient n’avoir jamais été utilisés. Je caressai le dessus du bureau. On aurait dit du satin, par rapport au bureau de plastique collant que je devais partager avec Jasmine, à Taxis Yellowhead. Si le fantôme avait effectivement disparu, je pourrais m’habituer à cette vie.

    Je sursautai lorsque la porte du bureau de monsieur Latterson s’ouvrit, mon patron s’avançant dans la salle de réception. Il regarda sa montre avec ostentation et fronça les sourcils, même si j’étais dix minutes à l’avance.

    — Bon matin, lançai-je en souriant. Je voulais vous remercier encore une fois de m’avoir embauchée.

    Il pointa du doigt la cafetière.

    — Café. Noir, trois sucres. Premier rendez-vous dans quinze minutes. Fais-moi signe lorsqu’il arrivera.

    Il me dévisagea, comme s’il attendait seulement que j’ouvre la bouche, lui donnant ainsi l’occasion de hurler. Je me gardai bien de dire quoi que ce soit jusqu’à ce qu’il retourne dans son bureau, fermant la porte avec fracas derrière lui.

    Wow. Désagréable. Presque aussi affreux que Gérald le Tyran. J’espérais que le café améliorerait la situation.

    J’ouvris une ou deux armoires, à la recherche du café et des filtres. Il ne me fallut qu’un moment pour mettre la Bunn en fonction et, pendant que le café coulait, je dénichai des tasses. La machine était rapide : en moins de quelques minutes, j’avais en main deux tasses fumantes sur le comptoir.

    Je versai une bonne quantité de sucre dans l’une d’elles, la saisis avant de me diriger vers la porte du bureau de monsieur Latterson. Je frappai, entrant pendant qu’il beuglait quelque chose que je ne compris pas.

    Il était au téléphone.

    — Oui, dit-il. Oui, monsieur Carruthers, je suis fin prêt.

    Alors que je marchais vers lui avec son café, il me lança un regard noir et couvrit de sa main le récepteur. Je pouvais quand même entendre monsieur Carruthers, peu importe qui il était, caqueter dans l’oreille de mon patron. Je posai la tasse sur le bureau.

    — Avez-vous besoin d’autre chose? demandai-je.

    Il secoua la tête et, après avoir siroté le café, m’offrit un demi-sourire et me remercia en silence.

    — Je vous en prie, murmurai-je, en reculant lentement pour sortir de son bureau, fermant doucement la porte derrière moi.

    Voilà, c’était

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